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64 L es relevés d’architecture de la fin du XV e siècle constituent une source importante, largement exploitée dans la bibliographie du XIX e et du début du XX e siècle, pour la connaissance de l’Antique, sa récep- tion et son appropriation par les artistes de la Renaissance. Les dessins conservés ont toutefois été majoritairement étudiés, au niveau disciplinaire, comme une composante du dessin architectural et de son évolution, moins fréquemment comme l’expression d’une pratique particulière avec ses instruments et ses développements propres. Les relevés topographiques surtout, ont été considérés dans le cadre d’une histoire des sciences et de la représentation. L’histoire du relevé d’architecture et de ses méthodes a été traitée plus spécifiquement à partir du dernier quart du XX e siècle, probablement en réaction aux rapides développements scientifiques et techniques de la discipline, parfois avec une vision par trop évolutive. Les recherches récentes ont réaffirmé l’intérêt et la grande richesse de la thématique du relevé en architecture 1 . L’analyse des dessins de relevé de la Renaissance vise aujourd’hui à approfondir les questions techniques et pratiques de la disci- pline, sans négliger les intérêts, les questionnements, et la créativité des artistes qui les ont produits. C’est un aspect qu’on ne peut manquer de prendre en compte dans l’étude des dessins de Giuliano da Sangallo (v. 1445- 1516) qui allient une rigueur analytique à une interprétation toute personnelle. Introduction Le relevé de l’architecture antique s’affirme, au cours du XV e siècle, comme une discipline essentielle au renouvellement formel et technique qui caractérise la création architecturale de la Renaissance. En analysant les vestiges de l’Antiquité grâce à des méthodes qu’ils mettent au point sur le terrain, les artistes se forment comme architectes, et interrogent le passé pour nourrir leur compréhension de l’antique et leur propre créa- tion. Par cette démarche ils développent un langage graphique spécifique à l’architecture, utilisé tant pour représenter l’existant que pour projeter de nouveaux édifices. Le relevé pourrait ainsi être considéré comme « la voie maîtresse 2 » de la mise au point du dessin d’architecture. Il se place avant tout comme une pratique incontournable, entre recherche « archéologique » et création architecturale. Cette discipline du relevé, toujours en usage aujourd’hui, voit ses méthodes et ses codes en grande partie esquissés au XVI e siècle. En témoignent les premières publications de recueils d’antiquités et d’architecture comme ceux de Serlio (1540) ou de Palladio (1570), dont la diffusion contribuera au renouvellement des formes CHLOÉ DEMONET Théorie et pratique du relevé d’architecture au XV e siècle et au début du XVI e siècle

Théorie et pratique du relevé d’architecture au XVe siècle et au début du XVIe siècle, ArtItalies, 21, 2015

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Les relevés d’architecture de la fin du xve siècle constituent une source importante, largement exploitée dans la bibliographie du xixe et du début du xxe siècle, pour la connaissance de l’Antique, sa récep-tion et son appropriation par les artistes de la Renaissance. Les dessins conservés ont toutefois été

majoritairement étudiés, au niveau disciplinaire, comme une composante du dessin architectural et de son évolution, moins fréquemment comme l’expression d’une pratique particulière avec ses instruments et ses développements propres. Les relevés topographiques surtout, ont été considérés dans le cadre d’une histoire des sciences et de la représentation. L’histoire du relevé d’architecture et de ses méthodes a été traitée plus spécifiquement à partir du dernier quart du xxe siècle, probablement en réaction aux rapides développements scientifiques et techniques de la discipline, parfois avec une vision par trop évolutive. Les recherches récentes ont réaffirmé l’intérêt et la grande richesse de la thématique du relevé en architecture 1. L’analyse des dessins de relevé de la Renaissance vise aujourd’hui à approfondir les questions techniques et pratiques de la disci-pline, sans négliger les intérêts, les questionnements, et la créativité des artistes qui les ont produits. C’est un aspect qu’on ne peut manquer de prendre en compte dans l’étude des dessins de Giuliano da Sangallo (v. 1445-1516) qui allient une rigueur analytique à une interprétation toute personnelle.

IntroductionLe relevé de l’architecture antique s’affirme, au cours du xve siècle, comme une discipline essentielle au renouvellement formel et technique qui caractérise la création architecturale de la Renaissance. En analysant les vestiges de l’Antiquité grâce à des méthodes qu’ils mettent au point sur le terrain, les artistes se forment comme architectes, et interrogent le passé pour nourrir leur compréhension de l’antique et leur propre créa-tion. Par cette démarche ils développent un langage graphique spécifique à l’architecture, utilisé tant pour représenter l’existant que pour projeter de nouveaux édifices. Le relevé pourrait ainsi être considéré comme « la voie maîtresse 2 » de la mise au point du dessin d’architecture. Il se place avant tout comme une pratique incontournable, entre recherche « archéologique » et création architecturale.Cette discipline du relevé, toujours en usage aujourd’hui, voit ses méthodes et ses codes en grande partie esquissés au xvie siècle. En témoignent les premières publications de recueils d’antiquités et d’architecture comme ceux de Serlio (1540) ou de Palladio (1570), dont la diffusion contribuera au renouvellement des formes

Chloé Demonet

Théorie et pratique du relevé d’architecture au XV e siècle et au début du XVIe siècle

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et de la pratique architecturale en Europe. Ces ouvrages et les modes de représentation de l’archi tecture qu’ils privilégient sont le fruit de plus d’un siècle de recherches de terrain.On peut dès lors s’interroger sur la démarche qui a conduit les artistes-architectes à développer une méthode d’investigation et de représentation de l’architecture. Cette problématique doit prendre en compte le processus d’élaboration de cette méthode ainsi que les objets sur lesquels elle a été éprouvée et développée.Différentes motivations ont conduit les architectes à se confronter directement à l’architecture de l’Antiquité et à développer la pratique du relevé, mais au-delà des objectifs de chacun, le but commun de toutes ces recherches paraît être la quête d’une vérité architecturale et de son appropriation. Qu’il s’agisse d’aider à l’interprétation des textes antiques, en premier lieu Vitruve, de rechercher de nouvelles solu-tions formelles et techniques, ou d’acquérir la connaissance nécessaire à la formation comme architectes, les pionniers du relevé et leurs successeurs ont mis au point des tech-niques de mesure et de représentation de l’architecture pour la comprendre et la maîtriser. Si « savoir mesurer les choses c’est savoir les comprendre 3 », savoir les représenter graphi-quement c’est savoir organiser cette connaissance, la divulguer et la démontrer.La représentation architecturale d’édifices existants requiert deux étapes : le relevé effectué in situ, nécessitant un croquis préalable ou dessiné à l’avancement de la prise de mesures, puis la restitution graphique qui exploite les données rassemblées au cours de la campagne de terrain et les organise en deux dimensions à une échelle choisie. Ce processus est largement évoqué dans les traités et écrits des architectes du Quattrocento. Pour le cerner dans le détail et bénéficier d’une lecture appropriée des dessins qui en résultent, il semble néces-saire de rapprocher ces grands textes fondateurs et les dessins des artistes-architectes de la période, donc à confronter une « théorie » du relevé à la réalité de sa pratique, dans ses aspects tant techniques qu’artistiques.

Le corpusLes recueils d’antiques élaborés par les artistes de la Renaissance constituent les prémices du livre d’archi-tecture. Démembrés, dispersés, nombre de ces albums ne nous sont généralement pas parvenus dans un état qui permette de retracer le fil des recherches et des préoccupations de leur auteur, ou de leurs auteurs.Deux albums complets sont toutefois attribués à un architecte grand releveur d’antiques : Giuliano da Sangallo. Florentin, formé initialement comme menuisier, Giuliano puise en partie sa connaissance architecturale dans les exemples subsistants de l’Antiquité. Il est appelé à projeter et à construire par les grands commanditaires de son époque. De sa Toscane natale, ses activités le portèrent à Rome, mais aussi en France et dans le sud de l’Italie, voyages qu’il mit à profit pour dessiner et relever sans cesse. Le résultat de ces investigations de terrain est consigné dans deux recueils 4.Le « Codex Barberini », ainsi dénommé pour son appartenance à la collection Barberini entrée à la Biblioteca Apostolica Vaticana en 1903 (Cod. Vat. Lat. 4424), est un grand volume de soixante-quinze feuillets de parchemin, réunis en cinq livrets. Le premier livret est constitué d’un carnet de dimensions plus réduites (24 × 39 cm), augmenté de deux bandes de parchemin pour rejoindre le format actuel (39 × 45,5 cm). Partiellement exploité avant l’agrandissement, ce libro piccolo offre les indices d’une véritable évolution dans les recherches et les modes de représentation de l’architecte (fig. 1) 5.

Fig. 1 – Giuliano da sangallo, Bases, chapiteau, candélabre, vase et ornements, rome, Biblioteca apostolica Vaticana.

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Ce petit livre peut être rapproché du deuxième codex conservé, le « carnet de Sienne », ainsi dénommé par opposition aux dimensions imposantes du codex de la Vaticane. Conservé à la Biblioteca comunale de Sienne (S. IV. 8), cet album, également en parchemin, est constitué de cinquante-deux feuillets (12 × 18 cm), assemblés en quatre cahiers, visiblement indépendants à l’origine.Selon la typologie des livres de dessins d’après l’antique, établie par Arnold Nesselrath 6, les deux ouvrages peuvent être considérés comme des livres d’archi-tecture de type autobiographique, car ils témoignent des recherches personnelles de l’artiste (intégrant des études d’après l’an-tique mais aussi d’architectures contempo-raines, et des projets personnels). Toutefois, le codex de la Vaticane est un véritable album destiné, semble-t-il, à être conservé

à l’atelier, alors que le carnet de Sienne, par son format et sa composition, apparaît plutôt comme un cahier de travail, utilisé au quotidien (fig. 2) 7.

Ce riche corpus, contenant un ensemble de dessins de relevé, d’après l’antique ou d’édifices contemporains, selon des modes de représentation architecturale variés, constitue une base essentielle pour une recherche visant à mettre en parallèle une théorie du relevé et ses applications par un architecte emblématique d’une période charnière. À la fin du xve siècle en effet, les leçons des premiers releveurs d’antique sont acquises, la recherche des humanistes a rejoint celle des artistes dans un but de connaissance élargie de la construction antique, nécessaire à l’assimilation des expériences des Anciens, une connaissance historique, technique, formelle.

Description et représentationL’utilité du relevé est exprimée dans les grands écrits d’architecture du xve siècle. Par Leon Battista Alberti en premier lieu, qui l’érige en pratique incontournable à la formation de l’architecte 8 ; par Filarète, qui met en évidence l’importance de la description graphique des antiquités pour assurer leur compréhension 9 ; mais aussi par Francesco di Giorgio Martini, qui insiste sur une nécessaire « conservation graphique » des monuments antiques – et des savoirs techniques qu’ils recèlent 10. Les méthodes du relevé semblent dès lors acquises. Pourtant les divergences paraissent nombreuses entre les tentatives de théorisation du relevé et de sa représentation, et l’expression graphique privilégiée par les artistes. Les « codes » du dessin d’architecture fixés à l’écrit sont mis à mal par une désorganisation apparente des différentes vues, par des rapports d’échelle à première vue inexistants, et surtout par des évocations de profondeur et de tridimensionnalité là où devrait s’imposer une stricte frontalité. L’analyse des dessins nous permet toutefois d’y déceler les usages propres au dessin d’architecture, au-delà des interprétations et extrapolations réalisées par les artistes. On peut dès lors s’interroger sur ce décalage apparent entre pratique et théorie de la description architecturale.

La tradition descriptive de la Rome antique peut remonter aux itinerari et mirabilia du Moyen Âge, destinés aux pèlerins, qui s’attachent essentiellement à décrire les monuments de la chrétienté mais évoquent la Rome païenne dans des digressions symboliques et empreintes d’extrapolations légendaires. Si les édifices antiques

Fig. 2 – Mise en rapport des deux albums de Giuliano da sangallo : rome, Biblioteca apostolica Vaticana, et sienne, Biblioteca comunale degli intronati.

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ont généralement perdu, dans les textes, leurs noms ou leurs fonctions d’origine, ces ouvrages maintiennent vivace une description topographique de l’Urbs.Le De mirabilibus urbis Romae élaboré entre la deuxième moitié du xiie siècle et le début du xiiie par le Magister Gregorius, se distingue des « guides » antérieurs en ce qu’il décrit principalement des édifices antiques, cherchant à les identifier grâce à des références aux auteurs anciens 11. Sa description comprend des mesures exprimées en pieds, qui visent à distinguer les monuments, à en souligner la grandeur. Elle ne pénètre toutefois pas très avant leurs caractéristiques architecturales, se limitant à des considérations d’ordre général (formes, matériaux).Toutefois la description architecturale tend à évoluer, se faisant plus précise, tenant compte des matériaux, des dimensions, celles-ci étant souvent mises en exergue pour démontrer une capacité à mesurer. Les auteurs indiquent volontiers avoir pris eux-mêmes les mesures, justifiant ainsi leurs descriptions tout en valorisant un certain savoir technique. Le Pogge, dans son ouvrage sur les ruines de Rome (1431-1448), affirme avoir analysé soigneusement les murs d’enceinte, comptant le nombre de portes et mesurant la distance des pans de muraille entre chacune d’elles 12. S’il donne une liste exhaustive des portes et tente de retrouver leurs dénominations, il n’indique que trois distances de muraille et ne donne aucune information sur la méthode utilisée pour les mesurer.Mais les humanistes, en complétant leurs recherches sur les textes des Anciens par une investigation des vestiges de l’Antiquité, ouvrent la voie de la descriptio aux architectes en devenir.

Quand les artistes s’emparent de l’exercice de la description de l’architecture antique, graphique cette fois, la question de la mesure et de sa précision prend une importance particulière, autant que celle de la représentation. Il ne s’agit plus de fournir une description générale, mais bien de définir de manière exhaustive l’objet étudié.Il se fait jour une certaine rigueur, peut-être héritée d’Alberti et des préceptes exprimés dans son traité, le De re aedificatoria, achevé en 1452 et publié pour la première fois en 1485.Au fil de l’ouvrage, l’auteur affirme à diverses reprises avoir lui-même réalisé des relevés. Au livre IX, il souligne en outre l’importance du relevé dans la formation de tout architecte :

« […] dans sa propre discipline, l’architecte examinera avec le plus grand soin partout où ils se trouveront, les ouvrages qu’aura jugé digne d’approbation l’opinion unanime des hommes ; il les dessinera, en notera les mesures et cherchera à se les approprier au moyen de maquettes et de dessins à l’échelle ; il étudiera et réexaminera l’ordre, la place, le genre et les mesures de toutes leurs parties, dont ont fait usage les architectes qui ont réalisé les édifices les plus grands et les plus dignes […] 13. »

Alberti insiste sur l’importance de la mesure et de l’échelle de représentation. Le dessin à l’échelle des « différentes parties » permet en effet de retrouver les mesures réelles de l’édifice et son articulation en trois dimensions.Si Alberti n’évoque pas la méthode à appliquer pour prendre ces mesures, il explique toutefois, au livre II, quel doit être le type de dessin propres aux architectes, en l’opposant au dessin « du peintre » :

« Le dessin du peintre et celui de l’architecte diffèrent en ce que le peintre s’applique dans son tableau à peindre les reliefs par des ombres ainsi que par des lignes et des angles raccourcis, tandis que l’architecte, qui dédaigne les ombres, exprime les reliefs à partir du plan, en faisant voir l’extension et la figure de chaque façade et de ses côtés par des lignes invariables et des angles exacts, comme quelqu’un qui veut que son œuvre ne soit pas jugée sur des apparences visuelles, mais remarquée pour ses dimensions précises et proportionnées 14. »

Alberti souligne ici la nécessité de lire, sur un dessin en deux dimensions, l’ensemble de la composition d’une architecture existante (ou à projeter), grâce à la figuration des distances réelles à une échelle réduite. La méthode de construction du dessin d’architecture est strictement géométrale, et chaque élément dessiné doit être en rapport avec l’ensemble des vues de l’édifice.

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Mais les préceptes d’Alberti en matière de dessin architectural ne sont pas rigoureusement appliqués dans les dessins de relevé de la fin du xve siècle et du début du xvie siècle aujourd’hui conservés, qui présentent souvent un « caractère illusionniste » 15 et font usage d’effets perspectifs, propres au « dessin du peintre ».Une observation attentive démontre toutefois que nombre de dessins allient mode géométral et perspectif. Cette constatation permet de renouveler la lecture de certains relevés qui paraissaient bien éloignés de la représentation préconisée par Alberti. Il suffit parfois d’éclipser l’effet perspectif pour découvrir un dessin parfaitement géométral. Ainsi, lorsque Giuliano da Sangallo représente l’élévation principale de l’arc de Constantin dans le codex de la Vaticane, il ne fait qu’évoquer la profondeur de l’édifice par une perspective centrée dans les trois arcades, sur une base strictement géométrale (fig. 3) 16.Le mode de dessin préconisé par Alberti est donc bien respecté ici, malgré les effets de profondeur visant à souligner le volume architectural. Mais l’humaniste signale également la nécessité de construire les élévations depuis le plan, selon des « lignes invariables et des angles exacts 17 », chaque vue représentée sur le dessin étant en rapport orthogonal avec les autres. Or les recueils de relevé ne présentent pas systématiquement les différentes vues d’un édifice ensemble ou à la même échelle.Dans sa recherche systématique sur la série des arcs de triomphe, Giuliano da Sangallo ne représente géné-ralement pas le plan et l’élévation selon ces rapports communs. Pourtant, une simple mise à l’échelle des différentes vues permet de découvrir des rapports orthogonaux bien présents entre le plan et l’élévation. Le petit plan qui semblait être un croquis ajouté là où l’architecte trouvait un peu de place sur le feuillet se révèle être parfaitement en rapport avec la ou les élévations (fig. 4) 18. Le système de représentation en projections orthogonales est donc parfaitement maîtrisé par Giuliano da Sangallo, malgré des échelles différenciées. Un seul feuillet du Codex Barberini, dans la série des arcs, figure le plan à la même échelle que l’élévation (fig. 5) 19.

Les dessins de relevé en bella copia, mis au propre à la table à dessin et organisés en différentes vues sur les feuillets d’un bel album, favorisent les effets perspectifs propres à des dessins de présentation, et organisent l’information selon une disposition qui tend à s’éloigner des codes de la représentation archi-tecturale. Mais, au-delà des simulations de profondeur et des variations d’échelle, la base géométrale du dessin permet à l’architecte, à l’artiste, au connaisseur, de retrouver les mesures des différents éléments composant l’édifice ainsi que leurs relations entre eux. Par ailleurs, l’étude de l’arc de Constantin dans le carnet de Sienne, propose un dessin parfaitement géométral, qui peut avoir été à la base de la version proposée dans le grand album 20 (fig. 6) 21.

Fig. 3 – Giuliano da sangallo, Arc de Constantin, élévation et plan, rome, Biblioteca apostolica Vaticana. À droite : élévation sans les effets perspectifs (Chl. demonet).

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Fig. 4 – Giuliano da sangallo, Arc de Constantin, élévations et plan, rome, Biblioteca apostolica Vaticana (mise à l’échelle - Chl. demonet).

Fig. 5 – Giuliano da sangallo, Arc de Galien, élévation et plan, rome, Biblioteca apostolica Vaticana (repères orthogonaux – Chl. demonet).

Fig. 6 – Giuliano da sangallo, Arc de Constantin, élévations, sienne, Biblioteca comunale degli intronati.

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Cette alliance de deux modes permet de conserver la fonction didactique du relevé, tout en lui adjoignant la fonction représentative d’un dessin lisible par tous et permettant d’imaginer l’édifice dans sa tridimension-nalité, ainsi que le concédera Raphaël.

La question de la représentation de l’architecture est en effet au centre des préoccupations de Raphaël, occupé à un grand projet de relevé de la Rome antique commandé par Léon X. L’artiste adresse au pape, en 1519, une missive décrivant précisément le projet et les étapes de sa réalisation 22.Dans ce texte, fondamental dans l’évolution du relevé d’architecture, Raphaël décline le choix des édifices à relever, la méthode employée pour les mesurer ainsi que celle pour les restituer graphiquement. Il dédie quatre paragraphes entiers à la description de la construction du dessin géométral, et démontre ainsi sa maîtrise et sa capacité à représenter « en architecte », reprenant en outre l’opposition exprimée par Alberti entre le dessin « du peintre » et celui « de l’architecte » :

« Et comme, à mon avis, beaucoup se trompent en dessinant des édifices, qu’au lieu de représenter en archi-tectes ils représentent en peintres, j’expliquerai maintenant la manière dont je pense qu’il faut procéder pour comprendre correctement toutes les mesures et savoir retrouver sans erreur tous les membres de l’édifice 23. »

Pour représenter toutes les parties de l’édifice étudié, il convient d’en proposer trois types de vues : le plan, l’élévation, la coupe :

« Le dessin des édifices se divise donc en trois parties : la première est le plan, ou plutôt le dessin plan, la deuxième l’élévation extérieure avec ses ornements, la troisième l’élévation intérieure avec ses ornements 24. »

Ces vues doivent être mises en rapport par une échelle commune qui permet de retrouver l’ensemble des mesures réelles de l’édifice.Si l’on retrouve ici les préceptes d’Alberti, la nouveauté du texte de Raphaël réside dans la description, étape par étape, de la construction du dessin par projections orthogonales.Raphaël fait toutefois une concession au dessin « du peintre » dans une des trois versions de la Lettre (conservée à Munich 25). Pour bénéficier d’une image complète d’un édifice, on peut lui adjoindre une vue en perspective.

« Et bien que cette manière de dessiner en perspective appartienne en propre au peintre, elle convient néan-moins aussi à l’architecte. Car, de même que le peintre a besoin d’avoir des notions d’architecture pour pouvoir représenter correctement les ornements avec leur proportion, de même, il convient que l’architecte connaisse la perspective car sa pratique lui permettra de mieux imaginer l’édifice entier pourvu de ses ornements 26. »

On ne peut manquer de voir ici une véritable explicitation de ce que propose Giuliano da Sangallo, dans une étude du Colisée, qu’il représente en plan, coupe et élévation, ajoutant à cette représentation architecturale complète, une vue perspective (fig. 7) 27.Toutefois, dans la majeure partie des cas, notre architecte fusionne les modes de représentations sur un même dessin, ajoutant à une base géométrale, les effets de raccourcis suggérant la tridimensionnalité de l’édifice.Ces effets perspectifs visent probablement à faciliter la lecture des dessins à des érudits et commandi-taires potentiels. L’architecte démontre ainsi sa maîtrise de la représentation architecturale, preuve de sa capacité à mener des projets constructifs, parallèlement à sa connaissance de la perspective comme de la création ornementale. Giuliano da Sangallo se présente ainsi en spécialiste accompli du dessin et en architecte compétent.

Mesures : instruments et méthodeUne telle maîtrise de la représentation de l’architecture existante implique une véritable pratique du relevé de terrain par Giuliano da Sangallo. S’il a pu, comme nombre de ses contemporains, copier des relevés préexis-tants, une grande partie des édifices qu’il fait figurer dans ses deux albums est bien issue de ses propres relevés (pour preuve les relevés effectués pendant son voyage en France). La question se pose alors du procédé de mesure sur le terrain, de ses instruments et méthodes.

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Si le De re aedificatoria évoque le relevé sans préciser les techniques de mesure à employer, celles-ci sont à rechercher dans un petit opuscule destiné au marquis d’Este, dans lequel Alberti recense une série d’exer-cices de géométrie pratique. Sous forme de jeu intellectuel, les Ex ludis rerum mathematicarum, rédigés entre 1443 et 1448, recensent en effet une série de problèmes de mesure à distance 28. Il s’agit de déterminer des hauteurs, longueurs, profondeurs, sur la base des éléments fondamentaux de la géométrie euclidienne.Le premier problème de ces Divertissements mathématiques est particulièrement éclairant. Au chapitre « Mesurer à vue la hauteur d’une tour », le premier exercice décrit « Comment procéder si l’on veut en connaître la distance et si l’on peut en mesurer directement une partie 29 ». Le releveur emploie une mire pour viser la hauteur de la tour mais prend également un point de référence sur l’édifice, avec cette même mire utilisée comme règle à mesurer. On allie ainsi deux procédés : la mesure directe, d’un point atteignable, et la mesure indirecte d’un point inatteignable.Toutefois, dans la majorité des écrits d’architectes, seule la mesure indirecte est mise en valeur, car elle permet à l’auteur de démonter sa maîtrise de la géométrie euclidienne et donc d’une véritable méthode scientifique ; la mesure « directe » appartenant au monde des praticiens et du chantier.

Fig. 7 – Giuliano da sangallo, Plan, coupe, élévation et vue perspective du Colisée, sienne, Biblioteca comunale degli intronati.

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Francesco di Giorgio Martini, dans son Traité sur l’architecture, l’ingénierie et l’art militaire, dédie un chapitre entier à la « Géométrie et façon de mesurer distances, hauteurs et profondeurs 30 ».Son instrument de prédilection est le quadrant, dérivé de l’astrolabe, et pourvu d’une ligne de mire pour viser et d’un fil à plomb qui indique les degrés qui serviront à calculer les angles, puis les distances (fig. 8) 31. Pour déterminer la hauteur d’un point inatteignable il applique un principe de géométrie pratique nécessitant de connaître une distance réelle, à mesurer directement donc. Mais Francesco di Giorgio s’étend sur le théorème de façon très abstraite, sans jamais préciser la question de la détermination directe des distances.Le quadrant est mentionné dans la Lettre à Léon X, dans laquelle Raphaël évoque également l’instrument pour mesurer les hauteurs, mais sans préciser selon quelle méthode il l’emploie 32.Raphaël s’étend toutefois largement sur un instrument de mesure qu’il utilise et dont il sous-entend la nouveauté. L’artiste se sert d’un « instrument rond et plat, comme un astrolabe », gradué, et pourvu d’une boussole centrale 33, pour relever le plan d’un édifice.Non content d’expliquer l’usage de cet instrument, il donne ses instructions pour le réaliser soi-même. Cette démarche lui permet de mettre à la portée de tous sa méthode de relevé, mais aussi d’en justifier le procédé :

« […] il reste à indiquer comment nous nous y sommes pris pour les mesurer et les dessiner [les anciens édifices de Rome], afin que ceux qui veulent s’occuper d’architecture sachent mener ces deux opérations sans erreur, et soient convaincus que, dans la description de cette démarche, nous n’avons pas procédé au hasard et par la seule pratique, mais en suivant une véritable méthode 34. »

Si cette description semble à première vue claire et convaincante, il s’avère que l’usage de ce seul instrument ne peut permettre de réaliser le relevé complet du plan d’un édifice. On adapte ici au relevé d’architecture un instrument de nature topographique qui permet d’orienter l’édifice dans un système géographique de référence. Ce procédé peut être rapproché d’un dessin d’Antonio da Sangallo le Jeune, où l’architecte place le plan de l’édifice au centre d’une rose des vents et semble bien avoir utilisé la méthode décrite par Raphaël (fig. 9) 35.C’est en réalisant une restitution de l’instrument de Raphaël et en le testant in situ, qu’on a pu constater qu’il peut avoir une autre et réelle utilité pour un relevé précis du plan d’un édifice. En effet, en suivant sa méthode, on peut calculer l’orientation exacte de chaque ligne du plan-masse, et donc des parois, entre elles. Ce qui

Fig. 8 – Francesco di Giorgio Martini, “Quadrante” – Mesure de la hauteur d’une tour, Codice torinese saluzziano 148, turin, Biblioteca reale.

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permet de vérifier de façon relativement précise la régularité d’un plan (fig. 10).Toutefois, pour obtenir les distances réelles de chaque paroi, d’un point à un autre de l’édifice, Raphaël utilise des procédés de mesure directe qu’il tait dans sa démonstration.

Les mentions de mesure directe sont donc absentes des grands textes théorisant l’architecture et le relevé au xve siècle. Tout un pan de la pratique du relevé nous est ainsi inconnu. Toutefois, les archives et l’ico-nographie peuvent permettre de pallier cette lacune. En outre, l’analyse des dessins de relevé mêmes peut donner un éclairage sur cette pratique.Les quelques représentations de relevé de terrain dont nous disposons pour la période, présentent le compas comme instrument de mesure directe et de restitution graphique (fig. 11). Il est présent également dans les représentations de chantiers, aux côtés de l’équerre, également utile à la construction et au relevé, et du niveau de maçon.Les archives fournissent des indications quant à l’usage commun d’instruments sur les chantiers et les relevés. La Fabrique de Saint-Pierre de Rome conserve un compas à pointes courbes du xvie siècle, dit compas « de Michel-Ange », dont on trouve la description dans un inventaire de 1581 : « Compasj no 2 […] di ferro di p[almi] 4 lunoe.n. di legno un grande et un [mediano] da faleg[name] ____ no 20 36 ». L’instrument était utilisé par les misuratori chargés de vérifier les dimensions des éléments architectu-raux mis en œuvre sur le chantier.Le compas à pointes courbes permet en effet de calculer de façon rapide tout type d’épaisseurs, et notamment les diamètres de colonnes qu’il est toujours difficile d’établir avec précision, en parti-culier par un mesureur seul. En apposant les deux pointes de part et d’autre de l’objet à mesurer il suffit de reporter l’écartement de celles-ci pour en obtenir les dimensions. Le procédé se révèle particulièrement utile pour déterminer le rétrécissement d’une colonne par exemple.Giuliano da Sangallo semble justement utiliser cet instrument pour évaluer l’entasis d’une colonne de Santa Prassede à Rome, dessinée dans le Codex Barberini au feuillet 70. Notre architecte affirme avoir mesuré cet élément « a punto », très précisément donc ;

Fig. 9 – antonio da sangallo le Jeune, Orientation du Panthéon (détail), Florence, Gabinetto Disegni e Stampe degli Uffizi.

Fig. 10 – restitution de l’instrument de raphaël (Chl. demonet).

Fig. 11 – Hermannus Posthumus, Paysage avec ruines antiques (détail), Vaduz, château.

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il prend non moins de vingt-trois mesures sur cet élément. Il semble que l’on puisse ici déduire du dessin même, le type de méthode employé par l’architecte dans son relevé (fig. 12) 37.On peut affirmer également par l’analyse des dessins, l’usage fréquent voire systématique du fil à plomb pour déterminer les mesures exactes des entablements. Le fil sert de ligne de référence pour calculer les hauteurs et saillies de chaque mouluration. Employée sur les croquis de terrain, cette ligne de référence persiste sur les dessins de présentation, car elle permet de visualiser et de retrouver l’ensemble des mesures du détail étudié. Cette représentation, issue d’une pratique de terrain, deviendra une véritable norme de présentation des détails architecturaux (fig. 13) 38.Une autre source pouvant renseigner sur les instruments de relevé sont les gravures des allégories des Arts libéraux ou des Vertus, éditées à partir du xvie siècle.Dans la série des Sept vertus de Bruegel 39, la Tempérance présente une série d’instruments parmi lesquels on retrouve l’équerre, le compas, le quadrant, mais aussi le fil à plomb, tenu par un personnage juché sur une colonne.

Un véritable inventaire d’instruments est figuré dans l’allégorie de la géométrie par Franz Floris, éditée par H. Cock en 1551 (fig. 14) 40. Elle met particulièrement en valeur le bâton de Jacob, utilisé depuis le xive siècle en navigation et topographie, probablement employable pour le relevé architectural. Dans une autre repré-sentation de la géométrie par Floris (fig. 15) 41, la scène est figurée dans un paysage de ruines (c’est la seule allégorie de cette série des Arts libéraux à l’être). La géométrie est ainsi expressément désignée comme la science qui permet de connaître l’Antiquité.

La connaissance des moyens techniques à disposition des releveurs du xve siècle apparaît ainsi nécessaire à la lecture des dessins de relevé, pour retracer étape par étape le travail de relevé, depuis les observations de terrain jusqu’à sa restitution graphique.

PerspectivesIdentifier les étapes du relevé à partir de l’ensemble des sources disponibles nous offre une meilleure compré-hension de la démarche qui va d’une recherche archéologique de terrain à une véritable appropriation de l’architecture antique, pour mener à la création architecturale contemporaine. C’est ce que préconisait Alberti en conseillant aux architectes d’effectuer des relevés pour « s’approprier » la bonne architecture :

« Il n’y a pas lieu pour autant de nous évertuer à transposer leurs plans dans notre propre ouvrage comme si nous y étions contraints par des lois ; mais, avertis par leur exemple, nous devons plutôt mettre au point de nouvelles inventions pour tenter d’acquérir une gloire égale ou si possible supérieure à la leur 42. »

Et comme il le souligne dès le premier livre de son traité d’architecture, il ne s’agit pas de copier l’architec-ture antique mais de s’en inspirer pour proposer un renouveau architectural adapté aux normes, aux besoins fonctionnels et au goût des hommes de la Renaissance.Giuliano da Sangallo a parfaitement appliqué ces préceptes en analysant par le relevé l’architecture antique et en proposant un véritable renouveau stylistique dans son œuvre d’architecte. Sa réalisation pour la chapelle Gondi à Santa Maria Novella à Florence (1503), traduit l’ensemble de ses recherches sur les arcs de triomphes antiques, dont il a su tirer des enseignements pour proposer une œuvre monumentale et novatrice.

Fig. 12 – Compas « de Michel-ange », rome, archivio della Fabbrica di san Pietro ; Giuliano da sangallo, Détail de colonne de Sainte-Praxède, rome, Biblioteca apostolica Vaticana.

75ixe Journée d’étude sur l’art italien

Chloé Demonet a suivi un parcours universitaire en histoire et histoire de l’art qui l’a conduite à poursuivre ses recherches en histoire de l’architecture. S’étant spécialisée en mastère européen, elle est aujourd’hui doctorante à l’École pratique des hautes études sous la direction de Sabine Frommel. Elle vient d’intégrer l’École nationale des chartes en tant qu’élève archiviste-paléographe.

Fig. 13 – Le fil à plomb, du croquis au livre d’architecture : Pietro Rosselli, Détails du théâtre de Marcellus, Florence, Gabinetto disegni e stampe degli Uffizi ; Pietro Rosselli, Corniches diverses, Florence, Gabinetto Disegni e Stampe degli Uffizi ; Andrea Palladio, I quattro libri.

Fig. 14 – Frans Floris, Geometria, amsterdam, rijksmuseum, rijksprentenkabinet.

Fig. 15 – Frans Floris, Geometria, amsterdam, rijksmuseum, rijksprentenkabinet.

76 Art Italies, n° 21

Nous tenons à remercier Sabine Frommel pour ses conseils et son suivi, Pietro Zander qui nous a fait connaître le compas « de Michel-Ange », et Caroline Thernier pour sa participation aux expérimentations de terrain.

1.  Fr. de Mazières, M. Grubert (dir.), Le relevé en architecture, l’éternelle quête du vrai (actes des Journées internationales d’études, Paris, Cité de l’architecture et du patrimoine, 2007), Lyon, 2011.2.  A. M. Brizio, Il Rilievo dei monumenti antichi nei disegni d’architettura della prima metà del cinquecento, Rome, 1966, p. 4.3.  H. Wölfflin, Die Kunst Albrecht Dürers, Munich, 1905, rééd. Munich, 1984, p. 283.4.  Le Codex Barberini a été publié et com-menté par Chr. Hülsen, Il libro di Giuliano da Sangallo. Codice Vaticano Barberi-niano Latino 4424, Leipzig, 1910 ; le carnet de Sienne a fait l’objet d’une publication en 1899 : R. Falb, Il taccuino senese di Giu-liano da San Gallo. 50 facsimili di disegni d’architettura, scultura, ed arte applicata, pubblicati da Rodolfo Falb, Sienne, 1899.5.  Rome, Biblioteca Apostolica Vaticana [BAV], Cod. Vat. Lat. 4424, fol. 15.6.  A. Nesselrath, « I libri di disegni dell’anti chità. Tentativo di tipologia », dans S. Settis (dir.), Memoria dell’antico nell’arte italiana, Turin, III, 1986, p. 127.7.  Rome, BAV, Cod. Vat. Lat. 4424, fol. 1 et Sienne, Biblioteca comunale degli Intronati

[BcI], S.IV.8, fol. 2vo.8.  L. B. Alberti, L’art d’édifier, éd. P. Caye, F. Choay, Paris, 2004, p. 459 [IX, 10, 857].9.  Florence, Biblioteca Nazionale Centrale, Codex Magliabechianus, II.I.140, fol. 87vo.10.  Turin, Biblioteca Reale [BR], Codex Torinese Saluzziano 148, fol. 71.11.  Cambridge, St. Catharine’s College, Magistri Gregorii De mirabilibus urbis Romae, Ms. L. v. 87, dans R. Valentini, R. Zucchetti, Codice topografico della città di Roma, Rome, III, 1953, p. 138.12. Le Pogge [Poggio Bracciolini], Les ruines de Rome. De Varietate Fortunae. Livre 1, éd. J.-Y. Boriaud, Paris, 1999, p. 42-44.13. L. B. Alberti, op. cit. note 8, p. 459 [IX, 10, 857].14.  Ibid. p. 99 [II, 1, 99].15. R. Recht, « Dessins et “traités” d’archi-tecture », dans G. Duby, Le Moyen Âge, Paris, 1995, p. 283.16. Rome, BAV, Cod. Vat. Lat. 4424, fol. 19vo.17.  L. B. Alberti, op. cit. note 8, p. 460 [II, 1, 99].18. Rome, BAV, Cod. Vat. Lat. 4424, fol. 19vo-fol. 20.19.  Ibid., fol. 25vo.20. S. Frommel, « I disegni di Giuliano da Sangallo : relazioni tra studio dell’antico e progettazione », dans A. Belluzzi, S. From-mel (dir.), Disegni rinascimentali di archi-tettura, Florence, 2010, p. 18.

21.  Sienne, BcI, S.IV 8, fol. 23vo-24.22. Raphaël, B. Castiglione, La lettre à Léon X, éd. F. P. Di Teodoro, Besançon, 2005.23.  Ibid., p. 47.24. Loc. cit.25. Munich, Bayerische Staatsbibliothek, Cod. It. 37b, fol. 75-89.26. Raphaël, B. Castiglione, op. cit. note 22, p. 59.27.  Sienne, BcI, S.IV 8, fol. 7, 5vo, 6ro-vo.28. L. B. Alberti, Divertissements mathéma-tiques, éd. P. Souffrin, Paris, 2002.29.  Ibid., p. 30.30. Turin, BR, Codex Torinese Saluzziano 148, fol. 27vo-32vo.31.  Ibid., fol. 28vo-30vo.32. Raphaël, B. Castiglione, op. cit. note 22, p. 64, note 31.33.  Ibid., p. 43.34. Loc. cit.35.  Florence, Gabinetto Disegni e Stampe degli Uffizi [GDSU], n. 307 A.36. Rome, Archivio della Fabbrica di San Pietro, Arm. 4/G/258, fol. 523.37.  Rome, BAV, Cod. Vat. Lat. 4424, fol. 70.38. Florence, GDSU, n. 1579 A et n. 1634 A ; A. Palladio, I quattro libri, LIV, 28.39.  H. A. Klein, Graphic worlds of Peter Bruegel the Elder, New York, NY, 1963, p. 245.40. Amsterdam, Rijksmuseum, Rijkspren-tenkabinet, RP-P-1939-197.41.  Ibid., RP-P-BI-6399.42. L.B. Alberti, op. cit. note 8, p. 81 [I, 9, 69].

RésuméDans le cadre des investigations menées sur les vestiges de l’architecture antique pendant la Renaissance, le relevé archi-tectural voit ses méthodes élaborées au cours du xve siècle. Cette discipline devient le lien fondamental entre recherche « archéologique » et création architecturale, et la meilleure des formations pour les artistes souhaitant devenir architectes. La pratique de terrain a favorisé le développement d’un langage graphique spécifique à la représentation architecturale. De la mesure de l’architecture in situ, à la restitution graphique, la connaissance de chaque étape du relevé architectural doit permettre de pénétrer les conditions de réalisation des dessins pour en offrir une relecture. Cette recherche menée dans le cadre d’un doctorat à l’École pratique des hautes études sous la direction de Sabine Frommel vise à mettre en évidence le rapport entre une théorie du relevé architectural, exprimée dans les traités du xve et du début du xvie siècle, et la réalité de sa pratique, décelable dans un corpus de dessins de relevé concentré sur les investigations de Giuliano da Sangallo.

RiassuntoI metodi dei rilevamenti architettonici vengono elaborati nel corso del XV secolo nell’ambito delle indagini condotte sulle vestigia dell’architettura antica durante il Rinascimento. Questa disciplina diventa il legame fondamentale tra la ricerca “archeologica” e la creazione architettonica, e la formazione migliore per gli artisti che intendono diventare architetti. La pratica sul terreno ha favorito lo sviluppo di un linguaggio grafico specifico alla rappresentazione architettonica. Dalle misurazioni dell’architettura in situ, alla restituzione grafica, la conoscenza di ogni tappa del rilevamento architettonico deve permettere di comprendere le condizioni di realizzazione dei disegni per offrirne una rilettura. Questa ricerca condotta nell’ ambito di un dottorato presso l’École pratique de hautes études sotto la direzione di Sabine Frommel intende mettere in evidenza il rapporto tra una teoria del rilevamento architettonico, espressa nei trattati del XV e dell’inizio del XVI secolo, e la sua pratica reale, riscontrabile nel corpus di disegni di rilevamenti relativi alle indagini di Giuliano da Sangallo.