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-2- LE R.ESPECT INTERNATIONAL DES DROITS ACQUIS¡ Introduction rr Le respect de pròpriété dt ded droits aô{uis dee 'étrangerl a dit un juge fédéral suisse statuànÉ comme aibit¡ê uniqire dæs I'affaire Goldenberg - fait sans conteste partie des princípes générau admis par le droit des genstr( sentence du 2? septembre 1928, U.IYRIAA II 903, 90ó ). Le juge féð,&al Fazy faisait écho ici, queique dux ans après, au célèbre prononcé de Ia Cour permairente de justíce internationale, dans le cas de ce¡taind intérêts allemands en Hairte Silésie polonaise ( Série A, n'7, page 4? ): " . ¡. The principle of respect fo¡ vested rights. forms part of generally accepted inte¡national law. ¡. t' Ce serait manquer à une t¡adition aujourdrhui wénérable que de parler de la doctrine des droíts acquiÉ sans se réfè¡er à ce jugement de la Cour de La Haye. On pcurrait aussi ti¡er de la jurisprudence internatio:. nale, surtout dans la période entre les deux guerres mondiales, drassez nombreuses citations de ce genre. ' Mais Ia formule nrappartietrt pas..seulemên! à lrarsen¿l-juri- dique, quron ¡iourrait. croire wieilli, d.e l'4varit.guerre j..ell.ç g.arait conserver sa vitalité puisquron la retrouve, sou6 une forme t¡ès nette, dang lrimpor- tante sentence arbitraLe donnée le 23 août 1958 entre lrArahie Saoudite et lrAramco : rr Le principe du respect des droits acuis est un dee principes fondamentaux, et du droit international public, et du droit inte¡ne de la plupa.rt de6 Etats civilisée. I' On ¡eviendra plus loin 6ur ces diverses déclarations, dont il y aura lieu de rechercher la portée exactê, en tenant compte de la portée de lraffai¡e. Contentons-nous dtobserver, pour le moment, que le fait dt accr¡mule¡ des citations de ce genre ne peut úranquer de créer une rassuran- te impreseion quatrt à la certitúde du D¡oit iniernational et à la vigoureuse protection dont y jouisseáEiläãit= à.s irdirido", Dtautre pa¡t, il nrest pae moiûs aisé d'éveìller une impreseion radicalenrent contraire, et de citer une abondance de déclarations ou de faits propres à nous faire comprendre la fragilité de ces droits I' acquis rl par les étrangers, et lraffaiblissement des règles traditionnelles du Droit international relatives au standard de traitement des étrangers, et à la responeabilité internationale de lrEtat en cas d.ratteintes aux dloits patiimo- niaux¡ A la formule, autrefois magique, de rrdroits acquis tr, il suffi¡a dlopposé¡ ur¡ mot : t.t Nationalisatiôn ri l. . . Dana le climat juridique et polítique draujourdrhui, y à-t-il beaucoup de mots qui åoient autant chargés drun pouvoir drévocation ? f ,a simple mention de ee terme, et de ce quril euggère de contenu historique láít.déjà pâlir singrilièiement le rrprincipe fondamèntai du droit d.es gensrl dciiÈ je parlais en commençant¡ Il eèt même superflu de donner des exemples i.. tt 'Bi lron passe de la pratique äirx dé¿iaïations principe, on sera frappé aueai par le méprie ouvert dans lequel est tenu, dans plusieurs paya, le principe du respect des droitg acquis. Sans doute ne fáut-il pas toùjours prendre au pied cle la lettre dee déclarationo souvent politiques, traduisant soit uné réaction purement émotionnelle soit aussi la volonté dtaffaiblir la position adverse. Mais elies reflètent parfois ausai d€ aingulières croyances juridiques. Creet, par exemple, le rrAsian Africal Legal Consultative

-2- · -2-LE R.ESPECT INTERNATIONAL DES DROITS ACQUIS¡ Introduction rr Le respect de lâ pròpriété dt ded droits aô{uis dee 'étrangerl a dit un juge fédéral suisse statuànÉ

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LE R.ESPECT INTERNATIONAL

DES

DROITS ACQUIS¡

Introduction

rr Le respect de lâ pròpriété dt ded droits aô{uis dee 'étrangerl

a dit un juge fédéral suisse statuànÉ comme aibit¡ê uniqire dæs I'affaireGoldenberg - fait sans conteste partie des princípes générau admis parle droit des genstr( sentence du 2? septembre 1928, U.IYRIAA II 903, 90ó ).

Le juge féð,&al Fazy faisait écho ici, queique dux ans après,au célèbre prononcé de Ia Cour permairente de justíce internationale, dansle cas de ce¡taind intérêts allemands en Hairte Silésie polonaise ( Série A,n'7, page 4? ):

" . ¡. The principle of respect fo¡ vested rights.forms part of generally accepted inte¡nationallaw. ¡. t'

Ce serait manquer à une t¡adition aujourdrhui wénérable quede parler de la doctrine des droíts acquiÉ sans se réfè¡er à ce jugementde la Cour de La Haye. On pcurrait aussi ti¡er de la jurisprudence internatio:.nale, surtout dans la période entre les deux guerres mondiales, drasseznombreuses citations de ce genre. '

Mais Ia formule nrappartietrt pas..seulemên! à lrarsen¿l-juri-dique, quron ¡iourrait. croire wieilli, d.e l'4varit.guerre j..ell.ç g.arait conserversa vitalité puisquron la retrouve, sou6 une forme t¡ès nette, dang lrimpor-tante sentence arbitraLe donnée le 23 août 1958 entre lrArahie Saoudite etlrAramco :

rr Le principe du respect des droits acuis est undee principes fondamentaux, et du droit internationalpublic, et du droit inte¡ne de la plupa.rt de6 Etatscivilisée. I'

On ¡eviendra plus loin 6ur ces diverses déclarations, dont ily aura lieu de rechercher la portée exactê, en tenant compte de la portéede lraffai¡e. Contentons-nous dtobserver, pour le moment, que le fait dtaccr¡mule¡ des citations de ce genre ne peut úranquer de créer une rassuran-te impreseion quatrt à la certitúde du D¡oit iniernational et à la vigoureuseprotection dont y jouisseáEiläãit= à.s irdirido",

Dtautre pa¡t, il nrest pae moiûs aisé d'éveìller une impreseionradicalenrent contraire, et de citer une abondance de déclarations ou defaits propres à nous faire comprendre la fragilité de ces droits I' acquis rl

par les étrangers, et lraffaiblissement des règles traditionnelles du Droitinternational relatives au standard de traitement des étrangers, et à laresponeabilité internationale de lrEtat en cas d.ratteintes aux dloits patiimo-niaux¡ A la formule, autrefois magique, de rrdroits acquis tr, il suffi¡adlopposé¡ ur¡ mot : t.t Nationalisatiôn ri l. . .

Dana le climat juridique et polítique draujourdrhui, y à-t-ilbeaucoup de mots qui åoient autant chargés drun pouvoir drévocation ?f ,a simple mention de ee terme, et de ce quril euggère de contenu historiqueláít.déjà pâlir singrilièiement le rrprincipe fondamèntai du droit d.es gensrldciiÈ je parlais en commençant¡ Il eèt même superflu de donner des exemplesi.. tt 'Bi lron passe de la pratique äirx dé¿iaïations dé principe, on serafrappé aueai par le méprie ouvert dans lequel est tenu, dans plusieurspaya, le principe du respect des droitg acquis.

Sans doute ne fáut-il pas toùjours prendre au pied cle la lettredee déclarationo souvent politiques, traduisant soit uné réaction purementémotionnelle soit aussi la volonté dtaffaiblir la position adverse. Maiselies reflètent parfois ausai d€ aingulières croyances juridiques.

Creet, par exemple, le rrAsian Africal Legal Consultative

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du rr droit inaliénablefi de lrEtat souverain de cocfisquer la propriété etrr to set its om terms and standa¡ds of compensation r', et invoque lerr sowereign right;.. to catry out Dationalisation and expropriation measureswithout let or hindrance r'. Ce sònt plusieurs pays en voie de développementqui, srappuyant naturellement sur leur concepiion de Ia souweraineté,þioclament parfois non éans quelque nafveté i cf . tes am-endemendementsPr hanistan à la l7ème session de llde ; International.and Coinparative ,

19 droit de nationaliser pour sortirno ompensatioà étant évidemment àaggravel ces mêmes dílficultés économiques. ce sonÈ les pays noüvellementindépendants qui répudient avec viwacité toute id.ée de respect des d.roitsacquis e-oûs le iégime colonjal ( cf. la position de lrAlgérie à la l?èmesession de lrassemblée générale de lrO.N;U. ; ICLe, awril L964, p.443 )...On pourrait multiplier ces exemples

Ce qui est plus significatif èncórÇ crest lrattitude drautiesEtatð, oêcidentaux surtout, dont òn aurait atiendu peut-être une défensetrès wigoureuse des thèses traditionnelles et, paï exemple, d.e ce droitacquis It par excellence rr qurest le d¡oit de propriété. il est intéressantde rappeler, dans cet ordre dridées, les n èrent la-éignature d¿i la CoDvention ile Rome du 4 n d.roits delrhomme ; teé Etats européenê ne purent s inition dudroit de propriété, ni même, semble-t-il, sur le principe de son reipect.La conwention elle-même contient sur ce.point une lacune - qui fut drailleu¡scomblée plus tard, au moins en partie, pâr un protocole additionnel du 20mara 1952. Crest que Ies atteintes étatiques au d.roit de propriété privéenront nulleme¡t été le monopore des Etats du bloc soviètique. une Zvorutionvéritablement mondiale a ru se rñultiplier Ies interventions de lrEtat dansla vie économique. La pratique des puissances victorieuses en matière de

q-ennemie nra guèie contribuée àprincipes traditiÀnnels ; uoo comþar,ai-a deuième guérre mondiale avei ceuxondiale est aseez instructive à cet égard,

''.'.'

Quoiquril en soit, dans notre mande divisér,dans une sociétéinternátibnale noúwelle qui cherche sêÒ valeurs communes, le principedu respect des droits acquis paraft ètre particulièrement propre.à'sueciterles controversès et les oppôsitiòns. Ceux, et ils sont ¡iómbreu*, quí voientle problème majeur de notre temps dáné ItoppoSition des pays ricbes etdes pays pauvres, setont tentés dry trôuVer lrexpression de la ãoctrinè con-servatríce des possèdants, une árme idéologique aussi bien que juridiquedans i¡n conflit mondial dtintérêts. eu iiri.rplê énoncé drun Còctiine commecelle-ci, .chacun risque de réagir selön

""-o p.opra. préjugés; Comme celle

de la souveraineté, ét pou! des ¡aiÈon's ànàlogues, la d.octrine ded droitsacquis est un- d.es dujêta qu'iI ntest pas aisé drétudier saas passion, d.tunemanière scientifique et objective¡

. ...'. J" me p¡ópose drailleur'e de montrer quren réalité, elle nrest, .pa.è;'comiiád'ie c¡oieirt óu 1é prétendent ce¡taini de ees adversaires, unobstacle à tout changement, obstacle dresidé þar lrintérêt égolste devant le

gences de justi est lrexpression,s de la Juótice firmationles peupÍeè ori compte ( si.non

.l

Crest dire que, aveò ce'sujel, roü!oous trouvona au confinsde la Statique et de la Dynamique du Dloit¡ en même temps quraux confinsdes domaineà du Droit et de la Politique !

Mais notre sujet irest pas difficile seulement pat son caractè¡eþartiellement politique. Il lrest ausËi par son ampleur ei son obscu¡ité.

'Par son ampleur, dtäbord : traiter cles droits acquis dans lavie internatíonale ( sauf bien entendu, stipulations conventionnelles ), crestdevoir aborder une foule de chaþitreó importants du droit internatíonal :

condition d.es étrangere, ".spoféäbilidé internationale, protection diþlomati-

que, souíeraineté, rrdomaine réseiíé rr, succeesion ailttâts, statut ¿les

'investiesements privés, nationalisations, voire droit des t¡aités ou aspectgjuridiques de Ia décolonisation. ..

' Il est à lrévídence exclu, en ces quelques"leçone de rend¡ecotñpte d.e tant de questions, et aussi vaetes. Cteet lilirç.qurun exposé commeieluÌ-ci ne peutmsaque¡ de donner prise à la critique par son caractè¡e

- ' fof-êément incomplet; ir ; -

La difficulté du eujet, enfin, tient à !¡¡píécision eià l'ôbGcuriiémême de sa notíon centrale: celle de rr droit acquie rr; Dès que lron weut

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dépasser Ie stade des pures aJfirmations ou des slogaus, efficaces Peut-êtredans Ies assemblées politiques, dès que Iron passe à lranalyse ProPrementjurídique, on se heu¡te à d'innombrables difficultés, et Iron est frapPé deconstater ici 1es incertitudes de la théorie, et lrembar¡as des meilleursauteurs. On srétonne moins, dès lors, des contradictíons de la pratiqueen Ia matière.

En résumé, crest un sujet palticulièrement délicat que jevais aborder ici. Je me suis efforcé de Irétudier sans préjugés, en gardantlresprit ouvert au milieu des controverses des auteurs et des hésitationsde la pratique, en cherchant à bien formuler les questions plutôt quràapporter des réponses préfabriquées et rassurantes. Pour que sa contribu-tion ait quelque valeur, le juriste doit tenter de faire preuve drautant delucidité et de ¡éalísme que de fermeté quant au valeurs morales essentielleÉ

En commençant cett€ étude, je Iravoue, jrétais loin drêtrecertain qulil existait une doctrine des d¡oits acquis, je me demandaissril en y avai-flãã-N plusieurs et si le principe proclamé par la Cour per-manente de justice internationale dans son arrêt n'? était encore aujourdrhuiun pri.nciþe fondamental du Droit intêmational. Crest le résultat de mesrecherches sur ce point que je vais vous e)q)oser. Ce faisant, je ne meproposerai pas pour but, au moins pour but principal, de vous indiquercomment le Droit international protège les droits acquis, dans quellernesure et d.e quelle manière. Je,vo-qdrai-s rechercher surtout sril existeune règle ou un principe, en droit internatiána,l général, qui constÉFe Ierespect des droits acquis.

Pour cela, il y a lieu dtabord dranalyser Ii notion des droitsacquis, telle quron Irentend ou qüron Ita eritendue:géné=alerñãrtJn parti-culier en Europe.

:

On me pardonnera donc de ire pas suivre lrordre ou Ie planhabituel et d.e ne pas commencer par un exposé de ia pra.tique internationale,conventionnelle, diplomatique ou jurisprudentielle en mafière de droits'acqui s.

Crest en effet sur lraspect théorique que je voudrais insister,tout drabord, en retraçant quelques unes des wicissitudes de la doct¡inedes droits acquis dans Ies relations internationales certes, mais aussilà où elle est apparue, en premier lieu, crest-à-dire en droit inte¡íe.

iÀ iHBonrr DES DRorrs ACQUIS

EN DROIT INTERNE.

Cénéralités :

Quå faut-il entendre par I' d;óits acquis rr, Par Protectibndes dioits acquis ? Notoris tout d'abord que lrexpression même de tr droitsacquis rr implique et suggère déjà f idée de protection, de resPect. II ne

sragirait pas de nriinporte quels droits, mais de droits acquis, crest-àdireen quelque sorte renforcéq. voire même peut-êtr€Poul certains, acquisune fois pour toutes, Permanents, immuables ( on reviendra plus tard surce que le terme derrdroits acquisrrcomPorte de þléonastique ), Lrintentionplus ou moíns conscienüe, de ¡enforcer I'idée apparaft mieux encore danslrexpressiori courante dè'r protection " ouderrrespect I'des " droits acquis'1lorsquron parle dturi droit, et à plus forte raison drun " droit acquis rl

nrest-ce pas nécessaE-mênt Pour slopposer à une menace, aÚJm-iñ3virtqelle, pour affirmer la fo@uelle ou d'un

pouvoir juridique ieconnu digne de protection et dê respect ?

Lrexpression nrest drailleurs qurune mailière abrégée de décri-re une réalité juridique plus êómplexe ; ce nrest þas seulement un droit subjee'tif quril s'agit de protègér óu de respècter, crest toute une relation socialeorganisée et régie par Ie Droit. Il est bien vrai que, pratiquement, I' dupoint de vue de celui qui a un intérêt au respect, cela se résout à un droit rl

( Kaeckenbeeck, Recueil des Còurs de lrAcadémie de La Haye lp3?, I,wol. 59, p. 323 ). Ausei lâ doctrine que nous étudions tient-e_lle compte d.e

ce fait et néglige-t-elle de srinteresser à lrensemble du raþprirt juridiquepour sren tenir à lrun de ses aspects, celui du droit, de la prérogati.re indi-widuelle.

Si ce choix iiritial, ce point de vue peuvent se þstifier sansdoute, ils méritênt d'être éoùlignés dtentrée de cause. Le point de déþartse trouve donc dans la doitrine de Irindivi<ì.ualistne juridique. Il esi inévitable,alors, que le principe apparaisse le plus souvent comme un instrument dedéfense contte les empíètements de ItEtat sur ]es inté¡êts et les droits desparticuliers, comme lraffirmation drure volonté de statu quo social.

Premiè¡e e:

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I

' Si 1'ot ehvisage, dans une relation juridique, lraspectrr obligationrrplutôt que lraspect " d.oi!i-!j":tif r', on conçoit aiséinentq'!E: pa=tGins de I'individuatismãìã!!-IãGlessènt que dans la mesureoù une intervention étatique, Iégislative ou autre; wiendrait acc¡oítre une

obligatión et rêstrèindre par là un d¡oit acquis. .. Il est clair quraucunproblème de la'r Protection d." *1ig"!io.1établies ", par exemple, ne se

pose , qui pourrait faire figure arentrepætie à celui de Ia Protection des

droits acquis.

res sérêt que åractèreas 6ez acquisrr'a-t-on roit " (

mais, par exemple, une simple espérance ou une exPectative ).

Si imprécise qurelle soit, lrexpression est consacrée ; ellonroffre pas drinconwénients majeurs, en elle-même, le tout étant de srenten-dre sur une d.éfinítion, or ctest ici que la difficulté commence, et nrimpor-te quelle étude du sujet, même la plus rapide, suJfit à persuader quril seratoujours impossible au auteurs de ae mettre draccord sur une définitionuníqué, que ce soit daás le domainé du d¡oit international ou dans drautresdomaines.

Si Iron examine Par exemPle la doctrine juridique Ql,avant-guerre, en Europe, on constate que les auteurs français tendent à opposerles d¡oits acquis au simples expectatives et soulignent le caractère .coúì-piet, acheié, de I'acquisiìio.ãi-ãiõlÎlãi son titulaire, quelle que soiTfa

-diète-ão"t cette acquisition a eu fieu (f ).

'Dlle( jusqurà Gierke tèrdu droit acquis;.telle concePtionple en droit public interne en matière de droits acquis des ronctionnaires-.on clevine aussi Ies prolongerñents.possibles de cetie doctrine sur le ter¡aindu droit international, par exémple quant à la protection <Ìes droits desconceS sionnair es étränger s,

Au risque drantíciper un Peu sur des développements ultèrieur

(l) Cf. aussi la définition de MERLIN 3 r' Les droits acquis sont ceu quisont entrés dans not¡e patrimoine, qui en font Partie et que ne Peut nousôter celui de qui nous les tenons.rr

( et sous résetwe des précisions quril faudra fournir, pour tel ou teldomaine, sur les sens principau de la notion ), jê crois utile drindiquerici, dès à þrésent, le seng tout géné¡al dans lequel je vãis entendté lestermes rr d¡oii aèquis rr, conforinéinent à la tendance la plus répanduèen droit iriteinational, En ce sens, on pourra remplacer Irexþiession parcelle rlertd.r'oit subjectif " ou de trdroit individuelrr. Il sragiiä en-défi-nitive des droits patrimoniåu, ou-même de certains drentre eu* seuiement.

Les termes derr d¡oit subjectif Itou de t' droit individuel I'

ont soulevé, eux aussi, de wives critiques, quril suffit de rappeler en pas-sant, sans entrer.dàns 1e détail de controverses connues entre les par-tisans du subjectivismè ou de lrobjectivi.sme juridiques.

. Poùr Léon Duguit, Ie d¡oit nrest en aucune façon un ensemblede droits, et il nrèxiste pas de rr droit subjectif rr. Les ptéoccupationspcilitiques des indiwidualistes ( en particulier de I'Ecöle du Droit de lañature et des Gens; aú Xrllllème siècle ) expliquent leur insistanèe surlesrrdroits naturels " comme défense contre les.prétentions des Souve-rains et de lrAbsolutisme¡

Led aritiques dè Duguit, du reste, srappliquent tout aussibíen aux rr droits de lrEtat r' - dont on parle beaucoup dans les assembléesinternationales. On peut aussi rappeler que Duguit ne songeait pas à

attaquer la notion de p¡opriété, mais quril voyait en elle une fonctionsoci¡le et non pas un droit indiwiduel.;

Ge Quron a pu aþpele/rlrEòole du Droit Socialrr, dans sescritiques à ltégard du droit subjectif considéré comme Ia base delrordrejuridique, a mis en lumière la liaison et lrinterdépendance des devoírset des droits, insi6tant sur le Droit objectif comme iègle de vie en socié-té, Le drcit cle þropriété lui-même, ce type du droit lè plus absolu pourI'Individualisme, comporte et a toujours comporté des obligations a-t-onfait remarquêf - notamment celles de voisinage.

Bref, lrévolution des idées, le recul de Lrindiwidualismeclassique, Itinfluence des doctrines juridiques þlus rr sociales rr, devraientamÈner, quelle que soit la terminologie employée, une certbine transfor-mation c1u contenu et de la portée attribuée à la notion de rr droitacquís rr,It droit subjectif r', etc.

Cet affaiblissement, au moins relatif , du concept de droitacquis¡'dans le cours de lrhistoirsde Ia penséejufïdlque, uäè cèrtaine

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perte dans safermeté et sa wigueur, semblent stopérer parallèlementã une extension, à un élargissement de la notion : si les rr droits acquis "se ramènent en définitive auxrtdroits subjectifs ", alors tout dloit existant."i d.or. acquís et 1rétiquette cesse dtêtre.rése¡vée à certaiies þrérògativesou situations particulièr ement intangibles, particulièr ement immuni sées

contre dréventuelles atteintes à IrEtat. . .

Ici encore le ca¡actè¡e vague et multiforme de la notion de bas

Irincertitude des terminologies, la vatíété des doctrines, interdisent defaire plus, pour le moment du moins, que dresquissel certaines tendances.

Voyons maintenant de plus près; après cette orientationgénérale, comment la notion des dioits acquis se présente dans diwersdomaines du droit, et, tout dtabord, en d¡oit interne.

Ainsi que lrobserve avec raison un internationaliste suissebien connu ( Guggenheim,p; 332 ), la notion des drotique et du droit international Privé 'r, Pour en obtenir une meilleure comPr

nterroger sur le problème tel qurilse présente en droit interne ( dans lequel je faís entrer, bien entendu, ledroit international privé ),

Ðroit inteÉémpõreI.

La notion de droits acquis est souvent consiclérée comme unaEpect, ou même une autte expresläon de lá non-rétroactivité des lois.I1 sragit íci de protèger certains droits individuels contre les atteintespossibles dtune Iégislation rétrospective. On est donc dans Ie dqrrainedu droit transitciirè ou , plus précisément, dans le domaine qurun juristesuisJã-ãi-ãZEiIãüãiècIe ( Affolter, 'r Das intertemporale Privatrecht rr,

l90l ) appelait Ie droit intertemporel.

La rétroactivíté est elle aussi une notion ambigue, et Ie Prin-ôipe dit de non-rétroactivité peut awoir plusieurs significations quriiiriporte de distinguer.

Considéré en tant que règle drinterprétation, sradressant auxjuges, il ne nous interesse pas directement.

I' As a rule of construction, it means only thata retrospective operation s not to be given toa statute so as to impair an existing right orobligation, otherwise than aa regards matter

cf procedure, unless that effect caq.not beavoided without doing viotencê to the lan:ua3eof the enactment". " (Allen, Law in the \taking, Oxford,

5 th. ed. , p. 442). Ce'qui iâteresse Ia doctrine des droits acqqis, en revanche,crest Ia possibilité, ou Irinterdiction, dr:ne lé;istation rétröspective ( àclistin, uer drailleu¡s de Ia légiÀlation 'r ex post facto "),

Pour répondre à cette question, il nrest pas nécessaire dlanalyser longuement le concept de rétroactivité. Une citatìon me paraît bienéclairer Ie problème :

rr The maxim of the law, as stated by Cokè( 2 inst. 95, Z9Z ) is : Omnis nova constitutiofut{ris iromam imponãÏè-ã-e'cet, et non praeteritis.,But it is cI ea¡ that new law cannot always ¡re

solèly prospective in íts operation ; it i6 almostcertain to affect existin¡: rights and, still more,existing expectations. It may be intended tooperate in the future, but the mere fact thatit operates at alil inevitably, in the long run,impinges upon ri.ghts and dutiés which existedlong before it came into beirg. This is particulailytiue of laws conce¡ning property, which at sometiñe or other must come wíthih the ambit ofevery change in the law relevant to it . . . rr

( Allen, Law in the Making, p. 44I)

Il nren reste pas moins que beaucoup de Ié;islations, notam-ment divers codes européens, consactent Ie principe du respect des d¡oitsaiquis drune manière plus ou moins directe. Ainsi les articles ler et 4 duTitre!'ìnal du Code Civil Suisse de l9lZ. ( Artícle I er : rtLes effets ju-ridiques de faits antèrieurs à lréntrée en vigueur du C. C. continuent àêtre régis par les dispositions du äroit fédéral ou cantonal sous Irempireduquel ces faits se sont passés. . .rr - Article 4 : " Les effets juridiquesde faits qui se sont passés sous Ireinpire de la loi ancienne, mais dont iInrest pas résulté de droits acquis avant Ia date de lrentrée en vigueur duC.C., soñt régis dès çette date par la loi nouvelle "), ( -Voi. au6si par er.em -ple, art, 5 Code Civil Autrichien et Ira¡t. Z Code Civil -u-rançais, etc.).

Cette tendance très marquée dans de nombreuxþays, contrela législation rétroactive dans son effet - en Irâbsence même de toute limita-tion constitutionnelle - est lréxpression drune exigence très répandue dejustice, de permanence et de sécurité. Tous les pays civilisés paraissent,y être sensibles. Allons-nous, alor6, découwrir lrexistence drun rr principe

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-l?-- rt -

art.dirait au législateur de donner eJfet rétroactif à ces lois et de porteratteinte par Ià aux droits acquis J

Tout au contraire, Irétude du d¡oit comPafé réwèIe une '

grande diversité dans les pratiques nationales à 1régard du problème de larétroactiwité. Sril est un trait commun entre ces Pratiques, crest bienquril nrexiste aucune prohibition absolue et gÉa6rale de la rétroactivité,ca¡

I' theré may be occasíons when public exig¿¡çycompels a departure from the general principle,and it is impossible the¡efore to say that retlosPectivelegislation is in all circumstances unjstifiablè "( Allen, op. cit. p. 444 )

Le problème est donc, en résumé, de Politique législatiwe,dtopportunité, de choix entre les tendances et les intérêts cont¡adictoires.r-ãtal-te tegislateur fait eppel à Lrordrê public, à des considèrations su-pèrieures pour supprimer des droits ou des situations individuelles existan-tes, tantôt ltéquité lui paraft exiger, non pas la suppression ou Ia modifica;tion de ce¡tains intérêts particuliers, mais leu¡ maintien, et iI stabstientde donner force rét¡oactive à ces lois. Comme lrobserve très bienKaeckepbeeck, dâns eon étude classique sur là question ( RCA.DI L937, I,vot, 59,r p. 33?-) ( qui reste aujourdrhui encore, à mon avis, Ia meilleureétude de cè problème en droit international ), il serait entièrement artificiede chercher à élaborer rr une notion t12e de &oit acquis, walable Partoutcomrne critère de la non-¡étroactiwité t'; loin de fou¡nir un critère précisà ce choix du législateur, lrexpression de droits acquis nrest peut-êtrequrune étiquette qui traduit le résultat de ce choix. !r Ctest ici 1ã qualitéou le motif de la loi nootellãlläìõilIe le caractèr" ¿" ¿ioit a.q"i", qti

Il va sans dire que ces observations 6ur la liberté dulégislateur national, à ltégard de Ia rétroactivité et des droits acQuís, nè

préjuge en rien la répönse à dônner à Ia question de la resþonsabilitéinternationale éventuelle de lrEtat pour Ies atteintes causées à des étrangerspar une législation rétroactive. Mais ces quelques remarques de droit in-teltemporel, bien que très générales, méritaient drêtre faiÈes ; on verraqurelles sont de nature à éclaiier Ie problème des droits acquis en droitinternational public.

Avant de sr€ngager gur ce terrain, ce peridänt, il me paraitutile dtexaminer la question, toujorlls en droit interne, et iêtte fois sóìrcIrangle du droit international priwé.

La notion dè droits acquis en droit international privé.

Dú alomaine du droit interteinporel, oì¡ il sropþoSe à Ia ¡étro-aativité deg lois, le principè de la piotection dês äroits acquis a passé sur Ieterrain du d¡oit international privé. Ceci nrest guère étonnant PUlSqUe Ce queIron pourrait appeler,,'selon la formule céIèb¡e du philosophe FouiIIée,ltrtidée-force t' à la base de ce principe¡ crest-à-dire une exigence de perma-nence et de sécurité, se manifeste dans ces deq domaines du droit interue,Droìt Ia tendance à transposer, quant à I'effefìGË lois dans lrespace, les idéeset solutions dégagées de ltétude des lois dans Ie temps. Reste à savoir si cetteanalogie est utile ou trompeu6e.. .

Une difficulté est, ici, quril nr.ya pas une mqis plusieursdoctrines des droits acquis en droit internationäI privéI-Ce ntestþãË-Tml-a placeici drentrer dans le détail, et quelques indications générales suJfiront àconstituer Ie rrbackgroundrr néeessaire à la suite de notre étri.de.

Je nrinsistef âi pas. srft ce qrie lron considère, tout au moinsen Europe, comme la théo¡ie anglo-améiicaine de'3 droits acquis, illustréenotamment par Beale. On sait qurellê patf du principe de la territorialité,et qurelle tend à expliquer lrapplicabilité du droit étranger pa-iT-¡uge tocaf.

Je voudrais surtbut me fonder sur la doctrine française dudroit internatíonal privé, dont certains représentants ont été, soit Ies plùsardents protagonistes, soit les plus vifs critiques de la tl¡éorie des droitsacquis ; que lron pense seulement, pout les premiers, à Antöine Pillet, etpour les seconds à Arminjon;

Les spécialistes du droit international privé connaissent toutelrimportance quta donnée Antoine Pillet au principe ilu respect internationaldes droits acquis, en lequel il est allé jusqurà woír lrun des trois objets dudroit international privé ( les deu aut¡es éiant lá condition des étrangerset les conflits de lois ),

Selon les p¿rtisans du principe, la justice exige que des droitsacquis dans un pays soient reconnus et protégés dansleò âittres; Il est v¡aique chaque Etat est mar'tre chez lui, mais il doit, précisément pour cetteraison, respecter la souveraineté des autres Etats, et donc avoir égard aux

éné¡al de d¡oit reconnu Ies .nations ciwilisées I

inteI Jus

r, au sens du famew, princi¡iè qui inter-

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actes accomplis su¡ Ie territoire drun autre Etat, en ve¡tu de la ì-oi quiest envigueur. Les effets Produits sous lrempire de cettë loi doivent êt¡e reconnus dans les Etats étrangers, tout au moins dans la mesùre où le pre-mier Etat, nt a pas comis un excès de pouvoir en Statuant ultra vires;Il vaut 1a peine de cite¡ ici PíIlet lui-même : ( " La théorie gZãét-"le d"sdroits acquis ", RCADI, Lg?s, IfI, p.489, vol¡ 8, p.491)-

". . . La fo¡mule à donner à ce principe Peut êtrecelle-ci. Toutes les fois qurun droit a été régulièrem1:ntâó9ùïé dans uä'þäys quelconqui:, ce droit doit êtrerespecté et Ies effets quril produit doivent lui Êtregarantis dans un autre pays faisant partie comme lepremier de la Communauté interriationale. Crest uneaécecsité absolument inéIuctable, un principe sansIequel aucun commerce international ne seraitpossible et, par là même, aucune ¡elation desnationaux de chaque pays avec Ies étrangers.t'(p. +92)

11 est vrai que Pillet atténue le caractère absolu de cetteaJfirrration en admettant des limites et d.es exceptions à son principe :

premièrement des limites : Ies lois pénales, politíques et fiscales nront pasdreffets à I'étranger. Elles sont strictenient territoriales et elles échap-pent au principe de lreffet inte¡national des droits acquis. Deuième:',:ent,le principe connaít draut¡e part deu exceptions, celle de Irordre public,et celle du cas oìr le droit acquis à 1rétranger I'ne correspond à aucun droitorganisé dans le pays oìr lron prétend Ie faire waloir r'.

- Enfin, la reconnaíssance drun droit acquis à 1rétrangernroffre pas une garantie entière de perrnanenêe puisque Pillet admet, con-formément à son principe qrue ttIa même nécessité internatipnale et lamême idée de repect des souverains les uns pour les autres fait qur:n auterégulièrement fait dans un pays peut réagir sur les droits antèrieurementacquis dans des pays différents-rr (

Ce qui est interessant, aux fins de la présente recherche,cl-est surtout lranalogie avec les conflits de lois dans le temps, Irinter-vention de Itidée de non-rétroactivité, en particulier dans ce que lron a ap-pelé rrles conflits drannexion rr.

Pillet, en effet, a été fuappé par la pratique internationaleen matière de cession de territoire, drannexion. Cette pratique, a-t-ilremarqué ( avec raison - comme on le verra plus loitr ) l consacré rr lep¡incipe de la stabilité des positions juridiques acquises sous lrempire deslois du pays démembrés ", ceci dans les t¡aités règlant le transfert deterritoires aussi bien quren lrabsence de tout traité. il en déduit querr crest une règle absolue que Ie changement de législation provenant delrannexion nra pas dreffet sur les bituations antèrieurement acquises rl

( p. a9r ).

Le pays acqueteur du tertitoirê srabstient de porter atteinteaux droits valablement acquis, avant la cession, par application de Ialoi du pays cèdant. ll srabstíent de donner un effet rétroactif à ses propreslois, tout en se rése¡vant de les appliquer aux faits futurs et même auxeffets futurs de faits antèrieurs ( ce qui nrest pas contraire au principe de

'on-ré-liõãõtivité ).

On werra plus loin, sur le plan du droit intetnationalpublíc, ce quril en est des droits.acquis en cas de tlansfert de souveraineté.Observons simplement íci que ltexemple de lrrtannexiontr, ou du transfertde territoires, semble avoi¡ se¡vi à certâins auteurs en quelque sorte detrait drunion entre le domaine du droit intettemporel privé et celui du droiti;Ê;;atiã;ãi-priwé. Le changement de d.roit applicable résulte ici, non pascornme en d¡oit intertemporel, drune nouvelle intervention du ..rnêìnè légis-lateur, maid du pas.sage drun même ter¡ítoire sous une autre silîãîainetéIégi slative.

A première vue, la situation ainsi créée par la cession deterritoiÌes peut paraftre la même que celle qui résulte dir déplacementdans lrespace drune pcrsonne ou drun bien soumis ainsi'successivement àdeux législations différentes. On peut dire, en simplifiant un peu la penséedes partisans de la théorie des droits acquis, que dans les deu cas lasolution doit être la mê'me, Ie. second 1égislateur doit respecter les situationsjurídiques régulièrement créées sous lrempire de la première législationchronologiquement applicable.

Ires auteurs français parlent volontiers ici de rr conflit mobile"lorsque une situation donnée est soumise à deux systèmes jur rdlque s

P. 533 )

LaÍragilité de cette doctrine, et ses nombreuses inconsé-quences ou erreurs, ont été souvent démont¡ées. On ne trouve plusaujourdrhui un internationaliste de droit privÇ pour soutenir èncore lrexistendu principe généraI che¡ à Pillet. Au contraire, la quasi-unanimité desauteurs reconnait Ia liberté qura Ie législateur national, dans les limitesextrêmement larges et vagues du droit des gens, de tenir compte ou non dela loi étrangère ou des situations juridiques créées à 1rétranger.

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successif s, par Ie changement du " point de rattachement rr ' - 1o mêmerésultat étant atteint, en cas dr"annexion r', par le transfert de te¡ritoires

Les exemples en sont multiples : un meuble acquis àIrétranger est importé dans le pays, des épou transfèrent leur domicileco.¡oga-I de 1rétr;nger dans le pay6, etc. Il sragit à chaque fois de déli-miter les domaines respectifs de la Loi ancienne et de la loi nouvelle dansla succession des rapports juridiques qu'engerdie cette situation ( Battifol,Traité é!éritentaire, 2 ème édition n' 318, 4ème édition, 4". .. )

Tout déplacement dans ce genre dans lrespace, à traversles frontières ( d'oìr Ie changement du point d. raTfããË-rer-fse situeaussi nécessairement dans Ie temP6. On comprend donc que les auteursaient été enclins à rtil-äãI-fEFlãcIäques áu droit intert::r.porÞl interne,et à faire interwenir Itidée de nòn-¡étroactivité.

Un bon exemple de cette " approche rr se trouve dans lesouvrages drun auteur aujourdrhui quelque peu oublié, mais non sans méritele Marquis de Vareilles-Sommières, qui, srinspirant de la pensée drUl¡ichHuber - qui eut tant drinfluence Cans Ia doctrine anglo-américaine - sreffo¡ce de réhabiliter la wieíIle théorie des statuts.

Selon lui, les conflits dans Irespace doiwent se résoudre selon les mêrnes règles que les conJlits dans Ie temPs. Le principe de la non'¡étroactiwité joue dans les deux cas, et il exige que les lois soient resPec-tées partout suivant lrordre chronologique.

Une de ses idées de base semble être que la personne quia conchi des actes sur un certain territoire, et se ¡end ensuite dans unautre pays, est dans la même situatj.on que la personne qui, dans un seul e

même Etat, est soumise successivement à deux Iois dont Ia seconde abrogeIa première. Le respect des droits acquis à lrétranger ( sous lrempirede Ia preniière loi applicable ) résulte donc du principe de lrapplicationchronologique. Clraqoe Etat, encole une fois, doit resPecter Ia douverainedes âutres et par conséquent prendre ên considèration Ies actes accomplissur leur te¡ritoire respectif en vertu de Ia loi qui y était en vigueur aumoment oÌr Iracte a été accompli.

Vareilles-Sòmmières précise drailleu¡s que les effetsfuturs de Iracte seront régis par la loi nouwell:, en conséquence du princi-p" a" t" territorialité

La doctrine européenne plus nouveÌle de droit internationalprivé nra pas manqué de reLever Ies inexactitudes et les faiblesses drunepareille théorie. Lranâlogie entre les deux situations ( celle du droit'intertemporet lntelnãl-ãt ælie du d¡oit international privé ), déjà miseen luitrière par Sawigny, nrest aucunement une identité. Dáns 1e premieròas, il sragit de deux interventioús du même lÇiElãi-u, Ia seconde étantþar hypothèse censée apporter une amélioration légiéIatwe. Dans lesecond ca.s-, le problème résulte de Ia coexistence de législations nationalesdifférente s.

Draut¡e part, si dans le premier c¿s, comme on Ita w, Ielégislateur est libre, selo¿ sa conception de,la justice et de lropportunité,de donner à ses lois un effet létroactif, su¡ le terrain du droit internationalpriwé, le législateur national ( du second pays ) né semble pas moins librede respecter ou drignorer ]es droitsrracquis', à1rétranger, selon sa con-cePtion de la justice et de Iropportunité. Il ne lui est pas interdit par ledroit des gens d'établir à saguise ses règles de conflits de lois sur cesujet et, par exemple, de refuser toute reconnaissance à des droíts acquissous la législation étrangère mais qui contrediseirt son organisationjuridique ; de même quril peut, selon une certà.ine théorie, reconnaitre deseffets à certains faits ou actes survenus à 1rétranger et qui ne produiraientpas de tels effets sous ltempire de ta tégislation étrangère.

Dans les deux cás ( celui du droit internationäl privé et celuidu droit intertemporel ) le législateur national esi maître de décid.er dela rétroactiwité ou de la non-rét¡oactivité de ses lois, sous la seule ¡éser-ve généeale drune violation éventuelle des droits des étrangers, violationsqui, dans certaines conditions pourraient engager la responsabilité inter-nationale de lr.Etat ; nous aurons à y revenir;

En résumé, sur Ie terrain cle la doctrine du droit internaiionalprivé, il ne semble pas rester grand chose aujourdthui dés constructions,passablement artificielles, des partisans du respect inteïnatl.onàl desdroits acquis commerr'un principe absoldr . Eñprüntons ici notle conclusionau Doyen Battifol :

I' La formule est insuffisante, comme le droit interne en afait.l'expéÊie@ lois,droits acquís est trop incertãine. . .tr ( Traité,

parce que la notion dez-ìm. éd--lio. 3ra, + èm.

éd. , 4'.. .)

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La brève analyse qui précède nous aPPorte cependant, mesemble-t-il, deux leçons utiles Pour la suite de notre enquête - indépendam-ment même de Ia lumiè¡e que ces anÊlogies Pourroat éventuellement jetelsur le problème des droits acquis en droit international public :

Première leçon : la notion de droit acquis 66t extrêmementque, suscePtible drêtre incorPorur obscure qurelle soit, la notio¡uctible ; sur le tetrain des

I' conflits mobiles rr, crest-à-dire du d¡oit inte¡national priwé, comme surcelui des conflits de lois dans le temps du d¡oit interne, elle exPrime une

aãpi.ration essentielle versla justicè, vers la Permanence des raPPolts so-

ciau et Ia sécurité des droits.

Quron est-il inaintenant de la notion des droits acquis dans lesrapports internationaux ? Crest ce que nous allons examiner dans une seconipartie de ce cours.

hypothè se smenacés, I

Premiè¡e partie i

I.A THEORIE DES DROII'S ACQUIS

EN DROIT INTERNATIONAL PUBLIC.

Il conwient de distinguer; et drenvisager séparément, deuxdans lesquelles les droits acquis des étrangers pe.vert ãäã-e principe de la protection des droits acquis ne jouant pas néces-

sairement de la même façon dans les deux cas.

I. En cas de transformation territo¡iale ( Succession drEtats ).

Crest dans le cas des cessions de territoires ( quron peut ap-pelr par la suite, en abrégé, le cas drannexion - sans mettte dans lremploide ce terme, aucunc connotation péjcaE;;l-que la solution du problèmedes droits acquis a tout naturellement inVité ltapplication, par analogie,des principes ð.égagés, soit en droit intertemporel ( prtnc$ãiãiãror-rétroactiwité ), söit en droit international priwé ( principe de I'efficacitéinternationale des droits, ou du respect des droits acquis ).

Jrai fait allusion précédemment à ces analdgies, qui sontcertaines, mais aussi limitées. Je crois superflu de ¡evenir là-dessus etje passe aussitôt à lrexamen de Ia pratique internationale en la matière,

On voit dremblée qre Ia question seta souvent, et normalementrégIée, par le droit international conventionnel. La cession territorialeintervient en ve¡tu drun traité, droù découleront Ðuvent des droits spéciauxtrès étendus pour IrEtat acquèreur ; dans lrexercice de sa souveraineté,ce dernier Mat pou¡ra-t-il modifier ou supprimer à sa guise les d¡oitsvalablement acquis pardes étrangers du temps où srexerçait Irancienneautorité ?

A côté du d¡oit conventionnel, et notamment des traités depaix, iI y a lieu bien entendu cl.renvisager et de considère¡ les règles dud.¡oit international commun. EIles joueront notamment un rôIe important pour

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complète tionnelles ou Pour Pelriièttre dren déga-

ger Ie se mettre en lumière Ie caractère plus

ou moins nel de la Lègle conventionnelle )'

Drune pratique internationale assez liche en cette matière'je me bornerai à citer quelques cas Particuliè¡ement interessants'

R-appelons tout drabord ici, pour son intérêt historique' Irexor

p1e clu traité de la Floride. Dans lraffair( US. Supreme Court, 7 Peters 5l ), jug e

Ma¡shall à ¡econnu la validité dtlrn droit tué

en Floride, d.roit acquis avant la cession de cet Etat au Etats-Unis'

. Jê voudrais aussi attirer lrattention sur la sentence du

TribunaL arbitraL mixte roumano-hougrois ( du Ib janvier I9Z7 ) dahs facéIèbre affaire des Opiants hongrois de Transylvanie. On sait lroriginede Iraffaire, née de la cession de la Prowioce de Transylwanie à Ia Rouma-nie en vertu du Traité de Trianon ( f920 ) et des lois agraíres roumaines,qui expropriai.ti*E "é"ìã

a. piãpriétaires fonciers, dont plusieurs a-.oa^i"r1 opté pour la nationalité hongroise, et étaient donc'des étrangers 'Stagissan.t drune mesure génêtaIe drexpropriation prise dans lrintérêt de

la collectivité roumaine, les étrangers poüvaient-ils prétendre, en ver"udu droit internationaÌ, à un traitement supérieur aU rr tlaitemeirt national rl

On voit le caractère fondamental des questions soulevées par ce litige'Signalons eafin qurune indèmnité était prérue par la loi d'expropriation,mais seulement postèrieuie et réduite.

Appliquant lrarticle 250 du Tr tla saisie ou 1a liquidation dês biens, droitshongrois établis sur les ter¡itoiies cédés )

droit international commun, Ie Tribunal arbitral jugea que Ies mesuresffiioration du piincipe générar du'respect des

droits acquis. ll rejeta notamment les arguments roumains fondés surIa souVeraineté de 1'Etat et sur le critère de non-discrimination ( traite-ment national );

On connaît la suite des évène¡irents : le refus du GouVe¡nemerroumain draccepter'Ia sentence et de ¡econnaitre 1a compétence du

Tribunal, les elforts de médiation du Conseil de la S.D.N.; ]a constitutiondtun fonðs agraire et Ia signature des Accords de París de I930. Cetteconclusion politique ne me paraÎt pa6 enlever de son intéîet ou de son

importance à cette sentence internationale. Dlns un commentaire qurilécrivait à ce suJet en l9?? , dans Ia Rewe Géné¡ale de droit internationalpubtic, M. Georges 5ce11e éc¡ivait notamment :

" Le principe fondamental du droit inte¡national

commun, crest le respect de la propriété privée.Tout acte attentatoire au tespect de la propriétéet des droits acquis déroge au droit internationalcommuri rr.

Mais lraffaire la plus célèbre, le rrleading cäse Ú quron nesáulait se dispensér drévoquer, crest celui de rrArrêt,o. z d. t] cour

Lralfai¡e est trop connue, trop classique pòur qu,íl soit utilede rappeler les f¡.its.

Le grand intérêt de cette ãJfaire ; comme de5 autÌes décisionsrendues par la Cour dans le litiges ger6ano -polonais suscités par lescessions de' territoires êx-allemands, crest qtrelle äpporte une grande

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e

clarté sur la notion de liquidation deen principe mai s, excepTlã;;;TÏ;;;nr

la propriété privée, me süre interditeadmisé, par dérogation au d¡oít inter_national commun, sur i¡ne base conveaitionnelle, et quril convient d'interpréter -restrictivement. ElIe ne se on causedrutilité est

c1e .commun, comme--une exception au principe ledpect de la propriété privéè étrangère,moyennant certaines conditions, dont nous r eparlerons plus loin.

bien être un arrêt_clé sur le chapitredu respect lièrement d" .";";; d; L n".orr¿r¿étrangère. rr.ôhñ?des dispesi å;'ii'"""i'"i,il.ii:ilJå'_îilîî."mondiale ( le même phénomène d.evant se rep¡od.uire rtêð i.s,trait?s-qri ortsuivi la seconde guerre mondiale ). Co*_.ì,observe Gidel ( nègles iéné_rales du d;i. public, f9Z?, p.76, ),32 ) l" Coor, dans ceta¡rêt,-

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I' a restitué au principe du respect de la propriétéprivée en droit ínternational son autorité traü.ltionnelle,exposée comme íl arrive fréquemment dans despériodes de c¡ise à des atteintes fâcheuses.. .rl

On peut rapprocher de cet Arrêt une décision non moins inté-ressante de la même Cour permanente, toutjours à propos de la cessionde territoiTes allemands à Ia Pologne, celle de lravis consultätif no 6,concernant Ies \4inorité s allemandes en Pologoe.

On se souvient que des colons allemands occupaient, sur leterritoire cédé, des terles en vertu de contrats dtun type spécial, lesI'Rentengutswertrâ.gerr, conclus al-ant la cession de territoire avec unecommission allemande de colonisation-

Après avoir constaté Ia validité des droits ainsi acquis par lescolons en vertu de ces contrats, la Cour constata que ces contrats avaientconservé ieur validité, rejetant la thèse selon laquelle la cession de terri-toire les aulait rendus nuls autoinatiquement. ( Série B, no. 6, p. ex.P. 36 ).

II y a Ià, on lra dit, une rr éclatante confirmatíon rr du principedu respect des droits acquis en cas de cession de tertitoire, conJirmationqui arr drautant plus de valeur que la Cour a jugé expressément qìlraucunedisposition conventionnelle nrest nécessaire pour protéger les droits etpour maintenir les obligatíonsfi drordre privé acquis avant la cession,( Kaeckenbeeck, RCADI 1931, I, 32I, p. 389 ),

La règle parait donc tout à fait incontestée. Avant dren reche¡-cher la portée exacte drapplication, c'est-à-dire Ies limites, il conwientde rappelr biièvement sa justification.

Cette justification est facile à découvrir : crest éxactementcelle que nous trouvions en parlant de " droits acquis I' sur le plan du d¡oitintertemporel interne, ou sur celui du dróit international privé. Ici aussi,il sragit drune exigence.fondamentale de tout orclre juridique, celle dela continuité et de la stabilité des relatiöis et cles situations juricliques.

A cette considè¡ation générzLe stajoute, dans Ie áas drunecession de territoire, dans le cas drannexion, un intérêt politique <ie IrEtatacquèreur : celui de ne pas s'alièner les populatimpar un bouleversement brutal des rapports sociaux existants, par une

suppression automatique et radicale des droits antè¡ieuremeat acquis.

Dans l,ord.re interne, Ie législateur évite aussi, d.rune manièreanalogue, des interventions trop brutales, évite[írétroactivité et prévoit sou-vent, par le moyen de dispositions transitoires, le passage grâduèI et sansdouleur du droit ancien au dloit nouveau. Ceci sauf, peut-être, dans Iecaq de réwolution, et encore.. . A plus forte raison, semble_t_il, IrEtatcessionnaire du territoire, qui fait souvent drabord figure de régislateur¿::glg:L pour les populations en cause, a-t-il intérêf à éwiter i.n changementbrusque de régime juridique.

( "es

considèrations, valables pour ce quronpeut appeler le du.type classique, perdent passablementde leur justess ansfe¡t de souveraineté sraccompagne delraccession à Ir ncienne colonie...).

Voilà pour la iustification du Prlnclpe.

Si solennelle .que soit sa consècration dms la juri sprudenceinternationale, notamment de la CPJI, le du des Croitsacquis, dans le cas de la cession de terrítoir e, tes limites.e

,,ciì

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C¡est pourquoi, par exemple, dans lraJfaire de la Cmtessede Buena Vista( ìloore, Dí gest of International Law, I, 99, P +ZBles Etats-Unis ont pu qualifier <ie droit public, Iié à uae organisation polí-tique, unrrofficerracheté à IaCouronne Espagnole à Cuba, etrracquisrlpar héritage, et cnt refusé de Ie considèrer comme un droit privé depropri été .

On constate à nouveau ici toute ItimþTécision de iá rotionmême des droits acquis.

A côté de drbits nettement privés, comme celui de propriété,ce¡tains droits mixtes bénéficient aussi de la protection due aux droits acquJiI semble en être ainsi, selon la doct¡ine dominante et la pratique internatiodale ( au1es d¡oit s tirés des concessions

moins drawant la deuxième guerre mondiale ) en ce qui concerne, ru leur caractère contractuel ainsi que,

peut-être Ieur valeur économique. Mais la question est délicate et mé¡ite¡ajune étude approfondie, Nous y reveindrois du ¡este à propos de Ia secondehypothèse, soit du cas où iI nry a pas cession de territoires.

Le principe du respect des droits acquis, par IrEtat cessionoaire du ter¡itoire, nrest pas seulement Iimité en ce quril wise seulementcertains droits. Il est Limité surtout drune autre façon. Sa raison dtQtremêmc, et la natu¡e des choses, command.ent une restriction de sa portée.

Le principe répond, on lra vu, à une exigence de stabilité dudroit ; cecí ne saurait sígnifier un statu quo définitif, Ia surwiwance éte¡nelleet intégrale des situations acquises. Personne ne prétend que IrEtat cession-naire ne puisselégiférer à1régarddes droits acquis, pouî les adapter à sonorganisation juridique, ceci bien entendu sous réserve dréventuelles stipu-Iaticns conventionnelles et sous réserr.e des garanties générales du droitdes gens ( qu'il reste à préciser ) quant à Ia condition des étrangers et à laresponsabilité inte¡nationale de lrEtat.

Tout comme en droit intertemporel, et comme en droit inter-national privé, par conséquent, la notion ou la doctrine des droits acquisapparait comme fournissant à la solution des I' conflits dtannexion ", nonune règle rigide ou absolue, mais un principe souple, voi¡ô une so¡te derrrecommândation r', pressante, certes, mais non absolue.

En drautres termes, si IrEtat cessionnaire reste maitre de Iégiférer et de modifier à lravenir les droits acquis, il nrest lié, onlra dit¡ que

þai lès'règles générales du droit des'gens quæt à la cmdition des étrangersêt à ia ièsponsabilité internationale de 1'Etat. Ce quril faut constater, crestque ces limites à Irexercice par ltEtat cessionnaire de sa souveraineté

législative ou exécutiwe, ne sont pas tracées par Ia notion, trop irnprécise,de droits acquis ; les limites sont fixées par clratres critères ou standa¡dscomme on le werra par la suite.

2. Le cas des pays nouvellement indépendants.

Com.me lrobserve, dans r Théories et Réa1ítés en D,I. p.r,,M. Charles De Vissche¡ en d¡oit international public ( Z¿-" ¿¿ltioì,^ igSZ

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nie, de pays devenus indépendants

p. 240 ss.) Ie respect des droits acquis en'cas de transfert de souveraineté,principe reconnu aussi bien par la doctrine que par Ia pratique, srexpliquepar 1a colhcidence entre le contenu de la règle et des intérets Politiqucsde IrEtat successeur ( intérêt à ne pas susciter lrhostilité de la populationet ceIIe des autres Etats, je Irai dit, par une suppression radicale dessituations acquises.

Lrexplication convient paifaitement au cas des transferts deterritoires survenus en Europe après les deux guerres mondiales du XX èmesiècle. En core que Itintérêt politique signalé nrait pas toujours retenu llEtat successeur et acquèreur de porter atteinte aux droits acqrris, ( commele montrent les exemples des litiges entre la Pologne et lrAllemagne, quídonnèrent Ìieu aux différentes décisions de Ia Cour permanente déjà citées ).

Mais on voit aussitôt que cette coihcidence driatérêts sera sou-vent inexistante! tout au moins très affa

Ðans ce dernier cas, Ies titulaires des

Comm entant , à lá Commission d.e souveraineté p erman ente( 3 rd seis sion, B l96t ), un projet chilien de résòluti on, Ie premier deces pays ( pays-Bas ) jugea nécessaire de ploposer un amendement con_cernant les investissementsrb.nciensil ; s elon cet amendement, ces investis_sements devi¿ient airssi être protégés conformément au principe genera-lement reconnu de-ãioi-t international du re spect pour Ies d¡oits acqur s( principe dont Irétudò préparatoire dri Sec rètariat, sur le statut de Ia sou_veraineté peráanente sur les ressources naturelle s, lrexistenceen droit internationàl )

A lropposé, ledéf endirent énergi quement,gétêrale, la notion selon laà la ¡econnaissance par IrEcession de ces Etats à lrind

Selon la thèse algérienne, Ies principes contenus d.ans Ieprojet de résol¡tion qui étàit en train drêtré disiuté ne pouvaient sl appliquerque dans le cas de conttats líbremènt négociés et conclus ; et les standardsdu droit international étaient cables aux acco¡ds s, et spé-cialement en cequi concetne e ¡tsation

fi.gure, à leursyeux, à tort ou à raison, drinstrument de conservatismesocial et drobstacle au progrès et à une libèration véritable d"" p.;;ï;"noûvellement indépendant s.

par la suite, un amendement conjoint, Etâts_Unis Grande_Rretagne, fut accepté, qui réserve entièremenì ra question des droits etobligations de lrEtat successeul envers des d.roits acquis avant Irindépen-dance, eu égard notamment aux travaux en couts de la Commission dud¡oit international sur le sujet Í gtate succession ,,.

.Sur quoi, les délégués algériens choisi¡ent d,interpréterqe dernie¡ amendement, óortraìr"me.i à I,opinlon exprimée nettêmentpa._ le Royaume-Uni, corilme taissant à la aiìcr-èïo;'ã;";;=#;Ji;å:"_de la nécessité des droits acquis, et du princife, et d.u montant et de Iacompensation.

droits acquis se recrutent le plus souvent parmi Ies ressortissants de Iran-cienne púissance coloniále. Les droits en question ont, parfois été acquis dan:des conditions peut-être formelLemant régulières, mais extraordinairementfavorables aux colons. Lo¡s même que cela ne serait pas Ie cas, le maintiendes lessortissants de lrex-colonisateur dans leur position acquise, crest-à-dire généralement privilégióe par rapport à une masse souvent misérable,apparait à Iropinion locale comme une suryivance intolérable du régimecolcinial, comme une limitatiön insupÞortable à 1a souveraineté récemmentconqul se,

Si onajoute à cela qúe le respect des droits acquis, surïoutdes droits de propriété foncière, sroppose, plus ou moins complètement,à Ia ¡éalisatioirde réfo¡mes de structure, en matière agraire notamment,¡éformes considérées comme indispensables par le nouveau régime, on con-çoit que ì.es stipulations conventionnelles les plus précises et Les míeux rédigé,risquent de constituer une barrière singutièrement temporaire !

Le principe du respect des droits acquis stétait établi, on lrarappeÌé þIus haut, à la faveur dtune distinction bien tranchée entle droit publicet droit privé, et dans une société où le concept de souveraineté aváit perdude son caractè¡e patrimonia\ Sragissat de pays sous-développés accèdant, parlois brusquement, à Irindépendance et à Ia souveraineté, convaincus deIa trécessité pour eux drune décolonisarion .économiquc aussi bien que politiquepressés de srengager dans Ia voie de sociatisation plus ou.moíns réfléchie et ordonnée, le principe de -la protection des droits acquis fai,t inévitablement

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Le problème, on le voit , est essentiellement politique, etil ne parait guère pouvoir être résolu par Irapplication de critères pure-ment juridiques, mal adaptés à une situation quasi révolutionnaire.

Ce qui parait sérieux, ce nrest pas tellement que les Etatsnouvellement indépendants contestent la force ob).igatoire dtaccord,s conclugou de dróitsobtenus, durant Ia période rr coloniale rr, dans des conditionsde fait parfois fort peu équitables. Ce qui est plus inquiètant crest d,e consta-ter Ia tendance de certains Etats nou.¡ellement indépendants de considèrerIes engagements qutils ont assumés après Iraccessionà Ilindépendance( quril s'agisse de traités internationãEl-lu', a fortiori pourrait-on dire, decontrats, par exempLe de concessions ) comñãiGIpr-imant qu'une sorte dléquilibre momentané, entre des intérêts divergents. De cet état dresprit,Ies manif estations sont multiples..

I1 faut reconnaitre que lés condt.ions sociales et politiquesqui sont souvent celles des premières années de Itindépendance, la rapiditéextrao¡dinai¡e d'une évolution souvent imprévisible, peuvent avoir þQúfconséquences le vieillissement accéléré des textes apparement Ies'mieuxconçus. D'oì¡ la nécessité, admise par beaucoup drEtats, anciens ou nouveaudrunè'so¡te de ¡évision permanente.

Auusi bexplicables que soient, sur Ie plan pólitique, des situa-tions de ce genre, elles doivent, du point de we juridique, demeurer excep-tionnelles. Lrinstabilité de ces acco¡ds, ne sauiait être considérée commeun.phénomène perrnáaent et notmal d¿ns une société digne de ce nom.La moralité internationale, Ia sécurité des relations internationales et, endéfinitive, lrintérêt même des Etats nouvellement indépend nts exigent qurunaccorèoít la loi des parties, et non Þas le point de départ drun marchandagecontinuel. Le principe des droits acquis rejoínt ici le principe I'pacta suntse¡vanda " ; et, puisque la question des invêstissements est vitale pour lespays en voie de développement, rappelons-nous que 'r Ia meilleu¡e garantieque lron puisse donner aux investissements nouveau se trouve dans Ierespect des investissements passás ( Iuchaire, dans " La personnalité moralet ses Limites ", Paris 1960, p. 174)-

Deuxième hypothèse : La théorie des droits acquis en dehors de toutchangemeàt de souveraineté.

( .Prtteinte à des d.roits acquis par Itinte¡vention législativeou exécutive au sein du même ordre ìuridique

-2A-

Dan ce deuxième cas, il semble que Le principe du respect desdroits acquis des étrangers soit inoins bien observé que dans la premièrehypothèse, celle de Ia succession dlEtats (comme lrobser.¿e M, Charles d.eVisscher, Théories et Réalités en droit inte¡national public, 2 ème ed. 1955,p. Z 4Z ). La pratique internationale du.XX ème siècle, et surtout depuís lapremière guerrê mondialé, fournit en'effet dtabondante exemples dratteintesauldroits acquis par des étrangers, pa-rfois o violation drengagernents formersde lrEtat I

Les motifs particuliers qui, dans le cas de ra cession de:territoire,poussaient en général lrEtat acquéreur à respecter les droi.ts acquis, dans sonPropre intérêt font üi. défaut. .

Le principe du respect inte¡national de ces droits connaît en tousoits destreect destle

paiement drune,indemnité aux étrangers,

- )a -

Cependant, même sril est .souvent mal observé en prátique, leprincipe des droits acquis a reçu drassez nombreuses consèc¡ations dans rajurisprudence les, je meborne¡ai à en Deux d.atentde la période d.raprès_guerrq. Il sra trage, ( toutesdeux reprodui internationalarb ations-Unies, re s Ç et 30Ç ) :lral religieuses expr celle destéc eurs noruégiens. le nrest autreque le 23 aott 1958, al ent¡e lrArabieSaoudite et LrAramco.

l. Ltaffaire des ses au4 septem

Les faits de lraffaire sont connus : après la ploclarnation de IaRépublique pottugaise, un décret avait été pris, en l!10, ordonnant la saisiede plusieurs étabrissements rerígieirx¡ protègeant leurs ressortissants, la

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30- )o -

tr'rance, I lt"

indi.vidus1913 ( artIten statu €r'

à défaut,: t de

I'équité ".

Un des aspects les plus intelessants de !talfaire est sans doute

la thèse défe-'nd.ue par le Gouvernemént Britanniqug' Permettéz'fnoi dr-'en

citer cluelques Passages significatifs i r"' ". .. The government of His Britannic \4ajesty

d.o not in any way intend to constitute themselves

. jtdges of the legality or validity, from tl.e point

Ithe- of view of/internal law of Portugal, of the actsI

"- of the Portuguese Gowernment. This is a matter,:of internal politics with which they have no 'concérrl.

But His Majestyrs Gowernment is of the opinionthat the Portuguese State, in taking possession as

it has done, of property legally acquired by Britishnationals in conformity with the legisì'ation of Portugaland under the cover of Protection of its public and '

Private law, has acted contrary to the prínciples ofthe law of nations vrhich governs the relations between

the States. rr

Le Gouvernement britannique reconnaissait que Ies étrangetssont soumis.aux lois du pays ( lois " de police et de sureté"r', lois régissantIes droits sur la propriété foncièie ). Mais il.affirmait qui iI en résultàitdes obligations Pour le Portugal :

". .. In retu¡n for this subiection, foreignersare entitled to count upon legal Protection t

and. guarantees unde¡ the cover of which theycame into the country and acquired their rights' "rr

La thèse britannique est interessante aussi en ce qurelle rejetl

expressément Itargument PortlEà'idi dela non-discriminatior-r ( r' tràíïement..-tíor"l " ), et souìigne la Position particulière des étrangers, qui sont pri'de tous droits Politiques.

DnJin, le mémoire britannique formule avec une 4etteté parti-

culière lardoctrine des d¡oits iìcquis : :

" Selon plusieurs áuteurs, il y a là une formulation véritablementL exemplaiie du princip/la protecticin des droíts acquis ( ûf. Fachiri, in

BYBIL, L925, p. 168, Schindler, in Annuaire Suisse de Droit intéinatii:nal,1946, III, p. 9t )'.

Quant'à la setence elle-même, qui donne un rôle importantà ltindividu dàhs ce proãEi-iãTEi.ational, elle considère lrexpropriation dé-cidée par 1e Portugal comme walable, et le portugal comme devenu propriétaire ddes établissements. Mais, eñ-ãõ:rt-iãpartie, Ia Coúr condamne le portugalà payer aurréclamânEúne indemnité globale et forfaitaire;

Le Portugal, il êst vrai, ne s'opposait pas vraiment à la thèsedes pays réclaáants, sélon lesqùels leurõ ressortissanti s'étaient installésau Portugal Èur la foí il'un système juridique clui garantii la propriété,s'affirmai't totalement rèsÞectuèu du droit et de I'équité, le Gouvernementportuguais se fondaiÉ éurtout sur un argument de caractère quelque peutechnique, et considèrait que les propriétaires de.s biens expropriés nrétaientpas les individus protégés par les trois pays, mais bienconstïstuées en vertu du d¡oit portuguais autorisées parne dewait pas empêcher la Cour drordonner le paiemerit

"... Respect ofjproperty, respect of acquiredrights, .. , arê legal principles of all civilizedcountries. Næ it is upon the securitywhich they assure ancl the confidence they inspirethat the ielations éntërtained by the nationa witheach otþqr are based. . . "

des associationslui. Cette thès

drune indemnité, dontle montant fut fixé ex ae et bono;

2. Ltaff.aite des armateu¡s norvégiens( Sentence du 13 octobre lÇ22)

Lrorigine de lraffai¡e tient dans la réquisition par les autoritésamérièaines, pendant la première guerre mondiale, de navires norvégiensse trouvant dans Ies ports américàins ou eri construction aux Etats-unis.La loi américaine, qui autorisait le président à ordonner ces réquiéifíons,était drailleurs p rotectrindemnité. Comme lra ramé¡icaine de contraireI3ilt prr des autorités amations de la Norvège.

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-32-- 3l -

tafsti

La sentence prononcée Par ttois arbitres ( Itun Américain,lrautre Norvégièn et le troisième Suisse ) est de premier ordre ; je mebornerai å en citer deu passages, particulièrement remarquables, qui con-cêrnent lrun 1é principe même de la protection des drcits acquis,, lraut¡e

droit dropposition qué lui reconnaissait Ia loi rocale contre ltcg'oi:ra.tlondont il était victime- J'ai cité déjà ra décision drun arbitre

"ri"""] rè jugel, qui proclame fermement f" jrilr.lpets n pour lrEtat exproÞliant J.a pro_p on équitable le plus vite poÊsible

MaiS je voud¡ai passei maintenant à une d.écision plus récente,qui est importante non seurement pouí les intérêts qui furent en- jeu dans relitige, mais par la nature des probrèmes sourewés et surtout p"t'i'."gr*"o-tation et la motivation de la sentence : iI sragit d.e la SentencJa¡bitraTe danslrarbitràgê Arabie Saoudite-A¡amco^

on de juste compensation.I No state can exe¡cise towards the citizensof another civilized State the power of eminentdomain without respecting the PloPerty of suchf {oreign citizens o¡ without Paying just compensationas dete¡mined by an impartial tribu nal, as isnecessaryjrl

Quant à I'indemnité, la se¡tence déclare ce qui suit :

'r Just compensation implies a complete restitutionof status quo ante based, not uPon future gains ofthe United States or other powers, but upon the Iossof profits of the Norwegian owners as còmparedwith.owners of similar property. "( UNRIAA, vol. I, p. 338 ), : .

On peut encore rappeler -que dans sê qentence, Ie Tribunalconstate que Ie droit public des deu parties en cause, notamment Ie cin-quième amendement américain, colYrcide avec le droit international publicpour protéger le d¡oit de prçri_été.

Ces ôitations Permettent de õomprendre que la doct¡ine deDroit international attache généraletnent une grande importance à la décisiondes Armateurs norvégiens, dans laquelle elle voit une proclamation et unereconnaissance fo¡melle de la protection du droit de propriété privée parle droit internationaì public ( Schindler,," Besitzen konfiskatorische Gesetzeausserter¡itoriale Wirkung ?. r', Annuâire Sui.sse D¡oit international 1946,III, p: 89 ).

Bien d'autres décisions pourraíent encore être citées, notamm€de la Cour perinanente dtarbitrage (par exemple dans le rrRussian indemnitycase f r I9Iz, I'aJfaire des'French claims against Peru r' 192L, ou It¿ÍfaíreCanevaro, qui reconnaissent plus ou moins implicitement le droit de propriéfJé pourrais évoquer lraffaire Sabla ent¡e les lìtats-Unis et le Panama( ÄJSf L934, voL.28, p.60Z ss. ), oü.la reconnaissance des droits acquisprend un relief particulier du fäit que cle Sabla nrawait pas fait usage du

3. Sentence albitialê dans Itarbi e Arabie Saoudite - A¡amco

sur le principe des droits acquis; la sentence rendue par re Tribunar arbit¡aldans lraffaire de lrAramco ( et présidée par le professeur Sauser_Hall)est tout à fait catégoiique : on sait que, dans le dispositif (p. ZS ) le Tribu_nal a estimé que les'droits et obrigations de lr^ram.o, .oàf"goi. corcession-naire " ont la natúre de droits acquis et ne peuvent pas être modifiés pai'E-tat concèdant sans le consentement du concessionnaire.rlDrautre part, comme je rtai déjà dit, je crois, une des raisons fond.amentaresde la décision, sinon inême la raison principale est que :I T'hê principle of respeôt for acquired. rights

l¿1"- is one oy'fundamental principles both of public' international law ancl of the municipal law ofmost civilized States. It has beea affirmed, by a wealth o{ judicial dëcisions. r' (p. l0l )

On pourrait citer encore drautres passages dans le même sens.Par exemple les suivants:tt . ,. The concession has the nature of a constitutionwhich háô the effect of conferring acquired. rightson the coirt¡acting parties " (p. 6f ) ( On note-ra Ieplu;iel : contracting parties )

Et enfin cè passagé, þàrticulièrement significatíf en ce quriléclai¡e la felation entre re prinôipê des d.roits acquiri et ra notion dé ra sou-veraineté de.Etat, ( si souvenl invoquée poo..;o"itifi"r r" -i". ¿ïã.,du principe ):

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-34-

" Nothing can prevent a State, in the exerciseof its sovereignty, from bindiug itself irrevocablyby the provisions of a ccn3e6sioÉ and from grantingto the concessionnaire irtetractable rights- Suchrights have the character of acquired rights. . . "( p. 6t ). (t)

Pour apprécier la portée exacte de Ia sentence, à distinguer r

I'influence générale qurauront vraisemblablement ses motifs, il conwientde rappeler biièvement quelques circonstances :

Leq deuparties au litige reconnaissaient, comme la senten<Ie rappelle, le principe du respect des d¡oits acquis. Le GoùvernementSaoudite prétendait que " the object of the arbitration is merely to determjne what are the rights granted to the company ". ( p. 35 ). Certaiás 3é;aietentés dren conclure, peut-être un peu irite, comme on I'a fait parfois àpropõs de Irarbitrage de la Baie de Delagoa, que lrabsence de contestationsur Ie principe diminue la portée de sà consècratLon par le Tribunal.

Cette conclusion me parait tout au moins exagérée, surtout sion tient compte du fait qurun certain nombre des arguments invoqués parles représentants du Gouvernement, par exemple sur ,-1a souveraineté, etsur le droit d.e lrEtat de " règlementerrrle transport, aboutissaíent indi-rectement à affaibli¡ beaucoup Ie principe du ¡e6pect des d¡oits acquís.

Il faut surtout se rappeler lrorigine du litige, et la naturedu problème essentiel posé au Tribunal, te1 que celui-ci I'a défini : il sragisait en substance de la compatibíIité de deux concessions, accordées suc-cessivement par le même Etat à deux étrangers,offre beaucoup plus dranalogies avec les problèminterne quravec celle, par exemple, des effets dlpropriété étrangère.

Le Tribunal ayant ain6i cláfini lrobjet du litige, il semble¡ésulter que les motifs retenus par Ie fribunal nront de portée que dans Iecadre strict ainsi déIimité. Donc ces motifs ne dewraient pas être automa-tiquement appliqués ou transposés à drautres situations et draut¡es problèncomme ceÌui de la responsabilité internationale de lrlltat en cas de nationa-li sation.

(I) cf, Annexe;

Dans Ie même sens, on pourrait invoquer Ie fait que Ie Tri-bunal considère Ie principe du reepect des d¡oits acquis - appliqué à la pos-sibilité pour le Gouvernement de modifier unilatèralement, par lroctroidrune seconde concession, Ies droits accordés par lui à un premier conces-sionnaire - coä¡me étant ( aussi ) un principe de droit musulman hanbalite.Stagirait-il i:n ¿é¡iniiive, pourrait-on se d.emander, drune simple questionde d.roit interne ? Dans ce cas, í1 se¡ait tout simplement e¡roné de citercette décision comme consacrant un principe valable dans le¡relations inter-national e s .

En vérité, une pareille interprétation ne correspond pas au sensvéritable de la sgntence. Celle-ci çpnsidère expressément ( p. I0I ) feprincipg des dioits acquis comme un priucipe fondamental d.etional publ,ic,. Et, âprès avoír rappelé que Ie principe était coabondant-e juri.sprudence, elle ne cite comme exemples que des décisionsinternatiõnàlés (cómmê lta remarqué Mme s. Bastid, '-Le d.lâit internatio-nal public dans la sentence de lrAramco, Annuai¡e français de droit inter-national, l9ó1, p. 300 )t si la décision ajoute enfin que J.e principe est¡éconnu par Ie droit hanbalite, crest, semble-t-iI, à titre de confirmation, eten quelque sorte par surabondance de motifs.

Reconnaissons.toutefois que Ia sentence nrest pas dénuée dram_biguité sur ce poirt. ñ'une part,'elie sembl. mettre I'accent sur son caractè-re internationàl du principe et ne cite que des décisions internationales,judiciaiies ou arbitrales..Drêutre part, on sait, que; drune manière générale,le T¡ibunal a pris soín dans une assez large mesule,sur le d¡oit de lrArabie S I'par Ia Concession elle-même. Quant à la nature t des'dtoits acquis, il ntestpeut-être pas tlès aisé de saisir la pensée exacte du Tribunal, sur la basedu passage peu explicite auív2_nt, et déjà cité :

". . . One oi the fundamental principles bothòf pubtic international law and of the municipallaw of most civilized States. . . I'

On a vurdans une première partie de cet exposé, que les législa_tions internes, soit sur le ter¡ain du droit intertemporel, soit aussi surcelui du droit inte¡national privé, pgqye{lt díverger bqaucoup sur la notionmême d.es aroili åco-uis et sur la portée d.u , principe r, ¡ II parait donc trèsdifficile, voire impossible, à mon avis, dry trover un de ces " principes

Pour.dive¡ses raisons, par conséquent, iI apparait donc que leTribunál invoque 1e principe des d.roil s acquis d.rabord.o-L. un principede droit international et ensuite seulement.o--- rr--r princípe de droitin ti sul man -

Ainsi énoncée, la questioes de dro_ifitertomporelune nationalisation sur la

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- Jb --35-

øénéraúxde droit reconnus par les nations ciwilisées rr' selon Ia céIèbre

ä-tå"iäì.ìl"li. se (r) ao siatot de la cour inte¡nãtionale de juetice'

En outre, et de toute façon' rien ne cómmande à Priori que la

doctrine des droits acquis doive awoir le même sens et la même Portée

en droit interne et en droit internati public. Les con sièèrations qui

précèdent laissent déjà entendre que' selon notre oPínion, ce nrest pas le

cas.

De très nombreux traités, en ef{çt, recon¡r¿lssent, awec d.esmodalités diverses, le priniipe de la protection des droits acquis d.esétrangers,.en particulier du droit de propriété ( le terme étant prisdans son.sens le plus targe ). par¡¡i 6s ¡.r"i¡gs, les plus intéressants àtous égards semblent être ceux de comme¡ce ou drétablissement ( voirpar exemple les fameux rr FCN, treaties lt conclu.s par les USA ). i:

:

A cela srajoutent drautres sortes de traités, notamment lestraités de paix draprèq les deux guerr€s mondiales ( ceux de 1947 éta t¡

Ce qutil Peut y avoir de commun' en revanche' au droit inter-

national public et "o* ãittt-" ordres juridiques internes' dans Ia notion des

droits acquis, c'e"t seulement I'expression drune exigence fondamentale

de justice minimum, de stabilité juridìque et non Pas une r-è,gll:' ni même

;;:;;;i; ;GfL. jé'e'ar aux cõntours ,suJfisament

déIimités, , :

- : .Mais¡ jranticipe. Et je ne puis m'étendre davantage sur la

seotence rendue dans lraffaire de lrAramco' malgré son exceptionnel inté-

rêt.. Quoiqu'il en soit ãe lrinterprétation que Iron puiSse donner à certains

passages un Peu obscurs de cetie décisión; encore troP peu connue' la con-

firmationformelte,etmêmesolennelle,QurelleaPPorteauprincip-edesdroitsacquissemblede'oirexerceruneinfluencequid'épasseleslimitesrelativement étÌo.ites de I'objet du litige tel quril a été défini par le Tiibuna

II faudrait aussi pour être complet' étudier le principe du res-

þect des atoit" .tqoi" tel qulíl aPParait sin-

gulièrement abondante et æmplexe' dep Ie

Gouvernement du,Rgjrarme.de Naples en , ----r-^-^:+ Lââ. trac-

;; * it;;t" do sáùrq jusqu'à.nos jours' ceci mrentraînerait beaucoup

Crop loin et d'ailleurs tt-tt"-p"t*tttrait Peut-etre Pa6 des conclusions t¡ès

précises. Les nombieu* t"" ãtittt.t tion diplor-rratique en faveur de res-

sortissants léséc à Itétranger dans l' fd¡oits acquis oni abouti souvent à

des solutions plug potitiquJs que juridiques' drune grande v¿îiéré' et dont

ti.",.átttt.tr"^de d¿duir; at" tègrt" générales Présentant un minimum de

;;;;;": Le paiement dio'" iJ¿"-tité semble /avoir été dt' dans dè

;;;;;.* ."", ã ¿." itcteurs politiques' économiques' droPPortunité'

s interessant dtétudier laes divers droits acquis de

égard des conventions, dent.

drune manière générale plutôt plus faibles que ceux draprès l9l9 à cetégard ), des traités drarbitrage, etc.

Les divers accords bilatèraux conclus ayec les þays d.e IrEstsse, pour règler le pioblème des indem_loin drêt¡e dénués d'inté¡êr à c.t égãiãl-s conclusions tiès ptécises, Ies Etats

nationalisateurs srabstenant évidemment de souscrire à des décla¡a'ti¡¡nsde principe concernant les droits acquis ou lrobligation drindemniser !rl nren reste pas moins que lrexistence même de ces t¡aités drindemnisationne peut pas srexplique¡ totalement par de sinples considèrations dropportu-nité ; et cette pratique conventionnelle paraît bien conJirmer, même chezles Etats nationalisatèurs, une reconnaissance bon gré mal gré, druneobligation drindemniser pour Ies êtteintes à la propriété étrangère (I).

- Relevolá enfin, pour terminer cette brève évocatí.on de laprotection conwentionnelle des droits acquis, la multiplication ; cesdernières années, des traités bilatèraux concernant, entle autres ou piín-cipalement, la otection des investissements De Irawis de beaucoup,

traduire une crise de confianced¡oit internatiohal général. Il nrest Pasquestion de pouvoir étudier.ici,,,sþus I'angl€ de Iâ proteôtioÉ des droit s

acquis, Ies divers types de t¡aitÉs bilatèraux, trèá en faveur, on le saitnon seulement aux Etats.Unis, mais dañs deb,pays comme le Japon,laFranç.e,, llAllemagne etla SBisse (Z):

(l)'La p¡q1ique tats de lrEurope orientaie a été étu-äiée en détails er, il La plotection de la propiiétéprivée en droit , RCADI 1956, II, vot. 90,p. l?9 er ss.

(z) ct. pa. exemple la récente thèse d'un jeune docteur en d.roít de Ia !-acul-té de Genève, M. Preiswerlc; La protection des investissements privésdans des traités bilatèraux, Zuric}. 1963.

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-37- - 38 -

. -r On me permettla cependant de relever ici, en passant, 1a po-sition très nette de mon Pays, la Suisse, qui srest toujours tenu.au principedu respect iríternational des droits acquis avec une ferr¡eté toute particu-lière, parmi les Etets européens. On pourrait en citer de très nombreusespreuves; sans parler même des nombreuses sentences albitrales Pronon-cées par des arbitres suisses,

Répondant en I9Z9 au questionnaire de la S.D.N. sur Ia codi-fication des règles relatives à la respoueabilité des Etats ( S.D.N. doc. C

M 69" I9Z9 V, n9 ) Ie Conseil fédéral suisse souligaait que Ia protectiondes droits acquis est ltun des principes reconnus du droit des gens. Ce poirde we a été défendu par lui à maintes reprises avec netteté. Crest ainsiqEe, protestant contre une loi roumaine réIatíve au contrôIe des changes etaux paiements à Irétranger, Ies Autorités fédérales répétaient, il y a plu-sieurs année's déjà :

rr Le d.roit des gens oblige tout Etat à protègerla propriété des étrangers. Or les dloits contractuelsfont pætie de la propriété. Il n'est donc Pàs admissíble

, qurune partie contractante soit lésée après coup par,: une tel.Ie atteinte de lrEtat à des droits acquia.r'

Cf¡ Salis - BurckharÉt : Le droit lédéral suisse,vol. I, no, 140 bis, cíté par Guggenheim Traité I,

. p. 338 ).

Dans un esprit a¡ralogue, Irarbitre suisse Mx Huber, dans sor

rapport sur Ies décla¡ations Èritanniques au Maroc espagnol ( 23 octobreI9z? RIAA, U.N.; vol¡ Il, P. 647 ) déclarait tr' ..iI peut être considéré comacquis quten droit international uo étranger ne peút être privé de sa Prôpiiété qans juste indemnité, .. ". Lrannée suivante, ün àutre juriste suisse,M.1Fazy, rendait ia décision que jrai déjà citée dans I'affaire Goldenberg( Rrl'A, u.N. rr, p. 909 ).

.. Nous Pouvons conclure de cet examen rapide de la jurisprirdence interriationale, complété par quelques aPerçus de la pratique diploma-tique et conventionnelle, qu'il semble bien exister une règ1e de droit ínter-national. , coutumièle à notre sens, protègeant les droits acquis des étrang

Reste à savoir ce uril faut entendre en droit internatíona1,,par I'droits acquis

La queçtion est délicate et semble embarrasser les meilleursauteirrs. II est eà tout cas admis que Ia propriété foncière est un droitacquis, Ie prototype, lrarchetype des droits acquis. Il faut.sans doute y.ajou-ter les autres d¡oits réels, comme les hypothèques. ( Cf. la liste dans

. Bindschedler, op. ci|., p. ZI7 ss. ) - G..r.otim déjà considèrait lapropriétécomme un d¡oit naturel, dont lrEtat doit assure¡ le respect-

Q.uren es et plus particulièrement desd¡oits contraðtuels ? er, p. Zl?.), il va de soique les éréänces q,ont s,

Pourtant, il fuLune époque où plusieurs Etats distinguaientassez nettement, en exerçant leu¡ d¡oit de protection diplomatique, les casdtatteintes au droit de propriété et les cas d'atteintes auóoiEcontractueh- Drautre part, Ie få.it qurune distinction semble possible, semble attes|êrlpar une tendance récente à renforcer, voire remplacer, la protection inter-nationale de Ia propriété, par une protection du contrat passé entre IrEtatet une personne étrangère ( par exemple une société ) au moyen du principeI'pacta sunt servanda r',

'Quoi qu'il en soit, ni lå théorie juridique, ni la pratique ne recommandent une pareille distinction su¡ le terrain de la proiection des droits ac-q'is. Led quelques citations faites plus iiaut montrent qire cette distinctíonnrest pas faite dans Ia pratique moderne, qui emplóie le tèrme propriéiédans un sens large, en y incluant les droits contractuels.

La raison théorique èq est.simple : en l,absence drune définition¿propre au droit internatiônal public de ce qui est p-ropriété et d.e ce rj.,ri estcontractuel, il :ne peu chaque lé définircê qutil entenéI par dro u pai dro droitcomparé enseigne que sont pas loinde là. Même une distinction aussi fondamentalè pour tant de júiistes européens,que celle entre les droits de créance et Ies d¡oits réels nrappa.ralt pas, ouque !-ryne manière, relative, dans les droits scandinaves.

Quren est-i1 alor¡fi.es concessions ? J'ai parlé déjà de leur.s.ort dans.le cas d.e succes"ion-d'Etãtlliããlro-its des concessionnaiïes sontcorsiàdrés þ"'. '."rt"ir" auteurs comme tles å¡oits mixtes, englobés cependant,comme les d¡oits privés, dans la protection des droits acquis en raison de leu¡carctère contraciuel ei de leur valeur économique.

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principe llue nous étudions est en effet,principe du respect de la parole donnée

ici, soutenu et renforcé par le( pacta sunt servanda ).

Drautres nrhésitent pas à Ies classer parmi les droits publicssubjectifs ( Cf; Bindschedler, p. 2I? ) mais à led ranger aussi. parini lesd=or!:::_q"i:, étant donné leur valeur Patrimoniale et surtout le titrespécìal sur lequel ces droits sont fondés.

Si I'on considère 1a pratique et spécialement Ia jurisprudenceinternationale corctnant Ia protection deS droits contractuels, or1 consta-te qutelle confi¡me les conclusions théoriquea qui précèdent. Drailleurs,la protection de ces droits Paraft, à certains égards, Plus facile à ¡éaliselque la protection drautres droits acquis comme celui de Ia propriété ; Ie

cel-ui' ¿þ11¿ êrie ¿" Delagoa, lraffairè dtr Shufeldt claim, entre le Guatemalaet tes Etáti-Urris, ( décisiondu?4 juillet 1p3O ; cf. British Year Bookt931, p."I?ô )', affaire int3¡esbanie pour Ia question de savoir dans-quellesconditions une concession peui être révoquéê sans qurun daôit acquis soitviolé ; un motif bien connu de la sentence du Chief Justice of British Hondu-¡as, ' m'é'rite di être rapþelé : -l

' " .. It is a settled prinCiple of international law. '

''thàt a soweleign cânnotbe peimitted to sèt uÞ

- one of his own mirnìcipal laws as a bar to a claiin t'

by a foreign sovereign for the wrong done to thelãtterts subjectrr ( bf. à cê sujet lraffaire dès ZonesFranches: CPJI.)

On pourrait citer aülsi diverses décisions du sura¡bitreRalston, dans les arbitrage.s vériézuéIiens ; ainsi dans lraJfaire MaÍtini ( en-tre I'Italie et Ie Vénézuéla );'décision du 8 jirillet 1904 ; ainsi dáns LraffaireOliva, de I903, ent¡e lesjmêiiiès pâyq, oìr le su¡arbitre constate la responsa-bilité du Yé¡ézréla pour rupturé dé'cônt¡at car, ilit-il, l¡ne nation ðommeun ind.ividu est lié par ses contrats, èt biên qu'elle aít Ie pouvoiå de Iesrésoudre, elle doit payer'Ies dommages-intéfêts en ¡ésultant.

Un cas célèbre est aussi celui de 1" Co-p"g"it d.."ïigde ltOrénoque ( sentence du 2 févrieÍ 1904, suivie, à la suite drun nouveau

-;p"oãG;-ã-tune nouvelle sentence de Ia Cour permanente drarbittagele 25 octobre I9l0;

Plusieurs arbitrages concernant les concessions ont eu Pourorigine, drautre Part,-Ies initiatives dtun rtouveau gouvernement, succè-dani au goot.tt"*.t(ãoncèdant, ceci sans parler de I'hypothèse, déjàenvisagée, dtune cesåion de territoire; r"

On sait enfin que Ia Cour Permanente et la Cour inte¡nationalede justice ont été saisies, avec plus ou moins de succès, de liiiges con-celnant des concessionnaires, dans lraffaire Mâv¡ommatis et, plus prèsde nous,,dans lraffaire de lrAnglo-I¡anian Oil Compàny, ( dans laquellela CIJ se'déclara incbriPéténté, on le sait ).

Enfin, je ne puis guère trouver ü.raffirmation plus catégoriquedu caiactère de droiti¡ acquis quront les d¡oits drun concessionnaire que

òelle de la sentenôe arbitrale, déjà cítée, dans lraffaire de IrA¡amco;

Crest ) dire, en Passant, que nous admettons la force obliga-toi¡e des contrats passés entre un Etat et un particulier étranger, contrai-rèment à Ia thèse ingé4ieusement présentée Par certains, mais inadinis-sible, selon ì.aquelìe il àèrait " impossible à un Etat souverain de se líeri¡révocablement envers un particulier étranger ou natìonal en dêho¡s drunrconventión i'ntei-étatique " I G"otges Vedel, Rapport au Congrès inie¡nati<nal delrarbitrage, Paris, mais 1961, P. 9 ).

En fait, la jurisprudence internationale a reconnu à de nom-brèuseÊ reprisqs la resporisabllité internationale de lrEtat Pour desatteinteg portées au d.toité contractuels drun étranger; Ceci , en Particulidans les aJfaires de maichés de fournitures, ainsi que à propos de contratde concessions.

POur la première hypothèse, ( marchés de fournitures ), onpeut cì.ter Itaffalre des ¡éclamations françaises contre I e Pérou, en cequí conceine la maison Dreyfuss tr'rè¡es ( sentence du ll octobre'1920,UN RIÀA, wol, I, p. 347 ). Les " Mexican claims commissions rr, entreles deux guerres mondiales, ont eu aussi. maintes occasions de se pronon-cer sur des atteintes âux droits òontractuels des étrangers ; r-oir parexemple .( 30 ävril 1929 ; cÎ . American Journâl 193

P. 199 ' On peut citel aussi I'aJfaire de ltlllinoisCential L 1926, p. 79a ), jugée Par la CommissiongénéraLe des réclamations entre Ies Etats-Unis'et Ie Mexique, etc. etc.

Quant aux contrats de concessions, il est à peine besoinde rappeler combien souvênt les d¡oits qui en découlaient ont été Iésés pardes interventions unilatèrales de lrEtat concådant, ei combien sou.entla jurisprudence internationale a eu Iroccasion de sroccuper de ce genrede problèmes; Bo¡nons-nous à citer ici, quelques cas cLasiriques, tels

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.- iétìriens de citer quelques catégories de d¡oits qui, selon lapratique inte¡nationale, peuvent être considérés d'i¡ne manière généralecomme des droits acquis. Examinons maj.ntenant quels droits ou intérêts,selon cette même pratique/ne sont pas des droits acquis, ( ceci, toujourssous réserve de circonstances spéciales ).

La clientèle. Lrexemple tout à fait classique sur ce point estI'affaire osc^i-õ1ìãill-õÞJl, série A-8, no. ó3, p. 88 ), tranchée entrele Royaume Uni et la Belgique par la Cour de La Haye.

On se souvient des faits de la cause : le citoyen britanniqueChínn possèdait une entreprise de transport fluvial su¡ Iç Congo. Legouvernement colonial ayant báiE5é les tarifs de Ireatreprise parastatale" Unatra ", Chinn perdit sa clientèle, tout comme, du reste, drautles ttans-

-l p.o¡-tqqrs. Le gôuvernement britannique cònsidèrait que cette mesure dlautorité¡ ai'ant eu pour résultat de priver M. Chinn de la perspectiwe-de poursuivre fructueusemt ses affaires, constituait une violation des prin-cipes généraux du droit international et notamment du re4czt d.ss drolts,acqui s .

La Cour permanente a rejeté cette thèse, en ces termes :

" La eour sans méconnäître le changement de 1a

drune situation différente. Aucun d¡oit acquis nrestviolé dans d.es cas se6blabiãlJã!-IETãI|-

Ce I' leading case Ir est généraleaient considéré, dans 1a d.oc-trine, comme marquant Ia Iimite possible de la notion de droits acquis ;aux droits de propriété et aux drois contractuels, protégés par 1e principe,sropposeraient des droits ou intérêts cgmme le rrgood will I' et drautresintérêts liés àla conjoncture économique généiale.

On peut rappeU:r cependant que ce jugement, assez discutédans la doctrine, fut ¡endu par six vois contre cinq. ( Cf. Van Essen,S¿-!:lg:_Y:::i¿1, p. 145 : rrA Reappraisal of Oscar Chinn rr ; M. VanEssen voit dans la décision du Gouvefnement colonial un abus de droit.).

le même ordre drídées, il .faut se dem¿f,ldc;¡si Ia créationPar lf Etat dlun monopole. lèse ou ne lèse pas des'rdroits. acquisrr . ._

La question a t¡ès fortement djvisé la doctrine lors de ia'céIèbre affaire de lac¡éationen Italie ( en I!ll ) å'ur moropole áe lrassu-rance-vie. Lrinstitution de ce monopole était-elle une expropriation indi-recte, obligeant Irltalie à indemnisatíon ? plusieurs j,uristes éminentsdè l'époque, comme Clunet, Anzilotti, Wehberg, etc. Iront pensé, tandisque drautres,.comme Fischer-Williams et Jèze lè niaient. (Cf, aussiFachiri, Eipropriation and Inteinational [-aw, BYBIL l9?5, p. L66).

La création drun monopole - apparaft donc comme un cas li-mite et il serait peut-être imprudent draffirmer drune manière absoluegénérale que cette création ne lèse jamais les dtoíts acquis ; selon lescirconstances, la décision sembre pãäãìi-ert.aîner une obligation interna-tionale de réparer, entous les cas ( etpeut-être uniquement ? ) lorsqurily a abus dé dtoit ( Cf. Xiss, Irabus de droit en droit int,ernatíonal, paris1953, p. 123 ss. ).

, Lrexemple de I'instituiion d'un monopole illustre I'idée admiseÞart Ia majorité des auteurs, que les libertés individuelies ( notammentceIIes du commetce et de lrindistrie ) bien que protégées par un régime

situation éconoiniqueariìené à liquider sonchantier, ne Sairtait

de M. Chinn, Iaquelle lrauraitentreprise ile tiarispôrt et son

ercevoir dans sá situätionoiiñ',ti""r.1:.t:et Ià posslblIlte

session drune cli entèl e, un véritable droit

aciuis. Une córijoncture écoóomique favoiable, áinsique Irachalandage, sont des éIéments temporaires susceptiblesde modificatíòns inéwitabtes ; Ies intérêts iles entrepreneursde transports ont pu subir des atteintes par suitede Ia c¡ise générale et des moyens pris en we de lacombatt?e

Aucune entreprise, surtout une entr_eprise de commerceou de transpoits, dont le succès est Iié au corrrs

changeant des prix ét des talifs, ne peut échaþper auxéventualités et au risques qui sont le résultat des conditionséconomiques générales. Certaines indùstiies peuventfai¡e des grands profits dans une époque de prospéritégénérale, ou bieri en plófitant drun tràité de commerceou drune modification des dfolts de douane ; inais elles ''sont aussi exposées à se ruine¡ et à sréteindre à cause

ömpoitait Ia posdren tirer profit

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constitutionnel en bien des pays, ne sont pas des droits acquis, car eIIes

sond'susceptibles drefre modifiées dans Ie cadre du d¡oit national rl

( Guggenheim, Traíté, vol. I,: P. 332433). Cette constatation Pourrait toutausei bien être faite, semble-t-íI, Poul 1es autres droits et situation - ju-ridiques, eux aussi susceptibles dtêtre rnodifiés dans le cadre du d¡oitnatiorial, (ainsi quron va le vbir plus loin). On mesure ici, une fois de pJus,

la difficulté euril y a- difficulté reconnue du reste par ltauteur qui vientd'être citéià " déterminer quels droits ou quelle*situations juridiques,constituent d.es dr,oits ai'quis " ( p. 332 ). ' :

Indiquons enfiir qu'iI nry a pas de droit acqu.is à une marge de

bénéfice, toujours drune façon générale, ni à Ia valeur intrinsèque drune

monnaie ( tout Etat ayant le droit dé détermine¡ lui-même ses monnaies' cor

me Ira reconnu Ia CPII dans Irajfalre des EmPrunts serbes ( Série ,{, no.

ZO-ZI, P. 44, lZZ. Sur cette question, voi¡ notamment Bindschedler, op'cít., p. 225 ).

Qüe coriclure de cette brève rewe¡ de cet essai de classifica-tion des d.¡oits en droits ãcquis et droíts non acqlris ? Tout drabord, encoreune fois, la grande diffiiulté quril y a à saisi¡ et à préci.ser le conceptfuyant de I'd.roit acquis ". Bien des prónoncés jurisprudentiels, bien des

commentaires de doctrine se ramènent, en définitiwe, à des aJfirmationspurestetrdiinples. On sant quril ya des cas, aI, oìr une

situation átablie mérite d'êt¡e p:'oiég'e s éactionsrexplique ì.e plus souvent , Par un t¡¡g=, 'équité'Mais iI n'est pas aisé de passer de l5-"ilt t t de dégager

une notion juridique suJfisamment précise, susceptible de

f<iu¡nir Iâ base drune règle de droit international.

I C'rest qutil nry a pas de notion autonome, ProPle au droit inter-nationâI,'dé " droit acquis r'. ( Cf, Guggenheirñ, Traité I, p. 332).On peut en tiouver laþreuve en étudiant, par exemple, Ie type I-e plusaciompli de " droit acquis !r, soit Ie droit de propriété.

; Dans une inté¡essante étude sur " Expropriation cf foreigncompanies ", (ÂJIL 1941, wol. 35, p.243 ) ; He¡z analyse ce droit acquis

typíque en droit intelnational public.".;.Since the law of property is a matter regulatedby municipal laws oÍ the different countries in various

ways, it might be expected that intelnational lav¡,when dealing with property worild havé iis own definition.. . "

Or il nrexiste que quelques éIéments de cette iléïinition, et I'auteur rnontre que la jurisprudence internationale a adopté une ccincêp-tion très large de la propriété. Cette constatation ne permet dtàilleurb pasde répondre à Ia question de sar.oir les atteintes à cette piopilété desétrangers sont prohibées par Ie droit international. La notion drexpropria-tion, montre ljetz, est difficile à disti.nguer de celle de rrdenial cif ,justice

"Drautre part, une aut¡e dístinction, nécessaire mai.s difficile, est cellequi doit être faíte ent¡e il droits acquisrr et rr expectatives rr ou intérêtsplus ou moirri vagues etc. ( L'affaire Oscar Chinn en est une illustration ).Sur ce point,capital, lrauteur obserwe ce qui suit i

rt ,.. The civil law of a country in alütost everyonèof its specific rules, and ¡often also¡'itsconstitutional and adminÍstrative lawrcreates situationàin the continuation of which an individual may : :

be interested. By acts of legislation, or ofadminístrative practice, this situation may bechanged. To give foreigners vested rights againsteach of these changes would mean to ensure themagainst every change which may concern theirinterests, And it ís clear that èomewhere a lineof demarcation has to be drawn bekéen I droitsacquis r¡ and that which is beyond tlreir spb-ere... r'

. il est significatif que Herz ne tire pas cette ligne de démarcation!De ce que nous avons ru jusqurici, iI semble bien iessortir que le droitinternational nelè fait pas non plus.

Il convient de rappeler à ce stade, lrarrêt rendu par Ia Courpermanente de ju,stice internat entre la Lithuanieet I'Esthonie dans lraffaí¡e du to. 76¡ p. lg ).11 en ressort que, 9n principe, insi que les droi.tscontractuers ) des.particuliers dépendent dans chaque Etat du d.roit intèrne,ceci quant à leu¡ existence, à leur mode dracquisition, à leur contenu, etc.I1 appartient au d¡oit national de c¡éer et de défini¡ les droits subjectifs,dren déterminer ou dren limÍter Iê c-ontenu,; et iI est clair que de nouvelleslimitations, une fois le droit créé, ne, peuvent être exclues ( comme on

I Þ"n.uoa,, { - Salc*ti¡¡6.'¡

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I ,\o î4

lra w, dans Ia première Paltie, relative au droit intertemPorel interne ) (l).

l-rabsence, en droit ihternational, de notion autonome et précisedes " droits acquis ", et la constatation faite par la Cour Permeqente que, en

principe, Ia détermination de ces droits dépend du droit interne, ne .signifientpas que Ie droit iles gens nrait pas à intervenir en la mati-ètp. Certes, Ialoi interne possède des compétences très étendues en ce qui concerne 1es

droits patrimoniaux des étrangers, notamment Ie droit de proptiété ( toujoursau sens large de cette notion ). Certains aiment à employer ici, plutôt quele terme de l compétencés rr, celui derrsouveraineté ". Il nt,en tésulteauccn,Smerrt que la question du droit de propriété des étrangers, par e¡emplerelève du domaine réservé (Cf. .Il'art. 2 5?, de la Charte des Nations Unies )

de chaque Etat. Dans lraffaire de I'AngIo.Iranian Oil Company, lrlran, bienentendu, mais, aussi'drautres pays ( comme IrUnion S oviètique ), devaot IeConseil de Sécurité, ont soutenu que le législateu¡ inte¡ne avait dans ce:domaine un pou voir discètionnaire, crest-à-di¡e non ¡ églementé par 1e droitinternational" Crest là une erreul manifeste ! '

r Sans ent¡er dans ce problème classique du droit des gens' jeme contenterai de rappeler céci: drune part, iJ. nry a Pas de qrestion qui, '.par nature, rentre nécessairement dans Ie domaine réservé. (Z)

j Ðrautre part, iI résu1te à 1révidence -,de la pratique internatiônale, et enpar.ticulier drune jurisprudence abondarite, que si la définition-et la réglerhea-tation des droits patrimoniaux ( droits acquis ), sont laissées au législateurinterne, lrexercice de cette comþétence est cependant limitée par les règ1esdu d.roit international I Ses règles sont drailléurs assez larges et i] convientde rappeleraussi que la réglementation interne jouit drune présomption de

confo¡mité avec le droit iuternational

En outre, 1I a été maintes et maintes fois rappelé et t1écid6,dans la jurisprudence internationJe, qutaucun Etat ne peut se pré:raloìrdel sa propre.iêgislation pour restreindre la portée de ses obligationsintéraationaLes ( cf. par exêmple CPIJ Zones franches de ]a llaute Savoie,

,Série ,A'/8, no. 46, p. 16? ).

Draulre part, et dans le même séns, il faut rapþeler que lestribunaux internationaux ne sont pas liés par les décisions des tribu¡auxinter.nes ( cf ., par exemple CPIJ, Usine dq Chorzon ( rond ) Séiie A, l

no. l?,:p. 33 ).

Il est donc constant, índiscutable qEe si la -notldn de dioit acquiBou de droit patrimonial, dépend en principe du droit interne, il nren résultepas que Ie législateur national jouisse drun pouvoir dfäìFtionnaire en ce quiconcerne les d¡oits de ce genre appaltenant à des étrangers. Lrexercicede sa compétence est limité par les règles du droit des gens.

Quelles sont ces limites, quelles sont ces règles ? Toute laquestion est 1à !

, En tous cas, Irexamen çlue noua avons fait jusqurici montre quela notion même de ttdroits acquis rr, ou le principe de larþroteciion desdroits acquis I' est en soi troÞ imprécis pour nous indiquer quell€s aontles limites du d¡oit international ou, en drautres telmes, quelles sontles règles du droit des gens à 1régard des droits acquis des étrangers.

Drune part, nous venons de le voir, ,on doit affírmer¡ sous peinedradmettre une ana¡chie destructive de Ia société internationale, ¡lue ItETatnational ne jouit pas drun pouvoir sans limite à l'égard des droits patri-moniaux des étrangers. Drautre part, on dqit constater, et la pratique inter-ná.tionale en fournit de multiples exemples, que, dans Irexercice normalde sa compétence, lrEtat peut porter atteinte, dans certains cas, aux droitspatrimoniaux ( droits acquis ) des étaangers,

Toute atteinte à un droit acquis drun étranger nrest pas prohi-bée par le d¡oit des gens, mais elle .peut devenir illicite à certaines con-ditions. Ces conditions, répètons-Ie, ne découlent pas du concept, trop va-gue, de droit acquis lui-même ; il faut donc chercher ailleurs¡

Reche¡cher quellos sortt ce6 conditions, crest srengager dansun trèq waste d.omaine du d.loit international; celui de Ia condition des é.

(l) Schwarzenberger éc¡it à ce sujet ( International law, 3ème éd., Londres,1957, vol. i, p. 204 ) :

".,.Even if the reservation expressely mad.e by the Court corl-d¡6e ignored ,

the protection of vested rights by international law would oot be\ meaninglessScope would stiLl ¡emain fo¡ the application of this rule in the case of arbi-

'';trariness, when the action of the State organ was incompatible with themurricipalrrule of its own country. The meaning which the World Coutt hasgiv,en to.the protection of vested rignhts, however, is múcVsubstanåial anddemands compliance of municipal law, and of State organs, with the minimumstandard of international law. 'l

(2)'Cf,,la déclaration céIèb¡e de Ia CPJI, dans I'aJfairè des Décrets de natio-nalité promulgués à Tunis et au Matoc, (série B, no.4, pp. Z3-24) :

"... Lt question de savoir si une certaine matière rentre ou ne rentre pasdans le domaine exclusif drun Etat e st une question e s sentiellement ¡ elative :

elle dépend du développement des rapports internationaux, r'

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De PIus,mites apportées par 1

r- autre constatation réliminair e,e la

le problème tles li-de I'Etat, ( et

éttangers, de la responsabilité internationale de lrEtat, etc. Je ne Pew,bien entenclu, mrengager dans cette voie, qui me conduirait à vous proPoserici., un vérítable traité de dtoit international ! Je me limite¡ai à quelquesbrèves constatations, pour en ti¡er une conclusion à 1régard de la doct¡inedu respect inte¡national des droits acquis'

La P¡emière constatation élémentaire, qui doit être Jaite,est la suivante : lc' dro international ne saurait inte¡venir que s'il y a

alteinte, non pas à un '' intérêt " quelconque, mais à un dròlt.En droitinternational comme en droit interne, tout intérêt éc.torñG-iqre nrest pasnécessair ement reconnu comme digne de Protection juridique; La célèbre¿{faire Oscar Chinn, ici encore, Peut être mentionnée.

.a)- celles qui limitent ou suppriment des droitssans les transfère¡ à quelqutun ou à un tierschoisi par luí ;b)- Ies mesures ayant pour effet ( sinon pourbut ) de transfèrer des d¡oits à ltEtat luí-même, ou à une personne désignée par lui.

Dans la preriièrecat6Éoríe, on rangera par exemple la Suppres-sion de lre3clavage, lrinterdiction des loteries, lrabolitíon de la manrifactureet de Ia vente des Liqueurs spiritueuses, etc. Dans de situations d.e ce genre,il nry aurait pas en principe d'obligation drindemniser, étant donné lrabbence,pour IrEtat drenrichissement sans cause.

Dans la seconde catégorie, le principe de lrenrichissementilrégitime serait à la bãse de ttobligdion drind,emnise. ptZäElãiTxl--iãìt i,ternational. Encore y aurait-il Iieu de distiûguer, ici les cas oì¡ la mesureétatique (.de.suppression et de transfêrt du droit à lrEtat ) est permiee sansindemnité ( exemþIed : meeures fiécales, amendes, conJiscations péoaTãil-confiscations de police, création drun monopole dtEtat : monopole des allumet-tes, monopole du tabac, monopoles des assu¡ances sur la vie, monopolede I'aìcool etc. ), et les autres cas, oìr une indemnité sErait prescrite par1e dr.oit international¡

Ces diwerses distincttone paraissent assez iragiles. La.prati_que des Etats à ce sujet est exttaotdinairement variée et contradictoirpElle permet souvent mal de distinguer, dans les cas mê¡ires où une in-demnité a été payée, si le paiement a été Lait comme un rr A'ct of grace ú,à bien plaire, ou comme une dette, en équité ou en droit strict.

Le droit comparé, sur ce point, est particulièrement révéla,teu¡et je voudrais attirer Irattention ici su¡ lrune des meilleures études qui,à ma connaissance, aient été faites sur les pratiques nationales ( à l'égarddes nationaux, du reste, comme des étrangers ) : celle deëIullington( Problems of International law in the Mexican Constitution of 19IZ, AJILwo7. Zl, l9z1 ).

I1 ¡essort de cette étude compálative quril serait vain de pré_tendre ramener la pratique, même dtun seul et même Etat, à des constan_tes logiques.

Le critère de ltexi.stenc./t,obtig"tio. d.e compenser, il ntestpas inutile de le souligner, nrest pas la justification de la mesure étatíquedu point de vue de I'intérêt public . La compensation peut être due même

e

dtu¡ié éventuèlle obligation intelnationale de réparer ), ne se pose,évidemmerque si lratteinte à un droit Il .nt.eE ntêst PaÊainsi lorsqurun étranger a on économiquegéaéraLe, ou à des catastroPhes natulelles ( hypothèse à laquelle on assimilegénéralement Ie cas de guerre. ).

Troisièmement : toutes Ies atteintes étatiques à des droitspatrimoniaux dõ-tt"rg*", tépétons-Ie, ne peuvent pas être considéré€fcomme imposant une obligation internationale de réparation ou de comPensa-tion. On a w déjà, à propos du d¡oít intertemPorel et du droit international

- prívé, les limites nécessaires à la portée du principe des droits acquis.Les mêmes considèrations sont walables ici.

Sur ce point, je me rallie Pleinement à lropinion de Kaecken-beeck ( RCADI 1937, I, vol. 59, p. 359 ):

" Nroublions pas quril nry a guère de changement social,guère de progrès qui ne Porte atteinte à quelques droits

. acquis. Obliger le Iégislateur à faire haltqdevant chacundreux, ce selait entraver et rendre impossible sa mis-sion. . . " Ct.est seulemen! P oulsuit lrauteur, ]e¡sque leIt sacrifice imposé au détenteur du droit e,st si considèrableet exceptionnel quren toute justice il exige un.tempérament, rl

que 6e posera la question de Irindemnisation, rr question différente et nouwel-1e t'.

A cet égard, il conviendrait, sélon cettains auteurs, ( parexeÞple Bindschedler, op. cit. , p. ZO7-17 ) de distinguer entre deux catégo.-ries de mesures étatiques:

a-

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lorsque la suppression du d¡oit acquis est parfaifement justifiée de cedernier point de vue ( cf. Kaeckenbeeck, op. cit., p. 359, 5 42 ).E! revanche, lrabsence drintérêt public jqstifiant Ia mêsqre pour-rê bienentendu, démont¡er son caractère arbitraire, d'où Itobligation de payerune iriciemnité.

On admet dans 1a doctrine que, drune façon générale, 1es

atteintés aux droits acquis des étrangers nrentraîhent pas Irobligation drin-demnisê¡ lossqurelles sont prises dans Irexercice nori¡ral de la compétencefiscale, monètai¡e ou pénale de lrEtat.

Personne ne conteste 1e caractère exclusif, en principe, deIa compétence étatique en matière fiscale et douaniè¡e. Or lrexercicede cette compétence peut causer de graves doinmaþes aux étrangers. Cepen-dant, lratteinte aux droits acquis peut ici, dans certaines circonstances,être prohibée par le droit international et entraîner I'obligation drindemniser

Comme te dit Charles Cheney Hyde ( International Law L927,vol. I, p. 368 ), si IrEtat a donné à une classe d'étrangèr s des raisonÈ spé-ciales de croire quraucun changement de 1a tégislation nrest à préwoirpendant un certain temps, í1 agit illicitement sril leu¡ cause un dommagepar un changement brusque de 1égislation.

'C'est ainsi que Ie Gouvernement des Etats-Unis a protesté àplusieurs reprises cÒntre de tels changements imprévus, de natirre à causerdes dommages à ses ¡essortissants, sans contester aucunement Ia compé-tence même de I'Etat en cause. Citons ici, à titre drexemple, lraffairèdu Port franc de Limon, au Costa Rica,

En 1884, 1e Parlement de Costa Rica abrôgêa sans avertisse-ment préalable une loi:de lrannée précédente qui décla;áit Ie port èe Lirnonun port franc þôur dix ans. ( Moor., Digest of Inte¡national Law, voli I1,p. 67 ). Le Gouvernement du CostaRica, tout en maintenant formellementle droit de son législatif dragir de cette façon, cèda en pratique et renonçaà appliquer aux étrangers intéressés la loi d'abrogation ( Cf.'Kiss; IrAbusde dioit endroitinternational, 1953, p. ?8 ). Une affaite tout àfait sem-blable est celle des zones franches du Guatemala, en 1888 ( Moo-e, Digest,vor. Z, p. ó8 ).

Ces exemples nous montrent que le droit international limitelrexercice de 1a compétence législatíve drun Etat, même dans une matière

traditionnellenent considér ée comme appartenant au domaine réservé,tel que le domaine fiscal et douanier. Cette limitation pourtant ne résultepas de.Ia. ntotion de rr droits acquis rr, ou tout au moins pas clairement etpas direçtement, Ce qui justifie ici lrinte¡vention du droit international,ce nrest.pas le principe de la.protection des droits acquis, crest bien plutôtIrinterdiction de lrabus de drqit; La maniè¡e dont IrEtat avait utilisé sacompétence législative, au mépris des prévisions légitimes quril avait suscí-tées lui-même, constituait un abus.

lrexercice de cette compétence par lrEtat, sur son territoire, peut Iésergravement les intérêts des étrangers dans Ies d¡oits de créances.Le droit international reconnaít cependant la compétence exclusive de ltEtaten cette rnatière, et, comme Ie dit Mann (Money in Public internationalIaw, BYBIL 1949', p. 292), Les Etats nrencou¡ent leur responsabilíté inter-nationale, avec Ieur politique monÉtaire, que si cette politique implique unabus de droit ou lq violation drobligatioirs conventionnelles. ( Le"standardminimurri'nrest pas mentionné ici, mais il semble pouvoir êt¡e considérécomme plus ou moinÞ tacitement englobé dans lanotion drabus de droit ;plus précisément , il semble que, quel que soit le critère empl.oyé pgurmesurer les lìmites du libre exercice de la compétence étatique, la com-pétence de lrEtat soit plus large, beaucoup moins réglementée par le droitinternational dans un domaine comme celui-là.).

Laissons de côté le domaine de Ia compéteuce fiscale ou mo-nétaire. Cet exemple nous a permis de mettre en lumière lrintervention d¡unenotion i.mportanie, qui permettre dans divers cas de t¡acer Ia ligne dedémarcation, si difftcile à établie, entre les atteintes permises-au d.roitacquis des étrangers et les atteintes illicites ( au sens d'obligeant à unecompensation ).

La notion dlabus de droit constitue certainement une réponse,au rnoins partielle, au problème que nous posons : en limitant lrexercicede la compétence du législateur national, elle protège par Ià même Ies d.roitsacquis. ( Cf., sur Irabus de droit, les déclarations de la Courpermanentede Justice internationale dans lraffaire de Haute Silésie polonaise, sérieA, no.?, p. 30, et dans lraffaire des Zones franches , série A/2., no 46,P; 167 ). fUais le principe de ltinierdiction de lrabus cle droit ne suffit pasencore à délimiter les cas d.ans lesquels la suppression ou la modificition,législative ou administrative des droits acquis des étrangers obligent 1'Etat

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au paiement dtune lndemnité.

Reienons ici à I'exemple du droit de propriété, et dernàndons-nous dans quel cas, et selon quel critère, ìa compÉtence normale, que jrairappelé plus haut, de IrEtat national, wient à être limitée par le droit inter-national public ?

Une chose est claire : Ie droit de propríété des étrangersnrest pas souúfait à la compétence du législateur territorial. Le principede Ia plotection internationale des droits acquis ne signifie aucunementleu¡ immunité ! I1 nrest pas question, même pour les partisans du þrincipede soutenir ( comme le reprochent parfois certains défenseurs æ-b¿-.ru6sde Ia souveraineté absolue ) que le droit de propriété serait intangible, sacrsupèrieur à Ia squveraineté de lrEtat.

, Le principe de la protection des droits acquis signifiè, toutdrabord, Irinterdiction des actes a¡bitrai¡es - crest-à:¿Ii¡e conllaires awlois mêmes de IrEtat territorial. Il signifie ensuite lrinterdiction des mesu-res abusives ( abus de droit ) et enfin, il veut dire qurun certain standa¡dde justice et cl'équité doit être respecté 1örs des atteintes portées aux droitsacquis des.ét¡angers.

On songe immédiatetnent, ici, à lrexemple de Itexpropriation.QuriI sragisse drexpropriation au sens étroit ou de nationalisation, on admetgénéralement que la mesuie, dans son principe, relève dú seul législateurnational et ne dépend pas drun critère inte¡national. L'opinion la þlus généraen cette matière me paraít parfaiteiîent exprimée ilans un discours dé M.Petitpierre ( cité par Bindschedler, RCADI 1956, [, wol. 90, p. f04 ),Conseiller fédéraL, chef du départemeat poJ.itique suisse, et 1947 :

I' Su¡ Ie principe de la nationalisation, nous ne

. pouwona pas intervenir. Il stagit dtune mesure drordreinterne prise par un Etat dans les limites de sasouveraineté et dewant laquelle nous devons nousincliner; pour autant qurelle srapplíquê égalementaux nationaux et au étrangeis;.,p¡ revanche,une natioilalisation, cr est-à-dÍre une expropriation,nrest admissible que pour autaát qutune indemnitééquitable est versée au propriétaíre dont les biens

, sont nationalisé"... "

Un des plus l-ucides obse¡vateur6 de Ia ¡éalité inte¡nationale( Charles Þe Visscher, Théoríes et Réalités. .., p. 243 ) résume la pratique

internationale en deu termes : non-intervention, mais indemnisation ;telle est selon lui la rr formule Íãctuene-A-'équlifbre entEfé-Tibe¡-tEile

- ItEtat de storganiser à sa guise et la sécurité des ¡elations internationales.'On ne saurait mieux dire.

Si un accord très général existe, dans la doct¡ine et dans lapratique internationale ( malgré quelques prises de poËition extrêmes etpolitiques, de la part de certains Etats ), sur le principe même de I'indemni_satíon, il y.àbeaucoup moins de r, congensus ,' su-i-!ãã-étendue et ses ino-dalité8',LaPrãtiqueinternationale,toutlemondet@s'exemples drindemnités dérisoi¡es rcu théoriques à Ia suite de nationâli,sations( alors que le catactère indiwiduel de ltexpropriation, au sens strict, per-met eE toue óàs, et par couséquent exige, une pleine indemnité ). Le carac_tère politique du règlement de nombrêux différends en cette matière, resexem t qui sont restées non

r.¿ saîct les De Visscher :L il Il Y es droits acquis d.d.ns

une s , (p. 244), -

On ne sarfeit en déduire; cependant, lrinexistence de principesde droit international en cette matière - ,pasplus que, en d.roit interne,le nombre des délits civils et pénaux restés non sanctionnés ne nous permetde conclu¡e à lrinexistence de la règlel de droit !

Certaines expériences tr spéctaculaires il ont peut_êtrèi¡iitéles internationalistes à des conclusions exagérément pessimistes quanf àlrexistence même ( à distinguer de lrefficacité ) des règles du droiiinterna-tional sur cÈ point.

On sai.t que, depuis quelques années, des iignes interessantsdrun redressement des standards du droit internationãI sont apparus- Jrentrouve un exemple, assez révèlateur, dans la Régolution no. lg03 de ItAssemblée des Nations Unies, en I9ó2, sur Ia souveraineté permanentesur les ressources naturélles (r) qui, tout en ¡éaffi¡anant Ia possibilitédes nationalisations, expropriations, ou réquisitions, poirr raisons d'intérêtnational ( ce qui nrétait pas contesté ) þrévoit ( et crestáur ce point très dis-cuté qurelle prend toute sa valeur ) que,

(f ) Voi" à ce sujet lrarticle de K. N. GESS, in I,C.L.e. , avfil t)64,P; 403.

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I1 est à peine besoin de dire lrintérêt de cette prise de positicrr c

la paf t d'une asserGblée internationale oìr tes Etatsiiðui¡c¡j-dñi;sóà et expor-tateurs de capitaux étaient en minorité - et cei¡i après le rejet drun amende-ment soviètique prévoyant que la question de ìa compensation aw proprié-taires se¡ait décidée en accord avec Ie seul d¡oit national de lrEtat prenantces mesures dans lrexe¡cice de sa souveraineté.

Reste à sawoir ce que sigoifient les termes r! appropriatecompensation rr et quelles sont les règles du droit international à ce sujet.On connaît une interprétation donnée à ce Þassage de la Résolution l-803pär les Etats-Unis, pour qui la résolution signifie la réaffi¡mation du prin-cipe de droit interrrational qui exige une compensation prompte, adéquatéet effective en cas drexpropriation ou de nationalisation.

I-rexemple si souvent discuté de lrexpropriation ou de Ia na-tionalisation de Ia propriété étrngère, est important aussi, pour lrétude dela doct¡ine des droits acquis, en ce quril met en lumière le caractère insuf-fisant du c¡itère dit du " traitement national'r ( non-discrimination ).

Comme Ie soulignait justement le Gouvernement britanniquedaas Ira-ffai¡e des Propriétés religieuses au Portugal ( on 1!a vu plus haut ),il nrest pas possible de considére¡ qurune atteinte aux droits acquis nlobli-ge à aucune compensation dès le moment où elle a-ffecte également les natio-naux et les étrangers. Sans doute le critè¡e du traitement national sur lequelbeaucoup drEtats i.nsi.stent vigoureusement comme exprimant un aepectfondamental de leûr souveraineté et comme constituant une bar¡ière auxinterveirtions þOlitiques d.tEtats plus puiSbants compóite-t-il une part devérité. Et Iron þeut admettre qurune meiuê qui atteint des étrangeis peutêtre présumée confoime au droit interäational lôrsqurelle srappliqueégateãããtãFnationaux. Mais ceci nrest, et ne peut.être, .qurune présomptio

Le critère du traitement national est, drautre part, tout àfait utilisable dans Ies lelations entre pays ayant les mêmes conceptions juri.diques et politiques fondamentales, et on le trouve pour cette raison d¿ns dtassez nombreux traités bilatéraux.

Il nren reste pas moins que certaines mesures qui sraPPliquent

sats discrimination aulnationau et aux étrangers, et qui 1èscnt les d¡oitsacquis dans un intérêt public, légitime en soi, Peuvent èe révéle¡ contrairesà æ standard éIémentaire de justice et d'équité que lron désigne communémentsous 1e nom- de{rr standard minimum de droit international trf.

.. Ce qutil faut rappeler, crest, comme lra montré Borchard (

HarvaÌd Law School, Draft conwentíot, 1929, art' 5, commentaire - citépar Kaeckenbeeck' P" 365,), on ne Peut alléguer à Ia légère qurune mesureétatique est contlaire à ce standard minimum ; rrle droit inte¡national ne

sroppose pas à des expériences sociales eatrePrises de.bonne foi et non

dans un but de spoliation ". 11 stagít ici drunmentaire, et qui tient néceseairement comPt s

ããããã-Iãgi"t"tioas nationales relativement à lrorganisation et au contenudes droits patrimonbu.. l

On perçoit maintenant Ia signific4tion exacter et les limita-tions, de la théo¡ie åu respect internationai des dioits acqgis. Son imp¡é-cision a été plusíeurs fois souiignée. On a 1'u que la notion de base étaitinsulfisante pour iournir une solution à notre problème, ctest-à-di¡epour déIimiter les cas oìr une atteinte étatique aux droits Patrimoniau des

étrangers entrairrait, selon le droit international, une obligation drindemni-sation.

Cette conclusion ne doit Pas être taxée de pessimisme' Crestau contraire, ctoyons-nous, renforcer 1e droit intelnational et aider à

son respect que de srefforcçr de rendre comPte drune marrière exacte etréaliste des principes et d¿s théories què I'on y emPloie, parfois non sans

légèreté.

Le principe du resPect international des droits acqois nrest donc

pas, je I'ai dit, unrr principe générat de droit reco vili-

"é"" i' ( au sens de i'air. 38 du Statut ); Est-il une

droit international ? Oui et non. 19.¿ "t tant que r cte

par exemple de la prolibítion de lrabus de droit ou tdu minimum standard. Oui, dansla mesule oì¡ elle nefait qurexprimer,d.rune manièr" àt"ill.tt"-""sez souPle et vague, äes exigences fondamen-tales de sécurité et justice, exigences dont on trouve drautres formulationsen droit international.

FIN

'r In such cases the owner shall be paid appiopriatecompensation, in accordance with the laws in forcein the State taking such measules in the exercise -

of its soverei.gnty and ì.n áccordance with internationalIaw, etc.. . r'

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I -II-

-.ANNEXE -

Droí ts acquis

Sentence arbit¡ale 23 août 1968 Arabie Saoudite-Ai arr!o.

pr- I04 LrAramco en effet, en sa qualité de première conce€sionnai-*, ."t au bénéfice de droits drexclusiwité qui ont Ie ca¡actère de droitsaquis et que 1e Gouvernement ne peut lui enlever par un contrat, mêmejuridiquement égal au sien, mais conclu awec un s econd conces sionnaire.Le du res ect des droits est un des fondamentauxet du droit inte¡na es

civilisés. Ce principe a consacr Par une sprudenceCoul permanente de Justice internationale' arrêt du 25 mai 19?6, d¿ns

ffits allemands en Haute Silésie, fond,Serre  no.7 pp. Zz et 42 ) ; avis consultatif du

allemande dans lesl0 septembre IP23

concernant Ies colons d ror!g!r.re telritoired cédés parlrAllemagne à la Pologne ( série B, no. 6, P. 36 ) ; il a encore été r econnudans Ies précédents soiranl{-loi-sont t=ès caractèristiques et qui concer-nent des causes entre un Etat et des Particuliers : Tribunal de Haute-Silésie, décision du 6 juin 1931, dans la cause Niedetstrasser contre Etatpolomis (Schiedsgericht fgi Obe¡schlesien, vol. II, nos.'4, p. f 56 ) ;

Tribunal arbitral spécial g ermäno-roumiaih, décision- du 27 septembre 193 8'dans la cause Goldei¡ber, g et fils cont¡e Etat allemand ( Recueil des senten-cffis Unies, vol. II, P. 909 ) ; Tribunal arbitralinstitué par le conseil de la société des Nations et présidé Par M' Guerrero'décision du l8 juin 1929, dans Iraffaire de la concessionsde Ia Sopron-Köszeg-Local Lailway Çompany quí relevait jadis de l'anciennã-M-fonrchie@ and Reports of Public International LawCases, L9Z9-1930, no. 34).

Dans le droit islamique du rite hanbalite, le resPect des d¡oítsprivés antérieurement acqqis, et tout sPécialement celui des d¡oits contrac-@fóndamental que dans les autles systèmesjuridiques des .Etats civilisés.

: C.l. ¡ésulte du fait que Ies contrats¿Í318-bleslient les dew par-ties et doivent être exécutés, catsles droits qui résultent drun acco¡dayant une cause ,valable sont assu¡és drune manière absolue ; lorsqurune

partie a conféré certains drbits à. son co-contlactant, elle ne peut plusultérieurement disposer de tout ou partie de ces mêmes d¡oits en faveurdrune autre partie;

Le Tribunal arbit¡al ayant constaté qæ la preuve de Ia con_cession à lrAramco drun droit exclusif de transport par mer est,appcirtéeà satisfaction de droit, n'hésite pas à mett¡e cette Compagnie au Lénéficede la protection juridique résultant du principe des droitl acquis, ,et esti_me qurelle est légitimement fondée à sropposer à tout empiètement sur 1esdroits dont elle est titulaire et bénéficiaire.

P. 6zPartles et leticuliè¡e en c

contrat de Concession esb donc la loi fondam entale ddeC lui ¡eco une importance par-

e qutil comble une lacune du droit de lrA¡abie Saoudite enmatiè¡e dlirdu-çú¡ie pél:slière ; í1 admet que la concession a le caractè¡edtune véritable constitution ayant.pour effet de conférer d.es droits défini-tiwement acquis aux Pa¡ties contlactantes, précisément parceque IrEtatest souwe¡ain dans les limites de ses frontières, il possède juridiquementlâ faculté de conférer deavant la fin de Ia Conces

s droits quril s'intèrdit lui-même de retirerslon, sous réserve dés clauses de révocation

contenues dans le Contrat de Concession. Rien ne 6l se à ce undans Irexercice de sa souveraineté, se lie ement 1esdrune concession et ãttiibue.à un qonce s e des actables,

ES ont Ie une nouvelleavec Ia première, ou s postérieure, abolissait en

tout ou en partie, ce qui a été accordé par irne loi aàtérieurþ, il y .aufáít

ou-atteintevi olátion manif e Ie second contr des d¡oitspar la loi au non-r lóis sous laseule ré serwe d.es règles sant ll et les bonnes moeurs ;une situation juridique acquise en wertu dtune loi spéciare antèríeu¡e nepeut paÈ être abrogée pal une loi postéríeure, generalia spêcialibus nonderogant, à moins que le législateur ne lui attribue expréssément d.es effetsrétroactifs, ce que lrEtat ne porrrait faire, sragisÉant.de.concessions, sansengager' sa responsabilité;

et du droit interne

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P. llzdite gr

cI est lrEtat lui-même srs de ses droits; Le

droits acquis sropposei-à ce quril déroge à cet engagement.

Dans lrexercice de sa souveraineté, lrEtat de ltArabie Saou-est imposé à lui-même des restrictions aJin d'assu¡er à la ComPagnl

-IIr-

I

concessionnaire, pour une considèration valable et aussi importante que

celle contenue dans le Contrat de Concession de lrAramco de I933' und¡oit exclusif de transport Par terre et par mer, limité dans le temPs.Il lui a garanti quril ne fera pas de sa souveraireté, w¡ usage contraire auxobligations quril a assumées envers elle et aux droits qutil lui a concédés.La souveraineté de ItEtat nrest pas limitée Par une cause cxté¡ieure ;

ation ve de nere

entlaverdes

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3&tLÀLIVE-P i 3 4

Université de Pa¡is

INSTITUT DES HAUTES ETUDES INTERNATIONALES1967 - 1968

LE RESPECT INTERNATIONAL

DES

DROITS ACQUIS.

Par

Monsieur Pierre LALIVE

Doyen de la Faculté de Droit de Genèwe,

Association des Hautes Etudes Inte¡nationaleslZ, Place du Panthéon - PARIS Vème

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