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3 AVERTISSEMENT Extraits relatifs au crash du mont Sainte-Odile. Ce qui suit est strictement conforme à l'original. Seules des corrections grammaticales et orthographiques ont été apportées, outre la rectification de quelques erreurs matérielles dues au fait que le livre avait été bouclé dans la précipitation pour des raisons exposées par ailleurs sur mon site, et accessibles ici La pagination de l'original est respectée. Bonne lecture Nota : les liens entre le texte et les annexes (et inverse- ment pour revenir au texte) sont actifs.

AIRBUS L'Assassin habite à l'Elysée - jacno.comjacno.com/livr-Ste-Odile.pdf · je ferai une comparaison. Vous allez de Paris au centre de Marseille en voiture. ... Cacherait-on

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    AVERTISSEMENT

    Extraits relatifs au crash du mont Sainte-Odile.

    Ce qui suit est strictement conforme l'original. Seules des corrections grammaticales et orthographiques ont t apportes, outre la rectification de quelques erreurs matrielles dues au fait que le livre avait t boucl dans la prcipitation pour des raisons exposes par ailleurs sur mon site, et accessibles ici

    La pagination de l'original est respecte.

    Bonne lecture

    Nota : les liens entre le texte et les annexes (et inverse-

    ment pour revenir au texte) sont actifs.

    http://jacno.com/long.htm#rep21

  • AIRBUS LASSASSIN HABITE A LELYSEE

    Livre publi en septembre 1994 aux ditions

    PREMIERE LIGNE

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    CHAPITRE 7

    MONT SAINTE-ODILE

    L'avion a percut le sommet du dernier ballon des Vosges avant la plaine d'Alsace, en approche finale de la piste 05, oriente du sud-ouest vers le nord-est. Le taux de descente tait lev. Les premires constatations montrent que l'avion, au moins jusque dans les dernires secondes du vol, tait sous le contrle des pilotes. C'est un accident classique, avec des hypothses assez simples sur ses causes.

    Premier groupe : anomalie sur la hauteur au dessus du sol.

    L'avion est bien, gographiquement, l o l'quipage pensait tre. Mais il tait trop bas. Cet cart peut avoir pour origine une dfaillance technique (fausse information d'altitude ou de taux de descente) ou une dfaillance humaine (mauvaise interpr-tation des informations d'altitude ou de taux de chute).

    Second groupe : anomalie sur la position gographique. L'quipage se croit ailleurs qu'il n'est rellement. En approche

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    d'un aroport, s'il se croit au dessus de la plaine alors qu'il survole du relief, c'est l'accident. L encore, la cause peut-tre technique (fausse position donne par les instruments) ou hu-maine (mauvaise interprtation des instruments de position gographique).

    C'est l'analyse de tous les faits disponibles qui permet de

    conclure. Au Mont Sainte-Odile, qu'en est-il ? Deux minutes avant la catastrophe, l'quipage sort les volets

    au premier cran. Les volets sont des surfaces mtalliques qui se dploient l'arrire des ailes pour permettre de voler plus lentement. A ce dploiement est associe la sortie des becs. Mme principe que les volets, mais l'avant des ailes. On sort cette ferraille en crans successifs, progressivement. L'inconvnient de ces modifications du profil de l'aile est que la trane de celle-ci augmente. Le profil a moins de finesse arodynamique. Il faut compenser en augmentant la pousse des moteurs.

    Deux minutes avant l'accident, l'avion est 5 000 pieds

    d'altitude (1 500m), en virage gauche pour rejoindre l'axe de piste (voir croquis page 92). L'appareil s'tait cart des trajec-toires habituelles, la demande du contrle arien (les aiguil-leurs du ciel), en raison du trafic dans la zone (autres appareils en approche et au dcollage). Tout cela est parfaitement normal. A ce moment, l'avion n'est toujours pas autoris descendre en dessous de 5 000 pieds, toujours cause du trafic.

    Une minute avant l'accident le contrle autorise l'avion l'ap-proche finale. C'est--dire que l'quipage doit rejoindre, par ses propres moyens, l'axe de piste et le plan de descente normale.

    A cet effet, l'quipage sort le train d'atterrissage et les volets

    au cran 2. Il se met en descente. Dans la foule, les moteurs sont rduits la pousse minimum et l'quipage sort les spoilers. Ces spoilers sont des destructeurs de portance. Ce sont des

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    parties mobiles qui sortent sur le dessus des ailes. On sort les spoilers pour augmenter le taux de descente. Ainsi, toutes les tranes arodynamiques sont sorties. Les moteurs sont au mini-mum. L'avion est devenu un pav. Sur certaines machines, l'utilisation des spoilers, une fois les volets sortis, est interdite. Le taux de chute serait trop lev.

    Toutes les oprations dcrites rsultent d'actes volontaires des pilotes. Il est impossible que ceux-ci se soient mis dans cette configuration sans s'en rendre compte. Si le conducteur d'une voiture coupe le contact, se met debout sur les freins et tire le frein main... c'est parce qu'il a envie de freiner ! Et il ne fait pas ces manoeuvres sans s'en rendre compte, ou sans se rendre compte de leur effet !

    En outre, 16 secondes avant l'impact, le commandant a d-clar : Faut faire attention qu'il descende pas..., ce qui con-firme que l'quipage surveillait sa trajectoire en descente. Et quelques minutes plus tt, l'quipage s'tait rappel les hauteurs minimales respecter, en raison du relief. L'erreur de l'quipage sur la hauteur (erreur dans le plan vertical) est fort improbable.

    Par ailleurs, rien ne permet de suspecter une dfaillance des systmes d'information dans ce plan vertical. L'avion a maintenu normalement l'altitude de 5 000 pieds demande par le contrle. Une dfaillance brutale, entranant l'quipage prendre un taux de descente lev aurait t dtecte comme telle. La cause de l'accident ne semble pas provenir d'une anomalie dans le plan vertical. Ni technique, ni humaine.

    Venons-en au second groupe. L'quipage se croyait-il ailleurs

    qu'il n'tait ? L'avion n'a pas suivi les trajectoires habituelles cause du trafic. Pour cette raison, pendant quelques minutes, dans la phase intermdiaire de l'approche, l'quipage a suivi les demandes du contrle au sol. Classique. A la suite d'une telle procdure l'quipage rejoint la trajectoire normale en se rfrant ses instruments de navigation.

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    Vue en plan

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    Au point marqu A, le contrle lche l'avion. Le pilote poursuit le virage gauche pour rejoindre l'axe de piste. Entre B et C, le commandant slecte son cran de navigation sur le mode carte afin de mieux visualiser la trajectoire normale pour rejoindre l'axe de piste (trajectoire en pointill). Sur cette carte de navigation synthtique, affiche sur un cran de mme type que les tubes cathodiques de tlvision ou les crans d'ordi-nateurs, apparaissent l'aroport, avec sa piste et son environ-nement, ainsi que les trajectoires standard de vol, en particulier l'axe final d'approche, dans l'alignement de la piste. La position de l'avion et son orientation y sont reprsentes. Tout cela en temps rel. Le pilote voit son avion se dplacer sur la carte.

    Or, au lieu de rejoindre l'axe (trajectoire en pointill), l'avion poursuit son virage gauche et prend un cap parallle l'axe. Pourquoi cette dviation par rapport la normale ? Le com-mandant aurait-il mal lu sa carte, ce qui constituerait une erreur grossire ? Rien n'est venu le perturber ce moment. Pas d'appel radio. Pas d'intervention du copilote ou de quiconque, pas d'alar-me ou de gong ou sonnerie divers. Le copilote interviendra plus tard. Il a une autre source d'information que le commandant. En outre, et ce point est essentiel, cest le pilote automatique qui contrle lavion ce moment. Puis, l'avion repart droite. Mais en D, il repart gauche, comme pour s'aligner, mais il est une nouvelle fois dcal. Et en D, le copilote annonce, en lisant son indicateur d'axe (le VOR) Sur l'axe. Cet indicateur est facile lire. L'aiguille est au milieu du cadran quand l'avion est sur l'axe. Difficile de se tromper (nota : ce cadran est reprsent par une image synthtique sur un cran de navigation). Compte tenu de la position relle de l'avion qu'on connat avec prcision puisque la trajectoire finale est cale sur le lieu du crash, parfaitement connu gographiquement, au point D l'aiguille de l'indicateur du copilote aurait du tre aux 3/4 de sa dviation maximale. L'erreur de lecture est impossible. Comparons avec une voiture, avec un compteur de vitesse qui va de 0 200 km/h. Faire une erreur entre 110 et 130 peut se concevoir. Mais pas entre 0 et 150. Ces constatations interviennent aprs la premire anomalie,

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    en sortie de virage. Il y a donc une forte suspicion de dfaillance matrielle dans la position donne par les instruments l'qui-page. Voil pour le sens latral (cart latral par rapport l'axe de piste).

    Qu'en est-il dans le sens longitudinal ? A quelle distance de l'aroport l'quipage se situe-t-il dans la dernire minute avant l'accident ?

    Ce point est le plus intressant. C'est mme le plus important. En effet, si l'quipage se croyait plus prs de l'aroport qu'il n'tait en ralit, cela expliquerait immdiatement sa faible alti-tude cet endroit des Vosges. En l'absence de commentaire de l'quipage, il faut rechercher la position de certains slecteurs. C'est un travail d'enqute classique. En particulier avec les slecteurs d'chelle. Leurs positions permettent de savoir dans quelle fourchette de distance, par rapport l'aroport, les instruments situaient l'avion. En place d'une explication dlicate, je ferai une comparaison. Vous allez de Paris au centre de Marseille en voiture. Sur l'autoroute vous utilisez une carte de France. Dans la banlieue de Marseille, une carte de la rgion. Une fois en ville, un plan de Marseille.

    Au Mont Sainte-Odile, les deux slecteurs de distance, celui

    du commandant et celui du copilote, ont t retrouvs sur la position 10 NM (Nautile Mile ; 1 NM = 1 852 mtres). Ce qui signifie que, dans la dernire partie du vol les instruments indiquaient que l'avion tait moins de 10 NM de la piste. Or le crash a lieu 10,5 NM de la piste. Il y a donc un cart anormal entre la position relle de l'avion, dans le sens longitudinal, et la position indique par les instruments.

    Cet cart dans le sens longitudinal est associ un cart dans le sens latral. Une dfaillance des systmes de navigation est la cause la plus probable de l'accident.

    On objectera que ces slecteurs d'chelle auraient pu tre dplacs par le choc de l'accident. Mais ces slecteurs peuvent prendre six positions. Il est donc hautement improbable qu'ils aient t tous les deux t positionns sur 10 NM par le choc. D'autant plus qu'ils ont t retrouvs intacts (voir annexes 9 et

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    10). Et il existe un moyen trs simple d'en savoir plus. La position du slecteur cot commandant est enregistre par le DFDR (voir annexe 11). On peut donc connatre avec certitude la position de ce slecteur au moment de l'accident. Et on peut mme dterminer les moments o il a t manuvr, ce qui donne des informations trs prcises sur ce qu'indiquaient les instruments dans la dernire partie du vol (distance entre l'avion et l'aroport).

    Deux ans et demi aprs la catastrophe, les listings de para-

    mtres restent toujours confidentiels. Ils ne sont pas annexs au rapport administratif final. Ils ne figurent pas dans le dossier judiciaire. Cacherait-on la vrit aux familles des victimes du Mont Sainte-Odile ?

    Les menteurs

    Ainsi, l'hypothse la plus probable est une fausse position donne par l'informatique de bord. Il est donc intressant, et cela fait partie des recherches normales dans une enqute, de faire un inventaire des incidents antrieurs ayant conduit une fausse position.

    Les recherches seront rapides, pour ne pas dire inutiles. Les approches du type de celle qui a vu l'accident du Mont Sainte-Odile avaient dj donn lieu de nombreux incidents, au point que toutes les compagnies exploitant l'A 320 avaient pris des mesures diverses, certaines ayant mme purement et simplement interdit ce type d'approche. Tel tait le cas, par exemple, de nos voisins de Lufthansa.

    Consigne aux quipages de M. Burkhardt Sons, chef pilote A 320 de cette compagnie, en date du 18 septembre 1991 : Au cours de ces trois derniers jours, deux cas circonstancis de fausses indications sur les deux rcepteurs VOR sont apparus sur A 320. Les approches l'aide des VOR ne sont plus autorises, avec effet immdiat, jusqu' claircissement du problme.

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    Consigne aux quipage de M. Probst, responsable technique Lufthansa, en date du 14 janvier 1992, aprs modifications et essais sur un prototype (six jours avant l'accident du Mont Sainte-Odile) : Les deux modifications sur les VOR apportent des amliorations. Toutefois, nous n'avons pas les informations stables et correctes attendues, sur toutes les stations. Airbus Industrie travaille sur une meilleure solution.

    Mais en France, en particulier Air Inter, les consignes

    taient diffrentes. Ces dfauts ont tout simplement t cachs aux quipages.

    Toutefois, aprs l'accident du Mont Sainte-Odile, il a bien

    fallu prendre des mesures. Le 7 fvrier 1992, les approches du type de celle du Mont Sainte-Odile furent interdites en France. C'est un incident survenu Bordeaux le 5 fvrier qui servira de prtexte. L'administration et les directions d'Air Inter et d'Air France dclareront que cet incident tait le premier en France. Menteurs ! Ces incidents taient connus, mais on a prfr touffer. Les compagnies franaises devaient tre la vitrine de l'A 320.

    Ces incidents avaient donn lieu des rapports. Par exemple

    celui du commandant Pirou, d'Air Inter, en date du 14 mars 1991 (voir annexe 12). Voil ce que dit ce rapport, en langage moins hermtique :

    Circonstances, constatations et paramtres concernant l'incident.En longue finale, guidage radio en piste 18 Porto, en bonne condition mto. Les cartes prsentes sur les deux crans de navigation montrent la piste dcale de 2 NM vers l'ouest de sa position. Haute prcision est prsent sur les deux crans de contrle multifonctions. Pas d'alarme indiquant une dgradation de la navigation. Aprs 30 secondes, tablis sur l'axe radio de la piste 18, les cartes se recalent.

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    Actions correctives entreprises par l'quipage.- Surveillance vue et aux carts bruts de diffrents

    moyens radio. - Qui croire en conditions de vol sans visibilit alors

    que haute prcision est prsent aux crans de con-trle et garanti en principe une prcision de 0,5 NM dans cette phase de vol ?

    Inutile de commenter. Et il y eut d'autres rapports du mme

    type. A Air France aussi des quipages avaient signal ce type

    d'incidents, avant l'accident du Mont Sainte-Odile. A Air France aussi ils ont t touffs. Tous ces rapports sont en ma possession.

    Il aura fallu les 87 morts du Mont Sainte-Odile pour prendre

    les mesures lmentaires de scurit qui avaient t prises par toutes les compagnies exploitant l'A 320. Et pourtant, en France, il y avait dj eu Habsheim !

    Quelles que soient les causes relles de l'accident du Mont

    Sainte-Odile, cette catastrophe confirmait, aprs celle de Habsheim, le bien fond de mes analyses. Toutefois, aprs le Mont Sainte-Odile, j'ai choisi, pour diverses raisons, de ne pas monter violemment au crneau. On m'aurait tax d'opportunisme et de publicit de mauvais got, et cela aurait finalement des-servi l'action que je menais. Je prfrais me taire, attendre et voir venir. Prudence, toujours. Je me suis content de remettre des documents quelques journalistes qui les exploitrent.

    J'apprenais toutefois qu'un vent de panique avait balay les hautes sphres politiques, ds qu'elles avaient eu connaissance de l'accident. Tout a ensuite t contrl et supervis, par le truchement de Matignon, depuis l'Elyse. Un commandement politique qui a considrablement retard l'arrive des secours. Et c'est finalement un journaliste, Jean-Pierre Stucki, qui finira par reprer l'pave ! Stucki et son confrre Francis Guthleben, dans un livre intitul La nuit du mensonge, expliquent, aprs une

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    enqute minutieuse, pourquoi les secours se sont fait attendre si longtemps.

    C'est 19 h 20 mn 33 s trs prcisment que l'Airbus A 320

    d'Air Inter s'est cras sur les pentes du Mont Sainte-Odile, quelques kilomtres seulement de l'aroport de Strasbourg. L'pave ne sera pourtant officiellement localise qu' 23 h 51. Plus de quatre heures et demie aprs le crash !

    Pourtant, 50 km au nord de Strasbourg, la base arienne de Drachenbronn, le lieu de la catastrophe a rapidement t connu. Ainsi qu'au centre de contrle de Strasbourg. L'enre-gistrement des communications tlphoniques montre qu' 19 heures 31, les militaires transmettaient la position du crash, moins d'un kilomtre prs. Malgr cela, l'pave a t dcouverte par un journaliste. On peut s'interroger sur le dlai supplmen-taire que les survivants auraient du subir si Jean-Pierre Stucki n'avait dcouvert l'pave, en communiquant immdiatement la localisation par radiotlphone.

    Les ordres venaient apparemment du Coda, le Centre oprationnel de la dfense arienne, implant Taverny, dans le Val d'Oise. Ce que confirme le colonel Traslglise, du corps des sapeurs pompiers, prsent au PC de la gendarmerie de Barr, seulement quelques petits kilomtres de la catastrophe : On peut s'interroger sur les conditions dans lesquelles ont t effec-tues les premires recherches. Mais c'est, entre autres, parce qu'il ne nous a jamais t possible d'obtenir la moindre infor-mation quant l'altitude de l'avion et sa trajectoire.

    Et une fois l'pave dcouverte, les mdecins en ont t tenus loigns.

    Pour comble, la prfecture du Bas-Rhin, sous prtexte que les journalistes pouvaient intercepter les messages, avait, elle aussi, ordonn de couper la frquence d'interconnexion radio qui permettait de coordonner les secours. Lorsque ceux-ci arriveront enfin, ils trouveront 87 morts et 9 blesss.

    Des blesss sont morts des consquences de ces errements criminels.

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    L'arme a jou la Grande Muette, mais elle n'a pas t la seule. Il y a eu plusieurs violations de spultures en Alsace. A chaque fois, Franois Mitterrand est intervenu publiquement pour faire part de son motion. Le chef de l'Etat s'est galement rendu Bastia, au stade de Furiani, lorsque avant le match Bastia-Olympique de Marseille une tribune s'est croule, faisant 15 morts. Lors des inondations meurtrires de Vaison-la-Romaine, le prsident s'est galement dplac. Pour le Mont Sainte-Odile, avec 87 morts, la catastrophe la plus meurtrire en France depuis plusieurs dcennies, Mitterrand est rest trs discret. Pas dmotion. Rien. Le silence. Mitterrand se saurait-il responsable de cette tragdie ?

    Pour ces raisons, les familles de victimes et les survivants risquent d'attendre longtemps la vrit. Sans parler des indem-nisations. Tout a t diligent pour enterrer l'affaire.

    Deux ans plus tard, le 6 avril 1993, je me suis rendu Strasbourg, convoqu par un juge d'instruction la suite d'une plainte que Mermaz avait dpose contre moi. Cela me donnera l'occasion de rencontrer deux dirigeants de l'association ECHO de soutien aux victimes et familles de victimes de l'accident du Mont Sainte-Odile (son prsident Tomi Ungerer et Mme Kress). Durant les deux heures de cette rencontre, M. Ungerer me fera part de ses convictions : la cause de l'accident tait un effet magntique du mur paen (un vestige historique situ prs du lieu du crash). Et, pour le reste, lui et Mme Kress chargeront la presse et les journalistes. Des charognards etc. Je leur ferai remarquer que les mdias taient leur seul atout dans la mesure o il ne fallait pas trop compter sur la justice. Rien n'y fit. Ils s'en prendront galement aux auteurs du livre La nuit du mensonge qui sortait le jour mme. Alors que ce livre rvlait quantit de faits intressants et profitables aux familles de victimes.

    Curieuse association. Il est vrai qu'elle a pour origine des pro-ches d'Air France. Aurait-elle t monte de toutes pices pour manipuler et canaliser les familles de victimes ? Son seul objet

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    serait-il de faire accepter ces familles de ne jamais connatre la vrit et d'attendre des annes quelques maigres indemnits ? Dans ces affaires o l'argent le dispute la politique, tout est possible.

  • TRANSITION

    VERS EXTRA SUIVAN (Chapitr

    IT

    T

    e 8)

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    Que la bte meure... Tel tait le mot d'ordre. Certains interlo-cuteurs anonymes me lanaient des menaces au tlphone. La raison en tait simple. Le 25 juin 1992, j'avais t interview par France 3 Alsace au sujet du Mont Sainte-Odile. Et j'avais natu-rellement dit le fond de ma pense. Le soir mme, une voix mystrieuse me dclarait : Tu vas bientt tre clochard et tu vas tre suicid parce que tu seras devenu clochard, et tu risques mme de te faire descendre avant, si tu ne fermes pas ta gueule...

    Le reportage a t diffus le 2 juillet suivant, aux infor-mations rgionales du 19/20. Paul Amar, au journal national, en a dit quelques mots. Et comme en cho ces rvlations tl-vises, de nouvelles menaces anonymes. Ce qui ne m'empcha pas de dormir.

  • TRANSITION VERS EXTRAIT SUIVANT

    (Chapitre 8)

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    Et le 14 octobre 1992, j'adressai au juge Guichard, charg du dossier judiciaire des deux accidents d'Airbus A 320 survenus en Alsace, une lettre qu'il convient de reprendre largement :

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    Monsieur le Juge,

    [Quelques commentaires sur l'absence de GPWS, avertisseur de proximit du sol, sur l'A 320 accident au Mont Sainte-Odile, avec une note jointe]

    Il apparat ainsi que Monsieur MONNIER, Prsident de la

    Commission administrative d'enqute, a menti le 20 fvrier 1992 en dclarant que le GPWS n'aurait retenti que pendant une dizaine de secondes. J'aurai l'occasion de revenir sur la composition et l'honntet de cette commission.

    Avant de poursuivre, je crois utile de rappeler les conditions de l'enqute sur l'accident de Habsheim. Les falsifications, tant intellectuelles que matrielles, des premires enqutes relatives cet accident sont maintenant clairement tablies. Je souligne que j'ai t le premier contester la version officielle, dnoncer ces falsifications, et j'ai maintenu ces accusations malgr les pressions, ce que Michel ASSELINE rappelle dans son livre qui vient de paratre. J'avais par ailleurs dnonc l'attitude de certains dirigeants flons du SNPL, en particulier celle du Pr-sident, Alain DUCLOS, et du Vice-Prsident, Xavier BARRAL.

    S'agissant de l'accident du Mont Sainte-Odile, le scnario semble identique. Je constate que plusieurs intervenants dans les falsifications relatives l'accident de Habsheim sont membres de la Commission d'enqute sur laccident du Mont Sainte-Odile (en particulier son Prsident et son Vice-Prsident !) et il semble que Messieurs GENDRE et BOUVET, successeurs de Messieurs DUCLOS et BARRAL, adoptent la mme attitude complice que leurs prdcesseurs.

    Je remarque par ailleurs que Messieurs VENET et BELOTTI, Experts, sont susceptibles plusieurs titres de subir des pressions. La remise de leur rapport dfinitif dans le cadre de l'accident de Habsheim se fait anormalement attendre, alors que la contestation de la version officielle repose uniquement sur Michel ASSELINE et moi-mme depuis quatre ans et alors que

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    nous sommes tous les deux interdits de travail en France, subissant ainsi un chantage la dchance, voire pire (cf. mes lettres vous des 14 et 19 septembre 1992).

    Il apparat par ailleurs que la cause la plus probable de l'accident du Mont Sainte-Odile -le GPWS restant un quipement salvateur uniquement- est une fausse information de position donne par l'informatique de bord, associe au manque d'infor-mation et de consigne aux quipages. [Suit, en quelques phrases, un rsum des faits qui militent de faon convergente et cohrente pour la dfaillance des systmes de navigation]

    Comme pour l'accident de Habsheim, les pouvoirs publics mentent de faon grossire.

    Air Inter se vantait, par de pleines pages de publicit couleur, d'avoir les A 320 les plus performants du monde. On com-prend mieux les raisons de ces performances quand on sait que toutes les compagnies trangres avaient donn des consignes spciales pour les approches VOR et VOR-DME sur A 320, cer-taines ayant mme purement et simplement interdit les approches de ce type.

    La Direction dAir Inter exploitait et, surtout, la Direction Gnrale de lAviation Civile laissait exploiter lAirbus A 320 en France dans des conditions inacceptables, alors que diff-rents vnements devaient conduire prendre certaines pr-cautions et alors que, de plus, les A 320 dAir Inter n'taient mme pas quips d'un systme aussi essentiel que l'avertisseur de proximit du sol (sauf dsintgration ou perte de contrle en vol, rares, tous les accidents sont, par dfinition, la rencontre de l'avion avec le sol !).

    Les responsabilits dans l'accident du Mont Sainte-Odile se situent la Direction d'Air Inter et la Direction Gnrale de l'Aviation Civile, ainsi qu' la Direction du Groupe Air France. Je note sur ce point que Messieurs SPINETTA, GOURGEON et ATTALI sont parfaitement informs de mon affaire et de ses raisons.

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    Messieurs GOURGEON et SPINETTA taient Conseiller du Ministre en 1988/1989/1990 et taient chargs du dossier Hab-sheim. Monsieur GOURGEON a confirm sous serment (not par Greffier) qu'il tait en relation, mon sujet, avec Jean-Franois GUEULLETTE, actuellement Conseiller du Prsident de la Rpublique.

    Je tiens votre disposition un ensemble de documents relatifs non seulement l'accident dHabsheim mais galement la perte du DC 10 d'UTA et laccident de Bangalore, et d'au-tres vnements, qui montrent que les 87 victimes du Mont Sainte-Odile ont t sacrifies pour cause de raison d'Etat.

    Il est intressant de constater que Monsieur SPINETTA a bnfici d'une promotion dans l'Ordre National de la Lgion d'Honneur aprs l'accident du Mont Sainte-Odile, ce qui n'est pas sans rappeler la distinction dans cet Ordre de Monsieur GARETTA en 1989, dans l'affaire dite du sang contamin !

    Je tiens galement votre disposition les lments qui permettent de penser que des responsabilits doivent tre re-cherches des niveaux suprieurs.

    Je vous prie etc. Une prcision sur Jean Spinetta. C'tait le prsident d'Air Inter

    au moment de l'accident du Mont Sainte-Odile. Il est maintenant, depuis avril 1994,... conseiller du Prsident de la Rpublique. La lgion d'honneur n'tait pas suffisante !

    En janvier 1993, quelques jours avant le premier anniversaire

    de la catastrophe du Mont Sainte-Odile, le juge Guichard incul-pera Jacques Rantet, chef pilote Air Inter. Le motif tait l'ab-sence de GPWS sur les A 320 de cette compagnie. Il fallait bien lcher du lest au moment de cet anniversaire. Si la justice avait fait correctement son travail, cette inculpation aurait d inter-venir beaucoup plus rapidement, au plus tard un mois aprs l'accident. Toutes les informations taient disponibles ce mo-ment. Peu aprs la publication du rapport prliminaire, en fvrier 1992, j'avais rdig une note -celle que j'ai transmise le 14

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    octobre 1992 au juge Guichard-. On y trouvait dj tous les lments qui entraneront l'inculpation de Jacques Rantet. La plupart des mdias avaient d'ailleurs diffus des informations concordantes sur ce point dans le mois suivant l'accident. Et malgr l'vidence, il aura fallu un an et toute la persvrance de Matre Alain Behr, avocat de plusieurs familles de victimes, pour qu'enfin cette inculpation soit prononce.

    En dcembre 1993, la Commission administrative d'enqute

    rendait son rapport final sur l'accident du Mont Sainte-Odile. Elle envisage plusieurs causes possibles qui, toutes, font partie du groupe des anomalies dans le plan vertical. Interrog par des journalistes, son prsident rpondra que les hypothses du groupe des erreurs dans les positions gographiques avaient t car-tes a priori. Tout simplement.

    Ces travaux tronqus amnent se remmorer l'incident de

    Bordeaux du 5 fvrier 1992. Quelques jours seulement aprs le Mont Sainte-Odile. Incident qui a entran, officiellement, l'in-terdiction des approches du type de celle qui a conduit au crash. Dans une note du 12 fvrier 1992 d'Air Inter, rfrence DENY-92265-XDH/rm signe de Xavier D'Hebrail, chef du secteur A 320 de cette compagnie, on apprend que deux jours aprs l'incident de Bordeaux, le dpouillement de l'enregistreur de paramtre tait disponible. Il s'agit du QAR, qui enregistre les mmes paramtres que le DFDR sur une cassette destine aux services de maintenance, qu'il suffit de retirer sans aucun d-montage. Cet enregistreur avait permis de constater l'existence d'un glissement de cartes (fausse position donne par l'infor-matique de bord). Deux jours plus tard...

    Deux ans et demi aprs l'accident du Mont Sainte-Odile, o

    ce mme QAR a t rcupr intact, avec des donnes imm-diatement exploitables, on ignore toujours ce qu'il en est. Certains paramtres concernant le fonctionnement des systmes de navigation n'ont jamais t divulgus, par exemple ceux qui concernent la position du slecteur d'chelle. Et il y en a d'autres,

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    tout aussi intressants, qui sont rests confidentiels. Sur l'Airbus A 320, le glissement de cartes relev Bordeaux et pass sous silence au Mont Sainte-Odile ne constitue ni une nouveaut, ni une exception.

    En dcembre 1989, au dcollage d'Amsterdam d'un A 320 d'Air France, les cartes reprsentes sur les crans de navigation se mettent glisser vers la droite, provoquant en quelques se-condes une erreur de vol de prs de 2,8 kilomtres. L'incident se renouvellera sur le mme appareil lors d'un vol Paris-Amsterdam.

    Un document d'Air Inter, dat d'octobre 1991, mentionne d'autres types d'anomalies du systme de navigation auto-matique (le FMGS pour Flight Management and Guidance System). Ces dfauts ont notamment entran des erreurs de position au dpart de Mulhouse et l'approche de Strasbourg. D'aprs ce document, trois cas d'erreur de position FMGS avaient t constats peu avant l'accident du Mont Sainte-Odile, dans ce triangle des Bermudes alsacien :

    - Lors du vol Air Inter IT 812 Mulhouse-Paris du 19 octo-bre 1991,

    - du vol Air Inter IT 207 Paris-Strasbourg du 22 octobre, - et du vol Air Inter IT 022 Mulhouse-Paris du 24 octobre.

    Des carts de 15 18 km entre les positions indiques aux pilotes par les ordinateurs de bord et les positions relles des appareils avaient t constats. Pourquoi ? Parce que les ordi-nateurs, qui calculent la position grce des balises radio-lectriques au sol, avaient confondu le signal mis par une balise civile avec celui provenant de l'arodrome militaire de Sollingen ! Les systmes de surveillances continuant afficher haute prcision ! Vive l'lectronique.

    Sous peine de poursuivre l'hcatombe, certaines mthodes d'exploitation de l'A 320 taient donc invitablement revoir. Conscient du problme, le nouveau ministre des Transports, Bernard Bosson, finira par prendre diverses mesures en dcembre 1993, notamment :

  • 112

    - Les programmes de formation et de contrle [des qui-pages] seront rviss pour inclure des scnarios d'anomalies de situations, spcifiques l'utilisation des logiciels embarqus et des EFIS [systmes d'instruments de vol lectroniques], et tirs du retour d'exprience ;

    - les autorits concernes par l'agrment des simulateurs procderont une rvision des catalogues de pannes proposs pour tenir compte de pannes spcifiques associes aux logiciels embarqus et aux EFIS ;

    - il sera procd l'tude des mthodes par lesquelles les constructeurs pourraient, le plus en amont possible dans le processus industriel, obtenir les meilleures informations sur les comportements probables des utilisateurs face aux novations susceptibles d'entraner des consquences importantes au plan ergonomique ;

    - les autorits de certification entreprendront une rvision du rglement de certification des avions de transports.

    Le demi-tour est ainsi officiel, rdig noir sur blanc, estam-pill par le ministre des Transports. Finie la politique de l'A 320 que ma concierge pourrait piloter. Le fou avait raison. Dommage qu'il ait fallu accumuler les accidents et les morts pour se rendre l'vidence.

    FIN DES EXTRAITS

    Suivent les annexes (Sainte-Odile uniquement)

  • 189

    ANNEXES

  • 201Annexe N 9

    Panneau suprieur central montrant les deux slecteurs d'chelle pour les

    cartes de navigation. Pour sa situation, voir annexe suivante. (Cf. page 94).

  • museFichier en pice jointeLisibilit - Rotation (Double clic)

  • 202Annexe N 10

    Photo du cockpit de lA 320. (Cf. pages 95 et 115).

  • museFichier en pice jointeLisibilit - Rotation (Double clic)

  • 203Annexe N 11

    Documentation d'Airbus Industrie sur les caractristiques des paramtres enregistrs par le DFDR. On voit que la position

    du slecteur d'chelle est enregistre. (Cf. page 95).

  • museFichier en pice jointeLisibilit - Rotation (Double clic)

  • 204Annexe N 12

    Ci-dessus et ci-contre : rapport d'incident du Cdt Pirou du 14 mars 1991. (Cf. page 96).

  • 205Annexe N 12 (suite)

    (Cf. page 96).

    Chapitre 7Chapitre 8AnnexesAnnexe 9Annexe 10Annexe 11Annexe 12