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Aquisuds Aquisuds Aquisuds Aquisuds A quisuds le pianiste François Faure la diva Jahida Wehbé Le Mag © Eric Mazeau ©Eric Mazeau ©Eric Mazeau Avril-Mai-Juin 2013 Le musicien François Faure Sonorites c ap-verdiennes Auras Trimestriel gratuit N˚1

Aquisuds - dominique-deblaine.com

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AquisudsAquisudsAquisudsAquisuds

Aquisuds

le pianiste François Faure

la diva Jahida Wehbé

Le Mag

© Eric Mazeau©Eric Mazeau

©Eric Mazeau

Avril-Mai-Juin2013

Le musicien François Faure

Sonorites cap-verdiennes

Auras

Trimestriel gratuit N˚1

Page 2: Aquisuds - dominique-deblaine.com

La Belle & la Bête

elin, 2012

© Eric Mazeau

© http://www.agence-immobilier-bordeaux.fr

votre trimestrielAqu isu ds Le mag

Aquisuds

©Eric Mazeau

Page 3: Aquisuds - dominique-deblaine.com

La Belle & la Bête

.

Rafael LucasDirecteur de la publication

Journalistes & Correspondants

Jamal NajahTouria Bel l i touDenyse TherrienPhil ippe SoulardDabila OuattaraAbdellah OuzitaneMaurice DoulaDavid GaüzereDominique DeblaineSabine BuchmannYasmine Hamarhoum Eric Mazeau Photographe de presse

Concept ion & graphisme :la rédact ion

aquisuds@hotmail . fr

www.aquisuds. fr

N° CPPAP en cours

AquisudsL’EDITO 3

Faouzia Hilmy 4

Amina Saïd 6

François Faure 8

Auras 10

Jahida Wehbe 11

Des émirs féminins 13

Paroles d’une île vagabonde 17

Rikkat KUNT 19

Pouvoir politique féminin 22

La voie est livre 24

Chercher la femme ? Où donc et pourquoi ? Pour se faire une idée du stat-ut que lui réservent nos civilisations modernes de l’après Guerre de 39-45. Certains domaines lui semblent « naturellement » réservés. Elle continue d’occuper une place prestigieuse, en tant qu’être fantasmé, célébré par-fois jusqu’au mysticisme, au cinéma, dans la peinture, dans les chansons d’amour, et dans toute une tradition de littérature poétique. Comment oublier ce beau vers de Victor Hugo « Je respire où tu palpites”1ou encore les vers magnifiques qu’inspirent à Aragon Les yeux d’Elsa :

Tes yeux sont si profonds qu’en me penchant pour boire

J’ai vu tous les soleils y venir se mirer

S’y jeter à mourir tous les désespérés

Tes yeux sont si profonds que j’y perds la mémoire.

Pourtant, objet du désir idéalisé, la femme reste encore indésirable dans de nombreux espaces de pouvoir, y compris dans le domaine des responsabilités religieuses, où la condition féminine traîne un parfum trouble de sexualité et d’infériorité, très mauvais pour la spiritualité. Mais c’est surtout dans le domaine du droit de vote et des hautes responsabilités politiques que la présence ou l’absence de la femme est révélatrice de paradoxes et de surprises.

Pour ce qui est du droit de vote, l’un des pays les plus audacieux en la matière fut la Nouvelle-Zélande où les femmes purent élire en 1893 mais durent attendre 1915 pour être éligibles. En France c’est l’ordonnance du 21 avril 1944 qui autorise le droit de vote aux femmes. Parmi les pays qui ont précédé l’Hexagone dans cette marque d’égalité citoy-enne, on trouve des noms pas forcément attendus : l’Albanie (1920), le Kazakhstan (1924), la Turquie (1930, éligibles en 1934), le Bré-sil et Cuba (1934), la Kirghizie (1936), l’Ouzbékistan, et la Boliv-ie (1938). Donc chercher la femme ? Oui. Il faut continuer à traquer les zones d’inégalité homme/femme, pour pouvoir rêver à âmes égales.

1 Rafael Lucas

� VictorHugo,LesContemplations

Cherchez la femme

Editorial

Page 4: Aquisuds - dominique-deblaine.com

La calligraphie, c’est l’art de la belle écriture, l’art de bien former les ca-ractères d’écriture. L’instrument de l’écriture est le calame (un roseau taillé en biseau au bec refendu). La calligraphie est l’entrelacs d’une li-gne de base simple et de lignes ver-ticales. Ils sont complétés par des si-gnes typographiques (voyelles brèves, …). La calligraphie répond à une lo-gique interne fondée sur l’équilibre et le dynamisme de la composition.

Cela permet d’expliquer pourquoi cet art peut émouvoir les non arabo-phones (c’est la beauté de la calligra-phie qui émeut, les impressions qui en ressortent). Cependant quelques artistes contemporains réalisent des calligraphies à partir de phrases célè-bres d’écrivains français ou traduites de l’arabe. Ces œuvres mettent en évi-dence la cohérence d’un thème avec un dessin : une vraie poésie où la rime se retrouve dans l’ornement des lettres

Il existe des dizaines de styles de cal-ligraphie arabe. Les plus connus sont le Koufique, le Diwani, et le Persan. Faouzia Hilmy pratique une cal-ligraphie qui explorer le sens infini des lettres dans un style sur lequel souffle un grand vent de modernité. Sa calligraphie séduit par sa forme et le sens qu’elle véhicule. Elle se nourrit de la spiritualité certes, mais surtout d’une gestualité obsession-nelle, celle qui est sans cesse à la re-cherche des formes quasi parfaites.

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et l'art de l'écritureFaouzia Hilmy

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30 dalles, béton, peinture dorée, L 180 x l 90 x h 10 cm (1 dalle)

Aquisuds : Comment la calligraphie est-elle venue à vous ? Et pourquoi avoir choisi cet art ?

La calligraphie arabe me fascine et a tou-jours éveillé beaucoup d’émotions en moi. Peut - être parce que j’ai appris l’arabe litté-raire dès le plus jeune âge. Lorsque j’ai ob-tenu ma maîtrise en marketing, j’ai travaillé comme commerciale pendant plusieurs an-nées sans réel intérêt.

Puis je me suis inscrite par hasard à un stage d’initiation à la calligraphie arabe. J’ai eu un véritable coup de cœur pour cet art ! Lors de ce stage j’ai rencontré des calligra-phes syriens avec lesquels j’ai pris des cours particuliers pendant plusieurs années.

J’ai commencé à exposer dans différents lieux tout en continuant à me perfectionner

en calligraphie

-Est-ce que la calligraphie est la révé-lation d’une nouvelle originalité of-ferte aux mots ?

L’écriture arabe devient art dès les premières années de l’Islam au 7eme siècle. Elle fut utilisée dans les manuscrits mais aussi dans l’ornementation architecturale dans tous les pays marqués par la civilisation musulmane, de la Syrie à l’Andalousie. L’interdiction faite aux musulmans de représenter les êtres animés à permis aux calligraphes de dével-opper leur créativité pour utiliser au mieux l’aspect graphique de l’écriture.

Cela fait bien longtemps que la calligraphie est utilisée dans les domaines artistiques et publicitaires, mais il est vrai qu’elle suscite beaucoup d’intérêt actuellement autant de la part des orientaux que des occidentaux. Pour ma part la calligraphie arabe a toujours nourri mon inspiration et ma créativité.

Quels sont vos projets pour donner plus de la visibilité à cet art?

J’espère faire des expositions au Moyen Ori-ent, notamment à Dubaï et au Qatar. J’aime beaucoup le dynamisme de ces régions en particulier au niveau culturel.

par : Hamarhoum Yasmine

pour visiter le site Internet de l’artiste:

http://www.faouziahilmy.com

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Page 6: Aquisuds - dominique-deblaine.com

j’ai dormi trois siècles sur un lit de rochers

j’ai vu des choses oubliées des hommes

j’ai mesuré la distance qui sépare le ciel de la terre

j’ai lu les lignes de la main j’ai rendu les oracles

une voix qui n’était pas la mienne a parlé par ma bouche

j’ai disparu dans une ville elle-même disparue

la mer s’est retirée des portes de ma ville

je me suis concilié les fleuves de la terre

j’ai orné le jour du tatouage de mes rêves

mon visage a vu mon autre visage

je suis née plusieurs fois de chaque étoile

je suis morte autant de fois du soleil des jours

j’ai pris très tôt des bateaux pour nulle part

j’ai demandé une chambre dans la patrie des autres

je n’avais rien accompli avant nos adieux

j’ai habité le couchant le levant et l’espace du vent

j’étais cette étrangère qu’accompagnait le soir

deux fois étrangère entre nord et sud

j’ai gravé des oiseaux tristes sur des pierres grises

j’ai construit des radeaux où il n’y avait pas d’océans

j’ai dressé des tentes où n’étaient nuls déserts

des caravanes m’ont conduite vers un rêve d’orient

mes calligraphies ont voyagé sur le dos des nuages

je me suis souvenue de la neige des amandiers

6

j’ai gardé ton amour au creux de ma paume

j’ai tissé un tapis avec la laine du souvenir

j’ai pansé les plaies du crépuscule

j’ai mis en gerbes mes saisons pour les offrir à la vie

j’ai compté les arbres qui me séparent de toi

j’ai serré une ceinture de mots autour de ma taille

j’ai recouvert d’un linceul l’illusion des miroirs

j’ai cultivé le silence comme une plante rare

lueur après lueur j’ai déchiffré la nuit

la mort un temps m’a courtisée

je t’ai attendu sans t’attendre

jusqu’à ce que tu deviennes poème

j’ai mêlé la chair à l’argile et à la lumière

j’ai mêlé le souffle à ce qui était déjà souffle

j’ai habité la maison chaude de ta voix

j’ai fait naître les souvenirs avant qu’ils n’aient vécu

j’ai caché mon amour sous les pudeurs de l’ombre

je me suis demandé comment le dire avant de le dire

je me suis alliée à l’alphabet du sable

aux ondulations de la vague

à la paix qui clôt tes paupières

mon chant sera à l’image de cette paix

j’ai reconnu l’aube à l’aube dans son regard

j’ai voulu le jour à l’image de ceux que j’aime

j’ai apprêté la nuit pour la moisson du rêve

j’ai courtisé le visible j’ai étreint l’invisible

© Amina Saïd, La Douleur des seuils / Edition La Différence, Paris, 2003

Sentier de lumière

Page 7: Aquisuds - dominique-deblaine.com

©:http://jlmi.eklablog.com

Amina Saïd :

de la fulgurance à la simplicité

Amina Saïd est une des voix les plus saluées de la poésie con-temporaine. Récipiendaire de trois prix dont le prix interna-tional de poésie Antonio Vicar-ro (2004), pour son recueil La Douleur des seuils, Amina Saïd poursuit une quête initiatique, quête de lumière, à travers une œuvre écrite dans sa langue ma-ternelle, le français. Depuis ses premiers recueils au début des années quatre-vingt et jusqu’à présent Elle explore une constel-lation de lieux, entre la Tunisie et la France où elle vit depuis de nombreuses années. La poésie de Amina Saïd est empreinte de ses cultures de naissance et de celles qu’elle aborde par la pensée, au cours de ses nombreux voyages .

..Sa poésie lui a valu les prix Jean Malrieu, en 1989, pour Feu d’oiseaux, publié dans Revue Sud (no 84), Charles-Vildrac (Société des gens de lettres), en 1994, pour L’Une et l’autre nuit, publié aux éditions Le Dé bleu, en 1993 et le prix international de poésie Antonio Vicarro, qu’elle a reçu lors du Marché de la poésie

de Paris, en juin 2004, pour son recueil La Douleur des seuils.

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Vendredi 29 mars 2013 à 18 h 00

Rencontre dédicaces

Auditorium Paul Méry / Médiathèque

Ernest Pépin figure parmi les écrivains majeurs de la Guadeloupe.

Il est l’invité du 10ème Concours

Citoyenneté Europénne organisé

par le Conseil Général de la Gironde et France Libertés Girondedans le cadre du Printemps des poètes.

Pôle culturel et sportif du Bois Fleuri

Rue Lavergne, à Lormont

Rencontre littéraire animée par Rafael Lucas, Maître de Conférences àl’université de Bordeaux III, chercheur en littérature francophone et

membre de l’association Lakay.

Denyse Therrien

Ernest Pépin

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Proche-Orient : Boualem Sansal et David Grossman ap-pellent à la paix

François

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lyrisme envoûtant et vérité du sentiment

Faure

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Après une solide formation classique acquise au Conservatoire de Bordeaux, François Faure s’est tourné vers le Jazz…Artiste singulier, sensible, secret et lyrique, ne faisant guère de concessions, il est de ceux qui forgent la féerie, es-quissent un autre monde, cheminent sur le rêve. On comprend mieux son univ-ers quand on sait qu’il aime Debussy, Hampton Hawes, John Coltrane, Miles Davis, John Scofield … et bien sûr celui qui joue l’espace et le silence, Bill Ev-ans. En 2009, il retrouvait ses émotions d’adolescent au Grand Théâtre de Bor-deaux, dans lequel il avait joué, à 14 ans, avec l’orchestre philarmonique le Concer-to en Ré de Mozart, grâce à l’invitation de Kwamé Ryan (chef d’orchestre de l’ONBA) en se produisant avec son trio.

Direction Sud-Ouest, That’s All, narration musicale et vérité du sentimentL’album « Direction Sud-Ouest », sous la direction de son complice de tou-jours, Philippe Laccarrière (contre-basse), très remarqué à sa sortie, a été réédité. Jazzman l’a chroniqué dans le numéro de mars 2013 (extrait) :

« […] Assumant les marqueurs que sont John Coltrane, Bill Evans, Chick Corea et Keith Jarret, ces trois mousquetaires […] François Faure sait raconter une his-toire qui va au cœur, aidé par une écri-ture que la vérité du sentiment rend inattaquable. […] » Denis Lacerna.

Son album « That’s All » (batteur : De-nis Fournier), élu CD du mois et de la semaine à Jazz à FIP, coup de cœur de l’année (1993) de Harmonia Mundi, avait ému par son élégance et sa musicalité. Il a été réédité en 2010 à la demande du public japonais et a été chroniqué, en-tre autres par Xavier Daverat de Gironde Magazine et par Le Monde de la musique :

« Un vrai trio, avec partage du travail. Le terme prend ici son véritable sens: la recher-che de la plus grande efficacité en valorisant le meilleur de chacun. […] La forme du trio est ici evansienne. On retrouve le sens de l’espace et de son occupation, menée de manière spécifique par chaque participant. Mobilité du bassiste, sans étalage ; légèreté du batteur, troisième mélodiste ; sérénité apparente du pianiste. Car, si l’on évoque Bill Evans pour l’ensemble du trio, notam-ment dans « That’s All » ou « Mathilde », le point d’ancrage de François Faure se trouve chez Hampton Hawes, sensibilité à vif et réserve pudique mêlées. (Joël Pailhé).

L’album Emily , joie de vivre et consécration d’un trio fabuleuxSon dernier album, « Emily » (batteur : Thierry Arpino) fait entendre le souffle et la fabuleuse respiration du trio. Salué dans différentes émissions telles Jazz à FIP, Open Jazz, Bleu la nuit (France Musique), Ar-rivée d’air chaud (France Bleue), il a égale-ment été chroniqué, notamment par le dis-tributeur japonais Disk Union (extrait) :

« Nous avons acquis le meilleur du trio fran-çais ! C’est le dernier disque de Francois Faure, le pianiste français très populaire depuis son génial « That’s All » de 1993 (celui qui se vend à plusieurs dizaines de milliers de yen en seconde main). Cette œuvre nouvelle est vivante et rythmée, le fin du fin ! Elle comporte la chan-son qui donne son titre à l’album, ainsi que « You and the night and the music », elle mélange des arrangements ortho-doxes et d’autres très subtils, elle donne une impression nouvelle aux oreilles à l’instant même où elle y parvient. À l’image de la couverture, imprégnée de blanc, elle transporte un vent frais et parle d’une voix pétillante et élégante.

Formation classique et amour du Jazz

La tonalité majeure de «Emily» est la joie de vivre, l’ivresse et l’envoûtement. La remarquable respiration présen-te dans tous les morceaux projette l’auditeur au cœur d’une musique qui crée un monde nouveau. « Emily » est l’aventure d’une connivence sur des sentiers inédits tel celui où le trio fait majestueusement survenir le ter-ritoire du binaire en lieu et place du ternaire dans le thème “Emily”. Plus que la fantastique composition “You don’t know what love is”, son interpré-tation en duo nous donne à entendre le rapport à la création du pianiste et du contrebassiste (toujours Philippe Laccarrière), leur souffle et la fabule-use respiration de leur musique.

Si François Faure se produit en trio, sa formation de prédilection, il joue également en solo ; sa dernièrement prestation solo dans le bordelais s’est déroulée lors du premier Festival Jazz Saint-Emilion (juillet 2012).

Dominique Deblaine

Maître de Conférences à l ’Universi té Montesquieu Bx IV

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Sonorites cap-verdiennes

Aurélio Santos connu sous son nom d’artiste Auras est né à Praia (Cap-Vert), en 1975, d’une famille relativement modeste. Il s’est initié seul à la guitare et au cavaquinho. Il a commencé par animé de nombreuses soirées dans les restaurants de la capi-tale Praia puis il a fait ses débuts sur scène avec la chanteuse Gardénia Benros, (venue des Etats-Unis) lors d’un concert au centre culturel de Belém (CCB) à Lisbonne, Auras a quitté le Cap-Vert en 2002 pour poursuivre sa carrière universitaire à Lisbonne. Il a alors collaboré avec Bana, Nancy Vieira, etc.

C’est ainsi qu’en 2004, la chanteuse Lura lui propose d’intégrer son groupe en tant que guitariste et choriste, ce qui lui inspirera la composition de sa sixième chanson du CD « M’Bem di fora » (je viens d’ailleurs), qui lui est dédiée. Pendant presque quatre ans, ils ont fait ensemble de nom-breuses tournées internationales, sillonnant ainsi les scènes et les festivals de France, d’Amérique, du Pacifique, etc.

Tout au long de son parcours, Auras a participé également à l’enregistrement de plusieurs CD. Auteur de plusieurs composi-tions, depuis 2009 il s’est mis au chant ; et en juin 2010, il a sorti son premier album intitulé « Skrabu d’Afrika » (Esclaves d’Afrique)

Titulaire d’un diplôme d’enseignement de la langue Por-tugaise, Auras met aussi en place des concerts pédagogiques dans les écoles auprès d’un public adulte, C’est une au-tre manière de promouvoir la culture et la musique capver-dienne, en lien avec les autres pays du monde lusophone.

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© Eric Mazeau

Auras

Page 11: Aquisuds - dominique-deblaine.com

Aquisuds :

Vous tracez votre voie, un peu à l’écart des styles les plus vulgari-sés de la musique cap-verdienne. (mornas, coladeira, funana et zouk). Comment est née cette dé-marche et qu’est-ce qui vous incite à y persévérer ?

Cette démarche est spontanée, et en quelque sorte inconsciente. Le fait d’écouter plusieurs styles de musique et d’avoir beaucoup voya-gé a certainement joué un rôle en ce sens. J’y persévère parce que, même en restant très accroché à mes racines, il me semble impor-tant de s’ouvrir au monde, vers ce que les autres cultures peuvent ap-porter à l’enrichissement et à l’évo-lution de la culture cap-verdienne.

On sent la présence de l’Histoire du Cap-Vert dans vos chansons. Quels sont les aspects de l’Histoire que vous préférez chanter ?

Oui, c’est évident. Pour moi la mu-sique doit accomplir aussi une cer-taine fonction pédagogique dans la société, transmettre l’Histoire et des valeurs positives, sans oublier le côté artistique et ludique. Les aspects de l’histoire que j’aime chanter sont plutôt le métissage et l’esclavage, qui sont les véritables piliers de l’identité cap-verdienne.

Pouvez-vous nous parler de quel-ques autres thèmes qui vous inspi-rent ?

L’amour, la liberté, les anecdotes, les aventures, etc.

Vous faites aussi des concerts pédagogiques ; quelles différenc-es notez-vous entre l’accueil des jeunes de milieu scolaire et le grand public ?

La grande différence c’est que le grand public participe en chantant ou en dansant, tandis que les jeunes de milieu scolaire démontrent une grande curiosité pour toucher et es-sayer les instruments traditionnels que je présente pendant ces concerts.

Par moments on perçoit des so-norités du Nordeste brésilien et un souffle de blues dans vos chan-sons. Est-ce votre choix personnel ou est-ce dû à la culture musicale cap-verdienne ?

Ces styles ont beaucoup influencé la musique cap-verdienne. En plus, j’écoute un peu de tout, ce qui fait que c’est ma façon naturel-le de m’exprimer musicalement.

Vous êtes la voix du Cap-Vert en Aquitaine. Est-ce un défi, une fi-erté ou un plaisir ?

C’est plutôt un défi. Comme la seule référence de la musique cap-verdienne continue à être Cesária Évora, représenter le Cap-Vert musicalement dans un style qui reste encore très inconnu c’est un vrai défi. Surtout quand ont est un artiste indépendant.

Par Aquisuds

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Une grande diva de la chanson arabe c lassique

Jahida Wehbe une grande voix originaire du pays du Cèdre, très connue dans le monde de la musique arabe. Poétesse, comédienne de théâtre, de télévision, de cinéma, diseuse de poèmes, elle est également inter-prète et compositeur. .

Où puisez-vous votre force qui donne tant de puissance à votre voix ?

Les souffrances que j’ai vécues : Il y a des menus où la souffrance fait toujours partie de la carte. Prenez, par exemple, le menu de l’artiste. Pour s’approcher de la perfection, il devra user de son talent, accepter le travail, le temps et bien sûr l’outil précieux ... mais assez amer : la souffrance. Bien entendu, nous ajouterons un peu de soli-tude, du rêve et de belles pensées. On n’oubliera pas la détermination qui est un autre outil néces-saire et indispensable. En plus, je tente toujours de m’accaparer de beaux moments avant qu’ils ne s’évadent. Chaque fois que je chante, je le fais comme si c’était la dernière fois. Chaque fois je veux offrir à mon public tout ce que je possède. Cette certitude que je vais mourir un jour provoque chez moi l’obsession de laisser des traces. Alors à penser que ma vie est mor-telle me donne sûrement beaucoup d’énergie.

A quand remonte votre passion pour le chant et quand avez-vous décidé d’en faire votre métier ?

Je ne pense pas l’avoir choisie, c’est plutôt le chant qui m’a choisie ! Depuis ma tendre en-fance, j’ai entendu l’appel de la musique et du chant. Petite fille, j’ai été sensibilisée au pou-voir d’expression de la musique en entendant les chants nostalgiques populaires arabes et libanais,

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Jahida Wehbe

Aquisuds : Pourriez-vous vous présenter en quelques mots ?

Jahida.W : J’ai découvert ma passion pour le chant dès l’enfance. Très tôt, j’ai suivi des cours d’opéra arabe, de chant syriaque, de récitation coranique et d’oud. Jai un diplôme en chant oriental du Conservatoire National. J’ai aussi un diplôme de psychologie et d’audiovisuel de l’Université libanaise (École des Beaux-arts). J’interprète souvent des poèmes de nombreux poètes libanais et internationaux :: Ibn Arabi, Rabi’aa Al’adawiya, Jalal Eddine El Roumy, Badr Shaker Assayyab, Nazek Al Mala’ika, Gi-bran Khalil Gibran, Goethe, Adonis, Taghor.. J’ai rendu hommage à de très grands chan-teurs arabes tels que Oum Koulthoum, Wadih El Safi, Mohammed Abdel Wahab, Asmahan, Sayyed Darwish, Mohammed Abdel Muttalib, Feyrouz…

J’ai représenté le Liban dans plusieurs événe-ments : Tunisie, Algérie, Soudan, Jerash, Dubaï, Koweït, Bahreïn, Paris, la Belgique, Berlin, Rome, Muscat, Le Caire, Alexandrie, le Yémen, l’Australie, les États-Unis, le Canada... J’ai joué plusieurs rôles au théâtre : «Ayyam Ruba’iyat Al Khayyam» .au Festival de Baalbek, «Ounshou-dat al Matar », réalisé par l’Iraquien Jawad Al Assadi et «Sakhrat Tanios », par Gérard Avedis-sian. En outre, j’ai participé à plusieurs films et séries télévisées. A l’Université libanaise, mon film «Balle de Pistolet Vide» a remporté le Pre-mier prix. Je suis à la fois sensible et hantée par la musique ; en revanche, je déteste le chaos et le bruit.

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C’est à cette époque que mon esprit a commencé à se peupler de mélodies à la recherche du bon-heur musical. C’est une série d’évènements et de circonstances qui font que je chante aujourd’hui.

Une chanson peut parfois marquer vos au-diteurs à vie. Vous réalisez cela ?

Sûrement, moi, loin de la politique, je suis partisane du Parti de l’Etre Humain. Dans mes chansons, je traite de l’existentialisme de l’homme en tant que tel.

Vos interprétations présentent les compositeurs de cette inégalable cuvée des années 20 : Za-karia Ahmad, Sayed Darwich, Mohamed Kass-abji…Les paroles sont toujours celles de grands poètes. Pourquoi ce choix ?

Mes études en musique ont marqué ma méthodologie et le choix que je fais d’habitude. Faisant connaissance de ces génies en musique, je ne puis qu’être influencée par l’héritage qu’ils ont laissé. Puis mes lectures pro-fondes des poètes arabes ont fait que j’insiste toujours sur les chansons qui reflètent notre patrimoine culturel dans un mode mondialisé par excellence. Ce choix je ne le fais pas par exprès, mais parce qu’il me ressemble.

Quel est le plus beau compliment que l’on vous ait fait ?

Tout compliment est beau ; deux m’ont le plus touchée. -Quand tu chantes, c’est comme si la chanson émanait du tréfonds de nos coeurs. -Schéhérazade de la musique, on veut l’entendre chanter 1000 et une nuits, sans nous ennuyer.

Le chant patriotique occupe une place im-portante dans votre production artistique « Al-Chahid (le martyr), et Kafa (assez) »Pen-sez-vous que la culture est la plus puissante des armes ?

La culture puise dans l’homme, pas directement comme les armes, mais plutôt lentement gardant néanmoins une trace profonde, comme le démontrent tant de civilisations. Les guerres s’en vont, les princes des guerres s’en vont. Seuls les gens restent, et seule leur culture persiste. Les traces artistiques partout dans le monde émanant de tous les empires sont le témoin le plus global de l’importance de la culture et de l’art. Moi je suis contre la chanson patriotique occasionnelle mais pour une culture durable qui sauvegarde les sociétés humaines face à la répression, au fanatisme, et à toute raison qui suscite les combats.

Quel serait votre dernière impression ?

Cherchons dans la musique ce qui est plus sincère et orig-inal. C’est ce que j’essaie de faire. Les lecteurs eux-mêmes ont une responsabilité, un rôle à jouer, ce sont eux qui peuvent commercialiser ou pas un travail artistique. Il ne faut pas qu’ils soient soumis au goût artistique des chaînes télévisées et de compagnies de production ayant un aspect plutôt commercial qui transforme l’art en marchandise.

Najah

La Diva d’Orient - Jahida Wehbé Institut du Monde Arabe - Paris Ve Le 30 mars 2013

Festival / Musiques d’Orient & Maghreb

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12 EUGUER ELIQUAT

Kirghizie : D es émirs f éminins en A sie Cent rale

AquiSuds : Les pays musulmans de l’Asie Centrale restent fort mal connus. Pouvez-vous rappeler quels sont-ils et nous dire d’où provient la méconnaissance relative que l’on a de cette région du monde ?

L’Asie centrale postsoviétique comporte aujourd’hui cinq Etats : le Kazakhstan, le Turkménistan, l’Ouzbékistan, le Tadjikistan et la Kirghizie. La Région Autonome ouïgoure du Xinjiang à l’ouest de la Chine et les provinces du nord de l’Hindou-Kouch en Afgha-nistan peuvent être rattachées à ce vaste ensemble, essentiellement turcophone ou persanophone et de religion musulmane. Cette zone immense, à la superficie équivalente de celle de l’Union européenne, mais dont la population ne dépasse pas les 70 mil-lions d’habitants est longtemps restée enclavée au sein de l’URSS ou sous son influence. Ceinturée par un véritable «rideau de fer», tant matériel qu’idéologique, la région a ainsi largement échappé à la connaissance des voyageurs étrangers, à l’exception de quelques délégations des groupes d’amitiés des partis communistes ou de quelques aventuriers audacieux logés dans les pâles hôtels Intourist

- Vers quelle époque et de quelle manière s’est déroulé le pro-cessus d’islamisation de l’Asie Centrale, et de quel courant de l’Islam s’agit-il ?

Le processus d’islamisation de l’Asie centrale s’est déroulé en deux phases parfaitement distinctes sur des aires également bien définies. La première phase fut brève et cantonnée aux popu-lations persanophones sédentaires des oasis de Sogdiane (Sa-markand, Boukhara, Khiva). Elle s’est déroulée en seulement cinquante ans (711-755), menée par des cavaliers arabes et persans sous la houlette du Gouverneur militaire Qutaïba Ibn-Muslim depuis le Khorasan iranien voisin. La seconde phase, plus lente, est surtout le résultat de l’action du soufisme menée par 4 confréries, arabes (Qadiriya) ou locales (Qubrawiya, Ya-sawiya et Naqchbandiya) à partir du XIIe siècle. Cette longue phase d’islamisation s’opérait en milieu strictement nomade : les steppes turkmènes ou kazakhes et les montagnes kirghizes. Elle était surtout forte lors des moments d’invasions (mongoles

David GAÜZERE - Chercheur associé post-doc, Université de Bordeaux 3, Spécialiste civilisationniste de l’Asie centrale

Interviewé par AquiSuds,

Ro z a Issako vna O tounbaïe va est une f emme poli-t ique kirghiz e, née le 23 août 1950 à Oc h, alors en République S ocial iste S o viét ique du Kirghizistan.

Koz atchyk ( l i t téralement les yeux ouverts) : off ic iant mélangeant les pratiques chamaniques et l ’Is lam. Les buu combinent la pratique de l ’Is lam et cel les des diseuses de bonne aventure. 15

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13LOREM IPSUM

au XIIIe siècle, kalmouke au XVIIe siècle, russe aux XVIIIe et XIXe siècles), constituant alors un élément fédérateur de résistance efficace. Lors de la conquête russe, l’action des confréries soufies étaient de surcroît re-layée par celle des commerçants tatars de la Volga qui, la vodka dans une main et le Co-ran dans l’autre, ont su se présenter comme les véritables intermédiaires entre le pouvoir tsariste russe et les populations turcopho-nes - comme eux - d’Asie centrale. Dans le nord de l’espace kirghiz (régions du Tchouï et de l’Yssyk-Koul), ce lent processus d’isla-misation n’était pas encore totalement achevé au moment de la fondation de l’URSS dans les années 1920. Qui plus est, les parallèles restent toujours forts dans les sociétés no-mades entre l’ancien pouvoir religieux cha-manique et la nouvelle religion musulmane. Les mollahs continuent ainsi aujourd’hui de côtoyer les «köz atchyk» et les «buu» cha-manistes kirghiz , tandis qu’Allah est indis-tinctement qualifié de Tengri, le dieu Ciel.

- Comment expliquer la présence d’émirs féminins dans cette région, et dans quel pays rencontre-t-on la femme émir la plus connue ?

Le cas des émirs féminins est une spécificité uniquement kirghize dans la région. Il résulte justement de cette collusion entre les deux for-mes de religion. Les émirs féminins tirent tout d’abord leur pouvoir de l’origine en partie si-bérienne des Kirghiz et de leur cosmogonie, où Oumaï Ene, la déesse de la Terre, mère-nour-ricière, et épouse de Tengri, est aussi respectée actuellement que son époux. Ensuite, l’épo-pée de Manas, le texte fondateur de l’identité kirghize parle de Kanykeï, la femme du héros Manas, ou d’Aïtchurek, celle de son fils, Se-meteï, qui «avaient pour habitude de mon-ter à cheval et de partager sur un même pied d’égalité avec leurs maris aussi bien les affaires domestiques que politiques». Ainsi, lorsque ceux-ci partaient à la guerre, elles assuraient l’intendance du pouvoir. Puis, dans l’Histoi-re des Kirghiz, deux autres femmes, Janyl et Saïkal, ont commandé des hordes tribales et étaient dotées de fonctions militaires après avoir chacune été «élue» par son «kouroul-taï» (assemblée tribale). Janyl et Saïkal restent

David GAÜZERE - Chercheur associé post-doc, Université de Bordeaux 3, Spécialiste civilisationniste de l’Asie centrale

Interviewé par AquiSuds,

des troupes et à assurer la défense de la ville d’Och contre les armées de Khoudoiar-Khan et de Seïd Mouzzafareddin ; ce qui lui a valu le titre de “Datka”, “juge” ou “sage” en kir-ghiz, de la part de ses deux protecteurs (dès cet instant, elle pouvait gouverner et rendre la justice dans son “fief ” et lever une armée dans une totale liberté). Devenue général en chef des armées de sa région, la “Tsarine de l’Alaï” (sic) a continué son subtil jeu de division, s’étant tantôt appuyé sur l’Émirat de Boukhara, tantôt sur le Khanat de Ko-kand. Cette politique s’est poursuivie avec l’arrivée des Russes en Asie centrale, que Kourmanjan-Datka n’a pas hésité à solliciter pour régler ses comptes avec les souverains locaux. Pour arriver à ses fins, elle a selon les années aidé ou combattu les armées du Tsar en ayant toujours considéré la Russie, com-me un État d’une égale importance que le Khanat de Kokand et l’Émirat de Boukhara. Ce n’est qu’en 1865, lors de la prise de Tachkent par les Russes et de l’installation de Von Kauffman comme Gouverneur du nouveau Turkestan, qu’elle a pris conscience de la supériorité militaire et politique de la Russie et qu’elle s’est définitivement rangée sous la protection de Von Kauffman pour l’aider à combattre les armées de Khoudoiar-Khan. C’était pour elle le prix du courage à payer pour préserver la liberté de sa région et son pouvoir jusqu’à la fin des combats. A la défaite du Khan de Kokand en 1876, elle a décidé de prendre sa retraite du pou-voir, désormais délégué pour peu de temps à plusieurs de ses fils. Son départ de la “vie politique locale” s’est accompagné d’une profonde déchirure, puisque parmi ses nom-breux fils, quatre ont été exécutés à la suite de l’organisation de révoltes locales contre la nouvelle puissance coloniale. Kourman-jan-Datka a notamment assisté à l’exécution d’un de ses fils par les armées du Tsar en 1898. Elle est décédée en 1907 à l’âge de 96 ans. L’image de Kourmanjan-Datka a, par la suite, été glorifiée par les autorités sovié-tiques locales, qui voyaient en elle plus une “héroïne nationale”, un “fervent défenseur de la cause des femmes et des classes pop-ulaires” qu’un simple seigneur féodal. Cette glorification s’est depuis poursuivie à l’indépendance de la Kirghizie en 1991.

aujourd’hui des modèles de courage, de bra-voure et de liberté pour les Kirghiz et leur nom est encore fréquemment donné aux petites filles du pays. Mais, la plus illustre d’entre elles demeure sans conteste Kourmanjan-Dat-ka qui, après la mort de son époux Alymbek-Datka, a su gérer son héritage politique dans un contexte particulièrement difficile. Hostile au Khanat de Kokand, qui occupait sa région d’origine (Alaï) et aux Russes qui avançaient vers le sud, cette femme de caractère avait su s’imposer et fédérer autour de sa personne les tribus kirghizes du sud durant ses 96 ans de vie.

- Pouvez-vous nous décrire en quelques mots le parcours de ce personnage ?

Kourmanjan-Datka est née en 1811 dans une famille nomade de la tribu des Moungouchs sur les contreforts kirghiz de l’Alaï, à l’est de la Vallée du Fergana. Dès l’âge de 18 ans, Kourmanjan n’a pas tardé à bousculer cer-taines traditions islamiques et coutumières.Sa famille l’avait, conformément à la tradi-tion, mariée à un homme qu’elle n’avait pas choisi et qu’elle découvrait pour la première fois le jour de ses noces. Au moment de quit-ter la yourte familiale, le jour de ses noces, elle a décidé de rester dans sa famille, malgré son mariage, afin de ne pas suivre un inconnu qu’elle n’avait pas choisi et qui ne lui plaisait pas. Ainsi, elle est restée mariée, mais séparée de son époux non désiré pendant deux ans, jusqu’à ce que, en 1832, le seigneur de l’Alaï, Alymbek-Datka, l’épouse, après avoir obligé son mari à la répudier avec, fait inouï dans l’Islam, le consentement tacite de l’intéressée ! Dès lors, elle a dépassé son simple statut d’épouse pour devenir le conseiller le plus fidèle du vizir de Cherali, le Khan de Kokand, dans les relations féodo-vassaliques complex-es entre Alymbek et ses protecteurs rivaux, le Khan de Kokand et l’Émir de Boukhara, Seïd Mouzzafareddin. Occupé la plupart du temps par sa tâche de vizir à Kokand, Alymbek ne revenait pas souvent dans l’Alaï et avait dé-légué la gestion des affaires courantes de son domaine à sa femme. Kourmanjan a donc bien mesuré les enjeux de son temps à propos de la domination de son territoire et a su en tirer parti à la mort d’Alymbek en 1862. En 1862, l’année de l’assassinat d’Alymbek par Khoudoiar-Khan, un usurpateur à la solde de l’Émir de Boukhara, elle n’a pas hésité à lever

Koz atchyk ( l i t téralement les yeux ouverts) : off ic iant mélangeant les pratiques chamaniques et l ’Is lam. Les buu combinent la pratique de l ’Is lam et cel les des diseuses de bonne aventure. 15

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14 EUGUER ELIQUAT

- Cette figure de femme émir a-t-elle inspiré d’autres figures politiques féminines en Asie Centrale ?

Oui, bien sûr, tout d’abord, dans sa «lutte contre l’obscurantisme religieux», le pouvoir soviétique n’a pas hésité à s’appuyer sur la force des femmes en Kirghizie. Ainsi, plu-sieurs héroïnes ont été encensées. Les plus emblématiques d’entre-elles furent Ourkouia Salieva, brûlée vive sur le bûché des fana-tiques «basmatchis», après avoir été la pre-mière femme à avoir fondé un kolkhoze dans la Vallée, très conservatrice, du Fergana en 1920, puis Zouourakan Kaïnazarova, la cham-pionne stakhanoviste de la récolte des better-aves dans l’après-guerre (1945-1955). Mais, sans aucun doute, c’est Roza Otounbaeva, la première présidente d’un Etat d’Asie centrale, de surcroît le seul régime parlementaire de la région, qui a dernièrement symbolisé la fig-ure la plus marquante de la transmission de la tradition du pouvoir politique aux femmes après l’indépendance des républiques d’Asie centrale en 1991. Kirghize, ce professeur de philosophie polyglotte et à la longue carri-ère de diplomate n’a pas hésité à se mettre en avant lors des deux révolutions de 2005 et de 2010 dans son pays, avant d’assurer la présidence transitoire d’Avril 2010 à Novem-bre 2011 et de doter son pays d’institutions démocratiques et parlementaires. Elle n’avait alors pas hésité à baser son pouvoir sur les enseignements de Kourmanjan-Datka, à qui elle avait consacré l’année 2011. Par ail-leurs, comme Kourmanjan-Datka avant elle, Roza Otounbaeva avait également dû étein-dre le brasier interethnique qui avait em-porté la ville d’Och et une grande partie du sud du pays en Juin 2010. Aujourd’hui en-core, aucune autre femme en Asie centrale n’a pu accéder à des fonctions politiques aussi hautes. L’exception des femmes de tête dans la région est donc bien kirghize et, à mon avis, le demeurera encore longtemps.

Par Aquisuds

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Festival Folklorique, un groupe de danse et de musique Kirghize

© http://fart.unblog.f

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15LOREM IPSUM© http://www.terre-istan.com 17

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Asie Centrale : des peuples entremêlés ©Vicken Cheterian et Philippe Rekacewicz, Le Monde Diplomatique 2001

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16 EUGUER ELIQUAT

JE CONNAIS mes habitants, hom-mes et femmes, je n’ignore pas leurs haines, leurs aversions, leurs préjugés, leurs peurs, leurs capric-es, leurs rêves ainsi que leurs invi-tations prétexte à trouver de nou-velles forces pour médire ou faire l’inventaire de la bêtise des autres, leurs cavalcades, leurs chasses dès l’adolescence. Leurs histoires de chaleur sans lendemain sont ennuy-antes. JE CONNAIS les hommes et les femmes de ma terre comme JE CONNAIS mes rivières et leurs méandres, leurs roches écrevisses, leurs sauts et leurs bassins. JE SAIS aussi qu’autrefois tumultueuses, elles sont aujourd’hui souvent ra-vines qui ne ravinent plus, eaux si lambinantes et silencieuses qu’on doute de leur existence. Je les con-nais comme JE CONNAIS mes ar-bres, les généreux, les dangereux, les vigoureux, les souffreteux, les beaux, pas beaux ; je les connais comme JE SAIS l’exubérance du flamboyant et la majesté du sa-blier, la gourmandise du sucrier et du merle, la patience du mabouya et du lézard, la résistance du bœuf et du cabri ; JE SAIS la faim de la mangouste et celle du congre, la violence de la murène et du barra-cuda, la ruse du poisson ballon et du poisson volant, la crainte de la demoiselle bleue et de la noire, la laideur de la blennie et du poisson lézard. JE CONNAIS toute chose de ma terre, de mes airs et de mes

eaux.

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RENTRER. De Margarita à Nassau, où dit-on il fait bon vivre, j’ai été em-portée par un maelström plus mor-dant que l’odeur souveraine de souf-fre, traversé un arc-en-ciel de braise miroitant de passions ordinaires et sombré à maintes reprises dans des mondes aussi rugueux que mon corail. Si cet archipel sidéral m’a roulée dans ses brisants, gragée comme manioc, fouettée comme linge en rivière, il m’a nourrie d’un suc brutal plus épais que sirop batterie des meilleures cannes

campêches.

À mon retour,

L’odeur des bougainvilliers, des gé-névriers, ti-baume et mangues mûres, se mêlant aux senteurs du café goutte

à goutte, m’a grisée…

Le murmure des eaux de rivière, le clapotis marin, les soupirs des feuil-lages, les déflagrations des loges de sa-

blier, m’ont ravie…

L’éclat et la luisance des siguines m’ont éblouie…

La majesté et la grâce des fougères ar-borescentes m’ont affolée…

Gorgée de compassion, d’amour et de vitalité, j’exhalais de mille es-sences. Le lien se renouait et mon appétence n’avait jamais été aussi puissante. J’étais plus vivante qu’une coulée de lave, plus brûlante qu’un so-leil de midi, plus impatiente qu’une pluie d’avril, je sursautais à la moin-dre brise inattendue, je m’affolais de petits riens. Je bondissais, je criais «

c’est moi ! C’est moi-même ! »

P. 57

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Paroles d'une île Vagabonde

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Dominique Deblaine

. . . On ne s’échappe pas de moi.

Je suis la présence et l’absence, l’exaltation et le vide, l’inconstance et l’obstination, le véridique et le fictif, la nonchalance et l’énervement, la moiteur et la brise, la fidélité, le mensonge, l’artifice, l’audace, l’appât, le mirage, et je suis aussi une terrible volition

comme un lapsus dans la mer turquoise.

Si l’on croit me connaître, me contrôler, me dominer, on ne s’échappe de moi. Ai-je vrai-ment besoin de le dire ? Tous le savent mais n’y croient pas. Et pourtant ! Je suis celle qui anime leurs aurores, inquiète leurs crépuscules et trouble leur sommeil. Je suis leur

volonté, leur lâcheté, leur peur et leur espérance. P. 85

Prix public : 12 euros

Ed. Riveneuve, 2011, Prix Fetkann 2012

© Eric Mazeau

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Maître de Conférences à l’Université Montesquieu Bx IV.

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La première femme Maître de calligraphie turque

Une enfance et adolescence d’expatriée francophone. Née le 27 avril 1903 à Beylerbeyi sur la rive asiatique d’İstanbul, Fatma Rikkat est la fille de Hüseyin Kâzım Kadri rédacteur d’un “ Türk Lügati ” soit un recueil de langues et dialectes turcs. Elle passe son enfance entre Is-tanbul, Sérres,Thessalonique et Halep suivant son père chargé officiellement de la rédaction de son ouvrage.

La petite Rikkat francophone, parlant déjà le français en fa-mille étudiera d’ailleurs à l’école française de Beyrouth durant la première guerre mondiale. Ce n’est qu’en 1919 qu’elle rentre à Istanbul et doit alors perfectionner son turc et s’intéresser à la littérature turque, ce qu’elle fait auprès d’illustres profes-seurs comme Mehmet AKıf Ersoy, le très célèbre poète turc auteur de l’hymne national de son pays “l’İstiklâl Marşı” ou «marche de l’indépendance». Jeune fille “complète” elle ap-prend aussi le dessin avec Bahriyeli Ali Sami Boyar et peut-être ressent-elle ses premiers émois à la manipulation du pinceau.

Deux brefs mariages, deux beaux enfants et l’entrée aux Beaux Arts

Après un premier mariage assez court dont elle aura un fils Reşid et trois années passées en Allemagne, Rikkat épouse en seconde noces le capitaine Fahreddin Gata pour s’en séparer également après la naissance de son second fils. Après une expérience d’expatriation d’un an à Athènes, elle effectue un retour dans la maison paternelle en 1927 à Istanbul. Après le décès de son père, elle entre à l’académie des beaux arts avec l’aide d’un ami de la famille. Elle commence alors par des cours de “tezhip”, l’enluminure du coran avec le maître İsmail Hakkı, parallèlement à des cours de reliure de sertis-sage de nacre, d’ébru - le papier marbré- ce qui lui permet d’appréhender quasiment tous les arts traditionnels turcs.

Passion et entêtement dans un monde de calligraphes et d’hommes

Entêtée dans un monde d’hommes, Rikkat , se spécialise dans l’art- oh combien délicat et précis – de la calligra-phie, approchant les plus grands calligraphes, avec obsti-nation elle entend faire respecter sa personne comme son travail. C’était une décision et un entêtement double, car, si la période de la jeune République turque de Mustafa Ke-mal Atatürk encourageait le travail et l’émancipation des femmes, les arts dits “ islamiques “ étaient quand à eux un peu “passés de mode” et la profession menacée de disparition.

Naissance d’une grande calligraphe

En 1944, cette calligraphe termine sa thèse sur les arts turcs et est embauchée comme bibliothécaire au sein de l’Académie. En 1948 elle succède au maître, en tant qu’enseignante 4 la chaire de calligraphie, ce qui fit d‘elle la première femme pro-fesseur de calligraphie . Jusqu’à sa mort, le 14 janvier 1986, Rikkat n’a jamais laissé ses calames et pinceaux. Elle est en-terrée au cimetière de Küplüce à Üsküdar auprès de son père.

En 2004, Yasmine Ghata , sa petite fille émerveillée en voyant une des œuvres de sa grand-mère dans une ex-position de la collection du Musée Sakıp Sabanci à Par-is, partit sur ses traces et écrivit un petit roman, La nuit des calligraphes paru chez Fayard. Ce dernier sau-ra vous enchanter le temps d’un week-end à Istanbul.

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Hommage Rikkat Kunt

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Connue pour l’élégance toute féminine de son style, la dou-ceur et la patience de sa manière d’enseigner et la réputa-tion qu’elle avait de rendre toujours son travail à heure et temps voulu font d’elle une des figures les plus précieuses de l’enseignement de la calligraphie turque. Pourtant as-sez modeste, elle n’était pas encline à signer ses œuvres.

Rikkat Kunt, était aussi restauratrice d’œuvres d’art traditionnelles et repartit en 1968 pour Lisbonne où elle fut invitée pour restaurer une miniature da-tée de 1501 ce qu’elle fit avec majesté malgré la fatigue. L’œuvre est aujourd’hui conservée au Musée de Topkapı.

Sabine Buchmann

«Je me suis éteinte le 26 avril 1986, à l’âge de quatre-vingt-trois ans» ainsi commence La Nuit des Calligraphes, premier roman de Yasmine Ghata. Nous sommes donc prévenu, c’est une voix d’outre-tombe qui nous parle mais une voix apaisée. Celle de Rikkat Kunt,....

Yasmina Ghata, La Nuit des Calligraphes, Ed. Fayard, 180 p., 15 €.

Fadwa Miadi

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Eric DUBESSET

Centre Montesquieu de Recherches Politiques (CMRP)

Université Montesquieu Bordeaux IV

Interviewé par AquiSuds,

Aquisuds : Malgré l ’ image de macho souvent asso-ciée à l ’Amérique latine, on s’aperçoit que les femmes chefs d’Etat y sont plus nombreuses qu’on ne le pense : Comment expliquer cette féminisation de l ’exercice du pouvoir ?

Concrètement, comment ont-elles conquis le pouvoir ?

A l’instar d’Hillary vis-à-vis de Bill Clinton aux Etats-Unis, plu-sieurs d’entre elles, comme Isabel Martinez, Mireya Moscoso, Janet Jagan ou Cristina Kirchner, sont arrivées au pouvoir en bénéficiant de l’influence politique de leur mari. Elles se sont ensuite dotées d’une légitimité propre et d’un capital politique suffisant leur per-mettant de s’imposer seules. D’autres ont aussi su profiter de leur condition de femme pour être élues. Ainsi en 2006, Michelle Bach-elet a recueilli 53,5% des voix féminines, alors que Ricardo Lagos, issu de la même mouvance politique, n’en obtenait que 45,3% lors des élections de 1999. En 2010, Laura Chinchilla a obtenu un vote féminin de 10% supérieur à celui des hommes.

C’est aussi la méfiance grandissante à l’égard des hommes poli-tiques, et de leur gestion souvent considérée comme outrancière-ment personnaliste, paternaliste et patrimonialiste du pouvoir, qui a largement contribué à leurs succès électoraux. Les crises économiques à répétition, la corruption endémique et la montée de l’insécurité et de la violence ont nourri un sentiment général de désenchantement démocratique qui a pu profiter à des femmes dont on reconnait plus facilement aujourd’hui les qualités profes-sionnelles et managériales. Car tout autant qualifiées et diplômées que leurs homologues masculins, elles se sont aussi souvent for-mées au contact de leur mentor, en occupant de hauts postes dans l’Administration ou dans le monde des affaires ou bien encore en gérant des portefeuilles ministériels, avant d’accéder à la Magistra-ture suprême. Dilma Roussef a fait ses premières armes aux côtés de son très populaire prédécesseur Lula Da Silva et Laura Chin-chilla auprès du Président nobélisé Oscar Arias.

Cette vague de présidentes a-t-elle donné lieu à des chan-gements significatifs ?

Pas nécessairement. Dans certains pays, l’influence de ces dirigean-tes reste limitée. Il y a plusieurs raisons possibles à cela. Soit qu’elles n’ont pas véritablement pris en considération les demandes de ce groupe social dont elles font pourtant partie, soit qu’elles ont butté sur des blocages de divers ordres. En raison de leur appartenance à un parti politique dont elles sont censées appliquer le programme indépendamment de leur condition féminine, leur présence à la présidence, et leur augmentation au sein des parlements, ne se sont pas traduites par des mesures spécifiques en faveur des droits des femmes. En outre, la forte influence catholique est à l’origine du maintien d’un certain conservatisme social. Au Chili par exemple, l’IVG et la pilule du lendemain restent strictement interdites à cause notamment de l’opposition de l’Eglise.

Pouvoir Pol i t ique Féminin en A mé r ique L at ine et dans la Caraïbe

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Eric DUBESSET

Depuis les années 1970, une douzaine de femmes est parvenue, par la voie des urnes, à la tête d’un Etat d’Amérique latine et de la Caraïbe: l’Argentine Isabel Martinez, veuve du Général Perón, de 1974 à 1976; la Bolivienne Lidia Gueiler investie par le Parlement en 1979 et renversée l’année suivante; la Nicaraguayenne Violeta Chamorro (1990-1997), l’Haïtienne Ertha Pascale Trouillot (1990-1991), l’Equatorienne Rosalia Arteaga qui, après la destitution du président Abdala Bucaram ne resta que six jours à la tête de son pays, du 7 au 12 février 1997 ; la Panaméenne Mireya Moscoso (1999-2004); enfin, Janet Jagan a été élue présidente du Guyana en 1997 avant de démissionner en 1999. Plus récemment, ce sont, Michelle Bachelet (2006-2010) au Chili, et les trois présidentes en exercice actuellement en 2013 : Cristina Kirchner, depuis 2007 en Argentine ; Laura Chinchilla, depuis 2010 au Costa Rica et Dilma Roussef depuis 2011 au Brésil, qui ont remporté les élections pré-sidentielles au suffrage universel.

C’est sans compter, par ailleurs, sur les femmes ayant accédé à la tête d’un gouvernement, comme ce fut le cas de la démocrate américaine Sila Calderón, Gouverneure générale de Puerto Rico entre 2001 et 2005, et de celles occupant, dans les régimes monar-chiques anglo-caribéens, la fonction de Premier ministre : la Ja-maïcaine Portia Simpson-Miller élue en 2006 par des délégués du People’s National Party, la Bermudienne Paula Cox (2010-2012), ou encore la Trinidadienne Kamla Persad-Bissessar depuis 2010. Dans tous ces pays, la féminisation de la vie politique est une ré-alité. Elle est liée d’une part au passage à la démocratie représenta-tive puis, d’autre part, à l’émergence de mouvements féministes qui ont réussi à imposer tant bien que mal la question de la parité dans le débat politique.

1- FANNY Costes, « L’Amérique latine à l’ère des présidentes », www.ninachauvet.wordpress.com/.../lamerique-latine-a-lere-des-pres(dernière consultation : 19 mars 2013)

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Enfin, malgré la modernisation des sociétés latino-américaines, l’image féminine de la mère, nourricière et protectrice, régulière-ment projetée sur l’espace politique, perdure un peu partout et pe-ine à faire reculer le machisme ambiant. Il reste donc beaucoup de progrès à faire en la matière, ce qui conduit à relativiser l’ampleur de ce phénomène.

La féminisation de l’exercice du pouvoir est-elle limitée à la présidence et est-elle inscrite dans la durée ?

En tant que symptôme agissant de l’amélioration de la démocra-tie latino-américaine, la féminisation de la vie politique s’étend aussi aux parlements. Le taux de représentation des femmes dans les assemblées est souvent élevé en Amérique latine : il est par ex-emple de 38,6% au Costa Rica, de 36,2% en Argentine, ou de 22,4% au Mexique, contre 18 % environ en France. Au total, pour l’ensemble du sous-continent, la proportion des femmes aux fonc-tions législatives était de 21,6% en 2008 contre 13% en 2000. Cette évolution tient avant tout à la mise en œuvre de quotas en politique. L’Argentine a été pionnière en la matière. En 1991, une loi établissant une présence féminine d’au moins 30% y a été votée, faisant progresser rapidement leur représentation de 5,8% en 1991 à 27,6% en 1998. Le Costa Rica, l’Equateur et le Mexique leur ac-cordent de plus en plus de place au sein de l’appareil législatif. Le Brésil, quant à lui, reste un peu à la traîne tant l’efficacité du quota est limitée et sa mise en place artificielle. Qui plus est, l’action des lobbys féministes et le débat sur la parité n’y ont rencontré à ce jour que très peu d’écho.

La féminisation de l’exercice du pouvoir se vérifie également à l’échelon municipal. La présence accrue des femmes dans la vie politique en fait aujourd’hui de véritables acteurs stratégiques de la vie locale dans les domaines suivants : exécutif municipal, person-nel fonctionnaire des mairies, militante au sein de partis tradition-nels, membre d’organisations sociales et de commissions de défense des droits des femmes. Les Bahamas, la Dominique, le Guyana, le Nicaragua, Trinidad-et-Tobago sont les Etats grands-caribéens qui enregistrent les plus forts pourcentages de femmes élues au siège de maire (au-dessus de 20%). Au Belize, au Honduras, à la Jamaïque et au Panama, ces taux avoisinent les 10%. Cette situation observ-able dans l’ensemble de la région s’inscrit dans le contexte actuel de décentralisation politique. La municipalisation des responsabilités a ouvert aux femmes un espace de participation citoyenne effective dans les affaires locales, en même temps qu’elle a renforcé durable-ment leur visibilité.

2- MARQUES-PEREIRA B. (2007), « Les femmes latino-américaines dans les exécutifs nationaux : le cas du Chili », Histoire@Politique ,1/2007 (n° 01), p. 3-3. URL : www.cairn.info/revue-histoire-politique-2007-1-page-3.htm.

3- Contre toute attente, ces taux n’ont pas beaucoup varié depuis près de dix ans. A ce propos, lire CORTES P (2002), Descentralización y desarrollo local en América Latina: nuevas alternativas para la equidad de género?, Proyecto Cepal/Daw “fortalecimiento de las capacidades de las oficinas nacionales de la mujer en América latina y el caribe para la gobernabilidad”, Santiago de Chile: CEPAL.

4- DUBESSET E. (2008), « Décentralisation et nouveaux acteurs politiques dans la Caraïbe hispanophone », dans Lerat C. (dir.), Elites et intelligentsias dans le monde caraïbe, Paris : L’Harmattan, p. 283-298.

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1-Laura Chinchilla élue en 2010 présidente du Costa Rica

2-Cristina Kirchner présidente l’Argentine depuis 2007

3-Dilma Rousseff, présidente du brézil depuis 2011

4-Michelle Bachelet présidente du Chili (2006-2010)

5-Ertha Pascal-Trouillot, Présidente d’Haïti de 1990 à 1991

6-Kamla Persad-Bissessar Première ministre de Trinité-et-Tobago depuis 2010

7-Mireya Moscoso Présidente du Panama 1999- 2004

8-Lidia Gueiler Tejada femme politique bolivienne 1979- 1980

9-Violeta Chamorro présidente du Nicaragua de 1990 à 1996

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Eric DUBESSET

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Le Couteau-chien

Petit caïd d’une cité antillaise, Zuel se voit of-frir un couteau en argent par un drogué en train de mourir sur le trottoir. Zuel est alors propulsé en en-fer, avec pour tout bagage un couteau maléfique et l’héritage de Liaram, légendaire guerrier mar-ron qui avait osé défier le diable en personne..Par : Joël CimarrónGenre : Aventure, Fantastique / MerveilleuxCollection : BayouDate de parution : 16 / 04 / 2010128 pages17,25 €170 x 240 mmISBN : 9782070624959

Code distributeur : A62495

Gallimard

Un jour, Astérix s’est mis à parler créole antillais

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«Nos ancêtres les Gaulois»… Une provocation ? La première bande dessinée en créole publiée par Caraïbéditions, c’était Astérix: Gran Kannal La (Le Grand Fossé). Hector Poullet, spécialiste de la langue créole, avait accepté d’en assurer la traduction, car « c’est un moyen d’affirmer une identité. Et puis, maîtriser sa langue, ça apaise, ça vous calme»… Et bien que le créole soit une langue orale, « l’écrire per-met de mettre de l’ordre et de montrer que cette langue possède une structure et une grammaire, dont les Antillais observent les règles sans le savoir », note Hector Poullet.

Gran Kannal La, ce n’était pas un choix anodin, mais «un clin d’œil aux petites rivalités insulaires, explique l’éditeur Florent Charbonnier, puisque de chaque côté, les uns par-lent le créole guadeloupéen, l’autre le martiniquais. Cela dit, le tronc des langues est commun à 90%.» Depuis, quelque 12 000 exemplaires en ont été vendus. Début 2009: le gros conflit social éclate aux Antilles. Un autre album d’Astérix en créole est sorti en 2010… C’est La Zizanni. Les droits d’Astérix n’ont été pas faciles à obtenir, mais ont facilité les démarches de l’éditeur quand il a voulu faire traduire un Titeuf ou un Tintin. Sa fierté: Le Petit Prince de Saint-Exupéry, qui pourra être lu en dans les quatre créoles des différents DOM. Mais Caraïbéditions a aussi sorti des productions originales en français, comme Les Iles du vent, « premier manga antillais ». Dans ses pro-jets, l’adaptation en BD de la vie du Chevalier de Saint-George, célèbre maître d’armes et compositeur noir du XVIIIe siècle, trouvera le chemin des librairies à la rentrée.

J. M. source : http://www.20minutes.fr

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La Voie est Livre

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Les Souterrains Historiques en Gironde

Stéphane Rousseau Tome 2

Le tome 2 complète l’inventaire par commune des trésors d’architecture et d’ingéniosité que présentent les souterrains historiques creusés par les populations de la région. Un périple enrichissant.

Une même nuit nous attend tous : roman.Auteur : Berrada-Berca Lamia

Editeur : La Cheminante

Résumé : L’auteure explore dans ce roman le chant sombre et cruel des dictatures en une petite musique bouleversante de l’intime..

Après avoir enseigné les lettres modernes en région parisienne, Lamia Berrada-Berca revient dans sa ville natale Casablanca pour se consacrer encore plus intensément à l’écriture et au journalisme. Son premier ouvrage édité à La Cheminante : «Kant et la petite robe rouge» fédère de très nombreux lecteurs autour du thème de la liberté indivi-duelle. Son ouvrage suivant «Une même nuit nous attend tous» obtient le Prix d’Afrique méditerranéenne - Maghreb de l’ADELF à l’unanimité. Son dernier titre qui paraît pour le salon, «La Reine de l’oubli» aborde tout en délicatesse la maladie d’Alzheimer.

PRIX LITTÉRAIRE D’AFRIQUE MÉDITERRANÉENNE - MAGHREB 2012décerné par l’ADELF Associa-tion des écrivains de langue française Prix : 13.30 €

Berrada- Berca Lamia

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Romans - Nouvelles

Poésie - Essai

Théâtre

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Poésie - Essai

Théâtre

Née en 1973 à Douala au Cameroun, Hemley Boum aspire très tôt à la dé-couverte du vaste monde. Le choix des sciences sociales option anthropolo-gie n’est dès lors pas anodin et servira plus tard son écriture. L’obtention de sa maîtrise à l’Université Catholique d’Afrique Centrale lui permet de passer le concours d’entrée de l’Université Catholique de Lille.

Hemley bascule des pluies tropicales à la grisaille humide et froide d’une ville du Nord de la France, dont elle retient pourtant trois années d’études où elle s’est amusée. Se dessine alors un certain regard sur le monde, les gens et la vie, qui caractérise son écriture, pleine d’humour. Dans Si d’aimer… elle rend hommage à ces gens du Nord qu’elle a aimés. Sylvie Darreau

L’existence de Salomé, Valérie et Moussa gravite autour de Céline,

une prostituée de luxe, héroïne captivante du roman de Hemley Boum.

Trois voix dénouant l’inextricable condamnation d’une maladie incurable,

gravée en quatre lettres dans le destin des protagonistes et du continent africain.

Témoignage littéraire saisissant de l’auteur, qui transmet l’espoir, avec humour

et lucidité, au prisme de relations terriblement amoureuses et amicales,

en lutte contre les turpitudes de la perversion.

Si d’aimer... ne tue pas, c’est au prix d’un cheminement incroyable

des aimants, amants et amis, en une exploration passionnantes

de la culture et de la société camerounaise.

À l’horizon, un tout petit paradis vert où faire pousser l’amitié...

Si d’aimerde Hemley BoumRomansuivi d’un glossairecamerounais et d’une car-te de Douala pour situer l’action.éditions La Cheminante Prix : 20.90 €

Ces Noces fraternelles sont celles d’un homme et d’une femme qu’un désir fou lan-ce l’un contre l’autre,comme deux corps

célestes destinés à se rencontrerde toute éternité.

Ce nouveau roman de Denis Lévy-Soussan dévoile un chant d’amour étourdissant.

Duo amoureux où le féminin et le masculin s’entremêlent dans l’infini de

l’instant.

Roman éditions La Cheminante Prix : 15.20 €

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Romans Nouvelles

Hemley Boum

Denis Lévy-Soussan

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© Eric Mazeau

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