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La Route un film de Darejan Omirbaev La Route un film de Darejan Omirbaev Scénario et dialogues DAREJAN OMIRBAEV et LIMARA JEKSEMBAEVA avec DJAMSHED USMONOV, SAOULE TOKTIBAEVA, AÏNOUR TOURGAMBAEVA, MAGJANE OMIRBAEV Image BORIS TROCHEV Décors MARINA TROCHEVA Son ELENA VLAZNEVA Mixage DOMINIQUE VIEILLARD Montage image R. BELIAKOVA Montage son CATHERINE D’HOIR Une coproduction Artcam International et NHK (Japan Broadcasting Corporation), KADAM-T, Artcam the Netherlands. Avec le soutien de Kazakhfilm Aïmanov, du Centre National de la Cinématographie, de NHK Enterprises 21 Inc. de la Fondation Montecinemaverità et de la Fondation Hubert Bals Joël Farges et Elise Jalladeau présentent Sélection Officielle - Festival de Cannes 2001 - Un Certain Regard La Route AFFICHE COLLIER 2001. distribué par Maq1 30/11/01 9:53 Page 1

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La Routeun film de Darejan Omirbaev

La Route

un film de Darejan Omirbaev

Scénario et dialogues DAREJAN OMIRBAEV et LIMARA JEKSEMBAEVA avec DJAMSHED USMONOV, SAOULE TOKTIBAEVA, AÏNOUR TOURGAMBAEVA,

MAGJANE OMIRBAEV Image BORIS TROCHEV Décors MARINA TROCHEVA Son ELENA VLAZNEVA Mixage DOMINIQUE VIEILLARD

Montage image R. BELIAKOVA Montage son CATHERINE D’HOIR Une coproduction Artcam International et NHK (Japan Broadcasting Corporation), KADAM-T,

Artcam the Netherlands. Avec le soutien de Kazakhfilm Aïmanov, du Centre National de la Cinématographie, de NHK Enterprises 21 Inc.

de la Fondation Montecinemaverità et de la Fondation Hubert Bals

Joël Farges et Elise Jalladeau présentent

Sélection Officielle - Festival de Cannes 2001 - Un Certain Regard

La Route

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distribué par

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Attaché de presseFrançois VILA64, rue de Seine9414 AlforvilleTél : 01 43 96 O4 04Fax : 01 43 96 04 [email protected]

DistributionEPICENTRE FILMS5, rue Taylor75010 ParisTél : 01 42 40 00 01Fax : 01 42 40 00 [email protected]

La Route

Sélection officielle Cannes 2001

Un Certain Regard

Sortie Nationale le 23 Janvier 2002

Un film de Darejan OmirbaevKazakhstan / France - 85 minutes

Couleurs - 1,66 Dolby - 35mmN° Visa 99180

Titre original : Jol

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SynopsisUn jeune cinéaste, Amir Kobessov, reçoit un télégrammel’avertissant que sa mère est malade. Il quitte son domi-cile, sa femme et son fils, pour se rendre dans son village,à trois jours de route.

Commence alors un voyage autant géographique qu’in-térieur. Une course folle de son imaginaire dans un décorde steppe et de montagnes qui le mène vers sa terrenatale.

Fiche artistiqueAmir Kobessov Djamshed UsmonovMère d’Amir Saoule ToktibaevaFemme d’Amir Aïnour TourgambaevaFils d’Amir Magjane OmirbaevServeuse du café Valéria GouliaévaCenseur Valéri SkorikovCopain d’école d’Amir Moukhamédjane Alpisbaev

Fiche TechniqueRéalisation Darejan OmirbaevScénario Darejan Omirbaev et

Limara JeksembaevaImage Boris TrochevSon Helena VlaznevaMontage Image R. BeliakovaMontage Son Catherine D’HoirPhotographe de plateau Cloé DrieuProducteur executif Limara Jeksembaeva Producteurs Elise Jalladeau

Joêl FargesUeda Makoto

Produit par Artcam International (France) NHK ( Japon)Kadam-T Kazakhfilm Aïmanov ( Kazakhstan)

Darejan Omirbaev est un cinéaste de la rigueur. Une rigueur quasi mathématique qu’il doit à une formation scientifique à laquelle il fait volontiers et fréquemment référence.A ce titre il cultive une véritable vénération pour Robert Bresson.C’est ainsi qu’il nous a raconté à sa façon son histoire avec Bresson : alors qu’il étudiait le cinéma au VGIK deMoscou, il apprit que le réalisateur français venait de publier des Notes sur le cinématographe.Il réussit à convaincre le bibliothécaire de son Institut de se procurer la version française de l’ouvrage qui n’existait pas encore en russe. Puis il recopia scrupuleusement chaque ligne, chaque mot de ce livre rédigé dansune langue et un alphabet qu’il ne connaissait pas. Enfin, il confia ces pages manuscrites à une traductrice quin’aurait pas été autorisée à pénétrer dans l’école. C’est ainsi que ces notes furent traduites sur un cahier d’écolierpour le seul Darejan Omirbaev.

Darejan Omirbaev aime nous raconter ses histoires... Il n’aime pas les écrire.Le réalisateur kazakh n’est pas un scénariste. Il recherche la simplicité et c’est pourquoi ses scénarii sont si minces,si ténus et pourtant si explicites, si visuels. « La Route » est une déclaration d’amour en forme de « jeu de l’oie » malicieux et nostalgique, un manifeste vital qui brouille les pistes du récit.La narration sème le trouble, elle divague sans itinéraire précis et pourtant à la lecture du scénario, on a le sentiment d’une nécessité extrême, d’une précision d’orfèvre. Enlevez une seule scène et la tension que DarejanOmirbaev a magistralement installée, s’évanouit.La ligne blanche que nous suivons tout au long de « La Route » est la prise de conscience du protagoniste-cinéaste- à l’image de Darejan Omirbaev - qui découvre à la mort de sa mère que le temps a passé et qu’il est à mi-coursede sa vie d’homme. C’est l’heure du bilan avec son cortège de désillusions ; la fiction du rêve fait place aux réalités amères.Une petite leçon d’ironie et d’humilité pour cet homme qui doit désormais envisager son avenir d’amant, de pèreet d’artiste sous le signe de la maturité, « La Route » nous dit que la vie est brève, fragile, dérisoire.

C’est le temps des lucioles attirées par la lumière qui les brûle.

C’est l’existence d’un cinéaste qui entraîne ses semblables dans le rai aveuglant d’un projecteur : quelle illusion.

C’est ce que nous raconte Darejan Omirbaev : nos destinées éphémères.

Elise Jalladeau & Joël FargesArtcam production

Note des producteurs

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Darejan Omirbaev

Darejan Omirbaev est né le 15mars 1958 au village d’Uyuk dansla région de Djambul, auKasakhstan. En 1980, il obtientson diplôme de la faculté de math-ématiques appliquées del’Université du Kasakhstan. Il tra-vaille ensuite comme professeur,programmateur et monteur au stu-dio Kasakh Film.

En 1987, il termine ses études auVGIK ( Institut des hautes étudescinématographiques à Moscou) etprésente une thèse sur la sémio-tique du cinéma consacrée auxtravaux théoriques de Pasolini,Metz, Jacobson et Mitry.

Pendant deux ans, Darejan Omirbaev travaille au sein de la rédaction du magazine New Film, où il se révèle un critique et un théoricien majeur.

En 1988 il réalise son premier court métrage, Shilde, en 1992, Kairat, son premier longmétrage, est récompensé par un Léopard d’Argent et le prix Fipresci au Festival deLocarno, et reçoit, la même année, la Montgolfière d’Argent au Festival des TroisContinents de Nantes, ainsi que le Grand Prix et Prix de la critique au Festival deStrasbourg l’année suivante. En 1995, son deuxième long métrage Kardiogramma estsélectionné en compétition officielle au Festival de Venise avant de recevoir le Prix Spécialdu jury au Festival des Trois Continents.

Tueur à Gages présenté en sélection officielle au festival de Cannes en 1998 reçoit lePrix Un Certain Regard- Fondation Gan et est sélectionné dans de nombreux festival aux quatre coins du globe dont Le Caire, Karlovy - Vari, Chicago, Tokyo,San Francisco et reçoit le prix du meilleur scénario à Téhéran. La Route sélection officielle au Festival du Film de Cannes dans la section Un CertainRegard en 2001 ouvre la rétrospective du cinéma Kasakh du Festival des Trois Continentsde Nantes et est également présenté au Forum Européen de Strasbourg.

Djamshed Usmonov,Acteur principal de La Route est avant tout réalisateur. Originaire du Tadjikistan,il est né dans un village au fin fond des montagnes. A 17 ans il découvre la ville,Douchanbé, où il fait des études d’acteur et de metteur en scène. En 1990 ilréalise le Puits, son premier long métrage. Mais à l’indépendance succède laguerre civile : Elle fut une perte de sept ans de ma vie. En 1999 il réalise Le volde l’Abeille. Ses deux longs métrages seront présentés au Festival de Locarno.Il a d’abord refusé le rôle que lui proposait son confrère Ormibaev puis aprèsavoir visionné Kardiogramma il accepte de camper le rôle de ce réalisateur... Ilréalise actuellement au Tadjikistan son troisième long métrage.

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L’Ange de l’Epaule Comment estnée l’idée de ce film ? Pourquoiavoir choisi comme héros princi-pal un réalisateur ?

L’idée de ce film m’est venue, jecrois, à la fin des années 80. C’étaità l’époque de « Terminus » (KonescnajaOstanovka) de Serik Aprymov. Aprèsla présentation du film, il y a eu unpetit scandale. A cette époque je n’étais pas encore réalisateur maisje travaillais dans l’unité de produc-tion Miras comme rédacteur. Unjour, mon chef m’apporta du Parquetune plainte déposée par une jeune

actrice qui avait joué dans le film.C’était moi qui devais répondre àcette lettre. Le problème était lesuivant : on n’avait pas prévenu cettejeune fille que la scène dans laquelleelle avait joué était, après le mon-tage, assez osée. La partie plus éro-tique fut tournée avec une autreactrice. C’est le montage qui donnel’impression que c’est la même jeunefille que l’on déshabillait. Elle n’avaitpas était prévenue et s’est donc rendue à la première du film. Ellevenait d’un village nommé Aksuat, jecrois, et lorsqu’elle s’est vue nue sur

l’écran, elle s’est indignée et à écritune lettre au Procureur Général. Là-bas, ils ont regardé cette lettre, maisn’ayant pas vraiment compris de quoiil s’agissait, ils l’ont envoyée auxStudios. J’ai donc fait nos excuses enexpliquant que la création artistiqueest ainsi faite… J’ai pensé que c’étaitintéressant et que ça pouvait fairel’objet d’une scène dans un film. D’uncôté c’est assez drôle, mais d’un autrecôté ça pose problème… Cette his-toire m’est restée en mémoire et a étéla première idée directrice du film. Etj’ai tenu à ce que Serik Aprymov jouedans mon film. Il avait créé toute cettehistoire et c’était à lui d’y mettre unpoint final. Il l’a compris et il joue lerôle du frère de la jeune fille. J’utiliseaussi quelques images de son film« Terminus »…

Pourquoi avez-vous choisi detourner dans votre village natal ?Pas parce que c’était mon villagenatal ! Mais cela a certainement jouéun rôle. Boris [Trochev, chef opéra-teur] est quelqu’un d’objectif, ça lui estégal, c’est du pareil au même pour lui.Je lui ai fait confiance quand il m’a ditque c’était ce que nous pouvions trou-ver de mieux. Quand tu arrives par laroute, il y a une très belle vue sur levillage. Il y a la steppe, la steppe ettout à coup, derrière une petitecolline, apparaît le village. Ceschoses-là sont difficiles à trouver.L’école et la maison principale quenous avons trouvé nous ont plu égale-ment.

Comment avez vous choisi votreacteur principal ?Au début je voulais filmer AmirKarakulov (NDLR : cinéaste kazakhappartenant à la Nouvelle Vague, réal-

isateur des films Une femme entredeux frères (pazlucnisa) (1991), Lesonneur de Cloches (golubinyjzvonar’) (1994), Dernière vacances(Poslednye kanikuly) (1996)). C’estpourquoi, lorsque j’ai écrit le scénario,j’ai appelé le héros Amir. Et puis,ensuite, je me suis rendu à Paris pourrégler les affaires relatives à monfilm. J’ai été invité chez Joël Farges, leproducteur du film, et j’ai fait con-naissance avec le réalisateur tadjikJamshed Usmonov. Le surlendemain,j’étais à Istambul, et je me suis réveil-lé pendant la nuit en me demandants’il ne conviendrait pas au rôle.

Etait-il aisé de le diriger alors qu’ilest aussi réalisateur ?Après avoir filmé des enfants dansKardiogramma, je me suis fait lapromesse de ne plus jamais avoiraffaire à eux. Après ce film, je me suisjuré de ne plus jamais fréquenter deréalisateurs (rires). Bien sûr, c’est unesituation difficile lorsque deux réal-isateurs se retrouvent sur un mêmeplateau de tournage… Mais quand jeregarde les rushs, je me dis que je neme suis pas trompé ! Si le choix étaità refaire aujourd’hui, je choisiraisencore Jamshed.

Dans votre scénario, vous aviez unereprésentation très juste et détail-lée de chaque scène, de chaqueépisode. Travailliez-vous complète-ment seul ?La personne qui m’a le plus épaulé estBoris Trochev, le chef opérateur quiest vraiment doté d’un sens de la réal-isation. Je pense qu’il en devientpresque un co-auteur. Il sait vraimentce qui est juste et ce qui ne l’est pas.En ce qui concerne Jamshed, bien sûr,il nous a soufflé quelques idées pourcertaines scènes…

Interview de Darejan Omirbaev

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Pratiquement tous les membres del’équipe de tournage ont joué dans lefilm.Au début, j’avais l’idée de ne filmer quedes réalisateurs. Car c’est un film pourles gens du cinéma, qui nous sontproches. Mais physiquement c’estimpossible. Il y a trop de personnages,et les trouver tous parmi lescinéastes… C’était une idée sans lende-main. Mais c’est vrai que nous avonsfilmé pas mal de gens du cinéma. Lehéros principal est réalisateur.Beaucoup de membres de l’équipe ontjoué dans le film, les habitants du vil-lage aussi.

Vous dites que vous aimez découvrirde nouveaux visages, trouver desacteurs non-professionnels. C’est àchaque fois un risque : avez-vous vujuste ?

Je crois que le rôle principal doit toujours être interprété par une nou-velle personne. Pour les rôles secondaires, c’est différent. Bresson, parexemple, a dit qu’il ne fallait pas filmerdeux fois la même personne. J’airegardé son oeuvre. En fait, il a déjàfilmé la même personne deux fois, bienqu’il déclare partout qu’il ne faut pas.

Par rapport à la réalisation de Tueurà gages, quelles sont les différences dans le fonctionnementdes studios Kazakhfilm ?En ce qui concerne le personnel, il mesemble qu’aujourd’hui, les gens travaillent mieux. Avant, il y avait toujours du travail, et même si on viraitquelqu’un d’un film, on le reprenait surun autre. C’était donc difficile d’êtreexigeant. On ne savait pas ce que sig-nifiait le mot « chômage ». On ne se

demandait pas comment gagner de l’argent.Maintenant, c’est le temps de l’économie demarché. Je crois que c’est une bonne chose. Lesgens ont commencé à mieux travailler, ils sontplus responsables car ils tiennent à leur travail.

Vous avez réalisé un film sur le monde ducinéma, quelle est la place des réalisateursdans le Kazakhstan d’aujourd’hui ?Malheureusement, ce n’est maintenant plusune profession prestigieuse. Le cinéma ne faitplus partie de l’espace public. Les gens se sontbranchés sur autre chose. Il me sembled’abord que la télévision joue un rôle trèsimportant, et la presse aussi. Maintenant lesprofessions les plus en vues sont celles quitouchent aux finances : banquiers, business-men... J’ai le sentiment que plus personne n’abesoin du cinéma. Je crois que la baisse duprestige du cinéma est liée à la distribution.Toutes les salles de cinéma ont fermé. Bienque, encore une fois, quelques salles de ciné-ma ont rouvert, ces dernières années, àAlmaty. On n’y montre que des films étrangers.Peut-être qu’avec le temps, il y aura une placeaussi pour nos films.

N’est-il pas difficile de savoir que vos conci-toyens ne peuvent voir vos films ?Bien sûr que c’est difficile ! Mais le problèmen’est pas que les kazakhs ne voient pas de filmskazakhs. Il y a aussi d’autres films à voir etautre chose que cette production qu’on leur pro-pose… Qu’est ce que le cinéma indien pour lesgens d’ici ? Généralement, le cinéma indien,c’est les danses. Alors qu’en Inde il y a un ciné-ma différent avec des réalisateurs commeSatyajit Ray par exemple… J’ai vu ces filmsdans les festivals, et c’est vraiment différent !Pourquoi ne pas les montrer ici ? Il y a aussi debons films iraniens que l’on voit dans le mondeentier, ici personne ne connaît Kiarostami.

C’est un problème d’éducation, car la jeunegénération est une génération-vidéo, quin’est jamais allée au cinéma…

C’est aussi lié au fait que la culture kazakheest une culture orale. La culture visuelle n’esttraditionnellement pas très développée. Il y aun proverbe qui existe depuis la nuit destemps : « l’art d’entre les arts - c’est l’art deparler ». Mais comment faire comprendre toutel’importance de la culture visuelle ? Le cinémac’est avant tout l’image, et non le mot.Comment naissent de très nombreux filmskazakhs ? Ils s’appuient avant tout sur la lit-térature. Si vous prenez les gens qui travail-lent comme rédacteurs dans les studios, vousn’y trouverez aucun artiste de l’image, pas unphotographe, seulement des écrivains. Caexplique la prédominance du mot jusqu’àaujourd’hui. Il faut que les gens comprennentque le cinéma n’est pas une littérature pho-tographiée mais un art à part entière…

Extrait de l’interview réalisée par Cloé Drieu et OlgaGarifoullina à Almaty, à la fin du tournage “La Route “,novembre 2000.

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Récit du tournagepar Cloé Drieu

Un éloge lancinant à la steppe...C’est dansles vastes locaux déserts des studiosKazakhfilm que le tournage de “Jol”, ledernier long-métrage de Darejan Omirbaev,a commencé. C’était le seul film à être tournéen 2000 au Kazakhstan. On est bien loin dela production du début des années 1990.Moins d’une dizaine de films en moyennechaque année, avec un record de 13 films en1991. Le tournage, partagé entre Almaty etla steppe kazakhe, s’est étalé sur un peuplus de deux mois.

C’est l’ancienne capitale du Kazakhstan,Almaty, qui voit les premières scènes de“Jol”. Dans un appartement reconstitué dansle plus grand pavillon des studios, situés enmarge de la ville, l’équipe de tournage s’af-faire dans la bonne humeur pour les scènesd’intérieur, peu nombreuses. Qui sait quandon tournera un autre film ? Quelques jourssuffisent à boucler les épisodes mettant enscène Amir et sa famille, la monteuse et

Serik (joué par Serik Aprymov lui-même), lefrère venu laver l’honneur de sa sœur.

Le temps est radieux, et ne laisse aucune-ment présager des caprices qu’il réservepour la suite du tournage… Après lesintérieurs, l’équipe se prépare pour unevirée à Kapchagaï, un lac situé à 80 km, aunord de la ville. C’est ici que nous devonstourner la scène entre Amir et Veronika…Le chemin, bordé de part et d’autre deroseaux, est soudain recouvert d’eau, Amirs’arrête au milieu, se tourne vers Veronika,la regarde et, après une lutte silencieuse,parvient finalement à l’embrasser… Darejanet son chef opérateur ont les pieds dansl’eau. C’est la seule scène tournée àKapchagaï… On rentre à Almaty mais il fautsans tarder prendre définitivement la routeet quitter la ville et ses environs pour lacampagne kazakhe.

Bientôt, ces constructions modernes, cesvoitures tout-terrain rutilantes mélangéesaux ladas sans âge, ces terrasses de caféombragées et accueillantes s’éloignent der-rière nous pour disparaître totalement. Alorsqu’Almaty étalait ses plus beaux atours, lasteppe, infini de terre jaunie, ne donne rienà l’œil pour s’y accrocher. L’œil glisse de nepouvoir rien fixer. La steppe kazakh, silen-cieuse, démesurée et monotone pour un œilnon averti a repris son droit. On découvre enmême temps qu’Amir cette infinie solitudedu paysage, ce vide qui fait gamberger. C’estle rythme de la steppe qui commence, lanci-nant, quasi-hypnotique, ennuyeux peut-être,mais qui éveillera en nous un certainmanque quand on se retrouvera de nouveauconfronté à un univers urbain, bouillonnantet bruyant.

Notre première étape est Merki, ancienneétape de la route de la soie. C’est une petiteville située à plus de 200 km d’Almaty, surla route qui mène à Taraz On doit y passer

deux semaines pour tourner la suite desscènes entre Amir et Veronika : leur ren-contre au café, le rendez-vous fantasmémais finalement manqué et le chemin quimène Amir au foyer maternel…

On est logé dans un sanatoriumlabyrinthique au pied des montagnes. Il faitfroid et humide et la brume s’accroche par-fois tellement aux sommets que l’on sedemande si le ciel existe réellement.Reverra-t-on un jour le soleil ? L’été fut par-ticulièrement chaud. Les herbes jaunies parle soleil ont fini par s’embraser, contraignantainsi les aigles des hauteurs à descendredans la vallée, à découvert. Les flancs desmontagnes sont pelés et noirâtres. Le brouil-lard se pose pour ne plus se décrocher.

Le sanatorium se compose de deux bâti-ments curieusement agencés. Le deuxièmeétage de l’un correspond au troisièmeétage de l’autre. Quelques salles exhibentdes appareils médicaux hors d’âge. Desinfirmières font les cents pas dans descouloirs interminables. La scène com-mencée hier sous le soleil doit être ter-minée aujourd’hui… Malheureusement, lesoleil n’est pas au rendez-vous. Onattend… Chacun tue le temps comme ilpeut. Il fait trop froid pour dormir. On joueaux cartes, au backgammon, au ping-pong,on va à la pêche ou on regarde une télésans âge elle aussi, à l’image neigeuse.

En plus du personnel médical et desquelques clients venus chercher un peu derepos ou se refaire une santé, le sanatori-um héberge un projectionniste et un mollahqui se partagent le même étage. Lamosquée fait donc face à la salle de projec-tion. Parfois, les appels s’entrechoquent :alors que l’un appelle le croyant à laprière, l’autre appelle le spectateur en malde sensation à une séance bien partic-ulière : “Ce soir, à 19h, ne manquez pas le

film américain, L’Empire de l’amour”… Etle mollah de continuer son appel... Avecson air débonnaire, il ne semble pas per-turbé par son voisin qui propose aussipour 100 tenge le visionnage en vidéo defilms plus hard-core pour ceux qui trou-vent que la séance officielle est trop soft.

Encore la steppe…Après avoir achevé ici, tant bien que mal,les objectifs de tournage qui avait été fixés,on reprend la route pour Akkol, dernièreétape du voyage avant notre retour àAlmaty… Retour à la steppe… Lespoteaux électriques, comme unmétronome, battent la mesure. C’est à cerythme monotone, répétitif et régulier, troprégulier parfois, que se fait notre voyage.Comment ne pas s’imaginer à la place deKaïrat, qui regarde à travers la vitre dutrain, ou à celle du jeune Jasulan deKardiogramma qui contemple ce mêmepaysage, mais d’une fenêtre d’autobus ? Onpeut faire une centaine de kilomètres sansne jamais apercevoir un village.

On arrive à Akkol de nuit. C’est le petitbourg, situé près d’un lac, qu’Amir redé-couvrira de la fenêtre de son véhicule,après une longue route. C’est aussi le vil-lage natal de Darejan. On arrive dans unenuit noire et glacée, sans lune. Il n’y a pasd’éclairage si ce n’est celui des phares desvoitures. On ne distingue quasiment rien,seules de vagues formes, des fantômes debéton et de brique qui se dressent derrièreles vitres. Après quelques circonvolutions,les véhicules s’immobilisent. On sort. C’estle silence. Toujours pas de lumière. On faitquelques pas, nos yeux se familiarisentavec l’obscurité… Des hommes s’ac-tivent… Puis la lumière apparaît dans unterrible grondement … C’est le bruit d’ungénérateur, qui ressemble étrangement àcelui que Jasulan met en marche dans

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Kardiogramma pour regarder la télévision.Fiction ou réalité ?

L’automne s’installe. On raconte que ça faittrente ans qu’il n’a pas fait aussi froid danscette région du Kazakhstan. Heureusement,le bâtiment fait de briques beiges garde bienla chaleur. Akkol est un bourg entre la vie etla mort. Des cinq ou six milles habitants quivivaient là il y a quelques années, seuls 2000 sont restés. Ayant perdu son statut decentre administratif, Akkol est déserté petità petit. Ses habitants ont rejoint les villesplus importantes, dans l’espoir de trouverdu travail. Ceux qui sont restés surviventtant bien que mal. La présence du lac lessauve un peu en apportant quelques richess-es poissonnières. Une statue de Lénine trôneencore vaillamment au milieu des habita-tions en ruine... Les briques des bâtiments inhabités sont récupérées à coupde pioche et de masse. Elles sont revenduesdans les villes des alentours.

Ramenons-nous un peu de vie avec ce film ?Nous logeons dans le foyer d’un établisse-ment de formation aux métiers agricoles.Cela fait cinq ans que personne n’a vécu ici.Devant nous, la steppe à perte de vue. Le videnous entoure et nous empli. L’électricité n’estdonnée que deux ou trois heures par jour.Entre 8 et 11 heures. C’est à ce moment qu’ilfaut recharger les batteries qui serviront à lacaméra, au Tascam ou aux projecteurs.Parfois, on n’a pas du tout d’électricité. Letemps est de plus en plus capricieux…

Mais la vie continue… Une fois familiariséavec cet environnement, l’œil commence à discerner les formes de la vie ici. L’école estétincelante. L’odeur de peinture fraîchementrefaite remplie l’atmosphère. “Cette odeurvous suivra toute votre vie…” rappelle à sesélèves la maîtresse d’Amir. Darejan se sou-vient d’avoir écrit en grosses lettres blanch-es le slogan qui accueille tous les matins lesécoliers et qui vante les vertus de l’éduca-tion. Les écoliers, proprets, arborent encore

l’uniforme qui était de rigueur du temps del’union soviétique. Costume noir et chemiseblanche pour les garçons, jupe noire, tablierblanc en dentelle et nœud blanc dans lescheveux pour les filles.

Le tournage dans la maison de la mèred’Amir s’éternise. Les figurants arrivent, leshommes avec leur kalpak noir et blanc [cha-peau de feutre que l’on trouve chez leskirghiz et les kazakh] et les femmes avecleur fichu blanc et leur gros gilet de laine. Ilfait froid, le samovar fume dans la cour dela maison, on attend patiemment un peu dethé pour se réchauffer… Et puis “moteur”…Amir descend de la voiture, regarde devantlui et ne saisit pas tout de suite le sens dece regroupement dans la cour de la maisonde son enfance. Sa peur augmente… etpuis… silence… il n’entend plus rien…Une partie de cette scène est tournée auralenti. La caméra qui permet de le faire estarrivée la veille du Kirghizstan… il n’y en aplus dans les studios kazakh.

On retrouve dans les paysages et sur le tour-nage le même rythme que dans les films deDarejan, cette même lenteur, ce mêmesilence, la même solitude de l’homme face auvide. La réalité, comme en un songe éveillé,se confond avec la fiction. Toute cette atmo-sphère a bercé l’enfance de Darejan et l’anourri. Ses films sont un éloge lancinant à lasteppe. Il ne nous reste plus que quelquesjours ici. Bientôt, devant nous, apparaîtraAlmaty, avec ses constructions modernes,ses voitures tout-terrain rutilantesmélangées aux ladas sans âge, ses terrassesde café ombragées et accueillantes…

Cloé Drieu, août 2001.

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