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Bilan d'activité des équipes de l'hôpital Saint-Louis à Niamey pour la prise en charge des séquelles de noma (médecins du Monde-Opération sourire)

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ARTICLE ORIGINAL

Bilan d’activité des équipes de l’hôpitalSaint-Louis à Niamey pour la prise en chargedes séquelles de noma(médecins du Monde-Opération sourire)

Activity report about hospital Saint-Louis’s teamfor taking in charge sequellae of NomaF. Foussadier a,*, J.M. Servant b

a Service de chirurgie plastique, hôpital René-Dubos, 6, avenue de l’Île-de-France,95300 Pontoise, Franceb Service de chirurgie plastique, hôpital Saint-Louis, 1, avenue Claude-Vellefaux, 75010 Paris, France

Reçu le 11 mai 2004 ; accepté le 16 juin 2004

MOTS CLÉSNoma ;Reconstruction faciale ;Chirurgie plastiquehumanitaire

KEYWORDSNoma;Facial reconstruction;Humanitary plasticsurgery

Résumé Après une présentation du pays dans lequel ces missions se sont déroulées, lesauteurs décrivent le cadre de leur action et les synergies développées avec des partenai-res associatifs permettant d’optimiser la prise en charge des patients atteints deséquelles de noma. L’épidémiologie et la clinique du noma sont brièvement présentés.Les différents cas opérés sont présentés par localisations, à savoir : labiales, centrofacia-les, jugocommissurales et hémifaciales. Les différents principes de ces reconstructionssont envisagés ainsi que les techniques utilisées avec leur adaptation à la particularité dela lèvre africaine et à la particularité des lésions du noma, à savoir l’importance de laperte de substance muqueuse qu’il est nécessaire de toujours réparer. Enfin les pointsimportant de l’organisation ayant permis un bon déroulement de ces missions sontenvisagés, notamment en ce qui concerne le suivi, essentiel en particulier à la prise encharge des séquelles de noma.© 2004 Publié par Elsevier SAS.

Abstract A presentation of the country in which the missions have been made, theauthors describe the schedule of their action and the synergy developed with associativepartners allowing tacking in charge of sequelae of Noma disease. Epidemiology and clinicsof Noma are shortly described. Different cases are exposed by localisations: lips,centro-facial, cheek, hemi-face. Different principles of these reconstructions are ex-posed and the techniques with their adaptation to the African lip and to the particularityof Noma lesion (important lose of substance of mucosae which is very important torepair). The very important points of the organisation are exposed especially for thefollow up of these patients.© 2004 Publié par Elsevier SAS.

* Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (F. Foussadier).

Annales de chirurgie plastique esthétique 49 (2004) 345–354

www.elsevier.com/locate/annpla

0294-1260/$ - see front matter © 2004 Publié par Elsevier SAS.doi: 10.1016/j.anplas.2004.06.006

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Introduction

Depuis 1997 les équipes du service de chirurgieplastique de l’hôpital Saint-Louis effectuent desmissions deux à trois fois par an à l’hôpital nationalde Niamey au Niger.Le but de ce travail est de rapporter l’expérience

acquise dans la prise en charge des séquelles denoma tant au plan des différentes techniques etrésultats que de la spécificité du contexte de cetteprise en charge.

Le pays

Le Niger est peuplé de 11 millions d’habitants vi-vant dans un climat subsaharien.Quarante-sept pour cent ont moins de 14 ans

avec un âge moyen de 16 ans.L’espérance de vie est de 42 ans.Trente-sept pour cent vivent en zone rurale,

c’est-à-dire désertique.Soixante-trois pour cent de la population vivent

au-dessous du seuil de pauvreté.Ces chiffres terribles expliquent les conditions

favorables du développement du noma qui n’estpas une maladie tropicale mais une maladie de laprécarité.

Les missions

Depuis 1998, 14 missions, financées par médecinsdu monde, ont été réalisées à l’hôpital national deNiamey (HNN).Il s’agit de missions courtes (8 à 10 jours) mais

répétées régulièrement trois fois par an.Les équipes sont constituées de : un chirurgien

senior, un chirurgien junior (chef de clinique), uneinfirmière panseuse, un anesthésiste, un photogra-phe dont le rôle est indispensable pour la constitu-tion d’une iconographie utilisable — la majorité del’équipe provenant du service de chirurgie plasti-que de l’hôpital Saint-Louis à Paris.Chaque équipe est autonome en matériel chirur-

gical et consommable. Une, parfois deux, sallesd’opérations sont mises à notre disposition.Le recrutement des patients est assuré :

• soit par les médecins de l’HNN, notamment pourla pathologie tumorale (sein, peau ), les séquel-les de brûlures ;

• soit, essentiellement pour les nomas et les fen-tes labiopalatines, par l’association Sentinelle.Sentinelle est une association suisse, branche de

Terre des Hommes, travaillant depuis de nombreu-ses années sur le problème du noma. Son objectifau Niger est de répertorier les enfants atteints de

séquelles de noma, de les regrouper dans des mai-sons communautaires et d’organiser leur prise encharge chirurgicale, en Europe ou au Niger. Senti-nelle, fonctionnant essentiellement avec du per-sonnel nigérien, sélectionne les patients qu’ils sou-haitent nous faire opérer, nous faire parvenir lesdossiers avec photos en France où le choix estvalidé. Connaissant d’avance les patients, la logis-tique s’adapte.Tous les enfants à opérer ou à revoir sont trans-

portés à l’hôpital de Niamey quelques jours avantl’arrivée de l’équipe.Ces enfants forment un groupe ayant tous le

même problème, ils voient les résultats des précé-dents opérés, ils vivent ensemble et ne sont plusisolés, ils sont soutenus, entourés et informés.Sentinelle assure également la prise en charge

sociale complète de ces enfants en favorisant leretour à l’école dont ils ont souvent étés exclus.La complémentarité de leurs objectifs et des

nôtres ont rendu possible une prise en charge de cespatients directement au Niger.

La maladie du noma

Épidémiologie

Présent en Europe au 19e siècle, retrouvé au 20e

siècle dans les camps de concentration, le noma atotalement disparu des pays européens.Actuellement passé pathologie prioritaire auprès

de l’OMS, le noma concerne entre un à septenfants/1000 (âgés de 2 à 5 ans), l’incidence pou-vant atteindre 12/1000 dans certaines zones.Certaines études donnent une incidence an-

nuelle de 140 000 cas ; on estime à 770 000 lenombre de patients porteurs de lourdes séquelles.La phase aiguë provoque la plupart du temps un

décès rapide.Lorsque l’enfant survit, il est généralement at-

teint de lourdes séquelles.

Description clinique

La gingivite ulcéronécrosante aiguë (ANUG), pré-cède le plus souvent la phase aiguë. La nécroses’étend aux tissus de recouvrement dans un tableauinflammatoire et douloureux. En trois semaines lanécrose se circonscrit et se dessine un sillon d’éli-mination de l’escarre constituée qui s’élimine enlaissant place à une perte de substance souvent depleine épaisseur.La cicatrisation très fibreuse provoque des ré-

tractions tissulaires responsables en fonction de lalocalisation de :

• constriction permanente des mâchoires par blocostéofibreux coronoïdomalaire ;

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• de rétraction de la paupière ;• voire de déformation du contour facial.L’étiopathogénie est encore imprécise, mais il

existe un grand polymorphisme de germes pathogè-nes [1,2].

Patients et méthodes

Patients

Trois cent quarante-six patients ont été opérésdurant 14 missions, 50 % de séquelles de brûlures,30 % de fentes labiales et palatines, 20 % de patho-logies tumorales diverses et 39 séquelles de noma.Trente-cinq patients ont été opérés en un ou

plusieurs temps à l’HNN.Quatre reconstructions complexes par lambeaux

libres ont été réalisées à Saint-Louis (le temps deséjour n’excédant pas un mois ), les temps suivantsétant réalisés à Niamey lors des missions.

Méthodes

Tous les patients ont été opérés par l’auteur senior.

Chirurgie des lèvres [5–11]Les principes de réparation [3,4] tiennent comptede la très grande laxité de la lèvre africaine et del’importance de la perte de substance muqueuse.Les lambeaux de Webster et d’Estlander [5] ont

été privilégiés.

La perte de substance muqueuse doit être re-construite en conservant une bande de tissu cica-triciel permettant l’amarrage de la muqueuse dulambeau transfixiant hétérolabial.L’avancement de la lèvre restante est assuré

grâce à une incision muqueuse dans le cul-de-sacvestibulaire de la lèvre restante.

Reconstruction nasaleQue ce soit avec un lambeau frontal ou un lambeauscalpant de Converse, la doublure interne doit êtreassurée pour éviter la rétraction et l’obstruction.La columelle est reconstruite par lambeau de

translation doublé d’une greffe de peau totale.Les différents cas, en faisant référence à la

classification de Montandon [12], sont regroupésdans le Tableau 1.

Commentaires

Chirurgie des lèvres

Tous les résultats ont été dans l’ensemble satisfai-sants. Tous les patients ont pu être revus en consul-tation.La plupart des reconstructions par lambeau ont

donné un volume suffisant symétrisant le visage. LaPDS muqueuse est toujours supérieure à la PDScutanée, la taille muqueuse du lambeau doit doncêtre suffisante.

Tableau 1 Série clinique.

Localisation Techniques utilisées12 PDS latérales lèvre supérieure 11 L d’Estlander

1 L d’Abbé-Burget2 PDS de l’hémilèvre supérieure 1 L Hémi Webster1 PDS de toute la hauteur de la lèvre blanche supérieure 2 L nasogéniens assurant la couverture muqueuse et cutanée6 PDS latérales lèvre inférieure 5 L d’Estlander (Fig. 1)

1 L fan flap de Gillies2 PDS de toute la hauteur de la lèvre blanche inférieure 1 L de Camille Bernard

1 L nasogénien à pédicule inférieure associé à un L muqueux deFamm

10 PDS centrofaciales 5 L de Webster uni ou bilatéral ( Fig. 2)4 L frontaux3 L de Converse (Fig. 3)3 L de translation pour la columelle (Fig. 2)

2 PDS purement muqueuses :Lèvre supérieure 1double Webster uniquement muqueuxEndonarinaire 1 L nasogénien retourné en endonasal1 PDS des 3/4 des lèvres inférieure et supérieure L deltopectoral pour la couverture cutanée et L de peaucier pour

la couverture muqueuse2 grandes PDS jugocommissurales 1 L de Grand-Dorsal pédiculé avecpalette cutanée endobuccale

et GPT externe1 L libre de G Dorsal à 2 palettes

1 Grande PDS hémifaciale 1 L libre de G Dorsal à 3 palettes (Fig. 4)

PDS, perte de substance ; L, lambeau ; GPT, greffe de peau totale

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Perte de substance de la lèvre supérieure

Le lambeau d’Estlander a été le lambeau le plusutilisé dans les pertes de substance latéralisées.

En cas de perte de substance concernant l’hémi-lèvre supérieure avec conservation d’un moignoncommissural, un lambeau de Webster [6] seul per-met la reconstruction de l’hémilèvre manquante enexerçant une traction maximale sur l’hémilèvrerestante, évitant ainsi la rançon cicatricielle d’unlambeau hétérolabial. Cette exploitation au maxi-

mum de la lèvre restante est particulière à la lèvreafricaine.La hauteur de la commissure doit être hyper

corrigée.

Perte de substance de la lèvre inférieureLe lambeau d’Estlander a été le plus utilisé.La hauteur de la perte de substance étant plus

importante, mieux vaut utiliser la hauteur du lam-beau pour reconstruire la hauteur de la perte desubstance labiale inférieure, d’où la nécessité d’un

Figure 1 A : perte de substance du 1/3 latéral de la lèvre inférieure droite, les lésions muqueuses concernent les 3/4 de la lèvreinférieure, la columelle n’est pas respectée ; B : vue peropératoire montrant la taille du lambeau d’Estlander de pleine épaisseur etson débord muqueux important à la largeur du lambeau correspond à la hauteur de la perte de substance de la lèvre inférieure. Uneincision vestibulaire libère la lèvre rétractée ; C : la rançon cicatricielle est satisfaisante à trois mois, la commissure est en place, iln’y a plus de fuite salivaire.

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prélèvement très haut et peu large du lambeauprélevé sur la lèvre supérieure.Dans la thèse de Haud Chaussard [11], Jean-

Marie Servant propose le schéma thérapeutiquesuivant :

• noma lèvre supérieure :C PDS hémilèvre avec conservation de la com-missure : lambeau de Webster.

C PDS hémilèvre sans conservation de la com-missure : lambeau d’Estlander.

C PDS subtotale de la lèvre blanche avec conser-

vation de la lèvre rouge : lambeaux nasogé-niens en îlot ;

• noma lèvre inférieure :C PDS inférieure à la moitié de la lèvre sansconservation commissurale : lambeau d’Estlan-der ;

C PDS inférieure à la moitié de la lèvre avecconservation commissurale : lambeau deGillies [7] ou Karapandzic [8] ;

C PDS des 3/4 de la lèvre : lambeau de Camille-Bernard.

Figure 2 A : perte de substance de l’hémilèvre blanche gauche avec atteinte du philtrum et orostome de l’aile narinaire, la columelleet le plancher des fosses nasales étant détruites ; B : aspect à huit mois après fermeture de l’orostome par double lambeau de Websteret technique des ailes flottantes. L’avancement obtenu peut se constater sur le déplacement des deux scarifications jugales. Lacolumelle a été reconstruite par lambeau de transposition à partir du croissant d’excision péri-alaire, la face interne a été doubléed’une greffe de peau totale ; C : réinsertion du pied de la columelle et des deux ailes narinaires dans un deuxième temps.

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Figure 3 A, B : noma centrofacial déjà reconstruit par lambeau frontal mais présentant une obstruction complète des orificesnarinaires ; C : libération de l’orifice piriforme, libération du lambeau frontal et mise en nourrice sur sa charnière, double Websterd’avancement pour couvrir l’orifice piriforme ; D : dessin du lambeau de Converse et redéploiement du lambeau frontal ; E : lambeaude Converse avec le greffon costal en place ; F : résultats définitif ; G : ailes narinaires remises en place.

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Figure 3 (suite)

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Figure 4 A : perte de substance de l’hémiface gauche sans constriction permanente des mâchoires. Les parties molles détruites sonttoute la région jugale, la paupière inférieure, l’héminez et l’hémilèvre gauche. Les structures osseuses détruites sont la partieantérieure du maxillaire avec exposition du sinus, le rebord orbitaire et les cartilages gauches du nez ; B : tracé des trois palettes dulambeau de grand dorsal libre : palette proximale pour reconstruire le plan muqueux jugal et labial ainsi que le plan palatin, paletteintermédiaire pour le plan nasal, palette distale pour le plan cutané jugal ; C : résultat postopératoire immédiat, la perte de substancenasale ayant été reconstruite par un lambeau frontal ; D : résultat à distance après retouche de la lèvre.

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Noma centrofacial

La PDS peut concerner à des degrés divers une ailenarinaire, une columelle, quasiment toute la pyra-mide nasale, souvent en association avec une at-teinte labiale supérieure centrale.La reconstruction nasale est assurée par un lam-

beau frontal et contre lambeau pour la doublureinterne.La perte de substance labiale supérieure cen-

trale est reconstruite par double Webster en un oudeux temps, la columelle par des lambeaux detranslation doublés d’une greffe de peau totaleprise aux dépens des lambeaux d’avancements deWebster. (Figs. 1, 2).Certains patients, déjà opérés par d’autres équi-

pes, pour rhinopoïèse, présentaient des obstruc-tions nasales complètes. Ils ont pu bénéficier de latechnique de J.M. Servant dite « des ailes flottan-tes » (Fig. 3).

Premier temps• libération des ailes narinaires par incision dansle sillon nasolabial ;

• double lambeau de Webster d’avancement pourassurer la couverture endonasale ;

• libération et mise en nourrice sur sa charnièrede l’extrémité distale du lambeau frontal en leretournant sur lui-même.

Deuxième temps(4 à 6 semaines ou plus)Redéploiement du lambeau frontal, la face cutanéeassurant la doublure interne, réalisation d’undeuxième lambeau frontal controlatéral pour lerevêtement cutané et repositionnement sur mesuredes ailes narinaires après désépidermisation de lazone receveuse.

Les grandes atteintes jugocommissuraleset hémifaciales

Le lambeau libre de grand dorsal (LDG) offre, en unseul temps, la possibilité de reconstruire les vastesPDS muqueuses et cutanées à l’aide de plusieurspalettes cutanées. Certaines dispositions anatomi-ques spécifiques au sujet africain permettent demonter le LGD en îlot au-delà du 1/3 inférieur de laface.Un cas seulement présentait une ankylose tem-

poromandibulaire. La libération totale de l’anky-lose et la couverture muqueuse étanche endobuc-cale à l’aide d’une palette du lambeau a permis àdistance, en protégeant la mandibule, une conser-vation de l’ouverture buccale sans mécanothérapieparticulière.Aucune reconstruction osseuse n’a été entre-

prise chez ces patients. Pour J.M. Servant un apport

de tissus mous de bonne qualité et en quantitésuffisante doit être le préalable à toute reconstruc-tion osseuse.

La stratégie de la prise en chargedes nomas dans le cadre des missionseffectuées en Afrique

Cette pathologie africaine doit au maximum êtreprise en charge sur place. Il est plus cohérenthumainement et économiquement d’aller vers cespatients que le contraire.Ce choix nécessite des alliances indispensables :

• être accueilli par un hôpital à l’équipementminimum et où le directeur est suffisammentsensibilisé à l’intérêt du développement de lachirurgie plastique ;

• s’intégrer dans le fonctionnement de l’hôpitalen évitant de n’opérer qu’une pathologie ;

• être partenaire avec une autre ONG dont letravail sera d’organiser toute la gestion des pa-tients dont la plupart sont disséminés dans toutle pays. Dans notre série pratiquement 100 % despatients ont bénéficié d’un suivi par les diffé-rentes équipes.Ces actions ne sont pas cohérentes sans volonté

de formation des chirurgiens locaux :• celles-ci ne peuvent s’inscrire que dans la répé-tition des mission pendant plusieurs années sa-chant que le temps de séjour est toujours court(8 à 10 jours) ;

• il est essentiel d’avoir en dehors de l’activiténoma une pratique de chirurgie plastique debase (traitement des brûlures aiguës et séquel-les, tumeurs, etc.).Certains étudiants très assidus à nos missions

effectuent actuellement toutes les greffes de l’hô-pital ainsi que les sevrages de lambeaux et certainslambeaux fasciocutanés.

Conclusion

Au terme de ce travail, il apparaît qu’il a étépossible de prendre en charge des séquelles denoma au Niger dans de façon satisfaisante en ce quiconcerne les conditions matérielles et le suivi despatients. Des interventions en deux ou trois tempsont pu être réalisées. Les reconstructions comple-xes, faute de réanimation sur place, ont été réali-sées en France avec un temps de séjour minimum(1 mois), les temps ultérieurs étant eux effectués àl’HNN de Niamey.À travers cette série, au vu des résultats obtenus

il est possible de dégager des principes et desstratégies opératoires qui pourraient servir de base

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pour l’établissement d’un consensus sur le traite-ment de cette maladie endémique, touchant sur-tout les enfants les plus démunis.

Références

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