56

Carnet de voyage Açores

Embed Size (px)

DESCRIPTION

Les 5ème3 vous emmènent aux Açores pour une promenade sensorielle...

Citation preview

Page 1: Carnet de voyage Açores
Page 2: Carnet de voyage Açores
Page 3: Carnet de voyage Açores

Les élèves de 5e3 ont procédé à la réalisation d’un carnet de voyage aux Açores.

A travers ce carnet, ils proposent au lecteur une promenade sensorielle dans ces îles. Cela recouvre tant des expériences culinaires que la description d’une promenade ou la découverte d’un port, d’un village, le portrait d’une personne rencontrée…

Bien sûr, les élèves jouent beaucoup sur l’imaginaire et les images générées par cette destination, inconnue pour grand nombre d’entre eux.

Page 4: Carnet de voyage Açores
Page 5: Carnet de voyage Açores
Page 6: Carnet de voyage Açores
Page 7: Carnet de voyage Açores

Jeudi 15 mai 1930

Et nous voilà prêts à partir ! Je vais devoir quitter ma famille et ma ville, Saint Malo. Il y a plusieurs mois que nous nous préparons pour cette odyssée. Une odyssée presque aussi fascinante que celle d´Ulysse.

Comme c’était dur de préparer ce voyage !!! Nettoyer le vieux bateau qui se nomme LE NEPTUNE ; mettre dans les caves l’eau, le vin, la nourriture... Quel travail fastidieux et long !!!

Mais aujourd´hui, tout est prêt ; nous allons enfin pouvoir quitter le quai et mettre le cap vers l'aventure. Il y a de l´agitation sur le port. Tout le monde bouge, se bouscule et s'interpelle ; même les mouettes semblent avoir compris que ce jour est très spécial pour nous et accélèrent leur ballet au-dessus de la ville et des quais.

Nous sommes impatients de partir vers les Açores et de découvrir cet archipel, ces îles dont les noms sonnent comme un appel vers l’inconnu et annoncent des paysages merveilleux : Faial, Corvo, Pico, Terceira, São Jorge, São Miguel, Santa Maria… mais aussi Graciosa et Flores dont les noms à eux seuls sont remplis de promesses… J’en oublierais presque que notre voyage a aussi des motivations professionnelles et que nous y allons pour travailler et poursuivre nos recherches scientifiques.

Ma femme a peur et me dit que cette traversée de St Malo aux Açores est trop risquée mais j’aime bien les défis et je ne laisserais ma place pour rien au monde. Au moment du départ, nous sommes tous nerveux et impatients à la fois.

J’entends les derniers appels que lancent nos familles depuis le quai. L’équipage retire les amarres et nous partons finalement.

Au revoir St Malo, bonjour les Açores !

Page 8: Carnet de voyage Açores
Page 9: Carnet de voyage Açores

Dimanche 25 mai 1930

Terre à l’horizon !

Après des semaines de voyage, nous arrivons enfin !Du pont du bateau, je vois le port. Un ponton en bois est relié à la passerelle où les marins s'affairent à leur travail. Les bateaux de pêche sont attachés au ponton par une grosse corde tressée. Ils sont petits et anciens. Je n’arrive pas à distinguer ce qu’il y a écrit sur les coques de bois car la peinture est défraîchie.

L’air est chaud et humide et l’atmosphère calme, paisible. Le doux chant de la mer me laisse...rêveuse. Je suis stupéfaite par ce paysage et cette terre inconnue qui semble garder de nombreux secrets à découvrir.

À l’horizon, des dauphins gris et blancs sautent et se donnent en spectacle pour notre arrivée. Ils émettent de petits bruits aigus qui me font rire. Ils sont magnifiques. Je rigole. Oh !, au loin, j’assiste aux merveilleux sauts des baleines. Dire que ces énormes mammifères parcourent des milliers de kilomètres !

Je me ressaisis. Enfin nous sommes arrivés au port de l’île Terceira, à la recherche de terres inconnues à découvrir. Le vent emporte la brise marine de tous les cotés de l’île. J’entends le chant des oiseaux, qui me berce. Emportés par la danse du vent, les cocotiers frémissent. Olivia et Julien vont partir en éclaireurs à la découverte de l’île.

Je suis heureuse avant même d’avoir mis un pied à terre.Je veux rester ici, à rêver éveillée...

Page 10: Carnet de voyage Açores
Page 11: Carnet de voyage Açores

Après un voyage extraordinaire en bateau, pendant lequel nous avons réussi à apercevoir au loin un groupe de cachalots, mais surtout à communiquer avec une bande de dauphins joueurs devenus nos accompagnons de voyage pour un temps, nous sommes finalement arrivés au port, le 25 mai 1930.

Tout juste débarqués, nous avons décidé d’aller faire un tour. Nous avions tellement envie d’explorer la nature, que nous nous sommes engagés à l’intérieur d’une forêt verdoyante, entrecoupées de ruisseaux.

Mes camarades et moi nous sommes alors perdus dans la campagne. Soudain, le ciel s’est couvert et le vent a commencé à souffler fortement. Une bourrasque si typique de ces îles s’annonçait. Il nous fallait rapidement trouver un abri. Nous avons vu alors, au loin, la fumée d’une maison et nous nous sommes dirigés vers elle.

Par chance, c’était une auberge et il était une heure de l’après-midi. La promenade nous avait ouvert l’appétit et nous en avons profité pour déjeuner. Cette auberge de campagne était simple mais accueillante. Les murs de la propriété étaient en basalte noir et la maison peinte en blanc avec des fenêtres de couleur bleue, encadrées aussi de basalte. La salle à manger était toute blanche, avec des tables rectangulaires en bois, rustiques, et des arcs entourés de bois qui la séparait du reste de l’auberge. Le plafond de la salle à manger était également en bois, avec des poutres apparentes d’où pendaient des tresses d’ail et d’oignons.

J’ai choisi la soupe du Espírito Santo que la cuisinière prépara lentement. Le fumet qu’elle exhalait était merveilleux et composé de diverses odeurs. Il y avait un mélange de sucré et de salé, de frais et de fort. L’odeur de la cannelle, sucrée, se diluait avec l’arôme de plusieurs viandes, du porc et du bœuf essentiellement, et la senteur fraîche de la menthe se mélangeait avec celle du sang coagulé du poulet. Les vapeurs de l’oignon, de l’ail et celle du piment me piquaient les yeux.

Une fois servi, j’ai dû laisser refroidir un peu la soupe. Tous les éléments étaient tendres, adoucis. La saveur était aussi exquise que l’odeur. L’oignon et la cannelle donnaient à la soupe un goût piquant mais en même temps, sucré ; le sang coagulé de poulet s’alliait à la saveur acidifiée par le vinaigre. J’ai mis un certain temps à m’habituer au piquant du piment, qui s’est atténué avec le pain de la soupe. La fraîcheur de la menthe rendait le plat plus digeste et moins fort.

J’ai dégusté un plat merveilleux, au goût inimitable mais complètement différent pour moi, inconnu ; un plat très spécial, fait avec amour et travail.Pour toutes ces raisons, je n’oublierai jamais le goût de ce plat.

Page 12: Carnet de voyage Açores
Page 13: Carnet de voyage Açores

Aujourd’hui, mardi 24 juin 1930, sur l’île de São Miguel, on fête la Saint-Jean.

C’est une fête très animée : il y a des spectacles musicaux et des expositions, mais le plus excitant est la ''tourada à corda''.

C’est très effrayant de voir la bête enragée devant nous, avec ses grandes cornes, mais heureusement, elle est contrôlée et attachée par de fortes cordes. Le taureau le plus furieux allait presque réussir à se libérer. J’ai un peu peur que cela arrive mais j'ai confiance en eux, des hommes grands, forts et compétents qui dominent l'animal féroce. Même avec la sensation de danger, c’est très amusant et la musique, donnant une ambiance festive, calme la peur de la foule.

De temps en temps, pourtant, la bête saute, de plus en plus enragée ! Ces soubresauts, cette tentative de fuite du taureau excite le public. Quand l'animal sursaute, des cris de peur envahissent nos oreilles mais, à la seconde suivante, un éclat de rire général apaise la tension. Nous rions car nous avons eu peur pour rien, mais quand l'événement se répète nous crions à nouveau. C'est comme un film de terreur : nous sommes effrayés de façon amusante, et c'est pour cela qu'il y a tant de monde. Je vois sur le visage des gens leurs sentiments, les sentiments les plus sincères du monde !

C’est cette ambiance que j’adore dans les fêtes de la Saint-Jean à São Miguel et qui les rend si spéciales et excitantes !

Page 14: Carnet de voyage Açores
Page 15: Carnet de voyage Açores

Mardi 24 juin 1930Lorsque le bateau accoste sur l’île de São Miguel, à Ponta

Delgada, je m’empresse de mettre pied à terre. Une fois passée le labyrinthe de marchandises, j’arrive sur le quai où règne une grande agitation. Une foule de personnes inconnues me bouscule et, dans la panique, manque de me faire tomber à l’eau, mais par miracle l’une d’elles me rattrapent. Puis ces gens m’entrainent sur un chemin parsemé de dalles. En chemin, l’un d’eux me résume la situation à venir d’une voix douce et onctueuse comme le miel.

Nous nous empressons vers une petite maison située sur une colline, pleine de fleurs odorantes et d’herbe fraîche. C’est alors que je me retrouve devant l’atelier de couture du village. Un homme bourru tape à la porte de l’atelier, ouvre la porte, me pousse à l’intérieur et referme la porte si brusquement qu’il en fait trembler les gonds. Je me retrouve dans une pièce où l’on sent les odeurs de la nature environnante. L’atmosphère cotonneuse me donne l’impression d’être dans les nuages. Au sol, je vois des tissus de toutes les couleurs connues en ce monde, comme si un arc-en-ciel avait déposé sa joie et ses couleurs pour montrer aux hommes que la beauté n’a pas plus de limites que l’imagination.

Une vieille femme s’approche de moi d’un pas léger, prend mes mesures et commence à tailler une tenue avec une habilité impressionnante. Tout en travaillant, la couturière me donne plus de détails sur l’événement du jour. C’est la fête de la Saint Jean et chacun doit porter à cette occasion le costume traditionnel de l’île.

Une demi-heure plus tard, la tenue est prête ! C’est un habit simple, constitué d’un foulard bleu à petits carreaux et d’une chemisette blanche comme la neige, avec des volants. La jupe, quand à elle, est d’un beau vert profond comme l’herbe ou comme les feuilles d’un chêne. Un tablier à losanges et à vaguelettes bleues est accroché sur la jupe.

Dès que j’enfile cette tenue, j’ai le sentiment de faire partie de l’île.

Page 16: Carnet de voyage Açores
Page 17: Carnet de voyage Açores

7 juillet 1930

Un beau matin, alors que j’étais dans un café, buvant un lait chocolaté, un vieux loup de mer s’est assis à côté de moi. Il a commencé à raconter une histoire extraordinaire, une histoire de chasse au cachalot. Des baleiniers chassaient sur un bateau sans aucune condition, ce qui rendait les femmes très inquiètes et quelques-unes allant à l'église pour y prier.

Le cachalot était énorme et tout le monde se sentait minuscule auprès de lui. Les baleiniers se battaient courageusement contre l'énorme cachalot. Tout à coup, l’animal fit un mouvement brusque et faillit renverser le bateau. A ce moment-là, la panique s'installa sur la plage. Mais ils se redressèrent et continuèrent le combat. Après quelques instants, ils réussirent enfin à enfoncer un harpon sur le dos du cachalot. Mais ceci ne cessa pas le combat et les femmes commencèrent à beaucoup s'inquiéter.

Après encore un grand effort, les baleiniers réussirent à enfoncer un deuxième harpon sur le dos du cachalot et peu de temps après, il mourut. Les hommes revinrent sur la plage très heureux et furent très bien reçus par les femmes qui purent enfin respirer.

Cette histoire est un des évènements qui m'a le plus impressionné du voyage.

Page 18: Carnet de voyage Açores
Page 19: Carnet de voyage Açores

Au petit matin du lundi 14 juillet 1930, j’allais vers le volcan de Pico pour faire une promenade.

J’étais très anxieux car j’avais peur de ne pas revenir de cette promenade au sommet de ce volcan. Je commençais à monter et je sentais déjà l'intense odeur de la lave qui me faisait penser à l’odeur du piment. Vite fatigué, je persévérais tout de même et continuais à monter quand, soudain, j’arrivais en haut du puissant volcan.

Un panorama extraordinaire s’offrait à mes yeux. Le volcan était splendide et de là-haut, je pouvais contempler et m’émerveiller devant toutes les beautés de l’île.

Le volcan, d'une couleur marron très foncé, s’accordait à celle du bois de cette île. J'écoutais le merveilleux chant des oiseaux majestueux et découvrais que ces oiseaux étaient également de cette même couleur marron très foncé.

Cependant, à chaque seconde qui passait, je sentais mon cœur se serrer de plus en plus car le volcan pouvait entrer en éruption à n’importe quel instant. L’odeur de la lave m’empêchant de respirer, je commençais à ressentir un certain malaise. La fumée qui entrait dans mon nez était peu agréable.

Après cette merveilleuse balade, je retournais vers le bateau. Je n’oublierai jamais cette promenade que j’ai beaucoup appréciée, ni cette île que j’ai adorée.

Page 20: Carnet de voyage Açores
Page 21: Carnet de voyage Açores

Je rentre par les lourdes portes de l'église, ses portes sont immenses. Tout de suite, j'aperçois la chaire du prêtre, elle est couverte de sculptures en bois, c'est simplement... magnifique.J'avance à travers les bancs simples, en un bois très clair, et je découvre les œuvres d'arts accrochées aux murs de l'église. Ces derniers sont hauts, blancs et décorés d'ornements et de peintures.

Après quelque temps d'observation, je contemple les beaux vitraux colorés d'un vert clair. Les vitraux se trouvent au plafond et sur les murs. Ils laissent entrer le soleil dans la salle, la chaire illuminée par le soleil devient verte.

L'atmosphère est emplie d'un air enfumé qui est dû aux bougies, allumées depuis de longues heures. Elles fondent lentement tout autour de l'église et forment des points colorés partout dans l'église. A cette odeur des bougies se mêle une autre fragrance qui me vient au nez, peut être celle des arbres qui sont sur la place à l’extérieur…. mais soudain je me rappelle ! Il s’agit plutôt des fleurs qu'une pauvre vieille dame vendait dans le jardin derrière.

Entraîné à nouveau vers l’extérieur par ce souvenir, je quitte l’église et cette atmosphère irréelle.

Page 22: Carnet de voyage Açores
Page 23: Carnet de voyage Açores

Le 26 Juillet 1930

Nous sommes arrivés en vue de l’île de São Miguel, à Ponta Delgada, le 26 Juillet 1930. Il règne dans la ville une ambiance très festive ; sur la place centrale, toute décorée et lumineuse, les gens dansent, d’autres jouent des instruments comme de la guitare, du tambour et d’autres instruments que je n’avais jamais vus. Cette population sympathique, nous prend par les bras et nous oblige à danser.

Après une nuit plus calme, mon équipe et moi, nous sommes allés rechercher l’aventure dans cette île surprenante. Nous avons marché pendant des heures et des heures, puis nous sommes arrivés près d’une grande forêt, elle était protégée par de grands arbres de plusieurs espèces. Nous avons pu voir des oiseaux, des papillons et des sangliers. Soudain, j’ai aperçu de la fumée ; mon équipe, après l’avoir vue, est entré en panique en courant dans tous les sens et en criant: “Au feu! Au feu!”. Pendant ce temps, je tentais de découvrir d’où provenait cette mystérieuse fumée. Nous avons continué dans sa direction et finalement nous avons aperçu les bords du cratère d’un volcan endormi. La fumée venait de ce volcan et un sentiment de peur me traversa le corps. Après l’escalade, je me suis mis à genoux, j’ai penché ma tête et j’ai vu un petit village situé dans le cratère du volcan ; j’ai aperçu encore une fois la fumée qui sortait de la cheminée d’une petite maison, et soulagé, je me suis approché de cette maison. Une odeur délicieuse a traversé mes narines. Cette odeur ressemblait à des fraises couvertes de miel. Mon corps semblait avancer tout seul, de manière automatique vers la petite maison.

La maison était constituée d’un toit rouge, de petits escaliers blancs et une cage avec un oiseau enfermé dedans, qui semblait triste car il ne pouvait s’envoler vers les grands espaces. Cet oiseau avait une gorge rouge et le reste de ses plumes étaient bleu-foncé. Le vent s’est mis à souffler fort et, nous avons toqué à la porte pour demander l’hospitalité. Une belle jeune femme aux longs cheveux roux nous a reçus et a donné à chacun de nous un pain, du fromage de chèvre et du jambon. Le lieu si paisible et les saveurs très simples et fortes à la fois m’ont emporté très loin et j’ai eu l’impression de retourner dans mon enfance, en mangeant le fromage piquant et le jambon dans le pain tout blanc comme les nuages.

Nous avons pris le chemin du retour. Sans m’en apercevoir, car plongé dans mes souvenirs d’enfance, nous sommes arrivés au port où nous attendait le bateau pour poursuivre notre voyage.

Page 24: Carnet de voyage Açores
Page 25: Carnet de voyage Açores

La nuit du 30 juillet 1930, je me suis perdue ; j’étais avec mes compagnons quand je les ai perdus de vue. J’étais toute seule dans la rue, il faisait noir ; il y avait beaucoup de vent, j’entendais les feuilles des arbres bouger et j’avais un peu peur.

A ce moment-là, j’aperçus une vieille dame qui se promenait avec des paniers en paille contenant sûrement de la nourriture. Je lui ai demandé si elle voulait de l’aide pour porter ses provisions, et également, si elle connaissait le chemin pour rentrer à l'hôtel. Mais il était déjà tard pour rentrer toute seule et l'hôtel était encore loin d’après elle. Alors, tout naturellement, elle a proposé de m’héberger chez elle pour cette nuit.

Elle m’a donc emmenée chez elle, dans une petite maison aux volets rouges. Quand nous sommes arrivées, j’ai tout de suite été attirée par les tableaux accrochés aux murs, toutes de belles aquarelles représentant l’île. La maison était très agréable, mais ce qui me touchait le plus, c’était l’odeur de menthe qui embaumait l’air.

La vieille dame a déposé ses paniers sur la table et m’a proposé un thé vert. Pendant que le thé infusait, elle m’a demandé comment je m’étais perdue et je lui ai expliqué mon aventure depuis mon arrivée.

Quand nous nous sommes aperçues de l’heure, il était tard, et comme nous avions faim, elle m’a proposé de faire des petits gâteaux, des “Biscoitos de Orelha”, une spécialité des Açores. Tout en poursuivant ma conversation avec la vieille dame, nous voyions la pâte dorer lentement dans le four et une douce odeur envahir la pièce. Les biscuits étaient prêts ! Je me suis régalée, c’était délicieux, une fine saveur exotique... Finalement, fatiguées, nous sommes allées nous coucher.

Le lendemain, je me suis réveillée la première et j’ai préparé le petit-déjeuner. Quand la dame s’est réveillée, elle est allée me retrouver dans la cuisine. Nous avons dégusté le petit-déjeuner et avant de nous quitter, la vieille dame m’a proposé d’aller nous promener pour me faire découvrir SON île.

Quand nous étions en train de nous promener, mes compagnons de voyage passaient par là. J’étais contente de les retrouver mais triste de quitter la vieille dame. Elle m’a dit que l’on se reverrait peut-être avant la fin de notre séjour. Je l’espérais aussi...

Page 26: Carnet de voyage Açores
Page 27: Carnet de voyage Açores

Lagoa Azul, le lac de faible altitude situé dans la «caldeira», le cratère du volcan des Sete Cidades, est un lieu paradisiaque, un des plus beaux au monde. Cette cuvette est recouverte de vagues d’hortensias bleus découpant les champs, de taillis dense, de fougères d’un éclatant vert émeraude recouvrant ses versants jusqu’à la mer. L’odeur des hêtres et des châtaigniers se mélange avec celle d’une forêt de lauriers tin, exhibant une douce et délicieuse senteur qui nous envoûte.

Avec son étendue infinie d’arbres comme l’émeraude, de buissons d’un vert éclatant et ces plantes aussi luxuriantes, je ne pouvais m’empêcher de contempler ce panorama. Je marchais, entouré de ce paysage euphorique, insistant et lourd, en sentant la frêle brise du vent chaud caresser mon visage. Lorsque je voyais mon reflet dans ce lac bleu azuré, enivrant, certains de mes souvenirs d'enfance remontaient en moi. En écoutant attentivement, je pouvais entendre le doux clapotis de l'eau finissant sa course sur la berge.

Je décidais alors d’aller voir les majestueux volcans. Tout en marchant, j'aperçus des cratères, des fournaises, toutes ces falaises, ces ravins, ces grottes, ces cheminées et ces lagunes, encadrés par le bleu profond de la mer, offrant un calme absolu uniquement troublé par les vagues s’écrasant sur le rivage. Soudain, une pluie diluvienne s’abattit sur ma tête me sortant de ma rêverie. Je courus m’abriter dans une caverne où j'eus le souffle coupé en voyant tous ces oiseaux nichant dans les cavités sombres et humides de la grotte. Malheureusement, je dus vite les quitter car il se faisait tard et la pluie avait cessé. Je rentrais donc chez moi, apercevant pour la dernière fois, les majestueux et cruels volcans qui se dressaient de toute leur hauteur au-dessus de ma tête, créant des endroits de pénombres sur l'île.

Ma balade au pays des rêves était terminée.

Page 28: Carnet de voyage Açores
Page 29: Carnet de voyage Açores

Après cette longue promenade, c’est déjà la fin de la journée. Il commence à pleuvoir. Une vieille dame, sûrement veuve m’aperçoit au loin. Elle porte des habits d’un noir profond. Elle m’invite à la suivre. Sa maisonnette était toute petite mais chaleureuse et très accueillante. La veuve se dénomme Maria do Céu. Elle me dit qu’elle était souvent seule et que ma visite lui réchauffait le cœur. Elle me demande si j’ai faim et je lui réponds que oui. La bonne femme me dit qu’elle connaît une ancienne recette de son arrière-grand-mère, une recette traditionnelle de l’île de Pico. Ce sont de petites galettes à base de farine, beurre et sucre, les ROSQUILHAS.

J’observe Maria do Céu qui, dans sa cuisine humide, faite en pierres, commence à faire une pâte mélangeant le beurre avec les œufs qu’elle venait d’aller chercher au poulailler. Elle pétrit la pâte qui a l’air si bonne et si légère. La farine que Maria do Céu a fait moudre au moulin est blanche comme la neige, le zeste de citron, d’un beau et grand citron, est luisant comme le soleil et le sucre, doux, est raffiné comme la calligraphie arabo-musulmane. Elle met tous ces ingrédients dans la pâte composée d’œufs et elle mélange tous ces ingrédients dans une vieille bassine usée par le temps. Après avoir pétrit la pâte, des odeurs sucrées s’éparpillent dans la cuisine. La vieille dame me demande de l’aide pour faire des formes avec cette pâte onctueuse comme le miel. Ses vieilles mains ridées et usées prennent la pâte et, délicatement, la forme d’une couronne apparaît. Elle me demande de faire de même et avec son aide, des formes couronnées envahissent la table.

Page 30: Carnet de voyage Açores
Page 31: Carnet de voyage Açores

Je me promenais dans Santa Maria au bord d’une plage de sable noir. Le vent glacé soufflait dans les rues proches de moi et le ciel, rempli de nuages, était gris. En fin d’après-midi, je n’avais pas encore mangé et je pouvais sentir mon estomac gargouiller. J’étais désespéré à l’idée de trouver un restaurant qui voudrait bien me servir à cette heure tardive et qui aurait de quoi me remplir l’estomac et me réchauffer.

Après une longue marche, enfin, au coin d’une rue, je trouvais une petite auberge ! Sa façade en pierre de taille et sa toiture en tuiles couleur feu donnaient à la maison un aspect chaleureux.

À l’entrée attendait un homme habillé en costume de serveur ; il paraissait assez vieux. Un moment après, enfin installé à une table, le même homme est venu prendre ma commande. Comme je ne comprenais rien au menu, je pris le plat du jour : «Coelho de molho».

Le serveur m’apporta le plat encore fumant. Au premier regard ce plat n’était pas très appétissant, mais la viande était si tendre et savoureuse que je pouvais la couper à la petite cuillère. La chair s’était imprégnée de l’odeur des légumes et le mélange de ses saveurs formait un ensemble parfait.

Page 32: Carnet de voyage Açores
Page 33: Carnet de voyage Açores

Le 2 août 1930

La mer est bleue, claire, magnifique et les reflets du soleil la caressent. Le paysage est vert. Vert de brins d’herbe, de trèfles et de bourgeons. Ce sont les Açores. Sous le ciel bleu, des dauphins sautent au dessus de l’eau et retombent dans cette mer douce et chaude.

Nous continuons le voyage dans notre bateau. Notre navire fend la mer ; elle s’ouvre et nous laisse un passage, un chemin. Les dauphins viennent à notre rencontre, passent devant le navire, nous montrent le chemin et nous emmènent dans un endroit magnifique, un coin ressemblant au Paradis. Il y a des baleines qui sautent et qui projettent de l’eau, comme des fontaines sur la mer. Au large, les dauphins, contents, nous suivent toujours et nous mettent de bonne humeur. Au milieu de l’océan, il n’y a personne, pas un bateau à l’horizon. Seulement des baleines et des dauphins. Nous continuons notre voyage sur cette mer azur. Une baleine saute si haut que tout son corps sort de l’eau. Quand elle replonge, elle nous asperge entièrement !

Enfin nous arrivons à l’endroit recherché et nous sommes stupéfaits par la beauté de ce lieu ! Une espèce de crique où, bizarrement, il y a beaucoup de dauphins, plus beaux que ceux qui nous avaient conduits jusqu’ici.Nous terminons notre voyage en regardant ce paysage magnifique d’où sort cette terre des Açores et qui nous montre les fleurs sauvages les plus belles, les arbres les plus imposants et l’herbe la plus verte et resplendissante.

Un mot pour décrire ce paysage : magnifique. Il restera dans notre mémoire jusqu’à ce que nous revenions ici, dans cet endroit secret.

Page 34: Carnet de voyage Açores
Page 35: Carnet de voyage Açores

Quand j’arrive aux abords de l’île, des nuages me bouchent la vue. Je pense à tout ce que je vais voir de magnifique, peut-être y a-t-il des lacs aux couleurs vives, des forêts sombres comme la nuit, de hautes falaises ou peut-être de belles espèces d’oiseaux à découvrir.

Enfin les nuages se dégagent très vite. Maintenant, je peux voir de hautes falaises rocheuses comme si un manteau de pierre les revêtait. L’eau creuse dans la roche d’une façon brutale, comme deux armées en pleine bataille. On peut entendre le bruit de l’eau ruisselant comme un clapotis dans les ruisseaux d’une montagne, autour du bateau. La mer est très agitée, le bateau bouge dans tous les sens. Elle est tellement agitée qu’on a l’impression qu’une vague se prépare à nous balayer jusqu’à la plage. Maintenant, après des jours d’attente, la mer se calme et peu à peu nous pouvons voir le port.

Autour du port, des petites maisons toutes identiques ont des fenêtres bleues et l'humidité qui monte donne encore plus de charme à ces petites merveilles. Dans ce port, il y a même une église très simple avec peu d'ouvertures et peu de décorations mais elle est plus belle qu'aucune autre.

Page 36: Carnet de voyage Açores
Page 37: Carnet de voyage Açores

Dimanche 3 août 1930

Nous marchons à côté de petites maisons peintes avec des couleurs claires et gaies, comme le bleu et l’orange. Les toits sont faits à partir de paille et de boue, la fumée qui sort par les cheminées est noire mais elle diffuse des odeurs de plats délicieux et appétissants.

Les personnes qui sont dans la rue papotent et se racontent leur journée, d’autres travaillent, vêtues d’un tablier et installant sur les présentoirs des marchandises. Je découvre des aliments que je ne connais pas encore, qui s’étalent sur des tables déjà un peu vermoulues à cause du temps qui passe.

Il se dégage de cette île une atmosphère étrange et la promenade au travers des rues semble nous entrainer, à travers la danse et la musique, dans un autre univers.

Le sol est fait de pierres carrées et rondes, noires et blanches ; elles forment un dessin géométrique. Elles sont couvertes de mousse et semblent former un tapis très doux sur le sol.

Soudain, au milieu de cette agitation qui nous entoure, il se fait un silence et nous écoutons les mouettes qui crient et qui poursuivent les bateaux à la même vitesse. Les mouettes volent contre le vent, leurs plumes sont à la dérive dans l’air, c’est magnifique. Les vagues brusques explosent sur les roches couvertes de coquillages.

Cette symphonie nous attire vers la plage.

Page 38: Carnet de voyage Açores
Page 39: Carnet de voyage Açores

Aujourd’hui, lundi 4 août 1930, nous avons décidé de découvrir les volcans des Açores. Quand nous avons commencé l’ascension du volcan, nous nous sommes vite fatigués. Nous avons pensé à revenir à la petite ville qui se situe à son pied, mais après réflexion, nous avons pensé que, là-haut, la vue devait être magnifique.

Arrivés au sommet, le mariage de la pierre et du magma créait une odeur unique, incomparable, que l’on ne pouvait sentir qu’à l’endroit où nous nous trouvions.

J’ai alors imaginé la terrible chaleur de l’eau en ébullition. C’est un étrange sentiment de penser que la roche sur laquelle nous sommes en train de marcher était auparavant du magma bouillant issu du centre de la terre. Nous avons peur car, à chaque pas que nous faisons, le volcan monstrueux peut entrer en éruption.

Autour de nous, le paysage est gris et obscur ; les bateaux qui naviguent sur l’Atlantique se voient depuis le sommet du volcan. Le soleil brillant se reflète sur la mer et la sensation étrange, mais unique, d’être plus haut que les nuages gris, me remplit le cœur.

Au cours de la descente vers la petite ville, j’ai pensé qu’aujourd’hui, j’ai vécu une des plus belles expériences de ma vie.

Page 40: Carnet de voyage Açores
Page 41: Carnet de voyage Açores

16 Août 1930Aujourd’hui, nous avons décidé d’aller nous promener

sur le mont du Pico. Arrivés au port, nous sommes descendus de notre navire. Puis, nous nous sommes arrêtés pour admirer le paysage ; les habitants allaient au marché, ils avaient l’air heureux et agités ; les hortensias roses bordaient les longs chemins, une odeur marine se répandait dans l’air. À ce moment là, un vieil home s’est dirigé vers nous. Il avait l’air content et accueillant, il nous a parlé en portugais, il a bien vu que nous n’avions rien compris alors, il a pointé du doigt le grand mont qui s’élevait derrière lui, c’était le Pico.

Pendant la montée, il nous montrait les beautés du paysage qu’il connaissait comme la paume de sa main. Il avait l’air fier d’être notre guide et de nous faire découvrir sa région. Nous le suivions un par un car les petits chemins étaient étroits et humides. Les oiseaux gazouillaient et une petite brise glacée venait frôler notre peau. Plus nous montions, moins nous entendions les vagues qui claquaient sur les falaises dorées.

Nous nous sommes arrêtés car nous étions fatigués de la promenade. Il y avait des falaises verticales, au loin, qui séparaient des lacs profonds. Nous pouvions admirer toute l’île, quelques forêts denses, des petites maisons qui s’emboitaient comme si c’était un jeu de puzzle.

En fin d’après-midi, il était temps de rentrer. Le vieil homme commençait à prendre le chemin du retour qui nous a paru plus long. Arrivés, nous avons remercié chaleureusement le vieil homme qui nous avait tant aidés. Il est reparti chez lui.

Il commençait à faire nuit ; nous sommes montés sur notre bateau qui se balançait sur la mer. Il faisait frais ; nous nous sommes tous enfoncés sous les couvertures et nous nous sommes endormis, fatigués mais ravis par cette magnifique balade.

Page 42: Carnet de voyage Açores
Page 43: Carnet de voyage Açores

En arrivant à la plage, le ciel bleu azur nous accueillait sur cette île majestueuse ; les nuages ressemblaient à de la laine et le soleil, couleur or, me faisait penser au jaune d'œuf que je venais de manger ce matin même. Le temps passait très vite, il était déjà midi et le ciel changeait déjà de couleur, il devenait de plus en plus sombre. Nous décidons d'aller à la ville car les nuages gris s'approchaient de nous rapidement. Nous étions en train de chercher un abri confortable pour manger et en même temps goûter les spécialités des Acores. Ah! Enfin nous apercevons au bout de la rue un petit restaurant charmant à l’atmosphère chaleureuse. Son odeur chaude et réconfortante nous accueille et nous invite à manger.

Nous arrivons à voir les cuisiniers, qui semblaient danser. Quand les serveurs apportent la nourriture, la présentation est magnifique. À la sortie du restaurant, le soleil brille de nouveau, c’est un miracle. Il semble que la nourriture était magique, qu'elle a transformé le ciel gris en un ciel féerique et plein de couleur.

Page 44: Carnet de voyage Açores
Page 45: Carnet de voyage Açores

Aujourd’hui, au cours de mon escapade, je me suis perdu mais heureusement une paysanne originaire de l’endroit m’a gentiment accueilli. Elle était assez âgée, avec un foulard sur la tête noué vers la nuque. Cette vachère avait une longue robe noire avec des petits dessins cousus dessus. Elle portait une chemise blanche. Elle utilisait de gros sabots en bois avec de grosses chaussettes noires. Elle revenait des pâturages et portait une grosse botte de foin sur la tête.

Cette dame sentait les vaches et le fromage. Cette odeur venait sûrement de ses vaches dont elle devait s’occuper tous les jours, les traire chaque matin. Arrivant à sa ferme, cette dame m’a proposé d’entrer.

Pour ne pas l’appeler toujours « senhora », je lui demande son nom. Elle s’appelle Amélia. Alors, je demande à Amélia de m’expliquer comment elle fait son fromage.

Elle m’explique tout d’abord que, pour que le lait soit bon, il faut sortir tous les jours les vaches, les emmener paître et brouter l’herbe tendre et fraîche qui couvre les prairies que nous venons de traverser. Je comprends au ton tranquille et chantant de sa voix que cette femme aime son travail ; le soin qu’elle apporte aux bêtes qu’elle est en train de traire, de grandes et fortes vaches comme le paysage volcanique des Açores où elles vivent, en est le témoin. Elles sont en train de manger de l’herbe fraîche d’un côté et du foin de l’autre côté de l’étable. Il règne dans l’étable une odeur chaude et douce à la fois. Nous entendons le bruit discret mais régulier du jet de lait qui gicle dans le seau.

Lorsqu’elle a fini de faire le tour de ses vaches, nous pouvons débuter la fabrication du fromage me dit Amélia. Alors lentement, nous mélangeons le lait avec un ferment, puis nous le laissons reposer. Au bout de deux heures de ce travail épuisant nous obtenons une pâte moelleuse et somptueuse !

Amélia me la fait goûter. En ouvrant le récipient contenant la pâte, une onde d’odeur s’est élancée vers mes narines. Elle est à la fois forte, mais en même temps si douce… Je goûte, je savoure… Je murmure « mmh ! C’est bon ! » tellement j’aime ce goût. Mais Amélia me dit que ce n’est rien comparé au goût du fromage une fois fini. Il faut la mettre à reposer pendant deux jours.

Alors Amélia m’emmène dans une autre salle où je vois des piles de fromages ayant un parfum fort… Amélia prend un gros couteau au manche en bois et lame d’acier, l’enfonce doucement dans le fromage légèrement mou et m’en coupe une part triangulaire qui laisse apparaître au cœur une pâte épaisse et onctueuse. Elle m’offre ce morceau et me dit : « c’est moi qui l’ai fait, il s’appelle Ilha ! », île en portugais. Je le porte à ma bouche et le pose sur ma langue où il fond doucement et libère sa saveur. Sa saveur est forte et prononcée. En mâchant lentement, je reconnais le caractère atypique de ce fromage : un véritable fromage des Açores !

Après ce moment rempli d’arômes et de couleurs, je quitte Amélia sans oublier d’emporter une dizaine de ses fromages.

Page 46: Carnet de voyage Açores
Page 47: Carnet de voyage Açores

Ce matin, comme il faisait beau, nous sommes partis en promenade pour aller voir les baleines. Toute l’équipe a manifesté une excitation particulière, un énorme sourire s’est installé sur nos visages et une énergie positive s’est élevée en nous. A la plage, tout le monde courait et faisait crisser le sable sous ses pieds. Un bateau s’est présenté devant nous tel un ange pour nous guider jusqu’au paradis, dans ce cas précis, jusqu’à notre rêve : rencontrer ces fabuleux animaux marins, les baleines.

Le bateau a démarré, le bruit de l’hélice du bateau nous a rempli les oreilles. Un peu plus tard nous avons eu le plaisir d’apercevoir la baigneuse tant espérée. Je la fixais avec admiration et emplie de bonheur. Elle était majestueuse et gracieuse à la fois. En même temps, des tas de questions se bousculaient dans ma tête comme : « la vie d’une baleine est-elle facile à vivre ? ». Un peu plus tard, je pense avoir trouvé la réponse : Non, car à tout moment elle peut être attaquée et beaucoup de fois en périr.

Je regardais la baleine qui partait et je me suis demandé la cause de cette fuite. Je pense bien quelle a dû avoir peur de nous en nous prenant pour des pêcheurs. Si c’est pour cette raison, je la comprends puisque nous, les hommes, nous lui enlevons ce quelle a de plus précieux, sa liberté et sa vie.

Au moment où nous sommes retournés a la plage, je me suis dit que cette promenade, non seulement, avait réalisé mon rêve mais aussi m’avait fait découvrir un monde merveilleux, le monde des baleines.

Page 48: Carnet de voyage Açores
Page 49: Carnet de voyage Açores

Le 23 août 1930.

Je me suis installée sur le sable fin et doux. Nous sommes en août, il fait chaud et je lis mon petit livre sur les Açores pour m’aider à me situer sur l'île. Ce sable dont j’ai déjà parlé chatouille la pointe des doigts de mes pieds.

Un sentiment de liberté très fort me pénètre. Un sentiment différent de tous les autres sentiments que j’ai déjà ressentis dans ma vie. Tous les jours, depuis ma naissance, je me réveille avec le bruit de la ville et j’ai un horaire à respecter. Et maintenant que je suis à la plage, aux Açores, je sens l’air chaud et salé qui me frappe le visage. C’est un air différent, un air que je n'avais jamais inspiré. C’est l'air pur.

Les enfants jouent dans le sable du matin au soir et rient avec joie parce qu'ils se connaissent tous les uns les autres. La plage sent bon. Cela sent la mer. C’est une odeur très légère et agréable. J’arrive à sentir le sel. Et l’air qui me frappe le visage est doux. C’est une brise qui caresse. Ce n’est pas le type de vent qui nous décoiffe mais celui qui nous coiffe.

J’ai vu un enfant faire une cabriole sur le sable donc je me suis mise à la faire aussi. Cela ne s’est pas aussi bien passé que je l’espérais... Et à la fin, je me suis retrouvée le nez dans le sable et j’en ai mangé un peu. C’était crissant et n’était pas savoureux du tout. Les enfants se sont moqués de moi et j’ai ri avec eux.

Page 50: Carnet de voyage Açores
Page 51: Carnet de voyage Açores

Le soleil chaud, qui jusqu’à présent nous illuminait, disparaît ; une nuit sombre prend sa place. Dans le noir profond de la nuit, une lumière éclairait le chemin comme autrefois le soleil l'avait fait. Encouragé par cette lumière, je me dirige vers elle et je me rends compte que c'est la lumière d'une maison. Je me rapproche encore plus et j’aperçois un homme, l’air triste comme s’il n’avait jamais rencontré le bonheur, un peu courbé et le visage fatigué.

Il m’accueille dans sa maison simple et chaleureuse, les murs étaient construits de bois, ce qui donnait à cette maison un aspect rustique. Avec une énergie pleine de joie, il prend plusieurs ingrédients tels que le sucre et le lait, qui dégagent des aromes différents, et se met à cuisiner. Une rare nuance subtile et mystérieuse prend place. Pendant ce temps, la nuit se rapproche de son point le plus sombre. Je commence à parler avec l'homme, il me raconte qu'il est ermite, qu'il vit tout seul dans cette maison, et que j'étais la première personne qu'il accueillait depuis qu'il était venu ici, aux Açores.

Maintenant, l'odeur prend de nouveaux airs, la timidité devient orgueil, elle me fait sentir fier. L'ermite me dit que ce qu'il cuisine est un flan traditionnel des Açores, le “pudim do copo”. L'odeur de ce flan sent le caramel, grâce au sucre, mais il sent aussi le lait chaud, des souvenirs de mon enfance me parviennent. Quand le flan est prêt, je prends un bout et je le goûte. Au début le goût est simple, mais après, une image se forme, l'esprit s'altère avec cette sensation, l’originalité et la pureté renforcent les souvenirs de mon enfance : ma mère me berçant avec beaucoup de tendresse.

Page 52: Carnet de voyage Açores
Page 53: Carnet de voyage Açores

Je suis sur le quai d’Angra do Heroismo à Terceira, un peu perdue. Où aller ? Mon regard est attiré par une vieille dame qui passe par là, donc je m’approche d’elle et je lui demande le chemin jusqu’à la Fromagerie São Miguel, dont j’ai entendu parler lors de notre dernière escale. En articulant et à l'aide de gestes, elle m’explique le chemin.

Mes yeux rencontrent son regard, triste, de la souffrance ou peut-être de l’amour ? Je vois ça dans ses yeux noirs comme le charbon. Elle est habillée légèrement d'une robe grise avec un peu de dentelle blanche au bout des manches. Il se met à pleuvoir des cordes, alors la dame avec un grand sourire aux lèvres me propose d’aller m’abriter chez elle.

Je rentre par une petite porte et sens immédiatement l’odeur puissante de lavande. Les meubles sont en bois. Le couloir qui donne accès à la chambre est sombre, en terre battue tout simplement. La chambre dans laquelle cette dame m’installe, est très petite, humide ; j’en ai de la peine et je me sens oppressée. Le lit est juste constitué d’une planche de bois recouverte de paille sèche. Attirée par une odeur salée raffinée, je m'approche de la cuisine qui est embaumée d’effluves délicieux.

J’observe la vieille dame qui cuisine et je vois de la passion. Quand l’heure du dîner arrive, je me déplace vers la table, je m’assois et j’observe les assiettes de porcelaine peintes avec délicatesse, les couverts épais ornés de fleurs forgées avec précision. Le potage sent très bon, je me régale juste avec du pain et une soupe chaude aux légumes. Quand il se fait tard, je la remercie pour le repas et je m’éclipse dans la chambre qui me parait plus étroite et je m’endors dans cette ambiance chaleureuse...

Page 54: Carnet de voyage Açores
Page 55: Carnet de voyage Açores

La grande cloche en bronze forgé se balance et son tintement annonce le commencement de la messe du dimanche. Une foule de gens se précipite vers les grands escaliers en pierre d’ardoise de l’entrée principale de l’église et nous sommes entraînés par elle. Nous apercevons la modeste église sur la place de la ville. Recouverte de mousse, la croix en pierre est perchée au sommet de l’église. Cette croix, symbole de la croyance chrétienne et de la puissance du ciel, me donne l’impression d’être perdue au milieu d’un vaste océan de foi et d’espoir. Les ornements et les piliers taillés avec minutie sur la pierre ancienne et sombre contrastent avec la façade extérieure de l’église peinte d’un blanc qui reflète la lumière du soleil et qui m’éblouit.

Nous entrons par l’énorme porte en bois. Au contact de nos pieds, les planches en bois du sol de l’église grincent et tous les regards se tournent vers nous. Nous nous asseyons aux derniers rangs. Toute l’église est silencieuse, personne ne parle, tous écoutent attentivement la voix monotone du prêtre.Seule une femme habillée en noir ne l’écoute pas, elle pleure la mort de son mari qui n’était pas revenu de la pêche.

Je lève les yeux et j’observe les fresques peintes au plafond. Les couleurs qui dominent cette peinture détaillée sont le bleu, couleur du ciel et le doré, couleur de la richesse. Au centre, j’aperçois le Christ, entouré d’anges et de fidèles qui représentent les cinq continents. Les vitraux formés par de petites vitres colorées de formes géométriques brillent avec la lumière du soleil et illuminent la pénombre où se trouve l’église de Santa Catarina. Les murs de l’église sont embellis, décorés par de petites statuettes en pierre grise qui illustrent des épisodes de la Bible. Derrière le prêtre, la statue de Jésus, assis sur les genoux de Marie, nous observe.

Le prêtre est habillé avec une tunique d’un blanc simple et clair. Pour contraster avec la simplicité du blanc, la tunique est ornée de fins fils en or qui donnent au prête un air plus solennel. Je l’observe attentivement, son visage transmet du calme mais en même temps de la sympathie. Il me rappelle mon grand-père, ses yeux bleus, ses cheveux gris. Des souvenirs d’enfance me reviennent à l’esprit. Les promenades au bord de la mer, les paroles qu’il disait avec un air si sérieux mais qui me faisaient toujours rire. Tous ces moments m’envahissent et je ne me sens plus une étrangère, je me sens chez moi, au chaud, réconfortée.

J’entends de la musique ; deux jeunes filles chantent accompagnées par des accords de guitare joués par un autre garçon. C’est la musique des adieux, la messe est finie, les gens s’embrassent et partent chez eux. Je reste, je ne veux pas quitter cette ambiance. Mes compagnons m’appellent, je ne les écoute pas. Pendant un long moment, je reste immobile et assise. Puis, je me lève et je sors de l’église. La lumière du soleil m’éblouit.

Page 56: Carnet de voyage Açores