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Ce document est une traduction vers le français du Chapitre 9 de l’ouvrage publié en 2015 par la FAO intitulé
Climate Change and Food Systems:Global assessments and implications for food security and trade
Editeur : Aziz Elbehri
Évaluation de la production mondiale de bananes et de
son adaptabilité aux scénarios du changement
climatique
Principaux messages du chapitre.............................................................................................. 2
1. Introduction ....................................................................................................................... 3
2. Zones climatiques adaptées à la production bananière .................................................. 5
3. Impacts du changement climatique jusqu'à 2070 dans les zones où ce changement
est propice au bananier.......................................................................................................... 7
4. Projections du changement climatique pour 24 sites bananiers en Amérique latine,
Afrique et Asie ...................................................................................................................... 14
5. Évolution de la productivité potentielle pour 24 sites clefs de la culture bananière en
Amérique latine, Afrique et Asie pour 2030, 2050 et 2070.................................................. 21
5.1 Évaluation des GDD et TDU du bananier ........................................................................ 21
5.2 Évaluation du déficit en eau pour le bananier ................................................................. 22
5.3 Résultat des calculs des GDD et TDU et du déficit en eau du bananier ......................... 22
6. Évolution des maladies foliaires pour six sites clef de culture bananière
en Amérique latine, Afrique et Asie pour 2030, 2050 et 2070 ............................................ 28
7. Fluctuations aux marges - Superficies potentielles perdues et gagnées pour la
production bananière en 2030, 2050 et 2070 ...................................................................... 32
8. Les implications du changement climatique pour la production bananière mondiale... 35
Références ........................................................................................................................... 37
Citation: Calberto, G., C. Staver & P. Siles. 2015. Évaluation de la production mondiale de bananes et de son adaptabilité
aux scénarios du changement climatique. In: Climate change and food systems: global assessments and implications for
food security and trade. Aziz Elbehri (editor). Organisation des Nations unies pour l’agriculture et l’alimentation (FAO),
Rome, Italie.
Évaluation de la production mondiale de bananes et de
son adaptabilité aux scénarios du changement
climatique
Germán Calberto1, Charles Staver2, Pablo Siles3
1Bioversity International, Cali, Colombie; 2Bioversity International, Montpellier, France; 3Bioversity International, Turrialba, Costa Rica (actuellement CIAT, Managua, Nicaragua).
• Même avec une augmentation de température de 3°C d’ici à 2070, les conditions de la
production bananière dans le monde continueront à être très favorables. L'augmentation
des températures annuelles rendront les conditions de production plus propices dans les
régions subtropicales et dans les zones montagneuses des tropiques. Pour 2070, la surface
cultivable propice aux bananiers augmentera de 50%.
• Les cycles de production, de la plantation à la récolte, seront plus courts du fait de
l’accélération du taux d'émission des feuilles ; la demande en eau augmentera de 12 à 15%.
En 2050, certaines zones dont les températures saisonnières sont supérieures à 30°C seront
perdues pour la production bananière.
• Des groupes spécifiques de cultivars tels que les bananiers d’altitude d’Afrique de l’Est
méritent des études approfondies. Compte-tenu de leur capacité spéciale d'adaptation aux
conditions de montagnes tropicales, la superficie cultivée avec ces bananiers pourrait être
étendue à des altitudes plus élevées. La montée de la température dans des zones moins
élevées rendra nécessaire le remplacement de cultivars.
• Bien que l'augmentation des températures ne soient pas défavorables aux bananiers, elle
peut l’être pour les cultures annuelles et vivaces cultivées avec les bananiers. Dans les
fermes où l’on cultive le café avec le bananier comme culture secondaire, les bananiers
peuvent disparaître si la culture du café est abandonnée en raison du changement
climatique.
• Des analyses plus poussées sont nécessaires pour quantifier l'effet des événements
climatiques extrêmes sur la productivité et la gestion des bananiers. De même, nous devons
faire des analyses plus approfondies pour mieux comprendre l'impact du changement
climatique sur la dynamique des ravageurs et des maladies des bananiers et d'autres
cultures tropicales.
Traduction française : Patricia Horry
Les bananiers et les bananiers plantain figurent parmi les dix premières espèces cultivées
dans le monde, se classant derrière le maïs, le riz, le blé, le manioc et la pomme de terre
mais devant le sorgho, le millet et la patate douce. Le groupe des bananiers et bananiers
plantain, à la différence de beaucoup d'autres de ces dix espèces, est composé de divers
groupes de cultivars ayant chacun une constitution génétique différente et non juste de
simples variétés au sein d’une même espèce. Cette diversité ajoute une dimension
supplémentaire à toute analyse de cette culture. La quasi moitié de la production mondiale
repose sur le groupe Cavendish qui est le bananier le plus important au niveau du
commerce mondial, suivi par divers types de bananiers à cuire, puis d'autres bananiers
dessert et finalement les bananiers plantain (Tableau 1).
Bien que l'on considère les bananiers comme une culture tropicale ayant besoin d'un climat
chaud et pluvieux uniforme tout au long de l'année, ils sont, en réalité, cultivés partout sous
les tropiques et les subtropiques. Les bananiers sont retrouvés en Europe méridionale,
Afrique du nord, Pakistan, Inde du Nord et Chine pour leur répartition extrême Nord et en
Argentine, Paraguay, Afrique du Sud et Australie pour leur répartition extrême Sud. Ils sont
aussi cultivés sous les tropiques à une altitude moyenne de 1500 mètres au-dessus du
niveau de la mer dans les Andes, dans l'Himalaya, au Kilimandjaro et dans sur les hauts
plateaux d'Afrique de l'Est.
La production et la consommation des différents groupes varient géographiquement. Le
bananier Cavendish est concentré en Asie, en Amérique latine et dans les Caraïbes, tandis que
les bananiers à cuire sont cultivés principalement en Asie (Inde, Indonésie et Philippines) et en
Afrique de l'Est. On trouve d'autres bananiers dessert principalement en Asie et en Amérique
latine. Les bananiers plantain sont concentrés en Afrique occidentale et centrale et en
Amérique latine mais il existe aussi une production en Afrique de l'Est et en Asie.
Les effets du changement climatique sur l'agriculture ont été envisagés tant en termes de
productivité que de risque de rupture de production, ce qui aurait des implications pour la
sécurité alimentaire et le revenu de milliers et de millions de ménages dans le monde. La
hausse de la température moyenne caractérisant le changement climatique va
probablement s'accompagner d'une augmentation de la fréquence et de la sévérité
d'événements météorologiques extrêmes et modérés entraînant des pertes épisodiques
supplémentaires. Cela se traduira par une vulnérabilité accrue de l'agriculture sur le moyen
et le long terme à moins que des mesures ne soient prises pour renforcer la résilience des
systèmes de production.
Tableau 1. Production bananière en tonnes par groupes de cultivars et régions pour 2011 (Source : Fruitrop, 2011)
Tonnes
Bananes à cuire Bananes dessert
Total Plantain AAB
Bananiers d'altitude + ABB
+ autres ABB + AAA + AA
Cavendish Gros Michel &
autres
Amérique du Nord 0 1000 8000 100 9 100
Amérique du Sud 5 664 779 416 491 12 479 463 3 927 750 22 488 483
Amérique centrale 783 830 63 835 7 551 531 81 500 8 480 696
Caraïbes 1 061 898 669 130 1 125 518 199 930 3 056 476
Afrique occidentale et centrale 8 981 861 758 796 2 349 174 485 342 12 575 173
Afrique de l'Est 944 716 12 574 031 2 726 439 874 516 17 119 702
Afrique du Nord et Moyen Orient 1031 135879 1969375 71871 2 178 156
Asie 2 130 774 10 726 630 32 034 984 12 942 172 57 834 560
Océanie 1 286 530 043 674 681 259 556 1 465 566
Europe 2 20 422641 30 422 693
Total mondial 19 570 177 25 875 855 61 341 806 18 842 767 125 630 605
Devant l'importance mondiale des bananiers, tant en termes d'alimentation que de
commerce, la Division du Commerce et des Marchés de la FAO, dans le cadre de cas d'étude
et d'aide technique pour différentes espèces alimentaires essentielles, a mandaté Bioversity
International pour entreprendre une étude sur dossiers des effets du changement
climatique sur le bananier. Cette étude contribue à l'effort mondial de renforcement des
capacités de réponse de secteurs liés aux matières premières d'importance mondiale.
L'étude a traité les points suivants :
1) Évaluer quantitativement les effets du changement climatique sur les conditions de
croissance du bananier dans le monde ;
2) Évaluer les impacts du changement climatique sur les indicateurs de la productivité
bananière ;
3) Évaluer les effets potentiels du changement climatique sur la principale maladie
foliaire du bananier ;
4) Identifier les grandes modifications – en termes de superficies gagnées et perdues
des terres potentielles dans les régions subtropicales, tropicales, des hauts plateaux
tropicaux et des plaines tropicales – relatives au changement climatique aux
horizons 2030, 2050 et 2070.
Pour classer les terres d'après une gamme de critères pertinents pour la production bananière,
une procédure de modélisation spatiale a été développée et mise en œuvre dans ArcGIS (ESRI
Inc.) utilisant ESRI Model Builder. La température mensuelle moyenne réelle et la précipitation
(résolution spatiale : - 5 kilomètres (km) – 2,5 minutes d'arc) ont été utilisées pour l'analyse de
classification mondiale trouvée sur le portail WorldClim (Hijmans et al. 2005).
Trois catégories de terres ont été identifiées dans l'analyse initiale (voir Tableau 2 pour les
paramètres clefs de température de la croissance du bananier). Les terres impropres à la
production bananière ont été définies comme des terres supportant pendant trois mois ou
plus des températures inférieures à 13°C. Les terres généralement adaptées à la production
bananière ont été divisées en terres tropicales et subtropicales. Les terres tropicales
présentent une température mensuelle moyenne relativement uniforme pendant l'année,
tandis les terres subtropicales ont été définies comme présentant un écart de température
entre le mois le plus chaud et le plus frais de l'année supérieur à 8°C (en sus de moins de
trois mois au-dessous de 13°C).
Tant pour les tropiques que pour les subtropiques, les sous-catégories ont été identifiées en
fonction de la température annuelle moyenne, des précipitations annuelles totales et de la
durée de la saison sèche (Tableau 3, voir p. 7). Un mois est considéré sec s'il présente une
précipitation inférieure à 60 millimètres. Trois catégories de température annuelle moyenne
ont été identifiées : 13-18°C, 18-24°C et >24°C. Le bananier survit dans l’intervalle 13-18°C
mais l'émission de feuilles est très ralentie et le temps jusqu'à la floraison peut atteindre
deux ans. Supposant aucune limitation en eau, pour la catégorie 18-24°C, l'intervalle
plantation-récolte sera compris entre 12 mois et 24 mois, tandis que pour la catégorie
>24°C, la tige produira un régime en moins d'un an. Les précipitations annuelles totales sont
sous-divisées en quatre régimes : <900 millimètres, 900-1500 mm, 1500-2500 mm et
>2500 mm. Selon la durée de la saison sèche, le bananier peut subir des limitations de
croissance au-dessous de 1500 mm/an de précipitation, alors qu'aux conditions de
précipitation supérieures, la croissance sera favorisée. Deux catégories pour la durée de la
de saison sèche sont utilisées – inférieure ou égale à trois mois secs (moins de 60 mm de
précipitation mensuelle) et supérieure à trois mois secs. La combinaison des précipitations
annuelles totales et de la durée de la saison sèche donne une indication de la vitalité de la
croissance du bananier sans irrigation et des conditions pour les maladies foliaires. Avec une
saison sèche inférieure à trois mois et des précipitations supérieures à 150 mm/mois, le
bananier se cultive bien toute l'année sans irrigation. De telles conditions sont aussi plus
favorables aux maladies foliaires.
Tableau 2. Températures critiques de la croissance du bananier.
Température (°C) Effet de la température sur la croissance du bananier
47 Point de danger thermique, les feuilles meurent
38 Arrêt de la croissance
34 Début du stress physiologique lié à la chaleur
27 Température moyenne optimale pour la productivité
13 Température moyenne minimale pour la croissance ; refroidissement au champ
6 Destruction de la chlorophylle foliaire
0 Dégâts du gel, les feuilles meurent
D'après ces paramètres, la convenance actuelle des terres pour le bananier peut être cartographiée et évaluée quantitativement (Figure 1, Tableau 4). Actuellement, les surfaces mondiales impropres à la culture du bananier, 140 millions de kilomètres carrés, sont bien supérieures aux surfaces propices des pays tropicaux et subtropicaux. Celles-ci se répartissent entre régions subtropicales et tropicales d'environ 40 millions de km2 chacune.
Tableau 4. Surface totale (km2) pour trois catégories convenant à la culture du bananier actuellement et dans le
temps.
Catégorie Actuellement 2030 2050 2070
Impropre 141 224 300 134 962 475 132 472 650 130 299 200
Propice subtropicale 41 201 350 40 346 450 40 194 675 39 829 175
Propice tropicale 43 189 025 46 952 150 49 593 750 52 132 700
Pour les subtropiques, la grande majorité des terres (36 millions de km2) reçoit moins de 900
mm de précipitation annuelle (Figure 2, Tableau 5, voir p. 8) et la moitié d'entre elles subissent
aussi des températures annuelles entre 13 et 18°C. Ces terres ne conviennent aux bananiers
qu'avec des pratiques spécifiques. Autour de 7 millions de km2 dans les subtropiques offrent
des précipitations et des conditions de température plus propices au bananier.
Pour les tropiques, en termes de température, toutes les terres sont appropriées sauf aux
altitudes élevées qui représentent seulement autour de 2 millions de km2 (Tableau 5). Les
terres propices en termes de température et de précipitation, y compris les zones
extrêmement humides (plus de 2500 mm de précipitations), représentent autour de
30 millions de km2. Cela peut être opposé aux superficies actuelles de production de
bananiers et bananiers plantain de 126 000 km2 (calcul fondé sur un rendement
approximatif de 10 t/ha).
L'impact du changement climatique sur la superficie des zones agro-climatiques a été aussi
cartographié et évalué quantitativement en utilisant des projections du changement
climatique basées sur des données du portail de données CCAFS (Ramirez et Jarvis, 2008)
avec une résolution de 5 km. Les projections ont été faites pour 2030, 2050 et 2070 en
conjecturant le scénario A2 et la moyenne de 20 modèles de circulation générale. Les
surfaces tropicales et subtropicales sont combinées dans cette analyse, bien que montrées
séparément dans le Tableau 5.
Au cours de la période considérée, les zones les plus importantes de croissance du bananier
augmenteront considérablement en superficie (Figure 2). Les zones 131, 231, 331 et 431
accroîtront toutes énormément en superficie. Dans chacun des régimes de précipitation
(premier chiffre - Tableau 5), les superficies de la catégorie des températures plus fraîches
(deuxième chiffre représenté par 1 (13-18°C) se réduiront et les superficies subissant des
températures plus élevées (deuxième chiffre représenté par 2, 3 (18-24°C; >24°C)
augmenteront. Le tableau 5 fait apparaître aussi une nouvelle catégorie 141 pour identifier
les étendues qui seront soumises à des températures excessivement élevées (>35°C
pendant au moins 3 mois par an). Ces étendues apparaissent d'abord en 2050 et
augmentent considérablement jusqu'en 2070, bien qu'elles représentent un faible
pourcentage de l'ensemble des terres propices au bananier.
Cette large vue d'ensemble de la convenance des terres basée sur la température et les
précipitations indique que les terres adaptées à la production bananière continueront à être
largement disponibles pour la culture du bananier dans les subtropiques et les tropiques
malgré le changement climatique. Il y aura un élargissement des zones climatiques dotées de
températures plus élevées et l'apparition de terres impropres en raison des périodes
prolongées de températures extrêmement élevées. Cela suggère que, si les températures
continuent à augmenter au-delà de 2070, les superficies risquant de devenir impropres à la
production bananière sous les tropiques augmenteront en raison des températures
excessivement élevées.
Tableau 3. Zones agro-climatiques.
<900 mm (1) 900-1500 mm (2) 1500-2500 mm (3) >2500 mm (4)
>3 mois de sécheresse
13 - 18°C
(1)
18-24°C
(2)
>24°C
(3)
>35°C
(4)
13 - 18°C
(1)
18-24°C
(2)
>24°C
(3)
>35°C
(4)
13 - 18°C
(1)
18-24°C
(2)
>24°C
(3)
>35°C
(4)
13 - 18°C
(1)
18-24°C
(2)
>24°C
(3)
>35°C
(4)
(1) 111 121 131 141 211 221 231 241 311 321 331 241 411 421 431 441
<3 mois de sécheresse
<900 mm (1) 900- 1500mm (2) 1500-2500 mm (3) >2500 mm (4)
13 - 18°C
(1)
18-24°C
(2)
>24°C
(3)
>35°C
(4)
13 - 18°C
(1)
18-24°C
(2)
>24°C
(3)
>35°C
(4)
13 - 18°C
(1)
18-24°C
(2)
>24°C
(3)
>35°C
(4)
13 - 18°C
(1)
18-24°C
(2)
>24°C
(3)
>35°C
(4)
(2) 112 122 132 142 212 222 232 242 312 322 332 342 412 422 432 442
Figure 1. Distribution mondiale actuelle distinguant les zones impropres, propices subtropicales et propices tropicales à la culture des bananiers.
Tableau 5. Modifications des surfaces (en km2) des zones climatiques des régions bananières subtropicales et tropicales pour les projections climatiques jusqu'à 2070.
Valeur Subtropical Tropical
Actuellement 2030 2050 2070 Actuellement 2030 2050 2070
0 0 1 350 1 750 1 875 +
111 1 907 000 1 202 500 775 525 542 900 - 616 725 382 125 253 025 183 900 -
112 4 450 3 375 12 575 16 950 + 3 975 3 400 1 475 1 275 -
121 17 749 650 15 634 075 13 442 900 11 594 125 - 2 495 050 1 638 800 1 234 875 933 800 -
122 3 400 1200 3050 17 175 + 9 700 2 975 4 225 3 050 -
131 16 018 350 21 161 325 25 159 125 28 595 100 + 4 653 925 5 556 050 6 085 825 6 333 975 +
132 0 0 0 25 + 3 600 5 425 4 950 5 325 +
141 0 0 225 30 700 + 0 0 0 17 975 +
35 682 000 38 002 475 39 393 400 40 796 975 + 7 783 000 7 588 775 7 584 375 7 479 300 -
211 251 325 266 700 241 575 205 875 - 326 900 199 475 126 225 85 100 -
212 472 000 229 150 171 200 159 975 - 82 800 57 375 49 450 50 450 -
221 1 384 225 1 299 950 1 370 450 1 319 475 - 4 449 025 2 900 100 2 138 425 1 234 025 -
222 1 067 550 1 580 275 1 842 650 1 962 050 + 772 075 355 225 232 675 151 400 -
231 1 756 375 2 299 825 2 600 575 3 034 800 + 6 807 200 8 279 450 8 957 925 9 626 725 +
232 24 225 74 700 168 725 241 200 + 601 775 916 975 943 325 1 065 850 +
4 956 000 5 750 600 6 395 175 6 923 375 + 13 400 000 12 708 600 12 448 025 12 213 550 -
311 89 900 69 950 51 825 38 025 - 78 375 32 575 17 475 8 650 -
312 166 950 106 700 69 300 51 200 - 182 175 109 200 81 500 63 275 -
321 760 350 602 375 521 200 445 975 - 1 167 375 561 550 374 200 275 825 -
322 808 575 1 237 050 1 491 850 1 707 725 + 1 669 025 829 525 620 600 494 750 -
331 404 525 764 225 1 087 850 1 372 525 + 2 930 250 3 813 325 4 377 875 4 755 450 +
332 14 425 25 875 107 600 250 525 + 8 185 925 8 539 500 8 319 750 7 963 500 -
2 245 000 2 806 175 3 329 625 3 865 975 + 14 213 000 13 885 675 13 791 400 13 561 450 -
Valeur Subtropical Tropical
Actuellement 2030 2050 2070 Actuellement 2030 2050 2070
411 17 200 11 725 8 825 7 275 - 800 2 300 2 525 1 400 +
412 3 225 2 625 2 375 3 150 - 98 825 76 000 64 125 55 375 -
421 128 850 103 875 94 850 86 600 - 56 125 41 575 31 275 25 700 -
422 31 975 33 625 39 025 42 600 + 792 950 506 150 393 100 312 050 -
431 116 025 190 700 257 125 317 800 + 384 025 421 500 457 500 494 250 +
432 5 750 21 200 35 600 50 600 + 4 830 875 5 115 850 5 422 300 5 686 100 +
303 000 363 750 437 800 508 025 + 6 164 000 6 163 375 6 370 825 6 574 875 +
Figure 2. Cartes des modifications de la distribution des zones climatiques propices à la culture bananière (Tableau 3). A : Actuellement; B : 2050.
A : Actuellement
Figure 2. Cartes des modifications de la distribution des zones climatiques propices à la culture bananière (Tableau 3). A : Actuellement; B : 2050.
B : en 2050
Pour explorer plus avant les implications du changement climatique sur la croissance des
bananiers, nous avons identifié 24 sites d'importance pour le bananier dans des zones
climatiques contrastées en Amérique latine, Afrique et Asie (Tableau 6). Huit sites ont été
choisis sur chaque continent principal avec au maximum deux sites par pays. Ces sites
représentent 13 des zones climatiques du Tableau 5. Ils incluent sept sites subtropicaux,
cinq sites tropicaux d'altitude, six sites tropicaux secs et six sites tropicaux humides (voir
Figures 3-6 pour les différents groupements et leur projection climatique). Pour chaque site,
les changements des précipitations et température mensuelles moyennes ont été prédits
pour 2030, 2050 et 2070, utilisant des données du portail de la base de données CCAFS
(Ramirez et Jarvis, 2008) avec une résolution de 5 km. Les projections supposent le scénario
A2 et la moyenne de 20 modèles de circulation générale.
En regardant chaque groupe de sites, on remarque que les sites subtropicaux (Figure 3)
présentent une différence marquée entre une saison fraîche avec des températures
minimales de 10°C et une saison chaude avec des températures élevées. Deux sites
présenteront, en saison chaude, des températures extrêmement élevées, atteignant 40°C –
Salta, en Argentine et Uttar Pradesh, en Inde – particulièrement pour 2050 et 2070. Les
précipitations varieront fortement selon les sites. Quelques sites présenteront une
distribution mensuelle très uniforme, tandis que d'autres recevront l'essentiel de leurs
pluies annuelles en seulement quelques mois. Les projections sur les décennies suivantes
montrent peu de changement dans la distribution des pluies mensuelles.
Pour les sites tropicaux d'altitude (Figure 4), les températures sont tout à fait uniformes
durant l'année, à part pour le site en Chine qui est une haute terre (1300 m d'altitude), bien
que subtropicale par son emplacement. Les températures hivernales du site chinois limitent
la croissance des bananiers, bien que les projections du changement climatique indiquent
un froid hivernal modéré. Dans les autres sites, les températures même avant 2070,
varieront entre 15°C et 30°C, ce qui est acceptable pour la croissance du bananier. Plusieurs
sites basculeront dans la zone agro-climatique >24°C. La distribution des précipitations
varient selon le site. Les sites comme Kawanda, Nord Kivu et Armenia n'ont aucun mois sec,
tandis que les autres sites présentent des saisons sèches. La distribution mensuelle ne
devrait pas changer au cours de la période étudiée.
Tableau 6. Zone agro-climatique pour les sites sélectionnés groupés par zone.
Zone Région Pays Ville/Province Ville Longitude Latitude
121 Afrique Afrique du Sud Nelspruit Nelspruit 30.97 -25.47
121 Amérique Argentine Salta Salta -63.86 -23.92
131 Asie Inde Bagalkot Karnataka 75.69 16.19
222 Afrique Ouganda Kampala Kawanda 32.52 0.41
222 Amérique Rép. dominicaine La Vega La Vega -70.71 19.06
222 Australie & Océanie
Australie Queensland Brisbane 153.02 -27.47
231 Afrique Burundi Bujumbura Bujumbura 29.36 -3.38
231 Asie Inde Uttar Pradesh Uttar Pradesh 80.12 27.81
232 Afrique Ghana Kumasi Kumasi -1.60 6.69
312 Afrique RDC Nord Kivu Butembo 29.28 0.13
321 Afrique Malawi Mzuzu Mzuzu 34.07 -11.64
321 Asie Chine Yunnan Puer 100.99 22.78
322 Amérique Brésil Sta Catarina Corupá -49.30 -26.44
322 Amérique Colombie Quindío Armenia -75.72 4.53
331 Amérique Nicaragua Rivas Rivas -85.64 11.51
331 Amérique Équateur Los Rios Pichilingüe -79.46 -1.10
332 Afrique RDC Kisangani Kisangani 25.18 0.53
332 Amérique Pérou Ucayali Pucallpa -74.58 -8.38
332 Asie Philippines Davao Davao 125.46 7.22
421 Asie Taiwan Kaohsiung Kaohsiung 120.66 23.06
431 Asie Philippines Bani Bani 119.86 16.24
432 Afrique Nigeria Akwa ibom Akwa ibom 7.86 4.80
432 Amérique Costa Rica Guapiles Guapiles -83.26 10.04
432 Asie Indonésie Kalimantan Central Palangkaraya 114.26 -1.70
Pour les deux groupes de sites restants, les tropiques secs (Figure 5) et les tropiques
humides (Figure 6), les températures moyennes devraient augmenter de 3°C, passant de
25°C à 28°C au cours des 50 ans suivants, mais resteront en grande partie dans une plage
favorable de 25-30°C. Les températures maximales atteindront la zone de danger pour le
bananier dans le site de l'Inde en 2070, bien que, déjà actuellement, des vagues de chaleur
causent des dégâts épisodiques aux nouveaux plants de bananier et aux régimes naissants.
Les précipitations moyennes ne varieront pas fortement, à part pour les sites d’Amérique
centrale et des Caraïbes où elles devraient baisser en 2050 et 2070.
Cinq des 24 sites changeront de catégories en raison des températures entre maintenant et
2070 - Kawanda en Ouganda; Butembo en RDC; Mzuzu au Malawi; Salta en Argentine et
Armenia en Colombie (Tableau 7), passant de la catégorie 18-24°C à >24°C. Trois sites
changeront de zone climatique en raison des modifications de leur régime de précipitation :
Rivas qui deviendra sec, Kawanda qui devrait devenir plus humide et La Vega où plusieurs
mois approcheront la limite de 60mm/mois qui sert de seuil pour différencier un mois sec
d'un mois humide, ce qui changera la durée de la saison sèche basée sur les précipitations.
En résumé, d'après cette analyse de 24 sites :
- Tous les sites montrent une hausse linéaire des températures tant moyennes que
minimales et maximales, justifiant les inquiétudes humaines liées au changement
climatique ;
- Seuls trois sites montrent des tendances vers des températures extrêmement
élevées - deux en Inde et un en Argentine – ce qui peut limiter la croissance des
bananiers ;
- Dans la plupart des sites, la distribution des précipitations durant l'année et la
quantité de précipitations par mois est tout à fait stable d’aujourd’hui à 2030, 2050
et 2070. Les sites d’Amérique centrale et des Caraïbes devraient ressentir une baisse
de leurs précipitations mensuelles, tandis que celles des sites en Ouganda et au
Burundi tendront à augmenter.
Tableau 7. Changement de catégorie de zone agro-climatique pour des sites. Les autres sites restent inchangés.
Région Pays Ville Actuellement 2030 2050 2070
Afrique Ouganda Kawanda 222 222 322 332
Afrique RDC Butembo 312 322 322 322
Afrique Nigeria Akwa ibom 432 432 432 432
Afrique Malawi Mzuzu 321 331 331 331
Afrique RDC Kisangani 332 332 332 332
Amérique Argentine Salta 121 121 131 131
Amérique Colombie Armenia 322 322 322 332
Amérique Rép. dominicaine La Vega 222 221 221 221
Amérique Nicaragua Rivas 331 231 231 231
A B
C D
E F
Figure 3. Projections des températures mensuelles moyennes et précipitations pour les zones subtropicales
de culture du bananier en utilisant les valeurs moyennes pour 20 GCM sous le scénario A2. A : Nelspruit
(Afrique du Sud), B : Salta (Argentine), C : Brisbane (Australie), D : Uttar Pradesh (Inde), E : Corupá (Brésil),
F : Kaohsiung (Taiwan).
G H
I J
K L
Figure 4. Projections des températures mensuelles moyennes et précipitations pour les zones d'altitude
tropicales de culture du bananier en utilisant les valeurs moyennes pour 20 GCM sous le scénario A2.
G : Puer (Chine) plateau subtropical, H : Kawanda (Ouganda), I : Bujumbura (Burundi), J : Nord Kivu (RDC),
K : Mzuzu (Malawi), L : Armenia (Colombie).
M N
O P
Q R
Figure 5. Projections des températures mensuelles moyennes et précipitations pour les zones de culture du
bananier tropicales sèches en utilisant les valeurs moyennes pour 20 GCM sous le scénario A2.
M : Karnataka (Inde), N : La Vega (République dominicaine), O : Kumasi (Ghana), P : Rivas (Nicaragua),
Q : Pichilingüe (Équateur), R : Pucallpa (Pérou).
S T
U V
W X
Figure 6. Projections des températures mensuelles moyennes et précipitations pour les zones de culture
du bananier tropicales humides en utilisant les valeurs moyennes pour 20 GCM sous le scénario A2.
S : Guapiles (Costa Rica), T : Akwa Ibom (Nigeria), U : Kalimantan Central (Indonésie), V : Davao
(Philippines), W : Bani (Philippines), X : Kisangani (RDC).
L'analyse de la section précédente, basée sur les conditions générales de culture pour le
bananier, fournit une vue d'ensemble des effets du changement climatique moyen. Divers
outils ont été utilisés pour convertir les besoins généraux de croissance en effets évalués plus
quantitativement. Par exemple, la modélisation de niche comme Maxent, BioClim et
ECOCROP a été utilisée dans de nombreuses espèces cultivées. ECOCROP a été utilisé pour le
bananier (van den Bergh et al., 2012). Les modèles comme ECOCROP utilisent des données
annuelles pour la température et les précipitations qui limitent son applicabilité pour des
espèces ayant un cycle de 12 mois susceptibles d'être sous irrigation.
Pour avoir un index quantitatif des effets des changements de températures et de la
disponibilité en eau sur la croissance du bananier, nous avons développé un calcul utilisant la
température et les précipitations mensuelles. Le taux d'émission des feuilles est une variable
clef dans la productivité de bananier, puisqu'il est étroitement corrélé à la durée du cycle
végétatif et la durée entre un régime et le suivant pour un même pied de bananier. Le taux
d'émission des feuilles est fortement influencé par l'eau disponible et la température. Trois
calculs ont été effectués : 1) l'effet de la température seule, mesuré en degrés-jours de
croissance (GDD) ; 2) les unités de développement thermiques (TDU) qui tiennent compte du
GDD modéré par l'excès ou l'insuffisance de l'eau disponible du sol pour une croissance
optimale et 3) le déficit en eau basé sur le bilan hydrique utilisant les précipitations naturelles
et le besoin optimal de la culture. Ces trois calculs ont été effectués pour des conditions
actuelles et aux horizons 2030, 2050 et 2070.
5.1 Évaluation des GDD et TDU du bananier
Le concept de base de degré-jours de croissance est que le développement de la plante
démarre quand les températures excèdent une température de base et cesse quand une
température maximale non létale est outrepassée. Pour l'évaluation du GDD, la
température moyenne mensuelle a été utilisée. Une température de base de 13°C a été
soustraite de la température moyenne mensuelle qui a servi à obtenir le GDD quotidien. Si
le GDD quotidien calculé s'avère négatif, il devient égal à zéro. Si la température mensuelle
moyenne excède 35°C, le GDD est de 0 en raison des températures élevées (Thomas et al.,
1998 ; Turner et Lahav, 1983). Le GDD mensuel a été calculé en multipliant le GDD quotidien
par le nombre de jours dans le mois et les GDD mensuels ont été ensuite additionnés sur
l'année pour obtenir le GDD total annuel. Celui-ci a alors été converti pour dénombrer les
feuilles en le divisant par 108°C. Fortescue, Turner et Romero (2011) ont démontré
l'existence d'un effet de la photopériode sur l'accumulation des GDD mais cet effet n'a pas
été pris en compte pour cette analyse.
Le calcul du nombre de feuilles/an utilisant les TDU utilise le GDD modéré par les effets de la limitation
en eau. Le rapport entre TDU et GDD pour une période de temps est :
TDU = GDD * Pf * Wf (°C jour)
Où : Pf est un scalaire (0,0 à 1,0) de la photopériode et Wf est un scalaire (0,0 à 1,0) du bilan hydrique du sol. Pf n'a pas été pris en compte dans cette étude. Le bilan hydrique du sol (Wf) a été évalué mensuellement à partir du ratio précipitation/évaporation potentielle (Pluie/ETp) donnant la valeur 1.0 à Wf si le ratio s'inscrit entre 1.0 et 1.1. Si Pluie/ETp est supérieur à 1,1 alors Wf = 1 + 0,2 (1-Pluie/ETp), tenant compte d'un effet négatif pour l'excès d'eau (Fortescue et al., 2011).
5.2 Évaluation du déficit en eau pour le bananier
Le besoin en eau d'irrigation ou le déficit en eau pour le bananier a été évalué tous les mois et cumulé tout au long de l'année. Il se définit comme la différence entre le besoin d'eau de la plante (évapotranspiration réelle - ETR) et la fraction des précipitations utilisable par la plante (précipitation efficace - Erain). L'évapotranspiration réelle (ETR) est la quantité d'eau qui est transférée vers l'atmosphère par l'évaporation au niveau du sol et les processus de transpiration des plantes (Allen et al., 1998). L'ETR dépend de la radiation solaire et de la température ainsi que des caractéristiques de la végétation, de la quantité d'eau disponible dans le sol et des propriétés hydrologiques du sol (principalement des courbes de rétention d'eau du sol) :
ETR = Ksol * Kc* ETP (mm/mois)
Où : Ksol = coefficient de réduction dépendant du taux d'humidité volumétrique du sol (0-1), Kc = coefficient cultural du bananier dépendant du développement de la culture (0,3-1,3). Le coefficient de culture (Kc) est utilisé pour évaluer l'utilisation d'eau de la culture pour la référence ETR pour différente espèces alimentaires ou types de végétation. Une valeur de Kc pour les bananiers de 1,15 a été prise d'après la littérature (Allen et al., 1998 ; Freitas et al., 2008 ; Silva et Bezerra, 2009).
Dans cette étude, la précipitation efficace a été évaluée en utilisant une formule empirique de la FAO/AGLW basée sur l'analyse effectuée pour différentes données climatiques (Clarke et al., 2001 ; Smith, 1992).
Les TDU comme l'ETR dépendent d'une évaluation de l'évapotranspiration potentielle ETP. Le modèle Hargreaves a été choisi (Hargreaves et Allen, 2003) puisque il se conduit presque aussi bien que le modèle FAO-Monteith mais exige moins de paramétrage (Hargreaves et Allen, 2003 ; Trajkovic, 2007). Le modèle Hargreaves utilise la température mensuelle moyenne (Tmoy) et la radiation solaire globale (Rs) à la surface mesurée en unités d'évaporation d'eau pour calculer l'ETP.
5.3 Résultat des calculs des GDD et TDU et du déficit en eau du bananier
Les calculs pour l'émission annuelle de feuilles basée sur le GDD (Tableau 8) montrent les effets de l'augmentation linéaire de la température seule sur l'émission de feuilles totale pendant une période de 12 mois. D’aujourd’hui à 2070, les degré-jours de croissance augmenteront de 30% ou environ 1000-1200 pour tous les sites. Cela représente une augmentation de l'émission de feuilles d'environ 10 feuilles, bien que quelques sites montrent
des augmentations plus faibles. Cette augmentation représente potentiellement plus de régimes/ha/an. Le site indien dans l'Uttar Pradesh est notable puisque, avant 2070, le site deviendra impropre à la culture du bananier, prévision basée sur une période prolongée de plus de trois mois avec des températures moyennes d'environ 35°C.
Le calcul d'émission de feuilles basée sur les TDU tient compte non seulement des effets de la température mais aussi des limitations en eau dans la production en régime pluvial (Figure 7, Tableau 8). Dans ces sites où l'eau continue à limiter l'émission de feuilles totale plutôt que la température, les taux d'émission de feuilles seront stables ou augmenteront seulement légèrement. Dans d'autres sites avec plus de précipitation uniforme durant l'année tels que Kisangani, Corupá et Armenia, l'émission de feuilles augmentera jusqu'à 10 feuilles pendant la période de 12 mois en 2070.
Les différences entre les augmentations de l'émission de feuilles basée sur le GDD et les TDU mettent en évidence l'importance de la disponibilité de l'eau dans la productivité du bananier. Cela se prévoit par un calcul du déficit hydrique (Tableau 9). D’aujourd’hui à 2070, la hausse de la température moyenne aura pour résultat non seulement l'accroissement de l'émission potentielle de feuilles et donc, celui du nombre de régimes, mais aussi celui de la demande en eau de la plante pour répondre à l'ETP. La quantité d'eau à appliquer sous forme d'irrigation pour répondre aux besoins de la plante augmentera de 12 - 15% au cours de la période. Les demandes seront plus élevées pour les sites secs que pour des sites dotés de précipitations >2500 mm/an.
Tableau 8. Émission foliaire totale annuelle sur la base de la température (GDD) et de la température et de l'eau (TDU).
Région Pays Ville GDD TDU
Actuellement 2030 2050 2070 Actuellement 2030 2050 2070
Afrique Ouganda Kawanda 25 30 32 36 21 24 24 25
Afrique DRC Butembo 15 20 22 26 13 12 14 18
Afrique Burundi Bujumbura 34 38 39 44 24 21 19 23
Afrique Ghana Kumasi 39 44 46 50 29 32 35 35
Afrique Nigeria Akwa ibom 41 46 47 50 27 28 29 33
Afrique Malawi Mzuzu 26 31 32 36 16 17 18 20
Afrique RDC Kisangani 37 42 44 48 35 40 41 44
Afrique Afrique du Sud Nelspruit 19 26 29 33 16 16 17 18
Amérique Brésil Corupá 20 25 27 31 18 21 24 27
Amérique Argentine Salta 27 31 34 37 16 18 19 19
Amérique Colombie Armenia 21 27 28 31 19 26 27 29
Amérique Costa Rica Guapiles 40 44 46 49 35 39 40 43
Amérique Rép. dominicaine.
La Vega 14 18 19 21 21 24 24 26
Amérique Nicaragua Rivas 40 47 51 55 24 27 27 27
Amérique Pérou Pucallpa 40 45 48 52 36 38 40 41
Amérique Équateur Pichilingüe 36 41 42 45 19 23 25 28
Asie Taiwan Kaohsiung 24 26 27 29 13 15 17 16
Asie Inde Karnataka 38 43 44 48 16 16 16 17
Asie Inde Uttar Pradesh 35 41 42 0 17 19 19 0
Asie Philippines Davao 39 43 44 47 35 37 38 41
Asie Philippines Bani 42 47 48 49 17 17 19 18
Asie Indonésie Kalimantan 40 44 46 49 35 37 40 42
Asie Chine Puer 16 22 23 28 14 18 18 21
Australie & Océanie Australie Brisbane 22 26 28 32 20 23 25 26
A : actuel
Figure 7. Unités de développement thermique (TDU) pour les climats actuels et projetés en 2050 en utilisant des
valeurs pour20 GCM sous le scénario A2. - A : actuel.
B : 2050
Figure 7. Unités de développement thermique (TDU) pour les climats actuels et projetés en 2050 en utilisant des valeurs pour20 GCM sous le scénario A2. B : 2050.
Tableau 9. Demande en eau du bananier (ETR) et déficit (mm/an) pour 24 zones de croissance du bananier pour les climats actuels et leur projection.
Région Pays Ville Demande en eau de la plante (ETR) Déficit en eau (ETR-pluie efficace)
Actuellement 2030 2050 2070 Actuellement 2030 2050 2070
Afrique Ouganda Kawanda 1743 1829 1899 1988 1077 1203 1312 1405
Afrique RDC Butembo 1525 1556 1614 1695 651 802 855 873
Afrique Burundi Bujumbura 1733 1806 1854 1942 996 1339 1432 1446
Afrique Ghana Kumasi 2026 2084 2095 2241 1154 1106 1104 1320
Afrique Nigeria Akwa ibom 1678 1759 1806 1879 613 729 763 777
Afrique Malawi Mzuzu 1497 1546 1582 1664 642 699 710 734
Afrique RDC Kisangani 1852 2010 2078 2177 794 943 1046 1150
Afrique Afrique du Sud Nelspruit 1420 1550 1605 1686 992 1165 1215 1312
Amérique Brésil Corupá 1316 1347 1336 1399 358 350 397 391
Amérique Argentine Salta 1820 1858 1879 1985 1383 1360 1366 1458
Amérique Colombie Armenia 1586 1711 1702 1761 370 338 332 565
Amérique Costa Rica Guapiles 1879 1924 1940 2000 105 221 230 260
Amérique Rép. dominicaine La Vega 1712 1808 1835 1893 1016 1113 1149 1231
Amérique Nicaragua Rivas 2062 2138 2206 2306 1043 1271 1418 1600
Amérique Pérou Pucallpa 1995 2061 2090 2202 977 1104 1124 1241
Amérique Équateur Pichilingüe 1808 1859 1911 2048 844 837 866 954
Asie Taiwan Kaohsiung 1352 1441 1462 1511 410 481 449 526
Asie Inde Karnataka 2058 2097 2133 2169 1682 1757 1790 1786
Asie Inde Uttar Pradesh 1887 2055 2078 2043 1300 1434 1428 1439
Asie Philippines Davao 1892 2018 2046 2120 527 669 692 652
Asie Philippines Bani 1849 1928 1946 1971 976 1033 1030 1087
Asie Indonésie Kalimantan 1658 1741 1768 1883 196 281 324 434
Asie Chine Puer 1716 1700 1753 1973 884 938 957 1119
Australie & Océanie Australie Brisbane 1355 1410 1464 1545 691 706 789 866
Outre les effets sur l'émission des feuilles et la demande en eau, le changement climatique
moyen pourrait aussi affecter les conditions d'incidence des maladies et leur sévérité. La
maladie foliaire la plus importante – la maladie des raies noires (MRN) causée par
Mycosphaerella fijiensis – a servi d'indicateur de l'effet envisagé du changement climatique
sur la gestion des ravageurs du bananier.
Six des 24 sites ont été choisis pour une analyse plus détaillée d'après les régimes de
précipitation : trois sites subtropicaux, Salta (121), Brisbane (222), Puer (321); un site
tropical d'altitude, Kawanda (222) et deux sites tropicaux, Pichilingüe (331) et Davao (332).
Pour conjecturer l'effet du changement climatique moyen sur la MRN, des données
météorologiques quotidiennes sont nécessaires. Le programme de simulation MarkSim™,
qui travaille à une échelle de 30 secondes d'arc, simule des modèles de précipitation
quotidienne à partir de la base de données WorldClim (Hijmans et al., 2005). Sur chacune
des années étudiées (2030, 2050 et 2070), MarkSim™ a été appliqué 10 fois pour produire
des modèles de précipitation quotidienne. Une moyenne de ceux-ci a alors été établie pour
obtenir un modèle simple de précipitation quotidienne pour l'emplacement. Ces modèles
quotidiens ont été alors utilisés dans deux calculs relatifs à la MRN : la vitesse d'évolution et
le stade d'évolution.
La vitesse d'évolution (SDR) de la MRN est liée à la température. La température minimale
de germination de M. fijiensis est de 12°C, l'optimal est de 27°C et le maximum est de 36°C
(Porras et Perez, 1997). En général, la germination des conidies est optimale entre 25°C et
30°C après une réponse quadratique avec une température optimale estimée pour la
germination de 26,5°C. De plus, presque 100% de la germination est effectuée après 24
heures (Jacome et al., 1991 ; Jacome et Schuh, 1992). Pour la germination des ascospores,
une température optimale de 25°C a été évaluée (Jacome et al., 1991 ; Jacome et Schuh,
1992). Les ascospores et les conidies ont des réponses différentes à l'humidité relative. Les
ascospores ne germent qu'avec une humidité relative supérieure à 98%, tandis que les
conidies germent dans une gamme d'humidité plus étendue (88% à 100%) (Jacome et al.,
1991). La somme quotidienne des vitesses d'évolution de la MRN a été calculée d'après les
températures quotidiennes maximale et minimale par une régression simple développée
par Porras et Perez (1997).
On pourrait s'attendre à ce que la hausse envisagée des températures sur les six sites
aboutisse à un taux de croissance accru du tube germinatif des spores et au développement
plus rapide de la maladie. Comme indiqué dans la Figure 8, la réponse est variable selon le
site, mais en général, en 2050 et 2070, la vitesse d'évolution devrait augmenter.
Une deuxième approche aux projections de l'effet du changement climatique moyen est basée
sur le stade d'évolution ou l'avancée de la maladie. En général, il ne se produit pas d'infection
des feuilles par les ascospores en absence d'humidité des feuilles. L'infection par les conidies se
produit après une période d'humidité des feuilles de 0 à 18 heures. Les lésions foliaires
apparaissent 14 jours après l'inoculation de plantes soumises à 18 heures d'humidité des
feuilles (cité par Jacome et Schuh, 1992). En général, le développement de la MRN au champ
peut être vérifié par le stade d'évolution de la maladie sur la feuille quatre (EE4H) ou la feuille
cinq (EE5H). En tenant compte du temps de latence de la maladie de 14 jours, Perez et al.
(2006) ont développé un modèle prévoyant le stade d'évolution de la feuille quatre (EE4H)
d'après les précipitations cumulées pendant 14 jours, cinq semaines avant la date de prédiction
et l'évapotranspiration potentielle moyenne deux semaines avant la date de prédiction (Perez
et al., 2006).
La deuxième approche pour prévoir la réponse de la MRN au changement climatique moyen
(Figure 9) indique qu'il y aura probablement peu de changement de la dynamique de la
MRN saisonnièrement. Les lignes de couleurs différentes se chevauchent en grande partie
pour chacun des emplacements. La distribution des précipitations ne devrait pas se modifier
et, d'après ce second calcul basé sur les paramètres d'humidité, la maladie restera
fortement problématique en période de pluie et beaucoup moins agressive pendant les
périodes sèches de l'année.
En se fondant sur ces deux calculs pour l'épidémiologie de la MRN et sa gestion, on peut
proposer les implications suivantes. La période de l'année où la maladie est le plus difficile à
gérer restera la même - principalement pendant la saison pluvieuse. La maladie peut
devenir plus agressive puisque l'on s'attend à ce que la vitesse de croissance du tube
germinatif des spores augmente en réponse à la température. Cependant, cela ne pourra se
produire qu'en présence d'humidité de la feuille.
A B
C D
E F
Figure 8. Cumul des vitesses d'évolution de la MRN sur la base des températures. A : Salta, (Argentine),
B : Brisbane (Australie), C : Puer (Chine), D : Kawanda (Ouganda), E : Pichilingüe (Équateur) et F : Davao,
(Philippines).
A B
C D
E F
Figure 9. Stade d'évolution de la MRN sur la base des précipitations et de l'ETR. A : Salta (Argentine),
B : Brisbane (Australie), C : Yunnan (Chine), D : Kawanda (Ouganda), E : Pichilingüe (Équateur) et F : Davao
(Philippines).
Les fluctuations de superficie des différentes zones climatiques intéressant la production
bananière peaufinent la vision mondiale des implications du changement climatique dans la
capacité du monde à produire des bananes. S'appuyant principalement sur les changements
de la température moyenne, il restera dans le monde de grandes surfaces de terre adaptées
à la production bananière. Nous examinerons d'abord les surfaces perdues pour la
production en raison de températures excessivement élevées, puis les tendances pour les
basculements de catégories – d'impropre à 13-18°C et de 13-18°C à >24°C – pour chacun
des principaux continents (Tableau 10).
En 2070, les projections indiquent que certaines régions d’Afrique et d’Asie subiront au
moins trois mois de température mensuelle moyenne supérieure à 35°C, qui les rendront
impropres à la production bananière (Tableau 10). Ces terres se situent à l'intérieur du
Sahara et de l'Inde. Aucune terre ne devrait être perdue en Amérique latine et aux Caraïbes.
À l'autre bout de l'échelle – dans la catégorie impropre à la culture en raison de périodes
froides prolongées en-deçà de 13°C, on note, sur tous les continents, un déclin du statut
actuel à 2070 (Tableau 10). Plus de 5 millions de km2 au monde sortiront de la catégorie
impropre à la culture, dont plus de 87% en Asie, 12% en Amérique latine et seulement de
très petites surfaces en Afrique.
La catégorie de températures 13-18°C verra un gain de terres issues de la catégorie inférieure
(impropre à la culture) et une perte de terres qui basculeront dans la catégorie supérieure 18-
24°C. Tout compte fait, cette catégorie perdra presque 4 millions de km2. Étant donné le
caractère mondial de la hausse des températures, on peut supposer que tous les
basculements de catégories se feront vers la catégorie suivante supérieure. Un basculement
de catégorie dans l'autre sens en raison d'une baisse des températures est peu probable ainsi
qu'un basculement de deux catégories. Les basculements dans la catégorie 13-18°C sont tout
à fait également distribués sur les trois continents. En combinant les gains et les pertes au
cours de la période des projections, c'est, au total, plus de 9 millions de km2 qui entreront
dans cette catégorie.
La catégorie de terre dans la gamme de température de 18-24°C verra un gain de terres
issues de la catégorie inférieure 13-18°C, et une perte de terres qui basculeront dans la
catégorie supérieure >24°C. Au cours de la période de projection étudiée, cette catégorie
18-24°C perdra presque 10 millions de km2, dont plus de 60% en Afrique, 25% en Amérique
latine et aux Caraïbes et le reste en Asie. Il serait utile d'effectuer des études plus détaillées,
mais il est probable que la hausse des températures des zones tropicales d'altitude et des
subtropiques soit responsable de ces changements. Plusieurs des 24 sites déjà examinés
devraient sortir de cette catégorie 18-24°C dans les zones plus tropicales.
Tableau 10. Modification des superficies (km2) adaptées à la production bananière par grande catégorie de températures en raison du changement climatique jusqu'à 2070 sur les trois continents.
Actuellement 2030
2050
2070
Impropre
ALC 3 226 450 2 802 200 - 2 568 425 - 2 306 525 -
Afrique 109 175 47 075 - 28 850 - 19 100 -
Asie 22 491 675 20 256 675 - 18 891 200 - 17 809 400 -
Total 25 827 300 23 105 950 - 21 488 475 - 20135 025 -
13 - 18°C
ALC 3 312 150 2 502 875 - 2 091 125 - 1885 300 -
Afrique 1 630 625 860 000 - 477 000 - 235 950 -
Asie 7 589 450 7 210 925 - 6 838 750 - 6 485 150 -
Total 12 532 225 10 573 800 - 9 406 875 - 8 606 400 -
18 - 24°C
ALC 6 675 800 5 313 650 - 4 783 075 - 4 318 275 -
Afrique 9 639 025 7 213 200 - 5 519 750 - 3 616 250 -
Asie 11 119 175 10 331 425 - 9 989 500 - 9 580 650 -
Total 27 434 000 22 858 275 - 20 292 325 - 17 515 175 -
24 - 35°C
ALC 12 406 025 14 892 450 + 16 068 550 + 17 001 075 +
Afrique 14 843 075 18 070 025 + 20 164 475 + 22 291 875 +
Asie 14 059 675 17 297 875 + 19 375 850 + 21 184 925 +
Total 41 308 775 50 260 350 + 55 608 875 + 60 477 875 +
Impropre en raison des températures élevées
ALC 0 0
0
0
Afrique 0 0
225 + 27 125 +
Asie 0 0 0 21 650 +
Total 0 0 225 + 48 775 +
La seule catégorie qui augmentera en surface en 2070 est celle >24°C. Avec presque 50% de
terres en plus dans le monde, passant de 40 à 60 millions de km2, représentant une
augmentation de la surface de 19 millions de km2. Cette augmentation se répartit également
entre l'Afrique et l'Asie avec 7 millions de km2 sur chaque continent et le reste en Amérique
latine.
En 2070, avec 60 millions de km2 de terres dans la catégorie >24°C, la terre propice à la
production bananière sera abondante. En termes de précipitation disponible, cela
représente 44% dans des terres sèches avec < 900mm de précipitations annuelles (zones
agro-climatiques 131 et 132) (Tableau 11). La production bananière dans de telles
conditions demandera un complément d'irrigation. Les terres des zones 231/232 et 331/332
représentent 45% du total de cette catégorie et sont réparties à peu près également entre
les deux zones. Ces quatre zones représentent les conditions naturelles les plus favorables à
la production bananière dans le monde, et la zone climatique 331 se distingue comme la
meilleure. Avec des précipitations annuelles de 1500-2500 mm et une saison sèche <3 mois,
le bananier pousse bien pendant l'année sans irrigation complémentaire. Les superficies de
cette catégorie resteront en grande partie stables des conditions actuelles jusqu’en 2070,
bien que pour 231 et 332, les superficies augmenteront de 50% en raison du changement
climatique (Tableau 11).
En résumé, les effets du réchauffement climatique sont très évidents dans cette dernière
analyse. Les zones climatiques avec des températures annuelles moyennes inférieures
devraient perdre des terres dans les trois continents, tandis que les superficies dans les
zones >24°C augmenteront. Ce changement favorisera la productivité potentielle du
bananier en raison de l'augmentation du nombre de régimes par hectare par an. La
température moyenne pour des terres potentielles de bananier dans cette zone va aussi
probablement augmenter au cours de la période de projection. Les sites de plaine tropicale
parmi les 24 sites déjà analysés ont montré une augmentation de 25°C à 28°C. Si la
productivité du bananier est favorisée par cette augmentation, l'apparition de zones
subissant une chaleur excessive à certaines périodes de l'année (trois mois >35°C) tant en
Asie qu'en Afrique confirme l'attention qui doit être portée au réchauffement climatique.
Il faut noter que les bananiers sont souvent cultivés en association avec des espèces
alimentaires pérennes et des plantes annuelles. Bien que la hausse des températures ne soit
pas défavorable au bananier, elle peut l'être pour la culture associée. Par ailleurs, les
paramètres de température de cette étude sont basés sur la culture des bananiers
Cavendish. D'autres cultivars de bananier peuvent présenter d'autres paramètres critiques
non encore établis. En particulier, le groupe de cultivars des hauts plateaux d'Afrique de l'Est
est connu pour bien se comporter aux altitudes plus élevées. Les agriculteurs les cultivant
pourraient repousser la limite d'altitude supérieure de plantation avec la hausse des
températures, mais pourraient aussi devoir le remplacer par d'autres cultivars à la limite
d'altitude basse à laquelle ils sont actuellement cultivés.
Tableau 11. Superficie mondiale (km2) pour la catégorie de terre >24°C sous différents régimes des précipitations.
Catégorie climatique Actuellement 2030 2050 2070
131 16 354 225 20 460 100 23 591 850 26 378 825
132 3 325 5 250 4 725 4 950
231 8 055 150 10 132 325 11 109 325 12 206 500
232 583 850 948 275 1 019 725 1 183 700
331 3 270 050 4 555 150 5 441 425 6 103 275
332 7 975 475 8 492 200 8 354 475 8 141 575
431 462 200 604 350 706 675 803 475
432 4 604 500 5 062 700 5 380 675 5 655 575
Les bananiers et les bananiers plantain sont parmi les 10 espèces cultivées les plus
importantes dans le monde en termes de surface, de rendement et de calories, occupant la
septième ou huitième place selon la catégorie. Les divers groupes de cultivars composant
les bananiers et bananiers plantain sont une source de revenu, de nourriture et de diversité
nutritionnelle pour des millions de ménages ruraux et urbains partout sous les tropiques et
les subtropiques. Le bananier est aussi une culture d'exportation majeure pour son fruit, le
plus consommé au monde, et donc un pourvoyeur de revenu et d'emploi pour des millions
de ménages. À la différence de beaucoup d'autres espèces dont les cycles de croissance se
déroulent sur 3-5 mois, le bananier est une culture semi-pérenne avec un cycle de culture
de presque un an dans les conditions optimales, voire plus long avec des températures
inférieures ou une alimentation en eau plus irrégulière. La vulnérabilité de la culture au
changement climatique est alors à examiner attentivement et nécessite des outils
spécifiques convenant au type de croissance du bananier et à son cycle de culture. Les
sections de l'étude décrites ici présentent les premières implications du réchauffement
climatique sur la production bananière et son adaptabilité au niveau mondial.
- Les conditions sont adaptées à la croissance du bananier dans de vastes superficies des
régions subtropicales, tropicales d'altitude et tropicales de plaine. Une approche par
catégorisation en zones climatiques, basée sur les températures mensuelles, les
précipitations mensuelles et la durée de la saison sèche, a permis d'évaluer
quantitativement au niveau mondial l'adaptation des terres pour la production
bananière. Même si les terres impropres à la croissance du bananier sont importantes,
les zones propices dans les deux catégories de température annuelle, 18-24°C et >24°C,
avec des précipitations favorables, représentent environ 37 millions de km2. Le
contraste est frappant si l’on compare avec les superficies occupées aujourd’hui par les
bananiers et bananiers plantain qui sont de 126 000 km2.
- D'après les projections du changement climatique établies en tenant compte du zonage
climatique et des 24 sites choisis représentant les zones importantes de culture du
bananier, les superficies impropres à la culture du bananier diminueront au cours des
périodes 2030, 2050 et 2070. Les superficies de plus faible productivité potentielle en
raison de températures fraîches, se réduiront, tandis que les superficies caractérisées
par des températures >24°C augmenteront. Le taux d'émission des feuilles, servant
d'indicateur de la productivité du bananier, calculé sur la base de la température seule,
augmentera de 10 feuilles/an sur la plupart des sites.
- Le taux d'émission des feuilles, calculé sur la base de la température et de l'eau
disponible, dans les différentes zones agro-climatiques et les 24 sites, augmentera de
10 feuilles/an dans les sites caractérisés par une abondance d'eau toute l'année. Dans
de nombreux autres sites ayant une saison sèche plus longue, le gain ne devrait être
que de 4-6 feuilles/an supplémentaires en réponse au réchauffement climatique. La
hausse de la température, induisant une vitesse d'émission des feuilles plus rapide,
entraînera aussi une demande accrue en eau estimée à 10-15% en 2070.
- La maladie des raies noires, une des maladies foliaires les plus importantes du
bananier, pourrait se révéler plus agressive avec la hausse des températures, puisque la
croissance du tube germinatif des spores s'accélère avec la température. Cependant, la
germination des spores est principalement liée à l'humidité de la feuille. Les projections
climatiques indiquent que la distribution des précipitations ne changera pas en
moyenne au cours de la période étudiée pour aucun des 24 sites. La maladie des raies
noires restera toujours problématique en périodes pluvieuses comme c'est
actuellement le cas.
- Une synthèse des fluctuations des superficies des différentes zones climatiques a
montré que celles des zones climatiques dotées des températures annuelles moyennes
inférieures diminueront dans les trois continents, tandis que celles des zones >24°C
augmenteront. Ce changement favorisera la productivité potentielle du bananier. La
température moyenne pour les terres potentiellement propices à la culture du bananier
de cette zone va aussi probablement augmenter au cours de la période de projection.
Les plaines tropicales parmi les 24 sites analysés ont montré une augmentation de
température de 25°C à 28°C. Tandis que la productivité du bananier est favorisée par
cette augmentation, l'apparition de zones subissant une chaleur excessive pendant
certaines périodes de l'année (trois mois >35°C), tant en Asie qu'en Afrique, indique que
le réchauffement climatique doit être pris en compte.
- Bien que la hausse des températures ne soit pas défavorable au bananier, elle peut
l'être pour les cultures qui y sont souvent associées, qu'elles soient pérennes ou
annuelles. Par exemple, des ménages agricoles cultivant le caféier associé au bananier
comme culture secondaire pourraient être amenés à abandonner le bananier en même
temps que le caféier en raison du changement climatique.
- Les paramètres de température utilisés dans cette étude sont basés sur le bananier
d'exportation Cavendish. On connaît d'autres groupes de cultivars de bananier,
particulièrement le groupe de cultivars des hauts plateaux d'Afrique de l'Est, poussant
bien à des altitudes plus élevées. Ce groupe de cultivars pourrait s'étendre dans des
altitudes plus élevées avec la hausse des températures, mais les agriculteurs pourraient
devoir les remplacer à plus basse d'altitude.
Les implications récapitulées ici sont basées sur des projections faisant intervenir la
température moyenne et les précipitations. Le réchauffement climatique est aussi lié à
l'instabilité croissante du temps. Des analyses complémentaires sont nécessaires pour
évaluer quantitativement le type et la fréquence des événements météorologiques modérés
et extrêmes et les implications pour la productivité de bananier et sa gestion.
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