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Contenus d’enseignement / apprentissage et …theodile.recherche.univ-lille3.fr/IMG/pdf/COmmunication_Thierry... · En interrogeant la « 1relation entre évaluation et contenus

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En interrogeant la « relation entre évaluation1 et contenus de l’enseignement / apprentissage » en EPS,

il apparaît que celle-ci est à la fois beaucoup et peu étudiée.

Beaucoup en ce qui concerne le champ d’étude de l’apprentissage moteur. Si la connaissance du

résultat est importante dans l’apprentissage moteur, la connaissance de la performance (c’est à dire les

moyens mis en œuvre pour obtenir le résultat) et plus encore la nature de l’information rétro-active

ainsi que sa précision sont déterminants.

Mais à notre connaissance, en ce qui concerne l’enseignement scolaire, peu de travaux en didactique

s’intéressent spécifiquement à cette relation. Peut-être parce que cet objet d’étude relève déjà de la

docimologie ou de la psychologie expérimentale ? Peut-être aussi parce qu’il résonne comme une

évidence que ce qui est évalué porte de facto sur ce qui a été enseigné ?

Cette représentation de la relation mérite d’être questionnée. Tout ce qui est enseigné « peut-il »,

« doit-il », « est-il » évalué ? L’évaluation n’a-t-elle qu’un rapport aux contenus d’enseignement ?

Comment se construit ce rapport entre un contenu et son évaluation ?

Cet article n’a pas l’ambition d’un compte rendu de recherche. Il problématise une relation à partir de

données officielles, d’expériences et de recherches empiriques et se situe dans une démarche

exploratrice.

Nous partirons d’une représentation que nous qualifierons d’institutionnelle et normative et qui postule

un lien fort entre les contenus et l’évaluation.

Nous verrons, en nous rapprochant des pratiques, apparaître des relations complexes entre lesquelles il

deviendra souvent difficile de séparer les composants du processus didactique.

Cela nous conduira à observer, lors de pratiques innovantes, le travail d’élaboration simultanée des

contenus et des repères et à interroger le sens que les enseignants attribuent à cette construction

particulière.

1. Contenus d’enseignement / apprentissage et évaluation : la limite de

représentations pescriptives

L’instrument d’une volonté

En proposant en 19832 une nouvelle forme d’évaluation des épreuves d’EPS au baccalauréat, plusieurs

objectifs étaient poursuivis : la reconnaissance d’une discipline, la modernisation des épreuves de

certification par le passage d’un contrôle terminal à un CCF (contrôle continu en formation), la mise

en correspondance du contenu de l’enseignement réellement dispensé aux élèves avec les épreuves

évaluées. Un réel écart existait alors entre les contenus d’enseignement et les épreuves certificatives

proposées au baccalauréat, mais le caractère national de ce diplôme gênait l’évolution.

A ces trois objectifs s’ajoutait une démarche volontariste de la « noosphère »3 pour bousculer les

pratiques traditionnelles et diffuser plus largement les pratiques rénovées de l’enseignement de l’EPS,

articulées autour des notions de performance (ce qui n’était pas nouveau) mais aussi d’habileté, de

connaissance et de participation.

Cette modification de l’évaluation au baccalauréat a donné lieu à de nombreux débats, suscité de

multiples expérimentations pour opérationnaliser ces nouveaux textes.

La représentation de la relation entre l’évaluation et les contenus d’enseignement était perçue comme

suffisamment « causale » pour être instrumentalisée comme moyen de pilotage des contenus. Pour

Louis Legrand, cette stratégie d’évolution, souvent employée par la « noosphère », permet

1 Nous nous en tiendrons à une définition assez générale de l’évaluation : « Evaluer signifie confronter un

ensemble d’informations à un ensemble de critères en vue de prendre une décision » (De Ketele, Roegiers, 1996,

p. 42). 2 Décret du 04/05/1983.

3 On retrouvera cette stratégie descendante dans la mise en place des CCF en lycée professionnels, des TPE en

lycée…

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effectivement « d'obtenir à moindre coût des effets spectaculaires sur lesquels les instances politiques

ont un contrôle… et dans un pays centralisé c'est un moyen puissant d'innovation »4.

Nous avons personnellement repéré au niveau des acteurs que sont les enseignants, que la

modification des textes officiels est souvent présentée par ceux-ci comme générateur de changements

dans les pratiques5.

Cela reflète-t-il la réalité ?

Le rappel à l’ordre

« Seul ce qui est enseigné peut être évalué ». Ce rappel officiel d’une nécessaire pertinence de

l’évaluation sommative rend compte d’écarts existants dont les acteurs du processus d’enseignement

sont d’ailleurs loin d’être conscients. L’objet évalué ne se superpose pas à l’objet enseigné et parfois

même, en diffère totalement. Il y a à cela l’hétérogénéité des conceptions des enseignants qui entraîne

des choix didactiques (Brau-Antony, 2003) et évaluatifs variés et parfois peu cohérents6. Il y a aussi

des difficultés proprement méthodologies à évaluer certains objets complexes7.

D’une évaluation perçue comme permettant de peser sur les contenus nous passons à un rappel à

l’ordre qui sonne comme un constat d’échec des tentatives d’évolution des pratiques au moyen de

l’évaluation, faute d’une adéquation sans faille entre l’objet évalué et le contenu enseigné. En EPS, les

enseignants évalueraient-ils autre chose que ce qu’ils enseignent ? Est-ce le propre d’une discipline

scolaire dans laquelle les apprentissages se réalisent au cours d’actions instrumentale ? Ou doit-

on penser autrement la relation ?

2. Contenus d’enseignement / apprentissage et évaluation : l’épreuve de la pratique.

Une superposition imparfaite

« Le présent programme… aide l’enseignant à identifier ce qui doit être évalué… Il ne résume pas…

tout ce qui est enseigné en EPS »8.

Nous voyons derrière cette recommandation une difficulté à penser une cohérence parfaite entre ce qui

est de l’ordre des contenus d’enseignement qui peuvent ou doivent être enseignés au regard des

finalités d’une discipline et ce qui est de l’ordre d’une cohérence programmatique et de son évaluation.

Cette superposition imparfaite se résout en tolérant que certains contenus, perçus comme essentiels,

ne soient pas « évalués ». Le programme autorise des ruptures de la relation contenus / évaluation.

L’évaluation révélatrice

A l’opposé, dans une étude déjà ancienne, Jacqueline Marsenach9 montre qu’en EPS, les contenus

d’enseignement, définis comme « les conditions à intérioriser qui permettent l’élaboration d’actions

nouvelles, elles mêmes corrélatives de transformation de l’activité corporelle »10

apparaissaient

essentiellement au moment de l’interaction entre l’enseignant et l’élève, quand l’enseignant régule la

prestation de l’élève et rarement dans la planification des scripts didactiques, ceux-ci étant plutôt

formulée en termes d’objectif comportementaux. Les contenus sont la face cachée de la performance

4 LEGRAND, Louis. Innovation et politiques éducatives. L'innovation en éducation et en formation. Dir CROS

Françoise, ADAMCZEWSKI Georges. Bruxelles: De Boeck, 1996, p 89-94. 5 FLEITZ T, 2003, Formation continue des enseignants d’EPS du second degré et processus d’innovation, Lille,

ANRT. 6 Prenons un exemple suffisamment caricatural pour nous faire bien comprendre. En sports collectifs, l’objet

d’enseignement porte sur l’équipe – construire une projet d’attaque par exemple - et l’élève est noté sur un

parcours chronométré en dribble. 7 Comment dans l’exemple ci dessus évaluer un collectif. Comment évaluer aussi une compétence ?

8 BO n° 29 18 juillet 1996 page 1968

9 MARSENACH, Jacqueline. Les pratiques pédagogiques des enseignants d'EPS. Tradition / Innovation. Thèse

de 3eme cycle. Sciences de l'éducation. Paris V: 1980. 10

MARSENACH, Jacqueline, MERAND, Robert. L’évaluation formative en EPS dans les collèges. Paris,

INRP, Rapports de recherches, 1987.

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observable. Ils correspondent à la lecture des processus perceptifs, cognitifs et moteurs qui produisent

la performance et c’est au cours des régulations didactiques « qu’émergent » les contenus réellement

enseignés. De ce point de vue, les régulations évaluatrices non seulement sont en lien avec les

contenus, mais ce sont elles qui les révèlent et les font émerger.

L’innovation scolaire aux risques de son évaluation11

Dans son ouvrage, Françoise Cros interroge l’évaluation des innovations. Dans l’innovation, la

distance au savoir, souvent, se creuse car « les innovateurs se placent sur le plan des valeurs et de la

forme qu’elles doivent prendre dans les apprentissages…» (Cros, 2004, p. 52) et donc moins sur les

apprentissages eux-mêmes.

Les difficultés à évaluer sont à rapporter aux multiples paramètres culturels, méthodologiques ou

organisationnels en jeu, mais aussi à des objectifs qui évoluent au fil de l’action ainsi qu’à une

évaluation qui « pour être pertinente doit être complexe et demandeuse de temps » (Cros, 2004, p. 69).

Face à cela l’innovateur sacrifie au pragmatisme des valeurs.

L’évaluation en contexte innovant ne peut qu’être particulière et comme le dit Françoise Cros « pour

évaluer l’innovation, il faut innover dans l’évaluation » (Cros, 2004, p. 200). Ce qui lie ici les contenus

d’enseignement aux pratiques d’évaluation, c’est la problématique de l’innovation.

Il faut surtout bien distinguer le contrôle de l’évaluation. Si l’évaluation au sens de « produire,

construire, créer un référent en même temps que s’y rapporter… (et qui) relève d’un travail

d’implication… » prend du sens dans un contexte innovant, le contrôle, qui « impose la précision,

l’objectivité » (Cros, 2004, p. 48), n’en a que peu. Avec des contenus innovants, l’enseignant va

devoir faire un choix : celui de l’objectivité, de l’analyse à distance ou celui de l’implication, du

processus.

L’évaluation sommative

On retrouve cette tension même dans le cadre d’une évaluation certificative comme celle du

baccalauréat. Bernard David12

qui s’interroge sur « l’équité et les arrangements évaluatifs » montre en

définitive une stratégie enseignante de « recherche de compromis entre le respect des caractéristiques

de l’APS pratiquée, la mise au point de repères compréhensible par les élèves et de modalités

d’évaluation faisables, et la traduction en vue d’une note à portée nationale dans le cadre du bac… ».

Dans le cadre de notre thèse nous nous sommes intéressés à la façon dont les enseignants d’EPS

mettaient en œuvre des « pratiques innovantes »13

suite à un stage de formation continue.

Nous avons abordé sommairement l’évaluation sommative de la pratique innovante et nous retrouvons

ce qui a été pointé par Françoise Cros. D’une manière générale, l'évaluation de la pratique innovante

est très imprécise et se fonde sur beaucoup de subjectivité. L’enseignant se fonde sur des impressions

pour dire que l'innovation a « marché » comme par exemple le transfert de la dynamique de classe créé

lors de l'innovation aux autres activités : « il y avait une ambiance, une, je ne sais pas, un état d'esprit

qui s'est installé », ou des élèves perçus comme « étant plus motivées…».

Mais d'autres enseignants évaluent davantage l'innovation par rapport au plaisir qu'ils ont eu à la

mettre en œuvre et à en assumer la réalisation. Le constat d'une évaluation imprécise, même s'il est à

nuancer, se retrouve massivement chez les enseignants qui en parlent.

En fait, les objets de l'évaluation se mélangent. Certains enseignants parlent d'eux-mêmes, d'autres de

notation, d'autres encore de l'innovation. Bref… c’est certainement moins les contenus et la précision

du contrôle qui importent que l’aventure vécue avec les élèves.

11

Titre de l’ouvrage. CROS Françoise. L’innovation scolaire aux risques de son évaluation. Paris : L’Harmattan,

2004, 210 p. 12

DAVID Bernard. La certification en EPS : équité et arrangements évaluatifs. Didactique de l’éducation

physique. Dir AMADE ESCOT Chantal : Editions revue EPS, 2003, p 279-306. 13

Dans notre travail de thèse nous avons parlé d’innovation. La notion de pratique innovante nous paraît

maintenant plus adaptée aux changements que nous avons étudiés, adhérant ainsi à une remarque faite par

Françoise Cros 2004 : « Certains enseignants peuvent avoir une pratique innovante sans que cette dernière soit

pour autant désigné comme une innovation ! Alors qu’est ce qui fait la différence ? Elle tient dans l’inscription

institutionnelle stratégique des innovateurs et de ceux qui les désignent. » (Cros, 2004, p. 25)

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La relation du contenu d’enseignement / apprentissage à son évaluation se complexifie. L’impossible

coïncidence entre une logique programmatique et les contenus perçus comme essentiels autorise une

rupture officielle. Certains contenus ne répondraient pas à la norme de l’évaluation. A contrario,

l’étude de l’enseignant en phase d’interaction semble montrer que c’est au travers de l’évaluation

régulatrice que les contenus réellement « enseignés » en EPS émergent.

Impossible cohérence, osmose ou lieux d’études différents ?

En contexte innovant, le contrôle se trouve décrié, sauf à lui trouver un nouveau sens qui participe

pleinement au processus d’innovation. D’instrumentale, la relation devient impliquante. Peut-on

encore parler de lien ? Ne doit-on pas plutôt y voir un complexe dynamique « contenu / évaluation »

au service d’un objectif qui tire l’ensemble du processus d’enseignement. Cette hypothèse semble se

vérifier lors de l’évaluation certificative au baccalauréat avec les « arrangements évaluatifs ».

C’est cette idée de dynamique « contenu / évaluation au service d’un objectif » que nous allons

approfondir en observant, toujours le champ des pratiques innovantes, la co-construction des contenus

et du repérage didactique.

3. Evaluation et contenus d’enseignement dans un contexte de pratique innovante

Nous avons développé, dans le cadre de notre thèse la façon dont l’enseignant organisait le repérage

pour faire avancer l’enseignement dans le champ des pratiques innovantes. Comment et sur quels

indices l’enseignant construit et avance dans son enseignement, à partir de contenus qu’il ne maîtrise

pas, qui sont à la fois incertains et en devenir et ce qu’il attend des « moments » d’évaluation ?

La prise en compte des réponses des élèves face à un contenu d’enseignement est consubstantielle de

l'enseignement. Mais les travaux effectués sur ce sujet montrent que l'enseignant a tendance à

« bousculer »14

le temps d'apprentissage afin de gagner du temps. L'enseignant s'attarde aussi moins

sur la réponse effective des élèves en situation d'apprentissage que sur ce qu'il désire obtenir. Ce qui le

conduit parfois à proposer la réponse avant que l'élève ne l'ait véritablement trouvée ou même, faute

de réponse de l'élève, à l’induire (effet « Topaze »15

, questionnements fermés) voire à la donner.

Dans une pratique innovante en EPS, l'enseignant a une idée précise de ce qu’il veut obtenir à la fin de

la période d’enseignement. Il sait aussi comment débuter le cycle d’enseignement car cela a été

abordé en formation continue. De plus, comme pour tout début de cycle d’enseignement, la nouveauté

provoque en général l’adhésion des élèves.

Entre le début et la fin du cycle d’enseignement, l’enseignant louvoie car il lui manque l’élément

principal qui est le panel de réponses adaptatives des élèves. Pour poursuivre son enseignement

pendant cette phase aux contenus et repères incertains, plusieurs stratégies sont possibles :

L’évaluation s’impose aux contenus : la procédure d'abandon

Certains abandonnent le contenu proposé parce qu'il ne leur parait pas essentiel. Ces enseignants

passent à autre chose. Cette procédure d'abandon n'est pas appliquée de façon systématique mais

surtout quand l’enseignant, doutant de la pertinence du contenu enseigné en situation de pratique

innovante, maintien la relation didactique en abandonnant le savoir.

Les contenus s’imposent à l’évaluation : le « passage en force »

Ce n’est pas non plus la stratégie la plus employée et cela est perçu par l’enseignant comme un pis

aller. Certains enseignants innovants nous disent poursuivre leur planification, malgré le manque

d’intérêt des élèves et faute de contenu de rechange. Ils n'arrivent plus à s'adapter "à chaud". Nous

14

Expression tirée de "Didactique de L'EPS", page 121. AMADE ESCOT Chantal, MARSENACH Jacqueline.

Didactique de L'EPS. INRP, La pensée sauvage, 1995, 178 p. 15

Topaze, dicte en se promenant. « Des moutons… Des moutons… étaient en sûreté… dans un parc; dans un

parc. (Il se penche sur l'épaule de l'Elève et reprend.) Des moutons… moutonss… (L'Elève le regarde ahuri.)

Voyons, mon enfant, faites un effort. Je dis moutonsse. Etaient (il reprend avec finesse) étai-eunnt. C'est à dire

qu'il n'y avait pas qu'un moutonne. Il y avait plusieurs moutonsse ». PAGNOL, Marcel. Topaze.

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sommes ici dans l'urgence de l'interaction. L’adaptation du contenu ne s’articule plus sur l’évaluation

des réponses des élèves. Le contenu et l’évaluation deviennent en quelque sorte indépendants.

L’évaluation permet d’extraire le contenu

En phase innovante, l’enseignant manque de repères. Il met alors en scène une situation en jouant sur

l'aspect motivationnel. Puis il observe, questionne, repère les réponses qui lui semblent prometteuses

et tire de ces réponses des informations sur ce qu'il doit faire. L’important c’est «qu'il y ait échange»

et l’enseignant compte « réellement » sur les élèves pour poursuivre dans une direction ou une autre.

L'enseignement n'est plus un contenu passe-partout, prédéterminé, sinon au début du cycle mais un

construit qui avance en se faisant. L'enseignant se donne les moyens de repérer les réponses qui vont

alimenter les contenus et contribuer à faire avancer l’enseignement.. Alors l’enseignant devient en

mesure d’ajuster. Le contenu s’articule à l’évaluation qui devient un moyen d’extraire les contenus

prometteurs.

L’articulation évaluation / contenus dans une co-construction de l’enseignement

Parfois, l'enseignant s'étonne de découvrir que les élèves hiérarchisent les difficultés différemment de

ce qu'il pensait « j’ai été surpris par les réponses, parce qu'il y a des choses que je pensais plus faciles

et que les élèves ont trouvé difficiles... ». Cela conduit l’enseignant à se construire « un catalogue des

difficultés par rapport aux problèmes que les élèves ont eus » et a chercher à comprendre l’origine de

ceux-ci. L’enseignant co-construit les contenus et les repères avec les élèves.

Conclusion

L’interrogation sur la relation entre évaluation et contenus de l’enseignement / apprentissage a le

mérite de questionner ce qui semble aller de soi : ce qui est enseigné est-il évalué et ce qui et évalué

est-il enseigné ? Loin des évidences, l’observation de cette relation nous a montré des rapports

complexes.

D’un coté, le pilotage par l’évaluation repose sur l’idée d’un lien fort avec les contenus

d’enseignement / apprentissage, de l’autre le lien peut aller jusqu’à paraître inexistant ou exerçant

d’autres fonctions que la stricte relation au savoir (comme celle par exemple de réguler la « relation

pédagogique » en tenant le savoir à distance).

Pour comprendre cette complexité, il faut se rapprocher du sens que les acteurs investissent dans les

deux termes de cette relation, sens qui d’ailleurs peut évoluer selon les phases la pratique enseignante

(phase d’enseignement / apprentissage ou phase de notation), selon le sentiment d’équité mais aussi

selon la nature des pratiques. De ce point de vue, les innovations nous sont apparues comme

intéressantes pour approcher la vision des acteurs.

Nous trouvons une évaluation à distance d’une évaluation « contrôle » et parfois aussi à distance des

contenus eux-même au profit des valeurs ou de l’aventure vécue.

Mais dans le cas des pratiques innovantes en EPS, l’articulation aux contenus reprend le dessus.

La relation contenu « d’enseignement / apprentissage – évaluation » peut alors être perçue comme un

garde-fou. En pointant des écarts que l’enseignant n’a pas les moyens de réduire l’évaluation conduit à

l’abandon de ceux-ci ou au passage en force.

Souvent, elle devient un maillon indispensable en permettant « l’émergence » du contenu. La

proposition innovante s’inscrit alors dans la réalité du débat didactique entre l’enseignant, l’élève et le

contenu « envisagé ».

Nous avons même observé que, non seulement l’évaluation participe au balisage du contenu, mais plus

encore qu’elle participe à sa définition. Le contenu et son évaluation font partie d’un même processus

de « co-construction » des « contenus / évaluation ».

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On peut donc faire l’hypothèse d’une construction simultanée par l’enseignant des contenus

d’enseignement et de normes de référence lui permettant de construire et de baliser le parcours

didactique.

Pour rendre compte du caractère indissociable de la relation entre l’enseignement et l’apprentissage,

pour atténuer aussi les débats de frontières, le couple « enseignement / apprentissage » est apparu. Ne

devons nous pas l’élargir au triptyque « enseignement / apprentissage / évaluation » ?

Bibliographie

AMADE ESCOT Chantal, MARSENACH Jacqueline. Didactique de L'EPS. INRP, La pensée

sauvage, 1995, 178 p.

BRAU-ANTONY Stéphane. Caractéristiques des situations didactiques proposées par les enseignants

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CROS Françoise. L’innovation scolaire aux risques de son évaluation. Paris : L’Harmattan, 2004, 210

p.

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DE KETELE Jean-Marie, ROEGIERS Xavier. Méthodologie du recueil d’informations. Paris: De

Boeck, 3eme Edition, 1996, 230 p.

FLEITZ T, 2003, Formation continue des enseignants d’EPS du second degré et processus

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LEGRAND, Louis. Innovation et politiques éducatives. L'innovation en éducation et en formation. Dir

CROS Françoise, ADAMCZEWSKI Georges. Bruxelles: De Boeck, 1996, p 89-94.

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MARSENACH, Jacqueline, MERAND, Robert. L’évaluation formative en EPS dans les collèges.

Paris, INRP, Rapports de recherches, 1987.

MARSENACH, Jacqueline. Les pratiques pédagogiques des enseignants d'EPS. Tradition /

Innovation. Thèse de 3eme cycle. Sciences de l'éducation. Paris V: 1980.