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< PAGE 11 >
LALLOCATION DES RISQUES DANS LES CONTRATS : DE LECONOMIE DES CONTRATS INCOMPLETS A LA PRATIQUE DES CONTRATS ADMINISTRATIFS 1
Thierry Kirat
Charg de recherche au CNRS IDHE, Ecole normale suprieure de Cachan
Revue internationale de droit conomique n1, 2003, pp. 11-46.
1. Le contrat de leconomiste et son environnement institutionnel : len-soi du contrat et la vacuite du droit et du juge........3
1.1. Contrats et institutions : lontologie du contrat et lextriorit des institutions...................................................................3
1.2. Le problme de lincompltude : les limites du grand cart entre des bons contrats et de mauvaises institutions .......4
2. De lincompltude limprvision ? ......................................................................................................................................5
2.1. Lincompltude comme outil danalyse conomique : lconomie des Default Rules ....................................................6
2.2. Lincompltude : de la ncessit de traduire une catgorie conomique en dispositifs juridiques......................................7
2.3. Incompltude et imprvision : de faux amis ?.....................................................................................................................9
3. Comment traduire juridiquement et empiriquement le probleme de lincertitude du futur? ..................................................... 11
3.1. Incompltude informationnelle et compltude juridique .................................................................................................. 11
3.2. Les dispositifs du droit priv............................................................................................................................................. 12
3.3. Limprvision en droit des contrats administratifs : une tude empirique ........................................................................ 14
4. La dtermination du prix et lallocation des risques dans des contrats incomplets................................................................ 20
4.1.La dterminabilit du prix.................................................................................................................................................. 22
4.2. La dtermination du prix de rglement ............................................................................................................................. 22
4.3. La jurisprudence administrative........................................................................................................................................ 25
Conclusion .................................................................................................................................................................................... 26
Rfrences..................................................................................................................................................................................... 27
Liste des arrts du conseil detat et des cours administratives dappel.......................................................................................... 29
1 Je remercie vivement Horatia Muir-Watt, EvelyneServerin et Laurent Vidal pour leurs commentaires qui ont accompagn
llaboration de ce texte.
2
< page 12 >
Lallocation des risques inhrents lexcution dobligations dans des accords dont la
temporalit est longue est une question importante, notamment pour lconomie. Or, cet gard, il est
significatif de constater que les entres consacres au droit administratif dans lEncyclopedia of Law
and Economics ne font pas mention des contrats administratifs, et que les entres relatives au droit des
contrats ne renvoient jamais au droit administratif. On ne peut que signaler, ce propos, loriginalit de
louvrage de microconomie des marchs publics et de la rglementation de J.-J Laffont et J. Tirole
(1993). Quelles conclusions tirer de ce constat ? De notre point de vue, deux hypothses peuvent tre
avances : soit les conomistes se dsintressent des contrats administratifs, soit ils les intgrent
implicitement dans le mme moule que les contrats de droit priv. Nous estimons que la deuxime
hypothse est la plus plausible, et nous souhaitons lexplorer ici en rflchissant sur le fait de savoir si
le droit positif des contrats privs et administratifs rend possible lapplication de mmes catgories
danalyse en matire dallocation des risques. Cette question appelera naturellement une rflexion sur
la signification et la porte empirique de la notion conomique dincompltude des contrats.
Il est bien vident que lallocation contractuelle des risques a des consquences importantes sur
lefficacit dun contrat ; elle est intimement lie aux incitations des co-contractants allouer des
ressources, procder des investissements dans une relation, ainsi qu la capacit respective des
parties assumer des risques (Trianis, 2000, p. 100). Cette question, considre dun point de vue
normatif, dbouche sur des recommandations en termes dallocation des risques, ou en termes de
pertinence des diffrents procds juridiques applicables en cas de survenance dun risque non
prvisible ou dinexcution du contrat par une des parties 2. La position commune nombre
dconomistes du contrat, qui consiste penser que lincompltude fait chapper le contrat
lemprise de solutions juridiques et le fait entrer dans la sphre de la rgulation prive nous parat
devoir tre dpasse par une analyse empirique du fonctionnement des dispositifs juridiques qui se
rapportent lexcution des contrats. 3
Nous procderons ici une brve tude positive et comparative du problme de lallocation des
risques dans les contrats administratifs, en droit franais et en droit des Etats-Unis. Cette tude sera
prcde dune mise en scne, assortie dune discussion critique, de la manire dont la thorie
conomique des contrats se saisit de leur contexte juridique ; lenjeu est de penser les contrats comme
des formes dchange conomique juridicises, plutt que comme des processus ontologiques
< page 13 > (1.). Nous procderons alors une prsentation critique de lconomie de lincompltude des
contrats, puisque les risques sont rputs dautant plus grands que les contrats sloignent du canon
idal de la compltude ; nous examinerons les prolongements de ces analyses conomiques sur la
dfinition du rle et des fonctions des variables juridiques (2.). Nous raliserons alors une premire
tude positive, consacre lallocation des risques dans les contrats privs et administratifs, en testant
2 Et ce en dpit dune curieuse jurisprudence du Conseil dEtat qui sest employe trouver dans le risque le critre de la
distinction entre dlgations de service public et marchs publics, les premires tant associes la prsence dun risque
financier induit par la rmunration du titulaire lie aux rsultats de lexploitation. Si ce critre est discriminant, on ne peut
que logiquement conclure que les marchs publics sont exempts de risque sur ce point, voir L. Vidal (1999).
3 Cette position est trs prgnante dans le courant dit de la thorie des cots de transaction. Pour une prsentation critique,
voir Bazzoli et Kirat (2003). La question de lanalyse empirique du droit des contrats est vigoureusement pose par
Korobkin (2001).
3
la pertinence des analyses conomique (3.), avant de procder de mme avec les conditions de
dtermination des prix (4.).
1. LE CONTRAT DE LECONOMISTE ET SON ENVIRONNEMENT INSTITUTIONNEL : LEN-SOI DU CONTRAT ET LA VACUITE DU DROIT ET DU JUGE
La littrature est plthorique en conomie des contrats et du droit des contrats, sur le continent
nord-amricain ; elle est importe peu de frais en France par des conomistes des contrats, sensibles
la question de lontologie de laccord contractuel et la vacuit du droit dans ses interfrences nuisibles
avec elle. Elle est aussi pleinement envahie et structure par lide que les contrats du monde rel sont
des contrats incomplets.
1.1. Contrats et institutions : lontologie du contrat et lextriorit des institutions
En dpit de ses affirmations relatives au fait quelle prend pour objet pertinent le cadre
institutionnel des contrats, la thorie conomique persiste considrer ce dernier comme extrieur aux
contrats, ce quillustrent les intituls du tableau suivant (tableau 1). La cl dentre dans ltude des
contextes institutionnels des relations contractuelles demeure strictement confine dans les termes de
lanalyse micro-conomique, partant des caractristiques des accords bilatraux inter-individuels pour
procder la construction de modles danalyse des institutions. Cette mthode de construction en
creux des contextes institutionnels des contrats peut tre discute, et remise sur ses deux jambes en
considrant les caractristiques des relations contractuelles comme des produits de dispositifs
institutionnels.
Nanmoins, lhonntet commande de reconnatre lincursion de certains conomistes dans des
analyses qui procdent dune entre par les institutions dans lanalyse des contrats. En particulier,
Schwartz (2000) cherche situer les dispositifs institutionnels comme des dispositifs structurants de la
pertinence de certaines rgles du droit des contrats ; Mnard (2001) tente de mettre en vidence les
correspondances entre les discours du droit et de lconomie sur la dtermination du prix dans les < page 14 >
TABLEAU 1 - UNE SCHEMATISATION DES DIFFERENTES APPROCHES ECONOMIQUES DES CONTRATS ET DU
ROLE DES CADRES INSTITUTIONNELS
Thorie Information des
contractants
Institutions extrieures* aux
contractants Thorie walrasienne Complte et symtrique Parfaites (garantissant labsence
de dviations par rapport aux
plans annoncs)
Thorie des incitations Complte et asymtrique Parfaites (garantissant
lexcution des engagements)
Thorie des contrats
incomplets
Complte et symtrique Imparfaites (incapables de
vrifier certaines variables)
Thorie des cots de
transaction
Incomplte et asymtrique Trs imparfaites (incapables de
vrifier certaines variables et
soumises la rationalit limite)
* nous soulignons
Source : daprs E. Brousseau et J.-M. Glachant, Economie des contrats et renouvellement de lanalyse conomique,
Revue dconomie industrielle, n92, 2 et 3 trimestre 2000, p. 34.
4
contrats de longue dure ; Brousseau (2001) semploie tablir les avantages compars des dispositifs
juridiques amricains et franais de modification des clauses contractuelles en cours dexcution.
Nanmoins, nous estimons que ces travaux, du moins ceux des deux derniers auteurs cits, persistent
penser que la qualit des contrats trouve sa source exclusivement dans le registre de laccord inter-
individuel, et que lintervention des institutions juridiques (en particulier du juge) relve dune
interfrence souvent inopportune avec les prfrences et les engagements des parties. Ces thses
peuvent tre explicites en rfrence la question de lincompltude des contrats.
1.2. Le problme de lincompltude : les limites du grand cart entre des bons contrats et
de mauvaises institutions
Sans embrasser lensemble des thories conomiques des contrats, sa version no-
institutionnaliste (dite aussi Thorie des cots de transaction- TCT) fait usage dune notion de contrats
incomplets en situation dincertitude radicale et de rationalit limite des agents et des institutions. Elle
pose, ainsi, que la qualit des relations contractuelles est doublement contrainte : dune part, par
lincompltude des accords conclus entre les parties et, dautre part, par des dfaillances
institutionnelles. Ces dernires dcoulent du fait que les institutions charges de rendre les contrats
excutoires sont, elles aussi, victimes dune information imparfaite et dune < page 15 > rationalit limite : les juges ne peuvent rendre excutoires des clauses portant sur des variables non vrifiables.
De plus, ils peuvent prendre beaucoup de temps avant darrter des dcisions, refuser de se
prononcer, faire des erreurs, etc. . Ainsi, Lexcution des contrats nest pas parfaitement garantie
par des mcanismes externes (Brousseau et Glachant, 2000, p. 32).
La particularit de la TCT est quelle laccent sur les relations contractuelles qui exigent, en
amont, la formation dactifs spcifiques, gnrateurs de possibles comportements de hold-up par la
partie non dtentrice de ces actifs non redployables. La possibilit de comportements opportunistes
ncessite alors le recours des mcanismes de protection et de rengociation des contrats en cours
dexcution. Dans ce cadre danalyse, lincompltude contractuelle nest pas considre comme une
pathologie des contrats, mais comme ouvrant la voie, sous certaines garanties, une flexibilit des
accords, surtout lorsquils sont de longue dure. La qualit de lajustement des contrats est alors
renvoye, non pas la justice institutionnelle (incapable de vrifier des variables non vrifiables),
mais des lments du cadre institutionnel aptes crdibiliser les sanctions garantissant lexcution
des engagements contractuels, savoir la rputation des firmes, les systmes de rgulation interne de
certaines professions, etc. Tout se passe, ainsi, comme si le traitement contentieux devant les tribunaux
et linterprtation judiciaire des contrats litigieux taient hors du domaine des procds efficaces
dajustement des accords dans le temps.
Laissant au lecteur le soin dapprcier le caractre pathogne du monde du droit et des
tribunaux en matire de vie des contrats 4, il importe maintenant dintroduire une premire discussion
de la notion, vritable cl-de-voute de la thorie conomique, dincompltude. A cet gard, Ayres
(1998) tablit une utile distinction entre deux acceptions de lincompltude des contrats :
4 Dont une dmonstration est faite dans Fars et Saussier (2002).
5
a) Dans le discours des juristes amricains et des tenants de lconomie du droit,
lincompltude est dfinie en termes dobligations. Cette notion est utilise pour qualifier
des contrats dans lesquels les obligations ne sont pas parfaitement spcifies, et ncessitent
un travail juridique de gap-filling. De notre point de vue, ce nest l quune manire
dexprimer le fait que les contrats se caractrisent par une texture ouverte, qui est une des
conditions essentielles permettant aux accords gnrateurs dobligations de fonctionner
(Serverin, 1996). Cependant, lide que des contrats incomplets sont des contrats dans
lesquels les obligations ne sont pas parfaitement spcifies est, en tant que telle,
irrecevable : la question pertinente en termes juridiques est de dterminer si des obligations
valides au regard du droit existent, ou non, dans un contrat. A dfaut dobligations valides,
cest--dire en labsence dobligations spcifies, le contrat est annulable (par exemple sil
ne prvoit pas dobligations relatives au prix, au calendrier de livraison, etc.) ; toutefois, il
nest pas admissible de considrer les obligations < page 16 > dans les termes dans lesquels les conomistes les conoivent, cest--dire sur un modle algorithmique, qui prvoierait,
la manire dun programme informatique, que si ltat x du monde survient, alors
lobligation x simpose.
b) Lorsquelle est utilise par les conomistes, hors de la Law and Economics, lincompltude
est dfinie dans des termes indiffrents la nature des obligations : dans une acception
strictement conomique, lincompltude est relative au fait que des accords conclus ex ante
ne peuvent prvoir tous les tats du monde futurs possibles, et y associer des clauses de
comportement certaines. Lincompltude se dfinit alors a contrario des contrats complets :
serait incomplet un contrat qui nest pas complet. Or, le concept de contrat complet
dsigne un systme dchange construit en thorie, pour qualifier le modle walrasien de
march, dans lequel les changes et les ajustements de loffre et de la demande au prix
dquilibre sont instantans. Ainsi, logiquement, les contrats empiriquement pratiqus sont
forcment incomplets du fait que le monde rel nest pas walrasien ; dans ce cadre, les
conomistes sortent les contrats incomplets du monde du droit, pour les placer dans celui
des rgulations qui, comme celles qui ont t plaques aux contrats relationnels, font appel
des procds non juridiques dajustement des prestations (tels la rputation des parties, les
usages professionnels, etc.).
Il nest pas dans notre propos de faire une exgse des diffrentes acceptions de lincompltude
des contrats 5; nous concentrons notre attention sur la porte de lusage de lincompltude par les
conomistes qui se penchent sur le droit des contrats. En dautres termes, nous souhaitons clarifier les
conclusions juridiques auxquelles conduisent les analyses des contrats incomplets.
2. DE LINCOMPLETUDE A LIMPREVISION ?
C. Mnard en estimant que Pour le juriste des contrats, lincertitude a pour nom
imprvision (2001, p. 12), pose que lincompltude des contrats, en particulier de longue dure,
relve dans la sphre juridique de la notion dimprvision. Ce jugement est dun grand intrt, aussi je
5 Nous renvoyons le lecteur un article trs intressant que Eric Posner a consacr la question en 2002.
6
vais my arrter, en laissant de ct les autres catgories juridiques qui pourraient tre associes la
question de lincompltude (comme la force majeure, les sujtions imprvues, ou, en droit des Etats-
Unis, limpossibility of performance, la parole evidence rule, etc.).
< page 17 >
2.1. Lincompltude comme outil danalyse conomique : lconomie des Default Rules
Dans la Law and Economics du droit des contrats, lincompltude a fait lobjet de nombreuses
tudes, souvent ralises par des juristes, qui mettent laccent sur les dispositifs juridiques qui ont pour
fonction de permettre aux parties contractantes de grer lincompltude des contrats. Parmi ces
dispositifs, le plus important est celui des rgles suppltives (Default Rules) qui dfinissent les
obligations des parties en labsence daccord explicite sur des rgles contraires (Craswell, 2000, p.1).
Cette notion est suffisamment floue pour quelle mrite quon sy attarde. Elle figure rarement
dans les ouvrages de Contract Law des Etats-Unis, ce qui signifie quelle nest pas une catgorie du
droit positif amricain, dautant plus quelle est absente des Restatements of Contracts ; elle nest pas
voque dans le Contracts de Calamari et Perillo (1999), et ne figure que dans une note infrapaginale
du Contracts, Cases and Materials de Farnsworth et Young (1995). Seuls Rhower et Skroki traitent
explicitement de cette notion dans le chapitre consacr linterprtation des contrats de leur Contracts
(2000). Ces deux auteurs les dfinissent dans les termes suivants : il existe des clauses
contractuelles que le droit impose simplement du fait que les parties ne les ont pas tablies. Ces clauses
sont appelles default rules (appliques seulement par dfaut lorsque les intentions des parties ne
peuvent pas tre trouves dans leur accord), ou gap fillers (Rohwer et Skroki, 2000, p. 261).
Les Default Rules sont intimement lies linterprtation judiciaire des contrats ; en droit
franais, elles dsignent donc les rgles applicables dans les silences du contrat, en rfrence au rgime
lgal qui simpose dfaut de clause contractuelle contraire ; en droit des Etats-Unis, elles salimentent
plusieurs sources : la reconstruction, par le juge, de ce quauraient prvu les parties si elles avaient
pris la peine de sentendre, les usages professionnels, et lquivalent de notre rgime lgal, tel que
lexpriment les Restatements of Contracts et lUniform Commercial Code.
Un certain nombre de travaux dconomistes et de juristes ont t raliss sur les effets des
rgles suppltives sur la rduction, ou la gestion de lincompltude dans les contrats privs. Le
problme pos est celui de ltablissement daccords contractuels aussi complets que possibles, compte
tenu du fait que les cots de ngociation sont dautant plus levs que les parties laborent des contrats
prcis : lefficacit de la ngociation est conditionne par le rapport entre le cot de la ngociation et
les gains esprs de lactivation des clauses labores, compte tenu du rapport des parties au risque et
de la probabilit de survenance dun vnement dont les consquences sur le contrat ne sont pas
prvues ex ante.
Sans rsumer ces analyses dans le dtail, une thse mrite attention : le juge est un acteur qui incite
llaboration de contrats prcis. En effet, lanticipation dune sanction, par le juge, des contrats qui nen
remettent trop largement au rgime suppltif, est en effet un moyen dinciter les parties laborer des
clauses prcises. Pour deux conomistes qui font rfrence en la matire, Ayres et Gertner (1989), les
cots de < page 18 > transaction qui affectent les accords contractuels sont une source dterminante de
7
leur incompltude 6. Or, lincompltude peut conduire les contrats devant le juge judiciaire ; tout se
passe comme si les carences des parties dans llaboration de leur accord contractuel revenaient
transfrer ex post au juge judiciaire la charge de l'amlioration du contenu de l'accord, alors quelle
aurait pu tre assure ex ante si les parties avaient pris la peine de ngocier srieusement. La solution
retenue par Ayres et Gertner est que le tribunal pnalise, sous la forme de pnalits de dfaut, les
parties entre lesquelles nat un contentieux qui aurait pu tre prvenu ex ante par une laboration plus
complte des clauses du contrat. La perspective de cette pnalit inciterait la ngociation, mais elle
aurait une vertu supplmentaire : elle inciterait la divulgation ex ante d'informations lors de la
conclusion de l'accord, de la part de la partie la mieux informe, qui aurait pu tre tente de tirer un
avantage ind de la transaction grce au flou des clauses du contrat.
Par ailleurs, lobjet juridique tangible auquel se rapporte la littrature brivement voque ci-
dessus est linterprtation judiciaire des contrats dans lesquels un dsaccord sur les obligations des co-
contractants ncessite un acte dinterprtation, soit sur lexistence dune obligation, soit sur son
contenu. En tout tat de cause, il est raisonnable de penser quil nexiste pas de compltude ou
dincompltude en soi, mais des contextes de discussion des obligations par des parties en situation,
lune delles prenant prtexte de labsence daccord exprs ou de la prsence dambiguts dune clause
pour se dfaire dune obligation ou des consquences de sa non-excution. De ce point de vue, on peut
approuver lide de Cohen que dans une certaine mesure, toute dispute contractuelle implique des
questions dinterprtation et de clauses implicites. (Cohen, 2001 p. 79).
2.2. Lincompltude : de la ncessit de traduire une catgorie conomique en dispositifs
juridiques
Certains juristes estiment que lincompltude, et son double quest la compltude, sont des
notions qui posent davantage de problmes quelles ne permettent den rsoudre (par ex. Cohen, 2001 ;
Muir-Watt, 1999) 7.
Que signifie, en pratique, lincompltude dans la traduction et la mise en forme quen donnent
le droit ? Du fait que la notion de compltude ou dincompltude ne sont pas des catgories juridiques,
il convient de traduire, dans le langage des dispositifs, les supports de la gestion, en droit, de plusieurs
sries de proprits :
< page 19 >
- les asymtries informationnelles ex ante entre co-contractants. En ce sens, lincompltude
exprime lexistence dun rapport dsquilibr autres les parties au contrat, lune bnficiant
dune information prive dont elle peut tirer un avantage indu par un comportement
opportuniste. Le droit des obligations offre des ressources pour que les parties rduisent a
priori la probabilit dune utilisation opportuniste de linformation prive, que ce soit par
6 Pour une analyse critique, voir Horatia Muir-Watt, Du contrat relationnel . Rponse Franois Ost, in : Association
Henri Capitant des amis de la culture juridique franaise, La relativit du contrat, LGDJ, 1999, pp. 169-179.
7 G. Cohen estime que : Lanalyse conomique du droit des contrats a tendu prendre comme point de dpart le concept
idalis de contrat complet, en dpit du fait que cette notion a vraisemblablement engendr davantage de confusion que de
clart. (Cohen, 2001, p. 79).
8
lobligation faite aux parties de sen tenir la bonne foi (ou la loyaut), par la sanction du
dol, ou par les effets information-forcing de certaines rgles dajustement des
obligations en cours dexcution. Ainsi, dans ce dernier cas, imaginons quune disposition
lgale de droit commun ne prvoie pas dindemnisation de lacheteur victime de
linexcution de son co-contractant ; lacheteur peut tre victime dune rupture abusive, non
efficace (au sens o le gain de la rupture est infrieur au cot support par lacheteur) et la
conclusion du contrat est entche par une mauvaise connaissance du type de vendeur
qui lacheteur pense confier un contrat (par exemple : sa propension ne pas respecter ses
obligations et rompre le contrat). La rvlation du type peut tre assure lorsque
lacheteur propose des clauses contractuelles de rparation du dommage quinduirait une
rupture unilatrale du contrat par le vendeur, dont le montant peut par itration successive
au cours de la ngociation tre une approximation fiable du gain de linexcution : ainsi, la
ngociation est information forcing dans la mesure o elle force le vendeur rvler les
caractristiques de son type.
- la connaissance imparfaite des tats du monde futurs est aussi une modalit dexpression de
lincompltude. Cette connaissance imparfaite porte, non pas sur le comportement futur du
co-contractant, mais sur des variables extrieures la relation entre les parties (le prix des
matires premires, des entrants, de lnergie, la fiabilit des fournisseurs, etc). Ces
ventualits ne sont pas sans tre trangres au monde du droit ; ainsi, le code civil franais
connat les obligations conditionnelles (art. 1181), le droit des contrats administratifs, les
formules de prix rvisable, etc. et la jurisprudence, civile comme administrative, dgagent
des rgles dinterprtation des obligations en prsence dune modification de
lenvironnement conomique dont la partie qui cherche se dsengager dune obligation
allgue lexistence.
- enfin, lincompltude peut tre un produit mixant des lments extrieurs et objectifs et des
lments intrieurs et subjectifs, cest--dire limprvisibilit des contingences de
lenvironnement et une connaissance imparfaite du comportement du co-contractant en
cours dexcution. L encore, ces situations ne sont pas trangres au monde du droit, qui
leur applique les procds de traitement voqus dans les deux premiers cas tudis (les
standards de bonne foi, les techniques de rvision et de redtermination des obligations, et
linterprtation judiciaire des obligations).
En dfinitive, lincompltude pose deux grandes sries de questions qui peuvent tre traites du
point de vue, non du monde abstrait de la thorie conomique formelle, mais du droit positif des
obligations :
< page 20 >
a) serait complet un contrat qui ne pose pas de problme dinterprtation et nimplique pas la
mise en uvre de rgles supposes crites. Dans ces conditions, force serait dadmettre que
les contrats non litigieux sont des contrats complets, et que lincompltude nest pas une
proprit en soi des contrats, mais lexpression de la contestation dune obligation qui lui est
prte par une partie.
b) Si on admet que lincompltude pose le problme de la viabilit du maintien dune
obligation alors que lenvironnement du contrat ou les conditions de son excution ont t
9
altrs depuis sa conclusion, alors il faut sintresser aux procds juridiques qui organisent
le traitement de ces cas de figure : dune part, les conditions suspensives de lobligation
(force majeure, impossibility, excuse, mutual mistake, commercial impracticability) et,
dautre part, les dispositions relatives aux consquences (notamment financires) de
linexcution de lobligation. En dautres termes, si lon admet que lincompltude pose le
problme de lajustement de lconomie du contrat aux vnements non prvus survenant
en cours dexcution, alors il serait judicieux que les conomistes sintressent aux
obligations conditionnelles et aux rgles positives relatives la rengociation des accords,
en termes de prix, de dlais, et de quantits 8.
2.3. Incompltude et imprvision : de faux amis ?
Certains conomistes franais concluent, trop rapidement notre sens, que la common law a des
vertus que le droit civil franais na pas quant la souplesse des ajustements des contrats en cours
dexcution, dans un environnement toujours changeant. Ainsi, Brousseau (2001) expose que la
rengociation des contrats serait considre comme une source defficience dans la common law des
Etats-Unis ; la notion dincompltude des contrats serait reue dans le systme judiciaire amricain
comme exprimant une forme normale des relations contractuelles, ouvrant la voie la mise en uvre
de clauses de rengociations, de clauses dajustement et linterprtation judiciaire des contrats. A
contrario, selon cet auteur, le droit franais des contrats serait hostile lincompltude des contrats,
leur rengociation, et linterprtation judiciaire :
- les contrats sont supposs tre assez complets, au sens o ils doivent tablir des
obligations de manire dtaille lorsque les rgles suppltives gnrales ne sappliquent pas
(Brousseau, 2001, p. 86) ;
< page 21 >
- les tribunaux franais sont plus rticents que les tribunaux amricains autoriser les
parties co-contractantes rengocier leurs engagements (ibid., p. 84).
Cet auteur ajoute que jusquau milieu des annes 1980, les contrats incomplets taient
considrs comme juridiquement nuls , et prend appui sur lexemple des contrats de distribution
long terme dans lesquels les prix ntaient pas tablis. Cette assimilation de lincompltude et de
labsence de prix introduit une confusion entre une caractristique de la relation (lincertitude et
labsence de probabilisation des vnements futurs) et une source de nullit du contrat (labsence de
prix). Ainsi, le droit amricain des contrats et le droit franais des obligations illustreraient des
mcanismes spcifiques de construction juridique du monde : le premier serait le domaine des contrats
incomplets, ouvrant la voie la possibilit de rengociations ex post des engagements pris ex ante, et
8 De ce point de vue, il faut signaler le dveloppement de travaux qui, en droit priv, vont dans ce sens, notamment au
regard de lexpansion des contrats dits relationnels : H. Bouthinon-Dumas, Les contrats relationnels et la thorie de
limprvision, RIDE, n3, 2001 et Horatia Muir Watt, Analyse conomique et perspective solidariste, 2001, paratre.
En droit public, on considrera avec attention la thse de doctorat que Laurent Vidal consacre lquilibre financier du
contrat administratif, et qui en tudie les fondements travers le double prisme de la jurisprudence du Conseil dEtat et des
cahiers des clauses administratives gnrales (thse soutenir en janvier 2003 sous la direction de Mme Brchon-Moulnes
lUniversit de Paris I).
10
donnant ainsi lieu une flexibilit des contrats ; le deuxime serait du domaine des contrats complets,
forant lexcution ex post des engagements tels quils ont t formuls ex ante, tablissant alors une
crdibilit des engagements au prix, cependant, dune rigidit des contrats (Brousseau, 2001, p. 84).
Sans nous attarder sur cet auteur, nous estimons que lincompltude doit tre, simplement,
considre comme lexpression dune texture ouverte des contrats, du fait du temps et de
limprvisibilit du futur. Le vritable problme pos est celui des dispositifs juridiques par lesquels les
parties peuvent organiser le traitement de leurs obligations futures en cas de survenance dalas, et les
tribunaux interprter ces obligations dans un cadre contentieux. Mais est-elle synonyme de
limprvision des juristes, comme Mnard semble ladmettre ?
Avant de considrer quimprvision et incompltude sont des synonymes, il serait judicieux de
saisir le sens de la premire notion et de faire le point du droit positif sur ladaptation des contrats la
survenance dvnements non prvus.
Limprvision est une catgorie produite par la jurisprudence civile et la jurisprudence
administrative, qui ont en fait des usages diffrents ; ainsi, limprvision de la jurisprudence civile,
amorce par laffaire Canal de Craponne en 1876, na de sens quau regard de la position des tribunaux
en matire de rfaction de contrats privs marqus par des changements de circonstances (Malaurie et
Ayns, 1990, 617). La jurisprudence de la Cour de cassation sest fixe sur la garantie de la force
obligatoire des contrats, qui implique labsence de pouvoir du juge judiciaire de modifier des clauses
contractuelles ; cela ne signifie pas pour autant que le juge impose aux parties lexcution stricte de
leurs obligations. Les parties demeurent matresses de ladaptation de leur accord aux circonstances
conomiques, compte tenu de leur mutus dissensus. Rien ne permet donc daffirmer, comme Brousseau
le suggre, que les tribunaux franais sont rticents face la rengociation par les parties de leur accord
contractuel. On peut galement souligner lerreur dinterprtation de Mnard, qui affirme lexistence
dun pouvoir discrtionnaire du juridique lgard des contrats, de leur rengociation, de leur
rvision ou de leur rsiliation, < page 22 >qui conforte lide dune importance dcisive et irrmdiable de lincompltude dans les contrats de longue dure. (Mnard, 2001, p. 11). On ne voit
pas que ce peut avoir de discrtionnaire lintervention du juridique lorsque les tribunaux sont saisis par
un co-contractant cherchant faire valoir une prtention lencontre dune autre partie ; on ne voit,
dans le droit positif, de tels pouvoirs du juge judiciaire en matire contractuelle.
En matire administrative, limprvision a t pose dans larrt Compagnie dclairage de
Bordeaux en 1916, qui a demble marqu la spcificit des contrats administratifs par rapport aux
contrats privs : lexcution du service public (de Laubadre, 1953, 830). Nous reviendrons
ultrieurement sur limprvision en droit administratif, mais il nous parat justifi dvoquer les
proccs juridiques de gestion de limprvisibilit du futur. Dans le domaine du droit priv, notre
connaissance, aucune analyse conomique de lincompltude des contrats na t ce jour ralise sur
des techniques juridiques importantes, comme : les contrats obligations conditionnelles (notamment
les conditions suspensives), les contrats alatoires, ou, plus simplement, les procds de rvision des
prix dans les contrats excution successive. De la mme, en droit des contrats administratifs, les
mcanismes de rvision des prix prvus dans les cahiers des clauses administratives gnrales, les
procds de dfinition des prix de rglement dans les contrats prix rvisables ou ajustables, pourraient
tre considrs avec attention. Enfin, limprvision ne peut tre apprhende comme lexpression
juridique de lincertitude, indpendamment dautres concepts juridiques tels que : la force majeure, les
sujtions imprvues, et en droit des Etats-Unis, la consideration, lestoppel, ou la parole evidence rule.
11
Il existe donc des procds juridique de gestion de lincertitude du futur, sur lesquels lattention
des conomistes ne sera pas susceptible dtre concentre aussi longtemps que ces derniers prendront
comme vision du monde celle de contrats complets ou incomplets, en tous cas isols de leur
contexte juridique et rduits de purs accords inter-individuels.
3. COMMENT TRADUIRE JURIDIQUEMENT ET EMPIRIQUEMENT LE PROBLEME DE LINCERTITUDE DU FUTUR?
Du point de lconomiste, incertitude et incompltude fonctionnent ensemble : lincertitude du
futur engendre lincompltude des contrats, incapables de prvoir de manire exhaustive la liste des
tats du monde pouvant survenir dans les relations de longue dure. La traduction juridique, empirique
de ces notions, nest pas chose aise ; nous en proposons ici quelques orientations possibles.
Les contrats privs, en tant que loi des parties et que rgis par le code civil, sont de la
comptence du juge judiciaire ; ils sont gnrateurs dobligations mutuellement consenties. Les
contrats administratifs ne relvent pas dune mme logique, au regard < page 23 >du fait quils sont linstrument de laction publique, ou de lexcution du service public. Ils sont le produit dune
rglementation plus large, contenue dans le code des marchs publics, dans les textes rglementaires
spciaux des dpartements ministriels, et dans des textes non rglementaires qui constituent
nanmoins une importante rfrence, tels les cahiers des clauses administratives gnrales et les cahiers
des clauses comptables gnrales.
Le code des marchs publics et la jurisprudence administrative usent, dans les contrats
administratifs, dune notion dconomie gnrale du contrat, inconnue du juge judiciaire (Frison-
Roche, 2002) conflit avec lautorit publique au titre des conditions financires dexcution de contrats
se traduisant par des dpassements de prix ou des retards de livraison.
Nous voquerons dans ce qui suit les dispositifs de droit priv, avant de prsenter les rsultats
dune tude empirique de largument dimprvision dans la jurisprudence administrative.
3.1. Incompltude informationnelle et compltude juridique
Deux remarques importantes peuvent tre formules sur lincertitude du point de vue de
lconomie :
- il est usuel de distinguer entre le risque et lincertitude : depuis Knight (1921), le risque est
dfini comme un vnement probabilisable, alors que lincertitude relve du non-
probabilisable ;
- lincertitude, au sens de fondement de lincompltude entendue comme dfaut de
prvisibilit du futur, est associe par les conomistes des contrats la ncessit de
mcanismes dajustement des relations en cours dexcution.
Nous voudrions souligner ici que lincompltude des contrats, au sens conomique, nen
entrane pas, ni logiquement, ni empiriquement, lquivalent sur le plan juridique ; un contrat incomplet
peut tre un contrat juridiquement complet. Prcisons cette ide, en distinguant entre deux types
dvnements du droit positif : lvnement connu dont la survenance est incertaine, et lvnement
12
non connu. Cette distinction peut tre traduite en termes dvnements risqus et dvnement
incertains. Ainsi, un contrat dassurance sinscrit dans un contexte dvnements connus, mais dont la
survenance est incertaine ; un contrat administratif connaissant la survenance dun vnement de force
majeure relve du deuxime type. Dans les deux cas, le droit positif organise les effets juridiques de ces
diffrents vnements. Cette organisation juridique des effets des vnements, anticipables par les
parties, permet de qualifier les contrats de complets : lvnement non prvu, quil soit dun type connu
ou non, ne met pas les parties cocontractantes dans une incertitude radicale quant leurs obligations
respectives.
< page 24 >
3.2. Les dispositifs du droit priv
Si le droit priv nest pas dmuni face lincertitude du futur, il nous faut prciser les moyens
que les dispositifs du droit priv franais mettent disposition des acteurs qui sengagent dans des
contrats de longue dure. Sans prtendre lexhaustivit, nous en signalons quelques uns :
- les articles 1168 1184 du Code civil relatifs aux obligations conditionnelles, comprennent un
certain nombre de dispositions relatives la condition suspensive, cest--dire lobligation qui
dpend, selon larticle 1181 du Code civil, dun vnement futur et incertain, ou dun vnement
actuellement arriv, mais encore inconnu des parties ; lincompltude, au sens dimprvisibilit de
lavenir, est une catgorie objet de dispositions de droit positif, comme larticle 1168 qui prvoit que :
Lobligation est conditionnelle lorsquon la fait dpendre dun vnement futur et incertain, soit en la
suspendant jusqu ce que lvnement arrive, soit en la rsiliant, selon que lvnement arrivera ou
narrivera pas. (art. 1168 c. civ.)
- Les contrats alatoires de larticle 1104 du Code civil portent galement sur le domaine des
vnements incertains :
Lorsque lquivalent consiste dans la chance de gain ou de perte pour chacune des parties, daprs un
vnement incertain, le contrat est alatoire. (art. 11042 C.civ).
- Les vnements qui relvent de la force majeure ou du cas fortuit sont voqus dans larticle
1148 du Code civil, qui dispense le dbiteur de dommages et intrts pour inexcution de lobligation
dans ces cas de figure.
Plus prcisment, la modification des conditions dexcution des contrats lorsquils connaissent
une transformation des circonstances qui avaient prsid leur conclusion ne se laisse pas enfermer
dans une logique dexclusion dfinitive de limprvision par le juge judiciaire. Certes, la jurisprudence
civile a condamn la thse de limprvision : Attendu que si, aux termes de larticle 1135 C. civ.,
lquit ou lusage doivent tre pris en considration pour linterprtation des contrats et des suites
quils comportent, le juge nen saurait faire tat pour soustraire lun des contractants
laccomplissement des engagements clairs et prcis, quil a librement assum. (Civ., 2 dcembre
1947, Gaz. Pal. 1948.1.25). Mais, pour autant, des exceptions doivent tre signales (Malaurie et
Ayns, 1990, 621):
13
- lapplication de clauses contractuelles de rvision des prestations contractuelles en cours
dexcution (utilisation dune clause dchelle mobile, rengociation des contrats en cours
dexcution) ;
- le recours des clauses de sauvegarde (hardship) par lesquelles les parties peuvent prendre
linitiative dune rengociation du contrat lorsque les prestations contractuelles deviennent
dsquilibres ;
< page 25 >
- lassujetissement des contrats des dispositions lgislatives qui fixent les termes de la
rvision des prix (rentes viagres, baux commerciaux).
Le droit priv franais nest donc pas absent du terrain de la gestion de lincompltude : ds
lors, si lon admet que les contrats ne sont pas des algorithmes informatiques, comme nous lavons
signal prcdemment, on ne devrait pas trouver source tonnement dans le fait que linterprtation
judiciaire existe bel et bien, et constitue un procd normal, non pathologique, de statuer sur lexistence
dune obligation dont une partie tente de se dgager, ou sur la compensation financire dune obligation
supplmentaire celles convenues contractuellement.
Linterprtation des contrats est traite dans les articles 1156 1164 du Code civil relatifs
linterprtation des conventions : elle est place sous le rgne du principe de la recherche de la
commune volont des parties (Mazeaud, Mazeaud et Chabas, 1998, p.333 342) ; larticle 1156
dispose que on doit dans les conventions rechercher quelle a t la commune intention des parties
contractantes, plutt que de sarrter au sens littral des termes ; dfaut de pouvoir dceler ce quon
voulu les contractants, le juge est invit recourir des rgles subsidiaires, lusage ou lquit. 9
Les mthodes dinterprtation sont selon les spcialistes fondes sur lintention des parties, leur
dclaration de volont, ce qui limiterait les intrusions du juge dans les affaires contractuelles ; le
besoin dinterprtation ne survient quen prsence dun texte obscur ou ambigu. Le Code civil dispose
que Ce qui est ambigu sinterprte par ce qui est dusage dans le pays o le contrat est pass (art.
1159 C. civ.), et que On doit suppler dans le contrat les clauses qui sont dusage, quoiquelles ny
soient pas exprimes (art. 1160 C. civ.). Dans ce dernier cas, le recours la loi, lquit ou lusage
est pens comme suppltif.
Nous partageons, finalement, le sentiment exprim par E. Serverin qui affirme que
prendre au srieux le droit des contrats, on ne peut que conclure louverture de ce type dinstrument
sur un monde juridiquement complexe fait de rgles tatiques, de conventions caractre collectif, et
dintrts juridiquement protgs. Au sens du droit, le contrat existe non pas en dpit de, mais par le
fait mme quil oblige, dans des limites qui ne sont pas entirement dtermines par la volont des
parties. Cest mme cette ouverture qui permet denvisager la possibilit dun rglement en situation
de conflit (Serverin, 1996).
9 Or, il peut tre signal que le droit amricain des contrats prsente, contrairement ce quaffirment aussi bien Mnard
(2001) que Brousseau (2001), dtroites affinits avec le droit franais en matire dinterprtation ; ainsi, le Restatement of
Contracts, Section 201(1) propose que le juge doit rechercher lintention subjective des parties.
14
< page 26 >
3.3. Limprvision en droit des contrats administratifs : une tude empirique
Il est notre sens dlicat de traiter de limprvision en gnral ; il convient en effet de prciser
lanalyse un niveau plus fin que celui des contrats administratifs en gnral, cest--dire en fonction
des formules de prix contractuel (forfaitaire ou bas sur les cots, ou ferme, ajustable ou rvisable) et
des types de march concerns, appellant la mise en uvre de CCAG diffrencis (marchs de travaux,
marchs de fourniture courante, marchs industriels, marchs de prestations intellectuelles).
Le problme de limprvision a fait lobjet dune circulaire du Premier ministre et du ministre
de lconomie des finances du 20 novembre 1974 relative lindemnisation des titulaires de marchs
publics en cas daccroissement imprvisible de leurs charges conomiques (J.O. du 30 novembre 1974,
p. 11971). Quatre aspects du contenu de cette circulaire nous paraissent mriter attention :
- si la force majeure est distingue de limprvision, il est admis quun vnement de force
majeure peut conduire rendre lexcution du contrat si onreuse quelle en bouleverse
lconomie et ouvre, ainsi, droit au titulaire de demander quil soit fait application de la
thorie de limprvision ;
- lapplication de la thorie de limprvision est exclue dans le cas des marchs comportant un
mcanisme de rajustement des prix en fonction de la conjoncture conomique, sauf si la
formule de rvision nempche pas le bouleversement de lconomie du contrat ;
- limprvision suppose la runion de trois lments: (a) le caractre non raisonnablement
prvisible de lvnement perturbateur, (b) le fait que cet vnement soit indpendant de la
volont du titulaire et se soit impos lui, (c) le fait que lvnement ait occasionn des
charges supplmentaires, extra-contractuelles, entranant le bouleversement de lconomie
du contrat.
- enfin, la circulaire invite ladministration viter, autant que possible, les procdures
contentieuses et sefforcer de donner une solution amiable aux demandes qui lui
paraissent incontestablement justifies.
Ainsi, la circulaire de 1974 contribue renforcer la texture ouverte de la thorie de
limprvision : elle ne proscrit pas largument dimprvision de la part de titulaires de march prix
ajustable ou rvisable et confirme le pouvoir discrtionnaire des autorits contractantes en matire
dapprciation de la justesse des rclamations des titulaires et de suites leur donner. Dans ces
conditions, il est raisonnable de penser que les demandes dindemnit dimprvision font lobjet de
solutions non contentieuses, donc inobservables : les dcisions des personnes responsables et du comit
de rglement amiable des litiges dans les marchs ne sont pas publiques, donc pas publies. Reste quil
est possible dobserver la jurisprudence administrative sur limprvision.
< page 27 >
A ce propos, nous avons pu identifier 55 arrts du Conseil dEtat et des cours administratives
dappel contenant au moins un fois le mot imprvision sur la base de donnes Lamyline.
Loccurrence de la notion dimprvision est toujours situe dans lexamen par la juridiction du moyen
15
avanc par la partie requrante, en vue dobtenir une compensation de charges prsentes par elle
comme extra-contractuelles, sous la forme dune indemnit dimprvision.
Les 55 arrts identifis, qui stendent sur la priode dcembre1964-mars 2001, comprennent 12
arrts de cours administratives dappel et 43 arrts du Conseil dEtat. Ils sont lis des disputes
opposant lautorit publique aux titulaires de marchs publics ou de concession de service public, qui
donnent lieu la revendication dune crance dune partie (essentiellement les titulaires) sur lautre, au
titre de difficults rencontres dans lexcution du march ou de la concession. Nous avons procd
la constitution dune base de donnes partir dun codage en plusieurs variables, qualitatives et
quantitatives, en vue de mesurer empiriquement :
- le traitement par les juridictions administratives dappel des demandes de compensation de
surcots subis par les titulaires au cours de lexcution des contrats administratifs,
- laccueil rserv par ces juridictions largument dimprvision avanc par les titulaires de
march en conflit avec lautorit publique.
En premire approche, nous pouvons tablir un tableau indiquant les profils conomiques du
contentieux entre les titulaires de marchs ou de concessions et lautorit publique, par type de domaine
technique concern. La variable conomie du litige a t dfinie en termes matriels, cest--dire au
contenu conomique de la requte forme devant le juge administratif. La modalit supplment de
rmunration demand par le fournisseur (SR/F) est un indicateur synthtique des requtes incluant la
revendication dune crance sur lautorit publique, qui agrge : (a) les demandes de rvision du prix ;
(b) les demandes de modification de la formule de rvision du prix, (c), les demandes dindemnit
dimprvision pour charges extra-contractuelles non prvues, (d) les demandes de compensation des
charges subies du fait de laction de lautorit publique (retards dexcution et modification des
quantits imputables du fait de lautorit publique).
Le tableau 2 montre la forte concentration des actions en compensation de surcots ou de
rentabilit effective infrieure la rentabilit escompte de la part des titulaires, dans des marchs de
travaux (construction et gnie civil). Le contentieux dans les six marchs de fourniture est sur-
reprsent, au regard du fait que trois affaires concernent trois fournisseurs de vtements militaires
ayant actionn les mmes moyens contre une mme partie (arrts Etablissements Truquin,
Etablissements Lardire, Etablissements Blotire rendus par le Conseil dEtat le 13 juillet 1965).
16
< page 28 >
TABLEAU 2 PROFILS DE LITIGES EN FONCTION DES DOMAINES TECHNIQUES
conomie du litige domaine technique compensation
cots d'expertise
compensation
licenciement
prix rachat de
concession
redevance rsiliation SR/F (supplment
de rmunration
demand par le
fournisseur)
Total
concession parking 2 2
concession march 1 1
concession ordures 1 1
concession patinoire 1 1 2
concession port 1 1
concession transport 3 3
construction 22 22
distribution de gaz 1 1
enlvt pave navale 1 1
entretien 1 1
fourniture 6 6
Gnie civil 1 6 7
honoraires architecte 2 2
Non connu 1 1
police des mines 1 1
sous-concession 1 1
titularisation agent 2 2
Total 1 2 1 1 2 48 55
Le tableau 3 montre, dune part, que les arrts des juridictions dappel confirment
majoritairement les dcisions des juges infrieurs lorsque ces derniers ne donnent pas raison la
contestation avance par les titulaires de marchs et, dautre part, que les arrts des cours
administratives dappel et du Conseil dEtat renversent parfois les arrts des juges infrieurs favorables
aux titulaires.
Largument dimprvision est systmatiquement avanc par les titulaires de march dans leur
requte devant le Conseil dEtat ou les Cours administratives dappel. Lanalyse des 55 arrts identifis
a permis de faire apparatre laccueil
17
< page 29 >
TABLEAU 3 DECISIONS DES COURS ADMINISTRATIVES DAPPEL ET DU CONSEIL DETAT AU REGARD DES
ARRETS ATTAQUES
Dcision (Conseil dEtat ou cours administratives dappel) arrt attaqu (arrt de TA ou de CAA)
Acceptation de la
demande de
compensation
formule par
lautorit publique
Acceptation de la
demande de
compensation
formule par le
titulaire du
march
Rejet total de la
demande de
compensation
formule par le
titulaire du
march
Acceptation/rejet
partiels de la
demande
Dcision
dexpertise
avant dire droit
Arrt
procdural
Total
Acceptation/rejet
partiels de la
requte
1 3 3 7
Acceptation totale
de la requte du
titulaire du
march
7 3 1 11
Rejet total de la
requte du
titulaire du
march
1 2 27 4 1 35
Arrt de
confirmation
1 1
Arrt prfectoral 1 1
Total 1 11 33 7 2 1 55
18
< page 30 >
rserv par le Conseil dEtat et des cours administratives dappel largument dimprvision avanc
par les parties rqurantes. Nous avons procd au codage des arrts sur ce point en distinguant entre
les arguments reus (V-valid), rejets (NV-non valid), les quelques occurrences (rares) du mot
imprvision hors contexte dcisionnel (NP- non pertinent dans larrt), et les rares cas o le traitement
est indtermin (ND- non dtermin). Le tableau 4 montre les rsultats du croisement entre la variable
argument dimprvision et le contenu matriel de larrt pour la partie requrante.
TABLEAU 4 LACCUEIL DE LARGUMENT DIMPREVISION PAR LES CAA ET LE CONSEIL DETAT AU
REGARD DU CONTENU DE LARRET RENDU
argument dimprvision dcision Non
dtermin
(ND)
Non pertinent
(NP)
Non valid
(NV)
Valid
(V)
Total
Acceptation de la demande de
compensation formule par
lautorit publique
1 1
Acceptation de la demande de
compensation formule par le
titulaire du march
10 1 11
Rejet total de la demande de
compensation formule par le
titulaire du march
1 32 33
Acceptation/rejet partiels de la
demande 1 6 7
Dcision dexpertise avant
dire droit 2 2
Arrt procdural 1 1
Total 1 2 51 1 55
Le tableau 4 fait apparatre que la position des juridictions administratives dappel est
extrmement rserve sur largument dimprvision avanc par les titulaires de marchs ou de
concession : sur 55 arrts analyss, seul un valide cet argument, alors que 51 le rejettent clairement. Les
dcisions dattribution dune indemnit dimprvision confirment ce constat (tableau 5). Le seul arrt
donnant droit un argument dimprvision est larrt n 27.208 du 2 janvier 1982 Socit entreprise
Quillery-Saint-Maur. Cet arrt est rendu en rponse une requte de lentreprise de rformer
< page 31 > le jugement du tribunal administratif condamnant lEtat lui verser une indemnit de 230.000F quelle estime insuffisante au titre de limprvision dans lexcution dun march pass avec
le ministre de la jeunesse et des sports ; dans larrt du Conseil dEtat, le juge administratif estime que
considrant quil appartient au juge administratif de statuer sur le montant de lindemnit
dimprvision laquelle lentreprise requrante peut faire tat, et du caractre partiellement prvisible
de ce surcrot de charges, il sera fait une juste apprciation de lindemnit due lentreprise requrante
en lvaluant 300.000 F. .
Il importe de signaler que le Conseil dEtat limite le recours limprvision en toffant
lutilisation des sujtions imprvues ou de la force majeure ; larrt du 2 dcembre 1964 Port autonome
de Bordeaux en est une illustration. Cet arrt rejetait une contestation par le Port autonome de sa
19
condamnation par le tribunal administratif de Bordeaux verser la Compagnie de remorquage et de
sauvetage les abeilles un supplment de rmunration pour sujtions imprvues et circonstances
atmosphriques exceptionnelles prsentant un caractre de force majeure auxquelles la Compagnie a
t confronte lors de lexcution dune convention denlvement dpaves. La compagnie tait par
ailleurs lauteur dun recours incident pour contester la dcision du tribunal administratif doprer un
abattement de 10% sur les sommes dont le Port autonome de Bordeaux a t considre dbitrice,
faisant ainsi supporter la compagnie un dixime de la charge extracontractuelle. A ce propos, le
Conseil dEtat, faisant fi de limprvision, donne tort au juge administratif davoir procd une telle
rfaction :
Considrant que le supplment de rmunration allou la compagnie par le tribunal administratif
tend, non tenir compte des charges extracontractuelles rsultant pour elle dune situation
dimprvision, mais rparer les consquences onreuses de sujtions imprvues et de circonstances de
force majeure quelle a rencontres dans lexcution des travaux ; que, ds lors, en labsence de faute
releve sa charge, lindemnit laquelle elle pouvait prtendre devait couvrir lensemble du prjudice
quelle avait subi ; quil suit de l que la compagnie est fonde soutenir que cest tort quele
tribunal administratif a laiss sa charge une part dudit prjudice.
Enfin, pour complter le tableau, nous avons pu identifier 39 arrts contenant une information
quantitative sur les montants montaires des crances dont les parties concernes sestiment tre
titulaire et ceux des montants allous au terme de la procdure contentieuse devant les juridictions
administratives, cest--dire aprs la promulgation de larrt du Conseil dEtat ou de la Cour
administrative dappel. Le tableau 6 prsente les principales variables pertinentes pour apprcier les
donnes quantitatives.
< page 32 >
TABLEAU 5 DECISION DATTRIBUTION DUNE INDEMNITE DIMPREVISION AU REGARD DE LECONOMIE
DU LITIGE
Attribution dune indemnit d imprvision conomie du litige Refus
dattribution
Non pertinent
dans larrt
Acceptation
dattribution
Total
compensation cots
d'expertise
1 1
compensation
licenciement
2 2
prix rachat de
concession
1 1
redevance 1 1
rsiliation 2 2
Demande de
supplment de
rmunration
43 4 1 48
Total 50 4 1 55
20
4. LA DETERMINATION DU PRIX ET LALLOCATION DES RISQUES DANS DES CONTRATS INCOMPLETS
Peut-on considrer avec Mnard que si les conomistes saccordent considrer que la variable
prix joue un rle relativement secondaire par rapport dautres (telles que lexigence de livraisons
rgulires) dans les contrats de longue dure, La Common Law semble enregistrer ce fait en
nimposant pas de prix dtermin , alors que le droit civil impose une contrainte plus forte ? en
affirmant cela, Mnard estime que dans le cas o [le prix] ne peut tre dfinitivement fix, le prix doit
quand mme tre dterminable dans des conditions qui respectent la symtrie des contractants, cest--
dire pouvoir tre dtermin par une tierce partie partir dlments indpendants de la volont des
parties (Mnard, 2001, p. 4).
Les questions ouvertes par ce jugement sont de deux ordres :
- est-il vrai que le droit priv franais prohibe les contrats sans prix dtermin ?
- est-il vrai que la dterminabilit du prix partir dlments indpendants de la volont des
parties est un caractre exclusif du droit priv franais ?
21
< pages 33 et 34 >
TABLEAU 6 PRETENTIONS ECONOMIQUES DE LA PARTIE REQUERANTE ET ISSUE JUDICIAIRE
Juridiction
domaine technique dcision
argument imprvision
Montant demand par le fournisseur
Montant attribu au fournisseur
Montant demand par l'Etat
Montant attribu l'Etat
CAA Bordeauxconstruction RDCF non valid 84 846, 72 0
CAA Douai concession ordures RDCF non valid 3 421 790, 11 0
CAA Lyon gnie civil ADCF non valid 3 765 248 356 453
CAA Nantesfourniture RDCF non valid 820198,3 0 6000
CAA Nanteshonoraires architecte ADCF non valid 1 745 413 88 330
CAA Nantesconstruction ADCF non valid 14 707 164 66 120
CAA Paris titularisation agent RDCF non valid 1 972 400 0
CAA Paris honoraires architecte ADCF non valid 107 907, 02 85 732
CAA Paris concession transport RDCF non valid 170 857 406 CFP 0
CAA Paris concession transport ADCF non valid 236 076 000CFP 0
CAA Paris construction RDCF non valid 57 880 000 CFP 0
CAA Paris concession patinoire ADCE non valid 10 792 724, 8910 792 724, 89
CE construction RDCF non valid 42 020,48 0
CE fourniture RDCF non valid 53 736,50 0
CE construction RDCF non valid 182 395,54
CE construction RDCF non valid 194 298,67 0
CE construction ADCF valid 230 000 300 000
CE police des mines ADCF non valid 340 620 345 620
CE construction RDCF non valid 360 237,80 0
CE gnie civil RDCF non valid 365 300 0
CE gnie civil RDCF non valid 400 000 0
CE concession march ARPAindtermin dans l'arrt 444 162 0
CE titularisation agent RDCF non valid 951 700 0
CE construction RDCF non valid 2 159 343 0
CE construction ADCF non valid 2 196 061 1 575 931
CE construction RDCF non valid 2 549 841 0
CE construction RDCF non valid 4 557 645 0
CE concession parking RDCF non valid 9 728 948,50 0
CE gnie civil RDCF non valid 60 374 038 0
CE construction RDCF non valid 241 396 840 0
CE construction RDCF non valid 1 422 590, 86 0
CE gnie civil RDCF non valid 15191013 CFP 0
CE distrib gaz EADD valid 162 463 000 AF161 895 256 AF
CE concession transport RDCF non valid 175 056 000CFP 0
CE construction RDCF non valid 19 033, 35 0
CE concession parking ARPA non valid 2 616 168, 962 015 433, 77
CE gnie civil ARPA non valid 24 405 185, 58 19 663 619
CE construction ADCF non valid 4 997 408, 15 ##########
CE construction ARPA non valid 490 000 kips
AF : ancien francsCFP : francs du Pacifiquekip : monnaie du Laos
ADCE : acceptation de la demande de compensation formule par l'autorit ARPA : arrt d'acceptation/rejet partiels de la requteEADD : renvoi une expertise avant dire droit
CAA : cour administrative d'appelCE : Conseil d'EtatRDCF : rejet de la demande de compensation formule par le fournisseur
ADCF : acceptation de la demande de compensation formule par le
22
< page 35 >
4.1.La dterminabilit du prix
En fait, le droit des Etats-Unis et le droit franais ne sont pas dans une position aussi loigne
lun par rapport lautre que Mnard le pense : dans les deux cas, la validit du contrat exige qu
dfaut dtre dfinitvement dtermin, le prix doit tre dterminable. De plus, lopposition dresse par
Mnard en posant que la spcificit du droit civil tient au fait que le prix doit tre dterminable par
une tierce partie partir dlments indpendants de la volont des parties ne rsiste pas lexamen
du droit des Etats-Unis, qui permet galement une dtermination extrieure du prix. Ainsi,
lUniform Commercial Code 2.305. Open Price Term prvoit que :
(1) Les parties, si tel est leur souhait, peuvent conclure un contrat de vente mme si le prix nen nest pas
fix. Dans un tel cas, le prix est un prix raisonnable au moment de la livraison si
rien nest dit quant au prix ; ou
le prix doit faire lobjet dun accord ultrieur et les parties ne trouvent pas daccord ; ou
le prix doit tre fix en rfrence un march ou dautres standards dfinis par accord et tablis par un tiers
ou une agence mais que le tiers ou lagence faillissent leur tablissement.
Cet alinea de lUCC 2.305 mentionne ainsi : (a) le place du pouvoir judiciaire dans la
dtermination du prix, partir du standards de raisonnabilit, (b) la possibilit de faire fixer la prix
partir de some agreed market or other standard as set or recorded by a third person or agency .
Cette disposition est somme toute proche de celle prvue par larticle 1591 du code civil :
le prix de la vente doit tre dtermin et dsign par les parties.
Si le dfaut de prix est une cause de nullit du contrat de vente, quelle est la position de la
jurisprudence sur les prix non dtermin ex ante, mais dterminables ? Il semblerait quelle admettre
que le prix puisse tre dterminable partir dlments ne dpendant plus de la volont de lune des
parties ou de la ralisation daccords ultrieurs ; elle laisse aussi ouverte la voie de la dtermination par
le juge du prix de la vente ou dune mthode de dtermination du prix diffrente de celle prvue au
contrat.
Sagissant des contrats administratifs, la possibilit existe galement de conclure des marchs
prix non dtermin, mais dterminable, soit par le biais de prix provisoires, soit par celui de prix
ajustables ou rvisable.
< page 36 >
4.2. La dtermination du prix de rglement
En France, les recommandations ministrielles sur la dtermination des prix de rglement dans
les marchs publics sont dfinies par voie non rglementaire, cest--dire par le biais de circulaires du
ministre de lconomie et des finances ; cest l une diffrence majeure avec les rgles amricaines de
dtermination du prix de rglement, qui ont valeur rglementaire et sont dfinies dans le Federal
23
Acquisition Regulation (FAR). Trois circulaires successives, dates de 1976, 1980 et 1987, donnent les
principes que les autorits publiques sont invites suivre en matire de prix de rglement10.
En premier lieu, les prix de rglement sont compris comme indpendants de leffort du titulaire
du march ; cest un trait particulirement explicite pour les marchs passs avec une clause de prix
rvisable, dans la mesure o Une formule de rvision nest pas un instrument de manipulation du prix
de rglement et na pour seul but de prendre en compte de faon forfaitaire, en hausse comme en
baisse, lvolution des conditions conomiques , sachant quune formule de rvision ne tient
aucun compte des facteurs internes propres lentreprise : volution de la productivit, amlioration ou
innovations techniques, politique de sous-traitance. (circulaire du 5 oct. 1980, III-C.2 et 3).
En deuxime lieu, ce nest quen 1987 quapparat dans les circulaires du ministre de
lconomie et des finances une formule de rvision applicable tous les marchs publics11, alors que
les circulaires de 1976 et 1980 ne fournissaient un modle de formule de rvision que pour les seuls
marchs dingnierie, et renvoyaient aux acheteurs le soin dlaborer leur propre formule au cas par
cas. Nanmoins, la circulaire de 1987 rduit limportance du terme fixe de la formule de rvision, qui
passe de 15% 12,5% et ce lavantage notoire des titulaires de marchs prix rvisable.
La rglementation amricaine fixe les conditions de dtermination du prix de rglement dans un
cadre rglementaire, traduit sous la forme de clauses-types dans les parties 52.216.2 6, et 52216.16 et
17 du FAR ; la diffrence de la France (et de la Grande-Bretagne) la rvision des prix ne fait pas
appel des indices ou sries de prix de rfrence, mais doit tre base sur la connaissance locale, au cas
par cas, de la vie du contrat par la personne responsable du march.
< page 37 >
Les clauses 52.216.2 Economic Price Adjustment Standard Supplies et 52.216.3 Semi-
Standard Supplies, prvoient une indexation du prix du rglement sur les prix du march du bien ou de
son quivalent le plus proche dans le cas des Semi-Standard Supplies ; un principe de proportionnalit
entre les variations du prix du march et celles du prix du contrat particulier est pos, toutefois dans la
limite de 10% du prix unitaire initial ou dun prix-plafond dfini contractuellement. La clause 52.216.4
porte sur lajustement des prix des Labor et Material, et nadmet que lajustement aux changements qui
sont imputables au contrat, et dans les mmes limites que prcdemment. Lquivalent fonctionnel des
rvisions de prix franaise est ici dfini dans des termes restrictifs, et dans un cadre donnant un large
pouvoir dexpertise des donnes justificatives des demandes dajustement par les personnes
responsables des marchs.
Mais la rglementation amricaine accorde une grande importance la dtermination des prix
de rglement dans les contrats prix redterminables, et plus particulirement aux contrats contenant
un volet incitatif, dans les clauses 52.216-16 (Incentive Price Revision-Firm Target) et 52.216-17
10 Circulaire du 10 fvrier 1976 relative la dtermination des prix de rglement dans les marchs publics, J.O. du 7 mars
1976, p. 1492 ; circulaire du 30 octobre 1980 relative aux prix dans les marchs publics, J.O. du 20 novembre 1980, p.
10063 ; circulaire du 5 octobre 1987 relative la dtermination des prix initiaux et des prix de rglement dans les marchs
publics, J.O. du 24 octobre 1987, p. 12409.
11 Dfinie dans les termes suivants : P=Po[x+y(aM/Mo + bS/So + cPsd/Psdo + d)], o P est le rvis, Po le prix initial, x
le terme fixe qui ne peut tre infrieur 0,125, a,b,c,d les paramtres reprsentatifs des lments du cot (avec
a+b+c+d+=1).
24
(Incentive Price Revision-Successive Targets) du FAR ; alors que les mcanismes dincitation ne sont
pas inclus dans la rglementation franaise des contrats administratifs mais simplement dfinies de
manire indicative dans une note de la Commission Centrale des Marchs 12, le FAR amricain en
organise le rgime par voie rglementaire. Sans entrer dans le dtail, il nous suffira de constater que les
principes suivants sont poss :
- en prsence de cots constats gaux aux cots-cibles, lajustement sopre sur la variable
profit du titulaire du contrat,
- en prsence de cots constats suprieurs aux cots-cibles, le mcanisme incitatif se
transforme en mcanisme de sanction de la pitre performance du contractant, compte tenu
que l aussi lajustement sopre sur la variable profit du titulaire du contrat.
Alors que la rglementation amricaine ne retient pas de possibilit de rvision des prix base
sur des indices conomiques, il nen reste pas moins que, comme lestimait J. Daumard en 1963, que
les marchs sans prix dtermin, aux Etats-Unis, ont un champ daction beaucoup plus large quen
France, car ils dbouchent sur la redtermination des prix. Ils supposent un contrle de lAdministration
et permettent lEtat de fixer unilatralement, sous le contrle du juge, le prix dfinitif en cas de
dsaccord. En France, ces marchs sont rservs au cas o le prix dfinitif ne peut tre fix ; aux Etats-
Unis, ces marchs sont dusage courant pour prparer la ngociation a posteriori des prix et des
conditions financires contractuelles, toutes les fois que des charges alatoires excessives seraient, sans
cela, incluses dans le prix (Daumard ; 1963, p. 225. la citation entre guillemets est celle du
Contrleur gnral Paulhac, intervention la commission mixte des marchs du 12 juin 1952).
< page 38 >
Daumard estimait galement que lun des facteurs qui interdisent dassimiler les prix provisoires
franais aux prix redterminables amricains tient la valeur accorde aux devis de prix, qui
engagent plus profondment les industriels amricains que les industriels franais. (Daumard, 1963,
p. 226), les devis nayant pas en France un caractre contractuel.
En dpit de cette diffrence en termes de poids accord aux devis de prix, le droit administratif
amricain et le droit administratif franais relatifs aux changements unilatraux dans les
contrats prsentent de fortes similitudes ; ils expriment une mme ide de continuit du service public.
En effet, larticle 19 du CCAG-MI et les articles de la partie 43-Contract modifications du FAR
prvoient une possibilit dimposition unilatrale, par ladministration, de changements de caractre
technique. Larticle 19-2 du CCAG-MI fait cho larticle 43.102(b) du FAR, qui impose une
quantification financire du changement impos avant son excution ; de mme, on peut rapprocher les
articles 19.12 du CCAG-MI et larticle 43.201(b) du FAR, qui ont en commun dimposer le
changement et de ne pas permettre au titulaire du march den suspendre lexcution. Une diffrence
existe, cependant, dans le rgime de dtermination du prix du contrat modifi : larticle 19 du CCAG-
MI prvoit que, dfaut daccord immdiat sur des prix dfinitifs, des prix provisoires sont appliqus
par ltablissement des dcomptes des prestations modifies, alors que larticle 43.102(b) du FAR
prvoit que, dfaut de disposer du temps ncessaire la ngociation dun prix, les parties doivent a
minima saccorder sur un prix maximum.
12 Annexe la circulaire du ministre de lconomie et des finances n2485 du 4 mars 1969 relative au guide des clauses de
caractre incitatif dans les marchs.
25
4.3. La jurisprudence administrative
La position de la jurisprudence du Conseil dEtat sur la clauses de rvision de prix est marque
par une interprtation restrictive des obligations de lautorit publique contractante ; ainsi, les arrts
Turquin, Blotire et Lardire du 13 juillet 1965 refusent de faire supporter lEtat laugmentation du
cours de la laine subi par trois fournisseurs de chantails militaires :
considrant que, si [la socit requrante] soutient avoir achet la laine qui lui tait ncessaire au
moment o les cours taient les plus levs, cette circonstance nest pas de nature engager la responsabilit
de ladministration son gard ; quelle ne justifie pas davantage que lconomie de son contrat ait t
bouleverse la suite de la rvision en baisse applique par lAdministration ; que, dans ces conditions, elle
ne peut pas prtendre une indemnit pour imprvision. .
Ce principe est repris dans le cas dune augmentation du cours du cuivre (CE, 7 juil. 1976,
Socit Demongeot), des produits sidrurgiques, dont le Conseil dEtat estime quelle constitue un
ala qui doit rester la charge du contractant (CE, 2 mars 1977, Socit Leflon et Compagnie), des
produits ptroliers (CE, 29 avr. 1981, M. Bernard ; CE, 17 juin 1981, Commune de Papeete)
< page 39 >
Les effets dune forte inflation subie au Laos par un entrepreneur titulaire dun march de
construction avec le ministre des affaires trangres ne donnent pas, non plus, droit une indemnit
dimprvision (CE, 21 avr. 1971, Sieur Desdame) ; il en va de mme avec les consquences
conomiques de lutilisation dune innovation technique et de conflits sociaux par un titulaire de
march, ds lors que la socit requrante na pas pris les mesures qui auraient pu prvenir des charges
supplmentaires (CE, 5 janv. 73, Office public dhabitations loyer modr de la rgion parisienne).
Le recours une technologie nouvelle nest pas, non plus, de nature ouvrir droit une indemnit
dimprvision, car elle ne constitue pas un fait extrieur aux parties (CAA Nantes, 20 juin 1990, S.A.
Campenon-Bernard-Cetra c/Dpartement de la Seine-Maritime). Les difficults de recrutement du
personnel et les hausses de salaires ne bouleversent pas lconomie dun contrat, surtout lorsque leur
incidence est rduite par le jeu de la formule de prix (CE, 22 fv. 1980, Socit Dumez-btiment), ainsi
que les grves et conflits sociaux (CE, 16 juin 1989, Socit Spie-Batignolles c/Dpartement de La
Runion). Lallongement des dlais dexcution nest pas en soi de nature ouvrir droit lindemnit
dimprvision (CAA Paris, 12 dc. 1989, Centre Hospitalier de Villejuif).
Par ailleurs, lexistence dune situation dimprvision nautorise pas le concessionnaire
rompre unilatralement les relations contractuelles qui le lient lautorit concdante et cesser son
activit, mais seulement, le cas chant, solliciter une rsiliation par le juge du contrat ou demander
une indemnisation raison des difficults rencontres dans lexploitation de la concession (CAA
Nantes, 11 avril 1991, Ville du Havre).
Le critre du caractre prvisible des hausses de prix des matires premires est courant dans les
arrts du Conseil dEtat (mme arrt ; CE, 20 janv. 78, SCREG 13), de mme que celui du
bouleversement de lconomie du march (CE, 26 oct. 1979, Socit des tablissements Billiard14).
13 Considrant que les variations de prix qui se sont produites au cours du dlai contractuel taient prvisables lors de la
passation du march et nont dailleurs, pas entran le bouleversement de lconomie de ce march ; que les hausses
26
Limprvision se rapporte exclusivement des vnements imprvisibles et extrieurs aux
concontractants entranant le bouleversement de lconomie du contrat (CE, 5 fv. 1986, SARL
patinoire de Vitry-sur Seine et autres ; galement : CE, 12 juin 1987, S.A. Billiard et Jardin c/ Centre
Hospitalier de Saint-Denis). Rcemment, le Conseil dEtat a considr que la pollution dun site de
captage deau pour une dure prvisible de deux cents ans, qui oblige la socit concessionnaire de la
distribution deau acqurir de leau un prix trois fois suprieur auprs dune ville voisine,
bouleverse tel point lconomie du contrat de concession quelle peut tre considre comme un
vnement imprvisible (CE, 14 juin 2000, Commune de Staffelfelden).
< page 40 >
CONCLUSION
Les lments danalyse avancs prcdemment peuvent tre rsums en cinq points :
1. lincompltude des contrats exprime simplement lide que lexcution des contrats, privs
comme administratifs, nest pas une histoire connue lavance, et que les obligations des parties ne
sont pas analysables sous le prisme dun algorithme informatique.
2. la texture ouverte des contrats est une caractristique peu surprenante des contrats, surtout de
longue dure ; elle appelle la prise en considration de lconomie des dispositifs juridiques
applicables la gestion des vnements non prvus en cours dexcution.
3. parmi ces dispositifs juridiques, peu nombreux sont ceux qui permettent une rengociation
des contrats aprs survenance dvnements non prvus ; plus nombreux sont ceux qui sont centrs sur
la dtermination du prix de rglement du march, compte tenu de diffrents types dalas. Les contrats
de droit priv et de droit administratif ont cependant un point commun : la pratique des contrats prix
dterminable.
4. le droit priv et le droit administratif des contrats diffrent fortement en termes de possibilit
de rengociation des contrats : elle semble plus extensive en droit priv quen droit administratif, ce
dernier prsentant un plus fort caractre dunilatralit (li au pouvoir de ladministration dassurer la
continuit du service public et dimposer la mutabilit des contrats) et tant centr sur la gestion des
consquences des vnements en termes de suspension ou de maintien des sanctions de droit commun
des retards et surcots dans les marchs (par exemple, par lannulation des pnalits de retard en cas de
force majeure), et de compensation forfaitaire des risques subis (par exemple par loctroi dune
indemnit dimprvision).
5. mais il ne faut dduire de ce qui prcde que la pratique des contrats administratifs est plus
contractuelle que celle des contrats privs, donc plus svre pour les titulaires en termes
dassomption des risques que les co-contractants de droit priv ; notre tude de la jurisprudence
administrative statuant sur des requtes faisant appel un argument dimprvision ne donne
intervenues aprs lexpiration de ce dlai, mme si elles ont t imprvues ne peuvent ouvrir droit indemnit (CE, 20
janv. 1978, SCREG).
14 lesdites dpenses ne pourraient motiver lallocation dune indemnit au titre de limprvision que si lconomie des
marchs staient trouve bouleverse (CE, 26 oct. 1979, St des Etablissements Billiard).
27
certainement quune image partielle de lallocation des risques, dans la mesure o seules arrivent
devant les juridictions administratives les requtes qui se sont heurtes un refus de suite favorable
oppose par ladministration ; hors, ce problme se situe du ct de la face cache de la lune, dans la
mesure o la gestion de limprvision qui aboutit une issue positive pour le titulaire nest pas
observable : elle sopre dans le silence des rapports entre le titulaire et la personne responsable de
march, ou dans celui du comit de rglement amiable des diffrends ou litiges dans les marchs
publics, dont les dcisions ne sont < page 41 > pas publies, et vraisemblablement pas crites et motives. Une recherche antrieure sur un domaine o sont nombreux les alas et les dpassements de
devis les marchs industriels de la dfense nationale a montr que lactivit des juridictions
administratives dans ce domaine tend vers zro (Kirat, Bayon et Blanc, 2003) ; on peut en pressentir
les raisons, la lecture de la circulaire du 20 novembre 1974 relative lindemnisation des titulaires de
marchs publics en cas daccroissement imprvisible de leurs charges conomiques, qui recommande
que :
Il est souhaitable dviter, autant que possible, que des procdures contentieuses naissent des demandes
dindemnit pour imprvision formules par un titulaire de march. A cet effet, et dans des dlais aussi
courts que possible, ladministration doit sefforcer de donner une solution amiable aux demandes qui lui
paraissent incontestablement justifies. (circulaire du 20 nov. 1974, 3.4).
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