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Journal de pédiatrie et de puériculture (2010) 23, 314—321 ARTICLE ORIGINAL Corps étrangers des fosses nasales : étude de 700 cas et revue de la littérature Nasal foreign bodies: Study about 700 cases and review of the literature S. Kharoubi Faculté de médecine Annaba, université Badji Mokhtar Annaba, 1, rue Chenafi Mohamed Annaba, 23000 Annaba, Algérie MOTS CLÉS Corps étranger nasal ; Obstruction nasale ; Rhinorrhée purulente ; Pile bouton ; Cacosmie Résumé But. — Présenter une étude sur les corps étrangers des fosses nasales aux urgences ORL et rapporter les données actuelles sur ce sujet. Matériels et méthodes. — Étude rétrospective entre janvier 1993 et décembre 2003 des admis aux urgences ORL pour corps étranger nasal. Les données colligées comportent : âge, sexe, terrain, durée de séjour, localisation, nature des corps étrangers, extraction et complications. Résultats. — Sept cents cas de corps étrangers des fosses nasales ont été colligés. Le sex-ratio est de 1,9 (masculin) avec un âge moyen de 4,3 ans et des extrêmes entre 12 et 15 ans. La majorité des patients consultaient le jour même (55 % moins d’une heure après l’accident). La localisation montrait 56 % de corps étrangers à droite et seulement neuf formes bilatérales (1,2%). Selon la nature du corps étranger, on retrouvait la prédominance des formes non orga- niques (perles synthétiques) et les variétés végétales. L’extraction était faite à la pince ou au crochet au pavillon des urgences. Quelques complications ont été notées : infection (n = 10), épistaxis (n = 5) et perforation septale (n = 1). Conclusion. — Accident fréquent et souvent banal en pratique médicale quotidienne (ORL, pédiatrie). Le corps étranger nasal peut constituer un état grave du fait de la nature (pile bouton), de l’évolution (infection associée) ou d’une manœuvre dangereuse d’extraction. © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Adresse e-mail : s [email protected]. 0987-7983/$ — see front matter © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.jpp.2010.07.005

Corps étrangers des fosses nasales : étude de 700 cas et revue de la littérature

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ournal de pédiatrie et de puériculture (2010) 23, 314—321

RTICLE ORIGINAL

orps étrangers des fosses nasales : étude de 700 cast revue de la littérature

asal foreign bodies: Study about 700 cases and review of the literature

S. Kharoubi

Faculté de médecine Annaba, université Badji Mokhtar Annaba,1, rue Chenafi Mohamed Annaba, 23000 Annaba, Algérie

MOTS CLÉSCorps étranger nasal ;Obstruction nasale ;Rhinorrhéepurulente ;Pile bouton ;Cacosmie

RésuméBut. — Présenter une étude sur les corps étrangers des fosses nasales aux urgences ORL etrapporter les données actuelles sur ce sujet.Matériels et méthodes. — Étude rétrospective entre janvier 1993 et décembre 2003 des admisaux urgences ORL pour corps étranger nasal. Les données colligées comportent : âge, sexe,terrain, durée de séjour, localisation, nature des corps étrangers, extraction et complications.Résultats. — Sept cents cas de corps étrangers des fosses nasales ont été colligés. Le sex-ratioest de 1,9 (masculin) avec un âge moyen de 4,3 ans et des extrêmes entre 12 et 15 ans. Lamajorité des patients consultaient le jour même (55 % moins d’une heure après l’accident).La localisation montrait 56 % de corps étrangers à droite et seulement neuf formes bilatérales(1,2 %). Selon la nature du corps étranger, on retrouvait la prédominance des formes non orga-niques (perles synthétiques) et les variétés végétales. L’extraction était faite à la pince ou aucrochet au pavillon des urgences. Quelques complications ont été notées : infection (n = 10),épistaxis (n = 5) et perforation septale (n = 1).

Conclusion. — Accident fréquent et souvent banal en pratique médicale quotidienne (ORL,pédiatrie). Le corps étranger nasal peut constituer un état grave du fait de la nature (pilebouton), de l’évolution (infection associée) ou d’une manœuvre dangereuse d’extraction.© 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Adresse e-mail : s [email protected].

987-7983/$ — see front matter © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.oi:10.1016/j.jpp.2010.07.005

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Corps étrangers des fosses nasales 315

KEYWORDSNasal foreign body;Nasal obstruction;Nasal discharge;Battery;Cacosmia

SummaryAims. — Presenting a study on foreign nasal ENT emergencies and report current data on thissubject.Material and methods. — A retrospective study was conducted from January 1993 to December2003 and admitted to the ENT emergency for a nasal foreign body. The data collected were: age,sex, field, duration of nasal foreign body insertion, nostril location, nature of foreign bodies,removal and complications.Results. — Seven hundred cases of foreign bodies of the nasal cavity were collected. The sex-ratio was 1.9 (male) with a mean age of 4.3 years (range, 12—15 years). The majority of foreignbodies consulted on the same day (55% less than an hour after the accident). The right nostrilwas predominant location and bilateral forms only nine cases (1.2%). Non organic compoundsaccounted for the majority of cases (synthetic pearls) and secondary vegetal varieties. Theextraction was done with forceps or hook in emergencies. Some complications were noted:infection (n = 10), epistaxis (n = 5) and nasal septum perforation (n = 1).Conclusion. — Often benign this frequent accident in pediatric and ENT practice. The nasalforeign body can be a serious in particular cases if we considered the variety of nasal foreignbody (batteries), cilical status (infection) or a dangerous extraction.© 2010 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

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L12 mois et 15 ans (âge moyen 4,3 ans).

La répartition selon les différentes tranches d’âge estdétaillée sur la Fig. 1.

Tableau 1 Répartition globale des corps étrangers dela sphère ORL (1993—2003).

Type de corps étranger Nombre %

Corps étrangers 700 27,2Fosses nasales

Autres types de corps étrangers 1873 72,8Oreille externe 320 17,08

Introduction

Le corps étranger des fosses nasales est une situation, le plussouvent accidentelle, que réalise l’arrêt ou l’incarcérationd’un élément exogène dans l’une ou les deux cavités nasalespar voie antérieure (vestibulaire) ou plus rarement posté-rieure (choanale).

Les corps étrangers des fosses nasales concernent surtoutles enfants en particulier dans les centres d’urgences ORLet pédiatrique [1].

Les problèmes posés sont rarement diagnostiques,l’accident initial étant souvent rapporté par l’enfant ouson entourage les cas méconnus peuvent se révéler parun tableau infectieux ou pseudotumoral selon la nature ducorps étranger.

En revanche, la variabilité et la diversité se voient dansles modalités d’extraction adaptées à chaque fois à la naturedu corps étranger, son volume, la durée de séjour et lesmoyens disponibles.

Le but de cette étude étant de rapporter, à l’occasiond’une série de 700 cas, les caractéristiques épidémiolo-giques, cliniques et de prise en charge des corps étrangersdes fosses nasales.

Matériel et méthodes

Étude rétrospective réalisée entre janvier 1993 et décembre2003 au niveau de l’unité urgences ORL hôpital DorbanAnnaba.

Au cours de cette étude plusieurs données ont été réper-toriées :• épidémiologiques comportant : l’âge, le sexe, la présence

d’un terrain particulier ;• cliniques : signe d’appel, temps écoulé entre l’accident

initial et la consultation, le siège, le nombre et le côté dela fosse nasale ou se trouvait le corps étranger ;

• les modalités d’extraction et les complications.

ésultats

n avait recensé 700 cas de corps étrangers des fossesasales au niveau de cette unité. Au cours de cette mêmeériode nous avions noté un total de 2573 corps étrangerse la sphère ORL incluant fosses nasales, oreille, œsophaget bronchiques (700/2573 : 27,2 %) (Tableau 1).

Par ailleurs, et en fonction des pathologies, les corpstrangers des fosses nasales représentent 3,9 % des urgencesRL.

La survenue de corps étranger des fosses nasales étaitabituellement accidentelle en présence des parents ou dea fratrie. Nous avions relevé un terrain particulier dans sixas (0,8 %) : trisomie 21 dans quatre cas et retard mentalans deux cas.

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’âge médian est de quatre ans avec des extrêmes entre

Œsophage 1313 70,10Bronchique 240 12,81

Total 2573 100

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Tableau 3 Répartition selon la nature des corpsétrangers.

Type de corps étrangers Nombre %

Perles synthétiques 162 23,1Végétal 160 22,8Plastique 103 14,7Coton 56 8Éponge 54 7,7Morceau de papier 47 6,7Pierre 45 6,4Chewing-gum 24 3,4Craie 20 2,8Type métallique 20 2,8

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igure 1. Répartition, selon l’âge, des corps étrangers des fossesasales.

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ne atteinte masculine était notée dans 66 % des cas contre4 % de cas féminin (sex-ratio 1,9).

L’analyse des fiches médicales des urgences ORL n’avaitas permis de ressortir de facon nette une répartition par-iculière concernant les mois ou les saisons.

Une répartition presque homogène des cas était notéeout au long de l’année.

urée de séjour

elon les données de l’anamnèse des parents 55 % des corpstrangers avaient moins d’une heure et 559 cas (79,9 %) ontonsulté dans les 24 heures. Les corps étrangers anciens sontlus rares ; huit cas (entre un et quatre mois) seulementnt été colligés soit 1,14 %. Ils correspondaient à des corpstrangers non organiques (perles, capuchon de stylo, plas-ique) diagnostiqués à l’occasion d’une rhinorrhée traînanteu d’une rhinite vestibulaire à répétition (Tableau 2).

ocalisation

ne nette prédominance d’atteinte de la fosse nasale droitetait notée ; 393 cas soit 56 % contre 298 corps étrangersauches et seulement neuf formes bilatérales (1,2 %).

Tableau 2 Répartition selon la durée de séjour descorps étrangers des fosses nasales.

Nombre %

Moins de 1 heure 170 24,2Moins de 24 heures 389 55,5Moins d’une semaine 84 12Moins d’un mois 49 7De 1 à 4 mois 8 1,14

Total 700 100

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Pile-bouton 9 1,2

Total 700 100

elon la nature des corps étrangers

ans notre série elle est dominée par les corps étrangerson organiques (perles 23,1 %) et ceux de type végétalTableau 3).

Les piles boutons particulièrement toxiques représen-aient 1,2 % des corps étrangers rencontrés.

Huit cas de pile bouton ont consulté le premier jour etn cas le quatrième jour.

La symptomatologie comportait une rhinorrhée impor-ante assez visqueuse, une épistaxis de faible abondanceais répétée et dans un cas des douleurs.L’examen clinique montrait des fosses nasales encom-

rées de sécrétions avec un piqueté hémorragique et deslcérations. Le corps étranger (pile bouton) était souventnclavé entre la cloison et le cornet inférieur dans la partieoyenne de la fosse nasale. Une perforation septale était

otée dans la forme tardive.

xtraction

lle avait eu lieu généralement au pavillon des urgencesRL.

L’enfant était immobilisé sur les genoux de l’un desarents et après visualisation du corps étranger et l’analysee son siège, sa forme et sa présentation l’extraction étaitaite à la pince dans 374 cas (53,3 %) et au crochet ramenante corps étranger d’arrière en avant dans 326 cas (46,5 %).e recours à une anesthésie générale était nécessaire dans0 cas en raison de la durée de séjour importante, deshénomènes inflammatoires associés ou de l’agitation de’enfant.

omplications

’évolution était favorable dans la majorité des cas. Nousvions noté une épistaxis dans cinq cas (0,71 %), une per-oration septale (pile bouton) dans un cas (durée de séjour

uatre jours). Cette perforation avait 5 mm de grand axevec des bords nets et accumulation de croûtes en périphé-ie, n’ayant pas nécessité de traitement spécifique.

Une infection locale (persistance d’une rhinorrhée puru-ente deux semaines après extraction) dans dix cas (1,42 %).

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Corps étrangers des fosses nasales

Ces infections ont nécessité des soins rhinologiques pro-longés (lavages des fosses nasales au sérum physiologiquedurant deux mois et antiseptiques locaux) associés à uneantibiothérapie (amoxicilline-acide clavulanique) pendant12 jours.

Par ailleurs nous n’avons pas noté de récidives de corpsétrangers parmi cette population répertoriée au niveau desregistres d’admission des urgences ORL.

Discussion

Les publications sur les corps étrangers des fosses nasalessont peu fréquentes et portent surtout sur périodes limitéesentre six mois et cinq ans [2,3].

Endican et al. ont rapporté en 2006 une étude sur258 corps étrangers des fosses nasales [4]. Plus récemment(en 2008), Gegori et al. ont publié une étude européenneportant sur 688 cas et Claudet et al. une casuistique de399 cas aux urgences pédiatriques [5,6]. Ces différentesétudes ne donnent aucune indication sur la fréquencede cette pathologie au niveau des structures spécialisées(pédiatrie, ORL, centres d’urgences).

Pour notre part, les corps étrangers des fosses nasalesreprésentent 3,9 % des urgences ORL et 27,2 % de l’ensembledes corps étrangers des voies aérodigestives supérieures col-ligés durant la période de notre étude (1993—2003).

L’analyse de la répartition de ces corps étrangersde la sphère ORL montre que les localisations nasalesoccupent la seconde place : 1313 corps étrangers œsopha-giens, 700 localisations nasales, 320 auriculaires et 240 corpsétrangers bronchiques. Ces chiffres nous font dire qu’ily a un corps étranger bronchique pour 1,3 corps étrangerauriculaire pour trois de type nasal et cinq œsophagiens(Tableau 1).

Le corps étranger des fosses nasales est généralementaccidentel survenant lors du jeu ou après découverte parl’enfant d’un objet négligé ou méconnu dans son environne-ment. Il survient habituellement chez des enfants ayant undéveloppement normal. Il peut être favorisé par un terrainparticulier : retard mental, trisomie ou toute autre infirmitépsychomotrice [7].

L’âge de prédilection des corps étrangers des fossesnasales se situe vers quatre ans [8,9].

Pour Michael et al. la majorité des corps étrangers desfosses nasales se voient entre deux et cinq ans [7]. L’âgemoyen est de trois ans pour Francois et al. [10] et Gregoriet al. [5].

Dans notre série 40 % de ces corps étrangers concernaientdes enfants entre trois et quatre ans et presque 80 % d’entreeux entre deux et cinq ans.

Ils sont rares avant deux ans et au-delà de neuf àdix ans. Cette répartition particulière est due au déve-loppement psychomoteur de l’enfant (préhension, pincepouce—index).

La répartition selon le sexe montre une prédominancemasculine (66 % de garcons dans notre série) dans la majorité

des publications [1,7,11].

Cette prédominance masculine est selon nous en rap-port avec le caractère souvent hyperactif des garcons et lerecours aux jouets miniature, aux objets arrondis ou sphé-riques (billes, boutons, capuchon de stylos).

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317

Quelques études font état d’une variation saisonnière desorps étrangers des fosses nasales avec une fréquence plusccrue au cours des périodes de fêtes [6] ou au contraire uneiminution en été [10]. Cette donnée n’a pas été constatéeans notre série, les caractéristiques ethnoculturelles étantariables dans chaque population.

La durée de séjour d’un corps étranger est éminemmentariable de quelques minutes à plusieurs mois. Elle dépende plusieurs facteurs : les circonstances de l’accident (épis-axis, rhinorrhée purulente et fétide), de la nature des corpstrangers (certains peuvent être bien tolérés et passentnapercus), les conditions socioéconomiques et la qualitée la couverture sanitaire (services spécialisés absents ouloignés).

Dans notre série, 55 % des corps étrangers avaient uneurée de séjour de moins de 24 heures dont 24 % moins d’uneeure. Généralement, les consultations précoces sont le fait’accidents survenant en présence de l’entourage (parents,ratrie, nourrice). Seuls 1,14 % des corps étrangers avaientne durée de séjour entre un et quatre mois et correspon-aient à des variétés inertes découvertes à la suite d’unebstruction nasale persistante ou une rhinorrhée purulenteécidivante après le traitement.

Michael et al. rapportent une durée de séjour de4 heures dans 73 % des cas avec seulement 14 % de cas serésentant au-delà de 48 heures [7].

La nature des corps étrangers des cavités nasales estssez homogène dans les publications de la littérature etes différences reflètent surtout la prédominance de telleariété de corps étranger par rapport à un autre. Ces dif-érences obéissent à des considérations essentiellementconomiques et ethnoculturelles dans lesquelles évolue’enfant.

Dans notre série, 23 % des corps étrangers sont repré-entés par les perles synthétiques suivis par les variétéségétales (haricot, grain de tournesol, maïs, pépins deruits, cacahuètes. . .). Ces végétaux sont à la base de’alimentation des familles et sont facilement accessibles à’enfant : séchage à l’air libre, étals à hauteur d’enfants. Desorps étrangers alimentaires de type particulier ont été citésbonbon de type Tic Tac ou Smarties) avec une dissolutionossible dans le milieu nasal [6].

Les piles boutons sont relativement rares dans notre série1,2 %) et les corps étrangers vivants non rapportés. Ceserniers sont chez nous préférentiellement rencontrés auiveau des conduits auditifs externes. Les données de laittérature montrent la prédominance des corps étrangerse type plastique (jouets), de fragments de coton, papier,omme et des formes végétales [2,4,6,10].

Parfois les corps étrangers rapportés sont originaux :pingle à nourrice, morceau de bois, fragments d’argile,clats de verre (accidents voie publique), arêtes de poissons1,9,11,12].

Les lésions engendrées par la présence d’un corps étran-er au niveau de la fosse nasale sont variables en fonction dea nature et de la durée de séjour. L’œdème de la muqueuseituitaire (irritation, réaction inflammatoire) puis surinfec-ion avec suppuration nasale, saignement de la muqueuse

ulcération, hyperhémie) et formation de tissu de granula-ion (granulome réactionnel à corps étranger).

Dans les formes prolongées, on peut avoir une infectiones cavités sinusiennes, une rhinite atrophique et croûteuse,

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3 S. Kharoubi

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nasales est variable. L’expulsion spontanée à l’occasion d’unéternuement est possible. Ailleurs elle dépend de la natureet du volume du corps étranger. Certaines complications ontété rapportées dans la littérature 9,5 % pour Figueiredo et al.

18

ne anomalie de développement du maxillaire supérieurpalais ogival, trouble de l’articulé dentaire, malpositionentaire) le plus souvent en rapport avec l’obstructionasale chronique [13,14].

Les piles boutons constituent un cas à part, particulière-ent dangereux, et à l’origine de graves lésions. L’intensité

t le type de lésion est fonction du type de pile (mensura-ion, chimie), du nombre (une ou plusieurs) et surtout de laurée de séjour. Les ulcérations muqueuses sont quasi sys-ématiques. À un degré de plus, on assiste à l’installatione lésions importantes : perforation septale par nécrose duartilage, nécrose du cornet inférieur et du méat, rhiniteestibulaire. Les piles boutons agissent par trois méca-ismes : une pression mécanique (contact pile bouton aveces structures endonasales et nécrose de type pressionnelle),ne action chimique (composants chimiques de la pile) etnfin un mécanisme électrique en générant un courant entrenode et cathode transfixiant les structures endonasales15—17].

Sur le plan clinique, la symptomatologie d’appel est trèsariable et dépend de la nature, de la durée de séjour etes circonstances de survenue de cet accident. Habituelle-ent une tierce personne assiste à l’accident et l’enfant est

mené à la consultation de médecine générale ; pédiatrieu ORL pour corps étranger nasal. Méconnue ou négligé ilonne lieu à une symptomatologie : rhinorrhée unilatéraleécidivante et rebelle au traitement, cacosmie, épistaxis,bstruction nasale, douleurs de la face. Plus rarement onetrouve une infection régionale : sinusite, cellulite orbi-aire, furoncle nasal et staphylococcie de la face [1,18].arfois c’est une découverte fortuite : radiologique (den-aire — face). Un corps étranger découvert à l’occasion’une intubation nasale a été rapporté [19].

L’examen des fosses nasales permet de suspecter le diag-ostic et de prévoir le meilleur procédé pour l’extraction duorps étranger. On explique brièvement à l’enfant le dérou-ement de l’examen clinique et son but. Il est immobilisé sures genoux d’un des parents une main bloquant sa tête. Ontilise un spéculum auriculaire de gros calibre pour l’examenndonasal. Chez le grand enfant un spéculum nasal de typeillian ou Vacher, voire une optique rigide 0◦ permettentn examen satisfaisant. Le corps étranger se localise enénéral au niveau du plancher nasal contre la cloison enrrière de la tête du cornet inférieur. Sa profondeur dans laavité nasale est fonction de sa forme, de son volume et dea nature (dégradation partielle ou décomposition) et desnomalies éventuelles associées (déviation septale, luxa-ion chondro-vomérienne, hypertrophie des cornets). Pluse corps étranger est petit et d’épaisseur réduite, plus il estostérieur. Des sécrétions nasales mucopurulentes sont sou-ent associées. Les piles boutons génèrent des lésions plusraves : ulcérations hémorragiques, nécrose et lyse septale1,16,17].

La fosse nasale droite est plus fréquemment atteinte ;6,6 % des cas de notre série et deux tiers des cas pourichael et al. [7]. La bilatéralité reste possible de mêmeue les corps étrangers multiples et/ou multifocaux (nasalt conduit auditif externe, nasal et bronchique) d’où la

écessité d’un examen ORL complet et rigoureux.

L’imagerie n’est pas habituelle en dehors d’un inté-êt iconographique particulier. Les corps étrangers de typeétallique et les piles boutons sont en revanche bien F

igure 2. Corps étranger de type pile-bouton.

llustrés par des radiographies standard de face surtouti l’examen clinique s’avère difficile ou non concluantFig. 2 et 3).

L’évolution spontanée d’un corps étranger des fosses

igure 3. Corps étranger métallique (trombone).

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Corps étrangers des fosses nasales

[8] : surinfection, cellulite de la face, rhinite vestibulaire ;épistaxis récidivante ; perforation septale et nécrose du cor-net inférieur (pile bouton), apnée du sommeil, septicémieet tétanos [1,7,9].

L’accumulation de sels calciques sur et autour du corpsétranger aboutit à la formation d’une rhinolithiase [20].

Un corps étranger des fosses nasales diagnostiqué imposeson extraction.

En fonction du lieu de consultation, le corps étrangerpeut être pris en charge par l’urgentiste, le pédiatre avecdes taux de réussite allant de 60 à 90 % [6].

Le rôle du spécialiste ORL devient prépondérant devantles cas ou le corps étranger n’est pas visible ou particu-lier nécessitant une instrumentation adaptée. Par ailleurs,il dispose de l’endoscopie (rigide ou souple) susceptibled’apporter un plus, voire un confort dans le traitement.

Une question peut s’imposer : faut-il faire l’extractiondu corps étranger en urgence absolue ou différer cet actepour être dans des conditions optimales de sécurité (person-nel qualifié, matériel. . .) ? En réalité tout dépend du lieu deconsultation (milieu adapté et spécialisé ou pas) et du typede corps étranger : une pile bouton nécessite une extractionen urgence en raison d’une morbidité importante associée.

L’extraction doit obéir à un protocole rigoureux et pré-définit assimilé à un véritable acte chirurgical (Fig. 4).

Dans la majorité des cas une anesthésie locale simple(xylocaine avec vasoconstricteur) et une instrumentationadaptée permettent l’extraction du corps étranger dansdes conditions optimales de réussite et surtout de sécu-rité. En effet, le risque majeur étant la bascule du corpsétranger à travers la choane aboutissant à une situationdangereuse, voire gravissime du corps étranger laryngo-trachéobronchique.

La littérature abonde de procédés d’extraction des corpsétrangers des fosses nasales souvent simples parfois ori-ginaux et quelquefois anecdotiques [18]. L’extraction à lapince de type Lubet-Barbon est le procédé de choix notam-ment pour les corps étrangers antérieurs et solides.

Figure 4. Revue de quelques variétés de corps étrangers (pilebouton, plastique, végétal, pépin).

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L’utilisation d’un crochet introduit dans la partie pos-érieure de la fosse nasale et ramenant le corps étrangerrogressivement d’arrière en avant l’accouchant au niveauu vestibule narinaire est un moyen très utilisé sur-out pour les corps étrangers antérieurs de petite taille1,21,18].

L’aspiration permet l’extraction des corps étrangersriables, ronds et larges [1,22]. L’utilisation des sondes àallonnets est souvent rapportée surtout dans les manuelse premiers soins ou les centres d’urgences pédiatriques.ne sonde de type Folley (5-6-8F) ou de type Fogarty est

ntroduite après lubrification dans la partie postérieure desosses nasales, dépasse le corps étranger puis est rempliear 0,5 à 2 cm3 d’air ou d’eau. En la retirant, elle accrochee corps étranger et permet son expulsion. Le procédé estrédité de 90 % de succès [23].

Les procédés pressionnels sont une autre variante tech-ique d’extraction des corps étrangers des fosses nasalesais qui requièrent une grande expérience, une bonne pra-

ique et la disponibilité de moyens (bloc opératoire) de prisen charge d’une éventuelle bascule du corps étranger danses voies respiratoires basses. L’insufflation orale utilise unasque Ambu-oral chez un enfant en position de Trendelen-urg tête inclinée à 30◦ avec occlusion de la fosse nasale nonbstruée par le corps étranger [24,25]. La pression nasaleositive repose sur le même principe et utilise après vaso-onstriction nasale une sonde à oxygène avec un débit de0 à 15 l/min au niveau de la fosse nasale controlatérale26,27].

Le lavage des fosses nasales n’est qu’une variante deression nasale positive en utilisant une seringue injectantvec force 7 ml de sérum salé isotonique dans la fosse nasaleibre [28].

Ces procédés pressionnels sont potentiellement dange-eux. Nous pensons qu’ils sont à éviter et ne sont pasecommandés pour les ORL qui disposent de moyens et tech-icité spécifiques adaptés aux corps étrangers des fossesasales.

L’utilisation cyanoacrylate (super glue) est en revancheriginale. Cette colle à séchage rapide est déposée surn porte coton et appliquée au contact du corps étranger0 à 60 s. Elle aide à l’extraction de certaines varié-és de corps étrangers lisses, arrondis ou en absence’une instrumentation adéquate [29]. Enfin une pince oune sonde magnétique peut solutionner d’une facon trèsimple l’extraction des corps étrangers de type métalliques30—32].

Certaines publications font état de difficultés dans 25 %es cas nécessitant des tentatives itératives et le recoursplusieurs artifices techniques d’extraction. Ces situations

eprésentent moins de 5 % de notre série soit du fait dea forme ou de la durée de séjour du corps étranger maisurtout en raison de manipulations antérieures [24].

Dans les cas difficiles on a recours à l’anesthésie géné-ale sous intubation et l’utilisation du microscope et de’instrumentation endonasale endoscopique.

La chirurgie par voie externe (vestibulaire, allotomie,

egloving) est réservée aux formes compliquées (infec-ion des cavités sinusiennes, granulations hémorragiquesnglobant le corps étranger, polype nasal) ou particulièresnombre et formes du corps étranger, anomalie ou variationsnatomiques des fosses nasales).
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20

Une antibiothérapie et un traitement local sont de miseour les formes compliquées ou en cas de piles boutons.

Un contrôle clinique à la troisième ou quatrièmeemaine est souhaitable pour s’assurer de la guérison totalet diagnostiquer éventuellement certaines complicationssynéchies nasales, perforation septale).

Les synéchies peuvent nécessiter un traitement chirur-ical avec section de la bride et interposition d’une feuillee silastic fixée à la cloison durant quatre à six semainesusqu’à cicatrisation. La prise en charge des perforationseptales est plus difficile.

Elle s’adresse aux perforations symptomatiques (épis-axis, croutes à répétition, sifflement, rhinolalie, rhinorrhéentérieure et postérieure) et fait appel soit aux lam-eaux mucopérichondraux, mucopériostés ou à la misen place d’un obturateur (silastic ou résine acrylique)33].

onclusion

es corps étrangers des fosses nasales constituent un acci-ent fréquent en pratique médicale notamment au course la petite enfance (2—4 ans). C’est la résultante de’interaction de l’enfant qui se découvre et découvre leonde extérieur.Cet accident est généralement connu de l’entourage ce

ui rend sa prise en charge rapide avec le minimum deéquelles ou de complications.

La gravité des corps étrangers peut résulter de leurature, toxicité locale ou loco-régionale, de la survenue deurinfection dont certaines sont assez morbides (sinusite,ellulite, vestibulite), voire de leur migration spontanéerare) ou provoquée par des manœuvres adéquates chezn enfant agité. L’irruption du corps étranger dans lesoies respiratoires basses bouleverse totalement le pronos-ic.

L’extraction doit se faire à chaque fois que le corps étran-er est mis en évidence. Elle doit obéir à des règles strictese sécurité et d’avoir lieu de préférence en milieu spécia-isé.

Un effort particulier doit être fait par les fabricants deouets quand au respect des normes de sécurité et proposées produits adaptés à l’âge de l’enfant et son développe-ent psychomoteur.L’industrie électronique doit fournir des informations

pécifiques sur les risques liés à l’ingestion ou l’inhalationes piles boutons et contribuer à l’instauration d’un code deonduite depuis la production, l’usage jusqu’au recyclage deette variété particulière de corps étranger.

onflit d’intérêt

ucun.

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