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1 Quelques souvenirs de Claudius Linossier Sainte-Agathe la Bouteresse, MA COMMUNE

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Quelques souvenirs …

de Claudius Linossier

Sainte-Agathe la Bouteresse,

MA COMMUNE

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Je n'ai jamais rien écrit, sinon des lettres à ma famille et à des amis, alors je me suis lancé dans cette aventure pour laisser un souvenir du passé. Je ne suis ni un poète ni un écrivain, mais au cours d'un apéritif, j'ai rencontré un ami, qui après avoir lu mon arbre généalogique dédié à ma famille, m'a conseillé de publier ces mémoires sur ma commune, et sur moi-même. Il m'a proposé de se charger de la mise en œuvre. Je tiens donc à remercier cet ami, Mr P. Verney-Carron, ancien maire de la commune, car sans lui je n'aurais jamais publié ces mémoires.

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Je m'appelle Claudius Linossier, je suis né à Boën-sur-Lignon le 9 juillet 1922. Un incendie avait détruit entièrement l'exploitation agricole de mes parents, au lieu dit « la Chaux » à Boën, et ceux-ci se sont retrouvés sans logement, on peut même dire à la rue. Je vis donc le jour dans une baraque en planches que mon père avait construite à l'emplacement actuel du C.E.S. de Boën, en avance sur la date prévue, et pesant 1 kg 200. Nous sommes venus à Ste Agathe en septembre de la même année, en location, et mon père fut embauché à la Tuilerie. J'ai fréquenté l'école primaire de cette commune jusqu'à mon certificat d'études où j'ai été reçu premier du canton. Je suis entré apprenti dans une imprimerie à Boën en 1936, l'année où fut votée la loi sur les congés payés. Sainte Agathe m'a vu grandir, j'y ai vécu jusqu'à l'âge de 20 ans, pour rejoindre ensuite les Chantiers de Jeunesse, puis déporté du travail obligatoire (S.T.O.) en Autriche, c'était la guerre de 39-45. Ensuite en 1945, année de mon mariage avec une stéphanoise, je rejoins la ville de Saint-Etienne, toujours dans l'imprimerie, dont 32 années dans la presse stéphanoise, au journal “La Tribune-Le Progrès”. Nous rendions souvent visite à mes parents, et comme l'on revient toujours à ses premiers amours, en 1982, suite à un licenciement économique, j’avais tout de même 60 ans, nous sommes revenus avec mon épouse terminer nos jours dans cette commune où nous avions toute notre famille Au cours de ma retraite, j’ai beaucoup participé à la vie de la commune sur le plan associatif :

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- Six années au conseil municipal, - six années président du club de foot dont je garde

un excellent souvenir, - deux années président du centre médico-sportif, et - douze années président du Club des Ainés.

Au cours des années passées au journal, j’ai participé à la vie mutualiste : trésorier et président de la Mutuelle Imprimerie, ensuite vice président de la Mutuelle du Livre ; membre du conseil d’administration des Sociétés Mutualistes de la Loire pendant 20 ans, avec beaucoup de déplacement dans la capitale ; membre fondateur des Mutuelles d’Entreprises ; secrétaire du Comité d’entreprise du journal. Alors, avant de rejoindre mes aïeux j'ai décidé de raconter dans un livre mon Sainte Agathe, votre Sainte Agathe, cette commune qui m'a vu grandir, comment vivaient les gens à cette époque, le passé de la commune de Sainte Agathe et le hameau de la Bouteresse, presque deux communes distinctes, qui d'ailleurs furent jumelées en 1792. J'ai voulu modestement laisser à ses nouveaux arrivants, à cette nouvelle population qui est venue habiter cette commune où il fait bon vivre, un souvenir du passé, de mon passé, de cette vie rurale de l'époque. Elle ne ressemble en rien à celle d'aujourd'hui, où la population en 1922 était de 545 habitants, elle a plus que doublée maintenant et on ne peut que s'en réjouir. Ce que je voudrais dire aussi, c'est seulement au terme de son existence que l'on se rend compte que l'on a oublié de poser des questions à ses parents sur leur vie, leur passé. Sans doute cette erreur est à mettre sur le compte de la jeunesse. L'on se rappelle de certaines informations que l'on a pu

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glaner par ci par là, mais l'essentiel, ils l'ont emporté. Ils avaient connu des moments difficiles et par pudeur peut être, ils ont préféré garder le silence. Vous trouverez aussi dans ces pages des récits beaucoup plus récents sur la foire de la Bouteresse du mois de septembre, comme des pages sur le vieux Sainte-Agathe. Des récits sur les soirées, appelées « Nuit des Vedettes », où les bénéfices étaient reversés au profit de la recherche contre le cancer, et permettaient également de financer la construction de la salle des fêtes. Vous trouverez un fait divers qui à l'époque avait fait la une des journaux, c'était l'assassinat du curé de Sainte Agathe et de sa servante, en 1901. Ma mère qui avait sept ans en avait gardé un souvenir inoubliable, mais ma grand-mère qui était à la messe ce dimanche matin s'en souvenait encore bien plus. Vous trouverez aussi quelques pages concernant un drame qui a bouleversé toute la jeunesse de l'époque, c'était la guerre de 39-45, j'avais alors 17 ans.

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LA COMMUNE DE SAINTE-AGATHE-LA-BOUTERESSE

La commune de Sainte Agathe-la-Bouteresse est située dans la plaine du Forez à une altitude de 387 mètres pour une superficie de 1.175 hectares. Elle est séparée en deux, dans sa partie basse par la Route nationale 89, devenue aujourd'hui route départementale. L'essentiel de l'habitat se trouve de part et d'autre de cette route extrêmement rectiligne, au nord de la commune de rares lieux-dits (la Barge, les Hitres, les Marceaux) sont isolés au milieu de vastes pâturages et quelques bois de feuillus et conifères. Deux principaux bourgs sont placés sur l'ancienne voie de communication : la Bouteresse et Sainte Agathe-la-Bouteresse, chef-lieu de commune. Le long de cet ancien chemin, l'habitat est très dispersé, se regroupant parfois en de rares hameaux (le Perrier, les Tuileries, Mollian, les Echaux, les Terrinats, Bonlieu). La commune de Sainte-Agathe-la-Bouteresse est composée de deux anciennes paroisses : Sainte Agathe et la Bouteresse. L'église de Sainte Agathe date environ du XVème siècle. Elle possède trois nefs et trois travées dont une travée de chœur complétée au XIXèrne par une abside à cinq pans. La paroisse de la Bouteresse aujourd'hui disparue, avait en 1222 pour collateur le prieur de Sail-sous-Couzan. La Bouteresse fut vraisemblablement la paroisse mère de Boën qui en fut détachée et qui était desservie par de simples vicaires, mais la situation s'est renversée et, avant 1614, la paroisse est ravalée au rang d'annexe de Boën.

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Le château de la Bouteresse qui occupait un rectangle entouré de fossés, a été en partie incendié, peut être à la Révolution. La Bouteresse était surtout connue pour ses foires, la première attestation d'une des deux foires date du 21 septembre 1409. Elle semble témoigner d'une manifestation importante, elle durait trois jours. Celle du 13 janvier a aujourd'hui disparu, mais elle a été reportée au deuxième samedi d'avril. Ces deux foires étaient très importantes pour l'économie locale, à cette époque, toute demande de création de foires était soumise à l'approbation des communes voisines. Sainte Agathe-la-Bouteresse était une commune rurale où l'agriculture occupait une grande partie du territoire. Il y avait cinq ou six grosses exploitations, beaucoup vivait avec cinq ou six vaches et un cheval, j'en ai compté plus de trente, et j'en oubli certainement. Le cheval, c'était le tracteur d'aujourd'hui, il avait un rôle important dans la ferme. C'était celui qui emmenait le jeudi, jour de marché à Boën, les gens acheter leurs victuailles pour la semaine, et surtout vendre le beurre, les œufs, la volaille, des légumes, il fallait bien un revenu pour vivre. C'était celui qui tirait la charrue pour labourer, c'était celui qui tractait la faucheuse pour les foins et pour les moissons, c'était aussi celui qui parfois le dimanche, emmenait les gens rendre visite aux amis et à la famille, un peu la voiture actuellement. A cette époque Sainte Agathe ne comptait que deux voitures, celle du maire et celle de l'instituteur, suivis

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ensuite par les commerçants. Toutes les fermes élevaient des porcs, il y avait ceux destinés au marché pour les vendre jeunes et ceux pour vendre gras. Mais il y avait aussi ceux destinés à l'abattage familial, principalement pour le jambon et les saucissons. Ces mets constituaient l'entrée pour le repas des vendanges et aussi celui de la batteuse, il fallait nourrir tout le personnel, les gens s'aidaient mutuellement, il y avait beaucoup de solidarité. Mais il y avait aussi des fermes avec deux vaches, j'en ai pour preuve mes grands parents maternels, ils ont vécu avec comme seul cheptel deux vaches. Ils élevaient un porc pour leur viande, car la viande bovine n'était pas souvent sur la table, quelque fois le dimanche. J'ai même connu un couple qui n'avait qu'une vache, et qui la faisait paître le long des fossés, attachée aux cornes par une corde. A cette époque, que j'ai bien connue, pas de butagaz pour cuisiner, pas d'électricité, je crois qu'elle est arrivée dans la commune en 1934, mais seulement à la cuisine car trop cher pour être dans les autres pièces. Je me souviens de mes parents qui allaient traire les vaches avec une lanterne à pétrole. C'est à peine croyable aujourd’hui'hui. Pas de carte de mutuelle, ne parlons pas du téléphone, et on se chauffait au bois, quel changement et quelle évolution!!! Beaucoup d'exploitants agricoles avaient une vigne, il me semble que le quart de la commune était en vigne, c'était

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un vin ordinaire, pur jus de la treille, sans aucun additif à cette époque et pas beaucoup de degrés. Souvent il y avait du vin nouveau pour la foire de septembre de la Bouteresse, on appelait cette boisson « la bourette », c'était le jus de raisin tiré à la cuve le lendemain de la vendange, un jus sucré, un peu trouble, qui se vendait facilement. Les habitants s'aidaient mutuellement pour ramasser ce raisin, nous gamins on adorait ces périodes, il y avait le repas en commun, c'était l'occasion de manger le « pâté » aux pommes fait maison, une bonne ambiance était toujours au rendez-vous. Personnellement je préférais les vendanges aux moissons, c'était moins pénible, il faisait moins chaud et il y avait plus de jeunessse, Je me souviens que pour les moissons, avec la chaleur, on buvait de l'eau avec un peu de vinaigre de vin, chaque famille avait un vinaigrier, « ça coupe mieux la soif», comme disaient les anciens. Ces moissons, que de mauvais souvenirs, c'était du tout fait main, quelle évolution, si nos anciens pouvaient revenir. Il y avait celui qui guidait le cheval tirant la moissonneuse, celui assis qui javelait pour faire la gerbe, ceux qui suivaient la moissonneuse pour attacher la gerbe avec un lien confectionné avec la paille coupée. On mettait ensuite en petite meule, en attendant de tout enlever pour faire un gerbier à côté de la ferme, en attendant le passage de la batteuse qui suivait les fermes, pour transformer en grain et en paille cette récolte. Quelle manutention ? Une partie était vendue au meunier

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ou à des particuliers qui avaient de la volaille, une autre partie était transformée en farine pour la consommation personnelle et pour le bétail, et aussi conservée pour la semence pour la prochaine récolte. Il faut dire qu'à cette période, pour tous ces travaux où il fallait beaucoup de personnel, la solidarité entre ces gens de la terre était très grande. Il y avait une grande amitié pour toute ces manifestations, que ce soit les vendanges, les moissons, et aussi la période où l'on tuait le cochon, qui pouvait durer deux jours. Tout ceci a disparu, avec la “modernité”. A cette époque les hivers étaient longs et froids, beaucoup plus qu'aujourd'hui. Nous n'avions pas beaucoup de distractions, pas de postes de radio, on était loin de la télévision. Alors entre voisins, il y avait les veillées, les hommes jouaient aux cartes, à la manille, on ne connaissait pas la belote, et les femmes tricotaient, devant la lampe à pétrole, et à côté du poêle à bois qu'il fallait approvisionner souvent. Les ménages n'achetaient pas souvent des chaussettes, ni des pull-overs, c'était l'occupation des femmes pendant ces soirées, elles tricotaient même leurs bas, car souvent dehors pour les travaux de la ferme, elles portaient des bas en laine. Et les veillées se terminaient toujours par le café et un petit coup de « gnole » pour les hommes, c'était l'eau de vie de raisins (les enfants avaient droit à un sucre trempé dans celle-ci). Comme toutes les fermes avaient une vigne, les propriétaires avaient ce que l'on appelait un privilège, 20 litres d'alcool sans taxe, le surplus étant payant mais très peu le dépassait. Cette grappe une fois le raisin pressé pour en extraire le

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jus, était emmenée vers un alambic qui se trouvait à Boën, pendant un mois, où chaque propriétaire amenait ces grappes et emmenait ses 20 litres d'alcool. Cette eau de vie servait aussi pour d'autres usages, les gens n'allaient pas à la pharmacie comme maintenant, il n'y avait pas la sécurité sociale ; un mal aux dents, un peu d'alcool sur la gencive ; mal à une articulation, un peu d'alcool pour frictionner ; mal à la gorge, une tisane avec la sauge du jardin et un peu d'alcool ; et s'il en restait, les femmes avec des extraits transformaient cette eau de vie en liqueur.

La batteuse à la Bouteresse

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MON SAINTE-AGATHE Sainte Agathe la Bouteresse est constituée de deux gros bourgs : Ste Agathe et la Bouteresse, qui dans ma jeunesse, avant la guerre de 39-45, avaient pratiquement leur vie séparée. Chacun avec ses commerces, son identité, et même sa fête patronale, ce qui n'était pas compréhensible, puisque la Bouteresse faisait partie de la commune. La fête de Sainte Agathe avait lieu le 5 février, et la fête de la Bouteresse le 24 août, jour de la Saint Barthélémy. Ces deux fêtes n'attiraient aucun forain, si ce n'est devant la mairie à Sainte Agathe, qui était l'école à cette époque, un forain habitant la commune vendait des babioles et bibelots pour les gamins qui n'avaient pas beaucoup d'argent à dépenser. Après la guerre de 39-45, la fête de la Bouteresse a disparu. Le bourg de Sainte Agathe n'a pas beaucoup changé dans son aspect immobilier, si ce n'est le monument aux morts des deux guerres qui se trouvait au carrefour, la salle des fêtes n’existait pas, le terrain de foot était en partie en vigne et le haut était la vigne du prêtre. Les classes, il y en avait deux : une se trouvait à la suite du secrétariat dans la mairie actuelle et la salle à manger des instituteurs était le secrétariat actuel de la mairie. L'autre classe, (la maternelle) était située dans les locaux de l'ancienne mairie, dans le bourg, où tous les matins les élèves se rendaient en rang depuis ce que l'on appelait la grande école.

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Voici le café au carrefour, en face de la salle des fêtes

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A cette époque, les enfants de la Bouteresse et des Marceaux venaient à l'école à pied, cela faisait tout de même assez loin. Je peux vous dire que cela représentait une jolie troupe, surtout de la Bouteresse, et qui parfois mettait un certain temps pour rejoindre leur foyer.. Il n'y avait pas de cantine non plus et à midi certains mangeaient chez des ménages proches, d'autres amenaient leur repas chez l'habitant. Au point de vue commerce, il y avait un café bureau de tabac qui existe toujours ; à la suite une épicerie, au carrefour sur la droite un café qui autrefois faisait restaurant et mercerie, (dont vous trouverez une photo ci-contre datant de 1920 je crois). Sur la route de Saint Etienne le Molard, à gauche un café qui lui aussi faisait épicerie, ce qui représentait trois cafés et deux épiceries. L'épicier en plus de son commerce faisait une tournée dans la commune pour approvisionner les maisons, car les gens n'avaient que leur vélo comme moyen de locomotion, et les plus âgés que leurs jambes.

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LA BOUTERESSE On ne peut pas parler de la Bouteresse sans avoir une pensée pour un homme qui a laissé un souvenir inoubliable dans beaucoup de communes : M. Joanny Durand, sculpteur, graveur et écrivain. Les monuments aux morts de beaucoup de communes dont Ste Agathe, Boën, Leigneux, Thiers, Saint-Etienne, et aussi bien d’autres sont ses œuvres, qui témoignent d’une grande maîtrise d’un art sobre et combien émouvant. Il reposait dans un caveau familial dans sa propriété à la Bouteresse, qui a été enlevé, je crois, suite à la vente de la propriété Il habitait à la Bouteresse, et j’ai eu l'honneur de le côtoyer au journal « Le Progrès » où il animait une rubrique. Dans son roman les « Contes de mon Cuvage », voici l'histoire des deux statues : C'était du temps que Ste Agathe s'appelait Ste Agathe la Bâtie et que la Bouteresse, commune indépendante, avait son église en face du puits St Genest, et qui fut détruite par un incendie en 1827. Saint Barthélémy patronnait Sainte Agathe et Saint Genest veillait sur les âmes de la Bouteresse Les deux saints locaux étaient d'accord mais les deux bourgs rivaux se défiaient sans raison et à tout propos. Le populaire prend toujours à témoin ou à partie quelqu'un ou quelque chose dans ses espoirs et ses défaites. Aussi, les saints patrons étaient-ils aussi souvent adulés que maudits, suivant qu'ils étaient rendus responsables du bien et du mal échus aux mendiants de leurs interventions. « Quand le soleil dessèchait les pommes de terre à Ste

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Agathe, c'était de la faute à Saint Genest. Quand la pluie faisait moisir les raisins à la Bouteresse, c'était de la faute à Sainte Agathe ». Mon histoire s'arrête là, mais j'ai voulu rendre hommage à un grand sculpteur, et aussi écrivain de l'époque. Mais la Bouteresse n'avait rien à envier à Sainte Agathe, certes il n'y avait pas d'école, mais les commerces étaient à égalité. Il y avait un café avec sa boulangerie, et qui existe encore mais sans la boulangerie. En face dans l'angle de la rue un café dont l'immeuble a été démoli dans les années 85-87, et plus loin sur la nationale un café qui lui aussi faisait épicerie. Le propriétaire, ainsi que le boulanger approvisionnaient à leur domicile les gens de la commune. A côté se trouvait aussi une « bascule », on appelait ainsi ce matériel qui servait à peser des grosses charges, peut être du monde agricole, elle fut démolie après la guerre de 39-45. Par contre la Bouteresse était le lieu de résidence de beaucoup de forains, j'en ai compté jusqu'à six, ils avaient leur roulotte, tirée par un cheval; plus tard des camionnettes. Ils déballaient leurs marchandises sur les marchés des environs : Balbigny, Feurs, Boën, Montbrison, etc…, c'était une autre époque.

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Voici le café à gauche en venant de Boën, après la route de

Champbayard, à droite on aperçoit la chapelle

Pour les fêtes communales, il y avait bal dans tous les cafés, les familles se réunissaient le soir après le travail dans les fermes, pour faire la fête, ça dansait, et sur les tables c'était vin et limonade. On faisait la fête jusqu'à minuit, et nous gamins on adorait ces repas et réunions de famille pour se retrouver et s'amuser. Les cafés à Sainte Agathe comme à la Bouteresse avaient tous un billard, et le dimanche après la messe, car à cette époque le dimanche (jour du Seigneur) réunissait à l'église beaucoup de personnes, c'était un peu la sortie de la semaine. Les hommes se donnaient rendez-vous au bistrot pour la partie de billard, on jouait à quatre contre quatre, tous les deux points changement de joueurs, et ça durait jusqu'à midi. Devant quelle boisson? je ne m'en souviens pas.

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Parfois c'était animé. D'autres jouaient aux cartes, à la manille, et les dames buvaient le café chez les amis ou la famille. C'était une habitude, tout le monde se connaissait, et la commune était moins peuplée que maintenant, et il y avait à cette époque une grande amitié et une grande solidarité. Autrefois, nous conte Jean-Paul Gourgouillon dans sa « Terre d'Astrée », les foulons sous le patronage du Saint Barthélémy de Sainte Agathe la Bâtie, travaillaient les peaux. Ils ont laissé leur nom au village puisque pendant longtemps on a appelé ‘batterets’ ou ‘boterets’ ces moulins à gauchons, nom sous lequel on désignait les fouleurs. La Bouteresse possédait sa propre église dédiée à Saint Barthélémy, elle fut détruite en 1827 par un gigantesque incendie, ainsi que le château fort, dont il reste maintenant un manoir du seizième siècle flanqué d'une massive tour carrée. Un solide escalier de pierre dessert l'intérieur qui a conservé sa vieille physionomie. De la terrasse du château on embrasse dans un coup d'œil féerique le paysage de l'Astrée. A une courte distance, on remarque une construction en pisé, complètement en ruine, que flanque encore une tourelle circulaire. C'est la résidence que firent construire peu avant la Révolution, les Mallets de Vaudègre. En face de l'église se trouvait la statue de Saint Genest, provenant de l'ancienne chapelle, cachée dans une niche dans le puits communal, portant le nom de puits Saint Genest, cette sculpture de Saint Genest, comédien jouant de la musette, était vénéré par les gens du voyage. Plus tard elle fut mise à l'abri des voleurs. Une petite chapelle fut construite en 1930 par l'ancien curé Rondel, elle appartenait à une association privée. J'étais

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alors « enfant de cœur » et je me souviens de l'inauguration, j'avais embrassé la bague de Monseigneur dans une maison en face de la chapelle, où les autorités religieuses avaient revêtu leurs habits de cérémonie. “C'est peut être pour cette raison que je peux vous écrire aujourd'hui”.

Voici la chapelle de la Bouteresse

Aujourd'hui cette chapelle est devenue une créche pour les enfants. La Bouteresse fut presque inséparable de la Goutte, le 24 février 1401, teste Jean Foron, damoiseau, qui veut être enterré au cimetière de Valbenoite et cite Pierre Foron son frère, damoiseau seigneur de La Bouteresse. Un autre membre de la famille Florimond est cité en 1421. Les du Cros, seigneurs de la Goutte, le furent aussi de la Bouteresse, de même les Mallets de Vaudègre, dont un des membres, Jean-Baptiste Mallet de Vaudègre fut marié à Marguerite de Pomeys, le 26 août 1766.

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Le propriétaire actuel est M. Landais qui a largement contribué à la restauration et à l'entretien du château. En 1740 Sainte Agathe comme nous l'avons précisé au début, se nommait Sainte Agathe-la-Bâtie. De 1770 à 1771 elle fut baptisée Sainte Agathe-sur-Lignon. Avant 1789 elle se composait de deux paroisses, Sainte Agathe et la Bouteresse que l'on réunit en 1792 pour former la commune actuelle. C'était déjà le regroupement. Au lieu-dit Bonlieu il existe une ancienne abbaye cistercienne de femmes, qui assura par la suite l’éducation des filles de la noblesse forézienne, fondée aux environs de 1200 par Wilhemine, femme du comte du Forez, Guy II. Les bâtiments conventuels sont détruits, il ne reste que l'église divisée en trois nefs. L'abside majeure est heptagonale, percée de trois fenêtres. Deux absides secondaires placées en éventail de part et d'autre de l'abside principale terminent les collatéraux. L'ensemble mesure 26,35 mètres de long sur 15,43 de large et 8,90 de hauteur. Les traditions cisterciennes ont été respectées par l'ornementation. La simplicité des lignes à l'intérieur et à l'extérieur est du meilleur effet Les Comte d'Urfé avaient leur tombeau dans le cœur de l'église. En 1545 Claude d’Urfé fit construire un mausolée, sa femme Jeanne de Balzac fut ensevelie dans un tombeau de marbre, puis Claude d’Urfé, mort en 1558 et Jacques, marquis d’Urfé, mort en 1657, y furent ensevelis. Mais au cours des guerres de religion, les séculiers vidèrent le mausolée. Les révolutionnaires de 1793 achevèrent la destruction. Au territoire du Bouchet se trouve un cimetière du moyen âge.

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LA TUILERIE Mais Sainte-Agathe n'était pas occupée que par le monde agricole, il y avait aussi la richesse du sous-sol en argile, d'où l'implantation d'une usine qui transformait cette richesse en produits de construction et de couverture des maisons. C'était ce que l'on appelait la Tuilerie Louis Moulin, en bordure de la Nationale 89.

Sur cette photo, on peut voir la cheminée qui a disparu, et les

godets qui remontent l’argile

Existait aussi la Tuilerie Auguste Deschamps dont l’activité prit fin à la guerre de 14-18. Comme témoin du passé, on peut voir la cheminée encore debout dans la propriété de ses petits enfants, et cette photo d’époque qui montre en arrière plan un séchoir à tuiles, dont à gauche une personne tient un moule à tuiles creuses, et aussi une autre personne tient un moule à galandages.

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On peut voir aussi un chien attelé à une petite charrette, et derrière, Mr et Mme Auguste Deschamps, qui fut maire de la commune pendant plus de 20 ans, et aussi conseiller général. A l’époque c'était un grand personnage que j'ai bien connu. En ce qui concerne la petite charrette sur la photo, je savais par mes parents que le boulanger de la Bouteresse faisait la tournée du pain dans la commune avec ce mode de locomotion, J'ai connu à l'école communale beaucoup de ces enfants dont les parents étaient venus travailler à l'usine. Ils venaient surtout des communes de la montagne environnante, l'usine qui se développait à cette époque avait construit une cité pour les loger, avec un jardin attenant, oh c'était sommaire (aujourd'hui il n'y aurait pas preneur). C'est pour cette raison que l'on avait vu arriver en nombre ces familles, une aubaine pour l'école, dont les

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parents travaillaient tous les deux à l'usine. Le travail n'était pas de tout repos, je me souviens que des femmes étaient au chargement des tombereaux de tuiles, qui étaient emmenés avec les chevaux à la gare de Boën pour différentes destinations. Les livraisons proches étaient acheminées par la route. Et je peux vous en parler! car lorsque nous sommes arrivés en 1922 sur la commune, avec rien en poche, suite à l'incendie que j'ai relaté précédemment, nous étions en location et mon père s'est embauché à cette usine comme voiturier. Il m'avait raconté qu'il allait à Feurs, Montrond, Montbrison, avec deux chevaux et les chargements de tuiles ou briques, en marchant à côté de ces tombereaux, que je revois, avec des grandes roues, il fallait que ce soit solide, car cela représentait du poids.

Les tuileries et les cités ouvrières

Il m'avait raconté qu'il avait livré à Sail pour l'usine Gauchon. Il y avait travaillé cinq ans, pour reprendre ensuite une ferme où j'ai grandi entouré de ma soeur et de mon frère.

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La Tuilerie a participé à l'évolution de la commune par la taxe professionnelle, à l'époque c'était la plus forte rentrée d'argent dans le budget, car il n'y avait pas beaucoup d'usines. Les jeunes allaient travailler à Boën, et la population était moins importante que maintenant, c'était pratiquement la moitié.

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LA VIE DES FEMMES A LA CAMPAGNE

De 1922 à nos jours, il y a eu une très grande évolution, surtout pour les femmes à la campagne. La première qui m'avait marqué chez mes parents, c'était l'arrivée dans les fermes de la bouteille de gaz, le butagaz -je possède encore le premier réchaud de mes parents, à deux brûleurs, et qui a été utilisé sur le champ de foire par une association -. Plus besoin d'allumer la cuisinière pour le déjeuner, par les grosses chaleurs, c'était terrible, je me souviens chez mes parents, on déjeunait parfois à la cave, c'était là qu'il y avait un peu de fraîcheur! Cette cuisinière que l'on devait allumer chaque matin, et que j'ai vu certains hivers très froids, la bouillotte gelée au lever. Inutile de vous dire que nous partions à l'école sans faire notre toilette. La deuxième évolution qui a changé la vie des femmes à la ferme, mais qui est venue beaucoup plus tard, c'est le lave-linge. Vous ne pouvez imaginer ce qu'était le jour de la lessive dans une ferme, les grosses exploitations avaient un valet et une bonne, mais pour toutes les autres petites fermes, c'était la corvée incombant à la femme. L'eau de la lessiveuse bouillait sur la cuisinière avec le linge blanc, et l'après-midi c'était la corvée du rinçage (une photo montre une dame au Lignon, avec en arrière plan le pont du Lignon). Mais il fallait aller au Lignon ou au bief de la Bastie! C'était la brouette, les petites remorques à deux roues sont venues plus tard, mais la corvée n'était pas finie. Au retour il fallait emprunter la fameuse côte que l’on appelait à l’époque « la côte de chez Vignon » du nom de la ferme

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qui se trouvait au bas de cette montée. Parfois les hommes venaient à la rescousse

Une dame de Ste Agathe rinçant son linge en dessous de la

cascade, avec le pont en arrière plan

Quelques fois le soulagement était au bout de l'effort, car très souvent une porte s'ouvrait pour offrir un café qui était le bienvenu. Je me souviens de ces moments de détente lors de cette corvée, et de la solidarité qui faisait la force de cette génération, où la majorité des couples avait connu la guerre de 14-18, et où la plupart des hommes était des blessés de guerre.

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Une « GARE » à Sainte Agathe Sainte Agathe ou plutôt la Bouteresse avait, avant 1945, sa gare, ou plutôt sa salle d'attente. Il existait une ligne de chemins de fer départementale qui reliait Boën à Roanne, avec une locomotive que les gens appelaient “la Galoche”et aussi « le Tacot». J'ignore pourquoi tous ces surnoms !!!! Ce dont je me souviens, à son retour de Roanne, au moment où le convoi passait dans le creux après Arthun pour se diriger sur Boën, il y avait une petite côte, le convoi devait rouler très doucement. Les anciens disaient :“si tu descends pour un besoin naturel, tu peux reprendre ta place en courant”. A Boën, la gare se trouvait après le rond-point à gauche, en arrivant la locomotive se positionnait sur un disque qui pivotait pour la remettre dans le sens du départ. La voie longeait la départementale 1089 jusqu'au rond-point de la nouvelle boulangerie, longeait la route appelée Zone Industrielle, la salle d'attente se trouvait après le carrefour de la route qui va à la Bouteresse, à une centaine de mètres. Je me souviens de deux inconvénients à l'époque: sur la 1089 les chevaux avaient une peur bleue de ce convoi car il n'y avait aucune protection, et avant l'entrée en gare de Boën, les rails traversaient la route, vers le rond point actuel, heureusement qu’il y avait moins de circulation que maintenant. Combien d'entre nous sont tombés, la roue avant de la bicyclette glissait sur ce rail, surtout par temps de pluie.

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LA GUERRE DE 39-45 J'avais 17 ans à la déclaration de guerre. Ce drame qui couvait depuis quelques années à l'horizon, soudain éclata, c'était la déclaration de la guerre contre l'Allemagne. Si je vous parle de cette période, c'est que ma jeunesse a été détruite par ces événements, et beaucoup de restrictions entre autres. En 1941 j'avais trouvé du travail dans une imprimerie à Feurs, j'y allais en vélo, il n'y avait pas de cars, je commençais à 9 h. et finissais à 18 h., je peux vous dire que pour le retour la côte de Villedieu était longue. En ce qui concerne cette guerre, je revois ces affiches avec deux drapeaux entrecroisés annonçant la déclaration de la guerre, et la mobilisation générale. A cette époque tous les hommes en bonne santé effectuaient leur service militaire et possédaient un fascicule de mobilisation où était mentionné, en cas de guerre, leur lieu d'affectation. Les ennuis pour la population ne faisaient que commencer. Je revois ces hommes qui allaient rejoindre leur lieu d’affectation, partir avec leurs valises à la gare de Boën. Ils avaient dit au revoir à leur vie familiale, certains à leurs parents, d'autres à leurs épouses, ils abandonnaient tout ce qu'ils avaient construit et qui étaient leur avenir. On ne peut imaginer ce qui se passait dans leurs têtes, car la majorité de leurs pères avaient connu 14-18. Et dire que certains ne sont pas revenus, nombreux ont été faits prisonniers et sont rentrés en 1945, les enfants nés au départ de leur père avaient six ans.

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Je repense à ces moments pénibles, les familles avaient changé, les épouses avaient dû faire face aux tâches de la maison pour vivre, certains couples ont été brisés, ce sont des plaies qui ne se refermeront jamais. Même les chevaux avaient été réquisitionnés par l'armée, beaucoup de fermes se sont retrouvées sans leur principal outil de travail. Cette guerre a détruit la jeunesse à laquelle je faisais partie, la vie n'était plus comme avant; l'occupation allemande nous avait imposé des restrictions. Voici un aperçu des cartes de ravitaillement qui nous avaient été distribuées, toutefois il était plus facile de vivre à la campagne qu'à la ville. Pain : 240 gr. par jour. Viande : 250 gr. par semaine. Fromage : 75 gr. par semaine. Matières grasses : 550 gr. par mois. Sucre : 500 gr. par mois. Riz : 200 gr. par mois. Pâtes : 250 gr. par mois. La suppression des tickets pris fin en janvier 1950, mais les tickets de pain furent supprimés en février 1949. Mais pour nous les jeunes, ce n'était pas fini. LES CHANTIERS DE JEUNESSE Pour comprendre les événements de 1940-1945, il faut mesurer l'impact du coup de massue que nous avions reçu en juin 1940, la déroute complète de notre armée. C'est ainsi que les responsables du pays ont sur les bras les jeunes hommes de la classe 40, le gouvernement français va alors créer les Chantiers de Jeunesse.

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Voici une photo de ces chantiers de jeunesse, prise dans le Jura, on aperçoit une barrière, c'était la ligne de démarcation qui partageait la France en deux.

Sur cette photo, je suis à droite

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Ils sont un compromis entre le service militaire et le scoutisme, ils mobilisent pour une durée de neuf mois les jeunes de la classe 40. Les Allemands se rendent vite compte que ces hommes représentent un potentiel de main d’œuvre, ils ne les laisseront pas longtemps à la disposition du gouvernement de Vichy. Dès 1941, l’Allemagne s’intéresse aux chômeurs français et essaie de recruter des volontaires avec des conditions alléchantes, mais ils sont peu nombreux à répondre à cette offre. Lorsque l’URRS fin 1941 entre en guerre, l’Allemagne a besoin d’hommes pour faire tourner ses usines qui produisent pour la guerre. Les hommes, elle les cherche au-delà du volontariat, aidée dans cette tâche par un certain M. Laval, du gouvernement de Vichy, à la solde du gouvernement allemand, qui par un discours a prononcé cette phrase : « J’ai décidé que la classe 42 partirait toute entière en Allemagne », ce qui voulait dire, des Chantiers de Jeunesse au Service du Travail Obligatoire, c’est-à-dire le S.T.O. De manœuvres en manœuvres de la part des Allemands et de leurs séides de Vichy, est né le S.T.O., système d’esclavage de la jeunesse du pays dont je faisais partie. Nous n’étions pas d’accord avec cela il faut le souligner mais nous avons été pris en otage, et on ne pouvait y échapper. Voilà pourquoi j’ai voulu parler de cette période noire de notre pays, pour que le lecteur n’oublie pas. Je partis donc aux Chantiers de Jeunesse le 13 juillet 1942, et fut libéré le 23 février 1943, pour ensuite partir en Autriche le 5 juin 1943. Je fus rapatrié suite à une grave maladie qui m’immobilisa quatre mois à l’hôpital en Autriche. Arrivé à Paris et ne pouvant descendre du train, je fus récupéré 6 heures plus tard par le personnel de nettoyage,

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et emmené par la Croix Rouge à l’Hôtel Dieu où je restais un mois avant de rejoindre ma commune. Je pesais alors 47 kg. Je dois tout de même vous raconter une anectode : « A l’hôpital je buvais tous les jours un litre de tisane et un litre de lait, et qu’elle ne fut pas la surprise de voir un jour apparaître au fond du pot de lait un dentier, je ne vous dirai pas si c’était le haut ou le bas, car j’ai reposé le pot en fermant les yeux ». Ce sont des souvenirs que l’on ne peut pas oublier, et qui resteront graver dans ma mémoire, comme ceux que je vais vous relater maintenant. En mai 1945, après l’arrêt des combats, et mon état de santé s’étant amélioré, je fus réquisitionné par le maire de Ste Agathe. Je devais parcourir la commune la nuit à la recherche de militaires allemands qui n’auraient pas déposé les armes. J’étais accompagné dans cette tâche par un ancien prisonnier de guerre de la commune. Nous partions à 22 h., de Bonlieu en direction des Marceaux, en passant par Champbayard. Nous étions armés tous les deux, et nous n’avons jamais fait de mauvaises rencontres, je pense que c’était mieux pour tout le monde. Ces rondes de nuit n’ont duré que 15 jours. Ayant repris mon travail dans une imprimerie à St Etienne, nous nous sommes mariés le 4 août 1945, nous avions invité une centaine de personnes. C’était toujours les restrictions, et nous avions mangé du pain, évidemment. Qu’elle ne fut pas notre surprise de voir arriver le lendemain des noces les gendarmes de Boën, suite à une plainte pour savoir d’où provenait le pain pour toutes ces personnes.

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Mon père ne pouvait que dire la vérité, c’était notre grain, emmené au meunier à St-Etienne le Molard, et donné ensuite au boulanger. C’était illégal, car on ne pouvait pas disposer alors de sa récolte, mais tout s’est bien terminé. Nous avions aussi obtenu des bons de la mairie pour le costume, les chaussures, et même la vaisselle. D'autres souvenirs dont je me souviendrai toujours : M. Jacquet, notre meunier de la noce, était maire de Saint-Etienne-le Molard et fut ensuite député de la Loire pendant 24 ans, de 1952 à 1976. J'eus l'occasion de le rencontrer place de l'Hôtel de Ville à Saint-Etienne le 7 juin 1959, lors de la venue du Général de Gaule en voiture décapotable, il m'invita alors à la réception à la mairie.

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LES EVENEMENTS DU PASSE 26 NOVEMBRE 1901 DOUBLE ASSASSINAT A SAINTE- AGATHE Un crime épouvantable vient de jeter la consternation dans la région : le curé de Sainte-Agathe la Bouteresse et sa servante ont été assassinés dans la nuit de samedi à dimanche. A Sainte Agathe, situé à un peu plus d'un kilomètre de la Bouteresse, se dresse l'église de la commune, devant elle s'étend une place au milieu de laquelle s'élève, encadrée de quatre grands arbres une croix en pierre. En face de l'église le presbytère, une vieille maison élevée de deux étages construite avec une symétrie parfaite, c'est dans cette maison qu'habitaient le curé et sa domestique. Devant la cure, un jardinet, planté de rosiers et de fleurs diverses met un peu de verdure et de gaieté. Une vigne grimpante se promène le long des murs de la façade. Sur ce jardin s'ouvre la porte principale du presbytère, ainsi qu'une petite porte percée dans le mur de clôture et donnant accès à un vignoble. Derrière le presbytère, entourée d'un mur de clôture dans lequel est situé une porte donnant accès sur le clos, une vaste cour, une écurie, dans laquelle se trouve un cheval et une voiture lourde et démodée, un poulailler et diverses dépendances. Une porte s'ouvre de la maison dans la cour. L'intérieur de la cour est vaste. Au rez de chaussée, en face la porte d'entrée, un vestibule, au milieu duquel est placée une table, chargée d'une plante verte, masquant

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l'escalier qui monte aux étages supérieurs. A droite une salle à manger, meublée très modestement, et la cuisine, à gauche une vaste pièce servant de réception et près de l'escalier une pièce servant d'atelier de menuiserie au curé, qui s'occupait à travailler pour ses courts instants de loisirs. Au premier étage sont situées plusieurs chambres à coucher pour le curé, sa domestique et leurs visiteurs. Le curé vivait là, dans ce bourg paisible, estimé et aimé de ses paroissiens qu'il avait séduit par sa bonhomie, son abord facile et affectueux. DECOUVERTE DU CRIME C'était une grande fête la veille à Sainte Agathe, et les fidèles se pressaient nombreux dans l'église, attendant le curé qui s'était beaucoup dépensé pour donner plus de magnificence à l'office, mais il ne paraissait pas. Après quelques minutes d'attente, un des fidèles se détacha et appela le curé, aucune réponse. Justement inquiet de ce silence et voulant se rendre compte de ce qui pouvait le motiver, la personne prit une échelle, l'appliqua contre le mur et regarda dans la chambre du curé. Des lueurs rouges lui apparurent. Convaincu qu'il se trouvait en présence d'un commencement d'incendie, il alla prévenir plusieurs personnes, et après avoir enfoncé la fenêtre, ils pénétrèrent dans la chambre, les flammes avaient déjà dévoré les rideaux et les draps, et une botte de paille avait été placée sous le lit. Ils enlevèrent les cendres et découvrirent étendus côte à côte, brûlés et portant de nombreuses blessures, les cadavres du curé et de sa servante.

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Le coupable n’a jamais été identifié, le maire à cette époque était Claude Linossier, boulanger à la Bouteresse.

La place derrière l’église, à droite la cure où furent assassinés le

curé et sa servante

Ce fait divers qui avait fait couler beaucoup d’encre à l’époque, me fait penser à un autre qui est resté dans ma mémoire, je ne sais pourquoi. J’avais une dizaine d’années, je me souviens que le boulanger de la Bouteresse, Marius Linossier, qui n’était autre que le fils du boulanger cité plus haut, avait organisé une expédition à Montbrison avec des amis, pour aller voir l’exécution sur la place publique, d’un condamné à mort. C’était le dernier qui fut guillotiné en public, ensuite ce fut à l’intérieur de la prison.

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Avec internet, j’ai retrouvé la date : 7 juillet 1932, j’avais 10 ans ; ensuite les exécutions eurent lieu à la prison, la dernière 10 février 1948. Abolition de la peine de mort 1981. Je me pose une question, pourquoi être attiré par quelque chose d'aussi morbide, et qui va rester gravé dans la mémoire : voir tomber une tête. J’ai vu que les hôtels étaient retenus à l’avance, et les rues pleines de curieux. C’était juste un souvenir qui est resté dans ma mémoire, je m’arrête là et j’oublie. Un autre souvenir beaucoup plus gai et faisant partie de l’histoire de France, m’avait été raconté par ma grand-mère maternelle, qui en 1877, elle avait 11 ans. Elle gardait les oies derrière la maison que mes parents avaient acheté, en 1927, une vieille ferme, et qui à l’époque était en construction, et se souvenait avoir vu Mac Mahon passer les troupes en revue. Effectivement on retrouve dans des archives sur internet que Mac Mahon, lors d’une visite à Montbrison, était venu jusqu’à Boën et avait parcouru à cheval la route entre Boën et Feurs pour passer les troupes en revue. Ce sont des souvenirs faisant partie de l'histoire de notre commune.

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UN PETIT TOUR

A STE AGATHE-LA BOUTERESSE Les pages suivantes sont la reproduction de coupures de presse de l’époque pour des évènements marquant dans la commune.

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SAINTES-MARIES DE LA MER EN FOREZ Sainte Agathe-la-Bouteresse est réputée pour sa foire qui compte au nombre des plus importantes de la région et qui draine chaque année quelques six mille curieux ou gens intéressés. Jadis une importante tribu alignait ses roulottes à l'entrée du village, depuis le champ de foire jusqu’au bas de la cote du C.E.S. de Boën. Ici on vendait des paniers à vendange, là on disait la bonne aventure et le soir, autour des feux, les belles gitanes dansaient au son endiablé des guitares, en s'accompagnant du traditionnel tambourin. « J’ai connu cette période, et je peux vous assurer qu’il y avait de l’ambiance » Aujourd'hui, ces éternels errants délaissent peu à peu cette grande manifestation de la Saint Maurice. Pour répondre à un vœu de la population on leur avait fixé un emplacement réservé à leur intention et qu'ils pouvaient occuper durant leur séjour, mais ce lieu n’avait jamais été agencé pour y séjourner. Est-ce la raison pour laquelle ces gens épris de liberté se font ici de plus en plus rare. On est tenté de répondre par l'affirmative. Si avec cette désaffection du peuple de la route, le pittoresque s'en va, la foire par contre, bénéficie toujours de la même audience auprès des populations de la plaine.

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FOIRE DE LA BOUTERESSE

22 SEPTEMBRE Je pense que ces pages, qui retracent les foires d’antan, restent un hommage pour tous les organisateurs. Années 1990 – 1991 1990

UNE MANIFESTATION AGRICOLE QUI A CONSERVE TOUTE SA NOTORIETE

PRES DE 7.000 PERSONNES ETAIENT AU

RENDEZ-VOUS De l'avis des spécialistes, c'est l'une des foires les plus réputées de la région, et aussi des plus anciennes. Au carrefour du chemin de St-Jacques de Compostelle (par Montbrison et Le Puy) et de la route d'Aquitaine. La Bouteresse su exploiter dès le Moyen-âge, les avantages de sa position géographique, en limite de la plaine et de la montagne. La date de la foire, qui correspond à la fête de la Saint Maurice, permettait jadis aux habitants de la région de s'équiper en matériel pour les vendanges et d'acheter des volailles à engraisser pour Noël. Aujourd'hui les besoins ne sont plus les mêmes et pourtant la foire de La Bouteresse a gardé sa notoriété. Samedi matin, environ 6 à 7.000 personnes se sont retrouvées dans cette petite bourgade des environs de Boën-sur-Lignon pour environ 400 étalagistes.

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UN FOIRAIL ANIME Les marchands de bestiaux étaient arrivés les premiers, dès minuit et demi pour certains, ils avaient déchargé les animaux sur le foirail. Les forains étaient venus un peu plus tard, vers 4 heures du matin. C'était l'heure où les organisateurs commençaient à préparer les tripes et le pot au feu. A 8 heures, la foire battait son plein, et les voitures affluaient de toutes parts. Les gendarmes de la brigade de Boën et ceux du PSIG de Montbrison ont organisé la circulation et canalisé les véhicules qui cherchaient un stationnement, en direction des parkings et aussi le long de la route de Boën.

LE PROBLEME DES BOVINS Tout au long de cette matinée, l'on a vu des marchands de bestiaux, solidement appuyés sur leurs bâtons « discuter le bout de gras » à la queue des bovins. Les cours étaient moyens, en race charolaise, des génisses laitonnes se sont vendues entre 3.800 et 4.000 francs, soit à qualité égale 1.000 francs de moins que l'année dernière. Les génisses hollandaises prêtes au veau se sont négociées entre 6.500 et 7.500 francs, et les Montbéliardes entre 7.000 et 8.500 francs. Mr Jean-Paul Genevrier, responsable national des marchands de bestiaux, déplore cette situation, il explique que les éleveurs ont été pénalisés une première fois avec les quotas laitiers. Ils ont pensé remplacer ce manque à gagner en produisant de la viande bovine. Et maintenant, principalement à cause de la concurrence des pays de l'Est, les cours ont chuté dramatiquement. La situation des éleveurs est grave. « Il y a 1.2 million d'éleveurs en France. et 15% d'entre eux font entrer 85 % des devises. Cela signifie que 85% des

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éleveurs font entrer 15% des devises. C'est la situation de ces derniers qui est dramatique. Leur avenir n'est pas du tout assuré.

DURS, DURS, LES DEBATS Les moutonniers ont leurs problèmes. Un éleveur explique que cette année les agneaux se sont mal vendus, en conséquence les éleveurs n'ont plus d'argent pour acheter des reproducteurs. Un producteur avait refusé de vendre ses jeunes moutons à Beaucroissant parce qu'il trouvait les cours trop bas, il les a laissé partir à La Bouteresse 110 francs (contre 140 en 1990). Un éleveur de St-Romain-le-Puy revendiquait 400 francs pour une brebis, à midi il la chargeait dans sa remorque pour la ramener au bercail, parce qu'il ne voulait pas rabattre un centime. Un peu plus loin, un marchand de chèvres et de brebis de St-Julien-la-Vêtre discutait ferme avec un paysan d'Ambert, il venait de vendre une chèvre Alpine Chamoisée pour 250 francs et proposait le bouc à 400 francs. L 'Auvergnat lorgnait du côté de la remorque du tracteur, il s'intéressait à une brebis et son petit, le vendeur en voulait 150 francs. Après beaucoup de sollicitations l'Auvergnat glissait un prix à l'oreille de son interlocuteur. Celui-ci sursautait comme si une mouche l'avait piqué: « A ce prix là, je préfère tout ramener à St-Julien, ce n'est pas la brebis, ni son petit, qui mettront le tracteur en surcharge».

GALOP D'ESSAI Les porcs de 40 à 70 kg, ceux que l'on appelle les « champans » ou les « couratiers » sont partis facilement à 12 ou 13 francs le kilo. En revanche, les porcelets de 20 kg trop petits pour l'engraissement d'hiver, intéressaient peu de monde.

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Un producteur de St-Marcellin en avait vendu six à 11 francs le kilo, et il se plaignait de la diminution des cours. Les lapins sélectionnés de 3 à 4 mois se vendaient 80 à 100 francs pièce. Quant aux dindes, les noires de 2,2 à 2,3 kilos qui seront à point pour Noël se sont vendues de bonne heure à 48 francs l'une. Un habitant de La Tour-en-Jarez était venu tout spécialement chercher des « dindonnes » à La Bouteresse, il en a trouvé trois à sa convenance. En fin de matinée on constatait que les dindes noires s'étaient vendues comme des petits pains, il en a même manqué. Les blanches tentaient de trouver acquéreur à 13 francs le kilo. Parfois un cavalier fendait la foule, c'était un acheteur potentiel de cheval qui effectuait un galop d'essai. Un visiteur pouvait repartir de la Bouteresse sur un cheval de selle de 3 ans acheté entre 7.000 et 8.000 francs. Pour les enfants on traitait l'achat d'un poney à 2.000 francs. Quant aux chevaux de trait de 18 mois, ils changeaient de main pour 5 à 6.000 francs.

DE GRE A GRE Un pointage pratiqué vers midi sur le foirail permettait de constater que sur les 400 bovins exposés, près de la moitié avait été marquée par un acheteur. Somme toute, ce n'est pas si mal. M. Jean Thévenon, marchand de bestiaux à Champdieu, qui exposait 62 bovins, en avait vendu 46, il avait même négocié une grande montbéliarde pour 10.500 francs. « C'est du haut de gamme, une vache qui a des origines. Et dans cette qualité là, il y a toujours moyen de trouver un acheteur qui accepte le prix ». L'avantage d'un rendez-vous économique comme la foire de La Bouteresse, c'est que l'on peut y voir une vaste

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présentation d'animaux et de marchandises qui s'offrent à la comparaison. Les prix se négocient de gré à gré dans une ambiance bon enfant et pittoresque. A midi et demi, Mme Marcellin, maire de Ste Agathe la Bouteresse, et M. Michel Damas, président du Comité de la foire, tiraient les conclusions du millésime 1990. « Il y a eu beaucoup de visiteurs, et de nombreux acheteurs ». La foire d'automne de la Bouteresse était jadis réputée pour ses volailles. Les petites dindes que l'on trouve chez nous le jour de la Saint Maurice sont une spécialité du pays, elles se mangent pour Noël, cette année encore il y en avait beaucoup et elles se sont bien vendues. Voilà une tradition qui ne s'est pas perdue et nous nous en réjouissons. Rendez-vous est donné pour les deux foires de La Bouteresse de 1991.

Une foire d’autrefois

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1991 Cinq à six mille personnes se trouvaient lundi matin à la Bouteresse, près de Boën-sur-Lignon, pour la célèbre foire de la Saint-Maurice. Avec une préférence pour les « petites bêtes » plutôt que les grosses Les visiteurs étaient venus de toute la Loire, du Puy-de-Dôme, de l'Allier, de Haute-Loire et du Rhône. Par cette manifestation le carrefour de la commune de Sainte Agathe-la-Bouteresse confirme sa position de lieu de passage dejà connu au temps des Romains, c'était là que se croisaient la voie d'Aquitaine et le grand chemin du Forez. De siècle en siècle l'habitude s'est conservée d'un grand rassemblement agricole et commercial à la Bouteresse, pour le tout dernier jour de l'été, le 22 septembre. L'on parle habituellement de la « Foire du 22 ». Cette année la date a été décalée d'un jour. A la demande notamment des forains le comité d'organisation a suivi l'exemple de la foire de la Sainte Catherine, à Saint-Galmier, qui a lieu le lundi lorsque la date tombe un dimanche.

LES « PETITES BETES » SE VENDENT BIEN Cette année, la foire s'étalait sur une plus grande surface qu'à l'ordinaire. Malgré l'ambiance de fête, malgré le pot au feu et le bon jambon cuit que les visiteurs dégustaient sous les chapiteaux des associations locales, la foire étaient marquée par la conjoncture générale. En voyant passer les photographes de presse, un forain

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les prenait à témoin : Regardez tout ce monde qui passe, et pas un seul pour acheter. Comme pour le démentir, un grand gaillard lui a coupé la parole, «Eh, au lieu de tenir des discours, viens donc ici, j'ai besoin d'acheter une veste pour l'hiver». Plus loin, près du foirail, c'était un Auvergnat qui vendait des outils : « On ne gagne pas beaucoup d'argent, mais on fait plaisir à nos clients». Effectivement, la marchandise n'était pas chère, il vendait tout à moitié tarif du prix marqué ; et de toute la matinée son stand n'a pas désempli. Comme l'année dernière, les volailles, les« petites bêtes» se sont mieux vendues que les bovins. M. Moulin, correspondant de notre journal, qui est également placier pour la foire, a pu opérer un sondage en milieu de matinée auprès des exposants d'animaux; les dindes blanches se vendaient 46 F. le kilo, les noires 50 F, les poules et poulets 50 F. le kilo, les chapons 140 F l'un, les petits canards à partir de 18 F l'un, l'oie mâle 130 F, l'oie femelle 120 F, l'oie de Guinée 250 F l'une. Plus de 150 moutons étaient à vendre, certains ont trouvé acquéreur entre 800 et 1.300 F l'un. Les porcs ont trouvé à se vendre, ceux de 30 kilos 35 F le kg, 13 F. le kilo pour les« champans » (cochons de 40 à 70 kilos à engraisser), 10 F le kilo pour les truies.

LA VACHE A « MILLE FRANCS EN DESSOUS» Le marché aux bovins paraissait plutôt morose. M. J.-P. Genevrier, président des négociants en bestiaux, précisait qu'il y avait moitié moins d'animaux qu'habituellement, 400 au lieu de 800 en bonne période. « Les temps sont difficiles pour l'élevage traditionnel »,

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confie M Genevrier, « ici on voit beaucoup plus d'agriculteurs de 55 ans que de jeunes ». Pour lui, comme pour les autres négociants en bestiaux, la foire de la Bouteresse permet, non pas de vendre des animaux, mais de les présenter, de les montrer aux clients. Sur un plan général, il constate que malgré la crise, certains éleveurs arrivent à tirer leur épingle du jeu: « ce sont ceux qui produisent de la bonne qualité. Les bons broutards charolais se vendent, parce que pour ces productions là, les pays de l'Est ne peuvent pas nous concurrencer, en revanche, pour toutes les productions de qualité moyenne, la concurrence des Pays de l'Est est impitoyable ». Les bovins qui ont pu se vendre ont été négociés à des prix généralement situés 1.000 F en dessous des cours de l'année dernière. L'on peut parler de la vache à « mille francs en dessous ». Voici les cours pratiqués ce lundi : charolaise de 10 mois 2.400 à 3.400 F, charolaise de 18 mois 4.000 à 6.000 F, hollandaise prête au veau 5.500 à 6.500 F, montbéliarde prête au veau 6.000 à 7.000 F, chevaux de trait 7.000 à 8.000 F, poneys 2.000 à 3.000 F. « L'argent manque », précisait un éleveur qui assistait, en fin de foire, au chargement des animaux dans les camions, pour le retour, « mais il y a aussi la sécheresse». « Comment voulez-vous qu'un agriculteur, déjà endetté, s'encombre d'une vache s'il est obligé d'acheter le foin pour la nourrir ? »

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UNE COMMUNE PROSPERE Ste Agathe-la-Bouteresse s'est depuis quelques années singulièrement modernisée, la commune est desservie en eau potable à 90% grâce au syndicat de la Bombarde. Dix kilomètres d'égouts ont été construits, ceci dans le cadre du programme de l'assainissement qui sera continué. Tous les chemins vicinaux et ruraux ont été refaits. Deux places publiques ont été aménagées. Ceci est le passé, mais ici on pense aussi à l'avenir. Le maire M. Déchavanne qui préside aux destinées de la commune depuis 16 ans, avec une indiscutable compétence, nous a précisé les objectifs de la municipalité. Tout d'abord la construction d'une station d'épuration où se trouve le terrain d'épandage. Ensuite, ceci à l'intention des jeunes, la réfection complète du terrain de sports, car on est sportif à Sainte Agathe. Il y a encore la construction d'un local à l'intention des jeunes qui auront ainsi un coin bien à eux pour y développer les activités qui leur sont propres. Dans le domaine du travail, il semble bien, que pour l'instant, le problème ne se pose pas.Outre les exploitations agricoles, on trouve ici quelques entreprises dont l'importance est suffisante pour assurer du travail à une majorité de la population. Le complément se trouvant facilement grâce à la proximité de Boën-sur-Lignon et Montbrison. D'autre part, la certitude d'implantation de deux firmes donne aux habitants de la commune des raisons supplémentaires de croire en l'avenir avec un certain optimiste.

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LE SPORT A L'ECOLE On parle beaucoup de sport à l'école, comme l'un des moyens de découvrir les espoirs qui seront demain notre élite nationale. A Sainte Agathe, le directeur de l'école publique, M. Voisin, et son collègue Michel Latour appliquent déjà cette méthode avec beaucoup de bonheur. Au dernier Critérium du Lyonnais à Saint-Pierre-Lapalud, sur les neuf garçons et filles engagés, Rosa Lopez a obtenu une médaille d'argent et Monique Rozier une médaille de bronze. Les sept autres, Robert Delorme, Robert Veillas, Monique Magnin, Jacky Duron, Jean-Louis Dufour, Jacky Maillard et Joëlle Ponchon se sont classés en bon rang. Il faut aussi souligner Odile Guingand, deuxième aux Championnats du Lyonnais sous les couleurs du C.A.S.E. L'école possède aussi une équipe de football pour laquelle un prochain terrain de sport sera le bienvenu. Trouver un moyen indispensable à la bonne marche de ces activités constitue sans nul doute un tour de force pour nos deux enseignants, qui, on peut l'affirmer, y croient vraiment. Au fait, qui a dit que la foi était capable de soulever des montagnes.

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CONSTRUCTION DE LA SALLE DES FETES Ste Agathe, comme beaucoup de petites communes, ne possédait pas de salle des fêtes. La chose semblait impossible vu le budget communal, l’idée d’une kermesse fut donc retenue pour le financement. Un comité des fêtes fut constitué, et kermesse et corso fleuri virent le jour et se développèrent, avec succès, pour se terminer par les Nuits des Vedettes. JOURNAL DU 28 NOVEMBRE 1961 Hier, M. le Maire de Sainte Agathe la Bouteresse lançait un appel aux grévistes du mardi, et aux anciens prisonniers de 39-45, les conviant à une corvée de déblaiement pour la construction de la salle des fêtes. Au journal télévisé, qu'elle ne fut pas la surprise des téléspectateurs de voir apparaître, en tête d'émission, sur le petit écran, le nom de Sainte Agathe la Bouteresse, et d'entendre un commentaire du communiqué de M. le Maire. « Aujourd'hui, ce mardi matin, vont commencer les premiers travaux. Tous les grévistes, ainsi que tous les curieux, munis de pelles et de pioches, doivent se rendre au clos, derrière le monument aux morts”. Tout ceci sera filmé vers les onze heures, puis retransmis à la Télévision dans un délai très court . Une belle entreprise du Comité des Fêtes qui, sans moyens, va réaliser une salle des fêtes splendide et dont des milliers de téléspectateurs verront l'ébauche. Rendez-vous ce matin à Sainte Agathe la Bouteresse, les caméras vous attendent

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On peut ajouter que le terrain agricole a été acheté par la commune à un prix très élevé à l‘époque, à la suite de nombreuses tractations, avec l‘obligation de construire, aux frais de l‘acheteur un mur plein, séparant la parcelle de celle restant au vendeur. La construction et l‘aménagement de la salle se réalisèrent grâce au bénévolat et au dévouement de tous !

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LES NUITS DES VEDETTES Au cœur d'un petit village de la plaine du Forez, de 1963 à 1973, deux personnages bien connus dans la commune, M. le Maire Jean Déchavanne, et M. Joseph Pons, très apprécié dans le monde des forains, propriétaire du Bazar du Forez, décidèrent d'organiser, en soirée, un spectacle qui s'appellerait « Nuit des Vedettes». 50% des bénéfices seraient reversés pour la lutte contre le cancer, au professeur Dargent, à destination du centre Léon Bérard à Lyon. Aidés par les membres du Comité des Fêtes, car il fallait des bras pour monter un chapiteau, ces soirées qui drainaient dans la commune des milliers de personnes, ont vu défiler des grandes vedettes de la chanson et du spectacle. Pour les jeunes d'aujourd’hui, ces vedettes sont d'une autre époque, quoique la majorité est encore en vie, mais les anciens s'en souviendront. En voici quelques unes : Annie Cordy, John Williams, Enrico Massias, Line et Willy, Mireille Mathieu, Claude François, Sophie Darel, Georgette Plana, le clown Zavatta, Sacha Distel, Pierre Perret, Les Surf, Hugues Aufray, Jacques Martin, Michèle Thorr, Thierry le Luron, Maria Candido, Rika Zarïa et Martin Circus, etc ... Ces soirées furent une réussite, au-delà des espérances des organisateurs. Le chapiteau était installé dans un pré en bordure de la Nationale, mais pour une raison que j'ignore, en 1966, il fut installé à la Bouteresse, (avec en vedette Mireille Mathieu). Près de 4.000 personnes ont assisté à cette Nuit des Vedettes, avec la venue du professeur Dargent, qui avait fait le déplacement de Lyon, et qui honorait chaque soirée de sa présence, et avait envoyé un courrier dont j'ai retrouvé le texte :

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« Je vous serai très obligé de bien vouloir transmettre à votre comité, à tous ceux qui vous aident, ainsi qu'à toute la population de Sainte Agathe et de ses environs, les sentiments de vive gratitude de nos chercheurs et l'expression de mes très vifs remerciements pour votre geste généreux qui nous aide dans la lutte menée contre le terrible fléau du cancer ».

Sur cette photo, au centre le professeur DARGENT ; à droite Joseph PONS ; à gauche Jean DECHAVANNE maire de Ste

Agathe, lors de la remise d'un chèque, le 21 novembre 1966, au Centre Pierre Bérard de Lyon, avec une délégation nombreuse

de Saint-Agathois

Un hommage méritait bien d'être rendu à deux hommes, qui à cette époque, avec ces soirées dans notre commune, ont contribué à la lutte contre cette terrible maladie, le cancer.

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Des sommes très importantes ont été reversées au professeur Dargent: trois millions d’anciens francs ont été prélévés sur les bénéfices - cela représentait une très belle somme alors. Les bénéfices réalisés au cours de ces fêtes et l’aide bénévole apportée par de nombreux volontaires aux différentes corvées (et je peux vous assurer que les bras ne manquaient pas), ont permis aussi la construction de la salle des fêtes, qui fut un énorme succès pour la commune.

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SOUVENIRS - SOUVENIRS Il y en a beaucoup que je ne peux pas oublier, j'en ai beaucoup, je vous en livre quelques uns qui me reviennent en mémoire, les mauvais je les laisse de côté Avoir été reçu par le maire de Colmar au cours d'une visite suivi d'un vin d'honneur. Avoir assisté au Parlement Européen à Strasbourg à une assemblée présidée par Mme Simone Weill. Avoir déjeuné à la cantine du Parlement Européen. Avoir été reçu par Alain Bombard, le docteur un peu fou qui, en 1952, traversa l'Atlantique sur un radeau pneumatique en 65 jours et en se nourrissant uniquement de plancton et d'eau de mer. Son exploit a permis de sauver beaucoup de vie par la suite. Comme souvenir de cet entretien, nous avons bu un verre d'eau d'Evian. Je pense que j'ai vidé ma mémoire, et que cette lecture vous a plu, ce sont pour moi des moments inoubliables. Me voici à la dernière page de mes souvenirs, alors pour conclure, je dis que vieillir c'est chiant, j'aurai pu dire c'est désolant, c'est mortel, mais j'ai préféré chiant, parce que chiant c'est un adjectif vigoureux qui ne fait pas triste. Vieillir c'est chiant parce qu'on ne sait pas quand çela finira. Non ce n'est pas vrai qu'on vieillit dès sa naissance. On a été longtemps si frais, si jeune, si appétissant, on était bien dans sa peau. On se sentait conquérant, invulnérable, la vie devant soi, je vous assure que j'avais encore plus de projets et plus de désirs.

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Je le suis encore, mais voilà, entre temps, j'ai vu dans le regard de certain qu'ils ne me considéraient plus comme un des leurs, c'est ça la vie, mais elle est parfois cruelle. Lutter contre le vieillissement, c'est dans la mesure du possible ne renoncer à rien, ni à la gourmandise, ni à l'amour (quoique), ni aux rêves. Vieillir c'est voir défiler dans sa mémoire tout ce que vous avez perdu, les membres de votre famille, les amis du travail que vous avez côtoyés pendant de longues années, les amis des associations que vous avez adorés, et avec lesquels vous avez échangés des idées, et croyez moi c'est le plus dure. C'est aussi la peur de la solitude, et elle est là. Alors il ne vous reste que le rêve. Rêver, c'est se souvenir des heures exquises du passé, c'est penser aux rendez-vous qui vous attendent, surtout avec la mort, c'est laisser son esprit vagabonder entre le désir et l'irréalisable. Pour moi internet est ma drogue douce qui parfois m'empêche de dormir mais me tient sacrément compagnie. J'aimerai mourir dans un fauteuil, (comme mon père, dans sa 95

ème année) mais en regardant défiler sur l'écran de

mon ordinateur des images du présent et du passé, mais je ne suis pas pressé, je vais prendre mon temps, en mois ou en jours, je ne sais pas. Je ne considére pas comme un capital ce qui me reste à vivre, mais comme un usufruit à jouir sans modération.

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Alors rêvons, et je terminerais par une pensée : .

« Si la jeunesse est la plus belle des fleurs…

La vieillesse est le plus beau des fruits ».

Avec Lisette, le 25 mai dernier à Pommier

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Imprimé par xxx 2° trimestre 2016

Isbn 9782746490721