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Armand Colin L'OBJET SINGULIER DE LA STYLISTIQUE Author(s): Laurent Jenny Source: Littérature, No. 89, DÉSIR ET DÉTOURS (FÉVRIER 1993), pp. 113-124 Published by: Armand Colin Stable URL: http://www.jstor.org/stable/41704619 . Accessed: 15/06/2014 10:28 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected]. . Armand Colin is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Littérature. http://www.jstor.org This content downloaded from 185.2.32.89 on Sun, 15 Jun 2014 10:28:23 AM All use subject to JSTOR Terms and Conditions

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Armand Colin

L'OBJET SINGULIER DE LA STYLISTIQUEAuthor(s): Laurent JennySource: Littérature, No. 89, DÉSIR ET DÉTOURS (FÉVRIER 1993), pp. 113-124Published by: Armand ColinStable URL: http://www.jstor.org/stable/41704619 .

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Laurent jenny , Université de Genève

L'OBJET SINGULIER DE LA

STYLISTIQUE

A la fin des années I960, le structuralisme paraissait avoir défini- tivement réglé la question du style littéraire. La « fonction poétique » jakobsonienne suffisait à en définir la forme générale, et transhistori- que. La stylistique semblait inévitablement vouée à disparaître, absor- bée par les « sciences du discours », plus générales et plus puissantes qu'elle. Dépourvue ďobjet propre, puisque le « discours littéraire » n'était plus qu'une région discursive parmi d'autres, la « stylistique » n'avait plus guère de raison d'être. De fait, durant une vingtaine d'années, la « stylistique » n'a plus été revendiquée par personne et l'appellation même a quasiment disparu de la littérature théorique française, cédant la place à celle de « poétique », de « rhétorique textuelle » ou de « sémiotique du discours littéraire ». Cependant, cette substitution d'approche n'a rendu que partiellement compte de ce que recouvrait la notion de style. En lui résistait un noyau de « non sémiotisable » trop évidemment réduit par les « sciences du discours ». C'est sans doute cette prise de conscience qui explique, depuis quelques années, un renouveau d'intérêt pour le style et la stylistique. Dans les publications récentes, on peut identifier, me semble-t-il, trois types de « retour à la stylistique », que je me contenterai d'évoquer sommaire- ment. Une première voie, empruntée par exemple par G. Molinié consiste à moderniser la description stylistique en composant entre la tradition rhétorique et les instruments linguistiques modernes. L'éclec- tisme méthodologique de la stylistique est ainsi reconduit et amélioré, sans être véritablement interrogé non plus que l'objet même de la stylistique (la notion centrale de « figure » restant floue et impensée). Une seconde voie, récemment suivie par G. Genette 2, vise à poursui-

1. G. Molinié, Éléments de stylistique française (Paris, P.U.F., 1986). Voir aussi J. Gardes- Tamine, La Stylistique (Paris, Colin, 1992) qui avoue une perspective « résolument éclectique » et vise une stylistique des genres de discours.

2. G. Genette, Fiction et Diction (Paris, Seuil, 1991). Cf. aussi l'excellente analyse qu'en propose Henri Mitterand, « A la recherche du style », qui expose et discute le livre de Genette, in Poétique n° 90 (avril 1992).

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vre la sémiotisation du style au-delà de Jakobson : le « style », étant présenté comme une propriété générale des discours, y gagne un statut encore plus large que la « fonction poétique » jakobsonienne (qui déjà s'étendait bien au-delà du strictement littéraire) ; cette extension repose sur un changement de référence sémiotique puisqu'on emprunte au sémioticien américain Nelson Goodman le concept ď« exempli- fication » (j'y reviens plus loin), central pour redéfinir la notion de style. L'absorption de la stylistique par une sémiotique des discours est donc ici accomplie. Enfin une troisième voie de retour à la stylistique, d'inspiration phénoménologique, propose une critique de toute les stylistiques de l'écart et cherche à repenser le style comme « parole originaire », c'est-à-dire relance dans la parole d'une activité de diffé- renciation interne à la langue 3. Le style est alors conçu comme une dialectique de la langue et de la parole : les différences qui s'y exposent y apparaissent à la fois comme une altération de la forme de la langue et un retour à la dynamique de différenciation propre à la langue. C'est cette direction qui me paraît à la fois la plus féconde et la plus périlleuse méthodologiquement parlant. Effectivement, elle seule témoigne d'une irréductibilité du style à sa codification rhétorique, irréductibilité qui nous place au cœur du phénomène littéraire mais pose aussi de redoutables problèmes de description. C'est que la résistance du style à sa rhétorisation a partie liée avec son essence singulière. Or c'est seulement en se confrontant à cette singularité du style qu'on peut espérer en reconnaître la spécificité. La difficulté tient sans doute à ce que cette confrontation exige de nous l'effort d'une approche elle- même singulière, et désabritée des garanties de la « science ».

La notion de style n'a cessé d'osciller entre un objet individuel et collectif. Cette ambiguïté n'est pas propre au style littéraire. On la rencontre aussi bien en histoire de l'art. Le critique américain Meyer Schapiro (dans un article de 1953) définit ainsi d'emblée le style par une alternative :

Par « style », on entend la forme constante - et parfois les éléments, les qualités et l'expression constants - dans l'art d'un individu ou d'un groupe d'individus 4.

Tantôt le style est donc considéré en tant que manifestation de la culture comme totalité, et il vaut surtout en tant qu'il est typique d'un ensemble, et susceptible d'une multitude d'applications. C'est le « style d'époque », par exemple le style grec classique de Winckelmann qui pénètre toutes les formes de la culture pendant une période donnée.

3. C'est dans cette voie que je situerais mon propre essai, La Parole singulière (Paris, Belin, 1990), ainsi que le livre de Dominique Combe, Im pensée et le style (Éditions universitaires, Paris, 1991), qui propose à la fois une archéologie de la notion de style et un essai de phénoménologie du style dans la poésie moderne.

I 4. « La notion de style » in Style, artiste et société, TEL, Paris, Gallimard, 1982, p. 35.

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Réflexions critiques

Tantôt le style est la marque de l'idiosyncrasie d'un artiste et il renvoie surtout à des valeurs d'exception et de singularité. C'est en tant que l'artiste se détache des formes collectives reçues et en opposition à elles qu'il apparaît véritablement comme styliste. L'opposition, on le devine n'est pas irréductible : que le style apparaisse dans son pouvoir intégrateur d'une collectivité historique ou qu'il se manifeste comme une marque de sécession et de solitude, il vise toujours une singularité plus ou moins large, plus ou moins partageable.

La stylistique du discours hésite semblablement entre ces deux positions. Au début de ce siècle, le genevois Charles Bally est ainsi le fondateur d'une stylistique des formes collectives de discours. Elève de Saussure, il en est aussi l'héritier et le continuateur. Le style dont il

propose la description institue un niveau intermédiaire entre les deux plans saussuriens de la « langue » et de la « parole ». La distinction saussurienne était effectivement sommaire et apparemment irréducti- ble : elle opposait radicalement le caractère « social » de la langue au caractère « individuel » de la parole, la passivité de la langue, réduite à un trésor de signes, et la créativité pure de la parole, conçue comme inventivité libre. La stylistique de Bally dégage un niveau de formes qui participent à la fois de la langue et de la parole : c'est ce qu'il appelle les « faits de langage ». Les « faits de langage » sont les ressources expressives propres à une langue donnée, ressources qui nous permet- tent de formuler le même contenu notionnel selon tout un paradigme de variantes stylistiques, de la plus analytique à la plus elliptique, de la plus neutre à la plus émotionnelle, ainsi par exemple la série :

Je suis étonné de vous rencontrer ici. / Tiens ! Vous êtes ici ? / Comment ! vous ici ? / Vous ! / Oh / î

Comme dans le cas de la langue, les formes constitutives des « faits de langage » sont collectives, elles sont passivement reçues et elles sont constituées en système, chacune trouvant sa valeur de sa relation à toutes les autres. Mais en revanche les « faits de langage » de Bally ressortissent manifestement au plan de la parole. Ils sont la trace de ce qui trouble la rationalité de la langue dès qu'elle se réalise en parole. Effectivement, Bally est sensible au fait que la parole ne se réduit pas à une opération combinatoire, qu'elle n'est pas une simple utilisation du code de la langue. Entre langue et parole intervient une puissance différentielle qui « affecte » le code de la langue, en bouleverse l'ordonnance et en diversifie les formes réelles. Bally a eu quelque peine à nommer cette face nocturne de la parole. On sait qu'il l'a beaucoup psychologisée en la rapportant à « la partie affective de notre être, nos émotions, nos sentiments, nos impulsions, nos désirs, nos tendances : en un mot tout ce qui vibre en nous, tout ce qui nous pousse à l'action,

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tout ce qui constitue notre tempérament et notre caractère »5 . Derrière cette description du « moi » du locuteur, de ce « qui crée notre personnalité dans le sens le plus vrai du mot», se laisse néanmoins deviner la poussée étrangement impersonnelle d'un vitalisme bergso- nien. Cette instance irrationnelle qui contraint la parole à se déformer dans l'expression relève plutôt d'une force sans nom que d'une individualité. Quoi qu'il en soit, il nous faut à présent donner une image plus nuancée de ce qui fait l'objet de la stylistique de Bally : sans doute cette stylistique décrit-elle des formes collectives de la parole, mais ces formes elles-mêmes traduisent la part la plus singulière de la locution. Bally imagine donc une subtile dialectique entre formes collectives et individuelles : sa stylistique a pour objet les « faits de langage » qui sont, si l'on peut dire, les formes collectives de l'indivi- duel (la stylistique de Bally refuse en revanche de considérer les formes individuelles de l'individuel que constituent le style littéraire, parce qu'elles sont à la fois dénaturées par le souci esthétique et délibérément inventées). Cependant la stylistique de Bally retrouve l'individualité de son objet à un autre niveau : celui de la langue tout entière. En effet chaque langue a son style de « faits de langage », répondant à son génie affectif propre. On fait la stylistique du français, de l'allemand ou du latin. Et malgré son souci de cantonner la stylistique dans un champ strictement interne et non comparatif6, Bally ne peut faire qu'il ne dégage une individualité des manières de dire françaises, et ne dessine ainsi les contours d'une vaste singularité discursive.

On sait que la stylistique littéraire s'est explicitement proposée un objet inverse de celui de Bally : ce qu'elle cherche à atteindre c'est un « écart » discursif vis-à-vis de l'usage commun, écart où elle voit la trace d'une singularité. La « ressource expressive » n'est plus donnée avec la langue, comme chez Bally, elle procède d'une singularisation et d'un froissement, d'une invention et d'une violence individuelle. Certes, les stylisticiens littéraires n'ont pas eu moins de peine que Bally à nommer ce site pur de l'individualité. On se souvient que Léo Spitzer dans ses premiers travaux a cherché à ancrer cette individualité dans l'âme même de l'écrivain, invoquant l'idée d'une étymon spirituel dont toutes les manifestations stylistiques d'un auteur seraient la trace. Barthes, dans Le Degré 'éro de ï écriture recourait au contraire à des métaphores corporelles, et pour tout dire pulsionnelles, pour figurer l'origine idiosyncrasique du style :

... des images, un débit, un lexique naissent du corps et du passé de l'écrivain et deviennent peu à peu les automatismes de son art... Quel que soit son raffinement, le style a toujours quelque chose de brut : il est le produit d'une

5. Traité de stylistique française (1902), Genève, Georg, 1951, p. 6. I 6. Exprimé par exemple dans Le Langage et la Vie (1925), Genève, Droz, 1965, p. 60.

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Réflexions critiques

poussée, non d'une intention, il est comme une dimension verticale et solitaire de la pensée. Ses références sont au niveau d'une biologie ou d'un passé, non d'une Histoire : il est la « chose » de l'écrivain, sa splendeur et sa prison, il est sa solitude. 7

Cependant la radicalité d'un solipsisme stylistique n'est tenable ni sur un plan théorique, ni sur un plan méthodologique. Postuler la solitude du style, c'est aussi présupposer sa congruence à une âme ou à une chair ; c'est le maintenir abusivement dans une antériorité au langage qu'il dément avec éclat. C'est enfin refuser à l'œuvre tout pouvoir de jeu et de déplacement vis-à-vis de la personne, ce qui constitue pourtant un enjeu souvent essentiel du travail d'écriture. Comme le remarque Jean Starobinski dans sa belle étude sur « Léo

Spitzer et la lecture stylistique » 8 : s'il y a une individualité du style, un « centre affectif de l'œuvre », il faut se garder de l'identifier à l'indivi- dualité empirique, au « centre affectif de l'existence ». Et les obstacles de méthode à une conception purement individualiste de style sont plus décisifs encore. Les singularités stylistiques ne sont pas seulement originales et singulières, elles sont aussi typiques, sans quoi elles seraient littéralement non repérables. On se souvient des brillants paradoxes que développe à ce sujet Clément Rosset dans YJObjet singulier 9 : l'unicité lui semble être la marque même du réel, alors que l'irréel se confond avec l'univers du double. Dire d'un objet qu'il est « singulier », ce n'est donc rien faire d'autre affirmer son existence, sa réalité. Mais cette évidence a son revers que Clément Rosset formule ainsi :

..plus un objet est réel, plus il est inidentifiable, plus le sentiment du réel est intense, plus il est indescriptible et obscur.. La singularité du singulier n'a d'égal que son inexprimabilité. Ainsi,

dans le champ du discours, on peut dire que toute parole est absolument unique, mais on ne saurait dire en quoi. Lorsqu'on croit nommer les formes de sa singularité, par cette nomination même on dégage au contraire ce que cette parole a de typique. Pris au pied de la lettre, ces principes sont évidemment dévastateurs pour une théorie du style. Effectivement ils entraînent, ou bien que le style ne relève pas du singulier - mais alors quelle est sa nature ? - ou bien que le style se confond avec la réalité de la parole - mais alors on ne peut rien en dire. Cette difficulté n'est pas toujours ignorée des stylisticiens. Elle est surmontée par le postulat que la parole est une réalité impure : les singularités ne s'y présentent jamais absolument. Les faits de style qu'on y observe émergent sans doute d'un fonds de singularité mais, du fait même qu'ils puissent être observés, ils sont toujours déjà sur la voie

7. he degré zéro de l'écriture (1953), Paris, Gonthier, coll. Mediations, p. 14. 8. In La Relation critique, Paris, Gallimard, « Le Chemin », 1970.

I 9- Paris, Minuit, 1979, pp. 33-37.

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L' objet singulier de la stylistique

d'une généralisation, au minimum dans l'espace de l'œuvre et virtuel- lement au dehors d'elle. Jean Starobinski relève cette thèse (qu'il fait d'ailleurs remonter à Gœthe) dans la conception stylistique de Spitzer :

Le style n'est donc ni le particulier pur, ni l'universel, mais un particulier en instance d'universalisation, et un universel qui se dérobe pour renvoyer à une liberté singulière. 10

Ou, pour le dire en mes propres termes, toute singularité stylistique esquisse sa convertibilité en forme de langue. L'accident discursif que constitue toute figure ne trouve de puissance d'affirmation qu'à laisser entrevoir la nouvelle alliance linguistique dont il pourrait être le point de départ 11 . Quant au destin de cette promesse - soit que l'innovation figurale passe en langue et rejoigne les formes collectives, soit qu'elle subsiste comme une proposition solitaire et irréductible au partage - il n'intéresse pas directement la stylistique mais plutôt l'histoire de la littérature et de la langue.

Essayons donc à présent de mieux cerner la complexité de l'objet de la stylistique. Le style nous est donc apparu comme un obscure puissance de différenciation à l'œuvre dans la parole de chacun. Les hypostases spirituelles ou charnelles proposées au style ne sont guère satisfaisantes. A la rigueur acceptables en tant qu'allégories de la singularité stylistique, elles demeurent inadéquates à plusieurs titres. C'est tout d'abord qu'elles réduisent le style à n'être que la trace d'une singularité qui se dispose sur une autre scène non langagière. C'est méconnaître que la singularité stylistique vient avec la parole, qu'elle est indissociable de la réalisation (c'est-à-dire du devenir réel) de la langue en parole. Mais ramener le style à une âme ou une configuration pulsionnelle, c'est aussi en unifier à l'excès le phénomène, comme si cette puissance de différenciation n'était pas elle-même travaillée par une différenciation intime qui l'écarté d'elle-même et l'arrache à toute identité. Ici, c'est un écrivain qui peut le mieux nous alerter sur les dangers d'une identification de l'écrivain à son style, sur la captation imaginaire et formelle que le style est susceptible d'imposer au sujet parlant. Relisons ce qu'en dit Henri Michaux dans Poteaux d'angle 12 :

Style : signe (mauvais) de la distance inchangée (mais qui eût pu, eût dû changer), la distance où à tort il demeure et se maintient vis-à-vis de son être et des choses et des personnes. Bloqué ! Il s'était précipité dans son style (ou l'avait cherché laborieusement). Pour une vie d'emprunt, il a lâché sa totalité, sa possibilité de changement, de mutation. Pas de quoi être fier. Style qui deviendra manque de courage, manque d'ouverture, de réouverture : en somme une infirmité. Tâche d'en sortir. Va suffisamment loin en toi pour que ton style ne puisse plus suivre.

10. Op. cit., p. 56. 11. Sur ce thème, cf. La Varóle singulière, Paris, Belin, pp. 20-28.

I 12. Paris, Gallimard, 1981, p. 33.

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Réflexions critiques

Henri Michaux, ici comme ailleurs, est d'une remarquable acuité. Bien loin de faire du style une « expression » de l'être, il y reconnaît un écart originaire de la forme vis-à-vis de l'être, et mieux une puissance indéfinie d'écartement, qui assure à l'être la liberté de son renouvelle- ment. Derrière l'acerbe critique du style, coupable de fabriquer des identités imaginaires, se dessine ainsi chez Henri Michaux une exigence stylistique plus haute : celle qui ferait du style un pouvoir de réouver- ture toujours en acte, un emportement formel d'une essentielle transi- tivité. On touche ici à l'essence du style mais aussi à l'essence de sa difficulté. Car là où nous espérions atteindre un objet, nous rencon- trons un processus et un événement. Le style est passage : en lui sans cesse la langue vient se retremper dans la différentialité de la parole, en lui sans cesse des singularités discursives se transmuent en formes typiques. Mais le style est aussi passage en un autre sens : en lui la singularité d'une forme discursive sans cesse s'arrache à elle-même, et se poursuit en un mouvement infini de fuite.

C'est en toute conscience de cette difficulté qu'il nous faut mainte- nant nous retourner vers notre question initiale : une stylistique est-elle possible ? Ce qui revient à se demander si l'objet de la stylistique se distingue de celui des autres disciplines du discours et si, au vu de son objet, la stylistique peut revendiquer une méthode descriptive propre. La confrontation à deux autres sciences du discours nous permettra peut-être de répondre.

On peut poser en principe que la stylistique ne se confond pas avec une sémiotique du discours, ou encore, pour le dire autrement, que le style ne se confond pas avec le lieu d'émergence du style. La théorie sémiotique du style récemment développée par Gérard Genette dans Fiction et diction 13 servira à illustrer cet argument. Gérard Genette y passe en revue un certain nombre de définitions sémiotiques du style qui se sont succédées ces dernières années (et parmi les plus générale- ment admises : le style comme expression et le style comme connota- tion). C'est pour en proposer une nouvelle fondée sur la sémiotique du théoricien américain Nelson Goodman. On se contentera, pour les besoins de notre propos, d'en retenir les grandes lignes. Nelson Goodman fonde sa sémiotique sur une distinction entre deux types de symbolisation, toute symbolisation consistant en une relation de « standing for », où quelque chose tient lieu d'autre chose. La première classe de symbolisation est la denotation définie comme « simple appli- cation d'un label [verbal ou autre] à une ou plusieurs choses ». La seconde grande classe de symbolisation est baptisée exemplification : elle « consiste pour un objet (qui peut être un mot) à symboliser une classe

I 13. Paris, Seuil, coll. Poétique, 1991.

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à laquelle il appartient» (p. 112). Ainsi le mot «bref» en français dénote la brièveté, mais Pexemplifie également en tant que mono- syllabe. Nelson Goodman conçoit des exemplifications littérales (comme la brièveté du mot « bref ») ou métaphoriques (ainsi les voyelles du mot « nuit », définies analogiquement comme voyelles « claires », exemplifient métaphoriquement la clarté). Chaque mot, outre le fait qu'il dénote, possède donc un riche potentiel d'exemplifi- cation : le mot « nuit » exemplifie littéralement et métaphoriquement toutes ses propriétés phoniques et graphiques, mais il exemplifie aussi la classe des mots français, celle des substantifs, celle des noms d'inanimés féminins, avec toutes les valeurs sexuelles que cela entraîne, etc. L'exemplification ne se limite pas au mot mais est évidemment une propriété des énoncés tout entiers, qu'ils soient littéraux ou figurés. Dès lors le style est redéfini par Gérard Genette comme « l'ensemble des propriétés rhématiques exemplifiées par le discours » (p. 131). Cette définition très large a l'avantage de définir le lieu d'émergence de la singularité stylistique : chaque texte ayant des propriétés phoniques, linguistiques, figúrales différentes, est le support d'un ensemble spéci- fique d'exemplifications - que ces exemplifications soient actualisées ou non par le destinataire. En ce sens, tout texte a du style, et de plus tout texte a virtuellement autant de style qu'un autre. Cependant la sémiotique de Nelson Goodman, comme d'ailleurs toute autre, si elle est précieuse pour identifier le champ de la singularisation stylistique en général, ne nous est d'aucun secours pour saisir la singularité d'un style en particulier. Si effectivement, tout texte, quel qu'il soit, a du style, le problème de sa singularité se trouve reporté d'un cran : de quoi donc est faite la singularité stylistique de certains styles qu'on s'accorde à trouver plus singuliers que d'autres ? La confusion vient évidemment de ce que le mot « style » est employé ici dans deux sens très différents : tantôt il renvoie à une propriété sémiotique très générale du discours, propriété inévitable et insignifiante en elle-même, tantôt il renvoie à la singularité de l'usage de cette propriété dans certains discours. Sans doute, grâce à l'appui de la sémiotique, la stylistique peut-elle de mieux en mieux observer où il y a une virtualité de faits de style, mais il lui appartient et à elle seule d'identifier en quoi il y a style au sens d'une forme singulière...

Pour des raisons analogues, la stylistique se trouve dans une relation d'exclusion réciproque avec la rhétorique, quelle que soit d'ailleurs la nature de la description rhétorique impliquée (classique, sémiotique ou pragmatique). Le postulat de toute rhétorique, c'est en effet que les écarts du discours sont exhaustivement répertoriables en types, types répertoriés de fait dans les traités de rhétorique. Les figures du discours sont le fondement d'un jeu d'écarts réglés constitutif du style.

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Kéflexions critiques

Le style n'y est donc nullement la marque d'une singularité ou d'une transgression : les écarts qu'il déploie répondent au contraire à une entente contractuelle entre les interlocuteurs. La rhétorique témoigne de l'existence, à côté d'un code linguistique normatif, d'un code des écarts discursif. Le style n'est donc pas l'instrument d'une individua- tion, c'est au contraire un signe de genre. L'approche pragmatique de la rhétorique va même plus loin dans l'intégration des figures au code discursif. Depuis quelques années en effet la pragmatique n'a cessé de s'intéresser au champ des figures de rhétorique, et tous ses efforts ont été pour montrer que les figures ne constituaient pas un usage spécifique du discours. Le discours est rarement recevable dans sa pure littéralité : il est presque toujours sujet à un travail interprétatif qui transforme les « phrases » en « énoncés » et leur confère ainsi un sens acceptable en situation. La pragmatique nous en décrit les procédures avec une précision technique inégalée. Dès lors, nous sommes conduits à admettre que c'est le littéral - c'est-à-dire l'absence de traitement inférentiel du discours - qui fait figure d'exception, de cas particulier, tandis que le déchiffrement des figures relève d'une compétence interprétative propre à tout locuteur. Ainsi la banalisation du rhétori- que se trouve accomplie en même temps que la pragmatique fédère dans une même science des usages du discours les fausses rivales qu'étaient la linguistique et la rhétorique. Faut-il en conclure que ce triomphe de la pragmatique (comme il y a quelques années celui de la sémiotique) laisse la stylistique désaffectée, dépassée sur son propre terrain par des sciences du discours plus rigoureuses et plus compré- hensives ? Je crois plutôt que ces progrès dans la description du discours doivent nous aider à mieux situer l'objet propre de la stylistique.

Pas plus qu'elle ne se confond avec une sémiotique du discours, la stylistique n'est assimilable à une pragmatique du discours. La stylis- tique ne saurait prétendre à décrire les procédures de production du sens dans le discours. Elle présuppose ces descriptions et s'appuie sur elles pour se formuler sa propre question : comment les procédures générales de production du sens sont-elles singularisées en un style ? En somme si la pragmatique rend compte de l'usage du discours, la stylistique cherche à saisir l'usage de cet usage. Si la pragmatique peut servir à identifier les figures par le type d'inférences qui leur sont propres, la stylistique doit se demander comment le style refigure les figures selon des orientations spécifiques. C'est dire que le champ de la stylistique n'est nullement le discours pris dans sa généralité, fût-ce le discours littéraire, c'est l'œuvre en tant qu'espace de singular isation. Effecti- vement c'est seulement dans l'œuvre que peut apparaître cette conver- gence d'usages (et parfois ces tensions) qui dessinent une perspective

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h! objet singulier de la stylistique

d'infléchissement des possibilités représentatives de la langue - et un déplacement du discours littéraire lui-même.

Soit par exemple chez Hugo une « métaphore maxima » du type : « he spectre Kien levait sa tête hors du gouffre » ( ha Fin de Satan ) . Cet énoncé n'est pas un accident isolé dans l'œuvre de Hugo. Il n'est pas non plus simplement engendré à partir des possibilités métaphoriques du discours littéraire avant Hugo. Cette « métaphore maxima » fait plus que déclencher les processus d'inférence ordinaires à toute métaphore. Elle introduit une tension entre lecture métaphorique et lecture fictionnelle de l'expression (mais ceci en dehors du code symbolique qui réglerait une fiction allégorique traditionnelle : assez significative- ment, c'est le néant, le non-figurable absolu, qui donne lieu à une concrétisation imaginaire). Ainsi une manière de dire se déploie en quasi-personnage. Prenant en compte réflexivement (comme le prouve la majuscule) la force représentative de ses propres rapprochements verbaux, Hugo défait la distinction entre figuration et fictionnalisation. Il pousse la métaphore au point tensionnel où elle échappe à elle-même (car, si « le spectre Rien » est un personnage fictif, l'énoncé redevient totalement littéral) et où se trouve ébranlé le statut d'une partie de la représentation. Or ce geste a son historicité : c'est celle de l'œuvre de Hugo. Et c'est cette historicité qui rend possible d'autres avancées. On pourrait suivre le destin de ce type de « métaphore maxima » jusque chez Michaux par exemple dans un énoncé comme : « c'est l'eau rougie de la veine mémoire ». On pourrait montrer comment dans son Portrait des Meidosems, la même ambiguïté entre figuration et fiction affecte le statut du texte tout entier (et non plus celui d'un personnage), mettant en question du même coup la nature de la voix énonciative, etc.

C'est l'œuvre donc et non le discours littéraire qui fait l'objet de la stylistique, car, en dehors d'une mise en œuvre réelle de la parole dans un ensemble cohérent et toujours provisoirement clos, la question du singulier ne peut être posée. Cette singularisation stylistique échappe effectivement aux points de vue sémiotique et pragmatique, d'abord en ce que ces disciplines n'examinent pas les ensembles historiquement uniques et structurellement convergents que sont les œuvres, mais seulement des occurrences isolées qui servent à illustrer des règles générales. Plus la sémiotique et la pragmatique généralisent les procé- dures de production du sens, plus le fonctionnement du discours s'éclaire dans son unité, mais alors, ce qui devient obscur c'est le phénomène du style. Peut-être n'est-il même pas pensable si l'on s'en tient à l'idée que la langue n'est pas affectée par les événements de parole qu'elle sert à produire.

Effectivement un événement discursif est toujours susceptible de faire vaciller par sa singularité les possibilités représentatives de la

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Réflexions critiques

langue et de s'imposer comme forme partageable d'une langue à venir. A vrai dire l'intangibilité de la langue n'est admissible qu'à se tenir dans un pur plan synchronique qui abolit précisément la possibilité d'un événement de parole réel. Or on peut poser en principe que ce qui scelle la réalité de la parole, c'est son historicité (comme d'ailleurs une langue n'a de réalité que par la dérive temporelle qui l'arrache sans cesse à sa forme idéale - et en relation avec l'historicité de la parole). Une parole réelle est nécessairement dans le Temps et sa profération est irréversible. Elle ouvre un « après » tel que rien dans la langue n'est plus jamais semblable à ce qui était avant elle. Cette historicité irréversible, c'est bien elle que vise Proust, lorsqu'il écrit, à propos du style de Flaubert que « par l'usage entièrement nouveau et personnel qu'il a fait du passé défini, du passé indéfini, du participe présent et de certaines prépositions, [il] a renouvelé presque autant notre vision des choses que Kant, avec ses Catégories, les théories de la Connaissance et de la Réalité du monde extérieur » 14. Mais sémiotique et pragmatique ne veulent rien savoir du temps qui passe, ce temps qui emporte la langue non seulement pendant qu'on parle, mais du fait qu'on parle. Elles ne veulent rien savoir de cette négativité à l'œuvre dans la parole qui, comme disait Merleau-Ponty, « réalise la langue en la détruisant ». Chomsky distinguait autrefois entre deux types de créativité : la créativité engendrée par les règles (qu'il logeait dans la compétence linguistique) et la créativité qui change les règles (qu'il réservait à l'évolution historique des langues). Le style a évidemment partie liée avec la seconde de ces créativités, et du même coup il nous apparaît qu'il ne saurait avoir lieu en dehors du mouvement même du Temps. Toujours singulier, sans jamais être « personnel » (car il n'y a pas de commune mesure entre un être et les formes qu'il dispose dans sa

parole), le style pourrait bien être la façon d'être des sujets parlants dans le Temps, la scansion par laquelle ils en accompagnent et en devancent parfois le passage. En effet seul le style balise la transitivité dans laquelle sont emportés non seulement notre existence charnelle mais aussi les instruments symboliques qui servent à la ressaisir.

Si donc stylistique il y a, elle sera aussi paradoxale que son objet. Une telle discipline sera nécessairement éclectique car dans un premier temps, elle ne saurait se passer des sciences du discours, et de leurs méthodes descriptives pour se poser son problème propre : celui de la singularité discursive. Mais au moment d'y atteindre, elle doit infléchir les instruments disponibles, qui ne sauraient rendre compte que de processus généraux et qui sont impuissants à atteindre l'unicité d'un style. Ainsi, c'est lorsque la stylistique en arrive à son propos qu'elle

I 14. « A propos du 'style' de Flaubert », in Contre Sainte-Beuve, Paris, Pléiade, 1971, p. 586.

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U objet singulier de la stylistique

apparaît le plus dépourvue de concepts et ďoutils. Elle doit alors faire face à un hétérogène singulier qui est par définition innommé. C'est dire que la stylistique, si elle doit s'étayer sur des descriptions aussi scientifiques que possibles, vise un objet qui échappe à toute science, puisqu'il n'est autre que le processus même de la singularisation. Certes, au passage, des usages, des figures et des dispositifs peuvent être repérés, et, une fois décontextualisés, intégrés à une « rhétorique générale ». Mais la spécificité même de la stylistique est ailleurs. Dans son effort pour nommer le travail de la singularisation discursive, elle s'expose à une conversion de méthode qui lui est propre : en effet elle n'a de chance d'en rendre compte que si, en un point, elle se reconnaît elle-même requise par un effort de langage. Pour répondre à l'effraction singulière que constitue un style, il lui faut faire événement dans sa propre parole. Parce qu'il n'y a pas a priori de métalangage, pas de transcendance pensable d'une parole vis-à-vis des événements singu- liers du style, il faut nécessairement que la stylistique ait du style. Et cette condition n'est nullement le signe d'une complaisance esthétique ou d'un manque de rigueur. La reconnaissance d'un hétérogène singulier et l'effort d'invention verbale pour en nommer le caractère inédit sont propres au mouvement même de la pensée critique. Ils en scellent l'identité.

Peut-être conclura-t-on de tout cela que la stylistique est une discipline imaginaire, comme toute autre sans doute, mais un peu plus, puisqu'on ne peut lui reconnaître ni outils propres, ni méthode propre, et puisque son objet semble dépourvu de régularité identifiable. A cela on répondra, légitimement je crois, que la stylistique fait pourtant face à ce qu'il y a de plus réel dans la littérature, et qu'en désignant ce réel comme le point de fuite de son effort descriptif, elle en témoigne mieux que bien des approches scientifiques qui triomphent de l'objet littéraire en l'arrachant à sa singularité.

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