Episode 7 - La Forteresse Écarlate

8/16/2019 Episode 7 - La Forteresse Écarlate

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Chroniques de Geyerra

Episode VII - LA FORTERESSE ÉCARLATE


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l’ouest vers Holok, ma sœur avait toujours rêvé de voir les cavaliers d’Holok et les légendaires plaines d’Orchalos et ses millions de chevaux.

- Mais tu n’es pas parti vers Holok.

- Non. Le soir avant mon départ, un homme, un soldat Kel’thirien, est venu me trouver dans la ruelle de Thyr où je couchais. L’homme m’a dit qu’il m’avait vu poser des

questions à tous les villageois les jours précédents et qu’il avait des informations à propos de ma sœur. Il m’a dit qu’il savait où elle se trouvait.

- Il t’a dit qu’elle était à Delgado n’est-ce pas ?

- Oui, il m’a dit que lui-même venait de Delgado et qu’une jeune femme Jusseïn correspondant à la description que je faisais de ma sœur était arrivée dans cette ville il y a

près d’un an de cela. Il m’a dit que c’était une jeune adulte possédant de grands pouvoirs à la recherche d’aventure, mais qu’elle s’était fait capturer par un riche marchand de la

ville qui la gardait comme son esclave personnel.

C’était la deuxième fois que Kalya entendait cette histoire et elle n’avait aucun doute que Kino s’était fait mentir. Mais dans quel but exactement ? L’Émissaire s’arrêta et se dirigea vers l’orée d’un petit boisé de bouleaux à quelques pas de la route principale, faisant signe au jeune homme

de la suivre.

- Viens Kino, la nuit est sur le point de tomber, nous allons faire campement ici. Nous

avons une longue route encore demain.- Mais… Kalya, attends. Je t’ai raconté tout ce qui est arrivé et pourquoi je me suis rendu à

Delgado, mais je ne comprends toujours pas pourquoi nous nous dirigeons vers Djherba.

Kalya s’arrêta et déposa son petit sac au pied de l’arbre le plus proche et se retourna vers Kino.

- Ta sœur, peu importe où elle est, n’a jamais été à Delgado. Tu comprends cela Kino ?

- Je sais qu’elle n’y était plus, mais peut-être y avait-elle vraiment été plus tôt. Peut-être qu’elle s’est échappée et est partie ailleurs.

- Non Kino. Ce n’est pas un hasard si un soldat de Kel’thir t’a trouvé en plein cœur du

royaume d’Yseria et t’as envoyé à un millier de kilomètres à l’est dans un petit village isolé de Kel’thir. Ce n’est pas un hasard non plus si un mois à peine après ton arrivée à

Delgado une attaque a eu lieu coûtant la vie à un Émissaire de Cerberus et que tu aies été pointé en tant que suspect numéro un de cet assassinat. Quelqu’un te voulait à cet endroit

à ce moment.

- Mais… Pourquoi moi ? Je n’ai jamais rien fait de mal, ni aux Émissaires, ni au peuple de Kel’thir.


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- Pourquoi toi exactement, je ne sais pas, mais un jeune étranger venant d’un royaume voisin et possédant des pouvoirs magiques fait certainement un bon bouc émissaire dans

les circonstances.

Kalya se promena entre les arbres, ramassant de petites branches de bouleau ici et là, le jeune

Jusseïn la suivant, faisant de même. Quelques minutes de silence passèrent puis tous deux retournèrent à l’orée du boisé. Kalya posa les branches d’arbres près d’un petit amas de pierres

alors que Kino ôtait ses souliers et son chandail. Kalya conjura une petite flamme dans la paume

de sa main et la jeta sur le bois qui prit aussitôt feu.

- Kino… Un soldat de Kel’thir t’a envoyé en direction de Delgado, des soldats de Kel’thir

t’ont accusé du crime et étaient à ta recherche dans la forêt de Delgado. Je ne sais pas

exactement ce qui est arrivé, mais Kel’thir a certainement son mot à dire dans tous ce qui t’es arrivé. C’est la seule piste que nous avons présentement si nous voulons prouver ton

innocence. Nous devons nous rendre à Djherba, la moitié du royaume est présentement là-bas pour l’inauguration de la cité, y compris tous les leaders militaires.


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Kino s’assit sur une petite motte de terre près du feu et garda le silence pendant un long moment. Kalya sortit un morceau de bœuf séché de son sac et le tendit à l’adolescent.

- Je comprends que ça puisse paraître dangereux, mais si tu pars seul à la fuite, ils finiront par te retrouver. Les gens qui ont voulu t’accuser de ce crime savent définitivement ce

qu’ils font et ont le pouvoir de tuer un Émissaire, ce n’est pas peu dire.

Kino ne disait toujours rien. Kalya en profita pour ôter ses bottes et son ceinturon avant de

s’allonger sur le sol, regardant le jeune homme. Celui-ci s’allongea à son tour face à l’Émissaire.

- D’accord, je te fais confiance. Mais si je dois te suivre en territoire aussi dangereux, j’aimerais te demander quelque chose.

- Quoi donc ?

- Je veux que tu m’aides.

- T’aider à quoi ?- À devenir plus puissant. Je veux pratiquer mes pouvoirs et devenir un mage aussi fort que

ma sœur l’était.

- Si ça peut te faire plaisir. Je ne suis probablement pas la meilleure professeure, mais

j’essaierai de te donner quelques trucs.

Kino esquissa un petit sourire puis souhaita bonne nuit à Kalya. Celle-ci regarda les derniers rayons de soleil disparaître à l’horizon.

Si l’on se fait capturer là où nous allons, ce n’est pas mes

petits trucs qui t’aideront à survivre malheureusement.

***

La mer de sang portait bien son nom. À la frontière entre les royaumes d’Yseria et

d’Holok, l’étendue d’eau reluisait d’une lueur rougeâtre sur toute sa longueur. La couleur lui était donnée par le reflet des millions de rubis qui sertissaient les monts Alchorok sur sa rive

ouest. Lorsque le soleil levant frappait les flancs est des montagnes la mer entière s’illuminait

dans un spectacle divin. Ce n’était pas la première fois qu’Ayoub assistait à ce spectacle, mais il ne pouvait s’empêcher d’être émerveillé. À quelques minutes de marche de là, juché entre

l’extrémité sud de la mer et la plus haute montagne de la chaîne, se retrouvait une immense forteresse de granit noir.

- La forteresse écarlate.

Nytarius n’avait pas besoin de la présenter. Ayoub y avait déjà été, bien que cela fasse plusieurs années de cela. La forteresse écarlate était le bastion des Émissaires de Cerberus, l’équivalent de


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la Vigile pour les Émissaires de Garusha. Cerberus, qui était après tout le Gardien de la mort et des peuples humains de Geyerra, était le seul Gardien à avoir bâti son bastion sur Geyerra. Les

bastions de Garusha et de Marwyn se trouvant dans les cieux au-dessus de la planète alors que

celui de Tritiok se trouvait dans un univers parallèle à Geyerra.

Après avoir perdu la trace de Kino, l’adolescent présumé coupable du meurtre de Delzo, l’Émissaire de Cerberus, Nytarius avait insisté pour retourner à la forteresse écarlate afin de

planifier la suite des choses avec ses collègues Émissaires. Suite à une discussion avec son

mentor Rhael’gazor, Ayoub avait décidé de continuer de suivre l’oracle de Cerberus. Nytarius semble déjà méfiant, le moindre faux pas de ma part ou de la part d’un autre Émissaire de

Garusha pourrait empirer les convictions qu’il semble déjà avoir.... Il croit que Garusha est derrière la mort de Delzo.

Nytarius était l’un des pires compagnons de route qu’Ayoub n’avait jamais eu. Il n’avait

pratiquement dit aucun mot des derniers jours. Les seuls moments où il avait semblé intéressé à questionner Ayoub fut après qu’il ait communiqué avec Rhael’gazor. L’oracle de Cerberus

semblait assez insulté par le fait qu’Ayoub se soit retiré avant d’appeler son maître. Ayoub s’en


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était sorti en prétendant que la conversation concernait ses récentes discussions avec les Astraanis concernant leur position en vue du conseil de Geyerra.

Le duo arriva au pied de la forteresse devant un sombre mur de pierre de plusieurs dizaines de mètres de hauteur. Gravé sur le mur se trouvait l’image d’un squelette haut comme cinq hommes

portant une masse de guerre dans une main et un fléau dans l’autre. Ce squelette, selon les Émissaires de Cerberus, représentait tous les hommes de Geyerra morts par le passé qui

protègent le monde présent. Cerberus, bien qu’appelé le Gardien de la mort, était en fait le

Gardien qui protégeait la mortalité des hommes. Apprendre de la mort pour se préserver contre la mort.

Nytarius fit signe à Ayoub de s’arrêter puis s’avança vers le mur avant de poser sa main sur

celui-ci. Après quelques secondes, la couronne de rubis à la tête du squelette s’illumina et une

immense fracture fractura le mur en plein centre. Dans un bruit sourd qui résonna dans toute la

vallée, le squelette se divisa en deux et le mur pivota vers l’intérieur, laissant apparaître un passage entrant vers le cœur de la forteresse écarlate.

- Vous êtes notre invité ici maître Ayoub, je m’attends à ce que vous respectiez l’espace

saint qu’est la forteresse écarlate. Vous ne toucherez à rien et ne direz rien. Vous allez me suivre et assister au rassemblement des Émissaires de Cerberus puis attendre mes ordres

pour la suite des choses.- C’est compris…

Au moment-même où Ayoub dit ces mots, une force invisible le submergea et il tomba sur le sol. Son corps entier fut pris d’une douleur insupportable, comme si chacun de ses muscles tentait de

se séparer de ses os. Nytarius le regarda du haut de ses deux mètres, un sourire narquois aux lèvres.

- Je vous ai dit de ne pas parler maître Ayoub. Cerberus lui-même protège la forteresse

contre les intrus. Seuls les Émissaires de Cerberus peuvent prendre la parole entre les

murs de la forteresse, toute autre personne ouvrant la bouche mourra d’une mort horrible. Heureusement que vous êtes un Émissaire, sinon vous seriez déjà mort.

Nytarius continua son chemin vers l’escalier central menant aux étages supérieurs de la

forteresse alors qu’Ayoub se relevait de peine et de misère. Ce n’était pas ainsi la dernière fois que je suis venu ici… L’Émissaire de Garusha emboîta le pas à l’Oracle sans dire un mot.

***


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Lys et Nathan avaient à peine franchi la porte principale de Traversa que la moitié du village était sorti dans les rues. Marchands, enfants, villageois, fermiers en visite au marché

central, tout le monde se précipitait pour accueillir le prince du royaume. Lys était surprise que

tous ces gens aient reconnu Nathan aussi rapidement.

- Ce n’est pas ta première visite ici j’imagine ?- Non, j’ai beaucoup parcouru le royaume dans les deux ou trois dernières années à la

demande de la mère. Au début je suspecte que c’était simplement une idée de ma mère

afin de me sortir de la capitale, mais j’y ai rapidement pris goût. Les habitants de ces petits villages semblent si heureux de pouvoir parler à leur prince, si je peux leur apporter

ne serait-ce qu’une ou deux journées de bonheur, j’en suis bien heureux.

L’Émissaire et le prince exilé se frayèrent un chemin à travers les masses lentement mais

sûrement jusqu’à un grand bâtiment de pierre au sud de la place publique. Un homme corpulent

descendit les marches de l’immeuble puis s’agenouilla devant le prince.

- Prince Nathan, mais quelle belle surprise ! Nous ne nous attendions pas à vous revoir

aussi tôt parmi nous. Ça ne doit certainement pas faire un an ? Que nous vaut votre

majestueuse visite ?

Le prince tendit la main à l’homme et lui fit signe de tête de se relever.

- Monsieur le maire, Hector n’est-ce pas ?

Le maire rougit au simple fait que le prince se souvienne de son nom.

- Oui, oui, c’est bien ça.

- Cette visite n’était pas prévue, je suis en route vers Bénédicte à la demande de ma mère et j’ai décidé de faire un détour par Traversa, j’ai toujours adoré l’hospitalité de votre

village.

- Oh mais c’est notre grand plaisir. Sentez-vous libre de séjourner ici aussi longtemps que vous le désirez. Nous allons préparer la plus grande chambre de l’auberge pour votre

confort, elle est bien modeste, mais si vous désirez quoi que ce soit vous n’avez qu’à le demander. Tout ce que Traversa possède est à vous bien sûr.

Le maire fit signe à une vieille femme dans la foule derrière Nathan. Lys présuma que c’était probablement l’aubergiste lorsque la femme se retourna et partit, presqu’à la course, dans la

petite rue de terre battue contourna l’hôtel de ville. Nathan prit la main de Lys et la présenta au maire.


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- J’ai l’honneur de vous présenter Lys, la toute dernière Émissaire de Garusha, elle est mon

escorte jusqu’à Bénédicte.

- Oh ça alors, une Émissaire en plus ! Nous sommes vraiment honorés. Nous allions justement tenir une messe en l’honneur des Gardiens ce soir, vous joindrez-vous à nous ?

Nous allons en faire une messe spécialement à l’honneur de Garusha en votre présence.- Oui certainement, monsieur le maire. Il me fait un plaisir de visiter votre village pour la

première de nombreuses fois je l’espère bien.

Deux enfants qui n’avaient pas plus de cinq ou six années s’approchèrent de Nathan et se mirent à le toucher un peu partout, comme s’ils n’étaient pas certains que le prince était un être humain

comme les autres. Une jeune femme aux cheveux d’ébènes s’avança à travers les villageois.

- Benjamin, Lydia, arrêtez ! On ne tâtonne pas un prince ainsi.

Nathan s’agenouilla et passa sa main dans les cheveux de Lydia, la plus petite des deux.


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- Non ce n’est rien, laissez-les faire. J’imagine que ce n’est pas tous les jours que les enfants ont des distractions de la sorte.

- Non c’est vrai votre altesse, mais nous étions en classe, nous devons y retourner

maintenant. Allez les enfants.- Vous êtes enseignante ?

- Oui. Bénédicte est un peu trop loin d’ici alors j’ai créé une petite école afin que les enfants de la région puissent avoir une éducation adéquate ne serait-ce que deux ou trois

jours chaque semaine.

- Mais quelle bonne initiative ! Si vous le permettez, j’aimerais bien assister à la leçon de la journée, si ça ne vous embête pas trop.

L’enseignante sembla un peu surprise par la proposition, mais accepta.

- Très bien, l’école se trouve à l’extrémité de cette rue juste après le parc si vous voulez

bien suivre. Oh, j’oublie mes politesses, je me nomme Claire.

Claire serra la main de Nathan et de Lys puis appela le reste des enfants avant de descendre la

rue principale du village. Lys et Nathan lui emboîtèrent le pas jusqu’à l’école. Claire n’avait pas

menti, l’école était réellement minuscule. Ce n’était en fait qu’un simple bâtiment de bois, pas plus grand que les autres maisons du village à l’intérieur duquel ne se trouvait qu’une seule

grande pièce avec une dizaine de chaises et de tables faisant face à un plus bureau, plus grand, sur une marche surélevée. Les enfants coururent jusqu’à leur place respective et Claire grimpa

s’asseoir à son bureau. Nathan s’appuya sur le mur du fond, Lys à ses côtés.

Lys écouta l’enseignante parler pendant un moment, la leçon en était une d’écriture où Claire

récitait des mots ou des phrases simples et demandait aux élèves de tenter de les écrire. Elle se promenait ensuite parmi les enfants et les félicitait ou les aidait à écrire les mots qu’ils n’étaient

pas capables. Ces enfants ont une chance inouïe, plus de la moitié des adultes sur Geyerra ne sont même pas capable de lire ou écrire.

Lys tourna son regard vers Nathan afin de lui demander combien de temps il comptait demeurer à Traversa, mais décida de rien dire lorsqu’elle vit son expression. Nathan semblait heureux, voir

fasciné. Il regardait l’enseignante aider une jeune fille à écrire un mot et il souriait comme elle ne l’avait jamais vu sourire auparavant.

Ce prince est complètement différent de celui que j’ai connu

à la capitale. Qui eut cru que de le faire sortir de la ville aurait un effet aussi bénéfique sur lui. Peut-être la reine n’était pas aussi folle que l’on pense de l’avoir expulsé de la capitale après

tout.

***


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- Plus haut, plus haut.

La chaloupe flottait à quelques centimètres à peine du sol. Le visage de Kino tordu dans une expression de concentration intense. Kalya était déjà surprise par le fait qu’il arrive à faire léviter

un objet de cette taille, mais il lui avait demandé de l’aider et l’Émissaire n’allait pas être satisfaite tant qu’il ne pousserait pas ses aptitudes au maximum.

- Plus haut Kino. Tu as déjà le contrôle d’une onde arcanique, tu n’as qu’à te concentrer, va chercher les autres ondes environnantes et ramène-les vers la base de la chaloupe.

Kino tendit ses bras vers l’avant et crispa tous les muscles de son corps.

- Cesse de forcer, tes muscles ne t’aideront pas, tout ton pouvoir est dans ton esprit.

Kino baissa les bras et la chaloupe retomba sur le sol d’un coup sec.

- Merde !

- Ce n’est pas grave, c’est déjà très bien. Tu dois simplement apprendre à visualiser tous les courants arcaniques à ta disposition avant de commencer ce genre de sort.

Kino se laissa tomber sur le sol, l’air découragé.

- Ce n’est pas aussi facile. Je ne suis pas un Émissaire moi…- Je sais, ce n’est pas grave. Presqu’aucun homme n’est capable de faire ce que tu viens de

faire, surtout à ton âge.- Ma sœur aurait été capable. Ma sœur aurait même pu faire exploser cette chaloupe si elle

l’avait voulu.

Kalya s’assit aux côtés de Kino dans le sable sur le bord de la rivière et passa son bras autour de

lui.

- Ça fait déjà plusieurs fois que tu parles de ta sœur ainsi, elle semble très puissante pour une Jusseïn.

- La plus puissante ! Mon père m’a déjà dit qu’aucun Jusseïn n’avait démontré autant de

talent depuis plusieurs siècles.- Tu ne m’as pas dit pourquoi ta sœur avait quitté votre village.

- Il… Il y a eu un accident.


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Kino se releva, poussa la chaloupe sur le bord de la rivière et se mit à ramasser son sac et ses vêtements. Kalya et lui avaient acquis la chaloupe d’un pêcheur vivant à quelques lieux de

l’endroit où ils étaient. Kalya lui avait proposé une pièce d’or en échange et le pêcheur avait

accepté comme si c’était le plus grand trésor qu’il ne lui avait jamais été offert. La rivière Ulna cheminant vers le sud-est tout droit en direction de Djherba, ce serait beaucoup plus rapide pour

se rendre jusqu’à la cité militaire que de faire le trajet à pied.

Kalya se releva et s’approcha de lui.

- Quel accident ? Que veux-tu dire ?

- Nous étions dans un village voisin pour la cérémonie de Halli’Nari, la cérémonie que nous tenons en l’honneur de Garusha chaque automne après les récoltes. Mon père avait

été désigné pour présider la cérémonie. Il n’avait rien de vraiment particulier à faire sauf

allumer le feu de joie alors il a demandé à ma sœur si elle voulait le faire avec lui. Mon

père devait conjurer la flamme et ma sœur devait la souffler en direction des débris pour allumer le feu. Mais lorsqu’elle essaya de pousser la flamme, elle eut un malaise ou je ne sais quoi et la flamme prit de l’expansion... beaucoup d’expansion.

- Elle en a perdu le contrôle ?

- Oui. La flamme est devenue plus grande qu’un homme et elle était visiblement instable. Mon père fut brûlé vif sur le coup. Quelques secondes plus tard et la boule de feu a

explosé, la moitié des bâtiments du village ont brûlé et aux moins une vingtaine de personnes ont perdu la vie.

Kalya était bouleversée par ce que le jeune homme venait de lui dire.

- Par Garusha ! Que s’est-il passé alors ?- Ma sœur fut saisie et enfermée. Les autres villageois disaient qu’elle était dangereuse,

qu’elle ne contrôlait pas son pouvoir. Il y a eu un procès et elle fut condamnée à mort.

Kalya ne savait plus quoi dire. Elle n’avait aucune idée qu’un évènement aussi terrible hantait le

passé du jeune Kino. Et il me demande de l’aider à augmenter sa puissance magique !?

- Le jour de l’exécution, ma mère s’est rendu à la cellule de ma sœur pour lui porter son dernier déjeuner et elle n’était plus là.

- Plus là ? Comment ?

- On ne sait pas. Par téléportation probablement. Je l’avais déjà vu essayer ce genre de sortilège, mais jamais réussir. J’imagine que l’urgence de la mort imminente lui a donné

la force nécessaire pour s’échapper.


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Kino remit son veston de cuir puis prit une des rames de la chaloupe avant de se retourner vers Kalya.

- Tu comprends pourquoi je veux que tu m’aides ? Je sais que j’ai le pouvoir en moi, mais je ne veux pas perdre le contrôle, pas comme ma sœur l’a perdu.

- D’accord, mais étant donné l’histoire que tu as vécu avec ta sœur, j’espère que tu comprends les risques associés à ce genre de chose. Lorsque tu es avec moi, tu peux

pousser tes limites un peu plus, mais sinon ne laisse jamais la magie te contrôler. Laisse

ton esprit travailler en harmonie avec elle et ne tente jamais de l’amener plus loin qu’elle ne te laisse le faire.

- Oui, je sais.- Allons alors. Testons cette chaloupe !

Kalya embarqua dans l’embarcation, Kino devant elle, et ils se mirent à pagayer sur l’Ulna en

direction du lac de cristal et du cœur du royaume de Kel’thir.

***

La salle d’Onyx se trouvait à l’avant-dernier étage de la forteresse écarlate. Une très large pièce sans fenêtres, sans piliers, ni aucunes ornementations ou décorations. Au centre de la salle

cinq sièges de marbre étaient disposés en cercle, montés sur une plateforme au centre de laquelle un grand brasero brûlant d’un feu rouge-orangé. Nytarius avait pris place sur le plus haut des

sièges, celui réservé à l’oracle de Cerberus. Les trois autres Émissaires étaient maintenant arrivés

et avaient également pris leurs places respectives.

À la droite de Nytarius se retrouvait Malik, le deuxième Émissaire de Cerberus. Il était simplement vêtu d’une camisole et de pantalons de cuir noir. À son dos étaient rangés deux

larges épées, presqu’aussi longues que lui et à sa ceinture une masse d’un côté et une dague de l’autre. Malik était beau à sa manière, ses traits précis et sévères et ses courts cheveux noirs

lissés vers l’arrière, mais son visage était inquiétant aux yeux d’Ayoub. Il avait le visage

impassible d’un homme dont on ne savait jamais s’il s’apprêtait à sourire ou à vous attaquer.

À sa droite était assis Nyx. Nys était grand, très grand. Il dépassait Nytarius de près d’un demi-mètre, mais était beaucoup plus mince, avait les cheveux rasés et, surtout, n’avait plus

qu’un seul bras. Nyx, comme Nytarius et Malik, était l’un des trois Émissaires originaux de

Cerberus s’étant battus aux côtés du Gardien lors de la guerre contre le dieu traître Terrok’tar. L’arme de prédilection de Nyx était un marteau de guerre à deux têtes dont les extrémités étaient

gravées à l’image de Cerberus.


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La dernière Émissaire présente était Dana, surnommée l’amazone à travers Geyerra. Une femme pas particulièrement plaisante à regarder, mais étant reconnue comme une guerrière sauvage qui

n’avait jamais perdu un combat, même pas contre ses collègues Émissaires de Cerberus.

Pendant un instant Ayoub cru qu’il devait prendre place sur le siège vacant, celui qui appartenait

autrefois à Delzo, mais le raclement de gorge menaçant de Nytarius lui fit comprendre qu’il devait rester debout. Il alla se placer à côté de l’Émissaire de Cerberus, gardant toujours le

silence. Ayoub avait compris assez rapidement que Nytarius ne plaisantait pas lorsqu’il disait

que seulement les Émissaires de Cerberus pouvait parler dans la forteresse, même les centaines de gardes qu’il avait croisé sur son chemin ne disaient pas un mot. La forteresse entière avait une

atmosphère de cimetière. Les choses ont changées dans les rangs des Émissaires de Cerberus depuis ma dernière visite, il n’y a aucun doute.

Ayoub fixait la flamme au centre de la pièce lorsque Nytarius prit finalement la parole.

- Merci mes frères d’avoir répondu à mon appel. Nous avons quelques points importants à discuter en lien avec l’assassinat récent de notre frère ainsi que des agissements de

Garusha et de ses Émissaires.

Les agissements de Garusha ? Décidemment ça commence bien.

- Dana, je sais que tu reviens tout juste de Teneb, mais ton rapport devra attendre quelques

jours si possible.

- Sans problème. Les tribus Pelag’thirs de la région n’ont démontré aucun signe de mobilisation dans les dernières semaines, je crois que nous avons encore du temps avant

ce que nous craignons.- Parfait. Nyx, Malik, tout est toujours comme planifié pour l’inauguration de Djherba ?

Nyx répondit à la question de son oracle.

- Oui maître. Les cérémonies devraient commencer après-demain comme prévu et aucun signe de perturbations n’a été perçu dans la région. Je compte y retourner après ce conseil

à moins que vous n’ayez une tâche plus urgente à me confier.- Oui, nous avons besoin d’au moins un Émissaire sur place, ne serait-ce que pour l’image.

Malik cependant j’aurai une autre tâche pour toi. Je veux que tu te rendre à Geyen pour

assister au conseil.- Au conseil ? Je croyais que avions décidé de ne pas y participer ?

- C’était le cas, mais à la suite de certains évènements récents, je ne pense pas que l’on puisse laisser Rhael’gazor et les autres Émissaires de Garusha être les seuls représentants


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des Gardiens dans le cadre d’une réunion qui pourrait décider des cent prochaines années de Geyerra. Je reviens tout juste de Delgado comme vous le savez, les gardes de la ville

et moi avons réussi à retracer l’assassin de Delzo.

Ayoub regarda les trois autres Émissaires s’agiter sur leur siège, une lueur d’excitation dans leurs

yeux.

- Il nous a échappé.

L’excitation disparut aussi vite qu’elle était apparue.

- Nous avions réussi à le localiser dans une clairière de la forêt au nord de la ville. Nous

n’étions qu’à deux minutes de marche de l’endroit lorsqu’un sort de téléportation a été

utilisé, l’enfant s’est volatilisé.

Malik, l’air confus, questionna son oracle.

- Comment est-ce possible ? Même les plus puissants des Jusseïns ne peuvent pas se

téléporter.- Les plus puissants des Jusseïns ne peuvent pas tuer un Émissaire non plus. Le jeune

homme a été aidé, tant dans son crime que dans son évasion. Mais il y a autre chose. Je sais qui l’a aidé à s’enfuir de la forêt.

Non… Il ne peut pas savoir.

- Il s’agissait de Kalya, j’en suis certain.

Merde !

- Kalya était à Delgado la journée-même. C’est le forgeron de la ville qui m’en a informé.

Elle tentait de passer incognito, mais il l’a reconnu. De plus, j’ai senti une puissance très forte dans la clairière au moment où le sort de téléportation a été lancé. La puissance

d’une Émissaire j’en suis certain. Nous ne pouvons pas savoir si Kalya est également responsable du meurtre de Delzo, mais le simple fait qu’elle aide le présumé assassin à

s’enfuir démontre en partie sa culpabilité.

Nyx se leva, décrocha sa masse de guerre et s’avança vers Ayoub. Celui-ci fit un pas vers

l’arrière. L’oracle de Cerberus tendit la main vers son collègue.


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- Nyx arrête, je ne veux pas de violence à l’intérieur de la forteresse. Je compte garder Ayoub à mes côtés jusqu’à ce que nous ayons des explications de Kalya ou de

Rhael’gazor.

- Mais maître, est-ce prudent de votre part de demeurer seul en sa compagnie ?- Je pourrais l’écraser comme un vulgaire moustique si je le voulais, ne t’inquiète pas. Je

vais également m’assurer qu’il ne communique pas avec les autres Émissaires.

Nytarius se leva, fit deux pas vers l’endroit où se tenait Ayoub et décrocha le cristal se trouvant à

la ceinture de l’Émissaire de Garusha.

- Je vais garder ceci si ça ne te dérange pas. Si Rhael’gazor veut te contacter, il devra passer par moi auparavant.

Ayoub baissa la tête en soumission. Il était maintenant clair qu’il était un otage parmi les

Émissaires de Cerberus. Sans le cristal de communication, il n’avait aucun moyen de contacter Rhael’gazor ou les autres Émissaires pour les informer de sa situation. Il ne savait pas ce que

Nytarius avait en tête, mais il allait devoir le suivre.

Je dois trouver une façon de leur prouver

que Garusha n’a rien à voir dans toute cette histoire, mais comment ?

Nytarius donna ses dernières directives à ses collègues. Malik devait se rendre à Geyen pour

assister au conseil, Nys retourner à Djherba pour les cérémonies d’inauguration et Dana aller aider les campements militaires au nord de Kel’thir à se préparer en vue d’une possible incursion

en territoire de Geyen. L’oracle se leva ensuite, souhaita bonne chance à ses collègues puis

poussa Ayoub vers la sortie de la grande salle. Ce dernier, toujours muet, avança jusqu’aux escaliers et descendit jusqu’au rez-de-chaussée de la forteresse. Se retournant vers Nytarius, il

était sur le point de lui demander où ils devaient se rendre maintenant, mais réussit à s’arrêter à la dernière seconde. Il se contenta de regarder l’oracle de Cerberus d’un œil inquisiteur. Nytarius

lui pointa la porte de sortie. Ayoub continua donc son chemin vers la sortie de la forteresse qui était demeurée ouverte.

Une fois à l’extérieur, le soleil de midi lui fit porter les mains devant les yeux pour se protéger de la lumière intense faisant contraste avec la pénombre de l’intérieur. Il se retourna vers Nytarius.

- Où est-ce que….

Il eut à peine le temps de constater que Nytarius avait dégainé l’épée longue de son fourreau et saisi l’énorme bouclier attaché à son dos lorsque que le coup de pied de ce dernier le frappa en

plein abdomen. Ayoub alla s’écraser une dizaine de mètres plus loin, le souffle complètement


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coupé. Il se releva sur ses coudes et aperçu le regard violent dans les yeux de l’oracle de Cerberus qui marchait d’un pas décidé dans sa direction.

- Il est maintenant temps de me dire la vérité Ayoub. Toute la vérité.

***

La petite embarcation transportant Kalya et le jeune Kino arriva finalement à la fin de la

rivière. L’Ulna débouchait à cet endroit sur le Lac de Cristal, la plus grande étendue d’eau du royaume de Kel’thir. Le lac s’étendait d’est en ouest, séparant les vertes prairies de la partie nord

du royaume des plaines rocheuses du sud. Sur la rive nord du lac apparurent pour la première fois le profil des plus hautes tours de la cité de Djherba. À l’est de la cité, les plaines étaient

inondées par les tentes et pavillons dressés par l’armée Kel’thirienne. Le cœur militaire du

royaume était présent pour l’inauguration de la nouvelle capitale. Kino semblait définitivement

impressionné par la marée humaine qui s’étendait à perte de vue.

- Par Garusha ! Combien sont-ils ?

- Je dirais au moins cinquante mille. La moitié des forces armées Kel’thiriennes.

- Et nous nous rendons là !? J’apprécie beaucoup que tu veuilles m’aider à prouver mon innocence, mais nous n’avons aucune chance contre une armée entière.

Kalya se mit à rire en pagayant, obliquant tranquillement la trajectoire de la chaloupe vers le

centre du lac.

- Je n’ai pas l’intention d’aller affronter une armée, sois sans craintes. C’est entre autres

pour cette raison que je voulais passer par le lac, à pied nous n’aurions eu aucune chance de passer inaperçu parmi cette foule. Nous allons tenter de rester relativement loin de la

côte et accoster dans les collines à l’ouest de Djherba. De là, j’espère trouver une façon d’entrer dans la ville.

Le duo continua son chemin vers le centre du lac, s’éloignant toujours de la côte nord. L’absence de courant rendait le travail facile pour les deux rameurs, mais une étrange bouffée d’air froid

semblait émaner de l’eau. Plus Kalya et Kino approchaient le centre du lac, plus l’air ambiant se refroidissait.

- Kalya…- Je sais Kino, je le sens aussi.


18/20

Kalya donna deux autres coups de rame puis stoppa, Kino fit de même. L’eau devant l’embarcation frémissait, comme si quelqu’un ou quelque chose soufflait sur la surface du lac.

Kalya vit son jeune compagnon commencer à suer, jetant des regards dans toutes les directions.

Kalya s’adressa à lui en chuchotant, sans trop savoir pourquoi.

- Il y a quelque chose dans les profondeurs, juste en dessous de nous.- Je le perçois. Ce n’est pas humain, ni animal…. C’est une présence étrange… ancienne.

La petite flaque frémissante devant eux commença à s’élargir et s’élargir encore allant jusqu’à entourer complètement la barque. Kalya et Kino était maintenant dos-à-dos. L’Émissaire, sans

même s’en rendre compte, avait manifesté une boule de feu dans sa main, prête à attaquer. Après une minute qui sembla une éternité pour Kalya et Kino, l’eau cessa subitement de frémir et deux

immenses tentacules surgirent de chaque côté d’eux, les aspergeant d’eau et faisant presque

chavirer la chaloupe.

- Baisse-toi !

Kino se lança dans le fond de l’embarcation et Kalya relâcha sa boule de feu sur le tentacule à sa

droite. Celle-ci l’esquiva en retraitant dans l’eau et réapparu aussitôt un mètre plus loin. Au même moment, l’autre tentacule frappa Kalya dans le dos. Elle fût presque projetée par-dessus

bord, mais réussi à s’agripper à la rambarde et à se relever. Elle conjura une nouvelle boule de feu et la lança vers le deuxième tentacule, celui-ci se recula en une fraction de seconde et se

secoua vers l’avant frappant la boule de feu en plein vol, la reprojetant en direction de

l’Émissaire. Kalya eut à peine le temps de réaliser ce qui se passait et sauta sur sa droite, mais trop peu trop tard. La boule de feu la frappa en pleine poitrine et elle tomba à la renverse dans le

lac.

- Kalya !

Kino se leva et s’agrippa sur le rebord de la chaloupe, fixant le lac à l’endroit où Kalya était

tombée. L’eau du lac se mit à bouillonner et un immense geyser surgit. Lorsque l’eau retomba, Kino vit Kalya léviter à quelques centimètres de la surface du lac. Cette dernière conjura une

sphère de feu autour d’elle et, lorsque les deux tentacules tentèrent de la frapper de nouveau, ils se heurtèrent conter le bouclier magique dans un éclat d’étincelles et d’eau. Les ventouses à

moitié carbonisés crépitant et provoquant une odeur de poisson trop cuit. Kalya lança deux

nouvelles boules de feu avec chacune de ses mains, frappant les deux tentacules. Ces derniers ne cessèrent cependant de frapper sur le bouclier de feu tentant de le percer.


19/20

C’est à ce moment que Kino aperçu l’eau se remettre à frémir à plusieurs endroits autour de Kalya.

- Kalya, attention !

Huit nouveaux tentacules surgirent partout autour de l’Émissaire, frappant le bouclier de tous les angles possibles alors que Kalya continuait de lancer boule de feu après boule de feu dans toutes

les directions. Après une solide frappe du plus gros des tentacules, le bouclier de feu finit par

céder et disparu dans un nuage de fumée. Un autre des appendices marins frappa Kalya derrière la tête, cancellant le sort de lévitation et plongeant Kalya dans l’eau de nouveau. Elle n’eut pas le

temps de se relever cette fois avant d’être saisi par un tentacule qui s’était enroulé autour de sa taille. Le tentacule tenait Kalya à quelques mètres au-dessus de la surface du lac comme une

vulgaire pierre alors que les neuf autres continuaient de la battre.

Kino, dans un élan de panique, grimpa sur la tête de la chaloupe et cria.

- LÂCHEZ-LÀ !!!


20/20

Soudainement, comme gelés dans le temps, les tentacules du monstre marin figèrent en position. Kalya, le visage en sang, ouvrit les yeux et vit deux des tentacules qui s’apprêtaient à la frapper,

immobiles, juste devant son visage. Non, pas immobile… Les tentacules bougeaient encore, mais

très lentement. Elle ne perdit pas de temps à se poser des questions et projeta deux nouvelles boules de feu, repoussant les tentacules vers l’arrière. Elle posa ensuite la main sur le tentacule

qui la tenait et concentra toutes ses énergies vers celle-ci. Sa main prit soudainement feu comme une torche, brûlant complètement le tentacule d’un bord à l’autre, le coupant en deux. Kalya

retomba dans l’eau et nagea de peine et de misère vers la chaloupe. Elle s’agrippa à celle-ci et

tendit la main à Kino. Le jeune homme l’aida à remonter dans l’embarcation.

Kalya se retourna et vit les tentacules se remettre à bouger un peu plus rapidement. Les ventouses à la surface de ceux-ci se tournant vers l’embarcation. Kalya s’agenouilla puis posa sa

main gauche dans l’eau. Les yeux fermés, elle tenta de rassembler chaque petit courant arcanique

qu’elle pouvait ressentir dans la région et les dirigea vers la surface du lac. L’eau de celui-ci se

mit à bouillonner, d’abord un peu, puis de plus en plus intensément. Elle ouvrit brièvement les yeux et vit les tentacules avancer de plus en plus rapidement dans sa direction.

Quelques secondes, j’ai besoin de quelques secondes de plus.

Elle avait refermé les yeux, mais sentit un des tentacules s’enrouler autour de son cou et un autre

autour de son bras plongé dans dans l’eau. Les tentacules se mirent à serrer de plus en plus fort alors que lac se mettait à bouillir. Des milliers de bulles d’eau montèrent à la surface du lac et

l’eau se mit à émettre une vapeur intense. Quelque part au cœur du Lac de Cristal, un

grognement sourd et profond se fit entendre et les tentacules lâchèrent prise sur Kalya. L’Émissaire ouvrit les yeux et vit les dix tentacules s’agiter dans toutes les directions, comme

pris d’une douleur intense. La couleur grisâtre de ceux-ci vira au rouge et, finalement, les appendices retraitèrent sous l’eau.

Kalya laissa sa main dans l’eau pendant quelques instants encore, puis la retira, se laissant

tomber dans le fond de la chaloupe. Kino, assis devant elle, la fixa sans dire un mot. Ils restèrent

en silence pendant quelques instants jusqu’à ce que Kalya se redresse et reprenne les rames.

- Sortons de ce lac le plus rapidement possible s’il-te-plaît.

Kino ne se fit pas prier. Il prit place devant Kalya, reprit les rames et le duo se dirigea vers la rive

nord du lac à un train d’enfer.

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Episode 7 - La Forteresse Écarlate