313
:'S'o/Sy DC(vu, oor:tZUn ive rs ité de Provence Jeu, ,3g Aix - Marseille 1 Institut d 'Histoire des Pays d'Outre-Mer ETRANGERS ET MALGACHES x DANS LE SUD-OUEST SAKALAVA 1845 - 1904 Thèse pour le Doctorat de troisième cycle HISTOIRE présentée par Mme E,.!NA fnie fOTOMANANTENA \ Jeanne Razafiangy - sous la direction de ; Monsiellr le Professeur Jean- Louis M" EGE Directeur del'I.H.P.O.M. Aix - en - Provence Octobre 1982

ETRANGERS MALGACHES DANS LE SUD-OUEST SAKALAVA

  • Upload
    others

  • View
    11

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

:'S'o/Sy DC(vu, oor:tZUn ive rs ité de Provence Jeu, ,3g
Aix - Marseille 1
ETRANGERS ET MALGACHES x
DANS LE SUD-OUEST SAKALAVA
HISTOIRE
;
Directeur del'I.H.P.O.M.
~==============~~~~~~~~~-----_<.
. ,
Je. soussignéch Madame DINA, Je8.J:ll1.e, Martre-Assistant à l'Universitë de Madagascar, enseignante au Centre Universitaire Régional de TuJ.éar, autorise par 1,,- présen~une copie intégrale de ma thèse de doctorat dé 3e Cycle pour les Archives de la ,.
M~ssion Norvégienne de Stavanger•
Fait à Tuléar le 23 Avril 1985/
Jett:~A Mattre-Assistant
ETRANGERS ET MALGACHES
HISTOIRE
sous la direction de
Directeur de l'I.H.P.O.M,
Aix - en - Provence
C.U.R •••.•••.. Centre Universitaire Régional
J.O.M.D ••••.•. Journal Officiel de Madagascar et Dépendances
J .O.R.F....... Journal Officiel de la Répu151ique Française
N.R.E......... Notes, Reconna î ss ance s et Explorations
O.R.S.T.O.~••• Office de la Recherche Scientifique et Technique Outre-Mer
S.O.M.•••••.•• Section des Archives d'Outre~er
- J -
INTRODUCTION
.., . "î'
..
,~
La If révolution 11 malgache de J972 qui témoigne surtout d'un
sursaut de nationalisme, se t~aduit entre autres manifestations par
l'éveil des différentes provinces de l'île. Ceci aboutit à la récla­
mation de la décentralisation par le Colonel BRECHARD RAJAONARISON
en février J975. En effet, si en 1972, on veut rejeter le néocolonia­
lisme, il faut aussi secouer tout le système installé par la coloni­
sation, dont la centralisation excessive autour d'ANTANANARIVO. qu'elle
avait choisi comme centre de rayonnement au détriment des autres
régions. Jusque là, l'historiographie, elle aussi, suivait cette ligne
de conduite générale. Toutes les études étaient orientées vers le
royaume Eerina. Or, si celui-ci a soumis une grande partie de l'île,
d'abord, il a dû affronter la résistance des populations locales
(Betsileo, Betsimisaraka, Sakalava du Boina, etc ..• ), donc des entités
qui existaient. D'autre part, il ne faut pas oublier qu'il restait des
régions encore indépendantes du pouvoir merina : les Sakalava du SUd
(Fiheregna et Menabe), les pays mahafaly et antandroy, etc .. , en ]896,
régions qui avaient encore leurs chefs traditionnels, mieux encore leurs
rois. Aussi assiste-t-on actuellement à un regain d'intérêt pour les
autres régions.
Comme nous sommes originaire du Sud-Ouest, il nous a paru naturel
de contribuer à une meilleure connaissance de son passé. D'ailleurs
nous nous sommes sentie obligée de le faire, car~sachant que nous avons
fait des études supérieures, il arrive très souvent qu'on nouS pose,
chez nous, des questions sur l'histoire du pays.
Mais il ne faudrait surtout pas concevoir cet essai pour faire
connaître les autres provinces de l'île comme une volonté de division
en cette époque d'effervescence nationale. Au contraire, nous Sommes
- 2 -
fermement convaincue de l'unité du peuple malgache. Mais justement~
il faut essayer de comprendre l'origine de nos problèmes actuels pour
trouver leurs solutions, en étudiant l'évolution historique qui a
créé les déséquilibres régionaux de Madagascar.
o 0
o
Le titre n Etrangers et Malgaches Il s'explique par le fait que
l'histoire des Sakalava ne peut pas se dissocier de leurs relations
avec les Etrangers. Leur puissance et leur expansion sont liées à la
maîtrise des ports de commerce du canalde Mozambique~ ceux de la baie
de Saint-Augustin comme ceux du Roina. De plus,pour la'période qui nous concern
il est difficile de faire une étude sur Madagascar en laissant de côté
les Etrangers. Cette période marque~en effet, l'apogée de l'expansion
européenne. Madagascar dont fait partie le pays saka1ava,rentre dans la
compétition entre les puissances occidentales colonisatrices.
Dans l'intitulé de notre sujet, nous avons précisé qu'il s'agit du
Gud-~est sakalava. En fait, le pays sakalava (1) s'étend de l'Onilahy
qui forme sa "frontière TI avec les Mahafaly au sud, jusqu'à la pointe
nord de Madagàscar. Vers l'intérieur, ses limites correspondent à la
crète médiane qui fait passer les deux bassins côtiers qui bordent
l'île, aux régions auxquelles on donne souvent le nom de Hauts Plateaux.
Le pays sakalava occupe donc la quasi totalité de l'Duest en excluant
le plateau mahafaly. Nous ne parlerons pas du Baina, bien qu'il fasse
partie de ce grand ensemble, car pour la période què nous étudions, il
est déjà bien rattaché au royaume d'ANTANANARIVO. .Sa .situation est diffé­
rente de celle des royaumes du Sud-Ouest.
(1) SAKALAVA : sur l'origine de ce nom~ on n'en est encore qu'aux hypo­ thèses. On retient de plus en plus celle du nom de la petite. rivière qui passe à BENGY TSIANDRORA~ capitale de la puissance sakalava~ qui est bien plus proche du Fiheregna (BENGY est dans la sous-préfecture de Manja) qu'elle ne l'est du Boina, reconnu sans conteste comme sakalava.
- 3 ­

N
ÇIH~~~Ct/oJA ~ iL j,lfo,"!!:. e,.1 1,) CI 1e.
\"\A\-\I,ld~AL'I ' Rc",o,)I"'e \,m\~~Of""e.
4 ...
Dès 1826, en effet, on peut dire que le Boina est conquis. Les
Merina occupent aussi bien son principal port, MAJUNGA, que la capitale
du royaume, MAROVOAY. L'influence des Islamisés y est très importante,
son dernier souverain, ANDRIANTSOLY, s'est converti à l'Islam. Une
étude sur le Boina actuel montre bien cette différence avec le Sud-Ouest
Sakalava. La plupart de ses notaoles portent des noms musulmans (1).
Ce choix du Sud-Ouest sakalava répond à deux autres préoccupations
- Nous avons étudié ensemble le Fiheregna et le Menabe, car ces
deux régions géographiquement comparables ont auss~ adopté une attitude
analogue face à l'expansion merina au XIXème siècle et vis à vis des
êtrangers. L'influence étrangère y est presque inexistante, ni européenne,
n~ musulmane.
- De plus, nous avons voulu regrouper le Fiheregna et le Menabe, car
nous avons constaté qu'actuellement sévit une tendance à exclure le
Fiheregna de l'ensemble sakalava, alors qu'il en fait bien partie. Quand
on parle des Saka1ava, on pense t~ès souvent aux seuls royaumes du Menabe
et du Boina. A tel point que le grand historien africain KI ZERBO, lui-même,
en arrive à localiser les royaumes sakalava au " nord ouest" (2) de
Madagascar. On appelle de plus en plus les gens du Fiheregna " MASIKORO "
ou Il VEZO ", alors que ces deux mots ne désignent que des groupes soc~o­
culturels parmi les Sakalava. La citation suivante est typique de cette
tendance et montre combien il est difficile d !appréhender les différences
qu'on cherche à établir entre les VEZO, les MASIKORO et les SAKALAVA :
Il MASIKORO e..nttLe. te. Mangoky et i' On.J.1..ahy eX à .tt E.6t de..6 maiJ.6J..6.6
du MDwboka. e.t de. l' Ana1.a.vUona (plu..6 de. 9..0 000 Ma..o&o./to).
SAKALAVA au No./td du Mangoky rptU.6 de. 75 000 Sa.hala.va. dM.6 lco
~ du Su.d-Ouco:t).
Quant aux VEZO qui ne. .60nt que. que.lque..6 rru)!LLeJL.5, on. lco a..6.!J,é.mü.e.
génë.Jta1.e.me.nt aux Sa..ka.1.a.va ou aux Ma..6.-Lko./to, ••• " (3)
(1) Cf. par exemple, l'ouvrage récent de J.F.BARE Sable rouge, une monarehie du nord-ouest malgache dans l'hi~toire. Paris, l'Harmattan.l980.
(2) J.KI ZERBO - Histoire de l'Afrique Noire. Paris, Hâtier, 1978, p.597.
(3) J.M. HOERNER - Géographie régionale du Sud-Ouest de Madagascar. Collec­ tion "Tsiokantimo", Série Recherche N° 5. Centre Uni.ver s i t a i re Régional de Tuléar, p.20.
Masikoro des Vezo chez les·Sakalava du sud du Mangoky est héritée d'une
volonté du régime colonial de diviser les peuples suivant le grand pr~n-
cipe du " diviser pour régner " qu'on appliquait en profitant des mom-',
En réalité, si parmi les Sakàlava, on distingue les Masikoro et les
Vezo, le premier terme désigne les gens de l'intérieur, pasteurs et culti­
vateurs, et le second, ceux du littoral, marins. Le mot" VEZO Il éthymolo­
giquement est l'impératif du verbe Tt MIVE " (mi.voy) , pagayer~ allusion à
(1) Rapports périodiques ~ D.O.M. Aix-en-Provence~ 2.D.213, lettre du 23 juillet ] 897.
(2) Idem, un dossier entier sur la rébellion de TOMPOEMANA (dans la liasse A).
(3) Leu jJ..ny :. appelés parfois aussi dadu, sont les reliques des ancêtres détenues par l'aîné de la famille. Elles existent dans chaque famille sakalava. Dans les familles royales, elles confèrent le pouvoir au détenteur.
cette insistance ·à distingue~ le$
- 5 -
dres nuances qu'on pouvait discerner à l'intérieur d'une ethnie. Ainsi
nous avons remarqué la précipitation d 'ESTEBE, Vice-~ résident français
à Nosy Ve, à réunir les VEZO, alors sujets sakalava à part entière, pour
les distinguer du groupe masikoro (1), celui~ci désigné comme plus belli­
queux, pendant la résistance sakalava à la conquête coloniale en 1897,
alors que dans ses correspondances antérieures, il parlait toujours des
Sakalava sans différenciation. Dans ses rapports relatant la rébellion
de TOMPOEMANA, roi sakala~a, il ne nomme plus que les Masikoro (2). Ceci
a été consacré par l'installation du système de petits protectorats du
Sud en 1901, avec l'instauration du protectorat dit justement" MASIKORO "
sous l'autorité de RIBIBY, fils de TQMPOEMANA. Le prince FIEPOHA, déten­
teur des jiny (3) des Andrevola à Benetse, partage notre point de Vue. Il
nous a dit que cette appellation de Masikoro donnée aux Sakalava du sud
du Mangoky est un phénoInène récent. Elle est apparue peu après la dispari- iC i 11\<"-; cXon t
tian de TOMPOEMANA,vexactement avec la période des protectorats, cammenous
l'avons suggéré plus haut. Selon lui, le Fiheregna est un pays sakalava
depuis toujours. Par contre, dans le Menabe, où l'administration coloniale
a constitué le territoire sakalava en ]898, sans appellation particulière,
le prob l ème n'a j amai s é té posé.
- 6 -
J,eurs activités maritimes, tandis que le mot Il MASIKDRD Il Tf'présenterait
plutôt ride id€e de région intérieure. VERIN cite le mot encore connu en
Tanzanie actuellement qui désignerait la repousse de l'herbe à l'intérieur
des terres Cl). A.ENGELVIN y voit un mot souahili qui signifie gardien de
boeuf ou fermier (2). GRANDIDIER, en 1868, qualifie le chef mahafaly
REDOGONE de masikoro en ces termes :
" Je m'en a.U.a1.. c.hez mo-<.., pOUll. me me..ttJr..e en qu.Ue de de.ux Vezo J
de deux ma/t.Üt6, mon g!U.de RAVOGONA é.tant un met6ik.oJr.o, un
teNUe.n, ... Ir (3).
Si les façons de parler diffèrent un peu, il s'agit tout simplement 1·
d'lU1 accent. Le " :tA Il masikoro se prononce" .t6 Il en vezo. Ainsi, par
exemple le Il -tIulgno ll masikoro devient .t.6agno chez le vezo, "tr ano'Len dia-
lecte merina ; le n Yl H du possessif est avalé chez le Vezo : 'b.mi..natj"
(chez nous) masikoro, prononcé : Q.mi'ay"vezo. Mais les Vezo ont-ils une
histoire différente de celle des Ma.sikoro en ce XIXème siècle ? Les deux
groupes obéissent aux mêmes souverains. Les Vezo, aussi bien dans le
Menabe que dans le Fiheregna, sont sujets des rois sakalava qui résident
parmi les Masikoro à l'intérieur, mais qui les considèrent au même titre
que ceux-ci. ~t:aines hypothèses veulent distinguer les Vezo comme l' un
des groupes autochtones que les dY!l:a~:,.d.;ea;marosaraguavenant de l'E:st. - auraient soumis (ce qui est peut-être vrai), mais c'est aussi le cas des
Mikea, des Sak0 ambe, qui sont néanmoins considérés comme saka1ava sans
conteste, tout en faisant partie des Masikoro. Tous les auteurs du XIXème
siècle, tel DOULIOT (4), qui n'a pourtant connu que la région au nord du
Mangoky où l'on ne parle plus actuellement que de Sakalava, désigne plus
volontiers ceux de l'intérieur (de la vallée de la-~fla~o,du Maitampake,
J,
(J)
(2)
(3)
(4)
P.VERIN : Les échelles anciennes du commerce sur les côtes nord de Madagascar. T.l, p.63
A.ENGELVIN : Les Vezos ou Enfants de la mer: monographie d'une sous­ tribu sakalava, Bellevue ]937, Librairie vincentienne et missionnaire p. 39.
Souvenirs de voyage d'A. GRANDIDIER 1865-1870. Documents anciens sur Madagascar VI, d'après son manuscrit inédit 1916, Antananarivo, ORSTOM, p. 20.
_.- ._-~-.~~-_._.. ~~-~-~--=======================~
- 7 -
et de la Demoke) comme Masikoro~ par opposition à ceux de Bosy, de Nosy­
Miandroke (Morondava actuel)~ c'est-à-dire du littoral, qu~ sont des Vezo,
des Sakalava-Marins. Et même les ouvrages plus anciens~ qu~ nous parlent
de l'apogée du grand royaume masikoro (vers 1660), nous rapportent que les
souverains du Fiheregna étaient toujours en relation avec ceux du Menabe.
, Ainsi ANDRIAMANANGA. ce roi masikoro qui est venu à Fort-Dauphin (il
devait être appelé masikoro par les hahitants du littoral du Sud du fait
qu'il venait de l'intérieur), en J654, serait un gendre de LAHIFOTY, et
voisin (1) de LAVATAGNA, ce dernier. fils du grand souverain du Menabe.
C'est peut-être pour cette raison que FLACOURT dans son Histoire de la
Grande Ile ne savait pas trop comment limiter le royaume de LAHIFOTY sur
ses cartes.
Une autre verS1.on dit que ZOMA (autre nom d'ANDRI.AMl!NA,NGA) a conclu
un traité de paix avec LAHIFOTY (2), le second préférant étendre son
royaume dans le Menabe, et on pense que ce serait à cette occasion qu'il
lui aurait donné sa fille en mariage. Et malgré les différents conflits
qui vont opposer les descendants de ces grands rois, cet accord est souvent
évoqué. Sous le règne d'ANDRlAMAGNALE, encore en 1845, le roi antifiheregna(~
ne veut pas attaquer son voisin antimena. TARAGNE, en vertu de ce traité
Le prince FIEPORA nous rapporte que la mère de MITRÀHA (ANDRlAMAGNEVARIVO)
est une princesse marosaragna du Menabe. Ceci es·t corroDoré par A.GRANDIDIER
dans ses" notes de voyage dans le Fiheregna en ]868 (4).
Et nous sammes tentée de croire que les guerres épisodiques que font
les souverains du 1iheregna contre ceux du Menabe n'ont d'autres buts que
(J) E.FAGERENGUne famille de dynastie malgache Oslo 1971 p.19.
(2) E.FAGERENG Une famille de synastie malgache)slo 197J p.&"O.
(3) Antifiheregna : Gens venus du Fiheregna ; Fiheregna : nom du pays sakalava du sud du Mangoky. Le préfixe anti ou ante~ marque la provenance. On le retrouve dans Antimena (développé ci-dessous) Antalaotra.".Aritandroy, An tanosy, etc •••
Antimena : Gens venus du Menabe. Menabe : nom du pays sakalava limité par le Mangoky au sud et le Mahilaka au nord.
~~-_._._-~=,=-===============================~
- 8 -
de dégager la personnalité de chef qu~ réunira un aussi vaste territoire
et ne sont donc que des conflits internes pour la domination du royaume.
De toute manière, il n'y a,aucune différence entre les peuples
antifilieregna et antimena, car-leurs chefs en guerre ont toujours cherché
à drainer le plus possible d'hommes vers leurs territoires respectifs.
Ainsi, ANDRlAMAGNETRIARIVO (Trimolahy fils de Lahifoty)
" ayan;t vai.nc.u RAVOVOGNA (1) .6' e.mpaJta. de. .se..o deu:x ùmu cUn4.-<­
que. beauc..oup de 6e.mme.1i et d' e.nfJards qu'il emmena e.n. c.aptiv"uë
ptr..ome;U.a.n;t de. tes nendne. à le..wu, maJL.L6 et à le.üJL.6 pêJr..u qu-<.
vie..nd!ta...[e.rr.t -6 1 ëta.5UJr. dans -6 on pa.yl.i, ce que. nÂ.Jl.e.n:t p.e.u..oie.CLtr..-6
c.e.n.:tainu dl Antinme.Jl..e.gna." (2)
Dans .La tradition que le prince fIEPOHA nous a rapportée, la grand-lmêre
de LAHIMIRlZA, citée plus· haut, aurait été accompagnée par deux de ses
frères et un nomhre ass·ez important de sujets antimena.
c' es t ainsi que l'on rencontre au Menao.e comme au Fiheregna 1es même s
clans tels que les AndJr.Mily, Andtr..ambe., H.ùUjy, K.hni.ja.., MagYU.dJr.a.no,
Mag natLil.a.va, M..tke.a., N:t6ai:.6ake., Ttr..agno:te.to, T.6ongoJLe., etc •.• et même
MaJLo.6aJLagna (3) ~KELESAMB.AE, s·oUverain du "MenaDe (règnant vers 3834-J837),
grand-père de TOERA, ayant des difficultés à cause de la présence merina
à proxinüté de son territoirejse refugie dans le Fiheregna et Sl y établit
jusqu'à sa mort en 3837, tandis que TOMPOEMANA, roi du Fiheregna, a envi­
sagé d'aller au Menabe en J897.
(1) RAVOVOGNA : D'après les recoupements que nouS avons essayé de faire, il a~paraît que Ravovogna (signifiant: toit, sommet, senS plus plausible pour un roi), prononcé et écrit Ravavane (bouche) par FAGERENG, suivant l'explication de OTTO CHR. DAHLE, selon laquelle les OVV chez Drury devant être lu a : (Drury l'appelle en effet Rervovern), est le même per­ sonnage qu'Andriamanga.
(2) G.GRANDIDIER et R.DECARY : Histoire des Antifiherenana~ dactylographié, déposé à l' ORSTOM, Bondy, Pans, p. 7.
(3) Dynastie régnante du Menabe.
----~--~--~-========~=================-'.
Ainsi se trouve démontré que l'appellation sakalava'regroupe les
Vezo et les Masikoro, et qu'elle englobe les gens du sud du Mangoky, les
An t i fi h e r e gn a, comme ceux du Nord, le sAnt imena. Dans notre étude, 'l' l l' ak 1 J1dnous ut~ lserons e terme s a ava ans ce sens.
o 0
o
Nous avons pris l'année J845 comme début de notre étude, car la
Il guerre Il de TAMATAVE a une conséquence importante pour l'euest de
Madagascar. Elle concrétise un malaise qui existait déjà au lendemain
nême de son avènement entre la reine RANAVALONA l et les Européens,
surtout la France, mal vue, après l'expédition de Geurbeyre en 1829.
Dans une expédition menée en commun, Français et Anglais bombardent
la ville de TAMATAVE en juin 1845, mais l'issue de cette opération leur
est défavorable. En effet, les Malgaches ont bien résisté aux assauts
des marins des trois bateaux européens, Le Be~~eau et La Zélée pour la
France et Le Conway pour l'Angleterre. Ils ont essuyé une défaite et ont
dû rembarquer sans même pouvoir emmener leurs morts. RANAVALONA: L,
convaincue de sa puissance par cette victoire contre les deux plus grandes
nations de l'époque, leur ferme les côtes qui lui sont soumises, c'est-à­
dire la côte orientale et celle du Nord-Ouest.
Ainsi,les traitants s'orientent vers les régions restées indépen­
dantes du pouvoir merina, et par conséquent ve~s le Sud-Ouest. Ce dont
témoignent les rapports de BAUDAIs,Capitaine de Corvette, commandant le
brick d'état Le VoLtigeun en juillet 1845 et le mémoire de l'Abbé DALMOND
en octobre de la même année (1). Ces articles sont des monographies portant
(l) Les rapports de voyages sur la côte ouest du Commandant du Vo~~un et du R.F. DALMOND sont déposés aux Archives Nationales, section Outre-Mer, rue Oudinot, sous la côte MAD.C.14, D.19. Mais quelques extraits ont été publiés dans les Annales Maritimes Coloniales! - BAUDAIS(J.M.) :hQuelques mots sur la partie nord de la province de
Saint Augustin':Alffiales Maritimes et Coloniales, Paris 1846, T. IV pp. 516-517.
- DALMOND (R.P.) : idem, pp. 512 à 515.
- 10 -
sur les moeurs et coutumes de la région, mais ils s'étendent aussi sur
les avantages commerciaux que l'on pourrait trouver dans ces pays.
L'installation de la famille SAMAT sur la côte ouest est également
liée à cette " guerre Il de TAMATAVE. Nous serons amenée à parler assez
souvent de cette famille, car elle est la plus importante de toutes celles
des traitants de l'Ouest, par ses activitês et par les fonctions officielles
qu'exercent quelques-uns de ses membres.
Elle a des démêlés avec la ma~son réunionnaise RONTAUNAY, justement
après cette .. guerre Il de TAMATAVE. En effet, Philippe SAMAT accuse
DE LASTELLE, représentant de la maison RONTAUNAY, d'avoir trahi la causefrançaise l
du fait qu'il était le seul, parmi les Anglais et Français, à avoir béné-~
ficié d'une mesure exceptionnelle lui permettant de continuer à commercer
avec la Reine RANAVALONA. Cette affaire se termine même par un procès à
Saint-Denis (1848-1849), qui finit au désavantage de Philippe SAMAT. Ses
frères, Eugène et Edmond, se lancent alors en pionniers dans l'Ouest pour
essayer d'y organiser un réseau commercial de la même importance que celui
de .. LASTELLE sur la côte est. Et ils s'installent dans le Menabe en Janvier
1847.
Cette mésentente entre DE LASTELLE et SAMAT explique 1'orientation poli­
tique de ces derniers. DE LASTELLE et son ami LABORDE ont choisi le camp
merina, les SA~T se portent en défenseurs des SakaI ava , ennemis irréducti­
bles des Merina, ne serait-ce qu'en souvenir de l'affaire de la baie de
Saint Augustin en ]835, pièce maîtresse du procès intenté par SAMAT contre
DE LASTELLE en ]848-J849. En effet, c'est un navire de LASTELLE (L~ Vo~~~)
qui emmène les Merina sous la direction de Jean Lf~ORDE, dans la baie de
Saint-Augustin, lors de l'enlèvement de sept chefs sakalava. U)
Ce conflit personnel entre DE LASTELLE-LABORDE d'un côté et les SAMAT
de l'autre) aura une incidence sur la politique française à Madagascar. La
•a.
- 1] -
métropole reçoit plusieurs versions incohérentes. LABORDE, devenu
consul (1862), encourage la France à jouer la carte merina, tandis
qU'Edmond puis Léo SAMAT louent les Sakalava. Et comme à cette époque
(jusqu'en 1895), il Y a encore une certaine interrogation dans la poli­
tique malgache de la France, elle est ballottée entre ces deux tendances.'
o <>
e
Quant à l'année J904, que nous avons pris comme autre limite de notre
étude, elle est symbolique : elle signifie la chute effective du pays
sakalava. ~~ ~lgré la proclamation de la colonisation de Madagascar ,en
Août J896, la conquête de l'Ouest ne commence qu'en ]897, pour n'être
vraiment achevée qu'en 1904. En effet, en ]904, les Sakalava ont compris
que le pouvoir royal est bien ter.mine, quand ce sont les colonisateurs
eux-mêmes qui détiennent les reliques royales, les" ji..ny " (1) ou qu'ils
intronisent le jeune prince KAMAMY.
o <>
o
Cette période ]845-]904, est ingrate pour le pays sakalava~. C'est
l'époque de la confir.mation du déclin. D'ailleurs l'intitulé du sujet
ne l'annonce-t-il pas déjà? Rapports entre Sakalava et :'Etrangers, rapports
de force entre deux groupes dont l'un va l'emporter sur l'autre en le colo­
nisant. o <>
o
(1) A propos des jiny : Dans le Menabe, les autorités coloniales les détien­ nent depuis la mort de TOERA à Ambiky en 1897. Elles les passent d'abord à INGEREZA, que le Gouverneur général reconnut comme souverain du Menabe à la première soumission de celui-ci en J900. Mais à Son retour dans la brousse en J904 elles sont reprises pour être données enfin au jeune ICAMAHY.
Dans le Fiheregna, l'administrateur de la province de Tuléar, A.DEMORTIERE,les a envoyés à Tananariveen janvier J905 à la suite des troubles du Sud-Est, car il n'avait pas confiance dans les rois antiferegna. Cf. A.DEMORTIERE : Note au sujet des Jiny" reliques royales des rois du Fiheregna, in B.A.M. J905-1906, pp. 1J7-118.
- ] 2 -
Notre gratitude va d'abord à M. le Professeur MIEGE, qui a bien . . .
voulu prendre la direction de- ce travail.
En tant que Malgache-Sakalava, nous voudrions appeler le Professeur
M:tEGE : père : Il Jta.e. Il et donner à M. PAILLARD, le rôle du Il Jte.n...Ltahy "
dans toute l'acceptation du terme chez nous. C'est cet oncle maternel
qui assure le soutien de la famille de la mère, auprès de l'enfant.
Madame CAILLON-FILET, elle, est la Il zok.y " gran de soeur. Nous trouvons
que ces comparaisons coincident avec ce que nOUS ressentons.
Nous n'oublierons pas la part des Conservateurs qui nous ont aimable­
ment ouvert les secrets du passé que renferment leurs Archives. En cela,
nous pensons particulièrement à M}L MAUREL et LEDOUX, des Archives d'Aix,
à M. ESTIENNE, des Archives de la Marine du port de Lorient, à M. COURDURIE , .-. "._.. è
Conservateurdes Archives \de la Chamb.re'deCommerce~Marseil1J,auPasteur RATSll1BAZAFYI
des Archives de la Mission Norvégienne à Isoraka, Antananarivo.
Nous remerc~ons également M. ADER qui nous a donné ses documents
personnels, M. Jacques LOMBARD, l'E~nologue du pays sakalava~Menabe,
M. Guy JACOB, Historien de Madagascar et enfin nos amis MM. LAHINIRINA •
Espoir et RABEDIMY Jean-François.
L'attitude du prince FIEPOHA, détenteur des reliques royales des
Andrevola à Benetse, à notre égard, nous rappelle le vieux cantique sakalava
" TaJUo gn' a.n.te..gna na. gn r an' oi:o :t6y ho me.a.ne. " ce qui veut dire :h Prends
soin des tiens parce que les autres ne te donneront pas les leurs: Il nous
a livré toutes ses connaissances sur l'histoire de son pays. Nos entretiens
avaient une allure de confidences. Il en est de même pour le pr~nce
LAHATAGNIBE SOLONDRAENE (Vol i.rano) et TSlMANGATAKE Gabriel (Antanimieva) .
. Madame Dorette SAMAT, descendante du célèbre colon de Morondava, nouS a égale­
ment parlé en tant qu'enfant du pays s ak al ava ,
Les Malgaches ne remercient pas leurs conjoints /1 T;.,y nan.ao n.y m.wao­
bady ", mais nous voudrions faire une exception pour ce géologue qui s'est
transformé en historien. Les suggestions de ce fils de Magnarilava (clan
sakalava) ne furent pas à dédaigner.
o 0
o
- 13 -
Mais avant d'entrer dans le vif du sujet~ nous voudrions éclairer nos
lecteurs sur l'onomastique sakalava. En effet, la plupart des personnages
historiques qui seront cités dans ce travail porteront plusieurs noms.
Dans la tradition malgache~ on donne le nom de l'enfant en se conformant
à son signe astrologique. Nous citons quelques exemples DAMA~ HAOVA, MlZA,
MONJA~ SAMBO, LAMEO, etc ... Mais en plus de cette règle générale commune
à toute l'île, les Sakalava ont cette particularité du tabou du nom des
morts. En effet, dans beaucoup de villages sakalava encore de nos Jours,
on ne doit pas prononcer le nom d'un mort. Ceux qui avaient le même nom, le
changent et même on remplace le nom des objets qui le rappellent. Nous pou­
vons reprendre les exemples donnes H.DOULIOT en 1891 dans Son ouvrage
parce qu'ils sont valables} auxquels nous ajoutons des exemples personnels.
Il Pour dire on ne dit plus mais
maison trano kivohy
grands-parents ( raza dady (
c'est un des facteurs qui est à l'origine de la différenciation du dialecte
sakalava du Baina et du Menabe. Nous avons par exemple remarqué en lisant
les mots sakalava cités par V.NOEL dans son article" Recherches sur les
Sakalava (2) (à noter que l'auteur ne connaît que le Baina) qu'en 1843, date
(1) DOULIOT (H) : Journal de voyage fait sur la côte ouest de Madagascar 189 , Paris, Extrait de la Revue de Géographie, p. J61.
(2) NOEL (V) : "Recherches sur les Sakalava'l\. Bulle tin de la Société de Géograuhie de Paris. 1843, 2ème série, T. XIX, pp. 275-295, T. XX, pp.40 à 64, pp. 285 à 306, 3ème série T.I, pp. 385 à 4]6.
- 34 -
à laquelle il écrivit, le dialecte était encore unique. Le Boina avait
l~ même dialecte que celui toujours parlé dans le Menabe et le Fiheregna.
c'est pour cette raison qu'on donne des surnams aux jeunes enfants tels
que KOLa ou Bora pour un garçon, rOTE ou PELA pour une fille. En effet,
l'importance de la mortalité infantile dans les pays pauvres est bien connue,
et si on donnait déjà le nom définitif aux nouveaux-nés cela compliquerait
encore les choses, puisque les enfants meurent beaucoup. Arrrive à l'âge
adulte~ si l'individu ne veut pas prendre son nom astrologique, il pourrait
en choisir un qui soit conforme à ce qu'il veut être ou bien ce qu'il est
devenu; c'est souvent le cas pour les chefs et les rois (exemple: LAHIMIRIZA
portait pendant son jeune âge au moins trois surnoms) il en est de même pour
TOMPOENANA = le riche qui est'encore servi). A tout cela on ajoute le nom
posthume donné aux morts le " fitahina" (]) Ce " f i t ahjna Il représente
presque toujours le caractère dominant du personnage de son vivant, DU bien,
il évoque un événement important qu'il a vécu. C'est ce qui explique le
grand nombre de noms que portent les rois. (cf. généalogie des rois du Sud­
Ouest). Ce qui ne facilite pas la tâche des chercheurs voulant reconnaître
les personnages historiques. Les historiens ne sont d'ailleurs pas les seuls
à avoir affaire à ce problème, l'administration coloniale s'en est plainte (:2).
Le Sakalava ajoute cette instabilité de son nom à sa mobilité traditionnelle.
(]) r, FITAHlliA peut se traduire par l'souvenir " équivalent du mot merina " fahatsiarovana " pour donner le verbe " mahatsiaro Il plus exactement Il mahatsiahy 't, ce dernier -mot en dialecte sakalava se dit mahatiahy. Le " fitahina " sert pour rappeler la personne puisque son nom de vivant est interdit. Par le f'Fitahiml', la personne ,'.... ~ rej oint le m~e.iJ.de. des ancêtres, bref des Saints,?uisque dans les croyances sakalava, les morts sont divinisés;Nous avons tenu à apporter cette précision, car 1 'histoire sakalava est inséparable du H fitahina lt, par lequel sont nonnïê s ses rois. Et ce mot prête à confusion, car il existe un terme similaire : fitahia ou fitahiana en merina et qui pourrait être pris comme la signification de ce mot Les deux mots Il fitahina Il. souvenir, et 11 fitahia Il (bénédic­ tion) risquent d'autant plus confondus que l'on demande toujours la béné­ diction des morts devenus divins. Or, ici il s'agit bien de rappeler les morts par ce nouveau nom qu'on leur donne le " fitahina ".
~~~~======.-==-"
1 - LA VIOLENCE a) Les guerres
b) La traite des esclaves
2 - LI HYGIENE
b) Le "Menabe indépendant
c) Le Mahilaka
2 - LE FIHEREGNA
a) Les conflits internes pour le contrôle de la baie de Saint Augustin.
b) LAHIMIRIZA (1858-] 886) .cu la belle époque de la trai te
c) Le règne difficile de TOMPüEMANA
c. 1 - Lu, MeJL.i..n.a. au FiheJr..e.gn.a.-Sad
c. 2 - Echee. de. la. ptte.mièlte. expéc:UtioYl. me.JuYt.a
e..3 - RAMAHATRA ou .te qu.ipJtoquo
Q.4 - La double. lYl.te.JtoJtétatian de .ta pJté~ene.e muLina au Fihe.Jie..gna.
d) Les royaumes du Fiheregna-Nord
cl!1 - Le. MaJtom~ eX ta po~~ée. batta
d.2 - Le. Volittano
-= ~~---------~~.
L'oeuvre dès Etrangers est facilitée par un déclin qui commence
bien avant les années 1840. On peut situer son commencement juste après
la disparition des grands chefs conquérants, LAHIFOTY (Andriandahifotsy)
avec ses deux fils ANDRlAMAGNETRIARIVO (]) et ANDRIAMANDISOARIVO (2) et
ANDRIAMANANGA (3) c'est-à~dire à partir de J750 environ. On le constate
par le nom que portent les différents rois qui leur ont succédé. Aucun
nom ne fait allusion à la conquête ou à l'organisation. Par contre, les
rois portent de s noms qui évoquent bien leurs actions défensives ; c' est le
cas de MIAKALA, roi: du Menabe du début du XIXème siècle, de son fi~
MITRAHA (4), qui a le même' nom que le souverain du Fiheregna régnant à la
même époque .,MITRAHA est mort en ] 834. 'Pour lui, nous adoptons la forme
mer~na de son nom, c'est-à-dire augmenté du préfixe RA, pour le distinguer
du roi antifeheregna, père de LAHIMIRIZA. Donc nous appelIons le souverain
an t imena ,RAMITRAHA.
La puissance sakalava ne subsiste que gT~ à la personnalité des chefs,
car les institutions ne sont pas solides, ce qu~ serait indispensable pour
le gouvernement d'un aussi vaste territoire. Nous évoquons par là surtout •
le droit de succession. En principe, il revient à l'aîné selon la loi de
primogéniture ; mais en fait, tous les membres de la famille royale peuvent
prétendre au trône (5). Cette carence est le principal facteur qui a porté
préjudice au pays Sakalava. LAHIFOTY ne l'a pas palliée car pour lui ce
problème ne se posait pas encore,tout l'Ouest étant disponible pour l'expan­
sion de ses enfants. Mais elle devient dangereuse à partir du moment où les
(l) ANDRIAMAGNETRIARIVO : Magnctny entouré des préfixe et suffixe de noblesse ANDRIA ... et ...ARIVO veut dire celui qui domine (ou abaisse mais ici c'est dans le sens de dominer).
(2) ANDRIAMANDISOARIVO : Nous saisissons cette occasion pour corriger l'erreur qu'on a toujours commise dans la traduction du nom de ce souverain~ dont H.DESCHAMPS : Histoire de Madagascar, Paris~ Berger Levrault, J972~ p.JOO.
En effet, la racine" diso Tl ne vient pas du mot Il di.s o fll'erreurl>ou ·faute~ mais du mot" liso " donnant le verbe Il mandiso ": chasser quelqu'un pour prendre sa place, ce qui n'est que trop conforme à l'histoire de ce prince conquérant.
(3) ANDRIAMANANGA : Il mananga '1 = e r i ge r : celui qua e r i ge littéralement mais cela doit être traduit organisateur~ c'est-à-dire le prince organisateur.
(4) fi~A ou MITRARA : ces deux noms sont synonymes, ils signifient barrer la route à quelqu'un, en dialecte merina Tl mi.b ah an a fi
(5) Nous citerons beaucoup d'exemples dans le récit des guerres que se font les royaumes sakalava.
- 18 -
"
limites de l'expansion sont atteintes, et surtout quand les vo~s~ns se .'
raffer.missent (Imerina, pays betsileo soumis à l'autorité de ce premier,
expansion bara venant de l'est).
Or,les royaumes sakalava commencent par se faire du mal à eux-mêmes,
s'affaiblissant mutuellement par les guerres qu'ils se font, alors que
leurs voisins se développent dans un milieu plus ingrat que le leur,
grâce à l'accroissement de leur population lié à la sécurité intérieure
qu'ils sont capables de préserver.
o 0
LE MILIEU NATUREL
Le Sud-Ouest Sakalava fait partie de la zone sèche du Sud de Madagascar.
En effet, si cette région diffère encore un peu du Sud mahafaly et antandroy,
par la présence de grands fleuves comme l'Onilahy, le MangoKY, la Tsirihibina
et'le Manambolo que l'on compte parmi les plus grands fleuves malgaches, beau­
coup de cours d'eau ont déjà une allure sahélienne, dont le Fiheregna qui est à
se c rdans sa basse vallée pendant la période de sécheresse. A lia même: période,
plusieurs d'entre eux ne présentent plus qu'un mince filet d'eau (Maitampake,
Soalengo, Lampaolo, Demoke, Sakalava).
Cette saison sèche est très longue : les pluies ne tombent -que pendant trois
mois effectifs (Décembre, Janvier, Février). En novembre et enmars elles sont
plus incertaines. De plus, elles correspondent à la période des grandes cha­
leurs, pénibles pour l'homme travaillant avec des moyens très rudimentaires
(pour Manja, la température moyenne tourne autour de 30°, cf~ J.M.HOERNER)(J)~
Et les sols en général très perméables ont vite fait d'engloutir l'humidité,
ceci s'ajoutant à l'évaporation déjà importante en ces temps de chaleur.
Ainsi les Sakalava Masikoro, les Vezo étant exclusivement des pêcheurs
marins, se portent plus volontiers vers l'élevage. En effet, il est bien plus­
facile de se constituer des pâturages en incendiant une forêt déjà originelle­
ment claire.
Pour envi.sager une culture intensive, il.aurait fallu domestiquer
l'eau. Les grands fleuves, eux-mêmes, ont un régime très capricieux selon les
saisons du simple au centuple.
Pendant le séjour de GRANDIDIER à Tuléar, le Fiheregna était en crue. Ce
fleuve a détruit le village du roi et emporté les boeufs (2).
(1) J.M.HOENER - Géographie régionale 9u Sud-Ouest de ~adagascar. Collection " Tsiokantimo ". Série recherche N° 5, C.U.R. de Tuléar, p.34.
(2) A.GRANDIDIER - Carnet de voyage N° 12, p.540.
'~-~~~·~===========================d
- 20 -
.' - 21 -
WOLTZKOW en ]893, parlait d'une des grandes crues de la Maharivo (1)
provoquant une 'grave inondation dans sa vallée.
Il en est 'de même pour le Mangoky, J.M.HOENER nous en donne une idée
par des chiffres i.,r~,.
" Avant dre.ntJr.vr. dans son deLta., .te. Mangoky a. W1 module. de. 458 m3/l:J,
o1.oJL!:J ou. 1 e.n ê.ti.age. te. dé6il pe.ut du c.e.ndJr..e. à 13 m3 /!:J 1 il. dépa..64 e. .te.h 5 000 m3/!:J e.n cnue., e.n 126q il a. même. a.tt~ ZZ 000 m3/~ ~
32 000 m3//) en ] 970 " r2).
o 0
o
Pour domestiquer tous ces cours d'eau ca~ricieux, il faut une main­
d'oeuvre nombreuse, or, la faiblesse démographique a toujours constitué
un des grands problèmes de l'Ouest Sakalava.
o 0
o
(1) Cité par A.FAUROUX : La formation sakalava ou l'histoire d'une articula­ tion ratée, C.R.S.T.C.M. Thèse d'Etat, ronéo, p.41.
(2) HOERNER J.M. - Géographie régionale du Sud-Ouest de Madagascar. Collection Tsiokantimo, série Recherche N° 5, C.U.R. de Tuléar, p. 49.
- 22 -
ÎÏ
Tous les documents d'époque que nous avons consultés soulèvent ce
. problème, depuis GUILLAIN en ]840 jusqu'aux Commandants de cercle du
début du XXème siècle, et il reste d'actualité (1). GUILLAIN parle ainsi
du Menabe : " Tou.te.6 cu. JLU.6OWLC.e..J. sont: annkhii-ë.eA pM l:,u.i;te. de. dë.po­
pu.1..a.ti..OYL du pay.6, Jte.6u..Ua.t de la. gu.eNte e:t du nomblte.u.6e..6 Invasions
qu t U. a. .6ubJ..VJ· depui.6· 25 a.n..ô." r2'
BAUDAIS en 1845, nous rapporte aussi: Il La.· . opu.tcttJ..on YLotL6 a. paJW.
peu' coYUldéJl.lwte., a mow qu.e: daM' l r intéJL.i.eU!.t, .auJt.te. b.o!l.d des JtivièJteA,
il n'e.~ t.tpt~ gJtande. quan..tLtë. de, vili.a.gM, comme, noM le. cU6a.i..e.nt lu
Sak.a.e.ava, ma...i.6 el eM:. une ct6f.,eJd.lcm. qu ril ne. nou.6 a. pas é.:té POlJ.oib.f.e. de. .
vW6ieA. Il (3)
Il en est de même pour GRANDIDIER qui trouve qu'il n'y a pas de gros
villages. De plus, il a remarqué que les Sakalava sont très peu prolifi~
ques. (4)
(1) Dans sa thèse d'état: La formation Sakalava ou l'histoire d'une arti­ culation ratée. C.R.S.T.O.M. (ronéo), Paris 1975, E.FACROUX signale encore le recul démographique des Sakalava (étude de science économique).
(2)GUILLAIN (Ch) - Documents sur l'histoire, la géographie et commerce de la partie occidentale de Madagascar. Paris, Imprimerie Royale, ]845, p.315.
_._-----~~-======================~
· ..
..... ' .......~
" rOERA, le. Itoi.. du. Me.na.be., n'~ qu.' à -5 ' .{;utai.te.lr. pOWl.
pJte.ndtr.e. pOMe..6.6,.[OVl. du pau«, il ne. t:JtOU\1e.JtM.t pVL60nne. .6Wl.
-6a 1toute. pouJt le. c.om6a.ttJr.e.. Va.n6 un pa.y!J où. 100 000 nomme.!J vi..vJta.i..e.nt à l' acse, J.1.. l'l' fi en a pM 1 000 ." (1)
gine de cette dépopulation et comprendre comment les Sakalava d'une
Mais c'est l'explorateur DOULlOT qui en est le plus frappé. Pour le
Mahilaka, il fait cette remarque :
C~rtains commandants de cercle (2) ont fait de longs rapports, à
ce sujet, accompagnés de sugge s t i.ons v Œl faut essayer d l exp Li.que r l'ori-
époque d'expansion (XVlllème siècle) en sont arrives au XIXème siècle à
de la main-d'oeuvre.
circulation de la traite d'esclaves a chEngé complètement de direction.
zone d'approvisionnement, au XlXeme siècle c 1est lui qui doit importer
En effet, si pendant les siècles précédents, le pays sakalava était une
ne plus soutenir que des combats défensifs et pourquoi le courant de
(]) DOULlOT (H) - Op. cit., p.J73.
(2) dont un extrait le rapport d' ensernbLe pour l'année 1900 du Comman­ dant de cercle d'Analalava qui fait une étude sur les causes de la dénatalité dans le Nord-Ouest, 2D.24. D.O.M. Aix en Provence. Il s'agit d'Analalava, mais la situation est analogue, puisqu'il 5 ' agit d'un pays sakalava. ; --' " .•z:
- 24 -
1.- LA VIOLENCE
Les guerres et la traite des esclaves sont les deux fléaux
qu~ dévastent le pays.
Nous ne parlerons plus des grandes périodes de conquêtes sous
le règne de LAHIFOTY et de ses enfants, conquêtes qui se sont effec­
tuées avec une population qui n'était déjà pas très nombreuse ; et
nous ne nouS intéressons qu'à la deuxième moitié du XIXème siècle.
Mais même à ces époques tardives, il est intéressant de souligner que
tous les observateurs que nous avons cités plus haut, ont assisté au
moins à une guerre durant leur séjour : depuis GUILLAIN qui a dû
intervenir pour reconcilier les Antimena et les Antsantsa dans le
Mahilaka en 1842. GRANDIDIER qui parle en 1868 des guerres qui oppo­
sent LARD1IRIZA à ses cousins dans le Fiheregna, jusqu'à DOULIOT nous
rapportant en 1891 les différends entre les chefs du Nahilaka.
Au Menabe tout le règne de TOERA (1860-J897) est marqué par les
guerres internes qui opposent les deux frères (TOERA et INGEREZA)
sans parler de celles que les Sakalava doivent soutenir contre l'inva­
sion merina.
si ces guerres ne sont pas très meurtrières, en elles~êmes,
comme le constatent WALLEN (1) et GRANDIDIER (2). elles contribuent
au moins à désorganiser la vie collective. Entre deux fi razzias ".
car il s'agit en réalité de 11 r'az z i a " " nece« Il " il n' y a générale­
ment pas longtemps à attendre" .(3). Dans ces guerres, il s'agit sur­
tout d'accaparer le plus de butin constitué par le troupeau, les esclaves
(1) A.WALEN - Two years aroong the Sakalava. Antananarivo Anoual N° 5, J 88], p. 14.
(2) A.GRANDIDIER - Cîté par G.GRANDIDIER et R.DEC.~Y : Histoire des Antifiherenana, note 45, p. 38.
0) A.WALLEN - T'wo years among the Sakalava. Antananarivo AnnuaI. p.14.
- 25 -
et 1es femmes. En effet, ces dernières sont des objets de 'convoitise
non pas uniquement comme esclaves mais aussi comme épouses. Rappelons
que dans la société sakalava, la polygamie est pratiquée. Elle est un
s~gne de prospérité. Ne peut se le permettre que l'nomme d'un certain
rang. :..,' le mariage avec une jeune femme libre implique certaines
obligations ~ituelles aussi bien envers la femme elle-même qu'envers
la famille de celle-ci. Et l'homme de condition modeste n'arriverait
pas à y subvenir.Ain~i certains guerriers minimisent leur problème
en volant tout simplement les femmes et de ce fait ils deviennent les
seuls maîtres de leurs' épouses en éliminant la famille de celles-ci.
Il n'est pas rare de voir des prisonniêres de guerre devenues des
épouses de leurs vainqueurs. Dans l'introduction, nous avons parlé de
LAHIFOTY qui emmena beaucoup de femmes en captivité pour attirer leurs'
maris et leurs pères chez lui afin de rassembler le plus de population.
Bien entendu parmi :es jeunes fiJ,les qu'on a emmenées, il y en a eu
certaine~ qui sont devenues des épouses de leurs vainqueurs. Et cette
tradition s'est perpétuée, ALIDY se constitue un véritable harem de
femmes-m"akaaCl). La seule différence est qu'il les a eues nonopas par
les armes mais par l'argent !!
Surtout en ce XIXème siècle où il n'y a plus d'initiative de
conquête territoriale , les escarmouches, que se font les chefs sakalava,
consistent à harceler l'ennemi,bref à l'ennuyer. On lui enlève du bétail,
des femmes. C'est ainsi que :
Ir .f.fUl Ôemme..6 e.t le-6 e.nÜa.n.té n.e peuvent plt.L6 ùwe. leM ptLOV-L-
s.cov: d'eau. qu.oUcüe.VlYLe. aux pwi...th f.,llJiLO .s ' exp0.6e.tL à me. app-'1..e.­
hendu pM le.o FI j j.JU.ke. H ( pilla!l.d61 ou le.o " 6ih.-L:t6 e." [..0 olda.a
du /z..O-L en.nem.-L) FI. ( Z) •
c'est ce que dit A.GRANDIDIER en parlant des habitants des villages
de LAHIMIRIZA lors de son séjour au Fiheregna en ]869.
(J) Makoa : DT abord e sc l.ave s affi:é:ains nouvellement importés. Mais ceux-ci vont constituer par la sui te tout un clan qui porte le même nom.
(2) A.GRA~~IDIER Documents anciens sur Madagascar VI. Souvenirs de voyage d'après son manuscrit inêdit de 1916. ORSTOM, 1971, p.20.
i!
• .1-
26 -
laissé les Merina s'installer à Tuléar, les rois du Maromaliia
dont LAHlABO, lui déclarent la guerre' en lui volant les boeufs.
Les Sakalava vivent en état- d'insécurité pennanent. L'on ne
peut donc envisager une agriculture sédentaire pour assurer l'alimen­
tation de la population. Et puis de. toutes les manières
If pendons; cas e.xpécU.ilol'L6 1 .te..b champIJ Ji.e..b.te.nt ..&!.c.u.e..te..b rI (] )
Il en résulte de la famine.
Aussi s'en remet-on aux produits de cueillette. Le riz est b.ien
connu en pays sakalava puisque selon les possibilités on en arrive à
en vendre aux traitants. Mais, comme c'est un produit de culture,
GRANDIDIER note surtout le Il .tauoto Il (2) et l' Il antaly Il (3) comme
base de la nourriture. En effet, les cultures supposent une vie pai­
sible qui autorise l'attente des périodes de récoltes. Or, il n'est
pas sûr qu'on puisse rester en un seul endroit pendant au moins six
mois, sans être inquiété, tandis que partout où l'on va, on trouve le
Il ;ta.vo.to Il et l' "an:to..ly". Ces produits précités, sont devenus aujour­
d'hui synonyme de disette (4)
Et l'élevage bovin, encour~gé par le milieu naturel, comme nous
l'avons évoqué plus haut, devient l'activité typique des Sakalava.
le zébu étant un bien meuble, on peut le transporter sans trop de
difficulté, comme l'a si justement remarqué Edmond S~~T en parlant
des gens du Nord du Menabe :
(1) G.GRANDIDIER et R.DECARY - Histoire des Antifiherenan~,inédit, p.33, note 45.
(2) TallOJ!.o (Tacca' pi.na t i fik a) ; racine .de laquelle on tire une farine elle pousse à l'état sauvage.
(3) Antaly : autre racine que l'on débite en petites tranches que l'on laisse au moins trois jours dans l'eau et que l'on fait sécher au soleil. On tire aussi une farine. L·''h.ntalyUpousse également à l'état sauvage.
(4) Pour montrer le degré de la famine, on dit de nos jours, par exemple; qu'une population en arrive à la consommation de li ta~'oJl..o Il et de JI.. "antaf.y ". Cela signifie que la population connaît une famine extrême.
- 27 -
" Ce..6 gen..6 habUen:t cei: endJr..o1;t~ e.xpJte..b.6e.me.nt poun: geuuieJt
cez arümaux, e;t en c.a..6 d'attaque des OVa.6 ~ le..{) POUMeJt .QUIt
te tvvr.J;to.i.Jr..e. du Maylac. (MaJU1.akaJ " ,"
L'élevage du zéb.q a acquis un tel prestige qu'il en résulte
presque un culte. Le Sakalava ne tue jamais son boeuf pour l'unique
besoin de l'alimentation, il n'en mange qu'après les manifestations
rituelles (circoncisions, bita, funérailles). Il ne veut même pas
traire ses vaches, de peur que les veaux n'aient pas assez de lait.
Dans le même ordre d'idée que plus haut, le troupeau représente la
thésaurisation ambulante, c'est la seule fortune du Sakalava.
o 0
o
Les guerres sakalava ne sont donc pas meurtrières en elles~êmes
puisqu'il s'agit surtout de pillage. Mais c'est _-,;.,._.-._ .. le bouleverse­
ment qu'elles entraînent qui explique la dépopulation du pays.
Les chmmps restent incultes, les femmes ne peuvent plus vaqueF~
à leurs occupations quotidiennes. On imagine facilement une famine
et une très grande mortalité, surtout infantile. Et parmi les butins
de ces pillages, il arrive également qu'on vend des prisonniers aux
traitants.
b) La traite des esclaves
Si en Imerina, RADAMA l l'interdit depuis J8J7, sur la vôte Vuest
elle existe toujours quoiqu'elle ait diminué de volume à l'exportation.
En ef:et, si le courant change totalement de direction dans le Menabe
et sur~out dans le Mahilaka, où l'on importe des esclaves, dans le
Fiheregna, plus peuplé, on continue toujours à en exporter.
- 28 -
Le nord) surtout le Mahilaka} est le plus dépeuplé, car il est
resté pendant longtemps la plaque tournante de la traite. Et pendant
le XIXème siècle, il reçoit bien plus d'esclaves provenant de la côte
est africaine, qu'il n'en exporte. L'exportation concerne surtout le
Fiheregna.
Réunion, à la même époque, certirie le fait. C'est même lui qui l'a
dénoncé aux autorités françaises (2). Un procès a d'ailleurs abouti à
la condamnation de JACQUELIN par la cour de Saint-Denis : jugement du
9 septembre ]887. Ces matelots sakalava sont rapatriés par le service
de l'immigration (3).
KABEFANATRIKA qui était en visite à lamatelots. Le roi an tano sy
L'appellation fi d'engagement volontaire Il remplace le mot de
traite sur la côte sud-ouest de Madagascar à partir des années ]858­
J859, parce que l'esclavage est aboli depuis J848 à la Réunion. ~ans
son mémoire de 1852, Edmond SAMAT ne l'utilise pas encore. C'est le
R.P.JOUEN qui en parle le premier à Baly en 1859 (4). Les conditions
(1) CAMPAN - Vice-Résident de Nosy-Ve au Résident Général de Tananarive, 7 janvier ]889. 2.2.19J. Réclamations Jacquelin. D.O.M. Aix_en-Provence.
(2) CAMPAN - Vice-Résident de Nosy-Ve au Résident Général de Tananarive, J6 janvier ]889. 2/2/191. Réclamations Jacquelin. D.O.M.Aix en Provence.
(3) Rapport du Gouverneur de l'île de la Réunion MANES adressé au Ministre de la Marine et des Colonies de Saint-Denis, 22 septemhre 18~8, 2.2.19], Réclamations Jacquelin. D.O.M. Ai~ en Provence.
(4) LA VAISSIERE (R.P.) - Madagascar, ses habitants et ses missionnaires. Paris. Lecoffre, 1884, T.l, p. 308 à 3J5.
Ainsi, à son arrivée dans l'îlot de Nosy-Ve en J 888, le Vice-Résident
français CAMPAN libère un esclave qui attend son départ pour l'exté­
rieur (J). Nosy Ve doit d'ailleurs son importance à son rôle de point
d'embarquement d'esclaves. En 1887, TOMPOEMANA, roi du Fiher~gna-Sud,
pille le magasin de JACQUELIN, car celui-ci a emmené par ruse six de
ses sujets. En effet, cette traite, bien qu'elle se soit habillée
\\d ' engagement volontaire", ne se fait qu'avec les prisonniers de
guerre composés à majeure partie d'Antanosy de l'intérieur. T_QMFOEMANA
condamne JACQUELIN pour sa malhonnêteté. Le traitant français voulait­
vendre à la Réunion des Sakalava (Vezo) qu'il avait engagés comme
- 29 -
l'esclave. L~ missionnaire norvégien L.ROSTVIG a adressé plusieurs
lettres au Natal, rendant compte de ce commerce.
" 111 nealfty il .u a mo!.>;th~g expiVUence co ouJL6elve!.>
al.> uvilùed people t» see ;the native!.> 0& ;th..ù, coiJYWLy Me
bnou.ght: t» a eu.nopean ;tJLa.cUY!g hou.!.>e, I.>Old ;thene, and k.ep;t
pWOl1eM u.n;till ;they Me !.>lùped ük.e beal.>M, wilhou.;(; any
ttegMd t» ;the w.iU 0& ;the..ùt OWl1. 111 ;the .mte.t.e!.>;t bo;th 0& hu.manily and legal commVtce we Me mM;t anxiou.!.> 1.>0011 ;to have
;th..ù, depnav.wg ;(;JLa&J..c noured. ou.;(; ". (1)
Cet te activité n'a donc cessé qu'à l'installation de la vi.ce-:
3-:ésidence, du moins pour Nosy-Ve , Ne serait-ce que pour cette raison,
les traitants européens s'installent plus volontiers dans l'Ouest
indépendant, étant donné que la traite est officiellement prohibée
dans les parties soumises au royaume merina. Aux dires d'Edmond SAMAT,
ce commerce des esclaves est en plein essor en J852 (2) sur la côte
occidentale.
Nous parlons de la responsabilité de la traite dans cette dépo­
pulation de l'Ouest au XIXème siècle, .mais c'est plutôt pendant les
siècles précédents qu'elle fut grande. D'ailleurs, pendant ces époques
de la grande puissance Sakalava, il faut noter que les esclaves exportés
étaient surtout le " fruit ". des razzias réalisées aux confins occiden-
taux de l'Imerina et du pays betsileo. Et à partir du moment où ces
pays se sont organisés (depuis ANDRIANAMPOINIMERINA) les Sakalava ont
de moins en moins l'occasion de s'approvisionner. La traite pour l'exté­
rieur subsiste, certes, comme nous l'avons indiqué plus haut, quand le
Résident français CAMPAN libéra cet esclave qui devait partir, mais
il faut surtout considérer les résultats pour la période qui nous intéresse
(1) L.ROSTVIG - Tuléar, Septembre J886, Kobibok brever 1882-]892. Registre 8J2.R, folio 133. Archives de la Mission Norvégienne FLM/NMS Isoraka Antananarivo.
(2) E.S&~T - op. cit., p.58.
- 30 -
" Ce commence. ut e.n gJr.a.nde. vogue. .6/..UL tou.:te. c.e..tte côte. ;
e..t il est: Jr.a.tLe. qu'u.n bou.:t!l..e. o.Jl.JUve de Zanzlba«, Mayo:t.te.,
MMC.a..te., Moe1.y [.6ic.J Anjouan, NO.Mi Be. han..6 la.i...6.6e.Jr. .t/to.f....6,
qu.a.t!Le., c.inq incU..v..Ldl1.6 qu..' ili vende.f'l.t han!> ê.tJte qu..e.f.qu..elJ -un.6
le.(1Jt.6 el>c..e.avel>. Ce -6 ont des engagé.6 qu..' il..6 ont comme. ma.te.­ l.o;(A ". (1}
Pour la part de la traite dans ce dépeuplement du pays sakalava
en la seconde moidé du XIXème siècle, il faut distinguer deux zones
distinctes :
. Au. Fih.eregna, la traite continue à draîner la population jeune
vers l'extérieur par le commerce des Il engagés" dans la baie de Saint
Augustin jusqu'à l'installation de la vice-~ésidence à Nosy Ve en Octo­
bre J 888 •
• Au Menabe et surtout au Mihilaka, le pays est vidé de sa popu­
lation et le courant de la traite est inverse. Il y a donc un repeuple­
ment relatif. L'explorateur DOULIOT parle des 800 Makoa de la ville de
Maintirano à côté des JOO Sakalava (2). Mais ce mouvement n'arrive pas
encore à combler les sequelles des guerres et de la traite des siècles
précédents, d'autant moins que si le courant de l'importation est le plus
fort, l'exportation n'a pas complétement disparu. En J89J, ces Makoa
ne sont présents que dans les villes de la côte et sur les " baiboho 1/
(les alluvions) des basses vallées des fleuves, et dans l'intérieur
du pays; on rencontre très peu de villages et ils sont t~ès espacés.
A ces deux grands fléaux, la guerre et la traite, s'ajoutent
l'alcoolisme et les maladies vénériennes.
(J) E.SAMAT - op. cit. p.S8
(2) H.DOULIOT - op. cit. p.119
.--'-~ -.=--:
2 - L'HYGIENE
a) L'alcoolisme
..ans un pays qui est déjà ruiné par les guerres, la
traite et par le foisonnement de petites chetferies, l'alcooliame ne
peut qu'aggraver la situation. Cette calamité est le fait des ch~fs,
mais aussi de leurs sujets, du moins ceux qu~ peuvent acheter de
l'arack.
Tous les chefs sans exception s'adonnent à l'alcool, auss~ bien
les hommes que les femmes.
Au Fiheregna, A.GRANDIDIER évoque à plusieurs reprises l'ivresse
du ro~ LAHIMIRIZA (J848-J886) :
If c.omme. mon n.ob!e. ôJtVl.e. [J), a.1Ja,{;t .6uilJant .M. c.outume. le. c.e.JtI.1e.au.
W1 pe.u .tJr..oub!é. pM le. Mu:m ••• " (2)
LO!L6que. je. .6tU..6 a.ttJL.i..vé Le: 26 ja.nvi..eJt 1869 an-donauo: dCU'L6 te.
üe.u où. il Jte..oi..dill, je II ai. tJt.ouvé i..vJte.-mou, il Jtéponeü;t pM
W'l. BJtogneme.n.t li ou.Jtd, .6aM un :tamevUn1..eJt, Les cheveux e.:t la.
b.aJl..be. pf.e.Âft6' de. pOLU.6i..èJte.... Kanazza est: .te. mo:t emp.toye pou.Jt
we. que J!.e. Jtoi Mt ivJte (pou.Jr. 1e..6 paJt.ti..e.u.Li.eA6, voua.n:tou.ak.e J •
Pneuve. que II ..lv!Z.U-6 e ut; c.ommune. chez ces haid» peM oYl.na..ge.6 •If (3)
ou encore quand il fait son portrait :
If Voué de bon heM e.:t de. pe.Mpic.a.c.Ué .ta!L6qu.' il é:taJ.;t à [eun,
c.e. qu.1 ne. fui.. a.tr.Jt..Lva.i:t pM .6auvent, il éta..U d' oJtdi..naJJz.e en
etat dl iVILe.-6-6e ab j ccze • 71
(l) A. GRANDIDIER s'est fait frère de sang avec L.AHIMIRIZA par la ceré- manie du Ûa..tJ...d/ta.. .
(2) A.GRANDIDIER - Souvenirs de voyage ... 1865-.1869,O.R.S.T.O.M.; op. ci t.; p. J 3 et 22.
~-~~~-~-----~~-~-----~-~---~-~---~--'_.-="
A MORONDAVA~ AU DEBUT DU SIECLE
Collection du Musée de l'Homme (Paris) - Cliché Dr. TEISSüNNIERE
~~~~-----~----~-~~----~----'----'-~"'-""-'-
et en note GRANDIDIER s'en désole:
Ir J' a,[ ét~ ma...in.te..o noJ..,o le t:émom écoeuJr.e. et: a.ttJU.ote., d'av..:tant que là.":ba.6 j'é~ !.lo~ pJLoche paAe~, n;u.6 étiOM 6/LVte..o de
hang Ir. ( 11
Il était dans cet état d'ébriété quand il signa en J86J un traité qui
att~ibua tout son territoire à deux traitants français ROSIERS et
BELLANGER qui voulurent le réclamer à l'installation de la 1iice-f§sidence
en J 888. (2)
Tous ses enfants suivent son exemple. Dès son Jeune âge,
TOMPOEMANA, quand il s'appelle encore RELAMBO, est déjà un grand
buveur:
Ir Mon ne.veu RALAMBO, .te [eune. 6ili du. !LOA.. LAH1MIRIZA, âgé de.
J 3 ctYL6 a. 10 an.o, ..• me. demanda une. bout.e...i.,Ue. d' a1tacl2., mw
.te COYlJ'l.W.6cmt et hachant que c.' é:t:.o...U: pOM De. gwe.Jt, je. la
lui Jl.e.ôu.ocU ". (3)
A.GRANDIDIER a connu également NAROVA, réine du Menabe, déchue
en J860. En J869, elle ne gouverne plus, mais elle a néanmoins Conservé
son titre de reine, son neveu TOERA l'a gardée auprès de lui.
" EUe. éta1:t déjà. .6oUll l' in~..e.u.e.nc.e. du toah.a~ du nhum qu'elle.
avaJ.:t bu dèlJ qu' e.Ue. ava.J....:t appw La nouvelle. de. notne. venue.." (4)
D,ANTHOUARD ne ménage pas ses sarcasme s sur INGEREZA ri
" La. c.ôte et le.o poy.nLtmol1.6 quA.. l r ha.bilin:t, c.onntLe..6 .6ous le. nom
de. Ve.zo, .6on:t .coU!.> .e.'a.u.to~é diJte.c.te. du. 6Jt~e de. rOERA,
(1) G.GRANDIDIER et ~.DECARY - Histoire des AnEifiherenana, op. cit. p. 13 et note N~ 7J.
(2) Mentionné dans les rapports de CAMP&~ du J 6 septembre .1889 et d'ESTEBE du 8 septenilire J889. Correspondance au départ de la vice­ ~~sidence de Nosy Ve, 2.Z4.26" D.a.M. Aix en Provence. Le texte intégral est mis en annexe. .
(3) A.GRANDIDIER - Documents anciens sur Madagascar VI. Souvenirs ... d'A. GRANDIDIER, op. cit., p.14.
(4) A.GRANDIDIER - idem, p. 23 .
._._~_.~--_~=.~========================i
- 34
.te.me.n.t du. matin au 1.> o-in:" (7 J
ALIDY, chef de Maintirano est très connu par son goût prononce
du vin. Et il entretient son harem, composé de douze femmes escla~
ves makoa, par la distribution quotidienne d'un litre de rhum à cha­
cune et un somony (huitième de piastre coupee)." (2)
Tous les chefs sont donc alcooliquesi Aussi peut-on comprendre
ce que soulignent les voyageurs contemporains qui les ont bien connus,
à savoir qu'ils ne sont pas en mesure de prendre des décisions intel­
ligentes et de faire face aux situations difficiles de cette époque
pénétratiùn mer~na et expansion coloniale. Ils subissent souvent
Il influence des n o t abLe s , qui n'interviennent, malheureusement, la
plupart du temps que dans leur propre intérêt. Ainsi, par exemple, ces
notahles du Fiheregna qui ont fait lever le siège du fort merina de
Tuléar en Octobre 189J, car la récolte du po~s du cap venue, ils veu­
lent reprendrè les relations commerciales avec le fort, qui est avant
tout un bon client
Il TAMP~. :"MANA, Jt.oi des MaJ.>..<..koJt.o, Nt le. plu.6 :tu.JtbuJ!.e.nt des Jtoite.tw
de. cexte. ,"aJl..t.i..e. de. la ç.ô:te.. ,. P!u.6-.f..e.UJt.6 no:tabte..6 de. la. :tfUbu.
I.>ont pCV1.Ve.I1lL6 en ûtattant .6on vic.e c..ap.i..;ta.e., 1.' ivJt.ogne.J1.J..e., a pJte.ndtte. un BJt.a.nd e.rnpiJr.e. /.lUfL tuJ.., e..t. a dic.:teJL le.uJL.6 vot.ordês", (3 )
Ainsi le pays C1akalava sombre dans l'anarchie. Son malheur vient
de ce que parmi les notables qui auraient" pu prendre en mains la situation
(J) A.D'ANTHOUARD - Voyage au pays sakalava, à la côte ouest de Madagascar par Morondava et retour par Manandaza en suivant le bas cours de la Tsiribihina, Bulletin de la Société de Géographie Commerciale de Paris, J890, T.91, p. J68.
(2) Y.PAILLARD - Les Etrangers sur la côte "occidentale de Madagascar au XIXème siècle: le cas de Maintirano, in Bulletin de l'I.H.P.O.M. a'977-1978. Université de Provence, p.44.
(3) CAMPAN - Vice-Résident français de Nosy Ve, paru dans le Progrès de l'Imerina N° 60 du 22.01.J889, Tananarive.
- 35 -
devant la faiblesse des souve ram.s , à Il instar de l'oligarchie
merina qui dirige en fait le royaume de Tananarive, il n'y a aucune
personnalité capable de l'assumer. Rappelons au passage que ces
notables aussi sont souvent alcooliques.
Madame Dorette SAMAT, petite-fille du célèbre colon de Morondava
Léa SAMAT, nous rapporte que son grand-père a dû répudier sa première
femme à cause de son alcoolisme.
Mais on est tenté de cro~re que cet alcoolisme généralisé est
non seulement à l'origine du déclin, mais aussi un de ses résultats.
On pourrait penser que les Sakalava se grisent, plus ou moins consc~em­
ment pour supporter à leur manière l'atmosphère de malaise de l'époque.
A titre de comparaison, les dirigeants merina, éclairés par les missions.
ont paré à ce danger, en prenant des mesures répressives. Ainsi, le
code des 305 articles (J8SJ) réglemente la vente de l'alcool et punit
l'ivresse (J)
A peine reposé, des fatigues des pillages et remlS des émotions
de la guerre, on s'adonne à l'alcool presque immédiatement après,
Il le nexou« dM ,gu.e.JVUe!U:J, ave.c leWt br..dJJ1 ut .6a.tué. pM de
110mbJL.etL6M JL.ejouA-6.6anc.e.-6. On danse , 011 J., 1 embJLM.oe •.• " (2)
et on Doit !! Dans toute réjouissance sakalava l'alcool est à l'honneur.
on ne s'arrête généralement que quand on est au moins " kaJi..cxz.y IF
(J) Notons cependant que RAINILAIARIVONY n'est pas le premler. car ANDRIANAMPOINIMERINA a déjà puni l'alcoolisme de mort, mais l'appli­ cation de ces mesures s'est relâchée après lui.
. - (2) MACROVODATO ,., l'étrange journal de R.DRURY, cité par E.FAUROUX -
La Formation Sakalava ou l'histoire d'une articulation ratée, Thèse d'Etat, Paris, O.R.S.T.O.M. J975. p.55,
- 36 -
Beaucoup d'hammes~fatigués par de longues journées d'ivresse,
préfèrent déterrer les racines sauvages plutôt que de fou~ir un
effort pénible pour s'occuper des travaux agricoles. De plus l'homœe
est bien affaibli.
d'autres attaques dont les maladies vénériennes.
b) Les maladies vénériennes
Nous avons été sâisie par l'interruption fréquente des arbres
généalogiques des familles Sakalava. Pour les familles royales, on
adopte des neveux ou nièces ou des enfants nés hors du palais (cas
de TOERA : c'est sa tante NAROVA qui est intervenue pour sa reconnais­
sance par son père). La légitimité de son fils KAMAMY est aussi mise
en doute. RESAOTSE~ reine de Mahabo, meurt sans enfant.
De nos jours encore, on compte des cas de stérilité dans presque
chaque famille sakalava CJ). Cette stérilité est sans doute à l'origine
de la grande facilité d'adoption d'enfants qu'on observe chez les
Sakalava. Une jeune femme qui a déjà eu un enfant est très recherchée
pour le mariage ; car au moins, de son côté, on est assuré de sa
fécondité. On parle souvent du Il .t1tolGy na. rvLoy olo ri c'est-à-dire du
Il ventre qui a déjà porté un enfant ", la suite en sous-entendu étant
" susceptible d'en avoir un autre Il. Son enfant des premières couches,
s'il n'a pas été reconnu par son vrai père, ce qui est rare, est très
souvent adopté par le mari de la mère. et est intégré sans problème
dans sa famille adoptive. Et à la légitimation, les grands-parents
maternels de l'enfant sont très sollicités et en profitent même pour
Cl) E.FAUROUX - op. cit., dit que les Sakalava ont un taux de natalité sensiblement plus faible que celui des autres groupes ethniques de Madagascar. p.ll.
- 37 -
obtenir tm " don '1 de valeur. On est très exigeant sur la taille
du boeuf requis pour cette cérémonie ( TT te. {jande.o "},
A.GRANDIDIER propose l'hypothèse suivante pour comprendre la
cause de cette stérilité :
Il LeJ.> Ma..(g aches .60 n.t :tJr..~ pe.u pJr.oUM,que..6 .6 uJLtolLt tu
Ma.chicouneJ.> ; pea de n~e..6 nomb~eUhe.6. LeA V~ZeJ.> quoique.
YI. 1 a..yant pM beaucoup d' en.6a.n.-t6 .6 embtvtCu.e.rr.t p.tu.6 6éc..OYLd.6,
c..on.6équen.c..e. de. le.u..n YLO~e. de. pO~.60YL. Le..6 Maha.Üa.tco,
qui ont du moe.UJ1..6 p.tu.6 .6age..6 que. tu Sakala.\1e..6, me. paJtw­
éJe.n:t a.'J.obt des 6amili..u ptUh nom6ttea.6u. Ve. Mangoake. a T.6hna.n.andJLa.6ouze., on ne. me. cLi;t que. naJA {jartû)!.J!.e.J.J de. 10 li
J2 en.5ant.6 rr. (1)
COlIDJle nous ne disposons pas d'éléments pour confirmer -ô~Tte'­
assertion de GRANDIDIER, nous avons cherché d'autres causes. C'est
ainsi que nous avons pensé au rôle des maladies-vénériennes. Ce pro­
blème des maladies vénériennes n'est pas propre au pays vakalava,
car il existe partout ailleurs à Madagascar (2), mais dans une région
déjà affaihlie, il s'ajoute aux facteurs précédents et ne peut être
ressenti qu'avec plus d'acuité.
Le Docteur Anne RETEL-LAURENTIN, spécialiste dans ce domaine nous
a confinmé que dans le cas de maladies vénériennes, la fécondité reste
faible, car, nous à-t-elle dit, ce sont les maladies les plus stérili­
santes de toutes celles qu'on connaît. J.M.HOERNER (3) partage le même
avis.
(J) A . GRANDIDIER - Carnets de voyage N° ] 5 : "N otes prises de Tsimanandrafozana à Madzanga~ pp. 722-723.
(2) L.JULIEN (Dr) - dans son étude sur la"distribution géographique de la syphilis ", parue dans les Archive s de Médecines Navales, T. 30, ] 878, affirme (p. J 47) que la syphilis était répandue à Madagascar de même que le Commandant du Cercle d'Analalava dans son étude sur les causes de la dénatalité dans le Nord-Ouest de Madagascar, déjà cité.
(3)J .M. HDERNER - op. c i.r , , p.29.
- 38 -
Or, nous avons relevé plusieurs mentions de ces maladies dans
divers. documents. Le " kola." (1) a existé depuis au moins le XVrllème
siècle, car lors d'une de ses expéditions dans le Fiheregna, LAHIFOTY
trouve dans un village, que les habitants ont abandonné, un infirme
rongé di t-on par le Il kola. Il _ qO;i~ menacé de mort, lui montre le chemin
suivi par les fugitifs. Le roi MARENTOETSE est aussi mort de '1 kola. "
en 1849. Ce que confirme A.GRANDIDIER :
Il Le. kouJ!.a. ut Ulte. ma1..a.cüe. qui. e.x1..6te. de. te.mP.6 immémotUai. dans
ce. paq«. Le.!.> chanCJte.6 VénéJU.e.M .6 ont d' hnpoJttilion Jtêcente
.r AJtabe.!.> ou. Ewwpée.n.o J. e..t tes b/.CÜ9ène..6 ne. c.onna-<..6.6e.nt pas de.
mécücarne.Y!.taüoYl. pOUlt eux, .:taYLd.-Lé qu.e. poUlt le. kou1.a., il.li ont
des méde.W1eA. ') (2 )
Ainsi, l'on peut supposer la vulnérabilité des Sakalava à ces
.zna'ladî e s , Le Dr. GRENET cite surtout des sujets IJJIlOzamb.iques Il, c'est
tm autre nom qu'on donne aux africains nouve l.letœnt;« arrivés.
Nous avons évoqué les maladies vénériennes dans cette faiblesse
démographique de la côte occidentale, car la stérilité des Sakalava
est frappante. Ces maladies ne sont pas meurtrières en elles-mêmes,
mais elles jouent sur la résistance générale de l'individu et naturel­
lement sur la fécondité.
Les guerres, en elles-mêmes ma~s surtout leurs conséquences dans
l'organisation de la vie quotidienne,sont à l'origine de la diminution
de la population. Les fatigues et la malnutrition en sont les principaux
résultats.
(1) Ce mot serait une déformation du nom d'une des maladies vénériennes la maladie de Nicolas FAVRE (Nicolas retenu pour"kola'), ce qui supposerait son origine étrangère. bien que selon GRANDIDIER cette variété soit plus ancienne dans cette région.
(2) Carnet 16. Voyage de Morondava à Madzanga, p.908.
/
!b-:..,~==============~__~~~_~__~_~__. ~",,,,.,
- 40 -
également à ce déclin démographique et politique. Les Sakalava ont
très peu d'enfants.
Or, la traite continue toujours à éclaircir les rangs de cette popula­
tiori<qui .,nt' es"t:'-dêj à plus nomb reuse.L r importation de m.ain-d' oeuvre qui
devient de plus en plus importante au fur et à mesure qu'on s'avance
vers le Nord n'arrive pas'à combler lès lacunes.,
Certains observateurs allaient même jusqu'à affir.mer que les
Sakalava devaient inévitablement disparaître. On évalue en 1901 la
densité du pays sakalava à 1 ha/kna en face de 73 pour les régions
les plus peuplées de l'Imerina (]).
Ces causes de dépopulation expliquent le manque de dynamisme
du pays sakalava au XIXème siècle. Il ne lui reste plus que son ancien
prestige pour le préserver de l'occupation merina, car en réalité, il
est déjà en déclin.
o
(J) Voyage du Géneral GALLIENI sur la côte-Duest. J.a.M.D. du 4 septembre J90J.
- 41 ~
III
Aucun des royaumes Sakalava ne connaît la paix, même interne.
Aussi, malgré les activités commerciales florissantes qui animent
leurs ports, aucun n'a pu en profiter pour se développer et retrouver
l'envergure des grands royaumes du siècle précédent.
1 .; LE "MENABE
A la mort de MIAKALA contemporain d' ANDRIANAMPOIN IMERINA, ses
enfants RAMITRAHA, KELESAMBAE et HOLILATSE se disputent l'héritage du trône.
C\e:st RAMTTR1\HA qui en sort vainqueur; IŒLESA..."MBAE suit la vieille
tradition sakalava en se retirant au bord de la Tsiribihina et en
essayant de regrouper un certain nombre de fidèles pour se constituer
un petit fief. Mais HOLILATSE (1), lui, ne trouve rien de mieux que
d'aller trouver RADAMA l qui n'attend plus que l'occasion pour intervenir
dans l'Ouest.
En effet, RADAMA l, déjà conscient de sa puissance, ne peut plus
souffrir d'être considéré comme tributaire des S~~alava . Sous
ANDRIANAMPOINIMERINA, les provinces occidentales de l'lmerina payaient
.. _. --_._._.._-~~._~--
- 42 -
encore lm tribut aux Sakalava. De plus, le Menabe est une zone de
traite importante que RADAMA l veut contrôler.
Et à l'instigation de ROLILATSE, il y envoie une armée en 1820.
Mais cette expédition est désastreuse pour RADAMA I. Elle a été entre­
prise sans préparation, et c'est l'époque où son armée n'a pas encore
été réformée. Les deux autres armées qui ont suivi et que RADAMA l
lui-même a conduites, n'ont pas remporté de victoires décisives non
plus (celles de 1821 et 1822). Ces guerres se terminent par des négocia­
tions et par le mariage de RADAMA-' avec la fille du roi ,',akalava,
RASALIMO. C'est ainsi q1.h:~t: née une situation ambigu"g. RADAMA l veut'
croire que les Saka1ava sont vaincus par le fait qu'ils acceptent de
négocier, et parce que RAMITRAHA lui donne la main de sa fille. Or"
dans la logique malgache, c'est le gendre qui doit rendre hommage au
beau-père, et RAMITRAHA lui, croit avoir gardé sa suzeraineté sur
RADAMA. Il est très compréhensible qu'il réagisse vivement quand celui-ci
veut désarmer le pays sakalava en signe de soumission, et y installer ses
premiers colons~ Ceux-ci sont exterminés par les Sakalava. Et les choses
en restent là jusqu'à la mort des deux souverains, car RADAMA l ne
s'occupe plus uniquement du Menabe. Son attention est plutôt attirée
par les troubles qui se produisent sur la côte orientale après la mort
de JEAN RENE, région de loin plus importante commercialement, à cause de
sa proximité des Mascareignes, principales partenaires de la Grande Ile.
Ainsi la situation est demeurée incertaine entre les deux parties
jusqu'à la mort de RADAMA en 1828.
Mais en 1834, une expédition envoyée par RANAVALONA 1 profite
de la vacance du pouvoir au Menabe, car elle arrive au moment où le
peuple est encore occupé par les funérailles de RAMITRAHA. Le roi élu,
RENASA est un jeune enfant de RAMITRAHA. Mais à l'arrivée des Merina, la
plus grande partie des Sakalava rejoi1oi. . KELESAMBAE, ce ;frère de
RAMITRARA qui s'est retire au bord de la Tsiribihina à la mort de leur
;"
~ .>
R.~ts i dtv, cc '(.".{Cl} '" d~. Il'-"'. a.I, e,
Il'1d,)(tndlW,f.
No ...... dL 500.: ~c.r~;",.
, • ',I ! ~~. ~ •• ~ Li", ; be ll-.l., .... l~ ~ e d", Y'O'j "'V""E. 1HT'ot;i
• MAtiAP.>c 'Po)r~ pfl",c.ir<tl me'l"irte-.
• AflJl"<I.IIopdr 1(l,1"l'\i~Oi\ O~ r0,"1t<ioua.rllt.r rn c..r, PI....
Ech"l\( . :: '1-0 Km.
-,. 44 -
La veuve de RAMITRAHA, SOLlA, se sentant abandonnée, a choisi le parti
de mettre son fils RENASA sous la protection des Merina" de qu~ va être
à l'origine de la formation de deux royaumes dans le Menabe
un Menabe représenté par SOLIA et son enfant RENASÂ qua
a sa capitale à Mahabo, poste merina ;
- et un autre, plus important car re,groupant la plus grande partie
de la population sous l'autorité de KELESAMEAE, frère de RAMITRAHA.
a) La présence mer~na au Menabe
On peut se demander dans quelle mesure on doit utiliser le terme
de Menabe pour la partie occupée par les ~rina. Si on jette un coup
d'oeil d'ensemble sur une carte du territoire soumis, il paraît incontes­
table que le pays est bien encadré par les postes installés régulièrement
le long d'une ligne partant de Tananarive, passant par Tsiroanomandidy,
Midongy, Manandaza Malaimbandy, Mahabo, dêb.ouchan t sur la 1Il€.r à Andakabe
et allant vers le Sud jusqu'à Manja pour aboutir à Andranopasy. Mais la
réalité est que le contrôle merina s'arrête juste aux alentours de ces
postes et leurs environs immédiats, et ceux du littoral comme