6
367 © 2007. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés - Rev Pneumol Clin 2007 ; 63 : 367-372 Explorations fonctionnelles respiratoires du grand enfant ou de l’adulte atteint de mucoviscidose I. Fajac 1 , F. Counil 2 , M. Reynaud-Gaubert 3 1 Service d’Explorations Fonctionnelles, GHU Ouest/Hôpital Cochin, AP-HP, 27, rue du Faubourg-Saint-Jacques, 75679 Paris Cedex 14. 2 Service de Pédiatrie, CHU Arnaud-de-Villeneuve, Montpellier. 3 Service de Pneumologie, CHU Sainte-Marguerite, Marseille. Correspondance : I. Fajac, à l’adresse ci-dessus. a fonction respiratoire du patient atteint de mucoviscidose est évaluée de façon objective par la pratique d’explorations fonctionnelles respiratoires. Cette évaluation est fondamentale dans le bilan clinique de la maladie, notamment parce que le pronostic est essentiellement conditionné par l’atteinte respiratoire. Principe et méthodes Les explorations fonctionnelles respiratoires consistent à réaliser des mesures des volumes et débits pulmonai- res : - les mesures dynamiques permettent d’apprécier la ca- pacité du patient à mobiliser rapidement l’air ; elles sont effectuées le plus souvent au cours de la réalisation d’une courbe débit-volume ; les volumes et débits me- surés sont : le volume expiratoire maximal par seconde (VEMS), la capacité vitale forcée (CVF), le débit expira- toire de pointe et les débits expiratoires moyens (DEM) entre 25 et 75 % de la CVF ; - les mesures statiques comprennent la mesure de la capacité vitale lente (CVL), subdivisée en trois compo- santes : volume courant (VT), volume de réserve inspira- toire (VRI) et volume de réserve expiratoire (VRE) ; et celle de la capacité résiduelle fonctionnelle (CRF) qui permet d’obtenir le volume résiduel (VR) et la capacité pulmonaire totale (CPT). Plusieurs sociétés scientifiques ont publié des recom- mandations pour le choix des appareils et la réalisation de l’examen chez le grand enfant ou l’adulte [1-5]. Ces recommandations ont été récemment actualisées par [email protected] Ce texte est le troisième d’une série de six arti- cles de synthèse rédigés par le groupe de travail « Explorations Fonctionnelles Respiratoires » de la fédération des Centres de Ressources et de Compétences de la Mucoviscidose (CRCM) de la Société Française de la Mucoviscidose. Les articles suivants seront publiés dans les prochains numéros de la Revue de Pneumologie Clinique. L

Explorations fonctionnelles respiratoires du grand enfant ou de l’adulte atteint de mucoviscidose

  • Upload
    m

  • View
    215

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Explorations fonctionnelles respiratoires du grand enfant ou de l’adulte atteint de mucoviscidose

367

© 2007. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés - Rev Pneumol Clin 2007 ; 63 : 367-372

Explorations fonctionnelles respiratoires du grand enfant ou de l’adulte atteint de mucoviscidose

I. Fajac1, F. Counil2, M. Reynaud-Gaubert3

1 Service d’Explorations Fonctionnelles, GHU Ouest/Hôpital Cochin, AP-HP, 27, rue du Faubourg-Saint-Jacques, 75679 Paris Cedex 14.2 Service de Pédiatrie, CHU Arnaud-de-Villeneuve, Montpellier.3 Service de Pneumologie, CHU Sainte-Marguerite, Marseille.

Correspondance : I. Fajac, à l’adresse ci-dessus.

a fonction respiratoire du patient atteint demucoviscidose est évaluée de façon objective par lapratique d’explorations fonctionnelles respiratoires.Cette évaluation est fondamentale dans le bilan cliniquede la maladie, notamment parce que le pronostic estessentiellement conditionné par l’atteinte respiratoire.

Principe et méthodes

Les explorations fonctionnelles respiratoires consistentà réaliser des mesures des volumes et débits pulmonai-res :- les mesures dynamiques permettent d’apprécier la ca-pacité du patient à mobiliser rapidement l’air ; elles sonteffectuées le plus souvent au cours de la réalisationd’une courbe débit-volume ; les volumes et débits me-surés sont : le volume expiratoire maximal par seconde(VEMS), la capacité vitale forcée (CVF), le débit expira-toire de pointe et les débits expiratoires moyens (DEM)entre 25 et 75 % de la CVF ;

- les mesures statiques comprennent la mesure de lacapacité vitale lente (CVL), subdivisée en trois compo-santes : volume courant (VT), volume de réserve inspira-toire (VRI) et volume de réserve expiratoire (VRE) ; etcelle de la capacité résiduelle fonctionnelle (CRF) quipermet d’obtenir le volume résiduel (VR) et la capacitépulmonaire totale (CPT).Plusieurs sociétés scientifiques ont publié des recom-mandations pour le choix des appareils et la réalisationde l’examen chez le grand enfant ou l’adulte [1-5]. Cesrecommandations ont été récemment actualisées par

[email protected]

Ce texte est le troisième d’une série de six arti-cles de synthèse rédigés par le groupe de travail« Explorations Fonctionnelles Respiratoires » dela fédération des Centres de Ressources et deCompétences de la Mucoviscidose (CRCM) de laSociété Française de la Mucoviscidose.Les articles suivants seront publiés dans lesprochains numéros de la Revue de PneumologieClinique.

L

Page 2: Explorations fonctionnelles respiratoires du grand enfant ou de l’adulte atteint de mucoviscidose

EFR du grand enfant ou de l’adulte atteint de mucoviscidose

368

les sociétés scientifiques américaine et européenne[6-9]. Les bonnes pratiques des explorations fonction-nelles respiratoires sont également détaillées dans desouvrages français récents [10, 11].Pour résumer, l’infarctus du myocarde datant de moinsd’un mois est la seule contre-indication à la réalisationd’une spirométrie simple. Les volumes peuvent êtremesurés à l’aide de différents types d’appareil :- spiromètre volumétrique : la CRF (dont on déduit le vo-lume résiduel) est généralement mesurée par dilution del’hélium par des cycles ventilatoires multiples ; cettetechnique n’évalue pas les gaz séquestrés et peut sous-estimer les volumes pulmonaires dans les maladies obs-tructives chroniques ;- pléthysmographe corporel : c’est la méthode la plusprécise de mesure des volumes pulmonaires, mais lematériel est coûteux et nécessite une plus grande parti-cipation du patient.Parmi les débits, le plus important est le volume expira-toire maximal par seconde ou VEMS qui mesure laquantité d’air exhalé pendant la première seconde d’uneexpiration forcée. Le VEMS peut être obtenu à l’aided’un spiromètre volumétrique ou d’un spiromètre débit-métrique, comme les dispositifs de mesure de pressiondifférentielle ou pneumotachographe.Le bilan fonctionnel respiratoire peut être complété pard’autres examens comme la mesure du transfert dumonoxyde de carbone (CO) qui renseigne sur la diffu-sion des gaz de l’alvéole vers le capillaire pulmonaire. Ilévalue ainsi l’intégrité de la membrane alvéolo-capillaireet la surface disponible pour les échanges [3]. Il apportepeu dans l’exploration des patients atteints de mucovis-cidose.

Interprétation : généralités

L’appréciation de la qualité de la réalisation est uneétape très importante de l’interprétation des résultats

car ils peuvent varier dans des proportions significativesen fonction de la qualité de la réalisation des manœu-vres ventilatoires. Une bonne reproductibilité des résul-tats est un des critères de qualité. On recommandegénéralement d’obtenir trois courbes avec un écart demoins de 5 % (100-200 ml) entre les CVF et les VEMSde deux courbes. Il est enfin important de connaître letraitement bronchodilatateur pris par le patient dans lesheures précédant l’examen.Les principales caractéristiques physiques entraînantdes variabilités des paramètres ventilatoires sont l’âge,le sexe et la taille. Les résultats de spirométrie sontcomparés à des valeurs de référence obtenues chezdes individus sains de même âge, de même sexe etde même taille. On dispose de nombreuses équationsde référence obtenues sur différentes populations adul-tes. Toutes ces équations ne sont pas complètementsuperposables. Ainsi, lorsque les résultats sont expri-més en pourcentages des valeurs théoriques, des diffé-rences importantes peuvent être notées en fonction del’équation de référence choisie [12]. Même pour unepopulation donnée, la « normalité » des paramètresventilatoires n’est pas simple à déterminer car il existedes variations individuelles importantes chez les sujetssains. Chez l’enfant, l’établissement des valeurs deréférence est difficile car la croissance des poumons etdes bronches ne suit pas exactement la croissance sta-turale. Enfin, il existe peu d’études couvrant la transi-tion de l’adolescence à l’âge adulte, et ceci peutconduire à des difficultés d’interprétation des résultatschez des jeunes adultes ou au moment de la transitionentre les normes enfants et les normes adultes. Il estdonc particulièrement important de tenir compte desvaleurs réelles mesurées chez le patient lors du trans-fert de prise en charge d’un centre à l’autre, ou lors dela transition entre le suivi pédiatrique et le suivi adulte.Les mesures spirométriques ont une distribution gaus-sienne et 95 % de la population normale se situentdonc à ± 2 écart-types de la moyenne. Pour déterminerla limite inférieure de la normale qui est la seule impor-tante ici, les recommandations européennes proposentde calculer pour chaque tranche d’âge le pourcentagedes valeurs prédites au-dessus duquel se situent 95 %de la population normale de référence (moyenne –1,64 x écart-type). Pour simplifier l’interprétation auquotidien, il est courant de considérer les valeurs obser-vées comme pathologiques si elles sont inférieures ouégales à 80 % des valeurs théoriques. Il a cependant étémontré que si le seuil de 80 % est applicable pour leVEMS, les limites inférieures de la normale pour les DEM25 et 75 % de la CVF (DEM 25-75 %) sont entre 55 et60 %.

ABRÉVIATIONS :

BO : bronchiolite oblitéranteBOS : syndrome de bronchiolite oblitéranteCPT : capacité pulmonaire totaleCRF : capacité résiduelle fonctionnelleCVF : capacité vitale forcéeCVL : capacité vitale lenteDEM : débit expiratoire moyenVEMS : volume expiratoire maximal par secondeVR : volume résiduelVRE : volume de réserve expiratoireVRI : volume de réserve inspiratoireVT : volume courant

Page 3: Explorations fonctionnelles respiratoires du grand enfant ou de l’adulte atteint de mucoviscidose

I. Fajac et al.

369

Résultats chez le patient atteint de mucoviscidose

Chez le patient atteint de mucoviscidose, il est générale-ment recommandé de pratiquer à chaque visite de rou-tine, c’est-à-dire tous les 1 à 3 mois, une évaluationobjective de la fonction respiratoire [13]. Le plus simpleest de réaliser une courbe débit-volume qui permetd’obtenir le VEMS, la CVF, le DEP et les DEM 25-75 %.Il faut souligner l’importance du VEMS qui reste lemeilleur facteur prédictif de mortalité [14]. Une explora-tion fonctionnelle complète, comprenant une mesure detous les volumes mesurables, est recommandée annuel-lement.L’âge de début de l’atteinte respiratoire est très variable,de même que la vitesse de dégradation des paramètresventilatoires. Ainsi, parmi les patients adultes du registrede la Cystic Fibrosis Foundation, 36 % avaient un VEMSsupérieur à 70 % des valeurs théoriques [15]. Il estadmis que les premières lésions obstructives apparais-sent au niveau des voies aériennes périphériques. LesDEM 25-75 % sont classiquement censés informer surl’état des petites bronches. Mais l’interprétation de cesmesures est difficile puisque, comme on l’a vu plushaut, la limite inférieure de la normale se situe entre 55et 60 % des valeurs théoriques, et que la reproductibilitéde la mesure du DEM 25-75 % est faible (des variationsdes DEM 25-75 % inférieures à 29 % ne pourraient êtreretenues comme significatives [16, 17] !). Un moyen sim-ple de mettre en évidence une obstruction des petitesvoies aériennes est de mesurer l’hyperinflation que cetteobstruction entraîne. Le profil spirographique observéest un VR augmenté avec une CPT normale ou augmen-tée, éventuellement associés à une diminution de la CVFet du VEMS dans les mêmes proportions [18, 19](figure 1).Au fur et à mesure que la maladie évolue, l’atteinte bron-chique devient diffuse et est objectivée par un troubleventilatoire obstructif défini par la diminution du VEMS/CV. Le degré d’obstruction est quantifié par la diminu-tion du VEMS. Comme dans les autres maladies à l’ori-gine d’un trouble ventilatoire obstructif, l’obstruction estsévère quand le VEMS est inférieur à 50 % des valeursthéoriques, ou inférieur à 1 litre [2, 5]. La CV est normaleou moins diminuée que le VEMS, la courbe débit-volume est « creuse ». Quand l’obstruction devientsévère, la courbe débit-volume est « cassée » (figure 2) :le débit de pointe est relativement bien conservé et con-traste avec une limitation sévère des débits de find’expiration. A ce stade, il existe généralement dessignes de distension avec augmentation de la CRF, du

VR, voire de la CPT. Dans la phase terminale de la mala-die, le VEMS peut ne représenter que 20 % des valeursthéoriques.En cas d’obstruction bronchique, il est classique de tes-ter la réversibilité de l’obstruction bronchique 15 à20 minutes après l’administration de bronchodilatateursd’action immédiate en sprays. Le trouble obstructifest considéré comme réversible si le VEMS ou la CV

2

4

6

8

10

12

0 1 2 3 4 5 6Volume (L)

Déb

it (L

/s)

Figure 1. - Courbe débit-volume normale chez une patiente de25 ans : VEMS et CVF normales, DEM 25-75 % à 64 % de lanormale, difficile à interpréter ; mais la mesure des volumesstatiques permet de déterminer un VR à 233 % de la normaletémoignant d’une hyperinflation due à une obstruction des petitesvoies aériennes. (Les points rouges représentent la courbe deréférence).

2

4

6

8

01 2 3 4

Volume (L)

Déb

it (L

/s)

Figure 2. - Courbe débit-volume chez un patient de 35 ans ayantun trouble ventilatoire obstructif sévère (VEMS à 17 % des valeursthéoriques). On note une « cassure » de la courbe avec une baissetrès importante des débits de fin d’expiration.

Page 4: Explorations fonctionnelles respiratoires du grand enfant ou de l’adulte atteint de mucoviscidose

EFR du grand enfant ou de l’adulte atteint de mucoviscidose

370

s’améliorent de plus de 12 % par rapport aux valeursthéoriques et/ou si un gain de 200 ml est observé sur leVEMS ou la CV [2, 5]. Les patients atteints de mucovis-cidose peuvent améliorer le VEMS ou la CV de façonsignificative après bronchodilatateurs (figure 3) ou pré-senter une hyperréactivité bronchique, très variabledans le temps pour un individu donné [20]. Il semble quecette hyperréactivité bronchique puisse être liée audegré d’inflammation bronchique et à la diminution ducalibre des voies aériennes [21]. Mais des cas d’asthmeassocié à la maladie ont été rapportés avec une assezgrande fréquence [22].Certains patients ont une diminution des volumes pul-monaires, notamment de la CPT. Ainsi, comme danstoute maladie responsable d’une dilatation des bron-ches, un trouble ventilatoire mixte, obstructif et restrictif,peut être observé. Cette restriction associée n’est pascorrélée à des signes cliniques ou radiologiques de gra-vité et semble plus liée à l’atteinte des voies aériennesqu’à des lésions parenchymateuses [23].L’évolution de la fonction respiratoire est extrêmementvariable selon les patients. La fonction respiratoire peutrester stable pendant des mois, voire des années ; maisune période de stabilité peut être suivie par une brutaleaggravation, ou une diminution par paliers. Une diminu-tion linéaire de la fonction respiratoire est, bien sûr, éga-lement observée. Le VEMS est le paramètre qui reflète lemieux l’évolution de la fonction respiratoire au cours dela maladie [24]. En moyenne, la décroissance annuelledu VEMS est environ de 100 ml, contre 25 ml chez le

non fumeur [25]. Mais il existe une variabilité importantedes paramètres respiratoires chez les patients atteintsde mucoviscidose et il est recommandé de ne considé-rer comme significatives que des variations de la CVF de240 ml et du VEMS de 260 ml (contre 102 et 140 mlchez les sujets sains) [17]. Ces résultats sont, bien sûr, àmoduler selon la reproductibilité des mesures chez unpatient donné.La colonisation par le Pseudomonas aeruginosa estclassiquement considérée comme un tournant évolutifde la maladie entraînant à long terme une détériorationde la fonction respiratoire. Cependant, plusieurs étudessuggèrent que la primo-colonisation ne s’accompagnepas obligatoirement d’une aggravation significative de lafonction respiratoire [26, 27]. Les poussées de surinfec-tion bronchique s’accompagnent classiquement, quelque soit le germe responsable, d’une dégradation desparamètres ventilatoires. Une diminution du VEMS et/oude la CVF de 10 % par rapport aux valeurs enregistréesau cours des 6 à 12 derniers mois est un des critèresdiagnostiques habituellement retenu. Cette dégradationest réversible après traitement de la surinfection.Plusieurs études ont cherché à établir des relationsentre le génotype et la fonction respiratoire. Les résul-tats sont hétérogènes. Cependant, plusieurs auteurs ontmontré que les patients porteurs de mutations entraî-nant une dysfonction importante de la protéine CFTR(classes I, II et III) ont une fonction respiratoire altérée[28-30]. De même, les patients suffisants pancréatiquesont habituellement une atteinte respiratoire modérée etune décroissance plus lente du VEMS [31].

Cas particulier de la transplantation pulmonaire

Le suivi fonctionnel respiratoire est essentiel lorsque lepatient s’inscrit dans un projet de transplantation pul-monaire. Un VEMS inférieur à 30 % des valeurs théori-ques est généralement considéré comme un descritères d’indication à une transplantation pulmonaire.Ce seuil reste d’actualité puisque sa valeur prédictivenégative de la mortalité à 2 ans est de 97 %, identique àcelle obtenue avec des modèles plus complexes [32].Cependant, sa valeur prédictive positive de mortalité estfaible (28 %), ce qui peut conduire à des indications pré-maturées de transplantation. Ainsi, c’est d’avantage lepourcentage annuel du déclin du VEMS, calculé à partirde la meilleure mesure de chaque année, qui est pris encompte dans la décision d’inscription sur liste d’attentede greffe [33].

2

4

6

8

01 2 3 4

Volume (L)

Déb

it (L

/s)

BasePost ß2+Post anticho.Théorique

Figure 3. - Courbe débit-volume chez une patiente de 22 ans :trouble ventilatoire obstructif avec courbe « creuse » (VEMS à26 % des valeurs théoriques). Réversibilité partielle du troubleobstructif après β2-mimétiques : gain de 320 ml sur le VEMS. Pasde modification après anticholinergiques.

Page 5: Explorations fonctionnelles respiratoires du grand enfant ou de l’adulte atteint de mucoviscidose

I. Fajac et al.

371

La surveillance des EFR du patient atteint de mucovisci-dose et transplanté pulmonaire n’a pas fait l’objet derecommandations internationales particulières à ce jour[34]. Elle n’en reste pas moins indispensable, notam-ment pour détecter la bronchiolite oblitérante (BO), équi-valent de rejet chronique, principale cause dedysfonction chronique du greffon, et par conséquentde morbidité et de mortalité post-greffe [35]. La pratiquehabituelle des équipes de transplantation est de mainte-nir une surveillance mensuelle la première année, puistrimestrielle, dans tous les cas dictée par l’évolution.Le diagnostic de la BO étant difficilement ou trop tardi-vement obtenu à partir des biopsies trans-bronchiquesde surveillance (manque de spécificité), des critèresfonctionnels permettent d’évoquer le diagnostic de syn-drome de bronchiolite oblitérante (BOS en anglais) basésur l’étude du VEMS et du DEM 25-75 %. Selon leniveau de VEMS en pourcentage par rapport aux deuxmeilleures valeurs obtenues en post-opératoire, espa-cées de 3 semaines minimum, différents grade de BOS(de 0 à 3) ont été définis afin d’unifier la description[36, 37]. La classification initiale, publiée en 1993, repo-sant sur le seul VEMS [36] a été modifiée en 2002 dansle but d’améliorer la précocité du diagnostic de cettecomplication [38]. Les seuils actuels de détection deBOS (stade 0-p) sont une chute de 10 % du VEMS etde 25 % du DEM 25-75 % exprimés en valeurs absolueset comparés à leur valeur de base post-transplantation,en l’absence de toute autre cause (tableau I). Il estdésormais admis que d’autres paramètres témoignantd’une obstruction périphérique et de trouble de la distri-bution de la ventilation alvéolaire permettent égalementune détection plus précoce de la BO [39, 40]. L’index leplus utilisé est la pente d’élimination de l’azote avec unesensibilité de 100 % et une spécificité de 76 % pour cediagnostic [40]. L’apport d’autres marqueurs tels quel’hyperréactivité bronchique ou le NO exhalé est encours d’évaluation [35].

L’auto-surveillance à domicile par des systèmes de spi-rométrie miniaturisés permet d’optimiser la prise encharge du greffé avec la limite de l’observance souventimparfaite au delà de 3 à 6 mois post-opératoires [41].

Procédures d’hygiène et de désinfection

D’une manière générale, les appareils de spirométriepeuvent être contaminés par contact direct avec desgermes contenus dans la salive ou, en cas de plaie buc-cale, dans le sang. Les embouts buccaux et les rac-cords proches de la bouche sont les plus exposés. Unetransmission aérienne de germes contenus dans lesgoutelettes de Pflugge est également possible et toucheles autres parties de l’appareil. Pour éviter une transmis-sion interindividuelle, les embouts buccaux et les pince-nez sont à usage unique ou désinfectés après chaqueusage. Les raccords, tuyaux et valves sont nettoyés etdésinfectés régulièrement. La fréquence de nettoyageest mal définie et dépend de la fréquence d’utilisation,mais une fois par semaine est un minimum. L’utilisationde filtres à usage unique placés après l’embout buccalpermet d’éviter une contamination bactérienne du spiro-mètre avec une grande efficacité. Leurs performancessur de plus petits organismes comme les virus sont malconnues. L’usage de filtres ne dispense pas d’unedésinfection et d’une décontamination régulières du spi-romètre. Il faut s’assurer auprès du fabriquant que lesfiltres choisis ne modifient pas les mesures des paramè-tres ventilatoires.Chez le patient atteint de mucoviscidose et souvent for-tement colonisé par différentes bactéries, ces mesuresgénérales d’hygiène et de désinfection doivent êtrescrupuleusement suivies ; l’usage de filtres est forte-ment recommandé, et la séparation des patients selonleur statut bactérien a été suggérée [13].

Références

1. American Thoracic Society. Standards for the diagnosis andcare of patients with chronic obstructive pulmonary disease(COPD) and asthma. Am Rev Respir Dis 1987;136:225-44.

2. American Thoracic Society. Lung function testing: selectionof reference values and interpretative strategies. Am RevRespir Dis 1991;144:1202-18.

3. American Thoracic Society. Single-breath carbon monoxidediffusing capacity (transfer factor). Recommendations for astandard technique; 1995 update. Am J Respir Crit Care Med1995;152:2185-98.

4. American Thoracic Society. Standardization of spirometry;1994 update. Am J Respir Crit Care Med 1995;152:1107-36.

5. European Respiratory Society. Standardised lung functiontesting. Eur Respir J 1993;16:1-100.

Tableau I. - Critères de bronchiolite oblitérante (BO) sur lesparamètres fonctionnels respiratoires (d’après [38]).

Stade de bronchiolite oblitérante

Paramètres EFR en % de la valeur absoluede base post-transplantation

Stade 0 VEMS > 90 % et DEM 25-75 % > 75 %

Stade 0-p (BO potentielle) VEMS 81-90 % et/ou DEM 25-75 % ≤ 75 %

Stade 1 VEMS 66-80 %

Stade 2 VEMS 51-65 %

Stade 3 VEMS ≤ 50 %

Page 6: Explorations fonctionnelles respiratoires du grand enfant ou de l’adulte atteint de mucoviscidose

EFR du grand enfant ou de l’adulte atteint de mucoviscidose

372

6. Miller MR, Crapo R, Hankinson J, Brusasco V, Burgos F,Casaburi R, et al.; ATS/ERS Task Force. General considerationsfor lung function testing. Eur Respir J 2005;26:153-61.

7. Miller MR, Hankinson J, Brusasco V, Burgos F, Casaburi R,et al. Standardisation of spirometry. Eur Respir J 2005;26:319-38.

8. Pellegrino R, Viegi G, Brusasco V, Crapo RO, Burgos F, et al.Interpretative strategies for lung function tests. Eur Respir J2005;26:948-68.

9. Wanger J, Clausen JL, Coates A, Pedersen OF, Brusasco V,et al. Standardisation of the measurement of lung volumes.Eur Respir J 2005;26:511-22.

10. Dassonville J, Beillot J. Spirométrie et courbes débit-volume :méthodes de mesures et applications pratiques. ExplorationsFonctionnelles Humaines. Cachan : Ed. Médicales Interna-tionales, 2002.

11. Weitzenblum E. L’exploration fonctionnelle respiratoire enpneumologie. Paris : Ed. Margaux Orange, 2004.

12. Rosenfeld M, Pepe MS, Longton G, Emerson J, FitzSimmons S,et al. Effect of choice of reference equation on analysisof pulmonary function in cystic fibrosis patients. PediatrPulmonol 2001;31:227-37.

13. Kerem E, Conway S, Elborn S, Heijerman H. ConsensusCommittee standards of care for patients with cystic fibrosis:a European consensus. J Cyst Fibros 2005;4:7-26.

14. Kerem E, Reisman J, Corey M, Canny GJ, Levison H. Predic-tion of mortality in patients with cystic fibrosis. N Engl J Med1992;326:1187-91.

15. Yankaskas JR, Marshall BC, Sufian B, Simon RH, Rodman D.Cystic fibrosis adult care: consensus conference report.Chest 2004;125:1S-39S.

16. Nickerson BG, Lemen RJ, Gerdes CB, Wegmann MJ,Robertson G. Within-subject variability and percent change forsignificance of spirometry in normal subjects and in patientswith cystic fibrosis. Am Rev Respir Dis 1980;122:859-66.

17. Cooper PJ, Robertson CF, Hudson IL, Phelan PD. Variabilityof pulmonary function tests in cystic fibrosis. PediatrPulmonol 1990;8:16-22.

18. Rubin AE, Bruderman I. Overdistension of lung due toperipheral airways obstruction. Chest 1973;63:948-51.

19. Stanescu D. Small airways obstruction syndrome. Chest1999;116:231-3.

20. Mellis CM, Levison H. Bronchial reactivity in cystic fibrosis.Pediatrics 1978;61:446-50.

21. Derelle J. Inflammation, hyperréactivité bronchique et muco-viscidose. Rev Pneumol Clin 1995;51:175-80.

22. Wönne R, Hofmann D, Posselt HG, Stöver B, Bender SW.Bronchial allergy in cystic fibrosis. Clin Allergy 1985;15:455-63.

23. Ries AL, Sosa G, Prewitt L, Friedman PJ, Harwood IR.Restricted pulmonary function in cystic fibrosis. Chest 1988;94:575-9.

24. Taussig LM, Kattwinkel J, Friedewald WT, Di Sant’Agnese PA.A new prognostic score and clinical evaluation system forcystic fibrosis. J Pediatr 1973:82:380-90.

25. Rosenberg SM, Howatt WF, Grum CM. Spirometry and chestroentgenographic appearance in adults with cystic fibrosis.Chest 1992;101:961-4.

26. Kerem E, Corey M, Gold R, Levison H. Pulmonary functionand clinical course in patients with cystic fibrosis after pulmo-nary colonization with Pseudomonas aeruginosa. J Pediatr1990; 116:714-9.

27. Winnie GB, Cowan RG. Respiratory tract colonization withPseudomonas aeruginosa in cystic fibrosis: correlationsbetween anti-Pseudomonas aeruginosa antibody levels andpulmonary function. Pediatr Pulmonol 1991;10:92-100.

28. Gan KH, Geus WP, Bakker W, Lamers CB, Heijerman HG,et al. Genetic and clinical features of patients with cysticfibrosis diagnosed after the age of 16 years. Thorax 1995;50:1301-4.

29. Hubert D, Bienvenu T, Desmazes-Dufeu N, Fajac I,Lacronique J, et al. Genotype-phenotype relationships in acohort of adult cystic fibrosis patients. Eur Respir J 1996;9:2207-14.

30. De Gracia J, Mata F, Alvarez A, Casals T, Gatner S, et al.Genotype-phenotype correlation for pulmonary function incystic fibrosis. Thorax 2005;60;558-63.

31. Corey M, Edwards L, Levison H, Knowles M. Longitudinalanalysis of pulmonary function decline in patients with cysticfibrosis. J Pediatr 1997;131:809-14.

32. Mayer-Hamblett N, Rosenfeld M, Emerson J, Goss CH,Aitken ml. Developing cystic fibrosis lung transplant referralcriteria using predictors of 2-year mortality. Am J Respir CritCare Med 2002;166:1550-5.

33. Rosenbluth DB, Wilson K, Ferkol T, Schuster DP. Lung func-tion decline in cystic fibrosis patients and timing for lungtransplantation referral. Chest 2004;126:412-9.

34. Yankaskas JR, Mallory Jr GB. Lung transplantation in cysticfibrosis: consensus conference statement. Chest 1998;113:217-26.

35. Bowdish ME, Arcasoy SM, Wilt JS, Conte JV, Davis RD, et al.Surrogate markers and risk factors for chronic lung allograftdysfunction. Am J Transplant 2004;4:1171-8.

36. Cooper JD, Billingham M, Egan T, Hertz MI, Higenbottam T,et al. A working formulation for the standardization of nomen-clature and for clinical staging of chronic dysfunction in lungallografts. International Society for Heart and Lung Trans-plantation. J Heart Lung Transplant 1993;12:713-6.

37. Boehler A, Estenne M. Post-transplant bronchiolitis obliterans.Eur Respir J 2003;22:1007-18.

38. Estenne M, Maurer JR, Boehler A, Egan JJ, Frost A, et al.Bronchiolitis obliterans syndrome 2001: an update of thediagnostic criteria. J Heart Lung Transplant 2002;21:297-310.

39. Estenne M, Van Muylem A, Knoop C, Antoine M. Detection ofobliterative bronchiolitis after lung transplantation by indexesof ventilation distribution. Am J Respir Crit Care Med 2000;162:1047-51.

40. Reynaud-Gaubert M, Thomas P, Badier M, Cau P, Giudicelli R,et al. Early detection of airway involvement in obliterativebronchiolitis after lung transplantation. Functional and bron-choalveolar lavage cell findings. Am J Respir Crit Care Med2000;161:1924-9.

41. Morlion B, Knoop C, Paiva M, Estenne M. Internet-basedhome monitoring of pulmonary function after lung transplan-tation. Am J Respir Crit Care Med 2002;165:694-7.