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Les alt´ erites: l’´ epiderme de la terre Caroline Ricordel-Prognon, Florence Quesnel, M´ edard Thiry To cite this version: Caroline Ricordel-Prognon, Florence Quesnel, M´ edard Thiry. Les alt´ erites: l’´ epiderme de la terre. Geosciences, 2009, 9, pp.56-63. <hal-00566449> HAL Id: hal-00566449 https://hal-mines-paristech.archives-ouvertes.fr/hal-00566449 Submitted on 16 Feb 2011 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entific research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destin´ ee au d´ epˆ ot et ` a la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publi´ es ou non, ´ emanant des ´ etablissements d’enseignement et de recherche fran¸cais ou ´ etrangers, des laboratoires publics ou priv´ es.

geosciences-09-2

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Les altérites

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  • Les alterites: lepiderme de la terre

    Caroline Ricordel-Prognon, Florence Quesnel, Medard Thiry

    To cite this version:

    Caroline Ricordel-Prognon, Florence Quesnel, Medard Thiry. Les alterites: lepiderme de laterre. Geosciences, 2009, 9, pp.56-63.

    HAL Id: hal-00566449

    https://hal-mines-paristech.archives-ouvertes.fr/hal-00566449

    Submitted on 16 Feb 2011

    HAL is a multi-disciplinary open accessarchive for the deposit and dissemination of sci-entific research documents, whether they are pub-lished or not. The documents may come fromteaching and research institutions in France orabroad, or from public or private research centers.

    Larchive ouverte pluridisciplinaire HAL, estdestinee au depot et a` la diffusion de documentsscientifiques de niveau recherche, publies ou non,emanant des etablissements denseignement et derecherche francais ou etrangers, des laboratoirespublics ou prives.

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    les altrites : lpiderme de la terre

    Dr Caroline Ricordel-PrognonIngnieur gologueBRGM, Unit Rgolithe et [email protected]

    Dr Florence QuesnelIngnieur gologueBRGM, Unit Rgolithe et [email protected]

    Dr Mdard ThiryMatre de recherche Mines ParisTechCentre de [email protected]

    Les phnomnes daltration supergne (mtoriques)

    comptent parmi les processus les plus importants qui modifient

    la surface de notre plante. Les altrations sont le rsultat

    des interactions entre gosphre, biosphre, hydrosphre

    et atmosphre.

    Les altrites : lpiderme de la Terre

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    L es roches des surfaces continentales subissent des altrations qui sont des usines chimiques aux ractions lentes mais continues, production massique gigantesque sur la dure. En agriculture, les altrations contrlent le dvelop-pement et lrosion des sols ainsi que leur productivit. En gotechnique, la rpartition et les proprits physiques des profils daltration conditionnent lamnagement des territoires. Dans le domaine de la gestion des risques naturels, linfiltration des eaux et les ruissellements dpendent des altrites et de leur couvert vgtal. Les rserves aquifres sont frquemment lies des altrites. Ainsi, sur les socles cristallins, les aquifres majeurs sont associs aux paloaltrations et dans les rgions calcaires, les karsts issus de laltration conditionnent la quantit et la qualit des ressources en eau. Enfin, la richesse et la rpartition de nombreuses ressources minrales rsultent danciennes altrations.

    Pour mieux apprhender le futur de notre plante, il est ncessaire de comprendre les phnomnes daltration et leur volution dans le temps, den dfinir les proprits et le comportement face aux sollicitations naturelles et anthropiques. Les altrations actuelles permettent dtudier leur fonctionnement en rapport avec le climat et les paysages, alors que les altrations anciennes fournissent en plus la dimension temps,

    Profil daltration Sidrolithique dge Crtac infrieur (cirque des Mottes Boudes,

    Puy de Dme, France)

    A Siderolithic weathering profile from the Early Cretaceous (Mottes cirque, near Boudes,

    Puy-de-Dme, France). M. Thiry

  • donc la vitesse des phnomnes. Ainsi, les altrations dveloppes au cours des temps gologiques repr-sentent un des systmes dobservation privilgis dune Terre dynamique.

    Nature des altritesLes altrations supergnes (ou mtoriques) corres-pondent aux transformations physiques et chimiques subies par les roches au contact de latmosphre et de lhydrosphre. Les altrites sont les matriaux issus de laltration. Les paloaltrations sont danciennes alt-rations qui ne sont plus fonctionnelles et qui ont ventuellement t enfouies sous des dpts sdi-mentaires. Laltration progresse per descensum de la surface vers la profondeur. Sindividualisent ainsi des horizons caractres ptrophysiques et gochimiques spcifiques qui forment le profil daltration (figure 1). Le sol est la partie superficielle des profils dans laquelle les actions biologiques sont prpondrantes. Souvent on parle de rgolithe pour caractriser len-semble des roches gnralement meubles et non consolides que lon trouve en surface ou au-dessus de la roche mre. Le rgolithe englobe aussi les forma-tions superficielles dorigine sdimentaire (formations alluviales, oliennes, glaciaires).

    Laltration physique conduit la fragmentation de la roche par la dcompression en surface, les cycles ther-miques et hygromtriques, laction du gel (cryoclastie), les forces de cristallisation et les bioturbations (micro-organismes, vgtaux suprieurs, animaux). Laltration chimique correspond aux transformations

    chimiques et minralogiques que la roche subit au contact de latmosphre et de lhydrosphre. En effet, la plupart des roches prsentent un caractre basique (d aux silicates et/ou aux carbonates prsents) et/ou un caractre rducteur (d la matire organique, au fer divalent et au soufre rduit). Or, leau de pluie (eau mtorique) a un caractre oxydant et acide acquis au contact de latmosphre. Cest le dsquilibre entre leau acide et oxydante avec les roches basiques et/ou rductrices qui est lorigine de laltration chimique.

    Schmatiquement, les altrations supergnes se dis-tribuent selon une srie allant dun ple soustractif (exportation de matire) un ple additif (importa-tion nette de matire) (figure 2). Ces deux grands types daltrites peuvent comporter des phases intermdiai-res, refltant lvolution des processus ayant opr, dans des conditions physico-chimiques successives parfois fort diffrentes.

    Structures secondaires lies aux coulements dans un profil d'altration sidrolithique. Coiffes et raies d'illuviation au-dessus de nodules. Ces structures sont caractristiques de processus pdologiques. Les coiffes sont constitues de matriaux fins silto-argileux entrains par les eaux de percolation et qui se dposent au-dessus des nodules dj indurs, dans les zones de ralentissement des coulements. Profil sidrolithique, coupe Le Bouchet, Olby (Puy-de-Dme), Massif Central.

    Secondary structures associated with seepage in a siderolithic weathering profile. Illuviation capping and streaks laid down atop nodules. Such structures are typical of pedological processes. The capping is composed of fine silty clay materials borne by percolation water and are deposited over nodules that are already indurated in zones where seepage has slowed. The siderolithic profile cross-section at Le Bouchet, Olby (Puy-de-Dme Department), in the Massif Central

    M. Thiry, Mines ParisTech

    DmTRITIQUESSILICEUXGRAVIERSSABLESARGILES

    CALCAIRES LACUSTRES

    SmDIMENTS

    BAUXITES

    FERRICRnTES

    SILCRnTES

    CALCRnTES

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    LATmRITESSL

    ALTmRITES

    mVAPORITES

    !LTmRATIONSOUSTRACTIVE !LTmRATIONADDITIVE

    GYPCRnTES

    Fig. 2 : Classification des altrites. Lensemble des altrations supergnes se distribue selon une srie continue allant dun ple soustractif un ple additif ; les silcrtes, selon leur type, se situent dans lun ou lautre des deux domaines. La nature des sdiments transitant ou se dposant sur la surface continentale pendant la formation des profils daltration est en quilibre avec la nature des altrites dveloppes.

    Modifie daprs Wyns, 2001.

    Fig. 2: Classification of alterites. All supergene alterites are distributed according to a continuous series ranging from a subtractive extreme to an additive one. Silcretes, depending on their type, may fall into one or the other of these two categories. The nature of sediments transiting across or deposited on the surface of the continent when the weathering profiles are forming is in balance with the nature of the alterites that develop.

    Modified from Wyns, 2001.

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    Fig. 1 : Profil daltration : caractres gnraux et dfinitions. Modifi d'aprs Schmitt, 1999.

    Fig. 1: A weathering profile: general characteristics and definitions. Modified from Schmitt, 1999.

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    les altrites : lpiderme de la terre

    Gense et volution des altritesLa formation et lvolution des altrites sont gouver-nes par quatre paramtres principaux : la nature de la roche mre et des minraux qui la composent, le contexte climatique, la position topographique dans le paysage et les conditions tectoniques.

    Tous les minraux dune roche mre ne prsentent pas la mme stabilit vis--vis de laltration mtorique. Ainsi, les roches basiques tels les basaltes mais aussi les calcaires, sont plus altrables que les grani-tes et les grs. La texture et la structure de la roche mre, interviennent aussi. Ainsi, les roches poreuses (grs s.l.), qui permettent la circulation de leau dinfil-tration, sont plus vulnrables que les roches massives (granite par exemple).

    Le climat est lun des acteurs majeurs de laltration surpergne. Leau mtorique est le ractif et la tem-prature intervient sur la vitesse des ractions. Actuellement il existe une zonalit latitudinale de laltration en fonction de ces paramtres (figure 3). Le dveloppement des altrations a t ingal au cours

    Le climat est lun des acteurs majeurs de laltration surpergne.

    de l'histoire gologique. Les modifications de la com-position de l'atmosphre, et notamment sa teneur en CO2, interviennent sur la composition de leau de pluie (plus acide quand la teneur en CO2 est plus forte) et sur la temprature [Schmitt (1999)]. Ces modifications ont augment les taux daltration certaines prio-des gologiques (au Crtac par exemple).

    La gomorphologie des paysages participe galement aux processus daltration car pour quun profil dalt-ration se forme, il faut que leau percole de la surface vers la profondeur. Une diffrence daltitude doit exis-ter entre des zones hautes et basses pour permettre la circulation de leau de pluie. Diffrents profils forment souvent une toposquence tage le long des reliefs, avec des profils lessivs l'amont et moins lessivs ou confins l'aval. Laltration engendrant un dpart de matire sous forme dlments chimiques dissous, la surface topographique finit inexorablement par sabais-ser et les matriaux exports depuis les parties hautes des profils et des paysages vont tendre colmater les bas fonds topographiques. Les profils diffrencis influencent lrosion et le model des paysages. Ainsi se diffrencient, dans les paysages tropicaux, des mor-phologies en demi-orange sous climat tropical humide et fort dense et des morphologies en grand glacis et inselbergs sous climat tropical sec avec couvert vgtal discontinu de savane.

    Enfin, la tectonique joue un rle important sur lalt-ration. Un antagonisme marqu existe entre altration

    Fig. 3 : Zonalit climatique actuelle de laltration en fonction de la latitude.Modifie daprs Strakhov, 1967.

    Fig. 3: Present-day climate zoning for weathering versus latitude.Modified from Strakhov, 1967.

  • alterites: earths outer skin

    chimique et tectonique active. En effet, les altrites tant la plupart du temps des matriaux meubles, leur conservation dans les paysages, et a fortiori dans lenregistrement gologique, ncessite une certaine stabilit tectonique. Lorsque les taux de soulvements sont importants, laltration chimique na pas le temps de se mettre en place, les profils daltration ne se dveloppent pas, ou peu, et sont trs rapidement tron-qus, lrosion physique tant le processus dominant. Au contraire, lors des priodes de stabilit tectonique, dpais profils vont pouvoir se dvelopper et tre conservs. Ils seront dautant plus matures et pro-fonds que la stabilit durera et seront entretenus sil y a un lent soulvement de la topographie. Sil y a sub-sidence, la surface topographique sabaissera et les profils seront alors scells par des sdiments conti-nentaux, puis parfois marins. Fossiliss, ils cesseront de se dvelopper, leur couverture les protgera jusqu une exhumation ultrieure.

    Les facteurs les plus favorables la gense et len-tretien des profils daltration sont donc : une roche poreuse/fissure et riche en minraux faciles alt-rer, un climat chaud, humide et riche en CO2, un paysage assez diffrenci, des conditions tectoniques stables ou en faible soulvement. Le temps et la topo-graphie sont toutefois les paramtres majeurs qui contrlent lvolution des altrites.

    Le temps et la topographie sont dautres paramtres majeurs qui contrlent lvolution des altrites.

    ATMOSPHnRE

    ESPACE

    DISSOUSDANSLESEAUXDEPLUIE

    ALTmRATIONDESSILICATES

    2IVInRES

    ROCHESSILICATmESSUBDUCTIONAUGMENTATIONDE4ET0

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    CARBONATES

    DmGAZAGEVOLCANIQUE

    ENSOLEILLEMENT

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    RmACTIONSPHOTOCHIMIQUES

    Fig. 4 : Schma illustrant les sources et puits de CO2 : principaux contrles de la chimie de latmosphre, incluant le cycle carbonates-silicates.Modifi daprs Schmitt, 1999.

    Fig. 4: Diagram illustrating CO2 sources and sinks: The main factors controlling atmospheric chemistry, including the carbonate-silicate cycle.Modified from Schmitt, 1999.

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    Une usine gochimique lchelle plantaire

    Les altrites fonctionnent comme une interface d'change avec l'atmosphre et participent aux chan-gements et/ou la rgulation de latmosphre terrestre. Laltration agit ainsi sur la plante Terre depuis sa naissance au sein du systme solaire et joue un rle important dans le cycle du carbone (figure 4). Laltration des minraux par hydrolyse ncessite des ions H+ qui proviennent le plus souvent de consom-mation du CO2 et aboutissent la transformation des silicates calciques et magnsiens en carbonates. Ainsi, les teneurs en CO2 de latmosphre nont cess de baisser de faon importante depuis le Protrozoque, par formation de carbonates et leur enfouissement. Le moteur de cette volution est laltration des sili-cates du manteau.

    Lvolution de la teneur en CO2 de latmosphre au cours des temps gologiques (avec des teneurs den-viron 20 fois les teneurs actuelles au Cambrien, il y a 500 Ma) est marque par de nombreuses inflexions

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    LESALTmRATIONSRmDUISENTLE#/DELATMOSPHnRECAR#/(#/

    LAUGMENTATIONDE#/ETLERmCHAUFFEMENTCLIMATIQUEAUGMENTENTLAVITESSEDALTmRATION

    LAUGMENTATIONDU#/CONDUITAURmCHAUFFEMENT

    DUCLIMAT

    LAVITESSEDALTmRATIONRmDUITECONDUITgUNEAUGMENTATIONDU#/ATMOSPHmRIQUE

    LABAISSEMENTDELATEMPmRATUREETDU#/RmDUISENTLAVITESSEDELALTmRATION

    LABAISSEMENTDU#/CONDUITAU

    REFROIDISSEMENTDUCLIMAT

    et accroissements qui s'expliquent en grande partie par des rgulations dues aux altrations [Berner et Caldeira (1997)]. Quand la teneur en CO2 de latmos-phre est leve, laltration est amplifie par lacidit de leau de pluie et llvation de temprature. Laltration consomme alors du CO2 lors de la carbo-natation des silicates, les teneurs en CO2 diminuent et le climat se refroidit. Laltration ralentit et les teneurs en CO2 atmosphrique augmentent nouveau (figure 5). Ainsi, les altrations jouent un rle essentiel dans la rgulation du climat de la Terre sur les grandes prio-des de temps.

    Le temps met tout en lumire (Thals)

    De nombreuses paloaltrations sont localises autour de la ceinture tropicale et quatoriale actuelle sur les zones stables des vieux cratons : Afrique-Amrique du Sud, Asie-Australie (figure 6d). Cependant, dimportants paloprofils daltration existent galement dans les zones de bassin, principalement sur les bordures, et jus-qu des latitudes trs leves. Ces profils se sont forms dans des contextes climatiques diffrents de la rparti-tion actuelle des ceintures climatiques, pendant les priodes de stabilit tectonique et/ou de bas niveau. Ces profils ont cess de fonctionner quand le niveau de base relatif est remont, ou quand la subsidence a repris. La nature de ces paloaltrations est trs variable : pais profils kaoliniques, latritiques, cuirasses ferrugineuses, bauxitiques, siliceuses, calcrtes, etc. (figure 6).

    La datation des altrations et paloaltrations a t pendant longtemps la pierre dachoppement pour quantifier la dure des processus et apprhender les dynamiques de la morphogense continentale. Les altrations et paloaltrations sont souvent dpour-vues de fossiles et les mthodes habituelles de la stratigraphie sy appliquent difficilement.

    Les roches des surfaces continentales subissent des altrations qui sont des usines chimiques aux ractions lentes mais continues.

    les altrites : lpiderme de la terre

    Fig. 5 : Rtroactions des altrations des silicates sur les changements climatiques induits par la variation du CO2 atmosphrique.

    Fig. 5: Retroactions of silicate alterations on climate changes caused by variations in atmospheric CO2. BRGM, Mines ParisTech

    Fig. 6 : a) Rsidus silex (en brun-rouge) forms aux dpens

    des craies silex (roche blanche) du bassin de Paris (prs dAmiens, France)

    b) Silcrte pdologique couronnant un profil d'altration trs volu la Croix des Landelles (Bretagne, France)

    c) Profil daltration ferrugineuse de la limite Palocne-Eocne (Carrire de Grandglise, Belgique)

    d) Isoaltrite de roches grso-pelitiques, avec kaolinisation et blanchiment suivis par une ferruginisation

    le long des discontinuits lithologiques et des fractures (Crampians, Victoria, Australie)

    e) Latrite bauxitique rouge dveloppe sur une coule basaltique et fossilise par de nouvelles coules de basalte

    (Plateau d'Antrim, Irlande du Nord) f) Paloaltrite silex au dessus de la craie (roche blanche)

    couverte par une coule de basalte (roche noire) (Devlin's quarry, Plateau d'Antrim,

    Irlande du Nord).

    Fig. 6: a) Clay-with-flints (reddish brown) formed upon

    the flint-bearing Chalk (white rock) of the Paris Basin (near Amiens, France)

    b) Pedologic silcrete capping a highly evolved weathering profile at Croix-des-Landelles (Brittany, France)

    c) Ferruginous weathering profile at the Paleocene-Eocene boundary (Grandglise quarry, Belgium)

    d) Isoalterite of greso-pelitic rocks, with kaolinization and whitening, followed by ferruginization

    along the lithologic discontinuities and fractures (Crampians, Victoria, Australia)

    e) Red bauxitic laterite developed on a basaltic flow and fossilized by subsequent basalt flows

    (Antrim Plateau, Northern Ireland) f) Paleo-Clay-with-flints overlying chalk (white rock),

    covered by a basaltic flow (black rock) (Devlin's quarry, Antrim Plateau, Northern Ireland).

    a-b-c-e-f) F. Quesnel, BRGM, d) M. Thiry, Mines ParisTech.

  • de f

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    Plusieurs mthodes physico-chimiques ont t appliques ces dernires dcennies pour dater les paloaltrations. La radiochronologie peut tre applique des minraux noforms et spcifiques [Vasconcelos et al. (1994)]. La variation des rapports entre certains isotopes stables dans le temps peut tre mise en uvre comme en chemostratigraphie. Les rapports isotopiques de loxy-gne et du deutrium peuvent tre utiliss en les rapportant la latitude [Bird et Chivas (1988)]. Le palo-magntisme appliqu aux oxydes de fer permet de dater les paloaltrations ferrugineuses (cf. encadr).

    Les datations obtenues ces dernires dcennies sur les profonds profils daltrations des vieux cratons, tout comme celles obtenues dans les bassins sdimen-taires ont amen revoir certains concepts de base. Ainsi, la datation des profils sur les vieux cratons afri-cains et sud-amricains [Vasconcelos et al. (1994) ; Thveniaut & Freyssinet (2002)] a montr lanciennet de certaines de ces altrations, dont le sommet des profils peut remonter prs de 100 Ma ! De manire similaire, la datation 140 Ma de certains paloprofils daltration du Massif central, qui taient gnrale-ment rapports 40-35 Ma, oblige repenser entirement toute lvolution palotopographique du Massif central [Ricordel (2007)].

    Au cours de laltration, la plupart des min-raux primaires sont dissous et des oxydes secondaires prcipitent. La goethite et lh-matite, principaux oxydes de fer, se forment dans les profils daltration et acquirent alors une aimantation chimique rmanente, dans la direction du champ gomagntique ambiant. Cette direction permet de calculer la position du ple palomagntique attach au site o les minraux magntiques ont pr-cipit. La datation par palomagntisme s'obtient en comparant le ple palomagn-tique d'un site la courbe de drive apparente du ple du continent sur lequel ce site est situ (figure7). n

    > Datation par palomagntisme des paloaltrations ferrugineuses

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    Fig. 7 : Courbe de drive apparente du ple de lEurasie depuis le Carbonifre jusqu sa position actuelle.

    Les cercles gris correspondent lincertitude sur la position des ples.

    Daprs Besse et Courtillot, 1991, et Van der Voo, 1993.

    Fig. 7: Apparent polar wander path of Eurasia between the Carboniferous and today. The grey circles correspond to

    uncertainties on the position of the poles.From Besse et Courtillot, 1991, and Van der Voo, 1993.

    On constate que les altrites rparties autour de la plante sont pour la plupart trs anciennes. Linventaire ne fait que dbuter, mais dores et dj plusieurs priodes apparaissent plus favorables lal-tration mtorique, comme le Crtac infrieur, le Palogne infrieur, le Miocne

    Les altrites : observatoire privilgi dune Terre dynamique

    De nombreuses questions restent en suspens. En par-ticulier, les grandes paloaltrations se dveloppent-elles de manire rgulire sur de longues priodes ou au contraire sont-elles pulses par les crises climati-ques et tectoniques ? Si oui, ces grandes phases daltration pourraient tre mises en parallle avec len-registrement des bassins sdimentaires, avec retour sur les bilans de matire, la stratigraphie squentielle Pour le moment, nous nen sommes quaux prmices dans ce domaine. Lacquisition de nombreuses donnes et la multiplication des zones dtudes sont la cl de linterprtation des paloaltrations, systmes dobser-vation privilgis dune Terre dynamique. n

    les altrites : lpiderme de la terre

  • alterites: earths outer skin

    Bibliographie : Berner R.A., Caldeira K. (1997) - The need for mass balance and feedback in the geochemical carbon cycle. Geology, 25, p. 955956. Besse J. & Courtillot V. (1991) - Revised and synthetic apparent polar wander path for the African, Eurasian and North American and Inian plates and true polar wander since 200 Ma. Journal of Geophysical Research, 96, p. 4029-4050. Bird M.I. & Chivas A.R. (1988) - Oxygen-isotope dating of the Australian Regolith, Nature, 331 (6156), p. 513-516. Ricordel C. (2007) - Datations par palomagntisme des paloaltrations du Massif central et de ses bordures : implications godynamiques. Thse Ecole Nat. Sup. Des Mines de Paris, Paris, 172 p. Schmitt J.-M (1999) - Weathering, rainwater and atmosphere chemistry: example and modelling of granite weathering in present conditions in a CO2-rich, and in an anoxic paleoatmosphere, Spec. Publs Int. Ass.Sediment., 27, p. 21-41. Strakhov N.M. (1967) - Principles of Lithogenesis, vol 1. Oliver and Boyd, Edinburgh. Thveniaut H. & Freyssinet P. (2002) - Timing of lateritization on the Guiana Shield: synthesis of paleomagnetic results from French Guiana and Surinam. Palaeogeography, Palaeoclimatology, Palaeoecology, 178, 1, p. 91-117. Van der Voo R. (1993) Paleomagnetism of the Atlantic, Tethys and Iapetus Oceans, Cambridge University Press, 411 p. Vasconcelos P.M., Brimhall G.H., Becker T.A. & Renne P.R. (1994) - 40Ar/39Ar analysis of supergene jarosite and alunite: implications to paleoweathering history of western USA and West Africa, Geochimica et Cosmochimica Acta, 58, p. 401-420. Wyns R. (2002) - Climat, eustatisme, tectonique : quels contrles pour laltration continentale ? Exemple des squences daltrations cnozoques en France, Bull. Inf. Geol. Bassin de Paris (39), 2, p. 5-16.

    Jean-Pierre Girard TOTAL DGEP/GSR/TG/ISS/[email protected]

    Souvent pais et anciens, les rgolithes des rgions tro-picales sont intressants pour ltude des phnomnes daltration supergne et constituent de fantastiques enregistreurs des variations climatiques sur longues priodes. En Guyane franaise, les profils daltration latritiques forms il y a environ dix millions dannes ont enregistr un changement climatique important au Miocne terminal. La transition dun climat tropical alternance de saisons humide et sche, un climat tro-pical humide a diffrenci de nouvelles structures pdogniques et de nouveaux minraux dans lesquels le signal paloclimatique a t grav.

    Lun des enregistrements les plus efficaces des change-ments climatiques est fourni par la composition isotopique de loxygne et de lhydrogne de minraux comme la goethite, lhmatite ou la kaolinite.

    Yaou, en Guyane, le profil latritique pais de plus de 30 m, montre un changement abrupt de la composition isotopique de goethites particulires (pseudomorphoses de pyrite) 20 m de profondeur dans la saprolite inf-rieure. Ce changement marque le dveloppement du climat quatorial humide actuel, responsable de la for-mation dun latosol pais de plusieurs mtres. Les variations du climat sont ainsi enregistres verticale-ment au sein des profils daltration, en rponse au perptuel rquilibre avec les conditions climatiques locales. Par la suite, lenregistrement peut tre modifi la faveur dune superposition dpisodes daltration successifs. Ce peut tre le cas notamment dans les hori-zons sommitaux indurs des latrites ( cuirasses ) qui cumulent souvent plusieurs phases daltration intense. Le signal climatique originel y est nanmoins fossilis dans les minraux de grande rsistance tels que les nodules dhmatite. Les volutions climatiques anciennes restent ainsi graves dans la couche altre de la surface terrestre. n

    > Phnomne daltration en Guyane : Yaou

    volution du profil latritique de Yaou, Guyane, montrant lenregistrement du passage dun climat tropical un climat quatorial dans le 18O des goethites de pseudomorphose.

    pyrite initiale

    pseudomorphose goethitique forme sous climat tropical

    pseudomorphose goethitique forme sous climat quatorial

    Girard J.-P., Razanadradorosoa D. and Freyssinet P. (1997)

    Alterites: Earths outer skinSupergene weathering features, developing over the course of geological times, are particularly interesting objects to study. Beyond their economic value, studying them provides information about paleoenvironments and the paleoecological conditions prevailing in the environments. The reactions involved when they form imply exchanges with the atmosphere and the hydrosphere, and they play a part in overall climate changes. They feed basins with soluble compounds and detrital materials. Examining them yields information about budgets of materials transferred from the continental realm to the marine realm. Therefore, understanding how they evolve over the scale of geologic times confers a new understanding of climate changes and the main geodynamic events.