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LA GARDE A VUE 2011 LA GARDE A VUE GUIDE PRATIQUE Arnal Mélanie Billet Sophie Fournet Fiona Djeradjian Julie Launay Julian Rey Charlotte MASTER II PJJ© Éditions GreenFox

Guide pratique de la garde à vue

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La garde à vue correspond à une phase très technique de la procédure pénale. Ses récentes et nombreuses réformes justifiaient une synthèse des règles désormais applicables.

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Page 1: Guide pratique de la garde à vue

2011

GENEVIEVE

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01/01/2011

LA GARDE A VUE

2011

LA GARDE A VUE

GUIDE PRATIQUE

Arnal Mélanie

Billet Sophie

Fournet Fiona

Djeradjian Julie

Launay Julian

Rey Charlotte

MASTER II PJJ© Édit

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Page 2: Guide pratique de la garde à vue

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SOMMAIRE INTRODUCTION

PARTIE I°) PLACEMENT ET DURÉE DE LA GARDE VUE

CHAPITRE I°) LE PLACEMENT EN GARDE À VUE

Section I°) Les personnes compétentes pour placer en garde à vue

§1) Le gardé à vue majeur

A. Compétence et initiative de l’officier de police judiciaire

B. Compétence de l’officier de police judiciaire sur instruction du procureur de la République

§2) Le gardé à vue mineur

Section II °) Les conditions du placement en garde à vue

§1) Le gardé à vue majeur

A. Principe : la mesure de garde à vue

1. Conditions préalables

2. Objectifs poursuivis

B. Cas spécifique : l’audition libre

§2) Le gardé à vue mineur

Section III °) Le contrôle du placement en garde à vue

§1) Le gardé à vue majeur

A. L’enquête préliminaire ou de flagrance

1. La compétence du procureur de la République

2. Le contrôle des motifs justifiant le placement

B. L’instruction

§2) Le gardé à vue mineur

A. L’enquête préliminaire ou de flagrance

B. L’instruction

§3) Tableau récapitulatif

Page 3: Guide pratique de la garde à vue

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CHAPITRE II°) LA DURÉE DE LA GARDE À VUE

Section I °) Garde à vue des majeurs

§1) Le régime de droit commun

A. Durée initiale

B. Prolongation

C. Tableau récapitulatif

§2) Le régime dérogatoire

A. Application du régime de droit commun

B. Prolongations supplémentaires spécifiques

C. Tableau récapitulatif

Section II °) Garde à vue des mineurs

§1) Durée initiale

A. Mineur âgé de 10 à 13 ans

B. Mineur âgé de 13 à 18 ans

§2) Prolongation

A. Mineur âgé de 10 à 13 ans

B. Mineur âgé de 13 à 16 ans

C. Mineur âgé de 16 à 18 ans

§3) Tableau récapitulatif

PARTIE II°) GARANTIES ET DROITS DU GARDÉ À VUE

CHAPITRE I°) LES GARANTIES ENCADRANT LA PROCÉCUDRE DE GARDE À VUE

Section I °) L’avis au procureur de la République

Section II °) Respect du droit à l’image et à la présomption d’innocence

§1) Le droit à l’image

A. Principe

B. Exceptions

1. Gardé à vue majeur

2. Gardé à vue mineur

§2) La présomption d’innocence

Page 4: Guide pratique de la garde à vue

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§3) Fouilles et respect de la dignité humaine

A. Fouille simple

B. Fouille intégrale

C. Investigations corporelles internes

§4) Application du code de déontologie

A. Non-discrimination

B. Protection du gardé à vue

§5) Contrôle des locaux de garde à vue

A. Par le procureur de la République

B. Par les parlementaires

§6) Elaboration et contrôle d’un registre de garde à vue

CHAPITRE II°) LES DROITS DU GARDÉ À VUE

Section I °) Notification immédiate des droits du gardé à vue

§1) Principe

§2) Modalités d’exercice

A. Quand ?

B. Par qui ?

C. Comment ?

1. Gardé à vue en état d’ivresse

2. Gardé à vue ne comprenant pas le français

3. Gardé à vue atteint de surdité

Section II °) Les droits du gardé à vue

§1) Le droit d’être informé du placement en garde à vue, de la durée de la mesure et des

prolongations possibles

§2) Le droit d’être informé de la nature et de la date présumée de l’infraction à l’origine de

la mesure

A. Nature de l’infraction

B. Date présumée de l’infraction

§3) Le droit de faire prévenir un proche et son employeur

A. Principe

1. Délai

Page 5: Guide pratique de la garde à vue

5

2. Les tiers avisés

B. Dérogation

1. Les nécessités de l’enquête

2. Les circonstances insurmontables

3. Spécificité propre aux mineurs

§4) Le droit à l’examen médical

A. La demande

B. Contenu de l’examen médical et délai d’intervention

C. Cas particuliers

1. Les faits de criminalité organisée

2. Les mineurs

§5) Le droit de faire des déclarations, de répondre aux questions ou de garder le silence

§6) Le droit au respect de sa dignité

§7) Le droit d’être informé des suites de la mesure

§8) Le droit d’être assisté d’un avocat dès le début de la garde à vue

CHAPITRE II°) TABLEAUX RÉCAPITULATIFS

§1) Tableau récapitulatif : les principaux droits du gardé à vue MAJEUR

§2) Tableau récapitulatif : les principaux droits du gardé à vue MINEUR

PARTIE III°) L’ASISTANCE EFFECTIVE DE L’AVOCAT

CHAPITRE I°) MISE EN ŒUVRE DE L’ASSISTANCE EFFECTIVE DE L’AVOCAT

Section I°) La Présence de l’avocat dès le début de la mesure

§1) Droit commun

A. Le délai de carence

1. Le principe : délai de carence de 2h

2. Les exceptions au respect du délai de carence de 2h

Page 6: Guide pratique de la garde à vue

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B. Le report de l’intervention de l’avocat

1. Les conditions du report de l’intervention de l’avocat

2. Mise en œuvre du report

§2) Régime dérogatoire

A. Les infractions visées

B. Mise en œuvre

Section II°) L’accès au dossier

§1) Consultation des pièces de la procédure

A. Liste limitative de pièces consultables

B. Report de l’accès au dossier

§2) Mise en œuvre

A. Principe

B. Exceptions

Section III °) La présence de l’avocat aux auditions

§1) L’avocat et le gardé à vue

A. L’assistance des majeurs gardés à vue

B. L’assistance des mineurs gardés à vue

§2) L’avocat et la victime

CHAPITRE II°) L’IMPACT SUR LA PROFESSION D’AVOCAT

Section I °) La désignation de l’avocat

§1) L’avocat choisi

A. L’avocat choisi par le gardé à vue

B. L’avocat choisi par la famille du gardé à vue

§2) L’avocat commis d’office

A. L’information de l’avocat

B. Le conflit d’intérêt

Section II °) La rémunération de l’avocat

§1) La rétribution de l’avocat en matière de garde à vue

§2) L’aide juridictionnelle

Page 7: Guide pratique de la garde à vue

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AVANT PROPOS

La garde à vue correspond à une phase très technique de la procédure

pénale. Ses récentes et nombreuses réformes justifiaient une synthèse des

règles désormais applicables. Plusieurs étudiants du Master II Pratiques

Juridiques et Judiciaires (Mélanie Arnal, Sophie Billet, Fiona Fournet, Julie

Djeradjian, Julian Launay et Charlotte Rey) ont eu à cœur de présenter un

guide qui soit tout à la fois complet et didactique. L’objectif est atteint,

qu’ils en soient remerciés.

Stéphane Darmaisin

www.masterdroit.fr

Page 8: Guide pratique de la garde à vue

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INTRODUCTION

La réforme de la garde à vue française portée par la loi du 12 avril 2011 prend sa source dans la

jurisprudence de la Cour Européenne des Droits de l'Homme et des plus hautes juridictions françaises.

La Cour Européenne des Droits de l'Homme rappelle dans son arrêt Salduz c/ Turquie du 27

novembre 2008 que l'article 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme, posant le principe du

procès équitable, impose la présence de l'avocat dès le début de la garde à vue et pendant les

interrogatoires. En juillet 2010, le Conseil Constitutionnel rend une décision dans laquelle il précise que

l'assistance de l'avocat n'est pas « effective ». Quelques mois plus tard, le 14 octobre 2010, la Cour

Européenne des Droits de l'Homme, dans son arrêt Brusco c/ France , juge que l'absence de notification

du droit de se taire à un gardé-à-vue constitue une violation de la Convention Européenne des Droits de

l'Homme (article 6 §1 et §3) d'une part, et que toute condamnation basée sur des déclarations faites par

une personne poursuivie non assistée par un avocat pendant sa garde-à-vue viole également la Convention

d'autre part. Cinq jours plus tard, c'est la Cour de cassation qui, dans trois arrêts du 19 octobre 2010,

précise que la garde-à-vue française ne satisfait pas aux exigences découlant de l'article 6 de la

Convention Européenne des Droit de l'Homme.

C'est dans ce contexte que la loi du 12 avril 2011 vient modifier en profondeur le régime de la garde

à vue en France. Elle opère un changement de la plupart des règles applicables en la matière, s'intéressant

tout d'abord au placement en garde à vue et au contrôle de son déroulement (Partie I) avant de se pencher

sur les droits reconnus au gardé à vue (Partie II) et enfin d'élaborer une refonte totale du rôle de l'avocat

pendant l'exécution de la mesure (Partie III).

Page 9: Guide pratique de la garde à vue

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Le code de procédure pénale définit les personnes compétentes (section I), les conditions (section

II) et le contrôle (section III) pour le placement en garde-à-vue.

Section I LES PERSONNES COMPÉTENTES POUR LE PLACEMENT EN

GARDE À VUE

Il convient de différencier le régime applicable aux majeurs (§1) du régime applicable aux mineurs

(§2).

§1) Le gardé à vue majeur

A. Compétence et initiative de l’officier de police judiciaire

L’article 63 alinéa 1er

du code de procédure pénale dispose que « Seul un officier de police

judiciaire peut, d'office ou sur instruction du procureur de la République, placer une personne en garde à

vue. Il s’agit donc d’un pouvoir exclusif de l’officier de police judiciaire ».

B. Compétence de l’officier de police judiciaire sur instruction du procureur de la

République

Toutefois, il faut noter que le procureur de la République peut, sur instruction, demander à l’officier

de police judiciaire de prendre la mesure de placement en garde à vue.

§2) Le gardé à vue mineur

Comme pour les majeurs ci-dessus, l’officier de police judiciaire est la seule autorité compétente

pour pouvoir placer en garde à vue.

PARTIE I

PLACEMENT ET DURÉE DE LA GARDE À VUE

CHAPITRE I

LE PLACEMENT

En pratique :

Dans le cas d’un flagrant délit, l’officier de police judiciaire prendra l’initiative de placer d’office la

personne en garde à vue.

En revanche, s’il s’agit d’une enquête préliminaire, le procureur de la République pourra demander à

ce même officier le placement en garde à vue. L’officier agira donc sur instruction du procureur et non

de sa propre initiative.

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Section II LES CONDITIONS DU PLACEMENT EN GARDE À VUE

Le placement en garde à vue est soumis au respect de certaines conditions, il convient de les

différencier selon la majorité (A) ou la minorité (B) du gardé à vue.

§1) Le gardé à vue majeur

A. La mesure de garde à vue

Pour limiter la mise en œuvre de cette mesure, la loi définit des conditions strictes(1) et cantonne

cette dernière à la poursuite d’au moins un des objectifs légaux(2) mentionnés à l’article 62-2 du code de

procédure pénale.

1. Conditions préalables

L’article 62-2 du code de procédure pénale précise « La garde à vue est une mesure de contrainte

décidée par un officier de police judiciaire, sous le contrôle de l'autorité judiciaire, par laquelle une

personne à l'encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elle a

commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d'une peine d'emprisonnement est maintenue à la

disposition des enquêteurs ».

La commission ou suspicion de la commission d’une infraction

Le placement en garde à vue est donc subordonné à la commission ou à la suspicion de la

commission d'une infraction.

Une infraction d’une certaine gravité De plus, il doit s’agir d’un crime ou d’un délit puni d'une peine d'emprisonnement.

L’exclusion des délits routiers

Cette nouvelle définition exclut le recours à la garde à vue pour les contraventions et les délits non

punis d’une peine d’emprisonnement, tels que les délits routiers, permettant ainsi de faire chuter le

nombre de gardes à vue en France.

Évolution du nombre de gardes à vue de 1989 à 2009

Page 11: Guide pratique de la garde à vue

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Evolution du nombre de délits routiers constatés par la police et la gendarmerie

2. Objectifs poursuivis

De plus, le placement en garde à vue doit au moins poursuivre un des objectifs suivants :

Permettre l'exécution des investigations impliquant la présence ou la participation de

la personne ;

Garantir la présentation de la personne devant le procureur de la République afin

qu’il puisse apprécier des suites de l'enquête ;

Empêcher que la personne ne modifie les preuves ou indices matériels ;

Empêcher que la personne ne fasse pression sur les témoins ou les victimes ainsi que

sur leur famille ou leurs proches ;

Empêcher que la personne ne se concerte avec d'autres personnes susceptibles d'être

ses co-auteurs ou complices ;

Garantir la mise en œuvre des mesures destinées à faire cesser le crime ou le délit.

B. Cas spécifique : l’audition libre

Les articles 62 et 78 du code de procédure pénale précisent que les personnes à l’encontre

desquelles il n’existe aucune raison plausible de soupçonner qu’elles ont commis ou tenté de commettre

une infraction, ne peuvent être retenues que le temps strictement nécessaire à leur audition.

La durée ne peut excéder quatre heures. La personne peut être entendue après ce délai si elle

Page 12: Guide pratique de la garde à vue

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confirme comparaître librement et que l’officier de police judiciaire lui indique qu’elle peut quitter les

locaux à tout moment.

S’il existe pendant l’audition, des raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de

commettre une infraction, la personne sera placée en garde à vue.

§2) Le gardé à vue mineur

Le placement en garde à vue diffère selon l’âge du mineur. L’article 4 de l’ordonnance n°45-174 du

2 février 1945 permet de tirer les conséquences suivantes :

Mineur de 10 à 13ans

Mineur de 13 à 16ans

Mineur de 16 à 18ans

• Impossibilité de placer en garde à vue

• Crime ou délit puni d'au moins 5 ans d'emprisonnement.

• Remplir un des 6 objectifs légaux (article 62 code de procédure penale).

• Acccord préalable du procureur de la République, du juge d'instruction ou du juge pour enfant.

•Garde à vue possible

•Crime ou délit puni d'une peine d'emprisonnement

•Au moins un des objectifs légaux (article 62-2 du code de procédure pénale)

•Enregistrement audiovisuel

•Garde à vue possible

•Crime ou délit puni d'une peine d'emprisonnement

•Au moins un des objectifs légaux (article 62-2 du code de procédure pénale)

•Enregistrement audiovisuel

Page 13: Guide pratique de la garde à vue

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Section III LE CONTROLE DU PLACEMENT EN GARDE À VUE

S’agissant du contrôle du placement, il faut différencier selon la majorité (§1) ou la minorité (§2)

du gardé à vue.

§1) Le gardé à vue majeur

Il convient de différencier l’enquête préliminaire ou de flagrance (A) de l’instruction (B)

A. L’enquête préliminaire ou de flagrance

1. La compétence du procureur de la République

Principe

L’article 62-3 du code de procédure pénale énonce que « la garde à vue s'exécute sous le contrôle

du procureur de la République, sans préjudice des prérogatives du juge des libertés et de la détention

prévues aux articles 63-4-2 et 706-88 à 706-88-2 en matière de prolongation de la mesure au-delà de la

quarante-huitième heure et de report de l'intervention de l'avocat ».

De plus, l’article 63-9 du code de procédure pénale précise que le procureur de la République est

« compétent pour être avisé des placements en garde à vue, en contrôler le déroulement, en ordonner la

prolongation et décider de l'issue de la mesure est celui sous la direction duquel l'enquête est menée.

Toutefois, le procureur de la République du lieu où est exécutée la garde à vue est également compétent

pour la contrôler et en ordonner la prolongation ».

Cas spécifique : le conflit de compétences

Selon l’article 63-9 du code de procédure pénale, quand la garde à vue se déroule dans le ressort

d’un Tribunal de grande instance autre que celui saisi de l’enquête, l’officier de police judiciaire doit tout

d’abord avertir le parquet qui dirige l’enquête. Ce dernier devra quant à lui en avertir le parquet du lieu où

la mesure est exécutée. Le procureur de la République qui dirige l’enquête est donc celui le plus en

mesure d’apprécier la nécessité, de maintenir la garde à vue ou le cas échéant, de la prolonger. Cependant,

l’article 63-9 alinéa 2 confère une compétence concurrente au procureur de la République du lieu

d’exécution de la mesure, pour la contrôler et décider de sa prolongation.

2. Le contrôle des motifs justifiant le placement

L’article 63 du code de procédure pénale dans son alinéa 2 indique que « dès le début de la mesure,

l'officier de police judiciaire informe le procureur de la République, par tout moyen, du placement de la

personne en garde à vue. Il lui donne connaissance des motifs justifiant, en application de l'article 62-2,

ce placement et l'avise de la qualification des faits qu'il a notifiée à la personne en application du 2° de

l'article 63-1. Le procureur de la République peut modifier cette qualification ; dans ce cas, la nouvelle

qualification est notifiée à la personne dans les conditions prévues au même article 63-1 ».

Cet avis de l’officier de police judiciaire n’est encadré par aucun formalisme. Il peut être réalisé par

téléphone, par message électronique, par télécopie etc.

Page 14: Guide pratique de la garde à vue

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Dans tous les cas, il appartient à l’officier de police judiciaire d’indiquer clairement l’heure de la

transmission de l’avis afin que le procureur de la République puisse exercer son contrôle.

Le procureur de la République dans son contrôle doit veiller à ce que :

L’officier de police judiciaire ait bien respecté un des 6 objectifs prévus à l’article 62-2

du code de procédure pénale.

Le ou les objectifs soient légitimes au moment du placement en garde à vue.

La qualification des faits retenus soit exacte.

B. L’instruction

L’article 154 du code de procédure pénale indique que « Les dispositions des articles 62-2 à 64-1

relatives à la garde à vue sont applicables lors de l'exécution des commissions rogatoires.

Les attributions conférées au procureur de la République par ces articles sont alors exercées par le juge

d'instruction. Lors de la délivrance de l'information prévue à l'article 63-1, il est précisé que la garde à

vue intervient dans le cadre d'une commission rogatoire ».

Par conséquent, la personne compétente pour contrôler le placement en garde à vue pendant

l’instruction est le juge d’instruction et non le procureur de la République.

§2) Le gardé à vue mineur

A. L’enquête préliminaire ou de flagrance

Le contrôle du placement en garde à vue d’un mineur pendant l’enquête préliminaire ou de

flagrance est le même que celui d’un majeur (voir ci-dessus).

B. L’instruction

Le contrôle du placement en garde à vue d’un mineur pendant l’instruction est le même que celui

d’un majeur (voir ci-dessus).

§3) Tableau récapitulatif

Contrôle du placement en garde à vue

Majeurs

Enquête de flagrance et préliminaire :

Contrôle du procureur de la République sans préjudice des

prérogatives du juge des libertés et de la détention en matière de

prolongation

Pendant l'instruction :

Contrôle du juge de l'instruction

Mineurs

Idem

Page 15: Guide pratique de la garde à vue

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La durée légale de la garde à vue diffère selon que la personne appréhendée est majeure (section I)

ou mineure (section II).

Section I GARDE À VUE DES MAJEURS

La durée de la mesure de garde à vue d'un majeur varie selon la nature de l'infraction commise ou

soupçonné d'avoir été commise. Il existe un régime de droit commun (§1) et un régime dérogatoire

applicable à des infractions spécifiques prévues par l'article 706-73 du code de procédure pénale (§2).

§1) Le régime de droit commun

Il convient d'étudier dans un premier temps les règles fixant la durée initiale de la garde à vue (A)

avant de s'attarder sur celles qui organisent son éventuelle prolongation (B).

A. Durée initiale

Principe : limitée à 24 heures

L'article 63 II° du code procédure pénale dispose que « La durée de la garde à vue ne peut excéder

vingt-quatre heures. »

L'interpellation de la personne objet de la mesure fixe le début de la période de 24h, ce que précise

l'article 63 III° du Code de Procédure Pénale en ces termes : « L'heure du début de la mesure est fixée, le

cas échéant, à l'heure à laquelle la personne a été appréhendée. »

Cas spécifique : pluralité de gardes à vue pour un même fait

Cet article contient l'information suivante : « Si une personne a déjà été placée en garde à vue pour

les mêmes faits, la durée des précédentes périodes de garde à vue s'impute sur la durée de la mesure ».

Cette précision est importante. Si l'on se trouve dans le cadre d'une enquête qui dure depuis

plusieurs mois ou années et qu'un suspect est placé une seconde ou une troisième fois en garde-à-vue pour

les mêmes faits, il conviendra de s'assurer que la durée totale de « ses » garde-à-vues n'a pas dépassé la

durée légale de 24h (ou celle des éventuelles prolongations).

CHAPITRE II

LA DUREE

Page 16: Guide pratique de la garde à vue

16

B. Prolongation

Principe

L'article 63 du Code de Procédure Pénale s'intéresse également à l'éventuelle prolongation de la

garde à vue en ces termes : « (...) la garde à vue peut être prolongée pour un nouveau délai de vingt-

quatre heures au plus, sur autorisation écrite et motivée du procureur de la République (...) »

Conditions cumulatives

Le Code de procédure pénale prévoit toutefois qu'une telle décision ne peut être prise que sous les

conditions cumulatives suivantes : « (...) si l'infraction que la personne est soupçonnée d'avoir commise

ou tenté de commettre est un crime ou un délit puni d'une peine d'emprisonnement supérieure ou égale à

un an et si la prolongation de la mesure est l'unique moyen de parvenir à l'un au moins des objectifs

mentionnés aux 1° à 6° de l'article 62-2. (...) qu'après présentation de la personne au procureur de la

République. Cette présentation peut être réalisée par l'utilisation d'un moyen de télécommunication

audiovisuelle (...) ».

La garde à vue de droit commun peut donc durer au total jusqu'à 48h.

C. Tableau récapitulatif

DUREE INITIALE PROLONGATION

- 24h

- Début du délai : l'interpellation

- Si garde-à-vue se rapportant à des faits ayant

déjà donné lieu à une telle mesure, les durées

précédentes s'imputent sur la nouvelle

- 24h

- Autorisation écrite du Procureur de la République

- Conditions requises :

- article 62-2 Code de Procédure Pénale

- peine encourue > 1 an

- présentation au Procureur

(avec possibilité d'y échapper avec une

décision écrite et motivée)

Les conditions cumulatives de la prolongation sont :

La peine maximale encourue par la personne poursuivie doit être au moins égale à une année

d’emprisonnement,

Remplir au moins un des « objectifs » visés à l’article 62-2 du code de procédure pénale,

Présentation de la personne au Procureur

Concernant la dernière condition, le texte prévoit une exception ainsi formulée : « (…) Elle peut

cependant, à titre exceptionnel, être accordée par une décision écrite et motivée, sans

présentation préalable ».

Page 17: Guide pratique de la garde à vue

17

§2) Le régime dérogatoire

Le régime dérogatoire est prévu par l'application combinée des articles 706-73 et 706-88 et suivants

du Code de Procédure Pénale. Le premier fixe la liste exhaustive des infractions concernées par ce régime

spécial et le second en détermine les contours. Les infractions concernées par ce régime sont les suivantes

(article 706-73 du code de procédure pénale) :

« 1° Crime de meurtre commis en bande organisée prévu par le 8° de l'article 221-4 du code pénal ;

2° Crime de tortures et d'actes de barbarie commis en bande organisée prévu par l'article 222-4 du code

pénal ;

3° Crimes et délits de trafic de stupéfiants prévus par les articles 222-34 à 222-40 du code pénal ;

4° Crimes et délits d'enlèvement et de séquestration commis en bande organisée prévus par l'article 224-

5-2 du code pénal ;

5° Crimes et délits aggravés de traite des êtres humains prévus par les articles 225-4-2 à 225-4-7 du code

pénal ;

6° Crimes et délits aggravés de proxénétisme prévus par les articles 225-7 à 225-12 du code pénal ;

7° Crime de vol commis en bande organisée prévu par l'article 311-9 du code pénal ;

8° Crimes aggravés d'extorsion prévus par les articles 312-6 et 312-7 du code pénal ;

8° bis Délit d'escroquerie en bande organisée prévu par le dernier alinéa de l'article 313-2 du code pénal

;

9° Crime de destruction, dégradation et détérioration d'un bien commis en bande organisée prévu par

l'article 322-8 du code pénal ;

10° Crimes en matière de fausse monnaie prévus par les articles 442-1 et 442-2 du code pénal ;

11° Crimes et délits constituant des actes de terrorisme prévus par les articles 421-1 à 421-6 du code

pénal ;

12° Délits en matière d'armes et de produits explosifs commis en bande organisée, prévus par les articles

L. 2339-2, L. 2339-8, L. 2339-10, L. 2341-4, L. 2353-4 et L. 2353-5 du code de la défense ;

13° Délits d'aide à l'entrée, à la circulation et au séjour irréguliers d'un étranger en France commis en

bande organisée prévus par le quatrième alinéa du I de l'article 21 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2

novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

14° Délits de blanchiment prévus par les articles 324-1 et 324-2 du code pénal, ou de recel prévus par les

articles 321-1 et 321-2 du même code, du produit, des revenus, des choses provenant des infractions

mentionnées aux 1° à 13° ;

15° Délits d'association de malfaiteurs prévus par l'article 450-1 du code pénal, lorsqu'ils ont pour objet

la préparation de l'une des infractions mentionnées aux 1° à 14° et 17° ;

16° Délit de non-justification de ressources correspondant au train de vie, prévu par l'article 321-6-1 du

code pénal, lorsqu'il est en relation avec l'une des infractions mentionnées aux 1° à 15° et 17° ;

17° Crime de détournement d'aéronef, de navire ou de tout autre moyen de transport commis en bande

organisée prévu par l'article 224-6-1 du code pénal ;

18° Crimes et délits punis de dix ans d'emprisonnement, contribuant à la prolifération des armes de

destruction massive et de leurs vecteurs entrant dans le champ d'application de l'article 706-167. »

Page 18: Guide pratique de la garde à vue

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A. Application du régime de droit commun

La durée initiale de 24 heures ainsi que sa première prolongation (24 heures également) prévues par

l'article 63 du code de procédure pénale susvisé s'appliquent également en matière dérogatoire.

Les articles 706-88 et 706-88-1 vont cependant venir ajouter une période supplémentaire.

B. Prolongations supplémentaires spécifiques

L'article 706-88 vient dans un premier temps préciser le régime applicable à toutes les infractions

visées à l'article 706-73 en matière de prolongation de garde-à-vue :

« (...) la garde à vue d'une personne peut, à titre exceptionnel, faire l'objet de deux prolongations

supplémentaires de vingt-quatre heures chacune.

Ces prolongations sont autorisées, par décision écrite et motivée, soit, à la requête du procureur de la

République, par le juge des libertés et de la détention, soit par le juge d'instruction.

La personne gardée à vue doit être présentée au magistrat qui statue sur la prolongation préalablement à

cette décision. La seconde prolongation peut toutefois, à titre exceptionnel, être autorisée sans

présentation préalable de la personne en raison des nécessités des investigations en cours ou à effectuer.

(...)

Par dérogation aux dispositions du premier alinéa, si la durée prévisible des investigations restant à

réaliser à l'issue des premières quarante-huit heures de garde à vue le justifie, le juge des libertés et de la

détention ou le juge d'instruction peuvent décider, selon les modalités prévues au deuxième alinéa, que la

garde à vue fera l'objet d'une seule prolongation supplémentaire de quarante-huit heures. (...) »

L'article 706-88-1 du code de procédure pénale vient dans un second temps préciser une dérogation

supplémentaire possible dans le cas d'une infraction prévue au 11° de l'article 706-73 autrement dit en

matière de terrorisme :

« (...) le juge des libertés peut, à titre exceptionnel et selon les modalités prévues au deuxième

alinéa de l'article 706-88, décider que la garde à vue en cours d'une personne, se fondant sur l'une des

infractions visées au 11° de l'article 706-73, fera l'objet d'une prolongation supplémentaire de vingt-

quatre heures, renouvelable une fois. »

En résumé,

Une garde à vue concernant n’importe quelle infraction mentionnée à l’article 706-73 peut

durer jusqu'à 96h soit 4 jours (la durée légale prévue à l'article 63 du Code de Procédure Pénale

pouvant aller jusqu'à 48h auxquelles on ajoute les deux prolongations de 24h chacune prévues par

l'article 706-88).

Concernant les infractions de terrorisme, il faut ajouter à cette période de 96h une nouvelle

période de 24h renouvelable une fois ce qui porte au maximum la durée de la garde-à-vue à 6

jours. Il est à noter ici que toutes ces prolongations exceptionnelles sont décidées soit par le Juge

des Libertés et de la Détention (en cas d'enquête de flagrance ou préliminaire) soit par le Juge

d'Instruction (en cas d'information judiciaire), deux magistrats du siège.

Page 19: Guide pratique de la garde à vue

19

C. Tableau récapitulatif

Infractions prévues à l'article

706-73, 1° à 10° et 12° à 18° du

Code de Procédure Pénale

Infractions prévues au 11° de

l'article 706-73 du Code de

Procédure Pénale

1ère prolongation 24h + 24h ou directement 48h

- Par le J.L.D ou le J.I

- Présentation devant ce magistrat

obligatoire pour la première

prolongation de 24h, pas pour la

seconde

IDEM

2ème prolongation

PAS DE 2ème PROLONGATION

POSSIBLE

24h + 24h

- Mêmes conditions que pour la

première prolongation

TOTAL 96h = 4 jours 144h = 6 jours

Page 20: Guide pratique de la garde à vue

20

Section II GARDE À VUE DES MINEURS

La réglementation concernant la durée de la garde à vue des mineurs puise sa source dans l'article 4

de l'ordonnance du 2 février 1945. Il convient dans un premier temps d'observer les règles régissant la

durée initiale de la garde à vue (§1) avant de s'intéresser à celles traitant de la prolongation (§2).

§1) Durée initiale

L'ordonnance de 1945 distingue selon que le mineur se trouve dans une tranche d'âge comprise

entre 10 et 13 ans (A), ou entre 13 et 18 ans (B).

A. Mineur âgé de 10 à 13 ans

L'article 4, I° de l'ordonnance de février 1945 dispose que :

« Le mineur de treize ans ne peut être placé en garde à vue. Toutefois, à titre exceptionnel, le mineur de dix

à treize ans (...) peut, pour l'un des motifs prévus par l'article 62-2 du code de procédure pénale, être

retenu à la disposition d'un officier de police judiciaire avec l'accord préalable et sous le contrôle d'un

magistrat du ministère public ou d'un juge d'instruction spécialisés dans la protection de l'enfance ou d'un

juge des enfants, pour une durée que ce magistrat détermine et qui ne saurait excéder douze heures ».

B. Mineur âgé de 13 à 18 ans

La garde-à-vue d'un mineur ayant entre 13 et 16 ans peut durer 24h, le délai légal de droit commun.

§2) Prolongation

L'ordonnance de 1945 distingue selon que le mineur se trouve dans une tranche d'âge comprise

entre 10 et 13 ans (I), entre 13 et 16 ans (II) ou entre 16 et 18 ans (III).

En matière de garde-à-vue de mineurs, il n'existe pas de régime dérogatoire similaire à celui des

majeurs. Un cas seulement permet l'application exceptionnelle d'une partie de ce régime au mineur ayant

entre 16 et 18 ans.

A. Mineur âgé de 10 à 13 ans

L'article 4 I° de l'ordonnance de février 1945 dispose que :

« Cette retenue peut toutefois être prolongée à titre exceptionnel par décision motivée de ce

magistrat pour une durée qui ne saurait non plus excéder douze heures, après présentation devant lui du

mineur, sauf si les circonstances rendent cette présentation impossible ».

La garde à vue d'un mineur de 13 ans peut donc être prolongée une fois pour une période de 12h.

Par conséquent, la durée totale de la mesure peut atteindre 24 heures.

Page 21: Guide pratique de la garde à vue

21

B. Mineur âgé de 13 à 16 ans

L'article 4 V° de l'ordonnance du 2 février 1945 dispose que :

« En cas de délit puni d'une peine inférieure à cinq ans d'emprisonnement, la garde à vue d'un

mineur âgé de treize à seize ans ne peut être prolongée.

Aucune mesure de garde à vue ne peut être prolongée sans présentation préalable du mineur au

procureur de la République ou au juge d'instruction du lieu d'exécution de la mesure ».

La prolongation de 24 heures de la garde à vue d’un mineur âgé de 13 et 16 ans est donc possible

sous réserve de deux conditions cumulatives :

Le mineur encourt une peine d’emprisonnement d’au moins 5 ans,

Le mineur doit être présenté au magistrat statuant sur la prolongation et ce sans aucune

dérogation possible.

C. Mineur âgé de 16 à 18 ans

Aucune disposition spécifique de l'article 4 de l'ordonnance du 2 février 1945 ne l'écartant, la

prolongation d'une garde à vue d'un mineur ayant entre 16 et 18 ans est possible et n'est soumise qu'à la

condition de présentation ci-dessus exposée.

L'article 4 VII° de l'ordonnance du 2 février 1945 dispose que :

« L'article 706-88 du code de procédure pénale, à l'exception de ses trois derniers alinéas, est

applicable au mineur de plus de seize ans lorsqu'il existe une ou plusieurs raisons plausibles de

soupçonner qu'une ou plusieurs personnes majeures ont participé, comme auteurs ou complices, à la

commission de l'infraction ».

Dès lors, et seulement dans ce cas précis, le régime dérogatoire est applicable au mineur ayant entre

16 et 18 ans.

Page 22: Guide pratique de la garde à vue

22

§3) Tableau récapitulatif

Age du mineur

Droit commun +

infractions de 706-73

Mineur auteur ou

complice

du majeur auteur d'une

infraction de 706-73, 11°

Durée totale

de garde à vue

10 – 13 ans

- 12h (Procureur, J.L.D ou

J.I)

- + 12h (prolongation)

- Décision écrite et

motivée

- Présentation devant lui

obligatoire sauf

circonstances

insurmontables

Pas de prolongation

supplémentaire possible

24h (1 jour)

13 – 16 ans

- 24h (Procureur, J.L.D ou

J.I)

- + 24h (prolongation)

- Peine encourue

supérieure ou égale à 5

ans

- Décision écrite et

motivée

- Présentation devant lui

obligatoire

Pas de prolongation

supplémentaire possible

48h (2 jours)

16 – 18 ans

- 24h (Procureur, J.L.D ou

J.I)

- + 24h (prolongation)

- Décision écrite et

motivée

- Présentation devant lui

obligatoire

- + 24h + 24h ou 48h

directement (706-88

alinéas 1 à 5)

- Mêmes conditions que

pour les majeurs (décision

par le J.L.D ou le J.I, etc.)

96h (4 jours)

Page 23: Guide pratique de la garde à vue

23

Vu son caractère attentatoire aux libertés individuelles, la mise en œuvre de la garde à vue est

subordonnée à de strictes conditions énumérées ci-dessus dans la PARTIE I, mais elle est également

entourée de garanties (Chapitre I) et de droits (Chapitre II) qui seront l’objet de cette seconde partie.

Avant d’étudier les droits spécifiques au gardé à vue, il convient d’énumérer brièvement les

garanties qui entourent la procédure de garde à vue en elle-même.

Section I L’AVIS AU PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE

L’article 62-3 du code de procédure pénale confère au Procureur de la République un pouvoir de

contrôle tant sur la mise en œuvre de la garde à vue que sur son déroulement.

Afin que ce dernier puisse exercer les prérogatives que lui confère ledit article, l’avis de placement doit

lui être notifié, par tout moyen, dès le début de la mesure selon l’article 63 alinéa du même code.

En effet, le renforcement des droits du gardé à vue par loi de réforme du 14 avril 2011 implique un

exercice effectif des prérogatives du procureur de la République, membre de l’autorité judiciaire en vertu

de l’article 65 et gardien de la liberté individuelle en vertu de l’article 66 de la Constitution.

Section II RESPECT DU DROIT A L’IMAGE ET A LA PRESOMPTION

D’INNOCENCE

§1) Le droit à l’image

A. Principe

L’article 9-1 du code civil institue le principe du respect à la vie privée. De ce principe la

jurisprudence a crée le droit à l’image de l’individu permettant à chacun de s’opposer à la

captation, fixation ou diffusion de son image, sans autorisation expresse et préalable.

L’officier de police judiciaire veille à ce que la personne appréhendée ne soit pas filmée ou

photographiée.

PARTIE II

GARANTIES ET DROITS DU GARDÉ À VUE

CHAPITRE I

LES GARANTIES ENCADRANT LA

PROCÉDURE DE GARDE À VUE

Page 24: Guide pratique de la garde à vue

24

B. Exceptions

1. Gardé à vue majeur

Dispositif d’enregistrement obligatoire des interrogatoires

Les articles 64-1 et 116-1 du code de procédure pénale prévoient que les

interrogatoires des personnes placées en garde à vue ou mises en examen pour crime

devront faire l’objet d’un enregistrement audiovisuel, consultable en cas de

contestation sur la portée des déclarations recueillies par procès-verbal.

Exception à l’exception

Sont exclus du dispositif d’enregistrement audiovisuel obligatoire :

les interrogatoires des personnes placées en garde à vue pour des crimes

mentionnés à l’article 706-73 et aux titres Ier et II du livre IV du code pénal ;

les interrogatoires menés en dehors des locaux de police ou de gendarmerie ;

les interrogatoires qui n’ont pu faire l’objet d’un enregistrement en raison

d’une impossibilité technique ;

les interrogatoires des personnes désignées nommément par décision écrite du

procureur de la République, versée au dossier, en fonction des nécessités de

l’enquête, lorsque le nombre de personnes gardées à vue devant être

simultanément interrogées, dans le cadre de la même procédure ou de

procédures distinctes, fait obstacle à l’enregistrement de tous les

interrogatoires.

2. Gardé à vue mineur

L'article 4 VI° alinéa 1 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 rend obligatoire

l'enregistrement audiovisuel des interrogatoires des mineurs placés en garde à vue.

Les cas de consultation de ces enregistrements sont strictement prévus par loi.

L’article 64-1 et 116-1 du code de procédure pénale prévoient que le fait, pour toute

personne, de diffuser illégalement un tel enregistrement constitue un délit puni d’une peine

d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende.

Page 25: Guide pratique de la garde à vue

25

§2) La présomption d’innocence

Le respect de la présomption d’innocence est un principe prévu par une pluralité de textes tels que

l’article 9 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, l’article 6-2 de la Convention

européenne des droits de l’homme et l’article 9-1 du code civil.

En application de ce principe, le gardé à vue est présumé innocent tant que sa culpabilité n’a pas été

établie. Par conséquent, il ne doit pas être présenté comme coupable tant qu’un jugement définitif

établissant sa culpabilité n’a pas été rendu.

§3) Fouilles et respect de la dignité humaine

La garde à vue doit, selon l’article 63-5 du code de procédure pénale, s’exécuter dans des conditions

assurant le respect de la dignité humaine de la personne gardée à vue. Ce principe s’applique tout au long

des diverses étapes qui la compose, notamment au cours des fouilles et investigations corporelles menées

par l’officier de police judiciaire sur la personne du gardé à vue.

A. Fouille simple

Il s’agit de la fouille par palpation ou utilisation de moyens de détection électronique prévue par

l’article 63-6 du code de procédure pénale dont l’objet est de s’assurer que la personne gardée à vue ne

détient aucun objet dangereux pour elle-même ou pour autrui.

B. Fouille intégrale

L’article 63-7 alinéa 1 du code de procédure pénale prévoit la possibilité d’effectuer une fouille

intégrale du gardé à vue lorsque la fouille simple est irréalisable. Cette dernière doit obligatoirement être

réalisée par un officier de police judiciaire du même sexe que le gardé à vue et dans un endroit fermé.

C. Investigations corporelles internes

L’article 63-7 alinéa 2 du code de procédure pénale prévoit la possibilité de mettre en œuvre des

investigations corporelles internes lorsqu’elles sont rendues indispensables par les nécessités de l’enquête.

Ces dernières ne sont réalisables que par un médecin requis à cet effet.

§4) Application du code de déontologie

Tout au long de la garde à vue les officiers de police judiciaire doivent appliquer et respecter le

code de déontologie de la police nationale, plus spécifiquement ses articles 7 et 10.

A. Non-discrimination

L’article 7 alinéa 3 dispose que l’officier de police judiciaire « a le respect absolu des

personnes, quelles que soient leur nationalité ou leur origine, leur condition sociale ou leurs

convictions politiques, religieuses ou philosophiques ».

Page 26: Guide pratique de la garde à vue

26

B. Protection du gardé à vue

L’article 10 alinéa 1er

dispose que « Toute personne appréhendée est placée sous la responsabilité

et la protection de la police ; elle ne doit subir, de la part des fonctionnaires de police ou de tiers, aucune

violence ni aucun traitement inhumain ou dégradant ».

§5) Contrôle des locaux de garde à vue

Afin d’améliorer les conditions matérielles de garde à vue, notamment l’état des locaux où ces

mesures privatives de libertés sont subies, des nombreux projets de mise en conformité avec les règles

élémentaires de sécurité et de respect de la dignité humaine ont été lancés par les ministères de l’intérieur et

de la défense.

Parallèlement, et toujours dans un but d’amélioration des conditions matérielles, un droit voir une

obligation de visite et de contrôle des locaux a été conféré a certaines personnes.

A. Par le procureur de la République

L’article 41 alinéa 3 du code de procédure pénale prévoit l’obligation pour le procureur de la

République de visiter au moins une fois par trimestre les locaux de garde à vue.

Ce contrôle se matérialise par l’apposition de mentions sur un registre spécial tenu au parquet et

répertoriant le nombre ainsi que la fréquence des contrôles effectués dans les différents locaux de garde à

vue.

B. Par les parlementaires

L’article 719 du code de procédure pénale prévoit que les parlementaires, notamment les

commissions d’enquête, sont compétents pour visiter à tout moment les locaux de garde à vue.

§6) Elaboration et contrôle d’un registre de garde à vue

L’article 65 du code de procédure pénale prévoit la tenue d’un registre spécial de garde à vue sur

lequel doivent apparaître « les mentions et émargements prévus par le premier alinéa de l’article 64, en

ce qui concerne les dates et heures de début et de fin de garde à vue et la durée des interrogatoires et des

repos séparant ces interrogatoires».

Ce registre fait apparaître la synthèse de chaque déroulement de garde à vue de tous les individus

interpellés. Il est contrôlable a posteriori et à tout moment par le procureur de la République.

Page 27: Guide pratique de la garde à vue

27

Il convient d’examiner d’abord la notification immédiate des droits du gardé à vue (Section I) puis

d’étudier en détail ces droits et leur modalité d’exercice (Section II).

Section I NOTIFICATION IMMÉDIATE DES DROITS DU GARDÉ À VUE

§1) Principe

L’article 63-1 du code de procédure pénale alinéa 1er

prévoit que « la personne placée en garde à

vue est immédiatement informée par un officier de police judiciaire ou, sous le contrôle de celui-ci, par un

agent de police judiciaire, dans une langue qu'elle comprend, le cas échéant au moyen de formulaires

écrits».

§2) Modalités d’exercice

A. Quand ?

Selon l’article 63-1 alinéa 1er

du code de procédure pénale, les droits du gardé à vue doivent lui être

notifiés dès son placement en garde à vue.

La Cour de cassation, dans une jurisprudence constante, a jugé que tout retard dans la mise en

œuvre de cette obligation, non justifié par une circonstance insurmontable, porte nécessairement atteinte

aux intérêts de la personne concernée (Cass.Crim 14 décembre 1999 n°99-84.148).

CHAPITRE II

LES DROITS DU GARDÉ À VUE

LES DROITS DU GARDE A VUE

Objet de la notification immédiate

-Droit d’être informé du placement en garde à vue ainsi que de la durée de la mesure et de la ou des

prolongations possibles (article 63-1 alinéa 2 1° CPP).

-Droit d’être informé de la nature et de la date présumée de l’infraction (article 63-1 alinéa 3 2°

CPP).

-Le droit de faire prévenir un proche et son employeur (article 63-2 CPP).

-Le droit à un examen médical (article 63-3 CPP).

-Le droit, après avoir décliné son identité, de faire des déclarations, de répondre aux questions ou

de garder le silence lors des auditions et confrontations (article 63-1 alinéa 8 3° CPP).

-Le droit au respect de sa dignité pendant la garde à vue (article 63-5 CPP).

-Le droit d’être informé des suites de la procédure (article 63-8 CPP).

-Le droit d’être assisté par un avocat dès le début de la garde à vue (articles 63-3-1 à 63-4-3 CPP).

Page 28: Guide pratique de la garde à vue

28

B. Par qui ?

L’officier de police judiciaire, ou l’agent sous le contrôle de ce dernier, procède à la notification

des droits mentionnés à l’article 63-1.

C. Comment ?

L’article 63-1 alinéas 3 et 4 du code de procédure pénale dispose que :

« Les informations mentionnées au premier alinéa doivent être communiquées à la personne gardée

à vue dans une langue qu'elle comprend, le cas échéant au moyen de formulaires écrits.

Si cette personne est atteinte de surdité et qu'elle ne sait ni lire ni écrire, elle doit être assistée par

un interprète en langue des signes ou par toute personne qualifiée maîtrisant un langage ou une méthode

permettant de communiquer avec des sourds. Il peut également être recouru à tout dispositif technique

permettant de communiquer avec une personne atteinte de surdité ».

1. Gardé à vue en état d’ivresse

Lorsque l’officier de police judiciaire constate l’état avancé d’ébriété du gardé à vue,

empêchant ce dernier de comprendre la portée des droits qui doivent lui être notifiés et

de les exercer utilement, l’officier doit placer le gardé à vue en cellule de dégrisement

et différer la notification de ses droits. Il s’agit alors d’une circonstance insurmontable

justifiant le report de la notification des droits.

2. Gardé à vue ne comprenant pas le français

Ses droits lui seront notifiés par un interprète dûment requis à cette fin qui pourra, si

besoin, y procéder par téléphone ou visioconférence.

Le cas échéant, le gardé à vue pourra être informé de ses droits par un formulaire. La

remise d’un formulaire constitue une information immédiate mais ne saurait valoir

notification des droits.

3. Gardé à vue atteint de surdité

Il devra être assisté « par un interprète en langue des signes ou par toute personne

qualifiée maîtrisant un langage ou une méthode permettant de communiquer avec les

sourds ».

Un procès-verbal contenant la mention de la notification des droits sera alors dument rempli et

émargé par le gardé à vue. En cas de refus d’émarger par le gardé à vue, il en sera fait mention.

En plus de ces droits, le gardé à vue peut demander à manger, à pouvoir dormir et à aller aux

toilettes.

Concernant le droit à s’alimenter durant la garde à vue, il convient de respecter le régime alimentaire du

gardé à vue imposé par sa religion, c’est ce qu’a affirmé la Cour européenne des droits de l’homme dans

un arrêt du 7 décembre 2010 Jakóbski c. Pologne où le pays fut condamné pour violation de la liberté de

religion prévue à l’article 9 de la Convention européenne des droits de l’homme.

Page 29: Guide pratique de la garde à vue

29

Section II LES DROITS DU GARDÉ À VUE

Il sera fait étude des différents droits du gardé à vue et de leur exercice.

§1) LE DROIT D’ÊTRE INFORMÉ DU PLACEMENT EN GARDE À

VUE, DE LA DURÉE DE LA MESURE ET DES

PROLONGATIONS POSSIBLES

La personne arrêtée doit être informée de son placement en garde à vue ainsi que de la durée de la

mesure par l’officier de police judiciaire. En cas de prolongation de celle-ci, le gardé à vue doit également

en être informé.

§2) LE DROIT D’ÊTRE INFORMÉ DE LA NATURE ET DE LA DATE

PRESUMÉE DE L’INFRACTION A L’ORIGINE DU PLACEMENT

EN GARDE À VUE

L’article 63-1 alinéa 3 du code de procédure pénale précise que le gardé à vue est informé « de la

nature et de la date présumée de l’infraction qu’elle est soupçonnée d’avoir commise ou tenté de

commettre ».

A. Nature de l’infraction

Les informations obligatoirement livrées

au gardé à vue

Les informations qui n’ont pas besoin

d’être portées à la connaissance du gardé

à vue

La qualification juridique de l’infraction ou

des infractions présumées

Le détail des faits reprochés

Toutes modifications de la qualification des

faits par le procureur de la République

Les articles définissant ou réprimant

l’infraction ou les infractions.

Il peut seulement être fait référence à des

catégories génériques d’infractions.

Une circonstance aggravante découverte au

cours de la garde à vue et qui a une incidence

sur le régime de la garde à vue (Cass.Crim,

10 nov. 2009 n°09-84.702)

Une circonstance aggravante découverte au

cours de la garde à vue sans incidence sur le

régime de la garde à vue

B. Date présumée de l’infraction

Une date imprécise notifiée lors de l’information sur la nature de l’infraction ne saurait faire grief à

la personne, dès lors qu’elle résulte des éléments de la procédure au moment du placement.

En effet, la date est appréciée en fonction des éléments de l’enquête à ce stade. Par conséquent, le

gardé à vue ne pourra pas en reprocher l’imprécision.

Page 30: Guide pratique de la garde à vue

30

§3) LE DROIT DE FAIRE PRÉVENIR UN PROCHE OU SON

EMPLOYEUR

Le principe est le droit de prévenir un proche et son employeur (A). Cependant, ce principe souffre

de dérogations (B).

A. Principe

1. Délai

L’article 63-2 alinéa 3 du code de procédure pénale dispose que : « les diligences incombant aux

enquêteurs en application du premier alinéa doivent intervenir au plus tard dans un délai de trois heures

à compter du moment où la personne a formulé la demande ».

Le délai sera donc de trois heures à compter de la demande du gardé à vue. Ce dernier devra alors

communiquer les coordonnées des personnes qu’il souhaite faire appeler ou, à défaut, tous les

renseignements qu’il détient. Les enquêteurs ont seulement à leur charge une obligation de moyen.

2. Les tiers avisés

Le droit de faire prévenir un proche et son employeur dépend de la qualité même de la personne

gardée à vue.

Ainsi, le gardé à vue pourra faire prévenir des personnes différentes selon qu’il fait l’objet d’une

mesure de protection juridique, qu’il est mineur ou encore qu’il est de nationalité étrangère.

Personnes que le gardé à vue peut faire prévenir

La procédure classique (article 63-2

alinéa 1er

CPP)

-un proche (une personne avec laquelle il vit

habituellement ; ou un de ses parents en ligne directe ;

ou un de ses frères et sœurs).

-et son employeur.

L’officier de police judiciaire va vérifier les liens

unissant le gardé à vue et la personne qu’il va appeler.

En cas de doute, il préviendra le procureur de la

République.

Les personnes faisant l’objet d’une

mesure de protection juridique

(article 63-2 alinéa 1er

CPP)

-un proche (même définition)

-ou son tuteur ;

-et son employeur.

Les personnes mineures -Les parents ;

-ou le tuteur ;

-ou la personne ou le service auquel est confié le mineur

-et, son employeur.

Les personnes de nationalité

étrangère (article 63-2 alinéa 1er

CPP)

-un proche (même définition)

-et son employeur

-et les autorités consulaires de son pays. .

Page 31: Guide pratique de la garde à vue

31

B. Dérogation

Trois cas particuliers sont envisagés. D’abord, les nécessités de l’enquête (1), ensuite, les

circonstances insurmontables (2) et, enfin, la spécificité propre aux mineurs (3).

1. Les nécessités de l’enquête

L’officier de police judiciaire peut considérer qu’il est préférable de rejeter la demande de la

personne gardée à vue en raison de nécessités de l’enquête (risque de nuire au bon déroulement de

l’enquête, risque de dépérissement des preuves ou encore en cas d’incertitude sur la qualité du tiers à

appeler).

Il va alors en avertir le procureur de la République qui accèdera ou non à cette demande. Sa

décision n’a pas besoin d’être écrite ou motivée mais doit être transcrite à la procédure.

2. Les circonstances insurmontables

L’article 63-2 alinéa 3 du code de procédure pénale prévoit qu’en cas de circonstances

insurmontables, par exemple une coupure de réseau électrique ou téléphonique, il est possible de déroger

au délai de 3 heures. Ceci sera alors inscrit dans le procès-verbal.

3. Spécificité propre aux mineurs

Le procureur de la République peur retarder le délai de 3 heures lorsque, par exemple, les parents

pourraient être complices des faits reprochés. Cependant, il ne peut pas dépasser 24 heures ou 12 heures

s’il n’y a pas de prolongation

§4) LE DROIT À UN EXAMEN MÉDICAL

L’article 63-1 alinéas 4 et 6 du code de procédure pénale dispose que la personne placée en garde à

vue est immédiatement informée par un officier de police judiciaire, ou sous le contrôle de celui-ci, par un

agent de police judiciaire « du fait qu’elle bénéficie […] du droit d’être examinée par un médecin,

conformément à l’article 63-3 »

Le médecin est désigné par le procureur de la République ou par l’officier de police judiciaire

parmi une liste. Si la garde à vue se prolonge, le gardé à vue pourra demander un second examen médical.

A. La demande

Initiative D’office

Du gardé à vue

L’article 63-3 CPP dispose que tout gardé

à vue peut demander à être examiné par un

médecin

Des proches

Si l’examen médical n’est pas réclamé,

il peut être demandé par un membre

de la famille du gardé à vue.

(article 63-3 alinéa 3)

Un examen médical de la personne

placée en garde à vue peut également

être demandé d’office, à tout moment,

par le procureur de la République ou

l’officier de police judiciaire.

(article 63-3 alinéa 2)

Page 32: Guide pratique de la garde à vue

32

B. Contenu de l’examen médical et délai d’intervention

Lors de l’examen médical, le médecin va :

-juger de l’aptitude au maintien en garde à vue et ;

-faire toutes constatations utiles (constat de blessures,…).

Selon l’article 63-3 du code de procédure pénale, « sauf décision contraire du médecin, l'examen

médical doit être pratiqué à l'abri du regard et de toute écoute extérieurs afin de permettre le respect de

la dignité et du secret professionnel ».

Cet examen est réalisé dans les locaux des services d’enquête ou, à défaut, au sein d’un établissement

hospitalier ou d’une structure médicale. Le certificat médical sera alors rajouté dans le dossier.

Le délai de trois heures commence à courir à compter du moment où la demande a été faite. Comme

pour le droit de faire prévenir un proche et son employeur, il est possible de déroger à ce délai en cas de

circonstance insurmontable.

C. Cas particuliers

Il existe deux cas particuliers concernant l’examen médical : le cas des personnes poursuivies pour

faits de criminalité organisée ou de terrorisme (1) et les mineurs (2).

1. Les faits de criminalité organisée

L’article 706-88 alinéa 4 du code de procédure pénale fixe le régime de l’examen

médical pour les personnes contre qui on reproche des faits de criminalité organisée ou

de terrorisme.

Cet article dispose que : « lorsque la première prolongation est décidée, la personne

gardée à vue est examinée par un médecin désigné par le procureur de la République,

le juge d'instruction ou l'officier de police judiciaire. Le médecin délivre un certificat

médical par lequel il doit notamment se prononcer sur l'aptitude au maintien en garde

à vue, qui est versé au dossier. La personne est avisée par l'officier de police

judiciaire du droit de demander un nouvel examen médical. Ces examens médicaux

sont de droit ».

2. Les mineurs

Selon l’article 4 III de l’ordonnance du 2 février 1945, lorsque le mineur a moins de

16 ans, le procureur de la République désigne un médecin pour l’examiner.

S’il a plus de 16 ans, l’officier de police judiciaire doit informer les représentants

légaux du mineur, au courant de la garde à vue, de leur faculté de demander un

examen médical.

Page 33: Guide pratique de la garde à vue

33

§5) LE DROIT DE FAIRE DES DECLARATIONS, DE REPONDRE

AUX QUESTIONS OU DE GARDER LE SILENCE

Le droit de faire des déclarations et de répondre aux questions ne pose pas véritablement de

difficultés.

En revanche, l’information faite au gardé à vue immédiatement après le début de la garde à vue du

droit de se taire est une nouveauté. Le droit de se taire peut être exercé par la personne mise en garde à

vue à tout moment.

Par trois arrêts en date du 19 octobre 2010 (n°10-82.306, 10-82.902, 10-85.051) la Chambre

criminelle de la Cour de cassation a rappelé que le gardé à vue devait, sauf circonstances particulières,

être informé de son droit de se taire dès le début de la garde à vue. Ces circonstances dites particulières

doivent être justifiées par des raisons impérieuses tenant aux circonstances de l’espèce et non pas à

l’infraction reprochée à la personne. Autrement dit, le retard dans la notification du droit de se taire ne

doit pas être lié à l’infraction à l’origine de la mesure de garde à vue, mais à des circonstances extérieures

à la procédure.

§6) LE DROIT AU RESPECT DE SA DIGNITÉ

La personne gardée à vue doit pouvoir disposer, selon l’article 63-6 alinéa 2 du code de procédure

pénale, au cours de son audition, « des objets dont le port ou la détention sont nécessaires au respect de

sa dignité » (vêtements, lunettes,…).

Concernant les mesures de sécurité strictement nécessaires qui seront imposées au gardé à vue telles

que les fouilles et investigations corporelles internes il convient d’opérer un renvoi au §3, Section,

Chapitre I, Partie II.

§7) LE DROIT D’ÊTRE INFORMÉ DES SUITES DE LA

PROCÉDURE

Le gardé à vue doit être informé des suites de la procédure.

Deux issues sont alors possibles :

- Soit, la personne gardée à vue est remise en liberté à l’issue de sa garde à vue. Dans ce cas,

elle est informée de la décision du procureur de la République sur l’action publique. A

défaut de décision par le procureur de la République, elle est informé qu’elle a la

possibilité, à l’issu d’un délai de 6 mois, de questionner le procureur de la République par

lettre recommandée avec avis de réception.

- Soit, la personne gardée à vue est déférée devant un magistrat.

Page 34: Guide pratique de la garde à vue

34

§8) LE DROIT D’ÊTRE ASSISTÉ PAR UN AVOCAT DÈS LE DÉBUT

DE LA GARDE À VUE

D’après l’article 63-3-1 du code de procédure pénale, la personne gardée à vue peut demander

à être assistée par un avocat, dès le début de la mesure.

Le gardé à vue aura alors le droit à un entretien avec son avocat. De plus, son avocat pourra assister

aux auditions et aux confrontations. Le gardé à vue est également informé de ce droit à être assisté

d’un avocat à chaque prolongation de sa garde à vue.

Les officiers sont là aussi tenus à une obligation de moyen. Par conséquent, s’ils n’arrivent

pas à joindre l’avocat demandé par la personne mise en garde à vue, ils demanderont au gardé à vue

de désigner un autre avocat et, le cas échéant, ils lui proposeront un avocat commis d’office. En

revanche, si c’est la famille du gardé à vue qui désigne l’avocat, les officiers de police judiciaire

devront alors impérativement demander au gardé à vue de confirmer cette nomination.

Enfin, l’intervention de l’avocat peut être différée pour des raisons impérieuses sur décision

du procureur de la République ou du juge d’instruction ou du juge des libertés et de la détention.

Une étude approfondie de ce droit sera réalisée dans la Partie III du présent guide.

Page 35: Guide pratique de la garde à vue

35

§1) Tableau récapitulatif : les principaux droits du gardé à vue MAJEUR

ASSISTANCE DE

L’AVOCAT

INTERVENTION

DU

MEDECIN

AVIS AUX

TIERS

CONTENU

REPORT

DROIT

COMMUN

Crimes

(enregistrement

audiovisuel,

Art 64-1)

Délits punis d’une

peine

d’emprisonnement

Entretien

confidentiel

(30 min par 24h)

(Art 63-4)

+

Consultation

de

pièces du

dossier

(Art 63-4-1)

+

Assistance aux

auditions et

confrontations

(Art 63-4-2)

+

Délai de

carence de 2 h

(sauf nécessités

de l’enquête)

(Art 63-4-2 al 1

et 3)

+

Droit de poser

des questions

et de faire

des

observations

(Art 63-4-3 al 2

et 3)

Consultation

des pièces et/ou

assistance

pendant les actes

Durée de 24h :

12h (procureur de

la république ou

le juge

d’instruction)

+

si délit ≥ 5

ans, prolongation

de 12 h (juge des

libertés et de la

détention)

Décision écrite

et motivée

Critère : raisons

impérieuses

Art 63-4-2 al. 4 à

6

Examen médical

▫à l’initiative du gardé-

à-vue par 24h

▫ d’office à tout

moment par l’officier

de police judiciaire, le

procureur de la

république ou le juge

d’instruction

▫ à défaut, à l’initiative

d’un membre de la

famille

Art 63-3

Délai de 3h à compter

de la demande

Dérogation en cas de

circonstances

insurmontables

Personnes

averties :

▫ un proche

▫ ou un parent

en ligne

directe

▫ ou son frère ou

sa soeur

▫ ou son tuteur

ou curateur

+

employeur

+

autorités

consulaires

Délai de 3h à

compter de la

demande

Obligation de

moyens de

l’officier de

police judiciaire

Dérogation au

délai de 3h en cas

de nécessités de

l’enquête ou de

circonstances

insurmontables

REGIME

DEROGATOIRE

Art 706-73

Entretien

confidentiel

et/ou

consultation des

pièces et/ou

assistance

pendant les actes

Durée de 24h

(procureur de la

République ou

juge

Garde-à-vue ≤ 48 h :

droit commun

Garde-à-vue de 48 à

96 h :

▫ examen

d’office à la 1ère

prolongation

(=48ème h)

▫ 2nd examen à

l’initiative du gardé-à-

vue

CHAPITRE III

TABLEAUX RECAPITULATIFS

Page 36: Guide pratique de la garde à vue

36

d’instruction)

+

24 h (juge des

libertés et de la

détention

ou juge

d’instruction)

+

24 h (pareil)

(stupéfiants &

terrorisme)

Décision écrite

et motivée

Critère : raisons

impérieuses

Art 706-88 al. 6 et

7

Art 706-88 al 4

Garde-à-vue ≥ 96 h :

▫ examen

d’office à chaque

prolongation

▫ à l’initiative de la

personne à tout

moment

Art 706-88-1 al

3

Page 37: Guide pratique de la garde à vue

37

§2) Tableau récapitulatif : les principaux droits du gardé à vue MINEUR

ASSISTANCE

DE L’AVOCAT

Article 4 IV de l’ordonnance de 1945

INTERVENTION

DU MEDECIN

Article 4 III de

l’ordonnance de

1945 et

article 63-3 CPP

AVIS AUX

TIERS

Article 4 II de

l’ordonnance de

1945 et

article 63-2 CPP

DÉSIGNATION

CONTENU

=pareil que

pour le majeur

REPORT

Mineurs

10 à 13 ans

Par le mineur

ou ses

représentants

légaux.

A défaut, d’office

par l’officier de

police judiciaire,

le procureur de la

République ou le

juge d’instruction

Entretien

confidentiel

(30 minutes

par 24h)

(Art 63-4)

+

Consultation

de pièces du

dossier

(Art 63-4-1)

+

Assistance aux

auditions et

aux

confrontations

(Art 63-4-2)

+

Délai de

carence de 2 h,

(sauf

nécessités de

l’enquête)

(Art 63-4-2 al

1 et 3)

+

Droit de poser

des questions

et de faire des

observations

(Art 63-4-3 al

2 et 3)

Consultation

des pièces

et/ou

assistance

pendant les

actes

Durée de

24h :

12h

(procureur de

la République

ou juge

d’instruction)

+

si délit ≥

5 ans,

prolongation

de 12h ( juge

des libertés et

de la

détention)

Décision

écrite et

motivée

Examen médical

d’office à chaque

période

Personnes

averties :

parents ou

tuteur ou

personne ou

service auquel

le mineur est

confié

+ éventuellement

Employeur

+

autorités

consulaires

Avis

obligatoire au

représentant

légal dès le

début de la

garde-à-vue

Délai de 3 h à

compter de la

demande

Report

possible du

délai de 3h par

le procureur

de la

République

(sans dépasser

12h ou 24h si

prolongation)

Mineurs

13 à16 ans

(

Par le mineur ou

ses représentants

légaux

Mineurs

16 à 18 ans

Examen médical

▫à l’initiative du

gardé-à-vue par 24h

▫ d’office, à tout

moment, par

l’officier de police

judiciaire, le

procureur de la

République ou le

juge d’instruction

▫ à défaut, à

l’initiative du

représentant légal

Page 38: Guide pratique de la garde à vue

38

Parmi les droits du gardé à vue se trouve le droit à l'assistance effective d'un avocat. Celui-ci

constitue l'essence même de la défense du gardé à vue. La réforme a joué un rôle crucial en la matière

puisqu'elle vient proclamer le droit à l'assistance effective d'un avocat. Par conséquent, elle assure au

gardé à vue une réelle défense de ses droits. L'article 63-3-1 du code de procédure pénal met à la charge

des officiers ou agents de police judiciaire le devoir d'accomplir toutes diligences nécessaires afin de

rendre effective la mise en œuvre de ce droit.

L’avocat assiste son client dès le début de la mesure de garde à vue (Section I). Il est présent

pendant les interrogatoires (Section II) et les auditions (Section III).

Section I LA PRÉSENCE DE L’AVOCAT DÈS LE DÉBUT DE LA GARDE

À VUE

§1) Droit commun

A. Le délai de carence

Le gardé à vue bénéficie, au regard de l’article 53-4 du code de procédure pénale, du droit d’être

assisté d’un avocat dès le début de sa garde à vue. Ce droit se matérialise tout d’abord par la possibilité

offerte à la personne appréhendée de s’entretenir avec un avocat pendant une durée de 30 minutes.

Le facteur temps qui imposerait que cette assistance soit effective « dès le début » de la mesure

privative de liberté, engendre des problèmes d’ordre organisationnels. C’est la raison pour laquelle un

délai de carence est prévu (1). De plus, ce principe souffre d’exceptions (2)

1. Le principe : délai de carence de 2h

Un délai d’attente de 2 heures est prévu, par l’article 63-4-2 du code de procédure pénale, lorsque

l’avocat ne s’est pas / ou n’a pas la possibilité de se présenter, dès le début de la mesure de garde à vue,

aux locaux où son client est retenu.

Certaines règles régissent ce délai dit de carence (voir le tableau ci-dessous) :

PARTIE III

L’ASSISTANCE EFFECTIVE DE L’AVOCAT

CHAPITRE I

MISE EN ŒUVRE DE L’ASSISTANCE

EFFECTIVE DE L’AVOCAT

Page 39: Guide pratique de la garde à vue

39

2. Les exceptions au respect du délai de carence de 2h

L’article 63-4-2 du code de procédure pénale prévoit la possibilité de déroger au délai d’attente de

deux heures, et ainsi débuter immédiatement l’audition du gardé à vue.

Cette exception est subordonnée à certaines conditions :

B. Le report de l’intervention de l’avocat

Dans certaines situations, l’intervention de l’avocat peut être reportée. Ce report est subordonné à

certaines conditions (1) permettant sa mise en œuvre (2).

1. Les conditions du report de l’intervention de l’avocat

La mesure doit être justifiée par :

Des raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l’enquête,

OU

Pour permettre le bon déroulement d’investigations urgentes tendant au recueil ou à la

conservation des preuves

OU

Pour prévenir une atteinte imminente aux personnes

Cas d’une extrême gravité

Pendant ce délai, les officiers ou les agents de police judiciaire ne peuvent pas commencer les

auditions mais ils sont autorisés à questionner la personne sur son identité (état civil et adresse

uniquement),

Le délai doit être également respecté lorsque la personne qui aurait renoncé à être assisté lors de

la notification de ses droits déciderait par la suite l’intervention d’un avocat (même principe

lorsqu’un nouvel avocat aurait été désigné à la suite d’un conflit d’intérêt),

Ce délai commence à courir dès que l’avocat (ou bâtonnier) concerné a été avisé,

L’heure à laquelle ce délai débute doit être mentionnée sur un procès verbal,

Ce délai est valable que pour le pour le premier interrogatoire,

Une fois les 2h dépassées, les officiers ou agents de police judiciaire peuvent procéder à l’audition.

Il faut que les nécessités de l’enquête le permettent,

L’officier de police judiciaire doit transmettre une demande au procureur de la République qui

devra écrire et motiver sa décision de faire débuter l’audition sans délai. (Le procureur peut

donner sa décision ultérieurement mais les OPJ ou les APJ devront acter cette autorisation à la

procédure).

Page 40: Guide pratique de la garde à vue

40

2. La mise en œuvre du report

Le procureur de la République décide de cette mesure sur demande des OPJ. Sa décision doit être

écrite et motivée.

A défaut d’avoir transmis son autorisation écrite, les OPJ pourront acter cette autorisation à la

procédure mais le procureur devra transmettre sa décision au plus vite.

§2) Régime dérogatoire

Il existe des situations où l’intervention de l’avocat dès le début de la garde à vue se trouve

compromise.

Cette dérogation s’applique uniquement en présence de certaines infractions (A). Il conviendra donc

dans un premier temps d’en déterminer le champ d’application puis d’en étudier la mise en œuvre (B).

A. Les infractions visées

Ce régime dérogatoire, interdisant la présence immédiate de l’avocat dès le début de la garde à vue,

n’est applicable qu’en présence des infractions prévues à l’article 706-73 du code de procédure pénale :

crime de meurtre commis en bande organisée prévu par l’article 221-4 du code pénal.

crime de tortures et d’actes de barbarie commis en bande organisée prévu par l’article

222-4 du code pénal.

crimes et délits de trafic de stupéfiants prévus par les articles 222-34 à 222-40 du code

pénal.

crimes et délits d’enlèvement et de séquestration commis en bande organisée prévus

par l’article 224-5-2 du code pénal.

crimes et délits aggravés de traite des êtres humains prévus par les articles 225-4-2 à

225-4-7 du code pénal.

crimes et délits aggravés de proxénétisme prévus par les articles 225-7 à 225-12 du

code pénal.

crime de vol commis en bande organisée prévu par l’article 311-9 du code pénal.

crimes aggravés d’extorsion prévus par les articles 312-6 à 312-7 du code pénal.

Le report ne vise que la consultation des pièces et la présence de l’avocat au

cours des auditions (l’entretien de 30 minutes n’est pas concerné par ce report)

La durée du report ne peut être que de 12 heures à compter du début de la mesure.

Ce report peut être prolongé sur décision du juge des libertés et de la détention saisi

par le procureur de la République :

La prolongation ne doit viser que les crimes et délits punis

d’une peine d’emprisonnement supérieure ou égale à 5 ans.

Le renouvèlement ne sera que de 12 heures également.

Le gardé à vue doit être informé et cela doit être précisé dans le procès verbal.

Page 41: Guide pratique de la garde à vue

41

crimes de destruction, dégradation et détérioration d’un bien commis en bande

organisée prévu par l’article 322-8 du code pénal.

crime en matière de fausse monnaie prévus par les articles 442-1 à 442-2 du code

pénal.

crimes et délits constituants des actes de terrorisme prévus par les articles 421-1 à 426-

6 du code pénal.

délits en matière d’armes et de produits explosifs commis en bande organisée prévus

par les articles L2339-2, L2339-8, L2339-10, L2341-4, L2353-4, 2353-5 du code de la

défense.

délit d’aide à l’entrée, à la circulation et au séjour irrégulier d’un étranger en France

commis en bande organisée.

délits de blanchiment prévus par les articles 324-1 et 324-2 du code pénal ou de recel

prévus par les articles 321-1 et 321-2 de produit, revenus et choses provenant des

infractions mentionnées précédemment.

délits d’association de malfaiteurs prévus par l’article 450-1 du code pénal, lorsqu’ils

ont pour objet la préparation de l’une des infractions mentionnées précédemment.

délit de non justification de ressources correspondant au train de vie, prévu par

l’article 321-6-1 du code pénal, lorsqu’il est en relation avec l’une des infractions

mentionnées précédemment.

B. Mise en œuvre

Le procureur de la République décide de cette mesure sur demande des officiers de police judiciaire

et sa décision doit être écrite et motivée.

A défaut d’avoir transmis son autorisation écrite, les officiers pourront acter cette autorisation à la

procédure mais le procureur devra transmettre sa décision au plus vite.

Le report dans le régime dérogatoire vise l’entretien de 30 minutes.

La durée du report ne peut être que de 24 heures.

La durée peut être prolongée de 24 heures (soit 48h) sur décision du juge des libertés et

de la détention (comme en droit commun)

Pour les infractions de terrorisme ou de trafic de stupéfiants, la

durée peut être prolongée de 24 heures à nouveau soit 72 h au

total.

Le gardé à vue doit être informé et cela doit être précisé dans un procès verbal.

Il n’y a donc pas d’obligation d’informer l’avocat que la personne souhaite bénéficier de

son assistance.

Cependant, la présence de l’avocat est simplement reportée ce qui signifie qu’une fois le

terme du report expiré, l’avocat pourra assister aux auditions ultérieures (à charge pour

les OPJ ou APJ d’en informer l’avocat)

Page 42: Guide pratique de la garde à vue

42

Section II L’ACCÈS AU DOSSIER

En avant propos, il convient de noter que le conseil constitutionnel, saisi par la voie d’une

question prioritaire de constitutionnalité, a considéré dans diverses décisions en date du 18 novembre

2011 (décision n°2011-191/194/195/196/197) que les dispositions relatives à l’accès de certaines pièces

du dossier du client par son avocat n’étaient pas contraires aux droits et libertés garantis par la

constitution.

§1) Consultation des pièces de la procédure

Depuis la réforme de la garde à vue, l’avocat peut désormais avoir accès au dossier de son client.

Cependant, le code de procédure pénale prévoit l’accès à une liste limitative de pièces (A) ainsi que

l’éventuel report de cette consultation (B).

A. Liste limitative de pièces consultables

L’avocat peut prendre connaissance de certaines pièces dès son arrivée mais l’article 63-4-1 du code

de procédure pénale prévoit une liste limitative :

Procès verbaux de placement en garde à vue et des droits y étant attachés,

Certificat médical,

Procès verbaux d’audition et confrontation de la personne,

Procès verbaux des auditions et confrontation de la personne établis antérieurement au

placement en garde à vue si cette personne a déjà fait l’objet d’une précédente garde à

vue.

B. Report de l’accès au dossier

Le procureur de la République ou le juge des libertés et de la détention peuvent décider, sous

réserve de motivations, de reporter l’accès aux procès verbaux d’audition et de confrontation.

Le report de l’assistance effective de l’avocat s’accompagne fréquemment d’un report à l’accès au

dossier.

§2) Mise en œuvre

A. Principe

L’avocat a le choix de prendre connaissance des pièces avant ou après l’entretien de

30 minutes.

L’avocat n’a pas la possibilité de se procurer une copie des pièces de la procédure

mais il peut prendre des notes.

Page 43: Guide pratique de la garde à vue

43

B. Exceptions

Il existe des cas ou l’accès au dossier par l’avocat est limité au stade de l’enquête ou de

l’instruction dans le but de préserver le bon déroulement des investigations. Cette exception est rappelée

par la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme (arrêt Svipsta c/. Lettonie du 17

février 2001). La cour précise cependant que l’avocat devra être en possession des pièces « qui revêtent

une importance essentielle pour contester efficacement la légalité de la mesure privative de liberté ».

Section III LA PRÉSENCE DE L’AVOCAT AUX AUDITIONS

En avant propos, il convient de noter que la décision du conseil constitutionnel du 18 novembre

2011 est venue préciser que les règles relatives à l’intervention de l’avocat pendant les auditions « ne

méconnaissent ni les droits de la défense ni aucun autre droit ou libertés que la Constitution garantit ».

§1) L’avocat et le gardé à vue

La présence de l’avocat pendant les auditions concerne aussi bien les majeurs (A) que les mineurs

gardés à vue (B).

A. L’assistance des majeurs gardés à vue

L’avocat peut poser des questions à l’issue de l’audition ou de la confrontation.

L’OPJ ou l’APJ peut s’opposer aux questions s’il estime qu’elles sont nuisibles à

l’enquête : son refus devra être mentionné dans le procès verbal.

L’avocat peut relire le PV mais ne le signe pas.

Il peut également joindre des observations écrites qui seront annexées à la procédure.

B. L’assistance des mineurs gardés à vue

La mise en œuvre de l’assistance de l’avocat pour les mineurs gardés à vue est identique à celle des

majeurs placés en garde à vue que ce soit pour les infractions de droit commun ou les infractions prévues

par l’article 706-73 du code de procédure pénale.

§2) L’avocat et la victime

La victime bénéficie, selon l’article 63-4-5 du code de procédure pénale, du droit d’être assistée par

un avocat lorsqu’elle devra se confronter à la personne gardée à vue.

Les règles relatives à l’assistance par l’avocat de la victime sont :

La victime devra être informée de ce droit d’assistance avant la confrontation.

Ce droit ne vise que les cas ou la victime doit se confronter au gardé à vue.

Page 44: Guide pratique de la garde à vue

44

Ce droit intervient peut intervenir au cours de l’enquête ou au cours de l’instruction et

même si la victime ne s’est pas constituée partie civile.

L’avocat peut demander la consultation des procès verbaux d’audition de la victime.

Comme pour l’audition classique, l’OPJ ou l’APJ peut s’opposer aux questions de

l’avocat s’il estime qu’elles peuvent nuire au déroulement de l’enquête (refus

mentionné dans le PV).

L’avocat pourra relire le PV mais ne le signe pas.

Il pourra soumettre des observations écrites qui seront annexées à la procédure.

Toutes les nouvelles règles applicables aux gardes à vue décrite ci-dessus ont entrainé un

bouleversement sans précédent pour les différents barreaux de France. Les avocats ont dû s’adapter au

nouveau régime applicable afin de garantir au mieux les intérêts de leurs clients et de satisfaire aux

nouvelles exigences légales.

Le droit du gardé à vue à l’assistance effective d’un avocat implique nécessairement la réalisation

d’un processus de désignation de l’avocat. Cela se matérialise notamment par l'information fait à ce

dernier de la demande d'assistance formulée par le gardé à vue. Elle doit être effectuée sans délais et par

tous moyens.

Section I LA DÉSIGNATION

Il convient de distinguer deux situations en la matière. L'avocat désigné peut en effet, être un

avocat choisi ou bien commis d'office.

§1) L’avocat choisi

A. L’avocat choisi par le gardé à vue

Le gardé à vue peut désigner l'avocat de son choix.

Il incombe alors aux officiers de police judiciaire de regrouper les éléments d'identification auprès

de la personne gardée à vue afin de le contacter.

Cependant si ces derniers ne parviennent pas, par tous moyens, à joindre l'avocat ainsi désigné, le

gardé à vue devra alors opter pour la désignation d'un autre avocat soit de son choix soit commis

d’office.

B. L’avocat choisi par la famille du gardé à vue

En ce qui concerne « l’avocat choisi » une situation particulière est à souligner.

CHAPITRE II

L’IMPACT SUR LA PROFESSION D’AVOCAT

Page 45: Guide pratique de la garde à vue

45

La famille du gardé à vue peut procéder, à sa place, au choix d'un avocat. Cependant cette situation

fait naître, à l'égard des officiers de police judiciaire, une obligation supplémentaire. Ces derniers doivent

alors obtenir la confirmation par le gardé à vue du choix effectué par sa famille, excepté en matière de

représentation légale des mineurs où cette règle est d'ordre impératif.

§2) L’avocat commis d’office

Le gardé à vue peut également s'en remettre à la désignation d'un avocat commis d'office.

A. L’information de l’avocat

Les officiers de polices judiciaires ont alors pour obligation de contacter le bâtonnier ou le service

de permanence du barreau. Celui-ci est organisé en vue d'assurer la continuité du droit à l'assistance d'un

avocat. Ainsi, l'avocat de permanence assurera la défense du gardé à vue. Dans cette hypothèse

l'obligation à la charge des officiers de police judiciaire de joindre l'avocat peut être satisfait par le simple

fait de laisser un message sur répondeur.

Les officiers de police judiciaire ont l'obligation d'assurer une information effective de l’avocat

commis d’office. Ce dernier doit être informé de la nature de l’infraction et de la date. Cette information

ne peut être réalisée que par communication téléphonique directe ou en personne après son arrivée dans

les locaux de garde à vue.

Afin de justifier du respect de leurs obligations les officiers de police judiciaire ont l'obligation de faire

acte de toutes les diligences effectuées.

B. Le conflit d’intérêt

La désignation de l'avocat peut susciter de nombreuses difficultés.

En effet, si la désignation donne lieu à un conflit d'intérêt, l'avocat est tenu de demander à ce qu'un

confrère soit désigné à sa place. Cependant, l'initiative de cette demande peut également émaner du

procureur de la République ou des officiers de police judiciaire. Ils en font alors part à l'avocat

initialement désigné puis, informe le bâtonnier de la nécessité d'une nouvelle désignation.

La réforme de la garde à vue vient renforcer les droits du gardé à vue en lui permettant d'être

également assisté d'un avocat lors de chaque interrogatoire. Ces nouvelles dispositions ont donné lieu à

un accroissement du rôle de l’avocat dans la procédure. Par conséquent sa rétribution a également

nécessairement était réformée.

Section II LA RÉMUNERATION DE L’AVOCAT

A la suite d'une concertation des représentants du Conseil National des Barreaux, le garde des

Sceaux a adressé le 14 avril 2011 une lettre au président du CNB précisant le nouveau barème de

rétribution des avocats et la contribution financière de l'Etat.

§1) La rétribution de l’avocat en matière de garde à vue

Il convient de préciser en premier lieu, que l’étude développée dans ce paragraphe portera

essentiellement sur les avocats commis d'office.

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En effet, pour les avocats choisis, la libéralité de leur profession leur laisse une grande liberté dans

la détermination du montant de leurs honoraires.

Jusqu'à la réforme, le paiement était de 61 euros Hors-taxes pour une intervention se limitant à une

demi-heure d'assistance. La Chancellerie a annoncé le jeudi 14 avril, avoir fixé le niveau de rémunération

des avocats.

Rétribution de l'avocat commis d'office de

la victime

Tarif Hors-taxes

Lors d'une confrontation 150 euros

Le Conseil National des Barreaux et la Chancellerie évaluent à trois heures la durée d'intervention

effective d'un avocat par garde à vue. Cette durée comprend l'examen du dossier, l'entretien préalable et

l'assistance aux auditions. Au cours d'une permanence, l'avocat peut donc assister plusieurs personnes

mises en garde à vue. La Chancellerie a établi un forfait de 300 euros correspondant à 100 euros H.T.

Le budget consacré à l'intervention de l'avocat a considérablement augmenté depuis la réforme

puisqu'il est évalué désormais à 100 millions d'euros. Par ailleurs, le Parlement envisage l'instauration de

mécanismes de paiement reposant sur la solidarité entre les justiciables. Néanmoins pour l'heure, la taxe

de 35 euros instaurée le 1er octobre 2011 et devant être payée par les justiciables a été supprimé. Celle-ci

avait pour objectif de financer l'augmentation de l'aide juridictionnelle. Par conséquent, il convient de

garder à l'esprit que la réflexion concernant les systèmes de financement reste entière. Des modifications

ou nouveautés restent par conséquent à prévoir.

Rétr

Rétribution de l'avocat commis d'office

du gardé à vue

Tarif Hors-taxes

Intervention se limitant à la première demi-

heure de garde à vue

61 euros

Assistance avec présence aux auditions

300 euros

En cas de prolongation de la garde à vue au-

delà de 24h

150 euros

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§2) L’aide juridictionnelle

L'aide juridictionnelle permet aux personnes, ayant de modestes revenus, de bénéficier d'une prise

en charge par l'Etat des honoraires d'avocat et frais de justice. Pour cela le justiciable doit répondre de

certaines conditions de ressources.

Conditions de ressources:

Aide juridictionnelle totale Ressources mensuelles inférieures à 929

euros

Aide juridictionnelle partielle Ressources mensuelles entre 929 euros et

1393 euros

Le budget de l'aide juridictionnelle consacré à la présence de l'avocat en garde à vue s'élevait à 15

millions d'euros avant l'entrée en vigueur de la réforme. Or depuis celle-ci, les crédits attribués à l'aide

juridictionnelle ont largement augmenté puisque le budget est désormais estimé à hauteur de 312 millions

d'euros.