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Histoire de la vitesse de la lumière Dans l’antiquité classique, il y avait deux grandes théories sur la vision. la théorie de l’émission La première théorie, la théorie de l’émission qui a été appuyée par des penseurs tels qu’Euclide et Ptolémée, postulait que la vision fonctionnait grâce à l’émission par l'œil d’un rayon de lumière . La vision résulte d’une communion entre le feu extérieur du monde qui nous entoure et celui qui compose notre âme .L’obscurité provient de ce que le feu intérieur n’a plus de semblable avec lequel s’unir . Euclide : le rayon lumineux. Les soucis de Platon et d’Aristote sont conceptuels et touchent à la nature de la lumière. Leurs réflexions théoriques n’aboutissent pas à un modèle qui puisse décrire les phénomènes optiques. A l’inverse, chez Euclide (IIIème Siècle av. JC), le souci est de rendre compte des « illusions » d’optique, par une méthode géométrique. Deux traités d’optiques sont attribués à Euclide : Optique et Catoptrique. Euclide géométrise l’optique: la lumière se propage suivant des lignes droites , au sens mathématique, sans épaisseur : les rayons. Ce modèle mathématique fonde l’optique géométrique utilisée de nos jours dans la plupart des cas usuels. Propagation de simulacres La deuxième théorie professait que les formes physiques entraient dans l'œil en provenance des objets. Lucrèce (98-55) reprend les théories atomistes de Démocrite (460-470) et d’Epicure (341- 270). Le monde est constitué d’atomes insécables qui constituent les parties ultimes de la matière. Ainsi, la réplique fidèle d’un objet constituée matériellement d’atomes émis par sa surface, se détache et se propage dans l’espace jusqu’à l’observateur. L’existence de ces simulacres trouve un support dans l’observation de la nature, par exemple les mues de certains animaux. Quant au fait que l’on ne peut voir la nuit, Lucrèce invoque que "En revanche, de la lumière nous ne pouvons voir dans les ténèbres ; car l’air obscur qui se trouve derrière le jour, étant plus épais, bouche toutes les ouvertures, obstrue les canaux des yeux, si bien que le choc d’aucun simulacre ne saurait ébranler la vue. " Phénomènes divers de la vision. Livre IV. Aristote (384-322) expose sa théorie de la vision dans le traité De l’Ame. Dans la partie consacrée aux sens, Aristote développe une étude théorique de la lumière, très subtile, fondée sur la notion de milieu. Au début du XIXème siècle, Thomas Young, en découvrant les interférences de la lumière, fera référence à la théorie des milieux d’Aristote, même si la théorie qu’il développe n’a plus rien à voir avec celle d’Aristote. Il n’y est plus question de rayon visuel, et dans la théorie aristotélicienne, ce que l’on voit correspond à un ébranlement se propageant de l’objet à l’œil. Aristote rejette la théorie du rayon visuel par un argument de bon sens : « et si la vision était le résultat d’une émission de lumière sortant de l’œil comme d’une lanterne, pourquoi la vue ne s’exercerait-elle pas aussi dans l’obscurité ? » Histoire de la vitesse de la lumière 1

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Histoire de la vitesse de la lumièreDans l’antiquité classique, il y avait deux grandes théories sur la vision.

la théorie de l’émission

La première théorie, la théorie de l’émission qui a été appuyée par des penseurs tels qu’Euclide et Ptolémée, postulait que la vision fonctionnait grâce à l’émission par l'œil d’un rayon de lumière. La vision résulte d’une communion entre le feu extérieur du monde qui nous entoure et celui qui compose notre âme .L’obscurité provient de ce que le feu intérieur n’a plus de semblable avec lequel s’unir .

Euclide : le rayon lumineux.

Les soucis de Platon et d’Aristote sont conceptuels et touchent à la nature de la lumière. Leurs réflexions théoriques n’aboutissent pas à un modèle qui puisse décrire les phénomènes optiques. A l’inverse, chez Euclide (IIIème Siècle av. JC), le souci est de rendre compte des « illusions » d’optique, par une méthode géométrique. Deux traités d’optiques sont attribués à Euclide : Optique et Catoptrique.

Euclide géométrise l’optique: la lumière se propage suivant des lignes droites, au sens mathématique, sans épaisseur : les rayons. Ce modèle mathématique fonde l’optique géométrique utilisée de nos jours dans la plupart des cas usuels.

Propagation de simulacres

La deuxième théorie professait que les formes physiques entraient dans l'œil en provenance des objets. Lucrèce (98-55) reprend les théories atomistes de Démocrite (460-470) et d’Epicure (341- 270). Le monde est constitué d’atomes insécables qui constituent les parties ultimes de la matière. Ainsi, la réplique fidèle d’un objet constituée matériellement d’atomes émis par sa surface, se détache et se propage dans l’espace jusqu’à l’observateur. L’existence de ces simulacres trouve un support dans l’observation de la nature, par exemple les mues de certains animaux.

Quant au fait que l’on ne peut voir la nuit, Lucrèce invoque que "En revanche, de la lumière nous ne pouvons voir dans les ténèbres ; car l’air obscur qui se trouve derrière le jour,étant plus épais, bouche toutes les ouvertures, obstrue les canaux des yeux, si bien que le choc d’aucun simulacre ne saurait ébranler la vue." Phénomènes divers de la vision. Livre IV.

Aristote (384-322) expose sa théorie de la vision dans le traité De l’Ame.

Dans la partie consacrée aux sens, Aristote développe une étude théorique de la lumière, très subtile,fondée sur la notion de milieu. Au début du XIXème siècle, Thomas Young, en découvrant les interférences de la lumière, fera référence à la théorie des milieux d’Aristote, même si la théorie qu’il développe n’a plus rien à voir avec celle d’Aristote. Il n’y est plus question de rayon visuel, et dans la théorie aristotélicienne, ce que l’on voit correspond à un ébranlement se propageant de l’objet à l’œil. Aristote rejette la théorie du rayon visuel par un argument de bon sens : « et si la vision était le résultat d’une émission de lumière sortant de l’œil comme d’une lanterne, pourquoi lavue ne s’exercerait-elle pas aussi dans l’obscurité ? »

Histoire de la vitesse de la lumière 1

Galien et le rôle de l’œil.

Des progrès sensibles sont accomplis par Galien (Pergame, IIème Siècle ap. J.C.). Il dissèque de nombreux animaux dans le but d’améliorer les pratiques médicales. Il met en évidence le rôle du nerf optique dans la vision. Il rejoint les idées platoniciennes en ce qu’il considère qu’un fluide intérieur est communiqué du cerveau à l’œil par le nerf optique, qui sensibilise l’œil et le rend apte à être impressionné par le fluide externe en provenance de l’objet. Il attribue la zone sensible au cristallin .

Ptolémée et la mesure physique.

Aux alentours de 150 ap. J.C., Claude Ptolémée accomplit un travail astronomique colossal, mettanten évidence la précession des équinoxes. Dans le domaine de l’optique, il réalise un dispositif expérimental qui lui permet de mener une étude systématique de la réfraction. Il peut ainsi noter la valeur de l’angle de réfraction pour un angle d’incidence et un milieu donnés.

Ibn Al-Haitham (965-1039) (dit Alhazen) ALHAZEN est né à Basra (Perse) et mort au Caire (Égypte), développel'optique théorique et expérimentale. Son traité d'optique aura une grandeinfluence jusqu'au XVIIe siècle. Opposé à Euclide, il considère que les rayonslumineux se propagent en ligne droite de l'objet vers l'œil. Un apport important d’Al-Haitham est alors de postuler que la vision nécessiteune correspondance bijective entre les points de l’objet et ceux de l’image

formée dans l’œil. Il étudie expérimentalement la réflexion et la réfraction de la lumière et met en évidence l'effetd'aberration sphérique. Ses expériences avec des miroirs sphériques ou paraboliques, son utilisationde la chambre noire, ainsi que toutes ses tentatives d'explication des effets météorologiques (leshalos, les mirages ou l'arc-en-ciel), font d'Ibn al-Haytham un des grands scientifiques de la périodemédiévale.

L’époque Médiévale. Jusqu’au XIème siècle, les intellectuels occidentaux ne disposent que d’ouvrages hérités des romains dont le souci n’avait pas été tant d’approfondir la recherche théorique des grecs, que de s’attacher à un savoir encyclopédique de vulgarisation. L’exploitation de ces documents ne permettait pas de faire avancer l’état des connaissances. Avec l’accès aux textes originaux ou aux traductions, via les documents laissés par les Arabes lors de leur retrait d’Espagne, commence une période de traduction intense des sources.

Robert Grosseteste.

Le franciscain anglais Robert Grosseteste (1168-1253) dirige l’école d’Oxford en 1230 et devientévêque de Lincoln en 1235. Grosseteste peut être considéré comme le fondateur de l’optique. Il préconise l’usage de l’expérience pour contrôler les hypothèses et s’appuie sur lesmathématiques, et en particulier la géométrie « car toutes les causes des effets naturels doivent êtreexprimées au moyen de lignes, d’angles et de figures, car autrement il serait impossible, d’avoirconnaissance de la raison de ces effets ». 1

Il faudra attendre 1604 pour que Johannes Kepler (1571-1630) renouvelle l'optique(Paralipomena ad Vitellionem), en relisant de manière critique Alhazen et Vitellion. Il y fut incité

1 Michel Authier dans Les éléments d’histoire des sciences.

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par les paradoxes d'une technique d'observation des éclipses en chambre noire qui donnait desrésultats aberrants. S'il revint expérimenter en chambre noire, ce ne fut donc pas en tant quecontinuateur, mais en tant que membre d'une nouvelle communauté scientifique tenant les donnéesd'observation pour des arguments discriminants entre théories concurrentes. ( http://stl.recherche.univ-lille3.fr/archives/archivesset/seminaires/sem/SimonResume.html )

Galilée : la lunette astronomique.

Galilée (1564-1642) donne à la lunette ses lettres de noblesse. Il a eu nombre de prédécesseurs dans la réalisation de l’instrument . L’apport déterminant de Galilée est de réaliser un instrument de bonne qualité: sa lunette a un grossissement de 8. GALILEE, sera le premier à tenter de mesurer la vitesse de propagation de la lumière.Il faudra attendre le XVIIIe siècle, pour que les contributions astronomiques de COPERNIC,GALILEE et KEPLER permettent à Jean-Dominique CASSINI de calculer et de déterminer lesjours et les éclipses d’un des satellites de Jupiter, Io mais il y a des erreurs systématiques.

Une première mesure indirecte de la vitesse de la lumière. Olaf Roemer (1644-1710), publie en 1676 la première mesure (indirecte) de la vitesse de lalumière. Astronome d’origine danoise, il travaille alors à l’Observatoire de Paris. La méthodeutilisée est décrite dans le Journal des Sçavans. Elle est fondée sur le relevé des dates d’immersionet d’émersion du premier satellite de Jupiter (Io).

Remarque :Hooke

La lunette, composée de deux lentilles, avait permis à Galilée de porter un nouveau regard sur leciel. L’association de deux lentilles dans une configuration différente aboutit à la réalisation dumicroscope, qui permet à Robert Hooke (1635-1703) d’accéder àl’univers du très petit.

Olaüs Roemer

En 1676, Olaüs Roemer(1644-1710), un savant danois invité àl’observatoire de Paris par Cassini, va tenter une explication : Selon lapériode de l'année, la Terre se rapproche de Jupiter ou s'en éloigne et, la

lumière en provenance du phénomène d'éclipse met plus oumoins de temps pour atteindre la Terre: la différence étantd'environ plus ou moins 10 min.

BRADLEY

L’astronome anglais James BRADLEY confirmeranéanmoins, cinquante ans plus tard, que Romer avaitraison : la lumière possède bien une vitesse finie, qu’il estime, lui, à 300 000 km/s.L'aberration de la pluie Si vous êtes immobile sous un parapluie alors que la pluie tombe verticalement vous ne vous mouillez pas, mais si vous courrez vous vous mouillez malgré le parapluie.C'est le phénomène d'aberration, la vitesse verticale des gouttes depluie se compose avec votre vitesse horizontale pour donner unecomposante oblique .La pluie tombe à la vitesse verticale V, elle est indépendante du fait que vous êtes immobile ou que vous courrez sous la pluie,nous

l'appellerons vitesse absolue par rapport au sol. Quand vous vous déplacez, votre vitesse horizontale v est une vitesse d’entraînement,c'est en quelque sorte la vitesse avec laquelle vous entraînez votre parapluie.

Histoire de la vitesse de la lumière 3

20'' !!

Remarque:l'angle pour une étoile est au maximum de 20 secondes d'arc !!!!

Christiaan Huygens (Hollande 1629-1695)

il présente sa théorie de la propagation des rayons lumineux dans le premier chapitre du Traité de la Lumière, publié en 1690 . La lumière consiste en « un mouvement de la matière qui se trouve entre nous et le corps lumineux » Huygens peut fonder cette analyse sur la toute récente mesure de la vitesse de la lumière par Roemer, qui le conduit à adopter une valeur d’environ 230.000 km/s.

François ARAGO,

François ARAGO, le nouveau directeur de l’observatoire de Paris, centre ses recherches sur lavitesse de la lumière avec Hyppolite FIZEAUet Léon FOUCAULT

Fizeau

Fizeau, aidé par Gustave FROMENT, unhabile constructeur mécanicien, met au pointen 1849 une machine capable de mesurer lavitesse de la lumière sur Terre

Urbain LE VERRIER

En 1873, Urbain LE VERRIER prend la tête del’observatoire de Paris et demande àFoucault de reprendre les recherches. Alfred CORNU, un jeune physicien, se lanceà son tour dans de nouvelles mesures de lavitesse afin d’obtenir la précision demandée parla communauté.

Albert MICHELSON

En 1878, un jeune américain, AlbertMICHELSON, va perfectionner quant à lui laméthode du miroir tournant (Foucault).Fin XIXe siècle, on comprend que la lumièrese propage comme une onde(électromagnétique) ; une nouvelle donnée quipermet maintenant de calculer la vitesse avec lafréquence et la longueur (d’onde), éliminantainsi le problème lié à la distance. On comprend aussi que les ondesélectromagnétiques (dont la lumière visible faitpartie) se déplacent toutes à la vitesse de lalumière, ce qui générera des applications dansles télécommunications après la Secondeguerre mondiale : on met au point des outilspour mesurer ces ondes, qui donnent ainsi desestimations chaque fois plus précise de la vitesse. Après celle de Kenneth EVENSON en 1973, la recherche de la précision s’arrête car

Histoire de la vitesse de la lumière 4

celle-ci dépasse maintenant celle d’une des données principales : le mètre, établie par le mètre-étalon (en platine), aux limites imprécises pour les capacités de mesure de l’époque !

La vitesse (de la lumière) finit donc par être utilisée pour définir ce mètre ! On la considère comme une constante physique notée c (du latin celeritas, " vitesse ")La vitesse de la lumière dans le vide est :

c = 299 792 458 mètres par seconde

Une propriété extraordinaire

Image tiré de http://culturesciencesphysique.ens-lyon.fr/XML/db/csphysique/metadata/LOM_CSP_relat.xml

Quelle que soit la vitesse à laquelle se déplace un objet par rapport à un autre, chacun mesurera la vitesse de l'impulsion lumineuse reçue comme ayant la même valeur C

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Conséquence encore plus étrange

Le temps n'est pas une grandeur absolue !!!

Reste un paradoxe : si on considère que la fusée est le repère de référence, la terre se déplace par rapport à la fusée et la conclusion devrait être inversée. C'est le "paradoxe des jumeaux" qu'on a opposé à Einstein et qui sera levé par la théorie de la relativité générale. (le problème n'est pas symétrique ; la fusée accélère et freine, pas la terre !!)

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