10
NOTE PRt~LIMINAIRE Ann. Immunol. (Inst. Pasteur) 1983, 134 C, 401-410 INFLAMMATION SOUS-CUTANI~E INDUITE CHEZ LA SOURIS PAR LE POLYACRYLAMIDE par F. H6rodin (0, P. Calvas Q), D. Dormont (1) et R. M. Fauve (~) (*) (1) Laboraloire d'Immunologie de la Division Radio-Biologie el Radio-Protection, Centre de Recherches du Service de Sanld des Armdes, 92141 Clamarl (France), el (0 Unild d'lmmunopbysiologie cellulaire, Ddparlemenl de Physiopalhologie expdrimenlale, Instilut Pasteur, 75724 Paris Cedex 15 SUMMARY POLYACRYLAMIDE-INDUCED SUBCUTANEOUS INFLAMMATION IN MICE The subcutaneous injection of polyacrylamide beads into mice induced an inflammation which allowedcounting and characterization of inflam- matory cells and substances contained within the granuloma. The cellular and protein content of the inflamed site was followed up for seven days. One day after injection of the beads, a large concentration of macrophages was found with a low content of polymorphonuclear leukocytes. No lympho- cytes were observed. The increased protein concentration of the inflamma- tory exudate was accompanied by the appearance in the plasma of a protein with a pHi of 4.1• This protein, absent in normal plasma, was found 6 h after induction of the inflammatory reaction, with its concen- tration increasing up to the 4th day. KEY-WORDS : Inflammation, Macrophage, Polymorphonuclear leuko- cyte ; Acute phase proteins. INTRODUCTION De trbs nombreux stimuli se r6v~lent phlogogbnes. On sait par ailleurs que toute r6action inflammatoire -- qu'elle accompagne un 6v6nement Manuscrit re~u le 30 mars 1983, accept6 le 23 avril 1983. (*) To whom reprint requests should be sent.

Inflammation sous-cutanée induite chez la souris par le polyacrylamide

  • Upload
    rm

  • View
    216

  • Download
    3

Embed Size (px)

Citation preview

NOTE PRt~LIMINAIRE Ann. Immunol. (Inst. Pasteur) 1983, 134 C, 401-410

INFLAMMATION SOUS-CUTANI~E

I N D U I T E CHEZ LA SOURIS

P A R LE P O L Y A C R Y L A M I D E

par F. H6rodin (0, P. Calvas Q), D. Dormont (1) et R. M. Fauve (~) (*)

(1) Laboraloire d'Immunologie de la Division Radio-Biologie el Radio-Protection, Centre de Recherches du Service de Sanld des Armdes,

92141 Clamarl (France), el (0 Unild d'lmmunopbysiologie cellulaire,

Ddparlemenl de Physiopalhologie expdrimenlale, Instilut Pasteur, 75724 Paris Cedex 15

SUMMARY

P O L Y A C R Y L A M I D E - I N D U C E D S U B C U T A N E O U S I N F L A M M A T I O N IN M I C E

The subcutaneous injection of polyacrylamide beads into mice induced an inflammation which allowedcounting and characterization of inflam- matory cells and substances contained within the granuloma. The cellular and protein content of the inflamed site was followed up for seven days. One day after injection of the beads, a large concentration of macrophages was found with a low content of polymorphonuclear leukocytes. No lympho- cytes were observed. The increased protein concentration of the inflamma- tory exudate was accompanied by the appearance in the plasma of a protein with a pHi of 4.1• This protein, absent in normal plasma, was found 6 h after induction of the inflammatory reaction, with its concen- tration increasing up to the 4th day.

KEY-WORDS : Inflammation, Macrophage, Polymorphonuclear leuko- cyte ; Acute phase proteins.

INTRODUCTION

De trbs nombreux stimuli se r6v~lent phlogogbnes. On sait par ailleurs que toute r6action inflammatoire - - qu'elle accompagne un 6v6nement

Manusc r i t re~u le 30 mar s 1983, accept6 le 23 avril 1983.

(*) To w h o m repr in t r eques t s shou ld be sent .

402 F. HI~RODIN ET COLL.

aseptique, infectieux ou tumoral - - met en jeu, sur les plans cellulaire et humoral , des m~canismes communs [1, 7, 11, 12].

L 'ut i l isat ion locale d 'un agent non toxique, non diffusible et non biode- gradable, aux fins de cr6er une r6action inflammatoire aigu6 non sp6cifique, apparal t a t t rayante . En effet, la dissection des m~canismes impliqu6s au cours de l ' inflammation est rendue plus ais6e en l 'absence des produits de d6gradation de l 'agent phlogog~ne qui peuvent , & distance, entralner des alterations physiologiques [3]. L'emploi d 'un gel hydrat6 dont les bille~ ne sont pas phagocyt~es en raison de leur diam~tre et qui incluent des prot6ines d 'un poids mol~culaire eompris entre 60.000 et 400.000 daltons, est int6ressant puisqu'il permet de retenir les mol6cules de poids mol6- culaires correspondaats pr~sentes au sein de la r~action inflammatoire. Or, il n 'existe pas dans la l i t t~rature de t ravaux por tan t sur l '~tude d~taill6e des prot6ines pr~sentes au sein d 'une r6action inflammatoire aigu~.

La raise au point d 'un modble impl iquant t ransi toirement des poly- nucl~aires neutrophiles et pr6f6rentiellement des monocytes, sans faire intervenir des lymphocytes , rev~t ~galement un aspect original.

Les microbilles de polyacrylamide utilis~es fi l '6tat de gel hydrat6 r6pondent h ces exigences. I1 avai t d~jfi ~t~ montr6 qu 'une r~action inflam- matoire induite par des billes de polyacrylamide pouvait , fi distance, s t imuler les effecteurs humoraux et cellulaires de la r~sistance envers Listeria monocytogenes [5]. I1 ~tait donc int6ressant d'~tudier, au cours d 'une telle inflammation, l '~volution des populat ions eellulaires et des prot~ines.

MATt~RIEL ET Mt~THODES

1) Animaux.

Les souris non consanguines CD1 (souche Swiss) (( EOPS ),, m~les, figdes de 8 semaines, proviennent de l'61evage Charles River France. Leur poids dtait de 30-35 g et elles recevaient de l'eau et des aliments stdriles.

2) Induction de la r~aclion inflammatoire.

a) Prdparation de la suspension de microbilles de polyacrylamide.

Elles est r6alis6e h l'aide de (r Biogel P300 )) (100-200 mesh, rdf. 150.2840 Bio- Rad). Les billes sont hydrat~es pendant 1 h h 900 C dans du PBS (Bcehringer, Mannheim, France, r6f. 395.868). Leur diam~tre est alors compris entre 80 et 150 ~m Le gel obtenu est ensuite d~gaz~, autoclav~ pendant 30 min ~ 120o C puis lav~ stdrilement en PBS. Le gel est alors abandonnd jusqu'h d~cantation totale, four- nissant, apr~s ~limination complete du tampon surnageant, une suspension de gel P300 dont la concentration est de 33 mg/ml.

PBS = t ampon salin phosphat~ (phosphate-buffered salin). PN ~ polynucl6aire neutrophile.

INFLAMMATION PAR LE POLYACRYLAMIDE 403

b) Traitement des souris. Sous hotte h flux d'air laminaire stdrile, les souris (8 lots de 10) sont anesthd-

sides ~ l'dther ; leur dos est rasd et ddsinfect6 h l'alcool iodd. Une incision trans- versale est pratiqu6e au niveau de la nuque et, par celle-ei, est introduite une fine canule pour administration buccale, ~moussde h son bout (longueur = 50 mm, diam6tre = 15 mm). Un d6bridement sous-cutand est ainsi rdalisd par mouvements antdropostdrieurs et latdraux de la canule. On injecte 4 ml de la suspension de P300 dans la cavitd ainsi crdde, qui est ensuite close ~ l'aide d'agrafes chirurgicales stdriles. On masse finalement le dos des animaux afin d'6taler le gel clans l'ensemble du plan sous-cutand dorsal.

3) Pr~Idvemenl du granulome.

A chacun des temps 3, 6, 24, 48, 72, 96, 120 et 168 h apr6s l 'administration du gel, les souris de chaque lot sont tudes par exsanguination, et le sang est recueilli sur citrate trisodique de concentration finale 3,8 %0. Apr~s ddsinfection de la rdgion dorso-sacrde h l'alcool iodd, un volet cutand est obtenu grgice h une incision transversale au niveau du sacrum et deux incisions latdrales remontant jusqu'aux creux axilaires. Le plan sous-cutand ainsi ddcouvert permet de prdlever le granulome stdrilement h l'aide d 'une spatule. Celui-ci est alors mis en suspension darts un volume connu de PBS maintenu ~ 4o C. Les rares exsudats contenant des globules rouges sont dliminds.

4) Examen biochimique el Mmalologique.

Apr~s sddimentation du gel pendant 20 min, le surnageant est pr61evd. Celui-ci renferme des leucocytes qui ont migr6 au niveau du site inflammatoire, La numd- ration des cellules viables est effect@e en cellule de Malassez ~ l'aide de bleu trypan. La formule leucocytaire est dtablie apr6s centrifugation pendant 2 min

1 000 tours/min, d 'une partie aliquote contenant de 105 ~ 2 x 105 61dments dans une cytocentrifugeuse (Cytospin Shandon) ; on effectue la fixation et la coloration par le May-Griinwald-Giemsa.

De plus, le gel sddimentd prdlevd sur chaque animal est dlud sur une petite colonne (hauteur = 100 mm, diam6tre = 25 mm) ~ l'aide de PBS auquel on a ajoutd le surnageant rdcupdrd apr6s centrifugation des cellules. L'dluat obtenu est ensuite concentrd par ultrafiltration sur tamis moldculaire dont le seuil d'exclu- sion est de 10 000 daltons (Amicon YM 10). La teneur en protdines de l'dluat est ddtermin6e en dquivalent albumine bovine par la mdthode de Lowry [7]. Les rdsul- tats exprimds correspondent ~ la moyenne des rdsultats observds sur 10 animaux. Le test de Student a dtd mis en oeuvre pour la comparaison des moyennes.

L'analyse dlectrophordtique des protdines des plasmas et des dluats des diffd- rents lots est rdalisde sur acdtate de cellulose en tampon pH 8,6-9 (Electra H R Buffer, ref. 5805 Helena), pendant un temps de migration de 30 rain sous 180 V ; la rdvdlation des protdines est faite par le rouge pouceau.

La numdration et la formule sanguines ainsi que les analyses immunodlectro- phordtiques des plasmas sont effectudes selon les mdthodes habituelles. L'dlectro- phor6se des protdines des plasmas et des dluats sur des plaques de gel de polyacry- lamide de concentration croissante (4,5 ~ 19,5 %) est aussi rdalisde (migration verticale pendant 3 h 30 min sous un courant de 50 mA apr6s ddnaturation des prot6ines selon la mdthode de Fairbanks [2]).

Le taux de fibrinog~ne plasmatique est dvalud par floculation et pesde de la fibrine suivant la mdthode de Foster et Whipple modifide par Schultze et Nicholo [9].

Enfin, un protocole d'isodlectrofocalisation est rdalisd sur les plasmas et les exsudats inflammatoires dans une gamme de p h i comprise entre 3,5 et 9,5 (migra- tion pendant 2 h sous 15 mA, 15 W e t voltage final de 1300 V). Parall61ement, les memes examens biochimiques, hdmatologiques et immunologiques sont effectuds sur des prdl6vements sangums d'animaux non inoculds.

RI~SULTATS

1 . - - Toldrance du gel P300.

La tol6rance du P300 est parfaite, et cela bien au-delfi de la dur~e de l'exp~rimentation d~crite ici. La survie des animaux et leur compor- tement ne sont pas modifies ; aucune toxicit~ apparente n'a ~te constat~e. En outre, aucune n6crose cutan~e et aucune infection n'ont 6t~ observ~es.

2. - - Numdration et formule leucocytaire.

La formule sanguine reste tr~s stable au cours de l'inflammation, pr6sentant en moyenne 85 % de lymphocytes, 13 % de polynucl6aires et 2 % de monocytes. De plus, des animaux de 8 semaines pr6sentent en g6n6ral 3 500 leucocytes par ~1 de sang, bien qu'une assez large disper- sion des chiffres apparaisse.

On ne note, au cours du temps, ni monoeytose ni 6osinophilie.

3 . - - Variation des populations cellulaires dans les granulomes.

La figure 1 et le tableau I pr~sentent au cours du temps les variations qualitatives et quantitatives des leucocytes presents dans le granulome : polynucl6aires neutrophiles (PN), macrophages, polynucl6aires de colo- ration 6osinophile.

TABLEAU I. - - l~.volution quantitat ive des leucocytes darts le granulome et re lat ivement ~. la circulation g~n~rale.

Temps apr~s l ' inoculat ion 3

0,65 • Leucocytes t o t aux conte- nus dans le granulome x 10 e

Macrophages du granulome Monocytes circulants

Poly. neu t ro granulome Poly. neut ro circulants

6 24

2 • 4 ,9 •

0,046

--0,7

48

1 19,1

2 2,26

4 ,5 • 5 ,1 :k l ,4

21,4

1,4

72

4,8=k

26,8

1,26

! 9(

6r

26

404 F. HI'RODIN ET COLL.

120 168

: =i=', 6, ,4

7,2 39,8

0,4 I 0,29

Les r appor t s concernant les leucocytes mono- et polynuc166s sont 6tablis sur la base de la numera t ion et de la formule leucocytaire sanguine suivantes : 3 500 globules blancs par ~1, 13 % de PN, 2 % de monocytes ; v o l u m e = 2 m].

Les PN forment la presque totalit~ des cellules pr~sentes dans les pre- mieres heures aux c6t~s de quelques rares macrophages. Au 5~ jonr, plus de 80 % des celluIes contenues dans le gel sont des macrophages. Sur le

INFLAMMATION PAR LE POLYACRYLAMIDE 405

1 0 0 '

9 0 .

z 8 0 , uJ

7 0 .

6 0 .

LU 5 0 '

I--

>" 4 0 . u

0 3 0 . 0

2 0 . iJJ " 1 0 .

I I Q

~ e : 3 6 2 4 4 8 7 2 9 6 1 2 0 1 6 8

H E U R E S

FIG. 1. - - l~oolution qualilatioe des leucocytes dans le granulome.

�9 = polynuclda i res neut rophi les ; �9 = polynuel~aires de co lora t ion 6osinophile ; �9 = macrophages .

Les va l eu r s sont affect~es de leurs 6car ts types . Les i ndex de s ignif icat ion s t a t i s t i que conee rnen t l ' 6vo lu t ion des maerophages t r a i tde isoldment par un t e s t c o m p a r a n t les moyennes in te r - jours selon Student . Chaque i n d e x 6value la s ignif lcat ivi t~ de la diffdrenee, pour un jour considdr~, en t re le pou rcen tage m o y e n des mac rophages de ce jour e t celui du jour s u i v a n t :

* = diff6rence s ignif lcat ive au r i sque P ~< 0 ,05 ; ** = difffirenee s ignif icat ive au r isque P ~< 0,01 ; *** = diffdrenee s ignif leat ive au r i sque P ~< 0,001.

De plus, une recherche de r6gress ion lin~aire a 6t~ appliqufie h la courbe de l 'dvolu t ion des macro- phages dans le granulome. Si X repr6sente le t emps en jou r en Y le % de M, l ' ~qua t ion de la courbe de ee pourcen tage s 'dcr i t :

Y = 22,44 (log X) + 46,11 avec un coefficient de cor re la t ion = 0,986 et un r isque = 6 • 10 -e.

plan morphologique, ceux-ci sont h6t~rog~nes (vacuoles 6osinophiles, prolongements membranaires). A aucun moment ne sont observ6es de cellules g6antes.

On observe de plus, vers le 4~ jour, des polynucl6aires de coloration 6osinophile, lesquels consti tuent 15 % des cellules pr6sentes au 7~ jour, alors que les PN ont presque totalement disparu.

Aucune infiltration lymphocytaire n'est not6e. Le tableau I pr6sente en outre l '6volution des rapports entre, d 'une

part, les PN et les macrophages contenus dans le granulome et, d 'autre part, les cellules homologues respectives circulantes.

4 0 6 F . H I ' R O D I N E T C O L L .

4. - - V a r i a t i o n des protdines totales dans les granu lomes .

La figure 2 exprime l '6volution pond6rale, par souris, des prot6ines totales qui sont 61u6es dans 4 ml de P300 inocul6 par voie sous-cutan6e.

La courbe obtenue pr6sente une croissance exponentielle pendant les 48 premieres heures et a t te int un plateau ~ partir du 3~ jour. La valeur maximale obtenue au 7~ jour se maintient au-del& de la pr6sente dur~e d'exp6rimentation.

cn 3 0 " ="2_

< ' ~ 25 i - 0 O ( n I--

2 0 r r

W 1 5 , Z

- - 0

" ' ~ 1 0 . I-

O z

~ m 5 a.

I I I e L J!

3 6 2 4 4 8 7 2 9 6 1 2 0 1681

H E U R E~S

FIG. 2. - - l~volution quantitative des protdines totales retrouvdes dans le granulome.

Les va leurs son t affect6es de leurs 6car ts types . Chaque teneur m o y e n n e en prot6ine est compar6e s t a t i s t i q u e m e n t pour un jour consid6r6 h la moyenne du jou r s u i v a n t selon un tes t de S t u d e n t ;

* = diff6rence s ignif icat ive au r i sque P ~< 0,05 ; ** = diff6rence s ignif icat ive au r i sque P ~< 0,01 ; *** = diff6rence s ignif icat ive au r isque P <~ 0,001.

5. - - F3ectrophordses.

Les diff6rentes fractions prot6iques s6par~es par 61ectrophor~se des plasmas des animaux inocul~s et pr61ev6s apr~s 6, 24 et 120 h ne pr6sentent que de faibles variations. Notamment , les ~-globulines et le fibrinog~ne ne varient pas de fa~on significative au cours du temps. Quant ~ l 'albumine, son taux baisse 16g~rement chez les souris inocul6es. Le taux de fibrinog~ne plasmatique (taux t6moin : 4,1-4-0,6 g/l) pr6sente une 16g~re baisse apr~s 6 h d ' inflammation (taux : 3,3 4-0,5 g/l) puis revient ~ la valeur normale ou la d6passe meme entre la 24~ et la 120~ h.

Les protidogrammes des exsudats inflammatoires montrent des profils tr~s semblables entre eux et reproduisent de plus l 'ensemble des fractions

INFLAMMATION PAR LE POLYACRYLA1V[IDE 407

plasmatiques. Ils sont eependant tous plus riches en albumine (70 • % au lieu de 46,4i3 ,4 % dans le plasma); quant au fibrinog6ne, il repr6sente 12,3• % des prot6ines contenues dans le gel.

Comme l'indique la figure 3, les prot~inogrammes obtenus par iso~lec- trofocalisation des plasmas et des exsudats sont voisins.

I1 faut eependant noter les variations du taux d'une prot6ine de pHi 4,1• apparemment inexistante dans le plasma normal. Celle-ci est pr~sente ~ la 66 et ~ la 246 h e n quantit6 tr6s faible, plus importante la 966. Cette prot6ine est pr~sente dans l 'exsudat d6s la 66 h (en quantit6 6quivalente ~ celle du plasma ~ la 966 h) et son taux double ~ la 24~ h, puis triple ~ la 966 h.

FIG. 3. - - Protdinogrammes des plasmas et des exsudats oblenus par isodlectro[ocalisation

B e, B24 et B96 : d6p6ts des 61uats des gels prdlevds h la 6~, 24~ et 96~ h respectivr P6, P~a et Pg~ : plasmas t6moin h la 6~, 24~ et 96~ h respect ivement . PT = p lasma t6moin. ~- = p h i 4,1.

DISCUSSION

I1 a ~t~ constat6 une parfaite inocuit~ des billes de polyacrylamide ehez les souris utilis~es. Par contre, chez les souris C57BL/6, on note, dix jours environ apr6s l'inoculation de ~ Biogel P300 ~, dans les m~mes conditions, une r6action n~crotique locale.

Au plan cellulaire, le mod61e inflammatoire d~crit ici se caraet~rise par une infiltration monocytaire pr6dominante et pr~coce puisque, d6s la 246 h, plus de la moiti6 des cellules du granulome sont des maerophages.

Au eours des nombreuses experiences r6alis6es, nous n'avons jamais observ~ de lymphocytes au niveau du site inflammatoire. De plus, il faut remarquer que seules de rares billes pr6sentent des macrophages ~ leur surface. Cela a ~t6 d~j~ constat6 avec d'autres lots de ~ Biogel ~, [4].

408 F. HI'RODIN ET COLL.

Ces arguments permet tent d'affirmer que l ' inflammation cr66e par le P300 est non sp6cifique et n ' implique aucune prise en charge d 'un quel- conque antig6ne exog6ne par le syst~me lymphocytaire.

La pr6sence de P300 provoque une d6margination des monocytes p6riph6riques et/ou une st imulation pr6coce et intense des prog6niteurs macrophagiques, car la circulation g6n6rale ne peut fournir l 'ensemble des monocytes qui affluent vers les microbilles. La r6serve monocytaire sanguine est environ de 1,4)< l05 cellules; le granulome en renferme, d6s la 246, 2,7 x 10 e, soit 20 fois plus (tableau I). Quelle clue soit l'origine pr6coce des macrophages retrouv6s au niveau du site inflammatoire, il reste vrai que ces cellules mononuc166es s6cr6tent du CSF (colony-stimu- lating factor) [6].

Au demeurant, bien qu'il s'agisse d'une inflammation aseptique, l'absence de lymphocyte a 6t6 observ6e comme 6tant une notion clas- sique [7, 11]. I1 est possible que la fuite des monocytes sanguins vers le site inflammatoire explique l 'absence de monocytose. L'absence de lympho- cytose pourrai t ~tre expliqu6e par l'origine non antig6nique de la r6action inflammatoire.

En outre, les polynucl6aires ~ coloration 6osinophile qu'on voit appa- raitre au 4~ jour et qui consti tuent finalement entre 10 et 15 ~ de la popu- lation cellulaire du granulome, ne pr6sentent pas la morphologie typique de polynucl6aires 6osinophiles. I1 pourrait s'agir de polynucl6aires neutro- philes en voie de d6gradation ou de' polynucl6aires ayant ing6r6 des sub- stances 6osinophiles.

Au point de vue humoral, l ' identit6 des trac6s 61ectrophor6tiques des prot6ines plasmatiques et de celles du site inflammatoire assigne ~ ces derni~res une origine exsudative plasmatique. Le granulome renferme au 76 jour 25 mg de prot6ines, ce qui 6quivaut ~ la fuite de 22 % des pro- t~ines plasmatiques vers la r6gion sous-cutan6e (en est imant la vol6mie d'une souris de 30 g ~ 2 ml (1/15 de poids corporel) et sachant clue la prot6i- n6mie est de 55 mg/1 environ.

Paradoxalement, on ne retrouve pas les modifications qui affectent, classiquement, les constantes biochimiques lors d 'une r6action inflamma- toire aigu~ [8]. Cependant, une partie des globulines ~1 et ~ - - dont l 'aug- mentat ion dans le plasma 6tait a t tendue - - a quirt6 la circulation g6n6rale au profit de la zone inflammatoire. Cela est 6galement vrai de la fibrino- g6n6mie qui devrait ~tre notablement accrue [8] ; mais, dans ce cas, une fibrinolyse active pourrait masquer cette augmentation, prot6olyse qui peut ~tre rapport6e ~ l 'action du plasminog~ne et des prot6ases synth6ti- s6es in situ par les macrophages [13]. Au demeurant, une prot6ine, dont il reste ~ 61ucider la nature, semble caract6riser cette r6action inflamma- toire, t an t au niveau du plasma que du granulome ; son pHi est de 4,1.

Ce mod61e inflammatoire original rev~t un int6r~t technique particulier, celui de faciliter l '6tude du macrophage puisqu'il s61ectionne une popula- tion cellulaire constitu6e presque uniquement d'616ments de la lign6e monocytaire. Certes, une r6action inflammatoire p6riton6ale permet d'obtenir un nombre 61ev6 de macrophages, mais ceux-ci sont toujours

INFLAMMATION PAR LE POLYACRYLAMIDE 409

associ6s fi un pourcentage d 'au moins 5 % de lymphocytes dans les meil- leurs cas [12].

L'uti l isation de gel de diff6rentes porosit6s, c'est-~-dire dont les billes pr6sentent des 6chelles d'exclusion mol6culaire diff6rentes, permet t ra i t d ' induire une 6volution diff6rente, sur les plans qualitatifs et quanti tat ifs , des cellules et des prot6ines retrouv6es au niveau des granulomes. I1 a en effet d6j~ 6t6 montr6 que des r6actions inflammatoires induites par des billes de polyacrylamide de porosit6s diff6rentes, peuvent avoir, ~ dis- tance, des r6percussions diff6rentes. Ainsi, seules les r6actions inflamma- toires induites par des microbilles de porosit6 inf6rieure sont capables d ' induire une r6sistance significative ~ l ' infection par L. monocytogenes [5].

Les exp6riences en cours ont prouv6 derni~rement que des souris ainsi trait6es pouvaient, dans certaines conditions, pr6senter une r6sistance augment~e aux effets des radiations ionisantes.

RESUMi~

L'injection de microbilles de polyacrylamide par voie sous-cutan6e chez la souris permet d ' induire une r~action infiammatoire grace & laquelle il est possible de quantifier et de caract6riser les cellules inflammatoires ainsi que les substances pr6sentes darts le granulome. Dans ces conditions, il a 6t6 possible de suivre pendant 7 jours l '6volution de cette r6action inflammatoire. Celle-ci se caract6rise par une infiltration polynucl6aire et no t ammen t macrophagique pr6coce, sans participation lymphocytaire . A une augmenta t ion de la concentrat ion des prot6ines de l 'exsudat inflam- matoire est associ6e l 'apparit ion, dans le plasma, d 'une prot~ine de p h i 4,1 -4-0,2 non d6tect6e dans le s6rum normal.

MOTS-CLI~S " Inflammation, Macrophage, Granulocyte polynucl6aire; Prot~ines inflammatoires.

REMERCIEMENTS

Nous remercions Madame C. Maczuka pour son aide dans la prdparation du manuscrit et MM. J. D. Laval et C. Pasquier qui, ~ des titres divers, nous ont aid6s au cours de ce travail.

BIBLIOGRAPHIE

[1] Chemical messengers of the inflammatory process (g. C. Houck), Else- vier/North-Holland, Amsterdam, 1979.

[2] FAmBANKS, G., STECK, T. L. & WALLACH, D. F. H., Electrophoretic analysis of the major polypeptides of the human erythrocyte membrane. Bio- chemistry, 1971, 10, 2606-2617.

[3] FnuvE, R. M., FONTAN, E. & HEVIN, ]5., Remote control of macrophage activation: influence of a nonspecific inflammation, in (( Phagocytosis, past and future ), (M. L. Karnovsky & L. Bolis) (p. 295). Academic Press, London, New York, 1982.

410 F. HI 'RODIN ET COLL.

[4] FAUVE, R. M. & JUSFORGUES, H., A new technique to obtain macrophages from subcutaneous granuloma. J. immunol. Methods, 1983 (sous presse).

[5] FONTAN, E. & FAUVE, R. M., Inflammation et r6sistance antibact6rienne. - - III. Influence d'une r6action inflammatoire induite par l'injection de gels de polyacrylamide sur la r6sistance des souris ~ 1 infection par Listeria monocylogenes. Ann. Immunol. (Inst. Pasteur), 1983, 1340 (sous presse).

[6] GOLDE, D. W., FINLEY, T. W. & CLINE, M. J., Production of colony-stimu- lating factor by human macrophages. Lancet, 1972, II, 1397-1399.

[7] Inflammation (J. R. Vane & S. H. Ferreira), Springer-Verlag, Berlin, 1978. [8] KOF, A., Acute phase proteins, in ~c Structure and function of plasma pro-

teins ~ (A. C. Allison) (p. 73). Plenum Press, New York, 1974. [9] LOISELEUR, J., Dosage de fibrinog6ne par la m6thode de Foster et Whipple,

in ~ Techniques de laboratoire, II ~ (p. 25-27). Masson, Paris, 1954. [10] LOWRY, O. H., ROSEBROUGH, N. J., FAnR, A. L. & RANDALL, R. J., Protein

measurement with the folin phenol reagent. J. biol. Chem., 1951, 193, 265-275.

[11] RYAN, G. B. & MAJNO, G., Acute inflammation. Amer. J. Pathol., 1977, 86, 185-274.

[12] The cell biology of the inflammation (G. Weissmann). Elsevier/North-Hol- land, Amsterdam, 1980.

[13] UNKELESS, J. C., GORDON, S. & REtort, E., Secretion of plasminogen activator by stimulated macrophages. J. exp. Med., 1974, 139, 834-850.