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Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XVI - n° 8 - octobre 2012 231 dossier thématique Adénomes hypophysaires La chirurgie endoscopique des adénomes hypophysaires Endoscopic endonasal approach for pituitary adenomas Stephan Gaillard, Michel Dupuy, Saad Bennis, Sorin Aldea, Bertrand Baussart, Étienne Mireau, Luc Foubert* points forts Highlights » La prise en charge des adénomes hypophysaires est obligatoirement multidisciplinaire, associant des endocrinologues, des radiologues et des neurochirurgiens habitués à cette pathologie. » L’abord endoscopique endonasal transsphénoïdal est devenu aujourd’hui la voie d’abord de référence pour l’exérèse des adénomes hypophysaires. » Les résultats de cette chirurgie et le taux de complications dépendent fortement de l’expérience du neurochirurgien. Mots-clés : Adénome hypophysaire – Endoscopie transsphénoïdale. The treatment of pituitary adenomas needs multidisciplinary collaboration between endocrinologist, radiologist and neurosurgeon. The endoscopic endonasal approach for pituitary surgery is now the new gold standard. Pituitary surgery must be performed by an experienced endocrine neurosurgeon. Keywords: Pituitary adenomas – Transsphenoidal endoscopic endonasal approach. L’ utilisation de l’endoscopie dans la chirurgie hypophysaire n’est pas si récente. En effet, Gérard Guiot, qui a créé le service de neuro- chirurgie à l’hôpital Foch en 1954, a été le premier à utiliser un endoscope dans la chirurgie hypophysaire en 1962 (1). Toutefois, à l’époque, le manque d’instru- ments adaptés ne permettait pas d’envisager d’utiliser l’endoscope pour autre chose que pour une simple observation. Il a fallu attendre plus de 30 ans pour que la première série de malades opérés d’un adénome hypophysaire par voie endoscopique soit rapportée par Hae-Dong Jho en 1997 (2). Les 10 années suivantes ont permis le développement progressif des techniques endoscopiques et la création d’instruments dédiés et de systèmes vidéo de plus en plus performants. Actuellement, l’abord endoscopique endonasal dans la chirurgie des adénomes hypophysaires est devenu le nouveau gold standard et a remplacé l’abord trans- sphénoïdal sous microscope, qu’il soit sous-labial ou narinaire (3). Au sein de l’activité de neurochirurgie crânienne conventionnelle, la chirurgie hypophysaire tient une place à part. Elle est caractérisée par un espace de tra- vail très réduit et une gestuelle un peu particulière, ce qui la rend encore plus sensible à l’expérience du neurochirurgien. Il y a une longue tradition de chirurgie de l’hypophyse et de la base du crâne dans notre service, et, entre 1960 et 2006, 6 213 patients ont été opérés d’adé- nomes hypophysaires par voie transsphénoïdale sous microscope par les différents neurochirurgiens qui se sont succédés (4). Depuis 2006, nous avons abandonné l’utilisation du microscope au profit de l’abord endos- copique endonasal transsphénoïdal, et, à ce jour, plus de 1 000 patients ont été opérés selon cette technique. Technique opératoire L’immense majorité (plus de 99,5 %) des adénomes hypophysaires est opérée par voie transsphénoïdale endoscopique endonasale. Les indications d’opération par voie intracrânienne sont devenues exceptionnelles (moins de 0,5 % des cas) [5-6]. L’IRM hypophysaire préopératoire est essentielle et doit être de qualité optimale afin d’avoir un bilan ana- tomique précis pour évaluer au mieux les chances de guérison postopératoire, ce qui va conditionner les * Service de neuro- chirurgie, hôpital Foch, Suresnes.

LA FIN DE VIE DE SANTÉ ? L’ ET LOI LÉONETTI - … · lement à la surveillance métabolique et endocrinienne et au risque de diabète insipide postopératoire transi - toire

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Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XVI - n° 8 - octobre 2012 231

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Adénomes hypophysaires

LA GARDE À VUE PEUT-ELLE CONCERNER UN PROFESSIONNELDE SANTÉ ?

SOINS AUX ENFANTS : DROITS ET DEVOIRS

DU MÉDECIN

LA FIN DE VIE ET LOI LÉONETTI

LE CONSENTEMENT ÉCLAIRÉ RELATION ENTRE LE MÉDECIN ET SON ASSUREUR

RESPONSABILITÉ INDIVIDUELLE ET PARTAGÉE

CONTENTIEUX ET SECRET PROFESSIONNEL

LE SECRET MÉDICAL

CONDUITE À TENIR LORS D’UNE PROCÉDURE

LE CONTENTIEUX DE LA RESPONSABILITÉ

MÉDICALE

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La chirurgie endoscopique des adénomes hypophysairesEndoscopic endonasal approach for pituitary adenomasStephan Gaillard, Michel Dupuy, Saad Bennis, Sorin Aldea, Bertrand Baussart, Étienne Mireau, Luc Foubert*

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ts » La prise en charge des adénomes hypophysaires est

obligatoirement multidisciplinaire, associant des endocrinologues, des radiologues et des neurochirurgiens habitués à cette pathologie.

» L’abord endoscopique endonasal transsphénoïdal est devenu aujourd’hui la voie d’abord de référence pour l’exérèse des adénomes hypophysaires.

» Les résultats de cette chirurgie et le taux de complications dépendent fortement de l’expérience du neurochirurgien.

Mots-clés : Adénome hypophysaire – Endoscopie transsphénoïdale.

The treatment of pituitary adenomas needs multidisciplinary collaboration between endocrinologist, radiologist and neurosurgeon.

The endoscopic endonasal approach for pituitary surgery is now the new gold standard.

Pituitary surgery must be performed by an experienced endocrine neurosurgeon.

Keywords: Pituitary adenomas – Transsphenoidal endoscopic endonasal approach.

L’ utilisation de l’endoscopie dans la chirurgie hypophysaire n’est pas si récente. En effet, Gérard Guiot, qui a créé le service de neuro-

chirurgie à l’hôpital Foch en 1954, a été le premier à utiliser un endoscope dans la chirurgie hypophysaire en 1962 (1). Toutefois, à l’époque, le manque d’instru-ments adaptés ne permettait pas d’envisager d’utiliser l’endoscope pour autre chose que pour une simple observation. Il a fallu attendre plus de 30 ans pour que la première série de malades opérés d’un adénome hypophysaire par voie endoscopique soit rapportée par Hae-Dong Jho en 1997 (2). Les 10 années suivantes ont permis le développement progressif des techniques endoscopiques et la création d’instruments dédiés et de systèmes vidéo de plus en plus performants.Actuellement, l’abord endoscopique endonasal dans la chirurgie des adénomes hypophysaires est devenu le nouveau gold standard et a remplacé l’abord trans-sphénoïdal sous microscope, qu’il soit sous-labial ou narinaire (3).Au sein de l’activité de neurochirurgie crânienne conventionnelle, la chirurgie hypophysaire tient une place à part. Elle est caractérisée par un espace de tra-vail très réduit et une gestuelle un peu particulière,

ce qui la rend encore plus sensible à l’expérience du neurochirurgien.Il y a une longue tradition de chirurgie de l’hypophyse et de la base du crâne dans notre service, et, entre 1960 et 2006, 6 213 patients ont été opérés d’adé-nomes hypophysaires par voie transsphénoïdale sous microscope par les différents neurochirurgiens qui se sont succédés (4). Depuis 2006, nous avons abandonné l’utilisation du microscope au profit de l’abord endos-copique endo nasal transsphénoïdal, et, à ce jour, plus de 1 000 patients ont été opérés selon cette technique.

Technique opératoire

L’immense majorité (plus de 99,5 %) des adénomes hypophysaires est opérée par voie transsphénoïdale endoscopique endonasale. Les indications d’opération par voie intracrânienne sont devenues exceptionnelles (moins de 0,5 % des cas) [5-6].L’IRM hypophysaire préopératoire est essentielle et doit être de qualité optimale afin d’avoir un bilan ana-tomique précis pour évaluer au mieux les chances de guérison postopératoire, ce qui va conditionner les

* Service de neuro­chirurgie, hôpital Foch, Suresnes.

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Adénomes hypophysaires

indications opératoires. La sémiologie radiologique de cette région est très riche et nécessite une bonne habitude du radiologue.Les patients bénéficient d’une antibioprophylaxie et d’une supplémentation de l’axe corticotrope systé-matiques.Les patients sont opérés sous anesthésie générale par voie narinaire endoscopique unilatérale.Pour la chirurgie des adénomes, nous utilisons le plus souvent une voie transsellaire simple, sans faire de turbinectomie et en altérant le moins possible les muqueuses nasales, cela afin d’éviter le méchage postopératoire et, surtout, les complications rhino-logiques.Après avoir incisé la muqueuse septale au contact du rostre, une sphénoïdotomie est réalisée, qui permet d’aborder le sinus sphénoïdal. La pneumatisation plus ou moins importante de ce sinus peut nécessiter un fraisage du sphénoïde afin d’aborder le plancher de la selle turcique.

L’endoscopie permet d’avoir une meilleure information visuelle avec un champ de vision plus large que sous microscope.La selle turcique est alors ouverte, puis la dure-mère de la selle est incisée, ce qui permet de visualiser l’hypo-physe et l’adénome. Selon les cas, la visualisation de l’adénome peut être évidente ou bien, au contraire, il peut être nécessaire d’explorer le parenchyme hypophy-saire à la recherche d’un micro-adénome millimétrique, comme dans certains cas de maladie de Cushing.L’objectif optimal est de pratiquer l’exérèse complète de l’adénome, tout en respectant au mieux le parenchyme hypophysaire normal.En fin d’intervention, le plancher sellaire est reconstruit à l’aide d’un fragment d’os issu du rostre, le septum est remis en place, et, dans l’immense majorité des cas, il n’y a pas de méchage narinaire.L’intervention par voie transsphénoïdale endoscopique dure en moyenne 30 à 45 minutes. La durée de l’hospita-lisation est de 3 à 4 jours. Cette durée est liée essentiel-lement à la surveillance métabolique et endocrinienne et au risque de diabète insipide postopératoire transi-toire. Les modalités de l’intervention sont strictement consignées dans le compte-rendu opératoire, de façon à aider l’interprétation radiologique des IRM de contrôle.

Consignes postopératoires pour les patients

Les patients sont informés des complications poten-tielles (tableau) et des suites opératoires. Après l’opé-ration, sur le plan local, l’impression du patient va être celle d’un “gros rhume”, avec :

✓ quelques céphalées modérées ; ✓ une sécheresse narinaire et une impression de nez

bouché accompagnées d’une hyposmie durant, le plus souvent, une quinzaine de jours ;

✓ quelques écoulements narinaires unilatéraux muco-sanglants de faible abondance, correspondant à la cica-trisation muqueuse.Il est demandé aux patients, après l’opération :

✓ de ne pas prendre l’avion pendant 2 à 3 semaines. Surtout s’il s‘agissait d’un adénome volumineux avec expansion suprasellaire ou s’il y a eu une rhinorrhée cérébrospinale pendant l’intervention ;

✓ de ne pas se moucher pendant 2 à 3 semaines et de faire des lavages narinaires doux au sérum physiolo-gique dès le huitième jour postopératoire, sauf en cas de rhinorrhée peropératoire ;

✓ de ne pas immerger la tête dans l’eau (piscine, bai-gnade) pendant 6 à 8 semaines ;

Tableau. Résumé des résultats et complications de la chirurgie endoscopique des adénomes hypophysaires. Série Foch (S. Gaillard).

Résultats endocriniens Rémission (%)

Adénomes corticotropes Micro-adénomeMacro-adénomeIRM “normale”Première interventionRéintervention pour récidive

90,484,668

83,468,8

Acromégalie Micro-adénomeMacro-adénome

85,7

60,18

ProlactinomeMicro-adénomeMacro-adénome

8969

Adénomes non sécrétantsExérèse complète

72

Complications de la chirurgie endoscopique des adénomes hypophysaires

(%)

Mortalité 0

Plaie vasculaire 0

Hématome postopératoire 0,31

Diabète insipide transitoire (quelques jours) 12

Diabète insipide prolongé 1,45

Insuffisance antéhypophysaire induite par la chirurgie 3,8

Méningite 1,24

Rhinorrhée postopératoire 0,83

Complications rhinologiques 0,2

Épistaxis 0,9

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La chirurgie endoscopique des adénomes hypophysaires

✓ de ne pas faire de sport violent pendant 1 mois.L’arrêt de travail est fonction du type de travail, et va de 10 jours à 1 mois.

Avantages de l’abord endoscopique (7-9)

Par rapport à un abord sous microscope (qu’il soit nari-naire ou sous-labial), l’abord transsphénoïdal endosco-pique endonasal permet un champ de vision beaucoup plus large, et donc, une zone de travail également plus importante. Cela permet de réaliser des voies endosco-piques endonasales dites étendues pour l’exérèse d’exten-sions intracrâniennes de certains adénomes, de certaines tumeurs intracrâniennes (craniopharyngiomes, ménin-giomes, etc.), et également pour l’exérèse de tumeurs de la base du crâne (chordomes, chondrosarcomes, etc.).La qualité de vision est également bien meilleure que sous microscope, à la condition qu’il n’y ait pas de sai-gnement opératoire gênant. Cela impose donc d’avoir les moyens d’une hémostase parfaite et des conditions opératoires d’installation et d’anesthésie optimales. L’exploration intra- et suprasellaire est bien plus large et de meilleure qualité que sous microscope. Cela permet de mieux contrôler le caractère complet de l’exérèse de l’adénome.Contrairement au microscope, qui ne permet qu’une vision monoaxiale, l’endoscopie permet de voir latéra-lement (avec un endoscope à 30°), et donc, de mieux apprécier les éventuelles invasions de la paroi interne du sinus caverneux, et parfois, de faire l’exérèse de ces invasions.L’utilisation de l’endoscopie a permis de diminuer significativement la morbidité rhinologique de cette chirurgie, et d’augmenter le confort postopératoire des patients (10).

Facteurs influençant le résultat de cette chirurgie

Le caractère invasif de l’adénome Bien que certaines invasions durales puissent parfois être enlevées, ce qui permet la guérison du patient, ceci n’est pas toujours le cas, notamment au niveau du sinus caverneux.Certains adénomes agressifs envahissent également les structures intracrâniennes visuelles et artérielles, empêchant l’exérèse complète. On se limite dans ces cas à une exérèse partielle la plus large possible complétée par un traitement médical ou une radio-thérapie selon les cas.

La consistance de l’adénomeEn cas d’adénome fibreux, voire fibrohémorragique, la dissection est plus difficile, surtout s’il est volumineux. Dans certains cas de volumineux macro-adénomes non sécrétants fibreux, nous préférons souvent réaliser une exérèse en 2 temps, qui comporte moins de risque pour le patient qu’une exérèse en 1 temps par voie endoscopique étendue.

La visibilité de l’adénome à l’IRM Le problème de la visualisation de l’adénome se pose dans la maladie de Cushing, puisque, dans environ 40 % des cas, celui-ci n’est pas clairement visible sur l’IRM. Il y a dans la littérature un débat sur l’influence de la visualisation de l’adénome sur l’IRM sur le résul-tat de la chirurgie. Dans notre expérience, l’absence d’adénome visible à l’IRM diminue significativement les chances de guérison dans la chirurgie de la maladie de Cushing.

L’expérience du neurochirurgien Depuis longtemps, il est admis que l’expérience du neuro chirurgien est un des principaux facteurs influen-çant les résultats de la chirurgie des adénomes hypo-physaires et le taux de complications (11-12).C’était vrai pour la chirurgie transsphénoïdale sous microscope et c’est toujours le cas pour l’abord endos-copique, d’autant que cette technique demande une gestuelle particulière et une habitude à la vision endos-copique, qui n’est pas stéréoscopique.Si l’on tient compte de la courbe d’apprentissage, il est raisonnable de penser que, pour acquérir et maintenir une expérience suffisante, le seuil d’activité minimale pour un neurochirurgien dans ce domaine est d’envi-ron 50 interventions hypophysaires endoscopiques par an.

Le saignement peropératoire La chirurgie hypophysaire endoscopique est peu hémorragique ; toutefois la zone de travail est, pour le neurochirurgien, très réduite, souvent de moins de 1 centimètre. De ce fait, le moindre saignement dans cette zone, même de faible volume, va perturber la qualité de vision et réduire les chances de guérison du patient. Plusieurs facteurs vont influencer ce saignement :

✓ L’installation du patient : il est indispensable d’éviter toute compression abdominale ou jugulaire pour dimi-nuer toute gêne au retour veineux et donc diminuer la pression veineuse au niveau du foyer opératoire.

✓ L’obésité du patient : elle entraîne une hyperpression veineuse.

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Adénomes hypophysaires

✓ La présence d’un sinus veineux intercaverneux médian, qui va entraîner un saignement veineux de faible abondance mais continuel pendant tout le temps de l’exploration intrasellaire, altérant la qualité de cette exploration.

✓ Les conditions anesthésiques (13) : il est primordial que l’anesthésiste soit très habitué à cette chirurgie et offre au neurochirurgien des conditions optimales de pression artérielle et de pression veineuse, notamment pour les patients obèses, cas fréquent dans la maladie de Cushing.

Indications, résultats et complications (tableau)

L’utilisation de l’endoscopie dans la chirurgie des adé-nomes hypophysaires n’a pas radicalement modifié les indications chirurgicales. Elle a permis de réduire encore plus les indications de voie intracrânienne. Actuellement, l’immense majorité (plus de 99,5 %) des adénomes hypophysaires est opérée par voie endosco-pique endonasale transsphénoïdale, car l’endoscopie permet l’exérèse de la plupart des expansions extra-sellaires des adénomes, à l’exception des expansions latérales en dehors de la carotide.

Adénomes à prolactineLes prolactinomes sont les plus fréquents et repré-sentent 40 à 45 % des adénomes hypophysaires. Ce sont les seuls pour lesquels il existe un traitement médical efficace et peu contraignant, et donc une alternative à la chirurgie. Cela explique que les prolactinomes sont passés de 35 % des adénomes opérés dans notre service en 2000 à 15 % aujourd’hui.Toutefois, il est essentiel de bien informer les patients que ces traitements médicaux sont des traitements freinateurs et nécessitent donc une prise de longue durée.L’IRM hypophysaire est très importante dans l’évalua-tion des chances de guérison chirurgicales. Les critères nécessaires pour proposer une exérèse chirurgicale sont d’avoir une parfaite visualisation du micro-adé-nome, avec des limites bien nettes entre l’adénome et l’hypophyse saine, et, surtout, l’absence d’invasion, notamment au niveau des sinus caverneux. Si ces condi-tions sont réunies, alors les 2 possibilités thérapeutiques (médicale et chirurgicale) doivent être proposées au patient. Dans notre expérience, les patients rencontrent en consultation l’endocrinologue et le neurochirurgien, et après une période de réflexion peuvent exprimer leur préférence.

Il est important de ne plus considérer que le traitement de première intention doit être médical, et que le trai-tement chirurgical devrait être réservé aux échecs ou aux cas de mauvaise observance du traitement médical. Car nous savons maintenant qu’un traitement médi-cal prolongé entraîne un remaniement de l’adénome dont les limites avec l’hypophyse saine deviennent moins nettes, ce qui a pour conséquence de diminuer significativement les chances de guérison postopé-ratoire. Il faut donc bannir l’attitude consistant à pres-crire d’emblée un traitement médical systématique sans information des patients et à ne leur proposer une chirurgie que lorsque, après plusieurs mois ou années, ils souhaitent ne plus prendre de traitement médical. Les résultats chirurgicaux sont influencés par la taille de l’adénome (meilleurs pour les micro-adénomes) et par le taux d’hyperprolactinémie initial.

Adénomes corticotropesL’exérèse chirurgicale du micro-adénome cortico-trope reste aujourd’hui le traitement de référence de la maladie de Cushing. Dans environ 40 % des cas de maladie de Cushing, l’IRM ne permet pas de voir clai-rement l’adénome hypophysaire ; toutefois, l’absence de traitement médical simple et efficace fait retenir, le plus souvent, l’indication chirurgicale d’exploration hypophysaire dans ces cas-là ; même si les chances de guérison sont un peu moins bonnes. Dans cer-tains cas très sévères de maladie de Cushing, il peut être préférable de mettre le patient sous traitement anticortisolique avant l’opération pour diminuer la morbidité générale.

Adénomes somatotropesLe contrôle hormonal des patients acromégales n’est pas toujours simple à obtenir. Bien qu’il existe un trai-tement médical par analogues de la somatostatine, l’efficacité de ce traitement, ses effets indésirables et ses modalités d’administration font que l’exérèse chirurgi-cale de l’adénome doit être privilégiée chaque fois que possible, en première intention. Toutefois, près de 50 % des acromégales devront bénéficier d’une stratégie thérapeutique mixte (chirurgie + traitement médical ± radiothérapie).L’intérêt d’une préparation préopératoire avec les ana-logues de la somatostatine a fait l’objet d’une littéra-ture dense et controversée. Dans notre expérience, il n’y a aucun intérêt, en termes de taux de rémission, à prescrire aux patients un traitement préopératoire par analogues de la somatostatine. Les résultats prélimi-naires de l’étude SAPORO (non encore publiés), vont également dans ce sens. En revanche, il est établi qu’une

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La chirurgie endoscopique des adénomes hypophysaires

telle préparation préopératoire peut avoir un intérêt sur le plan général pour des acromégalies ayant un important retentissement cardiorespiratoire.

Adénomes non sécrétants La plupart du temps, les adénomes non secrétants (qui sont, pour 80 % d’entre eux, des adénomes gonado-tropes) sont révélés par des troubles visuels et une insuf-fisance hypophysaire sur un ou plusieurs axes. Dans ces cas, l’indication chirurgicale est retenue en l’absence de comorbidité majeure. S’il y a une insuffisance cor-ticotrope préopératoire, elle doit, bien entendu, être supplétée avant l’intervention. On constate de plus en plus de découvertes fortuites d’adénomes non sécrétants sur des IRM réalisées pour d’autres raisons. Dans ces cas, l’indication chirurgicale est fonction du risque visuel à moyen terme, c’est-à-

dire du rapport entre la taille de l’adénome et l’âge du patient. En l’absence de comorbidité sévère, la tendance est de proposer une exérèse chirurgicale de l’adénome avant la survenue des troubles visuels.

Apoplexie adénomateuseDans le cadre d’une apoplexie adénomateuse, l’indication chirurgicale est formelle lorsqu’il y a un retentissement visuel chiasmatique (baisse de l’acuité visuelle, altération campimétrique). Lorsqu’il n’y a qu’une paralysie oculomotrice, l’indication chirur-gicale est plus discutable, car, le plus souvent, cela correspond à la nécrose de l’adénome envahissant le sinus caverneux, et il n’est pas prouvé que la chirur-gie améliore formellement la récupération de cette atteinte oculomotrice, qui, assez souvent, se fait spontanément. ■

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