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Apollonius, le 20.04.2016
La Papesse, la Pances ou Isis...
Ce deuxième arcane plus souvent appelé La Papesse apporte un
enrichissement de la pensée, pour qui fait effort, ainsi que
révélation des choses cachées. Elle signifie aussi la discrétion ou
encore les intentions secrètes.
Cette lame dans le tarot de Jean Dodal (Lyon 1701) porte le nom
de Pances. Elle nous montre une femme couronnée d'une tiare
dont on ne voit que deux couronnes, alors que sur le Noblet on
voyait nettement les trois. On peut penser que le créateur du
Dodal a voulu affirmer l'importance du nombre deux. La Papesse
tient un livre ouvert sur ses genoux. Son coude gauche s'appuie
sur un socle parallélépipède, peut-être l'accoudoir du siège sur
lequel elle est assise.
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Jean Dodal a appelé cette lame la Pances. il ne s'agit
certainement pas d'une faute d'orthographe ou d'une erreur de
gravure. Certes, à première vue, il s'agit d'une papesse (on peut y
voir le souvenir de la papesse Jeanne) ou d'un pape féminin
indiquant, quoi qu'il en soit, le haut sommet de la prêtrise.
Si le Bateleur correspondait à Keter, la première séphira, on peut
logiquement faire correspondre la Papesse avec la deuxième, la
Sagesse Hokhmah qui pourrait tout aussi bien se nommer la
Pensée (ou les pensées).
Par ailleurs, le mot "pances" pourrait aussi évoquer un "pan",
autrement dit une surface plane, donc un travail sur deux
dimensions. Derrière la papesse, en effet, un "pan" de tissus, qui
semble accroché au mur par ses deux extrémités supérieures et
s'enroule sur les côtés, est peut-être en partie ce qui lui a donné
son nom.
Dans le Tarot ancien de Marseille , c'est la lame n° 2. La
Papesse cache sous un manteau bleu (le spirituel), à col et
fermoir jaunes, sa longue robe rouge (la matière primordiale) sur
laquelle se croisent deux cordons jaunes, symbole de la force de
l'Esprit qui ne veut pas encore se manifester au-dehors. La tête
porte une tiare à 3 niveaux (dans le tarot de Dodal) et repose sur
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une étoffe blanche (signe de nécessaire pureté à
l’accomplissement de l’œuvre).
Comme le bateleur est prêt à recevoir une plus haute révélation. Il
doit affronter la gardienne du seuil : les grands mystères ne
peuvent être dévoilés qu’aux initiés certains, avec mesure, avec
prudence et patience.
Il est impossible de revenir en arrière et vivre comme avant. Le
visage de la Papesse est fermé tandis qu’elle tient le Livre ouvert.
Elle porte une tiare à double couronne (monde sensible et monde
intellectuel). Elle fait face au bateleur et l’invite à délaisser le
monde des apparences en donnant le Livre et sa compréhension.
Comme telle, elle symbolise absolument le signe zodiacal de la
Vierge, dans lequel l'hermétiste reconnaît le signe de la gestation.
l'Esprit est le Mercure et sa Force en est le Soufre rouge qui y est
sublimé, en attente de sa prochaine réincrudation. Le livre qu'elle
tient ouvert de couleur chair est à l'image de celui que tient la
Philosophie. C'est l'indice sur l'ouverture du métal, réalisée ici, en
puissance qui se trouve dans le bas-relief de Notre-Dame.
On retrouve le même axe oblique qui relie le chakra du cœur au
livre. La connaissance n’est pas manifestement, uniquement
intellectuelle. Le message apparaît ici comme évident. Derrière
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l’impératrice, en noir sur fond blanc, des lignes verticales (à
gauche de la carte) puis des lignes horizontales (à droite de la
lame), elles symbolisent respectivement, les forces spirituelles et
matérielles. On devine que ces tracés se rejoignent au niveau du
livre pour former l’équerre, symbole de rectitude, soit d’exigence
de la part du discipline, voire d’abnégation que demande
l’entreprise d’un tel travail.
Le linge blanc qui couvre la tête se décompose en 5 triangles
(L’Apprentissage et le Compagnonnage, passent par les 5 sens
du néophyte), le nombre 5 est répété 2 fois dans le col de la
papesse, ce qui ne peut plus être un hasard. Quant aux lignes du
livre 2 fois 8 soit 16 c’est à dire 7. La Papesse matérialise le
savoir par ces nombres 3, 5 et 7. Ce qui n’est pas sans rappeler
les enseignements de la Loge Bleue.
Dans la kabbale : La Papesse, deuxième lame du Tarot, est en
correspondance avec la deuxième lettre de l'alphabet hébreux, le
beith. Sa main gauche, qui tient le livre, est ouverte en forme de
beith. Elle est très grosse. C'est la clef graphique de cette lame.
Un daguesh (le point dans la lettre) est à peine suggéré par une
petite tache rouge comme un daguesh virtuel entre le pouce et
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l'index de la main. De l'ouverture de cette main sortent les six
premières lignes d'un texte.
D'autre part, nous pouvons observer un curieux grain de beauté,
bien marqué, placé sur la joue gauche de la Papesse. Cette joue
est encadrée par une coiffe suggérant le haut d'un beith tandis
qu'une sorte de barre, semblant fermer la cape du personnage,
suggère le trait horizontal inférieur de cette lettre.
Nous retrouvons là l'aphorisme de la Table d'Emeraude : "Ce qui
est en haut est comme ce qui est en bas".
Le livre tenu ouvert par la main gauche de la Papesse est donc la
Tora, mot qui signifie "enseignement", tandis que "main" se dit
yad qui signifie "connaissance". Le beith est aussi un nom
commun signifiant "maison", "tente", "demeure", "palais", "mère".
Le beith est donc à la fois la demeure de l'univers, le temple
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céleste et terrestre. Mes connaissances ne me permettent pas de
développer cet aspect hermétique.
Je constate simplement que la couleur bleue de l'intérieur, et
couleur d'or à l'extérieur (tel qu'on le verrait une fois roulé), le pan
de tissu placé derrière la Papesse évoque la Tente du ciel.
Dans le Tarot des Alchimistes , le personnage d'Isis gardienne
du sanctuaire marque le passage entre deux mondes, le réel et
l'imaginaire représentés par Lumière et ombre. L'image évoque
deux portes sans que l'on sache où est l'intérieur ni où est
l'extérieur, nous situant dans une zone d'échange possible en
forme d'entre-deux.
Deux clés sont proposées pour ouvrir la révélation contenue dans
le livre et deux serpents gardent le seuil avec vigilance (notre
Caducée). Les lions sur un autre plan annoncent ici la préparation
du soufre, première opération de l'œuvre.
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Le feu, représenté en bas dans un rectangle sombre comme une
caverne, est un concentré d'énergie enfouies. Il se situe dans le
même plan que le minéral et évoque le "feu secret" de l'alchimiste
qui participe de l'énergie du dedans comme du dehors. La ligne
rouge verticale à la jonction de deux rectangles symbolise la
montée, ténue mais réelle, de ce potentiel énergétique. Le livre
rouge se situe sur ce même parcours.
Le travail alchimique débute à proprement parler à l'image de
cette Isis qui rassemble, joint et combine, pour reconstituer le
corps démembré de son époux.
La mythologie égyptienne donne à l'alchimiste des images en
adéquation avec le travail qu'il va opérer pour obtenir "son
soufre". Il doit d'abord réduire (désoxyder) le sulfure métallique
qu'il a choisi. C'est aussi ce que D'Espagnet appelle "ré-incérer
l'âme tout en la nourrissant. Le soufre secret et visible doit
chasser le soufre arsenical, première matière, en devenant
invisible." Dans ce cas le potassium additionné de cuivre va agir
ré-activement sur le produit sulfureux qui a été choisi.
Géométrie et Architecture : Le pan est un autre nom de
l'empan. Aussi peut-on dire que la main de la Pances nous
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montre l'empan tout comme l'avait fait le Bateleur. Mais elle
montre encore autre chose.
Roland Bechmann1, à partir d'une main
semblable dessinée par Villard de Honnecourt ainsi que d'autres
dessins de mains de la même époque, démontre que cette
position représente le signe conventionnel du triangle égyptien ou
triangle de Pythagore 3-4-5 et le théorème y afférent.
Mais voici les tracés à décrypter :
L'angle de 108° :
- Un premier trait est suggéré par le petit trait droit à l'angle du
livre contre le bord de la lame. Prolongeons-le vers le haut en
suivant le bord du livre jusqu'au coin supérieur et vers le bas en
dehors de la carte. Traçons-le.
- Un second trait est suggéré par le bord supérieur du livre.
Traçons-le et mesurons l'angle formé, nous trouvons un angle de
108° dont le sommet est sur le coin du livre ouvert. Traçons un
1 Roland Bechmann (né en 1919) est un architecte, écologiste et historien français, auteur d'ouvrages surl'architecture gothique et sur Villard de Honnecourt.
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cercle à partir du sommet de l'angle en faisant passer la
circonférence par l'œil droit de la Papesse.
L'angle de 108° se trouve dans de nombreuses constructions. Il
est le sommet d'un triangle dont les deux angles à la base sont de
36°. Ces angles nous donnent "le déroulement de la circonférence
sur un plan et la construction géométrique du fronton grec". Ce
triangle est au nombre d'or Base/côté de l'angle au sommet = Phi.
C'est l'angle du pentagone convexe inscrit dans le cercle.
L'étoile à cinq branches : On peut alors penser que le mot pan
inscrit dans Pances fait aussi allusion au nombre cinq, en grec
Pan, les cinq gros doigts de la pances mettant ce nombre en
évidence. On peut maintenant placer le Pentagone et y tracer
l'étoile à cinq branches.
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En conclusion, avec la Papesse nous commençons les tracés. Le
Pan est la surface qui va permettre les premiers traits. Il n'y a pas
encore de volume. Tout est à plat.
D'autres Papesses :
La Papesse du Tarot des Grands Peintres
Maître de Flémalle – Représentation d’une femme lisant tandis
qu’une fenêtre ouvert nous invite à l’évasion. La Papesse a la
fonction de révéler les secrets même si elle doit être mal
comprise. Elle communique…
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Les Cartes de l’enfant intérieur : Thème : Les Fées
La marraine fée : elle est l’initiatrice, celle qui enseigne les
mystères, elle détient les clés de notre sanctuaire intérieur, de
notre possible. C’est l’Isis de l’Egypte ancienne. La marraine fée
est une enchanteresse. Elle nous apporte ce que nous croyons ne
pas savoir ou ne pas pouvoir obtenir.
Le nombre 2 est un point d’équilibre entre les domaines spirituel
et physique. Référence au conte de Grimm : Cendrillon dont la
marraine désigne la Reine des cieux qui produit des
enchantements : les animaux se transforment en aide humains
jusqu’au douze coup de minuit.
Elle est là pour nous rappeler le voyage qui nous attend et la
nécessité de persévérer, d’accomplir le travail de l’âme.
La Papesse du Tarot Maçonnique
Elle est située entre les deux colonnes, elle est la gardienne du
temple intérieur, la frontière entre le conscient et l’inconscient. En
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Franc-maçonnerie, il convient de faire le point avant d’entrer dans
le temple (rôle du cabinet de réflexion qui invite aux
interrogations, à une remise en question).
La carte donne l’idée d’un jeu de voiles, d’ombres et de lumière.
Pour comprendre le Livre de la Connaissance, il faut posséder
deux clés l’une d’or solaire, représente la raison, l’autre d’argent
lunaire sur la voie de l’intuition.
Principe de dualité : lumière /ténèbres, équerre/compas, pavé
mosaïque…
Elle peut être associée à Isis, gardienne de la partie la plus
secrète du temple intérieur. Le seuil du temple limite du monde
sensible est fermé par un voile entre les deux colonnes.
La Papesse du Tarot des Tailleurs de Pierre
La Papesse est associée à la lune, principe passif du retour sur
soi, du questionnement intérieur. Elle est couronnée et couverte
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de la tête aux pieds. De sa main droite, elle tient un étendard dot
l’extrémité est terminée par une croix et une clé pend de sa main.
Tandis que de la main gauche voilée, elle teint en pleine lumière
le livre de la connaissance sur lequel est représentée une serrure.
L’œil et le delta lumineux illumine le livre. (isolement du monde
extérieur).
Tarot, Alchimie et Franc-Maçonnerie interprètent ces images pour
nous dire que la Papesse ou Isis représente la mère et l'initiatrice
qui guide le Supérieur Inconnu à la recherche de son individualité.
Elle ouvre la voie. Elle invite à un retour sur soi dans un espace
concentré où l'être se retrouve face à lui-même.
Il prend alors conscience de la dualité dans le monde, dans la
matière qui le constitue et aussi dans son être propre. Premier
pas ver la connaissance de soi à travers nos rapports à
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l'environnement et à l'univers. Premier pas entre le moi et l'au-
delà du moi. Le Chevalier Supérieur Inconnu se trouve confronté
au voile qu'il doit traverser, voile qui n'est autre que son reflet ou
sa projection dans le miroir.
Le Chevalier, le "JE", va pénétrer dans sa propre dualité à partir
de laquelle il faudra créer. Pour cela il doit aller au delà du "MOI",
ou tout au moins placer celui-ci à la limite de la conscience sur la
voie de l'inconscience. Il s'agit de déplacer le MOI vers la marge,
en limite de cette zone d'incertitude et d'inconnu, là où il perd les
références du quotidien.
Le but est de découvrir, ou du moins de pressentir, la vraie nature
de la matière dont on est pétri et de comprendre le sens de la
dualité de cette matière.
Nous avons dit,
Sources :
*Marie Delclos, Franc-Maçonnerie et Tarot, Editions Trajectoire,
2016.
*Jean Beauchard, Le Tarot des Alchimistes, Editions Véga, 2006,