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La recherche clinique dans le domaine du cancer du sein: état des lieux et perspectives

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Page 1: La recherche clinique dans le domaine du cancer du sein: état des lieux et perspectives

La recherche clinique dans le domaine du cancerdu sein : etat des lieux et perspectives

J. Gligorov1, D. Azria2, Y. Belkacemi3, M. Spielmann4, M. Namer5

1Service d’oncologie medicale-APREC, APHP Tenon, 4, rue de la Chine, F-75970 Paris cedex 20, France2Service de radiotherapie, CRLCC Val-D’Aurelle-Paul-Lamarque, 208, rue des Apothicaires,

F-34298 Montpellier cedex 05, France3Service de radiotherapie, hopital Henri-Mondor, 51, avenue du Marechal-de-Tassigny, F-94010 Creteil cedex, France4Service d’oncologie medicale, institut Gustave-Roussy, 39, rue Camille-Desmoulins, F-94805 Villejuif, France5RPC Nice-Saint-Paul-de-Vence, 06200 Nice, France

Correspondance : [email protected]

Recu le 14 mai 2009 ; accepte le 18 mai 2009

Clinical research in the field

of breast cancer: current

situation and outlook

Abstract: Classification according

to different biological features

into subtypes has made breast

cancer an increasingly complex

and heterogeneous disease. With

an estimated over 45,000 new

breast cancer cases diagnosed in

France every year, efforts in

breast cancer research are focu-

sed, at both population and indi-

vidual levels, on developing new

risk assessment and treatment

strategies that will reduce morbi-

dity and mortality associated with

the disease. A better understand-

ing of tumour/host biology has led

to improvements in the multidis-

ciplinary management of breast

cancer, and traditional pathologi-

cal evaluation is being comple-

mented by more sophisticated

genomic approaches. All these

new parameters clearly influence

clinical research strategies. The

authors have tried to reveal the

general philosophy of these stra-

tegies and their links with the

various different biological and

clinical situations.

Keywords: Breast cancer – Clinical

trials

Resume : Le cancer du sein

devient une entite de plus en

plus complexe et heterogene du

fait d’une caracterisation biolo-

gique de differents sous-types.

Avec une incidence annuelle esti-

mee a plus de 45 000nouveaux cas

en France, les efforts de recherche

cliniquedans ledomaineducancer

du sein ont commeprincipal objec-

tif de reduire la morbidite et la

mortalite en basant nos strategies

therapeutiques sur des criteres

biologiques de populations, mais

egalement des criteres indivi-

duels. Par ailleurs, une meilleure

comprehension de l’interaction

entre les cellules cancereuses et

l’hote a permis des ameliorations

notables de la prise en charge,

mais egalement le developpement

de nouveaux outils en comple-

ments de l’anatomopathologie

classique. Tous ces nouveaux

parametres influencent les strate-

gies de recherche clinique. Les

auteurs ont essaye de faire trans-

paraıtre la philosophie generale de

cette recherche en rapport avec

les differentes situations clinico-

biologiques.

Mots cles : Cancers du sein –

Essais cliniques

Introduction

Le cancer du sein a probablement

ete au sein des tumeurs solides l’un

des modeles ayant le plus beneficie

des innovations therapeutiques et

le plus mobilise de patientes et de

cliniciens dans le cadre d’essais

cancerologiques. Nous avons

herite, en ce debut de millenaire, de

presde40 ansderechercheclinique

qui progressivement s’est structu-

ree repondant a des criteres metho-

dologiques de plus en plus precis et

permettant de definir nos pratiques

surdes resultats valides et supposes

indetronables. Qu’il s’agisse des

travaux des differents groupes

ayant explore l’apport de nouvelles

strategies ou de nouveaux traite-

ments, ouqu’il s’agissedes resultats

successifs de differentes meta-ana-

lyses, nos attitudes therapeutiques

sont en grande partie calquees sur

ces donnees et les thematiques

de recherche clinique suivaient,

somme toute, une logique de

developpement des traitements

systemiques, calquees sur d’autres

pathologies non cancereuses.

Etat des lieux

La plupart des progres medicaux

etant lies aux progres scientifiques

et technologiques, que ce soit dans

le domaine de la biologie, de la

physique, voire des statistiques, ces

progres se sont traduits recemment

par plusieurs revolutions que je

reprendrai en ordre chronologique

inverse.

Revolution epidemiologique

ou impact de la prevention

Que ce soit la prevention secon-

daire avec la mammographie de

Reflexions sur la recherche clinique en FranceOncologie (2009) 11: 319–324© Springer 2009DOI 10.1007/s10269-009-1085-6

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Page 2: La recherche clinique dans le domaine du cancer du sein: état des lieux et perspectives

depistage [1] ou la meilleure

comprehension de l’influence de

certains traitements hormonaux

sur l’incidence des cancers [2],

l’epidemiologie des cancers se

modifie. On retrouve de plus en

plus des tumeurs non invasives

depistees, des cancers invasifs de

taille de plus en plus petite au

moment du diagnostic, et des

cancers de plus en plus hormono-

dependants. Se sont donc naturel-

lement posees les questions de :

– l’optimisation des techniques

de depistage et d’evaluation du

risque de second cancer par les

nouvelles techniques d’imagerie ;

– la place et l’optimisation des

traitements locoregionaux non chi-

rurgicaux dans les cancers du sein

non invasifs ;

– les techniques d’evaluation

du risque de rechute dans les

cancers de petite taille.

Il faut ajouter a cette revolution

epidemiologique celle d’un vieillis-

sement global de nos populations,

amenant a remettre en cause nos

strategies therapeutiques actuelles,

puisqu’il faudra tenir compte, en

plus du pronostic de la maladie

cancereuse, de celui des comorbi-

dites et de l’etat de sante sous-

jacent des populations a traiter [3].

Cette question est abordee a part

entiere dans ce numero.

Revolution nosologique

ou nouvelle classification

des cancers du sein [4]

Nous ne devons plus parler du

cancer du sein, mais des cancers

du sein avec l’identification de sous-

types moleculaires differents en ce

qui concerne le pronostic spontane

de cesmaladies. Ainsi, nousdevons

distinguer aujourd’hui les cancers

du sein :

– « HER2 positifs », definis par

une amplification de HER2, qu’ils

aient ou non une expression des

recepteurs hormonaux ;

– les cancers du sein « lumi-

naux », definis par une positivite

des recepteurs hormonaux sans

seuil mais subdivises en deux sous-

types que sont les luminaux A

(caracterises schematiquement par

une forte hormonodependance et

une proliferation faible) et les lumi-

naux B (caracterises schematique-

ment par une hormonodependance

incertaineetune forteproliferation) ;

– les cancers du sein de type

« basal », dont la definition biolo-

gique est plus difficile en dehors de

la caracterisation moleculaire et

plus frequemment sans surexpres-

sion de HER2 ni de recepteurs

hormonaux [5].

Revolution therapeutique

ou avenement des therapies

ciblees [6]

Malgre l’utilisation historique des

therapies ciblees antihormonales

dans le domaine du cancer du sein

depuis plus d’un siecle, c’est a la

suite de la recherchedes facteurs de

resistance aux traitements antihor-

monaux que HER2 fut identifie

comme une nouvelle cible biolo-

gique, et des therapeutiques speci-

fiques furent developpees, ciblant

soit de facon hautement specifique

la partie extramembranaire du

recepteur avec un anticorps mono-

clonal, soit sonactivite enzymatique

tyrosine-kinase via un inhibiteur.

Ces deux strategies nous ont per-

mis en clinique denous apercevoir :

– des activites croisees des diffe-

rents inhibiteurs de tyrosine-kinase

expliquant certaines de leurs toxi-

cites,mais egalementdesefficacites

croisees sur differentes cibles [7] ;

– de l’importance de la reaction

immunitaire dans la reponse tumo-

rale via la comprehension des

mecanismes d’action des anticorps

monoclonaux [8].

Revolution methodologique

ou choix des modeles

de recherche clinique

C’est dans le controle de la maladie

micrometastatique que se situe

l’enjeu majeur de la guerison des

patientes a haut risque de rechute

du cancer du sein, hors depuis

maintenant plus de 60 ans et l’ave-

nement de la classification TNMdes

cancers du sein, il est indiscutable

que ce risque de rechute soit

fortement lie au degre d’envahisse-

ment ganglionnaire et a la taille

tumorale [9]. Parallelement, les dif-

ferentes approches therapeutiques

visant a ameliorer la prise en charge

locoregionale, tant d’un point de

vue carcinologique que d’un point

de vue esthetique, ont permis de

conclure qu’une approche thera-

peutique strategique valide, consis-

tant en un traitement systemique

premier, etait possible et permettait

independamment des possibilites

de conservation mammaire celle

de l’identification de populations

de tres bons pronostics apres trai-

tement : les patientes ayant une

reponse histologique complete

tumorale apres chimiotherapie

neoadjuvante. Les donnees actuali-

sees des etudes duNSABP publiees

recemment avec un recul suffisant

valident ce modele de recherche

clinique comme legitimedans l’eva-

luation de la sensibilite des cancers

aux traitements et son impact pro-

nostique [10]. Cette approche n’est

peut-etre pas applicable a toutes les

tumeurs,mais certainement a celles

necessitant une chimiotherapie).

Revolution conceptuelle

ou redecouverte

de l’importance de l’hote

Il ne s’agit certainement pas d’une

revolution mais d’une evolution

conceptuelle ayant suivi les progres

biologiques etmedicaux [11]. On ne

peut que constater que de facon

quasi simultanee furent decrits, il y

a plus d’un siecle maintenant,

l’importance therapeutique d’une

manipulation antihormonale dans

la prise en charge du cancer du sein

et le concept de l’interaction entre

les cellules cancereuses et les tissus

hotes. A y bien reflechir, une depri-

vation hormonale (n’utilisant pas un

inhibiteur competitif d’une cible

cellulaire tumorale comme un

recepteur), comme une castration

ou l’utilisation d’un inhibiteur d’aro-

matase n’est rien d’autre qu’un

traitement de l’environnement

tumoral soustrayant du milieu un

des signaux biologiques potentiel-

lement utiles a la croissance tumo-

rale sans action directe obligatoire

sur la cellule cancereuse. D’un point

de vue biologique, l’effet therapeu-

tique est potentiellement moins

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Page 3: La recherche clinique dans le domaine du cancer du sein: état des lieux et perspectives

soumis aux pressions de selection

des cellules cancereuses, car

l’agent actif n’agit pas directement

sur elles. Toutefois, ces agents

biologiques ont une activite depen-

dant directement de leur meta-

bolisme dans l’organisme hote

(pharmacologie encore malheureu-

sement trop peu utilisee pour

predire l’efficacite d’un traitement).

Deux approches plus recentes

concernant le traitement du tissu

hote viennent elargir le champ de la

recherche clinique dans ce

domaine. Il s’agit de :

– l’apport des biphosphonates

en situation adjuvante, notamment

dans la population hormonodepen-

dante [12] ;

– l’apport des traitements anti-

angiogeniques en situation metas-

tatique [13].

Il apparaıt impossible et preten-

tieux de donner une information

exhaustive concernant les protoco-

les de recherche clinique dans le

cancer du sein actuellement dispo-

nibles enFrance et dans lemondeet

auxquels differents centres partici-

pent en France. Toutefois, cela est

en partie le role des institutions que

nous sommes alles interroger sur

leurs sites respectifs : l’INCa pour la

France (http://www.e-cancer.fr),

l’EUDRACT pour l’Europe (https://

eudract.emea.europa.eu) et le NIH

pour les Etats-Unis (http://www.can-

cer.gov). Chose etrange, aucune

information sur les essais en cours

sur le site de l’EUDRACT, en revan-

che sur ceux de l’INCa et du NIH, il

semble que la mission soit remplie.

Si l’on regarde de plus pres les

essais references dans le domaine

du cancer du sein on notera :

– 121 essais sur le site de l’INCa

(12 % de phase I, 37 % de phase II,

29 %de phase III, 4 %dephase IV et

18 % non precises) ;

– 841 essais sur le site du NIH

(13 % de phase I, 57 % de phase II,

25 % de phase III, 5 % de phase IV).

Enjeux

A la vue des reflexions preliminai-

res concernant la nouvelle donne

clinicobiologique dans le cancer du

sein, quels sont, a ce jour, les axes

de recherche clinique que nous

pouvons identifier ?

Population HER2 positive

On retiendra les reflexions strategi-

ques suivantes actuelles qui sont

celles de :

– l’optimisation du traitement

cible anti-HER2 en situation adju-

vante (duree et molecule) ;

– l’apport des traitements anti-

angiogeniques en association avec

les traitements anti-HER2 du fait de

la caracterisation dans cette popu-

lation d’une activite tumorale pro-

angiogenique importante ;

– la prise en charge des localisa-

tions metastatiques frequentes que

sont lesmetastases cerebrales ;

– l’evaluation de nouveaux

agents et/ou la combinaison a des

agents ciblant la voie de signalisa-

tion de HER2 dans un objectif de

contournement de la resistance aux

therapies classiques anti-HER2.

Partant de l’acquis du traitement

adjuvant par trastuzumab pendant

un an en cas d’indication de chimio-

therapie, on pourrait resumer les

strategies d’essais en situation

adjuvante avec quatre essais

actuels ouverts en France et com-

parant un traitement standard par

trastuzumab a :

– une duree raccourcie de six

mois de trastuzumab (essai rando-

mise de phase III, PHARE) ;

– un traitement par lapatinib ou

les deux, en traitement sequentiel et

en association (essai randomise de

phase III ALLTO) ;

– un traitement prolonge par

neratinib (essai randomise de

phase III NCT00878709) ;

– un essai evaluant l’adjonction

du bevacizumab au trastuzumab en

situation adjuvante (essai BETH).

On notera que si en pratique

clinique certaines situations nous

amenent a discuter de l’indication

d’un traitementanti-HER2,memeen

cas de non-indication theorique de

chimiotherapie, il n’y a pas d’essai

prospectif danscette situation, peut-

etre lie a une situation clinique

relativement rare et des difficultes

potentielles de recrutement.

En situation neoadjuvante, on

retiendra :

– la comparaison de deux stra-

tegies anti-HER2 associe au paclita-

xel (trastuzumab et/ou lapatinib)

dans le cadre de l’essai de phase II

NeoALLTO ;

– l’apport du bevacizumab en

combinaison avec le trastuzumab et

une chimiotherapie soit dans les

cancers du sein inflammatoires

(essais de phases I-II, BEVERLY I et

II), soit dans les cancers non inflam-

matoires (futur essai de phase II,

GETNA) en attendant egalement

l’evaluation du pertuzumab ;

– la combinaison du pazopanib

(activite anti-VEGF) au lapatinib

dans les cancers inflammatoires

(essai de phase II, NCT00558103).

En situation metastatique, on

retrouve dans cette population des

essais posant la question de la prise

en charge specifique des metasta-

ses cerebrales :

– la prevention primaire par

irradiationprophylactique cerebrale

au moment de la premiere rechute

metastatique extracerebrale (essai

de phase II, TSARINE) ;

– l’evaluation de la prise en

charge des metastases cerebrales

non pretraitees par une association

de traitement anti-HER2 (lapatinib)

a une chimiotherapie (capecitabine)

[essai de phase II, LANDsCAPE].

Un autre axe de recherche est

celui de l’evaluation de la combinai-

son de traitements cibles anti-HER2

a un traitement anti-angiogenique :

– association trastuzumab-

docetaxel comparee a une associa-

tion trastuzumab-docetaxel-bevaci-

zumab (essai dephase III, AVEREL) ;

– association bevacizumab-

trastuzumab-capecitabine (essai de

phase II, HAX) ;

– combinaison pazopanib-lapa-

tinib (futur essai de phase II,

NCT00347919).

Enfin, l’identification des voies

de signalisation des recepteurs

de la famille EGF-R, ainsi que

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Page 4: La recherche clinique dans le domaine du cancer du sein: état des lieux et perspectives

leur interaction avec d’autres voies

pouvant expliquer certaines resis-

tances, amene a tester en situation

metastatique :

– le pertuzumab (anticorps

monoclonal anti-HER2 et anti-

HER3) en combinaison avec trastu-

zumab–docetaxel compare a l’asso-

ciation trastuzumab-docetaxel

seule (essais de phase III, CLEOPA-

TRA) ;

– l’adjonction d’inhibiteur de

mTOR (RAD001) reversion de la

resistance au trastuzumab associe a

la perte potentielle de pTEN et

l’activation de la voie Akt/mTor a

l’association trastuzumab–paclitaxel

(essai de phase II, CRAD001J2101) ;

– l’adjonction d’un inhibiteur de

HSP90 favorisant la degradation

proteique de HER2 (IPI-504 retaspi-

mycine ou KOS-953 tanespimycine)

au trastuzumab (essais respect-

ivement de phases II et I–II,

NCT00817362 et NCT00773344) ;

– le trastuzumab-DM1combinant

a l’anticorps monoclonal un derive

de la maytansine (antimicrotubule)

libere en intracellulaire (essais de

phase III le comparant a l’association

trastuzumab-docetaxel ou essais de

phase II en association avec le

pertuzumab).

Population « luminale »

Il s’agit de la population la plus

frequente de cancers eligibles a un

traitement antihormonal mais dont

le degre d’hormonodependance est

parfois incertain. Les principales

modifications actuelles, en ce qui

concerne les strategies de prise en

charge de cette population, concer-

nent l’utilisation des inhibiteurs de

l’aromatase dans la population

de patientes menopausees et

l’augmentation du nombre de trai-

tements adjuvants par chimiothera-

pie proposee dans cette population

d’apres les differents referenti-

els nationaux et internationaux

[14-16]. De ce fait, il est apparu

important a la communaute medi-

cale de mieux definir le niveau de

risque de recidive de ces popula-

tions, ainsi que le benefice attendu

des traitements adjuvants. De nou-

veaux outils biologiques, apportes,

ont ete utiles dans cette demarche

et sont le rationnel de trois essais

internationaux comparant une

information pronostique biologique

aux criteres de choix classiques

(anatomopathologiques et referen-

tiels). Il s’agit de trois essais

adjuvants de phase III :

– l’essai NNBC-3 evaluant l’inte-

ret d’UPA-PAI1 compare aux refe-

rentiels de Saint-Gallen en ce qui

concerne l’indication et l’impact des

chimiotherapies adjuvantes dans la

population pN0 essentiellement

(essais clos aux inclusions) ;

– l’essai TAILORx evaluant

l’interet d’une chimiotherapie asso-

ciee a un traitement antihormonal

compare a un traitement antihor-

monal seul dans une population de

patientes a risque intermediaire de

recidive (risque estime avec l’outil

Oncotype Dx) [essai en cours de

recrutement] ;

– l’essai MINDACT evaluant

l’interet de la signature genomique

Mammaprint comparee aux criteres

anatomopathologiques classiques

en ce qui concerne l’indication et

l’impact des chimiotherapies adju-

vantes dans la population dite a

risque intermediaire de Saint-Gal-

len (essai en cours de recrutement).

Parallelement dans cette popu-

lation de patientes, se pose la ques-

tion de l’identification des facteurs

d’hormonoresistance avec soit :

– une approche predictive

comme l’essai CARMINA 02 NIM-

FEA visant a rechercher des fac-

teurs d’hormonosensibilite aux

traitements antihormonaux (fulves-

trant ou anastrozole) en situation

neoadjuvante ;

– une approche de modulation

de l’efficacite des traitements anti-

hormonaux avec l’adjonction d’une

therapie ciblee visant a inhiber une

voie d’action des signaux intracellu-

laires d’echappement comme la

voie EGFR-R. De nombreux essais

de phases II et III explorent actuelle-

ment l’adjonction d’un inhibiteur de

tyrosine-kinase a action anti-EGFR

ou inhibiteur de mTOR en combi-

naison avec un traitement antihor-

monal qui n’etait plus efficace seul

en situation metastatique ;

– une approche d’inhibition de

l’angiogenese dans cette situation

par l’adjonction d’agents anti-

angiogeniques associes aux traite-

ments antihormonaux.

Population dite « triplenegative »

Les difficultes de prise en charge

concernant cette population resi-

dent, d’une part, dans le fait meme

de la difficulte de sa caracterisation

par des criteres anatomopathologi-

ques classiques qui regroupent des

populations de pronostic spontane

pejoratif de type basal like, mais

egalement des populations de tres

bon pronostic spontane comme les

formes medullaires ou adenoıdes

kystiques et, d’autre part, dans

l’absence de cible therapeutique

clairement identifiee dans cette

population.

Toutefois, la separation des

autres sous-types moleculaires de

cancer du sein a tout de meme

permis de faire des cancers dits

triples negatifs une entite a part en

ce qui concerne l’identification de

cette population et la mise en place

de strategies therapeutiques parti-

culieres.

En situation adjuvante, il faut

signaler deux essais reposant sur

deux concepts differents et non

forcement antinomiques :

– l’essai PACS08 de la FNCLCC

qui compare un schema de chimio-

therapie adjuvante classique (trois

FEC suivis de trois docetaxels) a un

schema substituant le docetaxel par

l’ixabepilone qui a montre en situa-

tion metastatique une efficacite

apres echec des taxanes (il s’agit

d’un essai de phase III en cours) ;

– l’essai BEATRICE qui evalue

l’impact d’un traitement adjuvant

par bevacizumab en complement

de la chimiotherapie (phase III en

cours).

En situation metastatique en

revanche, la plupart des essais

therapeutiques cherchent a valider

l’interet d’une cible therapeutique

particuliere. L’une des strategies

principales repose sur l’association

plus frequente du profil « triple

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Page 5: La recherche clinique dans le domaine du cancer du sein: état des lieux et perspectives

negatif » dans la population BRCA1

mutee [17]. Hors la mutation de

BRCA1 est associee a un defaut de

reparation de l’ADN amenant a

proposer des strategies therapeuti-

ques ayant :

– soit pour cible l’ADN avec un

interet theorique possible des

agents alkylants ou une action indi-

recte sur l’ADN (essais de phase II

ET-B-027-06 evaluant la trabecte-

din) ;

– soit pour cible les « outils de

reparation de l’ADN comme PAPR

(essai de phase I-II en cours avec un

inhibiteur de PARP AZD 2281).

Par ailleurs, les cancers de type

basal like ont plus frequemment

une surexpression d’EGFR et de

c-kit expliquant des strategies

d’essais therapeutiques utilisant :

– des anti-EGFR (essai GETNA

en situation neoadjuvante de phase

II randomisee associant au doceta-

xel le panitunimab, en cours

d’ouverture) ;

– des agents agissant sur la voie

PI3kinase-Akt mTOR.

Optimisation des traitementslocoregionaux

Deux axes importants de la rech-

erche clinique en cancerologie

mammaire sont actuellement l’opti-

misation de la radiotherapie et celle

de l’exploration et du traitement de

l’aisselle. Dans les deux cas, il s’agit

essentiellement de protocoles de

recherche academique.

Pour la radiotherapie, les ques-

tions portent sur :

– l’impact d’un complement de

radiotherapie apres traitement

radiochirurgical conservateur des

cancers canalaires in situ du sein

(essaidephase III,BONBIS2008/25) ;

– l’impact d’un complement de

radiotherapie apres traitement

radiochirurgical conservateur des

cancers invasifs de la femme de

moins de50 ans (essais dephase III,

Young Boost Trial RTS 01/0704) ;

– plusieurs essais explorant la

place de l’irradiation partielle du

sein.

Pour la chirurgie, la question

cruciale est celle de la prise en

charge du traitement de l’aisselle

en cas de positivite limitee du gan-

glion sentinelle. Deux essais posent

laquestiondestrategiesdifferentes :

– l’essai AMAROS de l’EORTC

10981-22023 est un essai de phase

III comparant, apres prelevement de

ganglion(s) sentinelle(s) positif(s),

une radiotherapie axillaire a un

curage axillaire chez des patientes

ayant un cancer du sein invasif non

metastatique ;

– l’essai IBCSG 23-01 est egale-

ment un essai de phase III compa-

rant, apres prelevement de ganglion

sentinelle revelant l’existence d’une

micrometastase, un curage axillaire

a l’absence de traitement comple-

mentaire au niveau de l’aisselle chez

des patientes ayant un cancer du

sein invasif nonmetastatique ;

– l’essai CINNAMOME qui

explore la place du ganglion senti-

nelle dans la prise en charge des

carcinomes canalaires in situ purs

oumicro-infiltrants etendus du sein,

lorsque le diagnostic est realise par

macrobiopsie et le traitement par

mastectomie d’emblee.

Essais de prevention primaire

Enjeumajeur dans les populations a

risque de cancer du sein invasif, on

retiendra :

– l’essai IBIS2 DCIS 0302, phase

III randomise, comparant l’impact

preventif du tamoxifene a l’anastro-

zole chez les femmesmenopausees

operees d’un carcinome canalaire

in situ du sein ;

– l’essai LIBER, phase III rando-

mise evaluant la prevention du

cancer du sein par le letrozole chez

la femme menopausee porteuse

d’unemutation genetique BRCA1/2.

Conclusion

En plus de ces axes de reflexion

prealableplus specifiquesaucancer

dusein,deuxelementsclesviennent

influencer et structurer la recherche

clinique en general. Ce sont :

– les donnees economiques ;

– lesdonneesorganisationnelles

et reglementaires.

Si une tres grande partie de la

recherche est academique, elle ne

pourrait en grande partie avoir lieu

sans le soutien direct et indirect des

laboratoires de l’industrie pharma-

ceutique. Toutefois, beaucoup plus

embarrassante est la question de la

selection des futures cibles thera-

peutiques, de la synthese des nou-

veaux agents et de leur evaluation

qui elle reste encore tres fortement

liee aux politiques internes des

differents laboratoires.

Concernant les donnees organi-

sationnelles, il est indiscutable que

la recherche clinique en situation

adjuvante a repose et beneficie en

tres grande partie, en France, de la

dynamique du groupe sein de la

federation des centres de lutte

contre le cancer avec notamment

lesprogrammesPACSquiont ete en

quelque sorte la suite de la dyna-

mique du GFEA. La recherche dans

le domaine des strategies neoadju-

vantes et metastatiques est beau-

coupplus portee soit par des projets

industriels, soit par des groupes de

moindre envergure. Quant a la

recherche en situation metasta-

tique, elle semble encore plus « dis-

persee » tout du moins en ce qui

concerne les strategies therapeuti-

ques, chacun essayant a juste titre

d’offrir aux patientes prises en char-

ges dans le cadre des differents

programmes de recherche un

accesaux therapeutiquesdites inno-

vantes. Reste a saluer l’effort impor-

tant de structuration de la recherche

en oncogeriatrie soutenue depuis

plusieursanneespar les institutions.

Malgre tout, de nombreux

enjeux persistent pour les annees

a venir qui sont :

– celui de l’integration des diffe-

rents sous-types moleculaires en

situation non metastatique impo-

sant un effort national, voire inter-

national pour pouvoir repondre a

des questions strategiques et thera-

peutiques essentielles ;

– celui de l’importance de la

recherche en situationmetastatique

portee par differents groupes ou

directement lies a l’industrie et

qui beneficierait probablement de

SYN

TH

E0

SE

/REVIEW

ARTICLE

323

Page 6: La recherche clinique dans le domaine du cancer du sein: état des lieux et perspectives

programmes de recherche transla-

tionnelle permettant d’apporter

dans des phases plus precoces de

la maladie une meilleure caracteri-

sation des populations cibles.

L’avenir de cette recherche de

plus en plus fractionnee du fait des

caracterisations biologiques de

plus en plus precises de sous-type

moleculaires de cancers du sein ne

pourra se concevoir que dans le

cadrede strategies communes et de

collaboration a l’echelle nationale et

internationale.

Declaration de conflit d’interet :

Les auteurs declarent ne pas avoir

de conflit d’interet.

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