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Cours de droit hospitalier – AUTEUR : Emmanuelle Carrue Préparation au concours de secrétaires médicales en ligne © Les contenus pédagogiques de ce cours sont exclusivement réservés au CUEEP. 1 La responsabilité en établissement de santé Auteur : Emmanuelle Carrue Sommaire Introduction sur la responsabilité médicale 1. Les différents types de responsabilités La responsabilité indemnitaire La responsabilité pénale Responsabilité d'une personne physique Responsabilité d'une personne morale La responsabilité disciplinaire 2. La mise en oeuvre de la responsabilité Le règlement à l'amiable Les organes de la procédure d'indemnisation La procédure de règlement amiable proprement dite La procédure devant les tribunaux 3. La réparation pécuniaire supportée par les établissements publics de santé a. La réparation de la faute La faute établie par le requérant La responsabilité sans faute La faute détachable du service public b. La réparation de l'aléa thérapeutique Tableau résumé de la responsabilité médicale c. La responsabilité d'une clinique privée 4. Les responsabilités déontologiques et disciplinaires Glossaire

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La responsabilité en établissement de santéAuteur : Emmanuelle Carrue

SommaireIntroduction sur la responsabilité médicale

1. Les différents types de responsabilités

La responsabilité indemnitaire

La responsabilité pénale

Responsabilité d'une personne physique

Responsabilité d'une personne morale

La responsabilité disciplinaire

2. La mise en œuvre de la responsabilité

Le règlement à l'amiable

Les organes de la procédure d'indemnisation

La procédure de règlement amiable proprement dite

La procédure devant les tribunaux

3. La réparation pécuniaire supportée par les établissements publics de santé

a. La réparation de la faute

La faute établie par le requérant

La responsabilité sans faute

La faute détachable du service public

b. La réparation de l'aléa thérapeutique

Tableau résumé de la responsabilité médicale

c. La responsabilité d'une clinique privée

4. Les responsabilités déontologiques et disciplinaires

Glossaire

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Introduction sur la responsabilité médicale

L'accident thérapeutique préoccupe à juste titre tout professionnel de santé exerçant eninstitution de soins (2000 affaires par an, chiffre peu élevé par rapport au 400 millions d'actes /an).

On évalue entre 10 000et 20 000 le nombre d'accidents réellement survenus, restés en l'état outransmis à une compagnie d'assurance sans suite juridictionnelle.

Si le malade estime qu'il a litige, il n'ira pas devant le même tribunal selon l'établissement.

* Il ira devant le juge judiciaire , s'il est en clinique privée ou s'il s'agit d'un acte d'un médecin oud'une sage femme intervenant en pratique libérale (relation contractuelle de droit privé puisqu'ily aura eu entente sur honoraires)* Le juge sera administratif , si le malade est usager du service public hospitalier.

La loi du 4 mars 2002 n'a fait que codifier la jurisprudence existante en matière deresponsabilité médicale, sans la modifier fondamentalement.

En l'absence de responsabilité, elle crée une procédure analogue à celle existante pour lesvictimes d'infraction (notamment pour l'aléa thérapeutique).

La loi est applicable aux accidents médicaux "consécutifs à des activités de prévention, dediagnostic ou de soins réalisés au plus tôt six mois avant la publication de la loi" et auxinstances en cours n'ayant pas donné lieu à une décision irrévocable.

Les principes traditionnels continueront donc à s'appliquer en matière de responsabilitémédicale, pour tous les dommages survenus avant le 4 septembre 2001.

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1. Les différents types de responsabilités

La responsabilité juridique se diversifie en trois système distincts.

1. On trouve en premier lieu la responsabilité indemnitaire ( qu'on appelle communément laresponsabilité civile) dont le but est l'indemnisation de la victime.

2. Puis il y a la responsabilité pénale, on recherche la culpabilité d'une personne, ici le butpremier est le prononcé d'une peine.

3. En troisième lieu, il reste le système de la responsabilité disciplinaire.

Chaque fait peut être apprécié sous l'angle de chacune de ces responsabilités, mais c'est parl'analyse cumulative de ces trois régimes que l'on peut trouver la cohérence de la responsabilitéau sens large.

La responsabilité indemnitaire

La responsabilité indemnitaire se base sur l'article 1382 du code civil :

" Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la fauteduquel il est arrivé, à le réparer ".

L'acte ne doit pas forcément être volontaire, on est aussi responsable du dommage causé par sanégligence ou par son imprudence (article 1383).

De plus, on est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait, maisencore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses quel'on a sous sa garde.

Ainsi le père et la mère sont responsables pour leurs enfants mineurs habitant avec eux. Lesmaîtres et les commettants le sont pour les domestiques et préposés lorsqu'ils exercent leurfonctions. Enfin, les instituteurs et les artisans pour leurs élèves et apprentis pendant le temps oùils sont sous leur surveillance (article 1384).

Deux types de droit régissent la responsabilité indemnitaire : le droit civil et le droitadministratif .

En principe lorsqu'il s'agit de relation entre personnes privées, le droit civil s'appliquera. A partirdu moment où il y a un rapport avec l'administration, c'est le droit administratif qui entrera encompte. Du type de droit applicable dépendra le tribunal devant lequel les litiges vont arriver.

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• Relation entre particuliers :Ainsi en médecine libérale, la responsabilité du médecin relève des juridictions civilesjudiciaires.Le principe est celui du caractère contractuel de la responsabilité du médecin.

La Cour de cassation dans un arrêt Mercier du 20 mai 1936 a admis qu'un véritable accord devolontés existe entre le médecin et son patient :

" Il se forme un véritable contrat emportant pour les praticiens l'engagement, sinon bienévidemment de guérir le malade, du moins de lui donner des soins, (...),consciencieux,attentifs, et réserve faite des circonstances exceptionnelles, conformes aux données acquisesde la science ; la violation, même involontaire, de cette obligation contractuelle, estsanctionnée par une responsabilité de même nature, également contractuelle ... "

Toutefois, il reste que dans certains cas exceptionnels, la responsabilité du médecin n'est pascontractuelle :

* lorsque aucun consentement aux actes médicaux n'a pu être donné (situation d'urgence,d'inconscience, ou encore lorsque le contrat médical est annulé)

* en cas d'indemnisation des victimes par ricochet (la famille du patient): victimes qui n'ont pasconclu de contrat direct avec le médecin

* en cas de dommages étrangers à l'acte médical lui-même : chute du patient de la tabled'opération, chute du lit ...

* en cas de responsabilité du fait des produits dangereux en application de la loi du 19 mai 1998,ce qui englobe la fourniture de prothèses ou de médicaments par des médecins.

La distinction du caractère délictuel ou contractuel en droit médical n'entraîne pas desdifférences de traitement majeures puisque, dans les deux cas, la responsabilité est fondée sur lafaute.

La principale différence résidait dans les délais pour agir en justice : l'action en responsabilitédélictuelle se prescrit par dix ans, alors que l'action en responsabilité contractuelle se prescrivaitpar trente ans.ATTENTION :Si les conditions de la responsabilité contractuelle étaient réunies, la victime était tenue defonder son action sur cette responsabilité.

La loi du 4 mars 2002 a unifié la prescription délictuelle et contractuelle à 10 ans à compterde la date de consolidation du dommage.

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• Relation avec l'administration :En établissement public, on considère que le malade n'est pas lié contractuellement avec lemédecin qui le soigne mais avec l'établissement public de santé (et donc lien avecl'administration)

D'où la responsabilité mise en cause est celle de l'établissement public devant les juridictionsadministratives. Mais, il convient de préciser que la faute commise par le médecin agissant dansle cadre du secteur privé hospitalier, ou bien la faute détachable du service (faute personnelled'une particulière gravité), restent de nature civile.

De plus, en vertu de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983, les fonctionnaires bénéficient, àl'occasion de leurs fonctions, d'une protection organisée par la collectivité publique dont ilsdépendent.* Cette protection civile a été complétée par une loi du 16 décembre 1996.* Le législateur a décidé que la collectivité est tenue d'accorder sa protection au fonctionnaire ouà l'ancien fonctionnaire dans le cas où il ferait l'objet de poursuites pénales à l'occasion de faitsqui n'ont pas le caractère d'une faute personnelle.

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La responsabilité pénale

Dans un litige de responsabilité,- le droit civil permet la réparation des victimes par l'allocation de dommages et intérêts,- le droit pénal répare la société de l'atteinte réalisée par l'infraction commise, par lacondamnation à une amende et/ou à la prison.

En matière médicale, les incriminations souvent invoquées sont :• violences• administration de substances nuisibles• mise en danger d'autrui• non assistance à personne en péril.)

De plus, le législateur n'hésite plus à assortir d'incriminations pénales les lois sur l'activitémédicale et scientifique (par exemple loi de 94 sur la bioéthique, sur le secret médical…)

Pour mettre en œuvre une responsabilité, il faut :

* Responsabilité civile :- une faute- un dommage- un lien direct entre la faute et le dommage

* Responsabilité pénale :- un fait- un texte- une conscience soit "se rendre compte de"

La mise en cause de la responsabilité peut être liée tant à l'accomplissement des tâches courantes(entretien, organisation du service) qu'à des activités plus sophistiquées et techniques (activitémédicale, chirurgicale, recherche..)

Contrairement à la responsabilité indemnitaire, on ne peut être responsable pénalement dufait de quelqu'un d'autre (article 121-1 NCP).Des nuances existent en ce qui concerne les équipes et les personnes morales.

La responsabilité pénale peut s'appliquer:

- à une personne physique- à une personne morale.

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Responsabilité d'une personne physique

Outre sa condamnation à des dommages-intérêts en cas de préjudice causé à un patient, lemédecin s'expose à des sanctions pénales, lorsque les faits qui lui sont reprochés sontsusceptibles de constituer une infraction.

On peut citer :

* les atteintes involontaires à l'intégrité de la personne (article 222 - 19 et 222 - 20 NCP),* les atteintes involontaires à la vie (article 221 - 6 NCP),* l'omission de porter secours à personne en danger (article 223 - 6 alinéa 2 NCP),* la violation du secret professionnel (article 226 - 13 NCP) ...

• Pour engager la responsabilité pénale, une faute pénale d'imprudence ou de négligencesuffit.

Depuis un arrêt de 1912 de la Cour de cassation, la faute pénale d'imprudence et de négligencese confond avec la faute civile,* ce qui signifie que toute faute civile du médecin est susceptible de constituer en même tempsune faute pénale,* ce qui laisse le choix à la victime entre les juridictions civiles et les juridictions pénales.

La victime peut être tentée de porter l'action en réparation devant les juridictions pénales afin deprofiter des pouvoirs importants d'investigation du juge d'instruction (ce qui lui facilite larecherche de la preuve), ou bien même pour répondre à un désir de punition et de vengeance.

• Dans le cas d'exercice collectif de la médecine (équipe multidisciplinaire avec lien desubordination, de hiérarchie avec même un mélange entre privé et public),

la question se pose de savoir qui est responsable pénalement, et par voie de conséquence quiencourt le risque d'être condamné.La tendance actuelle est de faire reposer la seule responsabilité sur le chef de l'équipe soignanteau motif qu'il a mal choisi ses collaborateurs, mais cette solution n'est pas systématiquementretenue. De plus, la responsabilité d'un praticien n'exclut en rien celle d'autres professionnels.

• La Cour de cassation a jugé que "le chirurgien, investi de la confiance de la personne surlaquelle il va pratiquer une opération, est tenu, en vertu du contrat qui le lie à cettepersonne, de faire bénéficier celle-ci, pour l'ensemble des interventions, de soinsconsciencieux, attentifs et conformes aux données actuelles de la science ; il répond dèslors des fautes que peut commettre le médecin auquel il a recours pour l'anesthésie etqu'il se substitue, en dehors de tout consentement du patient, pour l'accomplissementd'une partie inséparable de son obligation." (arrêt Mercier du 18/10/60) .

Il faut en déduire qu'à défaut de lien contractuel direct entre le patient et les intervenants de

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l'équipe médicale, le chirurgien est responsable de leur faute.

Par contre, dans le cas d'un lien direct entre le patient et l'anesthésiste, il faut rechercher laresponsabilité de l'anesthésiste fautif.Par exemple : si le patient a rencontré l'anesthésiste avant l'opération ou s'il l'a choisipersonnellement.

Toutefois, le chef de l'équipe n'en demeure pas moins tenu à un devoir de surveillance généraledont la violation peut engager sa responsabilité.

• En outre, la Cour de Cassation, par un arrêt du 28 octobre 1997,a rappelé que lors d'un acte médical impliquant une équipe, il s'agit d'un travail d'équipe,nonobstant l'indépendance de chacun, ce qui nécessite que chacun donne à l'autre le cas échéantles informations nécessaires, sauf à engager sa responsabilité.

En l'espèce, un chirurgien avait omis d'informer l'anesthésiste que le globe occulaire du patientétait plus allongé en raison d'une grande myopie, ce qui avait une incidence sur le choix del'aiguille. Le globe occulaire du patient a ainsi été perforé par l'aiguille de l'anesthésiste. Laresponsabilité du chirurgien a été mise en cause.

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Responsabilité d'une personne morale

• C'est l'art L 121-1 NCP qui introduit dans le système répressif la responsabilité de lapersonne morale.

* L'infraction doit être commise pour le compte de l'établissement. I l faut un certain avantagematériel ou moral pour l'établissement. Sont donc exclus les actes commis par intérêt personneld'un agent ou pour celui d'autrui.

* L'infraction est commise par les représentants ou les organes de l'établissement, il s'agitd'instances prévues par la loi ou les statuts pour diriger l'établissement, soit pour l'établissementde santé : le directeur, le conseil d'administration ou son président.

• La responsabilité d'une personne morale n'est engagée que si un texte le prévoitexpressément.

Le nouveau code pénal stipule l'engagement possible de cette responsabilité à propos d'une séried'incriminations susceptibles de concerner l'activité thérapeutique d'un établissement.

Pour chaque texte, des sanctions spécifiques à la personne morale sont prévues :Article 131-37 s du NCP : " Les peines criminelles ou correctionnelles encourues par lespersonnes morales sont l'amende et dans les cas prévus par la loi, les peines énumérées àl'article 131-39. "

• Lorsque la loi le prévoit à l'encontre d'une personne morale, un crime ou un délit peutêtre sanctionné d'une ou de plusieurs des peines suivantes :

1. La dissolution de la personne morale :* lorsque la personne morale a été créée* ou (lorsqu'il s'agit d'un crime ou d'un délit puni en ce qui concerne les personnesphysiques) d'une peine d'emprisonnement supérieure ou égale à trois ans détournée de sonobjet pour commettre les faits incriminés ;

2. L'interdiction, à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus, d'exercer directementou indirectement une ou plusieurs activités professionnelles ou sociales ;

3. Le placement, pour une durée de cinq ans au plus, sous surveillance judiciaire ;4. La fermeture définitive ou pour une durée de cinq ans au plus des établissements ou de l'un

ou de plusieurs des établissements de l'entreprise ayant servi à commettre les faitsincriminés ;

5. L'exclusion des marchés publics à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus ;6. L'interdiction, à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus, de faire appel public à

l'épargne;7. L'interdiction, pour une durée de cinq ans au plus

* d'émettre des chèques autres que ceux qui permettent le retrait de fonds par le tireur auprèsdu tiré,* ou des chèques autres que ceux qui sont certifiés,* ou d'utiliser des cartes de paiement ;

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8. La confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction ou de lachose qui en est le produit ;

9. L'affichage de la décision prononcée ou la diffusion de celle-ci soit par la presse écrite, soitpar tout moyen de communication audiovisuelle.

Les peines définies aux 1° et 3° ci-dessus ne sont pas applicables aux personnes morales de droitpublic dont la responsabilité pénale est susceptible d'être engagée.

Elles ne sont pas non plus applicables aux partis ou groupements politiques ni aux syndicatsprofessionnels.

La peine définie au 1° n'est pas applicable aux institutions représentatives du personnel.(dissolution interdite pour établissement public donc hôpital public).

Attention :La responsabilité des personnes morales n'exclut pas celles des personnes physiques. Il est doncpossible qu'un dirigeant de l'établissement soit condamné personnellement.

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La responsabilité disciplinaire

Selon l'article L. 4234-1-1 NCSP, en cas de faute professionnelle, les particuliers peuvent, dansdes conditions déterminées par décret, saisir le conseil régional ou central compétent.

Ainsi en cas de manquement au droit des patients, ou à la déontologie, le médecin risque dessanctions ordinales.

La responsabilité disciplinaire permet d'apprécier un acte au regard de règles internes qu'ellessoient celles générales de la profession _ comme lorsqu'il s'agit d'un ordre professionnel_, ou demodalités particulières d'exercice selon que l'on soit salarié, agent de la fonction publique ouexerçant en libéral.

La responsabilité disciplinaire est très diversifiée. Quasiment chaque corps de métiers à son codede déontologie (des chirurgiens-dentistes, des sages femmes mais aussi police nationale,architecte).

• Le code de déontologie médicaleAinsi, dans son article 69, le code affirme que l'exercice de la médecine est personnel, parconséquent chaque médecin est responsable de ses décisions et de ses actes.

Tout médecin, lors de son inscription au tableau, doit affirmer devant le conseil départemental del'ordre qu'il a eu connaissance du présent code et s'engager sous serment et par écrit à lerespecter ainsi tout manquement à ce code peut donner lieu à des poursuites disciplinaires.

• Loi du 09 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publiquehospitalière

On retrouve cette idée de responsabilité disciplinaire dans son chapitre 7.

L'article 82 rappelle que " L'autorité investie du pouvoir de nomination exerce le pouvoirdisciplinaire après avis de la commission administrative paritaire siégeant en conseil dediscipline et dans les conditions prévues à l'article 19 du titre 1er du statut général ". On amême prévu les différents types de sanctions possibles.

Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes :1. Premier groupe : l'avertissement, le blâme ;2. Deuxième groupe : la radiation du tableau d'avancement, l'abaissement d'échelon,

l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de quinze jours ;3. Troisième groupe : la rétrogradation, l'exclusion temporaire de fonctions pour une

durée de trois mois à deux ans ;4. Quatrième groupe : la mise à la retraite d'office, la révocation

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2. La mise en œuvre de la responsabilité

Lorsque survient un accident thérapeutique, la plus grande attention est portée aux suitesimmédiates : dialogue avec le patient ou sa famille et examen de la meilleure solution derèglement.

On essaye d'éviter que les litiges dégénèrent et que les conflits n'aboutissent devant lestribunaux. C'est pourquoi est d'abord privilégié le règlement à l'amiable.

Quand c'est l'impasse, c'est devant les tribunaux que vont se régler les affaires.

La mise en oeuvre de la responsabilité :

* Le règlement à l'amiable* Les organes de la procédure d'indemnisation* La procédure de règlement amiable proprement dite* La procédure devant les tribunaux

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Le règlement à l'amiable

• Le règlement à l'amiable consiste à se mettre d'accord, sans intervention judiciaire.* Il a été favorisé par la loi du 4 mars 2002 qui a institué des commissions régionales deconciliation et d'indemnisation, afin de " déjudiciariser " ce contentieux.

* En outre, dans chaque établissement de santé, une commission des relations avec les usagers etde la qualité de la prise en charge a pour mission de veiller au respect des droits des usagers et decontribuer à l'amélioration de la qualité de l'accueil des personnes malades et de leurs proches etde la prise en charge.

* Cette commission facilite les démarches de ces personnes et veille à ce qu'elles puissent, le caséchéant, exprimer leurs griefs auprès des responsables de l'établissement, entendre lesexplications de ceux-ci et être informées des suites de leur demande.

* Par contre, elle n'a pas de pouvoir de conciliation.

• La nouvelle procédure de règlement amiable en cas d'accident médical s'applique àtous les accidents médicaux graves, pour faute ou sans faute, lorsque les dommagessubis présentent un seuil de gravité à préciser par décret (le taux d'incapacitépermanente doit être au plus égal à 25 %).

* Cette procédure d'indemnisation s'applique quel que soit le risque, que celui-ci soit dû à unproduit de santé, un médicament, à un acte chirurgical ou un acte d'investigation ou deprévention.La procédure est désormais identique que l'incident ou l'accident se produise dans un hôpital, uneclinique ou un cabinet libéral.

* Elle n'est pas exclusive et un patient peut continuer de saisir directement le tribunal ou demener les deux démarches de façon concurrente, à condition d'en informer la commission et lejuge.

* Toutefois, il n'est rien prévu pour harmoniser les décisions de la commission et du juge. Lerisque est donc d'aboutir à des contradictions d'appréciation sur l'indemnisation de l'intéressé.* De plus, la tentation sera grande pour les victimes de saisir à la fois le tribunal et lacommission, pour ne pas perdre de temps.* Ainsi, en cas de rejet de la commission (si les critères ne sont pas réunis par exemple), lavictime peut se reporter sur l'instance en cours sans perdre de temps.

• Une obligation d'information des victimes est instaurée par la loi du 4 mars 2002 :* le droit pour toute personne s'estimant victime d'un accident médical ou ses ayants droit(héritiers ou représentants d'incapables), si la personne est décédée, d'être informée par lesprofessionnels de santé sur les circonstances et les causes de cet accident, dans un délaimaximum de quinze jours (L.1142-4 de la loi).

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* Cette information lui est délivrée au plus tard dans les quinze jours suivant la découverte dudommage ou à sa demande expresse, lors d'un entretien au cours duquel la personne peut se faireassister par un médecin ou une autre personne de son choix.

* Si un patient victime d'un aléa thérapeutique perdait ou voyait son droit à indemnisationretardé du fait de la violation du devoir d'information du professionnel ou de l'établissement, ilpourrait engager la responsabilité civile ou administrative de ces derniers.

* Par ailleurs, la responsabilité pénale du professionnel ou de l'établissement de santé pourraitêtre recherchée, notamment pour les délits d'atteintes à l'intégrité de la personne, et expositiond'autrui à un danger, voire omission de porter secours à personne en péril : (voir la suite: Lesorganes de la procédure d'indemnisation)

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Les organes de la procédure d'indemnisation

Deux organismes sont créés :- une commission régionale de conciliation et d'indemnisationet- l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux.

• une commission régionale de conciliation et d'indemnisation :* Dans chaque région, une commission régionale de conciliation et d'indemnisation (articles1142-5 et s de la loi et R 795-49 du décret du 3 mai 2002) est chargée de faciliter le règlementamiable des litiges relatifs aux accidents médicaux, aux affections iatrogènes et aux infectionsnosocomiales, ainsi que des autres litiges entre usagers et professionnels de santé, établissementsde santé, services de santé ou organismes ou producteurs de produits de santé.

* Elle a aussi un rôle de conciliation pour les accidents médicaux qui ne réunissent pas lescritères exigés par la loi, pour encourager le traitement non contentieux des accidents médicaux.

* Dans ce cadre, la commission peut déléguer ses compétences à des médiateurs indépendantsqui disposent des mêmes prérogatives .

• Les commissions régionales sont présidées par un magistrat de l'ordre administratif oude l'ordre judiciaire

• elles comprennent vingt représentants des personnes malades et des usagers du système desanté, des professionnels de santé et des responsables des établissements et services desanté, ainsi que des membres représentant l'office et les entreprises d'assurance

• - ce qui doit garantir en principe leur indépendance,

- Ce qui pourrait laisser à douter de l'indépendance des commissions à l'égard de l'office.

L'inconvénient serait que cela amène les commissions à réduire la prise en charge de l'officeau titre de la solidarité nationale, ce qui semble difficilement envisageable en raison mêmede leurs compositions et du but de la loi.

• Par contre, les frais de fonctionnement des commissions sont assurés par l'office qui leurapporte également un soutien technique et administratif, notamment en mettant à sadisposition le personnel nécessaire.

• l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux :* Au niveau national, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (articles 1142-7de la loi et R 795-1 et suivants du décret du 29 avril 2002), des affections iatrogènes et desinfections nosocomiales est chargé de l'indemnisation au titre de la solidarité nationale.

* Il s'agit d'un établissement public à caractère administratif de l'Etat, placé sous la tutelle duministre chargé de la santé essentiellement financé par les caisses de sécurité sociale (décret du3 mai 2002).

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* Son financement est donc assuré par une dotation globale dont le montant est fixé par la loi definancement de la sécurité sociale.

* Il agit comme un Fonds de Garantie qui intervient soit en qualité de substitut de l'assureur,soit au nom de la solidarité nationale.

L'Office est tenu de procéder à l'indemnisation de la victime, dans trois cas (a. R.795-15 à R795.19 du C.S.S.( Code de la sécurité sociale) :

• En cas d'absence d'assurance;• lorsque les plafonds d'assurance sont dépassés;• en cas de silence ou de refus explicite de l'assureur de faire une offre. Dans ce cas, il doit

respecter la procédure d'offre, comme s'il était l'assureur. Mais, il dispose d'un recourssubrogatoire à l'encontre de l'assureur qui s'expose à des pénalités. Il devra rembourserl'assureur qui à transigé avec la victime sans responsabilité de son assuré. Enfin, l'officeprocédera à l'indemnisation des victimes d'aléa thérapeutique, en l'absence de touteresponsabilité d'un professionnel de santé.

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La procédure de règlement amiable proprement dite

La saisine de la commission :

• La commission régionale peut être saisie par toute personne s'estimant victime d'undommage imputable à une activité de prévention, de diagnostic ou de soins, ou, le caséchéant, par son représentant légal.Elle peut également être saisie par les ayants droit d'une personne décédée (héritiers).La demande d'indemnisation est présentée à la commission régionale dans le ressort delaquelle a été effectué l'acte médical en cause.La demande est présentée au moyen d'un formulaire conforme au modèle approuvé par leconseil d'administration de l'office national d'indemnisation.

• La demande est envoyée à la commission par lettre recommandée avec accusé de réceptionou déposée auprès du secrétariat de la commission contre récépissé.Elle est accompagnée de pièces justificatives incluant notamment un certificat médicalattestant la consistance précise des dommages et la gravité de ceux-ci dont le demandeur aété ou s'estime victime.

La saisine de la commission suspend les délais de prescription et de recours contentieuxjusqu'au terme de la procédure, de sorte que le patient peut saisir en premier lieu la commissionrégionale et en cas d'échec, le tribunal.

• Afin d'apprécier le caractère de gravité du préjudice subi, la commission, ou son présidents'il a une délégation en ce sens, peuvent recourir à une expertise ou soumettre pourobservation les pièces justificatives à un expert.

En l'état, les victimes risquent de perdre six mois devant la commission, sans même avoirbénéficié d'une expertise.

Si la commission estime qu'elle est compétente, les parties concernées ainsi que lesassureurs des parties mises en cause sont avisés par lettre recommandée avec accusé deréception de la date à laquelle la commission se réunit en vue de rendre un avis.

• A tout moment, les parties sont informées, à leur demande, de l'état de la procédure.Les parties sont entendues sur leur demande ou à la demande de la commission.Elles peuvent se faire représenter ou assister par une personne de leur choix.

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Avis de la commission :

• L'avis est adressé par lettre recommandée avec accusé de réception au demandeur, à l'officenational d'indemnisation ainsi qu'au professionnel mis en cause et à son assureur.

La commission émet un avis pour chaque chef de préjudice sur les circonstances, les causes,la nature et l'étendue des dommages subis ainsi que sur les responsabilités encourues et lerégime d'indemnisation applicable.

Elle précise également si, à la date où l'avis est rendu, l'état de la victime est consolidé ounon.

S'il n'est pas consolidé, le patient ne pourra obtenir qu'une provision sur les dommages etintérêts.

L'offre définitive devra être faite dans un délai de deux mois suivant la date de laconsolidation.

• Cet avis est la clé de voûte du système puisque c'est sur la base de cet avis quel'indemnisation sera mise à la charge soit de l'assureur, soit de la solidarité nationale.

Il ne peut être contesté qu'à l'occasion de l'action en indemnisation introduite devant lajuridiction compétente par la victime ou des actions subrogatoires qui peuvent être intentéespar l'assureur du responsable, ou par l'office national d'indemnisation.

Offre de transaction :

• En ce qui concerne les compagnies d'assurance, lorsque la commission régionale estimequ'un dommage engage la responsabilité d'un professionnel ou d'un établissement de santé,l'assureur qui garantit la responsabilité civile ou administrative de la personne considéréecomme responsable par la commission adresse à la victime ou à ses ayants droit, dans undélai de quatre mois suivant la réception de l'avis, une offre d'indemnisation visant à laréparation intégrale des préjudices subis dans la limite des plafonds de garantie des contratsd'assurance.

• L'assureur qui fait une offre à la victime est tenu de rembourser à l'office les frais d'expertiseque celui-ci a supportés.

S'il estime que la responsabilité de son assuré n'est pas engagée, l'assureur, une fois lavictime indemnisée, dispose d'un recours subrogatoire contre le tiers responsable ou contrel'office.

En cas de silence ou de refus explicite de la part de l'assureur de faire une offre, ou lorsquele responsable des dommages n'est pas assuré, ou lorsque la couverture d'assurance prévue àl'article est épuisée, l'Office est substitué à l'assureur (dans ce cas, le juge peut condamnerl'assureur ou le responsable à verser à l'Office une somme au plus égale à 15 % del'indemnité qu'il alloue).

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• Lorsque la commission régionale estime que le dommage est indemnisable sans faute,l'Office adresse à la victime ou à ses ayants droit, dans un délai de quatre mois suivant laréception de l'avis, une offre d'indemnisation visant à la réparation intégrale des préjudicessubis.

La victime, ou ses ayants droit, dispose du droit d'action en justice contre l'Office si aucuneoffre ne lui a été présentée ou si elle n'a pas accepté l'offre qui lui a été faite.

Si l'office estime que l'accident engage la responsabilité d'un professionnel de santé ou d'unétablissement ou d'un producteur de produit, il dispose lui aussi d'un recours subrogatoirecontre le responsable.

Transaction et paiement :

• L'acceptation de l'offre de l'assureur ou de l'Office vaut transaction au sens de l'article 2044du code civil.

• Le paiement doit intervenir dans un délai d'un mois à compter de la réception par l'assureurou l'Office de l'acceptation de son offre par la victime.

• Dans le cas contraire, les sommes non versées produisent de plein droit intérêt au double dutaux légal à compter de l'expiration de ce délai et jusqu'au jour du paiement effectif ou, lecas échéant, du jugement devenu définitif.

Saisine des tribunaux :

• Si le patient n'accepte pas l'offre proposée ou n'est pas réglé des sommes qui lui sont dues, ilpeut saisir le juge compétent.

• Si le juge compétent, saisi par la victime qui refuse l'offre de l'assureur, estime que cetteoffre était manifestement insuffisante, il condamne l'assureur à verser à l'Office une sommeau plus égale à 15 % de l'indemnité qu'il alloue, sans préjudice des dommages et intérêts dusde ce fait à la victime.

• Le but de la loi étant la satisfaction de la victime, cette pénalité constitue une garantie afinque les offres soient raisonnables.

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La procédure devant les tribunaux

Les délais varient selon la juridiction compétente :En matière administrative :

• Pour obtenir réparation par l'administration en général, il faut lui présenter préalablementune demande écrite d'indemnité.

• Cette demande préalable à l'administration, puis l'action en justice, doivent être formées auplus tard dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant cellependant laquelle les droits ont été acquis.

• Si vous agissez hors délai, la dette de l'administration est prescrite : il s'agit de ladéchéance quadriennale.

• La déchéance quadriennale est interrompue par toute demande de paiement ouréclamation adressée à l'autorité administrative ou par le recours exercé même devant unejuridiction incompétente.

En matière médicale :

• Le point de départ à compter duquel court le délai pour demander l'indemnité est la date àlaquelle le dommage s'est révélé à la fois dans son existence et dans toute son étendue, c'est-à-dire la date de la consolidation (l'état de santé qui ne peut plus être amélioré par lathérapie).

• En règle générale, les personnes atteintes par le virus de l'hépatite C ou le sida ne peuventêtre consolidées au plan médico-légal, dans la mesure ou la maladie est évolutive.

• De plus, la loi du 4 mars 2002 a unifié la prescription des actions civiles et administrativesà 10 ans. Cette disposition est immédiatement applicable, en tant qu'elle est favorable à lavictime ou à ses ayants droit, aux actions en responsabilité, y compris aux instances en coursn'ayant pas donné lieu à une décision irrévocable.

• A relever également que les délais de recours contentieux sont interrompus par unrecours gracieux ou adressé à l'auteur de l'acte ou par le recours hiérarchique adressé ausupérieur de l'auteur de l'acte.

La juridiction administrative ne peut en principe être saisie que contre une décision préalablementprise par l'administration (sauf pour certains référés), c'est-à-dire :

• soit contre une décision prise spontanément par l'administration (par exemple unrèglement)

• soit contre une décision que le demandeur aurait provoquée ou le silence gardé parl'administration .

• En effet : lorsque l'administration n'a pas pris spontanément une décision, le demandeur nepouvait saisir le juge administratif d'une demande de dédommagement qu'après avoirprésenté préalablement sa demande à l'administration.

• Si l'administration est taisante, ce silence est assimilé à une décision implicite de rejet aubout de deux mois ( depuis le 1er novembre 2000, loi du 12 avril 2000, JO 13 avril 2000).

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En matière civile :

• Avec la loi du 4 mars 2002, la prescription des actions civiles et administratives a étéunifiée à 10 ans à compter de la consolidation1 du dommage, alors qu'elle étaitauparavant soumise à 30 ans en matière contractuelle civile.

• Toutefois, le fait que le point de départ soit la consolidation du dommage, peut permettre àla victime d'exercer quasi indéfiniment son action en cas d'évolution ou d'aggravationde son état.

En matière pénale :• pour les contraventions, l'action publique se prescrit par 1 an.• pour les délits, l'action publique se prescrit par trois ans.• pour les crimes, l'action publique se prescrit par dix ans.

• Ces délais partent du jour où l'infraction a été commise, ou du jour où vous en avez euconnaissance, suivant les infractions. Si vous n'agissez pas dans ces délais, la personnedélinquante ne peut plus être poursuivie au tribunal pénal. Cependant, l'expiration de cesdélais ne fait pas obstacle à l'action devant le juge civil dans les délais ci-dessus.

• L'action publique est déclenchée* soit, dans la grande majorité des cas, par une plainte avec constitution de partie civile dupatient ou de sa famille (comme ayants droit),* soit cas plus rare par plainte simple.

Enfin le parquet peut se saisir d'office (toutes les morts suspectes sont obligatoirementsignalées).La juridiction de renvoi sera le tribunal correctionnel. On utilisera souvent plusieurs experts.

1 Il y a consolidation d’un dommage à partir du moment où le domage est définitif. Par exemple, lorsqu’on perd unemain dans un accident, le dommage est définitif : il n’y a pas d’évolution domme dans certaines maladies (dommagenon consolidé : lorsqu’on contracte le virus du SIDA, la maladie est évolutive jusqu’au décès).

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3. La réparation pécuniaire supportée par les établissements publics de santé

En fait, le préjudice en droit médical ne présente aucune particularité par rapport au droitcommun. Il est possible de demander des dommages et intérêts pour :

• les frais engagés• le manque à gagner en cas d'incapacité temporaire ou définitive de travail (ITT)• le manque à gagner en cas d'incapacité temporaire ou définitive de travail (ITT)

l'incidence professionnelle• l'invalidité permanente (IPP)• le préjudice moral• le préjudice d'agrément (perte de la pratique d'un sport)• le préjudice sexuel• la douleur• le préjudice esthétique• La perte d'une chance de guérison ou de survie : La perte d'une chance peut être indemnisée

distinctement de l'invalidité ou d'un décès. Il s'agit de sanctionner le médecin qui a faitperdre au malade une possibilité d'échapper aux conséquences subies.

Quelques exemples d'indemnisation :• IPP :

IPP 15 % : entre 60.000 francs et 150.000 francsIPP 25 % : entre 150.000 francs et 250.000 francsIPP 50 % : entre 500.000 et 800.000 francs

• Pretium doloris :1/7 : environ 4.000 francs2/7 ou 3/7 : entre 10.000 francs et 20.000 francs4/7 : entre 25.000 francs et 35.000 francs5/7 : autour de 50.000 - 60.000 francs6/7 : autour de 100.000 francs7/7 : 150.000, ou plus

• Préjudice esthétique :1/7 : autour de 3.000 francsléger 2/7 : 5.000 à 15.000 francsmodéré : de 20.000 à 50.000 francsimportant : 70.000 ou plus

• Préjudice d'agrément : variable suivant l'aptitude à réaliser les actes de la vie courante, lapratique antérieure d'un sport...

Par exemple, une victime qui a subi une amputation partielle de la jambe gauche a obtenu70.000 francs à ce titre.

• Préjudice moral :perte d'un conjoint : entre 20.000 francs et 100.000 francsperte d'un enfant : entre 20.000 et 100.000 francs pour chaque parent

• Préjudice sexuel :Victime âgée de 19 ans dans un état grabataire : 300.000 francs pour ce poste.

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L'indemnisation varie suivant les circonstances du dommage et la situation personnelle dela victime (âge, profession, activités ...), mais également suivant les juridictions saisies.

Ainsi, pour des faits à peu près similaires, les différences d'indemnisation peuvent êtreimportantes. En effet, il existe une différence importante entre les juridictions administratives etles juridictions judiciaires. D'une manière générale, la juridiction administrative indemnisetrois à cinq fois moins que les juridictions judiciaires.

À titre d'exemple :• Pour un enfant d'1 an avec une IPP 100% :

CA Rouen 30/10/96 : 10 millionsCAA Nancy 30/12/95 : 2,5 millions

• Pour une femme de 47 ans avec une IPP 12% :CA Agen 23/4/97 : 422.000CAA Nantes 7/2/87 : 55.000

• Pour une femme de 36 ans IPP 33% :CA Paris 24/5/96 : 1.460.000CAA Nantes 11/95 : 240.000 francs

Les suites financières d'un accident thérapeutique survenu en établissement public de santéincombent à ce dernier et non à son personnel.

Elles relèvent du juge administratif sauf quelques cas résiduels (ex : cas de recherchesmédicales).

Attention :ce n'est pas parce qu'il y a relaxe ou non lieu qu'il y a en matière civile obstacle à lacondamnation de l'hôpital public.

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a. La réparation de la faute

• La responsabilité des établissements de santé se caractérise par la prise en compte par le juge administratif nonseulement de la faute établie mais aussi de la faute présumée.

• Il reste le cas particulier de la faute détachable du service public hospitalier.

La faute établie par le requérant

Article L 1142-1 dispose :" Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé,les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que toutétablissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels deprévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageablesd'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute.

La réaffirmation du principe de la responsabilité pour faute s'accompagne de l'obligationpour les professionnels de santé exerçant à titre libéral, les établissements de santé, services desanté et toute autre personne morale, autres que l'Etat, exerçant des activités de prévention, dediagnostic ou de soins ainsi que les producteurs, exploitants et fournisseurs de produits desanté, de souscrire une assurance destinée à les garantir pour leur responsabilité civilesusceptible d'être engagée (article L.1142-2 de la loi).

• Sont dispensés de cette obligation les médecins hospitaliers ainsi que les professionnels desanté exerçant en tant que salariés dans un établissement privé, mais dans cette dernièrehypothèse, la responsabilité de ces personnes devra être garantie par l'assureur del'établissement.

• En matière thérapeutique, la responsabilité de l'établissement public de santé est depuis 1992engagé sur la base de la faute médicale sans distinction.

Traditionnellement on distinguait suivant trois catégories de fautes :

* la faute lourde pour les erreurs de diagnostic et de traitement ainsi que les fautescommises lors des interventions chirurgicales,* la faute simple pour les soins courants* et la faute dans l'organisation et le fonctionnement du service public hospitalier.

L'arrêt époux V. du 10 avril 1992 a mis un terme à l'exigence de la faute lourde.

Toutefois, la faute médicale de nature à engager la responsabilité de l'hôpital demeure une fautecaractérisée, une faute spécifique.

Il ne peut s'agir de n'importe quelle erreur et le juge prend toujours en considération la difficultéde l'opération, l'urgence d'une situation, les moyens de l'hôpital...

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Désormais, on distingue entre la faute commise par le médecin au sein de l'établissement et lafaute de l'établissement dans l'organisation et le fonctionnement du service.

• En cas de faute du médecin à l'hôpital, en principe, une faute médicale commise dans unhôpital relève de la responsabilité de cet hôpital

* S'il s'agit d'une faute de service : en ce cas, le médecin n'est pas personnellementresponsable. Il convient alors d'engager la responsabilité de l'hôpital devant les tribunauxadministratifs.

• Exemples de responsabilité hospitalière du fait d'une faute médicale :

* Méconnaissance, au cours d'une séance de dilatation de l'oesophage, des règles habituellesd'emploi des sondes utilisées (CAA Nantes, 30 octobre 1997 ),* ou Erreurs techniques comme la pose d'un cathéter jugulaire dans l'artère carotide droite(CE 30/6/99, LACHAUD)* ou le non respect des règles de l'art dans l'injection d'un corticoïde (CAA Bordeaux15/2/99 CAUHAPE).

• Pour le médecin qui exerce en secteur privé de l'hôpital, si le dommage est dû à un défautd'organisation ou de fonctionnement ou à une faute du personnel, la responsabilité del'hôpital peut être engagée.

• En principe, il faut prouver une faute dans l'organisation ou le fonctionnement du servicepublic hospitalier.

• Il s'agit d'une faute caractérisée, une faute spécifique. Le défaut de surveillance estfréquemment invoqué par les victimes.

• À cet égard, l'obligation de surveillance s'impose durant toute la durée de l'hospitalisation etparfois même au delà.

• En exemple,* il y a le défaut de surveillance d'un patient installé sur un matelas chauffant défaillant(responsabilité partagée avec le fabricant de matelas, CAA Paris 18 mai 1999, CORREIA)* ou encore le défaut de surveillance obstétricale d'une patiente dont l'accouchement parcésarienne avait été différé de 3 heures, pour une autre urgence, alors qu'il s'agissait d'unegrossesse à haut risque (CAA Lyon 20 mars 1997).

Cependant, le juge administratif ne retient pas la responsabilité de l'établissement lorsquel'état de la victime ne laissait pas présager des événements aussi graves que par exempleune tentative de suicide (CE 29 janvier 1999, Dame TRIMMEL) ou un incendie volontaire(CAA Bordeaux, 5/7/99, SA La Préservatrice foncière assurances TIARD).

Par contre, dès lors que les patients présentent des signes d'agitation ou de déséquilibre, lesétablissements, même non spécialisés en psychiatrie, sont tenus d'une obligation de surveillance.(CAA Bordeaux 8 mars 1999 , consorts JANOTA et CAA Lyon 22 juin 1999 SILVESTRE).

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De manière générale, le juge vérifie concrètement que " compte tenu des moyens techniques etdu personnel médical dont dispose l'établissement, le malade a reçu tous les soins quipouvaient être pratiqués et a été suivi par des médecins qualifiés pour traiter son affection "(Conseil d'état, 23 avril 1997, veuve MARUT)

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La responsabilité sans faute

Dans certains cas, la responsabilité du médecin peut être engagée en l'absence de toute fauteprouvée de sa part. Suivant la loi du 4 mars 2002, la responsabilité sans faute est maintenuedans deux cas essentiellement :* en raison des produits de santé* et en cas d'infections nosocomiales pour les établissements de santé.

Dans le cas de la fourniture de produits,le médecin qui fournit un produit à son patient n'accomplit pas un acte médical, mais un actetechnique.* Sa responsabilité est donc celle de tous fournisseurs de produits, qui consiste à livrer desproduits sains.* En revanche, le médecin ayant réalisé la transfusion avec du sang qui lui a été fourni n'est pasresponsable de la contamination, sauf faute prouvée de sa part (en effet, il n'a pas l'obligation decontrôler les produits sanguins qui lui sont fournis).* En outre, la loi du 19 mai 1998 a consacré une responsabilité de plein droit à la charge desfabricants et des fournisseurs de produits défectueux, dont les médicaments défectueux.

En ce qui concerne les appareils,il s'agit depuis longtemps d'une obligation de résultat en ce qui concerne la conception,l'entretien et la bonne conformité des prothèses dentaires.

Ainsi la jurisprudence distingue _s'agissant des dentistes :* la pose de l'appareil qui demeure un acte médical et relève de l'obligation de moyens,* et sa fourniture qui est soumise à l'obligation de résultat de fournir un appareil sans défaut.

Afin d'indemniser les victimes d'accidents médicaux la jurisprudence avait admis dans descas de plus en plus nombreux une responsabilité sans faute prouvée :En matière d'infections nosocomiales :

• Désormais, la loi du 4 mars 2002 unifie le régime de responsabilité des infectionsnosocomiales tant en établissement public qu'en établissement privé (les tribunauxjudiciaires étaient plus sévères).

* Pour les établissements de santé, elle retient une présomption de faute et un casd'exonération par la cause étrangère (faute de la victime par exemple porteuse de germes,fait d'un tiers par exemple un fournisseur de l'établissement, la force majeure par exemple uncyclone).En conséquence, sauf s'il est rapporté la preuve de la cause étrangère, les compagniesd'assurances prennent en charge les infections nosocomiales qui ont causé un dommage dansles établissements de santé, soit dans presque tous les cas.

• Par contre, suivant la nouvelle loi, les médecins libéraux sont exclus de ce régime deprésomption de faute.

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En cas d'infection nosocomiale dans un cabinet libéral, il faut donc rapporter la preuve de lafaute d'asepsie ou de stérilisation.En ce cas, la compagnie d'assurances doit prendre en charge les dommages. Il s'agit d'unenouveauté, puisque la jurisprudence retenait une présomption de faute pour les médecinslibéraux, comme pour les établissements.

• Ces nouvelles dispositions s'appliquent aux infections nosocomiales consécutives à desactivités de prévention, de diagnostic ou de soins réalisées au plus tôt six mois avant lapublication de la présente loi et aux instances en cours. La loi a été publiée le 5 mars 2002 ;elle s'applique donc incontestablement aux infections nosocomiales commises après le 5septembre 2002.

En matière d'information du patient :• Il ne s'agit pas d'un cas stricto sensu de responsabilité sans faute.

Mais, le médecin ayant la charge de la preuve de l'information du patient (1re chambre civilede la Cour de cassation, 25 février 1997)

A défaut on en déduit une faute engageant sa responsabilité, ce qui permet uneindemnisation plus large des patients qui ont du mal à trouver une véritable faute médicale.L'obligation d'information servant en ce cas de prétexte à l'indemnisation.

• Par deux arrêts importants du 23 mai 2000 et un arrêt du 18/7/2000, la Cour decassation facilite la mise en œuvre de la responsabilité des médecins en cas d'accidentmédical en consacrant la théorie dite de la " faute virtuelle ".

Ainsi, lorsque la réalisation du traitement ou de l'intervention n'implique pas l'atteinte ou lalésion dommageable, le seul constat de ce résultat dommageable suffit à établir la faute dupraticien, sans qu'il soit nécessaire de rapporter la preuve d'une faute ( par exemple, mise encause d'un kinésithérapeute du seul fait qu'une compresse a causé une brûlure à la patientealors que cette brûlure demeure inexpliquée, défaillance du matériel utilisé...)

La faute est donc déduite du dommage. Il s'agit toutefois d'une présomption simple que lepraticien peut renverser en établissant que l'atteinte était inévitable en prouvant l'anomaliede l'organe atteint. La loi du 4 mars 2002 n'a pas statué sur le bien fondé de cette théorie.

• Ainsi, il arrive que le juge administratif déduise l'existence d'une faute, des faits de la cause.La faute est alors présumée.

* Ce raisonnement s'applique à des hypothèses dans lesquelles un acte de soins courant et àcaractère bénin entraîne des conséquences très graves, sans commune mesure avec le motifinitial de l'hospitalisation ( cas de paralysie suite à une piqûre, Conseil d'Etat 23 février1962, MEIER).* De même lorsque le dommage est inexplicable. Il relève alors d'un fonctionnementdéfectueux du service public (par exemple rapt de bébé dans une maternité, conseil d'Etat 9juillet 1969, époux PUECH).

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La faute détachable du service public

La faute détachable du service public hospitalier, lorsqu'elle est d'une gravité exceptionnelle (au delà de la fautelourde), c'est alors la responsabilité pécuniaire de l'agent qui est engagée.

La faute personnelle relève de la compétence des tribunaux judiciaires.

Ce sont des cas assez rares : médecin qui s'enfuit lors d'un incendie, chirurgien de garde qui ne se déplace pas, refusde soigner un patient, retard dans l'intervention ...

Il s'agit d'une faute "qui relève un manquement inexcusable à des obligations d'ordre professionnel etdéontologique" (Cour de cassation, 2 avril 1992).

Si la faute a été commise à l'occasion du service ou si le service a fourni l'instrument du dommage, le patient a lechoix entre poursuivre le médecin ou l'hôpital.Donc, il peut y avoir cumul des responsabilités : faute personnelle de l'agent et faute de service. Il y a alors cumul defautes et répartition des dommages.

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b. La réparation de l'aléa thérapeutique

La loi du 4 mars 2002 crée un dispositif de règlement amiable et d'indemnisation en casd'aléa thérapeutique.

L'article L. 1142-1 NCSP dispose " lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'unétablissement, service ou organisme de santé ou d'un producteur de produits n'est pasengagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvredroit à la réparation des préjudices du patient au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sontdirectement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eupour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme del'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, appréciéau regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée etprofessionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'incapacité permanente ou dela durée de l'incapacité temporaire de travail."

Désormais, en cas d'aléa thérapeutique causant un accident médical préjudiciable à un patient, laréparation sera servie au titre de la solidarité nationale, par un organisme relevant de l'Etat :l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux.

* Les juridictions ne pourront plus retenir la responsabilité d'un médecin ou d'un établissementde soins en cas d'aléa thérapeutique, afin d'indemniser le patient victime.

* La victime pourra saisir une commission régionale de conciliation et d'indemnisation qui rendun avis favorable ou non sur l'indemnisation dans un délai de six mois.* En cas d'avis favorable pour la victime, l'Office national d'indemnisation doit faire uneproposition dans un délai de quatre mois et payer, en cas d'acceptation, dans un délai d'un mois

Le texte précise les conditions d'accès à ce nouveau droit à indemnisation, qui s'inspire de lajurisprudence.Le dommage doit :

• Etre directement imputable à une activité de prévention, de diagnostic ou de soins : il fautdonc établir le lien de causalité entre l'acte de soin et l'accident médical.

• Avoir un caractère anormal au regard de l'état de santé du patient et de l'évolution prévisiblede celui-ci (des séquelles inévitables sont exclues du nouveau régime).

• Enfin remplir des critères de gravité :* fixés par décret* appréciés au regard de la perte de capacité fonctionnelle et des conséquences sur la vieprivée et professionnelle (mesurées en tenant compte du taux d'incapacité permanente ou dela durée de l'incapacité temporaire de travail).

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Le taux d'incapacité permanente est au plus égale à 25 pour cent et il doit être précisé pardécret.

• Néanmoins, il faut préciser que ce seuil de gravité peut aussi s'apprécier au regard de ladurée de l'incapacité temporaire de travail.

Ainsi une victime peut faire l'objet d'une incapacité permanente légère et d'une incapacitétemporaire de travail très longue et en conséquence réunir les critères de gravité pourbénéficier du nouveau système législatif (exemple d'un pianiste qui a un doigt amputé).

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Tableau résumé de la responsabilité médicale

Responsabilité pour fauteInfections nosocomiales dans lesétablissements de santéet produits défectueux

Aléa thérapeutique

Tribunaux : Tribunalde grande instance ettribunal administratif.

• Le critère de gravité n’est pasexigé.

• Procédure plus longue et pluscoûteuse pour les victimes quele nouveau système.

• Le critère de gravité n’estpas exigé.

• Avant la loi :développement d’uneresponsabilité sans faute.

• Après la loi : risque derejet devant les tribunaux,le principe affirmé étantcelui de la responsabilitépour faute.

Système loi du 4mars 2002 :commission régionaleet office nationaled’indemnisation

Il faut remplir le critère de gravité :• Lettre AR* de la victime à la

commission régionale. Avis dela commission dans un délaide 6 mois.

• Avis défavorable àl’indemnisation : tribunal ouconciliation possible.

• Avis favorable : offre dans undélai de 4 mois par l’assureur.

• Silence ou refus de l’assureur :offre par l’office dans un délaide 4 mois.

• Paiement dans un délai d’unmois après acceptation.

• Recours subrogatoire possiblecontre le responsable parl’assureur ou l’office.

Il faut remplir le critère de gravité: système de solidarité nationale.

• Lettre AR de la victime àla commission régionale.

• Avis de la commissiondans un délai de 6 mois.

• Avis défavorable àl’indemnisation : pasd’indemnisation sans fautedevant le tribunal saufpour les deux exceptionsprécitées.

• Avis favorable : offre dansun délai de 4 mois parl’office.

• Paiement dans un délaid’un mois aprèsacceptation par l’office.

• Recours subrogatoirepossible de l’office.

Conciliation :commission régionaled’indemnisation oucommission desrelations des usagersou Ordre concerné.

Le critère de gravité n’est pas exigé.

• Risque de rejet (pas deresponsabilité sans faute).

• Sauf pour les infectionsnosocomiales et du fait desproduits.

• Assurance personnelle

* AR : avec accusé de réception

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c. La responsabilité d'une clinique privée

Le plus souvent, les victimes agissent à la fois contre la clinique et le médecin, ou contre l'un desdeux qui appelle l'autre en garantie. Mais les responsabilités ne sont pas les mêmes suivant lescas.

Faute du médecin au sein de la clinique :• Le médecin qui exerce dans le cadre d'un contrat d'exercice libéral en clinique privée reste

responsable de ses fautes.Bien entendu, la responsabilité de la clinique pourrait être également mise en cause enraison d'une faute propre qui, avec celle commise par le médecin, aura causé le dommage :en ce cas, le médecin et la clinique peuvent être condamnés solidairement.

• Si le médecin est salarié de la clinique, la clinique est responsable de ses fautes.Suivant une décision du tribunal des conflits du 14 février 2000 , le patient conserve lapossibilité de rechercher la responsabilité personnelle du médecin sur le fondement de laresponsabilité délictuelle.* Le tribunal précise que dans l'exercice de son art, le médecin agit en toute indépendance ;il n'est pas un simple exécutant d'une mission définie et dirigée par un commettant.* Ainsi, le patient peut agir sur un fondement contractuel à l'encontre de l'établissementprivé de santé et sur le terrain délictuel à l'encontre du praticien.

Faute de la clinique :• Par exemple :

* manquement à son obligation d'organisation et de bon fonctionnement (mise à dispositiond'un personnel médical et paramédical qualifié, du matériel nécessaire en bon état defonctionnement....), de surveillance, de soins, ...* Il peut s'agir d'absence de permanence de médecins anesthésistes réanimateurs pouvantintervenir dans les délais nécessaires (Cass, 1ère civ, 15/12/99, Sté Clinique Généraled'Annecy/Ep. S)* ou de manquement dans l'organisation de la concertation entre les chirurgiens et l'uniquemédecin anesthésiste de la clinique pour établir un programme opératoire (Cour d'appel deBourges, première chambre, 6 mai 1998).* Autre possibilité : retard excessif mis par une clinique à fournir du sang approprié à unepatiente qui subissait une intervention chirurgicale (Cour d'appel de Rennes, 7e Chambre, 30avril 1997).

• L'obligation de surveillance pèse sur les cliniques dans le cadre du contrat d'hébergementqu'elles concluent avec les patients. Il s'agit d'une obligation de prudence et de diligencedont les exigences varient selon l'état du patient (Cass, 1ère civ, 9/11/99 GAN).

Exemples :

* chute d'un patient opéré sous anesthésie générale le jour même, traité par antalgiques etsomnifère, perfusé, en se rendant aux toilettes attenantes à sa chambre et dont la porte avait été

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laissée entrouverte et la lumière allumée (CA Paris 17/3/00)

* ou encore chute d'une patiente dans un établissement psychiatrique, qui voulait descendre deson lit dépourvu de barreaux alors qu'elle avait déjà été hospitalisée pour état dépressif avecintoxication éthylique (CA Pau 18 /12/1996).• Pour le suicide du patient, les obligations de la clinique varient selon le degré d'atteinte du

malade, sa dangerosité pour lui-même ou pour autrui et le traitement administré.

La clinique peut être exonérée de responsabilité si le comportement du patient ne révélaitaucune tendance suicidaire, ou si l'établissement n'a pas été informé des traitementsantérieurs du patient pour dépression et des risques d'une nouvelle tentative de suicide (CAPau, 1re Chambre 17/04/1996 et Cour de cassation, 3 mars 1998).

La clinique peut également être tenue responsable du fait d'un malade mental hébergé par laclinique et qui a causé des dommages à un tiers (C AOrléans , 25 mai 1996 et 17 septembre1996).

Responsabilité sans faute prouvée de la clinique :• Traditionnellement, on retrouve la responsabilité sans faute pour les problèmes d'origine

nosocomiale.

Pour la fourniture des produits :* la loi du 19 mai 1998 a consacré une responsabilité de plein droit à la charge desfabricants et des fournisseurs de produits défectueux, dont les médicaments défectueux.

Une clinique est tenue à une obligation de sécurité de résultat pour ce qui concerne lesdommages médicaux nés d'un produit (Cour de cassation, 1ère Chambre civile, 7 novembre2000, AGF et a).

• En matière d'information du patient :la Cour de cassation a jugé à cet égard : "la clinique, liée par un contrat d'hospitalisationet de soins, est tenue à l'égard de ses patients d'une obligation de renseignementsconcernant les prestations qu'elle est tenue d'assurer." ( Cour de cassation, 14/10/97).

Ce fondement permet une indemnisation plus large des patients qui ont du mal à trouver unevéritable faute médicale. L'obligation d'information servant en ce cas de prétexte àl'indemnisation.

• En principe, en cas de responsabilité, il s'agit d'une responsabilité civile :

Depuis quelques années, on assiste également à l'émergence d'une responsabilité pénale desdirigeants de la clinique (Cour de cassation, 26 février 1997 ). Dans cette affaire, lepersonnel de garde n'était constitué que d'une aide soignante placée sous la responsabilitéd'une unique infirmière en poste dans un autre service et ce personnel de garde s'est avéréincapable d'assurer les soins d'urgence adaptés à l'état du malade, ce qui a été à l'originedirecte du décès de la victime.

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4. Les responsabilités déontologiques et disciplinaires

Les faits ayant donné lieu à une action devant une juridiction civile, répressive ou administrativesont susceptibles d'entraîner également des poursuites déontologiques et disciplinaires.

Les poursuites déontologiques :

Les poursuites déontologiques concernent les médecins qui relèvent d'une inscription à l'ordredes médecin (exclu les médecins de l'armée).

• Les règles générales :* Les accidents thérapeutiques peuvent être portés, en première instance, devant le conseilrégional de l'ordre statuant en matière disciplinaire.

* Le malade ne peut pas s'adresser directement au conseil régional. Il doit adresser sa demandeau conseil départemental

* Celui-ci est tenu de la transmettre avec avis motivé au conseil régional de l'ordre. Il peut alorsappliquer des peines disciplinaires comme l'avertissement le blâme, l'interdiction temporaire oupermanente d'exercer, radiation de tableau de l'ordre. C'est le conseil d'état qui connaît despourvois en cassation.

Cas de défaut d'assistance à personne en danger ou de risques injustifiés.

• Le cas particulier du médecin hospitalier public :Pour les médecins du service public hospitalier, pour les actes faits dans l'exercice du servicepublic hospitalier, le conseil régional de l'ordre des médecins ne peut être saisi que par leministre de la santé, le directeur départemental de la santé ou le procureur de la république.

Les poursuites devant l'employeur :• Les sanctions administratives en établissement public de santé :

Le corps médical relève de l'instance disciplinaire fonctionnant auprès du ministre chargéde la santé (différent du conseil de l'ordre).

Le personnel hospitalier relevant du titre IV du statut du fonctionnaire hospitalier peuvent fairel'objet d'une procédure disciplinaire dans les conditions de la loi du 9 janvier 1986.

• Les sanctions en institutions de soins privés :Les salariés, médecins et autres personnels relèvent du droit du travail par les contrats, lesconventions collectives et le code du travail. En cas d'accident thérapeutique lié à une fauteprofessionnelle, il revient à l'établissement d'apprécier si une sanction, pouvant aller jusqu'à unemesure de licenciement, doit être appliquée.