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240 | La Lettre du Neurologue • Vol. XVIII - n o 7 - septembre 2014 DOSSIER Neuro-pédiatrie L’enfant “hyperactif” : attitude pratique en exercice libéral ADHD: diagnosis, cares and follow-up R. Buissonnière* *Cabinet médical de l’Olivier, Montigny-le-Bretonneux, et hôpital Mignot, Le Chesnay. L e syndrome de l’enfant “hyperactif” ou trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyper- activité (TDA/H) est un sujet d’actualité parfois très polémique, mais connu depuis longtemps sous d’autres appellations (instabilité psychomotrice). Le syndrome TDA/H repose sur 3 symptômes : déficit attentionnel (primum movens) ; agitation motrice ; impulsivité inconstante. Ces symptômes peuvent être diversement associés : 60 % de formes mixtes ; 30 % de formes avec un déficit attentionnel (DA) prédominant, qui peut être sous-estimé car facilement méconnu ; 10 % de formes avec agitation et impulsivité au premier plan. Le syndrome TDA/H toucherait de 2,5 à 5 % des enfants, avec une prédominance masculine : 2 à 4 garçons pour 1 fille, mais il est possible que, chez les filles, la forme DA soit plus présente, expliquant une fréquence sous-estimée des cas. Diagnostic Le diagnostic repose avant tout sur une concor- dance d’arguments cliniques, renforcés par des tests (neuro-) psychologiques (encadré 1). Les critères du manuel DSM-IV donnent les éléments à rassembler pour le diagnostic (encadré 2). Les critères DSM-IV permettent ainsi d’éliminer de simples difficultés comportementales réactionnelles ou d’évoquer d’autres pathologies neurologiques ou psychiatriques. Les symptômes peuvent se rencontrer chez des enfants souffrant d’une déficience sensorielle, d’une déficience intellectuelle, d’une épilepsie, de troubles du spectre autistique, de troubles bipolaires, etc. Les comorbidités sont également fréquentes et nombreuses : troubles des conduites (troubles opposi- tionnels), troubles anxieux, troubles dépressifs, tics. Ces troubles peuvent être primitifs ou secondaires aux difficultés rencontrées par l’enfant atteint d’un TDA/H, en souffrance. Les troubles d’apprentissages (dyslexie-dysorthographie, troubles logico-mathéma- tiques, dyspraxie) et des difficultés scolaires aggravent fréquemment les difficultés de ces enfants. Des troubles du sommeil doivent aussi être recherchés : insomnie, trouble d’endormissement, voire syndrome de décalage de phase chez l’adolescent, syndrome d’apnées du sommeil, syndrome des jambes sans repos. Ils participent aux difficultés de l’enfant et doivent être pris en charge. Néanmoins, la différence, académique, entre diagnostics différentiels et comor- bités est difficile à faire en pratique et la coexistence de plusieurs pathologies est fréquente, ce qui peut rendre délicate la prise en charge thérapeutique. L’interrogatoire est une étape capitale du diagnostic, il permet aussi de repérer des problèmes associés. Il précise les antécédents médicaux (familiaux et personnels) et le parcours scolaire de l’enfant. Il est important de prendre connaissance des livrets Reconnaissez-vous cet enfant qui : • arrive en retard • bouscule ses condisciples • oublie ses affaires • fait des bruits incongrus • bavarde, fait des interruptions intempestives • est agité, chute de sa chaise • bricole avec tout ce qu’il a sous la main détériore ses objets (trousse refaite régulièrement), les fait tomber • parfois, part dans des rêveries, est distrait, étourdi… • ne comprend pas, ne suit pas les consignes • fait répéter les consignes, fait des fautes d’étour- derie, hors sujet… • ne finit pas ses devoirs • ne prend pas les devoirs à faire • a des cahiers mal tenus, incomplets • a une orthographe défaillante • peut être grossier, insolent • est souvent isolé ou avec les “durs” • est rebelle Mais, par ailleurs, enfant gentil, vif et qui regrette son attitude, qu’il ne peut pas contrôler Encadré 1. Reconnaissez-vous cet enfant ?

L’enfant “hyperactif” : attitude pratique en exercice libéral

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Page 1: L’enfant “hyperactif” : attitude pratique en exercice libéral

240 | La Lettre du Neurologue • Vol. XVIII - no 7 - septembre 2014

DOSSIERNeuro-pédiatrie

L’enfant “hyperactif” : attitude pratique en exercice libéralADHD: diagnosis , cares and follow-up

R. Buissonnière*

*Cabinet médical de l’ Olivier, Montigny-le-Bretonneux, et hôpital Mignot, Le Chesnay.

Le syndrome de l’enfant “hyperactif” ou trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyper-activité (TDA/H) est un sujet d’actualité parfois

très polémique, mais connu depuis longtemps sous d’autres appellations (instabilité psychomotrice). Le syndrome TDA/H repose sur 3 symptômes :

➤ défi cit attentionnel (primum movens) ; ➤ agitation motrice ; ➤ impulsivité inconstante.

Ces symptômes peuvent être diversement associés : 60 % de formes mixtes ; 30 % de formes avec un défi cit attentionnel (DA) prédominant, qui peut être sous-estimé car facilement méconnu ; 10 % de formes avec agitation et impulsivité au premier plan. Le syndrome TDA/H toucherait de 2,5 à 5 % des enfants, avec une prédominance masculine : 2 à 4 garçons pour 1 fi lle, mais il est possible que, chez les fi lles, la forme DA soit plus présente, expliquant une fréquence sous-estimée des cas.

Diagnostic

Le diagnostic repose avant tout sur une concor-dance d’arguments cliniques, renforcés par des tests (neuro-) psychologiques (encadré 1). Les critères du manuel DSM-IV donnent les éléments à rassembler pour le diagnostic (encadré 2). Les critères DSM-IV permettent ainsi d’éliminer de simples diffi cultés comportementales réactionnelles ou d’évoquer d’autres pathologies neurologiques ou psychiatriques. Les symptômes peuvent se rencontrer chez des enfants souffrant d’une défi cience sensorielle, d’une défi cience intellectuelle, d’une épilepsie, de troubles du spectre autistique, de troubles bipolaires, etc.Les comorbidités sont également fréquentes et nombreuses : troubles des conduites (troubles opposi-tionnels), troubles anxieux, troubles dépressifs, tics. Ces troubles peuvent être primitifs ou secondaires aux diffi cultés rencontrées par l’enfant atteint d’un TDA/H, en souffrance. Les troubles d’apprentissages (dyslexie-dysorthographie, troubles logico-mathéma-tiques, dyspraxie) et des diffi cultés scolaires aggravent

fréquemment les difficultés de ces enfants. Des troubles du sommeil doivent aussi être recherchés : insomnie, trouble d’endormissement, voire syndrome de décalage de phase chez l’adolescent, syndrome d’apnées du sommeil, syndrome des jambes sans repos. Ils participent aux diffi cultés de l’enfant et doivent être pris en charge. Néanmoins, la différence, académique, entre diagnostics différentiels et comor-bités est diffi cile à faire en pratique et la coexistence de plusieurs pathologies est fréquente, ce qui peut rendre délicate la prise en charge thérapeutique.L’interrogatoire est une étape capitale du diagnostic, il permet aussi de repérer des problèmes associés. Il précise les antécédents médicaux (familiaux et personnels) et le parcours scolaire de l’enfant. Il est important de prendre connaissance des livrets

Reconnaissez-vous cet enfant qui : • arrive en retard• bouscule ses condisciples• oublie ses affaires • fait des bruits incongrus • bavarde, fait des interruptions intempestives• est agité, chute de sa chaise• bricole avec tout ce qu’il a sous la main• détériore ses objets (trousse refaite régulièrement),

les fait tomber• parfois, part dans des rêveries, est distrait, étourdi…• ne comprend pas, ne suit pas les consignes• fait répéter les consignes, fait des fautes d’étour-

derie, hors sujet…• ne finit pas ses devoirs• ne prend pas les devoirs à faire• a des cahiers mal tenus, incomplets• a une orthographe défaillante• peut être grossier, insolent• est souvent isolé ou avec les “durs”• est rebelle

Mais, par ailleurs, enfant gentil, vif et qui regrette son attitude, qu’il ne peut pas contrôler

Encadré 1. Reconnaissez-vous cet enfant ?

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Points forts » Pathologie fréquente, à ne pas négliger ni surestimer. » Prédominance masculine. » Comorbidités fréquentes à dépister. » Suivi multidisciplinaire. » Traitement médicamenteux à envisager après et avec les suivis multidisciplinaires.

Mots-clésDéfi cit de l’attentionHyperactivitéTDA/HEnfantMéthylphénidate

Highlights » ADHD is a common condition

that should not be neglected or over-estimated.

» ADHD has a male predominance. » ADHD is associated with

frequent comorbidities that should be screened.

» ADHD needs a g lobal approach and a multidisciplinary follow-up.

» Drug treatment for ADHD should be considered after or with a multidisciplinary follow-up.

KeywordsADHDAttention defi citChildrenMethylphenidate

scolaires, du carnet de liaison (collège), des cahiers, et de s’aider des échelles de Conners remplies par les parents, les enseignants et les intervenants (orthopho-niste, psychomotricien, etc.) [images 1 et 2, p. 242].L’observation de l’enfant (seul et avec ses parents) apporte beaucoup : cela va de “l’ouragan dévastateur” au “doux rêveur” qu’il faut ramener à la discussion régulièrement (il en est de même pour le compor-tement de certains parents…). On peut aussi s’appuyer sur les bilans (neuro-) psychologiques : tests WPPSI-III ou WISC-IV, selon l’âge, qui montrent fréquemment une chute de l’indice de mémoire de travail (IMT) et de l’indice de vitesse de traitement (IVT) chez des enfants par ailleurs intelligents. D’autres tests sont plus spécifi ques à l’attention (TEA-Ch, NEPSY, etc.). Un complément de bilan doit être proposé en fonction des éléments précédents : bilan orthopho-nique (langage écrit ou logico-mathématique), bilan psychomoteur ou d’ergothérapie (dyspraxie), bilan neurovisuel ou autre, pour rechercher une comorbidité et apporter des éléments indispensables à une prise en charge adaptée. Comme dans la plupart des cas de diffi cultés scolaires, un bilan sensoriel aura auparavant été demandé ou, à défaut, devra être complété : bilan ophtalmologique (acuité visuelle, troubles de la réfraction), si besoin orthoptique (oculomo-tricité) et audiométrique. L’avis du pédopsychiatre sera demandé pour diagnostiquer une pathologie psychiatrique (diagnostic différentiel/comorbidité) et/ou mettre en place un suivi spécifi que. L’EEG n’a pas d’intérêt pour le diagnostic positif mais elle peut être demandée pour éliminer un diagnostic différentiel ou rechercher une comorbidité (encadré 3, p. 242).L’annonce du diagnostic est un moment important et suffi t parfois à apaiser (partiellement) l’enfant et sa famille, qui révise alors son point de vue sur l’enfant et modifi e son attitude. Le diagnostic et la prise en charge doivent se faire le plus tôt possible pour éviter la mise en place d’une spirale de l’échec et du rejet. Ces enfants sont souvent punis, récoltent de mauvaises notes et se trouvent progressivement (parfois très vite, dès la grande section de mater-nelle ou plus souvent au CP) rejetés et marginalisés, avec une dévalorisation de leur image, un manque de confi ance en soi et une souffrance qui conduit à la révolte ou à la dépression. Cela est d’autant plus vrai que ces échecs et le rejet se retrouvent à la cantine, au club sportif et dans leur propre famille (parents et

fratrie), pouvant aboutir, à l’extrême, à des mauvais traitements. À moyen ou long terme, on peut observer des accidents plus fréquents, un échec scolaire, une fragilité professionnelle avec une possible dérive sociale (addiction, troubles de la conduite).

Prise en charge

La prise en charge est multidisciplinaire et doit faire intervenir divers professionnels de santé (neuro pédiatre, pédiatre, pédopsychiatre, psychologue, orthophoniste, psychomotricien, etc.) et les professionnels du système scolaire, en faisant participer les parents à la prise en charge. Le neuropédiatre participe au diagnostic, au traitement et au suivi de l’enfant, souvent dans un rôle de coordination entre les intervenants.Le suivi psychologique est indispensable, il a plusieurs fonctions. Un suivi psychologique individuel, voire une psychothérapie, peut aider l’enfant à faire face

– Déficit attentionnel •  souvent, ne parvient pas à prêter atten-

tion aux détails, ou fautes d’étourderie dans les devoirs scolaires, le travail ou autre activité

•  a souvent du mal à soutenir son attention (travail ou jeux)

•  semble souvent ne pas écouter quand on lui parle personnellement

•  souvent, ne se conforme pas aux consignes et ne parvient pas à mener à terme ses devoirs, ses tâches domestiques ou obligations professionnelles (sans opposition ni incompréhension)

•  souvent, a du mal à s’organiser dans son travail ou ses activités

•  souvent, évite, a en aversion ou fait à contrecœur les tâches imposant un effort mental soutenu

• perd souvent ses objets•  souvent, se laisse distraire par des

stimulus externes •  a des oublis fréquents dans la vie quoti-

dienne

Au moins 6 symptômes depuis plus de 6 mois

– Agitation, impulsivité•  remue les mains, les pieds, s’agite sur

sa chaise•  quitte souvent sa place (alors qu’il

devrait rester assis)•  court et grimpe partout de façon inap-

propriée• ne joue pas calmement et en silence• “sur la brèche”, “monté sur ressort”• a du mal à attendre son tour• coupe la parole ou impose sa présence•  laisse échapper la réponse à une ques-

tion non encore entièrement posée

Au moins 6 items

– Indispensable pour le diagnostic de TDA/H primitif)

Début des symptômes avant 7 ans Depuis plus de 6 mois

• dans au moins 2 lieux différents•  répercussions sociales, scolaires ou

professionnelles•  sans trouble de la personnalité sous-

jacent

Encadré 2. Proposition d’interrogatoire inspirée du DSM-IV.

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Image 1. Questionnaire de Conners pour les enseignants rempli chez un enfant ayant un TDA/H.

Image 2. Cahier d’un enfant souffrant de TDA/H, avant traitement.

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L’enfant “hyperactif” : attitude pratique en exercice libéral

DOSSIERNeuro-pédiatrie

aux diffi cultés directement liées au TDA/H (thérapie comportementale et cognitive [TCC] vis-à-vis de l’agi-tation, de l’impulsivité, des relations aux autres) et aussi à ses répercussions (restauration de l’image de soi, reprise de confi ance en soi).Des prises en charge plus spécifi ques visent à renforcer les capacités d’attention et de concentration de l’enfant. Elles peuvent être mises en place par les psychologues, les orthophonistes ou les psychomo-triciens. Le recours à des logiciels dédiés est utile, d’autant que les enfants atteints de TDA/H sont souvent attirés par les écrans. Une thérapie familiale visant à restaurer une harmonie familiale mise à mal par le TDA/H peut être nécessaire. Les groupes de parents peuvent aider ceux-ci à mieux prendre en charge l’enfant. Enfi n, il est nécessaire d’établir un traitement et un suivi des comorbidités : orthophonie, psychomotricité, orthoptie, etc.Parallèlement, des explications et des conseils doivent être donnés à l’enfant et aux parents pour faciliter la vie de la famille, qui s’apparente souvent à un parcours du combattant du lever au coucher. Les associations de parents sont très utiles sur ce plan.Le corps enseignant connaît de mieux en mieux le TDA/H et dépiste de plus en plus les enfants

Initial

• Anamnèse• Examen clinique avec et sans parents (observation)•  Échelle(s) remplies par les parents : critères DSM-IV,

Conners• Échelle de Conners pour les enseignants•  Livrets scolaires et cahiers, carnet de liaison,

agenda +++• Bilan psychiatrique• Test psychométrique, test de l’attention• Bilans orthophonique, de psychomotricité• Bilan opthalmologique, ORL

Suivant contexte : bilan thyroïdien, dosage ferritine, EEG, ECG, échocardiographie, etc.

De surveillance

•  Consultations à 28 jours et à 56 jours, à 3 mois puis tous les 6 mois

•  Examen clinique (poids/taille, neurologique et cardio-vasculaire ++)

• Échelles de Conners (parents/enseignant/intervenants)• Examen des cahiers, livrets scolaires• Avis des différents intervenants• Adaptation posologie et/ou changement traitement

Encadré 3. Bilans : initial et de surveillance.

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Page 4: L’enfant “hyperactif” : attitude pratique en exercice libéral

Image 3. Cahier du même enfant après traitement.

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DOSSIER

hyperactifs. Les enseignants peuvent repérer les limites ou certains effets secondaires du traitement, conduisant à des adaptations thérapeutiques. Un aménagement pédagogique est nécessaire pour aider l’enfant en tenant compte des diffi cultés liées au TDA/H et aux troubles associés (dyslexie/dysortho-graphie, troubles logico-mathématiques, dyspraxie). Un plan d’accueil individualisé (PAI), voire un projet personnalisé de scolarisation (PPS), est parfois nécessaire. Un traitement par fer et magnésium peut être instauré chez les jeunes enfants (avant 6 ans), en attendant la fin du bilan, ou encore en attendant de voir les effets des suivis mis en place. En cas d’échec des prises en charge déjà citées, un traitement médicamenteux doit être envisagé. En pratique, le traitement médicamenteux se limite, en France, au méthylphénidate. Initialement, ce dernier n’a été disponible que sous une forme à libération immédiate, la Ritaline® 10 mg. Ce traitement, effi cace, nécessitait plusieurs prises par jour (matin, midi, voire vers 16-17 heures), ce qui posait des problèmes, notamment pour la prise du midi, avec la nécessaire mise en place d’un PAI à l’école, et pour la prise de l’après-midi, qui peut entraîner de l’insomnie. L’arrivée des formes à libération prolongée (Ritaline® LP 20-30-40 mg/Concerta® 18-36-54 mg et Quasym® LP 10-20-30 mg) a simplifi é et permis d’affi ner les prescrip-tions. Leurs autorisations de mise sur le marché débutent à l’âge de 6 ans. L’interrogatoire et l’examen clinique permettront de rechercher des contre-indications. Il importe d’éliminer un problème cardiovasculaire ou cérébro-vasculaire par l’étude des antécédents familiaux et l’examen de l’enfant, complétés si besoin par un bilan cardiologique (ECG, holter, échocardiographie), bilan à renouveler au besoin sous traitement (ECG ± holter). L’épilepsie n’est pas une contre-indication, mais le traitement doit être instauré prudemment, en prévenant l’enfant et sa famille du risque de crise. La dépression et les troubles anxieux peuvent être majorés par le traitement, ce qui impose de bien peser l’indication, en sachant que, lorsque ces troubles sont réactionnels au TDA/H, ils s’améliorent, parfois rapidement. C’est aussi le cas pour les tics, souvent aggravés mais parfois guéris.La prescription du méthylphénidate est très encadrée. La première prescription doit être réalisée par un médecin spécialiste hospitalier (psychiatre, neurologue, pédiatre) sur ordonnance sécurisée, en spécifiant le nom de la pharmacie délivrant le traitement et l’adresse de l’enfant. Le traitement est instauré pour 28 jours à la posologie de 0,5 mg/kg/j en une prise matinale, l’enfant et ses parents étant prévenus des effets indésirables. L’enfant est revu au bout de 1 mois pour évaluer l’effi cacité, dépister les effets indésirables

et affi ner la posologie (augmentation de la dose, dose supplémentaire à midi ou vers 16 h). La posologie moyenne est comprise entre 0,5 et 1 mg/kg/j). Classi-quement, on ne dépasse pas 60 mg/j. Une consul-tation est réalisée au bout du deuxième mois pour un contrôle, avant de céder la place au médecin traitant, qui renouvellera le traitement tous les mois. L’examen contrôle notamment le poids, la taille, la fréquence cardiaque et la pression artérielle. L’efficacité du traitement est en règle générale rapidement visible, surtout sur les symptômes d’hyperactivité/impulsivité. On doit interroger l’enfant, les parents, les enseignants et les différents intervenants sur leur ressenti. Il faut contrôler les échelles de Conners remplies avant et après traitement ; elles sont souvent parlantes, de même que l’observation des cahiers, des notes et du carnet de liaison (image 3). Des tremblements sont possibles : ils diminuent en règle générale avec la réduction de posologie.En pratique, les effets indésirables les plus fréquents sont une baisse de l’appétit (le midi) quasi inévi-table, pouvant entraîner une perte de poids parfois problématique (une anorexie doit faire [re]discuter l’indication). Il importe de prévenir le personnel de cantine qu’il ne doit pas forcer l’enfant à manger : il se rattrape souvent le soir. Des douleurs abdominales sont possibles, souvent transitoires, tout comme des céphalées, mais leur persistance impose parfois une baisse de posologie. Un ralentissement de la croissance staturale est classiquement signalé : il est en fait rare et, devant un ralentissement de croissance, il importe de rechercher une autre cause organique avant d’incri-miner le méthylphénidate. Des diffi cultés d’endormis-sement sont fréquentes, parfois limitées au début du traitement, parfois persistantes, pouvant conduire à une baisse de la posologie ou à des changements dans les horaires de prise (sont visées les prises du midi ou de 16 h). Le recours à la mélatonine doit être envisagé si les modifi cations de posologie du méthyphénidate ne suffi sent pas ou si les problèmes de sommeil préexis-taient au méthylphénidate. La survenue de palpitations ou d’une gêne précordiale impose un bilan en milieu spécialisé et doit faire arrêter ou diminuer la posologie, avec un contrôle avec et sans traitement.

Conclusion

Le syndrome TDA/H est fréquent et doit être reconnu au plus tôt pour que soit instauré un suivi, multi disciplinaire de préférence, et, si besoin, un traitement médicamenteux, qui permet d’éviter “la spirale de l’échec et du rejet”. ■

• DSM-IV-TR. Manuel diagnos-tique et statistique des troubles mentaux. Paris : Masson, 2003.

• Konofal E, Lencdreux M, Mouren Simeoni MC. Mise au point des études cliniques sur le rapport “veille-sommeil” dans le trouble défi cit de l’attention/hyperactivité de l’enfant. Ann Med Psychol 2002;160:105-17.

• Bange F. Vivre et communiquer avec un enfant hyperactif. Inte-rEditions.

• Bouvard M, Le Heuzey MF, Mouren Simeoni MC et al. L’hyperactivité de l’enfance à l’âge adulte. 2003.

• Thomas J, Vaz-Cerniglia C, Willems G et al. Troubles de l’attention chez l’enfant : prise en charge psychologique. Masson, 2007.

• L’enfant souffrant du TDA/H : des modèles théoriques à l’intervention. ANAE, n° 114, novembre 2011;23(4):297-412.

• Gosselin S. le méthyphénidate chez l’adulte : effets indési-rables sous-estimés ? Bulletin d’information toxicologique 2011-10-11.

• HyperSupers TDAH-France.

Pour en savoir plus…

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