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Médecine des maladies Métaboliques - Septembre 2007 - Vol. 1 - N°3
70 Stratégie thérapeutique
Correspondance :
Michel FarnierPoint médicalRond Point de la Nation21000 [email protected]
L’ abaissement des concentrations
sériques de LDL-cholestérol
(LDL-C) est de façon incontes-
table le meilleur indicateur de l’efficacité
de la prévention cardiovasculaire par les
hypolipémiants, et les statines – agents
les plus efficaces pour abaisser le LDL-
C [1] – ont logiquement pris une place
primordiale en pratique quotidienne.
Toutes les recommandations nationales
[2] ou internationales [3, 4] proposent des
objectifs ou cibles thérapeutiques sur le
LDL-C qui dépendent du niveau de ris-
que cardiovasculaire global du patient,
avec des objectifs de LDL-C de plus en
plus bas pour les patients à haut risque
cardiovasculaire [2-4]. De ce fait, pour
des patients à haut risque ou présentant
une dyslipidémie sévère, la monothéra-
pie par hypolipémiant s’avère parfois
insuffisante pour atteindre les objectifs
recommandés. Par ailleurs, il faut tenir
compte d’anomalies portant sur d’autres
paramètres lipidiques, en particulier les
taux de triglycérides (TG) et de HDL-cho-
lestérol (HDL-C). Enfin, certains patients
pour lesquels une statine est indiquée
ne tolèrent pas cette famille d’hypolipé-
miants.
Ainsi, en pratique quotidienne, la
question de la nécessité ou non d’as-
socier des hypolipémiants devient de
plus en plus fréquente. C’est la raison
pour laquelle un groupe de travail de la
Nouvelle société française d’athérosclé-
rose (NSFA) a récemment proposé des
recommandations pour associer des
hypolipémiants chez un patient non à
l’objectif thérapeutique sous monothéra-
pie [5]. Ces recommandations sont com-
plémentaires de celles de mars 2005 de
l’Agence française de sécurité sanitaire
des produits de santé (AFSSAPS) [2], et
représentent un consensus d’experts
dans la mesure où les preuves apportées
par des essais cliniques de prévention
cardiovasculaire sont, pour l’instant,
inexistantes. Cet article a pour objectif
de donner une attitude pratique pour
associer des hypolipémiants en s’ap-
puyant essentiellement sur les recom-
mandations de la NSFA.
Quand proposer une association d’hypolipémiants ?
Avant d’envisager une association d’hy-
polipémiants, les recommandations
de la NSFA insistent sur les conditions
préalables à remplir pour décider ou non
d’une telle association et précisent les
arguments en faveur de l’initiation d’une
association d’hypolipémiants et de son
maintien [5]. La conduite à tenir est indi-
quée dans le tableau I. En résumé, chez
un patient ayant une bonne observance
à une monothérapie bien tolérée, une
association d’hypolipémiants est à pro-
poser, après optimisation des mesures
hygiéno-diététiques, si les objectifs thé-
rapeutiques ne sont pas atteints sur deux
dosages successifs et en tenant compte
du terrain du patient.
Les bi- et trithérapies hypolipémiantes : quelles indications, pour quels bénéfices/risques ?
M. FarnierPoint médical, Dijon, France.
© 2007 - Elsevier Masson SAS - Tous droits réservés.
Les associations d’hypolipémiants vont prendre une place de plus en plus importante dans le futur, compte tenu des objectifs stricts proposés sur les paramètres lipidi-ques pour les patients à haut risque cardiovasculaire. Le développement de ces associations a conduit un groupe de travail de la Nouvelle société française d’athérosclé-rose (NSFA) à publier récemment des recommandations intitulées : « Quand proposer une association d’hypolipémiants chez un patient non à l’objectif thérapeutique sous monothérapie ? », recommandations qui servent de base essentielle à cet article consacré aux bi- et trithéra-pies hypolipémiantes.
Pour tout patient non à l’objectif de
LDL-C sous statine : vérifier l’obser-
vance et refaire un contrôle biologique
sous mesures hygiéno-diététiques bien
suivies et sous monothérapie prise très
régulièrement.
71
Médecine des maladies Métaboliques - Septembre 2007 - Vol. 1 - N°3
Les bi- et trithérapies hypolipémiantes : quelles indications, pour quels bénéfices/risques ?
La décision d’initier une association doit
tenir compte du niveau des anomalies
biologiques persistantes sous mono-
thérapie. La normalisation du LDL-C
doit rester l’objectif prioritaire et une
association est licite lorsque les objec-
tifs thérapeutiques de LDL-C du patient
ne sont pas atteints. En revanche, pour
les paramètres HDL-C et TG, compte
tenu de la variabilité dans les dosages
et de l’absence d’objectifs précis, il est
proposé de réserver une association aux
circonstances suivantes :
• pour le HDL-C : patient pour lequel
le taux est < 0,35 g/l chez l’homme et
< 0,40 g/l chez la femme ;
• pour les TG : patient pour lequel le taux
reste > 2,5 g/l sous régime bien suivi.
La notion d’une réponse faible à une
monothérapie, en particulier par statine,
est certainement un argument capital,
mais difficile à apprécier en pratique quo-
tidienne. La définition d’une réponse insuf-
fisante reste imprécise. Avec une statine, il
s’agit en pratique d’une baisse du LDL-C
nettement inférieure à celle attendue avec
la molécule et la dose choisies [1].
La sévérité du risque cardiovasculaire est
également un élément important à prendre
en compte et les catégories de patients à
haut risque pour lesquels une association
peut être nécessaire sont indiquées dans
le tableau II. Trois des quatre catégories
indiquées correspondent aux patients
à haut risque des recommandations de
l’AFSSAPS [2], recommandations qui
ne prenaient pas en compte les formes
familiales monogéniques. Une associa-
tion d’hypolipémiants sera d’autant plus
justifiée pour les patients classés dans
une catégorie dite « à très haut risque
vasculaire ». Les recommandations de la
NSFA [5] proposent de classer à très haut
risque les patients :
• au décours d’un syndrome coronaire
aigu ;
• ayant une maladie cardiovasculaire
avérée, plus : soit des facteurs de ris-
que majeurs (en particulier le diabète),
soit des facteurs de risque sévères et
non contrôlés (en particulier la persis-
tance d’un tabagisme), soit les facteurs
de risque multiples du syndrome méta-
bolique ;
• avec artériopathie clinique symptoma-
tique.
À noter que plusieurs recommandations
internationales proposent maintenant
un objectif de LDL-C < 0,7 g/l pour les
patients à « très haut risque vasculaire »
[3, 4], comme par exemple les diabéti-
ques de type 2 en prévention secondaire
[4].
Pour quels bénéfices utiliser une association d’hypolipémiants ?
Comme aucune étude de prévention
cardiovasculaire avec objectif clinique
n’a jusqu’alors validé l’utilisation d’une
association d’hypolipémiants, les béné-
fices de telles associations sont pour
l’instant limités essentiellement à des
bénéfices additionnels biologiques et
à des bénéfices issus d’études utili-
sant des marqueurs intermédiaires de
l’athérosclérose. Une statine étant le
traitement de première intention pour
une très large majorité de patients, les
recommandations de la NSFA insistent
surtout sur les bénéfices additionnels
biologiques attendus pour les associa-
tions statine + autre agent hypolipémiant
(tableau III). Les avantages et les incon-
vénients des principales associations à
envisager avec une statine sont indiqués
dans le tableau IV.
Association statine + ézétimibeChez des patients non à l’objectif de
LDL-C sous statine, l’addition d’ézéti-
mibe 10 mg induit, dans plusieurs étu-
des [6-8], et de façon concordante, une
baisse moyenne complémentaire du
LDL-C de l’ordre de 25 à 30 %. Cette
baisse complémentaire obtenue par
ajout de l’ézétimibe dépend directement
de la réponse initiale à la monothérapie
par statine : les patients les moins répon-
deurs à la statine sont ceux pour lesquels
l’ézétimibe abaisse le plus le LDL-C [9].
Plus un patient à haut risque ou ayant
une dyslipidémie sévère est mauvais
répondeur à une monothérapie par sta-
tine, plus il sera candidat à une bithé-
rapie par hypolipémiants.
Tableau II : Catégories de patients à haut risque cardiovasculaire pour lesquels une asso-ciation d’hypolipémiants peut être nécessaire.
Hypercholestérolémie monogénique familiale sévère
Patients avec antécédents de maladie cardiovasculaire avérée
Diabétiques de type 2 à haut risque
Patients ayant un risque absolu supérieur à 20 % de faire un événement
coronarien dans les dix ans
Tableau I : Conduite à tenir pour utiliser une association d’hypolipémiants.
Conditions préalables à remplir
Renforcement des mesures hygiéno-diététiques
Bonne observance de la monothérapie (au moins 80 %)
Tenir compte du terrain (espérance de vie, présence ou non de co-morbidité)
Objectifs thérapeutiques non atteints sous monothérapie lors d’au moins deux dosages
successifs
Bonne tolérance de la monothérapie
Arguments en faveur de l’initiation d’une association d’hypolipémiant
Sévérité des anomalies biologiques persistantes
Mauvaise réponse à une monothérapie
Absence de contre-indication à l’association choisie
Sévérité du risque
Arguments pour le maintien d’une association d’hypolipémiants
Bonne tolérance clinique
Efficacité biologique vérifiée
Surveillance clinique et biologique régulière
Médecine des maladies Métaboliques - Septembre 2007 - Vol. 1 - N°3
72 Stratégie thérapeutiqueStratégie thérapeutique
Une association fixe ézétimibe/simvas-
tatine est également disponible avec
deux dosages 10/20 mg et 10/40 mg,
qui diminuent le LDL-C de l’ordre de 50
à 53 % avec la posologie 10/20 mg et de
55 à 57 % avec la posologie 10/40 mg
[10]. Les augmentations du HDL-C sont
de l’ordre de 8 à 9 % et la baisse des TG
de l’ordre de 30 %.
Association statine + résinePour l’instant, seule la colestyramine est
disponible en France. Une autre résine,
le colesevelam, sera peut-être introduite
prochainement en Europe. L’effet sur la
réduction du LDL-C est additif entre une
statine et une résine, comme par exem-
ple avec la simvastatine ou l’atorvasta-
tine associés au colesevelam [11, 12].
L’effet sur les TG n’est en général pas
différent entre statine en monothérapie
et association statine + résine. Il en est
de même pour l’évolution du HDL-C.
L’association statine + résine est surtout
limitée par la mauvaise tolérance globale
de fortes doses de colestyramine.
Association statine + acide nicotiniqueL’effet complémentaire d’abaissement
du LDL-C induit par l’acide nicotinique
(ou niacine) chez des patients en cours
de traitement par statine n’a jusqu’alors
pas été évalué de façon très précise. En
association avec une statine, les effets
globaux sur les paramètres lipidiques
d’une association statine + acide nico-
tinique dépendent à la fois de la nature
et de la dose de la statine, de la dose
d’acide nicotinique et du type de dys-
Tableau IV : Avantages et inconvénients des principales associations d’hypolipémiants [5].
Associations Points forts Points faibles Conseils d’utilisation
statine
+
ézétimibe
• Abaissement
complémentaire du LDL-C
• Facilité d’utilisation
• Bonne tolérance
• Absence de données d’études
de prévention ou d’études avec
marqueurs intermédiaires
• Patient non à l’objectif LDL-C sous statine
• Surveillance hépatique (transaminases)
et musculaire (CPK si douleurs)
statine
+
résine
• Abaissement
complémentaire du LDL-C
(dépendant de la dose de
résine)
• Tolérance digestive médiocre
aux posologies importantes
• Risque d’interférence avec
d’autres traitements
• Patient avec hypercholestérolémie pure
non à l’objectif LDL-C sous statine
• Augmentation progressive des doses
• Nécessité de prendre la colestyramine à distance
des autres traitements (1 à 2 h avant ou 4 h après)
statine
+
acide
nicotinique
• Efficacité complémentaire
sur les paramètres TG
et HDL-C (voire sur LDL-C
et Lp (a))
• Données d’étude
de régression plutôt positives
• Difficulté à utiliser les doses
utiles (1 à 2 g/j) en raison
de la présence de flush
• Absence de données précises
d’efficacité et de sécurité d’emploi
en association avec une statine
• Patient traité par statine avec TG élevés
et/ou HDL-C bas
• Augmentation progressive des doses
• Surveillance hépatique (transaminases) et musculaire
(CPK si douleurs)
• Surveillance de la glycémie chez les diabétiques
et les potentiellement diabétiques et de l’uricémie
statine
+
fibrate
• Efficacité complémentaire
sur les paramètres TG et
HDL-C
• Peu d’effet complémentaire
sur le LDL-C
• Augmentation du risque
musculaire (surtout
avec le gemfibrozil) et hépatique
• Absence de données d’études
de prévention ou d’études
avec marqueurs intermédiaires
• Pour le fénofibrate, résultats
non probants de FIELD
chez des diabétiques de type 2
• Contre-indication de l’association statine +
gemfibrozil
• Association possible : statine + fénofibrate (sur avis
spécialisé)
• Nécessité d’une surveillance clinique et biologique
régulière (transaminases, CPK et créatininémie
avant association, après 1 mois, puis tous les 4 mois)
FIELD : Fenofibrate intervention and event lowering in diabetes ; Lp (a) : lipoprotéine (a).
Tableau III : Effets biologiques attendus des associations statine + autre agent hypolipé-miant [5] (effets complémentaires à une monothérapie par statine).
LDL-C TG HDL-C
Statine
+
Ézétimibe
Statine
+
Résine
Statine
+
Fénofibrate
Statine
+
Acide nicotinique
LDL-C : LDL-cholestérol ; HDL-C : HDL-cholestérol, TG : triglycérides.
73
Médecine des maladies Métaboliques - Septembre 2007 - Vol. 1 - N°3
Les bi- et trithérapies hypolipémiantes : quelles indications, pour quels bénéfices/risques ?
lipidémie traitée [13-15]. Par comparai-
son à la rosuvastatine en monothérapie
et à l’association simvastatine/ézéti-
mibe [15], l’association de niacine à
une statine (atorvastatine et rosuvas-
tatine) permet d’augmenter significati-
vement le HDL-C et d’abaisser les TG.
L’association statine + acide nicotini-
que est pour l’instant surtout limitée
par la mauvaise tolérance de l’acide
nicotinique, essentiellement en raison
de flushs induits par la niacine aux
doses utiles de 1 à 2 g/jour. Dans un
avenir proche, une formulation nouvelle
associant niacine et laropiprant pour
inhiber les flushs doit permettre une
utilisation plus commode en pratique
quotidienne.
Association statine + fibrateChez des patients avec hyperlipidé-
mie mixte, et par comparaison à une
statine en monothérapie, l’association
statine + fibrate permet principalement
d’abaisser significativement les TG et
d’augmenter le HDL-C, alors que l’ef-
fet complémentaire sur le LDL-C est
modeste [16]. Par exemple, en compa-
rant l’association simvastatine 20 mg
+ fénofibrate 160 mg et la simvastatine
20 mg en monothérapie, la différence
dans la réduction du LDL-C n’est que
de 5,4 % en moyenne [17]. Compte tenu
du risque de rhabdomyolyse constaté
initialement avec ce type d’association
(risque qui existe surtout avec le gemfi-
brozil) [18], et de l’absence de données
d’efficacité clinique, cette association
doit être réservée aux spécialistes,
en contre-indiquant le gemfibrozil et
avec une surveillance étroite clinique
et biologique comme indiqué dans le
tableau IV.
Même si aucune étude de prévention car-
diovasculaire avec objectif clinique n’est
disponible, des arguments en faveur d’un
bénéfice clinique ont été obtenus dans
diverses études qui ont évalué l’évolution
de l’athérome soit au niveau coronaire [19,
20], soit au niveau carotidien [21]. Dans
tous ces essais de régression d’un athé-
rome coronaire ou carotidien, il est noté
une tendance à la réduction des évène-
ments cliniques, évènements toutefois
trop peu nombreux pour pouvoir en tirer
des conclusions valides définitives.
Dans quelles indications associer des hypolipémiants en pratique clinique ?
Les recommandations de la NSFA [5]
envisagent les trois cas principaux pour
lesquels une association d’hypolipé-
miants est à discuter, c’est-à-dire :
• les patients non à l’objectif sous sta-
tine, cas les plus fréquents ;
• les cas plus rares de patients non à l’ob-
jectif sous fibrate ou acide nicotinique ;
• enfin, le cas particulier des patients
intolérants aux statines.
Patient non à l’objectif sous statineLe choix de l’association d’hypolipé-
miants est essentiellement guidé par
le type d’anomalie biologique persis-
tante sous monothérapie. Les principa-
les situations cliniques sont résumées
dans le tableau V et les avantages et les
inconvénients des diverses associations
statine-autres hypolipémiants figurent
dans le tableau IV. Globalement, pour un
patient avec LDL-C non à l’objectif sous
statine et TG normaux ou modérément
augmentés, l’association statine-ézéti-
mibe est la plus commode en pratique
quotidienne. En cas d’élévation franche
des TG et de LDL-C à l’objectif ou pro-
che de l’objectif, l’association statine
+ fénofibrate peut-être utilisée, sur avis
spécialisé, avec une surveillance clinique
et biologique régulière. L’association sta-
tine + acide nicotinique est en général la
plus efficace en termes d’augmentation
complémentaire du HDL-C, mais son
utilisation est limitée par la difficulté à
prescrire des doses efficaces d’acide
nicotinique pour des raisons d’intolé-
rance.
Patient non à l’objectif sous fibrate ou acide nicotiniqueRappelons tout d’abord, qu’en dehors
des cas d’intolérance aux statines évo-
qués ultérieurement, les indications
d’un fibrate ou de l’acide nicotinique en
monothérapie sont limitées aux seules
hypertriglycéridémies sévères isolées
(TG > 4 g/l) ou aux patients avec LDL-
C < 1 g/l associé à des TG élevés et un
HDL-C bas [2].
Les patients non à l’objectif sous fibrate
ou acide nicotinique sont donc plus rares
en pratique quotidienne et les principa-
les circonstances sont résumées dans
le tableau V. Schématiquement, lorsque
persiste une élévation franche du LDL-
C, une association avec une statine est
à utiliser avec les précautions habituel-
les d’emploi. Dans le cas d’une éléva-
tion plus modérée du LDL-C, et pour
éviter les problèmes de surveillance liés
à l’association fibrate + statine, l’em-
ploi de l’ézétimibe est possible avec un
fibrate, même si cette association n’est
pas encore validée dans l’Autorisation
de mise sur le marché (AMM) de l’ézéti-
mibe. L’association de l’ézétimibe avec
le fénofibrate a été approuvée aux États-
Unis chez des patients avec hyperlipidé-
mie mixte [22, 23]. Dans cette popula-
tion, l’association ézétimibe-fénofibrate
diminue plus significativement le LDL-
C (-20,4 %) que le fénofibrate seul (-
5,5 %) [22]. L’ajout d’ézétimibe n’induit
par contre ni baisse complémentaire
des TG, ni élévation complémentaire du
HDL-C par rapport au fénofibrate seul.
L’association ézétimibe-acide nicoti-
nique est une alternative, peu étudiée
jusqu’alors [24]. L’association fibrate
ou acide nicotinique avec une résine
est théoriquement possible, mais peu
de données d’efficacité sont dispo-
nibles. Ce dernier type d’association
est surtout à envisager lorsque les TG
sont normalisés sous fibrate ou acide
nicotinique, avec élévation modérée
du LDL-C. Enfin, pour un patient avec
LDL-C normal, mais persistance de TG
et/ou HDL-C non aux objectifs, le choix
thérapeutique est difficile et un avis spé-
cialisé est souhaitable.
Patient intolérant aux statinesLa première étape est d’affirmer l’into-
lérance totale aux statines dont les ori-
gines les plus courantes sont musculai-
res, hépatiques ou diverses (digestives,
cutanées…). Certaines intolérances sont
dépendantes de la nature et surtout de
la dose de la statine. Si la réduction de
la posologie de la statine et/ou le chan-
gement de molécule permettent d’obte-
nir une tolérance acceptable, la statine
tolérée doit être gardée en priorité, même
si l’objectif de LDL-C n’est pas atteint.
La stratégie d’association est alors celle
qui a été décrite chez le patient non à
l’objectif sous statine.
Médecine des maladies Métaboliques - Septembre 2007 - Vol. 1 - N°3
74 Stratégie thérapeutiqueStratégie thérapeutique
Pour un patient totalement intolérant aux
statines, l’alternative thérapeutique est au
départ une monothérapie, sous laquelle,
très souvent, les objectifs ne sont pas
atteints. Les types d’associations possi-
bles chez le patient intolérant aux statines
sont résumés dans le tableau V, mais glo-
balement peu d’études sont disponibles
avec ces diverses associations. Pour les
patients ayant une élévation du LDL-C
isolée après monothérapie par ézéti-
mibe, l’association d’une résine peut être
envisagée, avec toutefois des résultats
inconstants [25-27] et des interrogations
vis-à-vis des interactions possibles entre
ézétimibe et en particulier le colesevelam
[27]. En pratique, la colestyramine peut être
associée, mais à distance, de l’ézétimibe
(ézétimibe à prendre au moins 2 heures
avant ou plus de 4 heures après la résine).
Les autres alternatives d’associations ont
déjà été évoquées dans le paragraphe
précédent. En cas d’hyperlipidémie mixte
avec intolérance aux statines, l’association
ézétimibe + fénofibrate est sans doute la
plus commode avec, comme alternative,
ézétimibe + acide nicotinique. L’emploi
d’une résine dépend surtout de l’élévation
résiduelle des TG sous monothérapie par
fibrate ou acide nicotinique.
Est-il possible d’envisager des trithérapies ?
Dans des formes particulièrement sévè-
res d’hyperlipidémies, le plus souvent
familiales, et pour des patients à haut ris-
que, peuvent se discuter des trithérapies.
Peu de données sont toutefois disponi-
bles concernant l’efficacité biologique et
la tolérance à long terme [28, 29].
Pour des patients avec hypercholesté-
rolémie familiale hétérozygote, l’asso-
ciation statine + ézétimibe + résine est
possible avec toujours les mêmes pré-
cautions d’emploi vis-à-vis de la distance
à respecter entre la prise d’ézétimibe et
de résine. L’association statine + ézéti-
mibe avec un inhibiteur de la squalène
synthase (lapaquistat) est en cours de
développement.
Pour des formes particulièrement sévè-
res d’hyperlipidémie mixte, les trithérapies
possibles sont statine + ézétimibe + féno-
fibrate [29] et statine + ézétimibe + acide
nicotinique. Dans les recommandations
de la NSFA [5], il est mentionné que ces
trithérapies relèvent d’un avis spécialisé.
Conclusion
Pour normaliser une dyslipidémie, et en
particulier pour atteindre les objectifs théra-
peutiques recommandés sur le LDL-C, une
association d’hypolipémiants est à envi-
sager pour de plus en plus de patients à
haut risque cardiovasculaire ou présentant
une dyslipidémie sévère. L’optimisation
des mesures hygiéno-diététiques et une
bonne compliance de la monothérapie
sont des conditions indispensables à res-
pecter avant d’envisager une association
d’hypolipémiants. Une fois initiée, cette
association doit être maintenue au long
cours, après avoir vérifié l’efficacité biolo-
gique et la tolérance clinique et également
biologique si nécessaire.
Tableau V : Critères de choix d'une association d’hypolipémiants.
CATÉGORIES DE PATIENTS ASSOCIATIONS POSSIBLES
Patient non à l’objectif sous statine1. LDL-C , TG et HDL-C normaux
2. LDL-C à l’objectif, TG > 2,5 g/l,
HDL-C < 0,35 g/l (H) et < 0,40 g/l (F)
3. LDL-C, TG et HDL-C non aux objectifs
• élévation modérée des TG
• élévation franche des TG et LDL-C proche
de l’objectif
• élévation franche des TG et LDL-C
loin de l’objectif (≥ 10 %)
statine + ézétimibe
statine + résine
statine + fibrate*
statine + acide nicotinique
statine + ézétimibe
statine + fibrate*, voire statine
+ acide nicotinique
statine + acide nicotinique
Patient non à l’objectif sous fibrate ou acide nicotinique1. LDL-C
• élévation franche du LDL-C
• élévation modérée du LDL-C
2. LDL-C normal, TG et/ou HDL-C
fibrate ou acide nicotinique + statine
fibrate ou acide nicotinique + ézétimibe
fibrate ou acide nicotinique + résine
(si TG normalisés)
avis spécialisé
Patient intolérant aux statines1. LDL-C , TG et HDL-C normaux
2. LDL-C , TG et/ou HDL-C
ézétimibe + résine
ézétimibe + acide nicotinique
résine + acide nicotinique
ézétimibe + fibrate
ézétimibe + acide nicotinique
résine + fibrate
résine + acide nicotinique
* sauf gemfibrozil et sur avis spécialisé ; H : hommes ; F : femmes.
• Le recours à une association d’hypolipémiants est de plus en plus justifié pour attein-
dre les objectifs stricts des recommandations thérapeutiques.
• L’objectif prioritaire est toujours la normalisation du taux de LDL-cholestérol.
• Mais, le choix parmi les associations d’hypolipémiants doit tenir compte de l’ensemble
du profil lipidique. Ce choix est, pour l’instant, essentiellement fondé sur les anomalies
biologiques persistantes sous monothérapie.
Les points essentiels
75
Médecine des maladies Métaboliques - Septembre 2007 - Vol. 1 - N°3
Les bi- et trithérapies hypolipémiantes : quelles indications, pour quels bénéfices/risques ?
Le choix dans les associations d’hy-
polipémiants reste encore difficile et
dépend pour l’instant essentiellement
de critères biologiques, ceci en l’ab-
sence de résultats d’études de préven-
tion cardiovasculaire. De nombreuses
études avec objectifs cliniques sont
en cours, entre autres avec les asso-
ciations statine + ézétimibe, statine
+ acide nicotinique (± ézétimibe) et
statine + fénofibrate. Ces études doi-
vent préciser dans l’avenir pour quels
types de patients une association doit
être utilisée plutôt qu’une autre. De nou-
velles stratégies d’associations d’hypo-
lipémiants sont également en cours de
développement.
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