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LES BRODERIES DE RABATPAR
CHRISTIANE BRUNOT-DAVID
TOME 1
PRÉFACE DE HENRI TERRASSE
COLLECTION HESPÉRISINSTITUT DES HAUTES-ÉTUDES MAROCAINES
N° IX 1943ÉCOLE DU LIVRE - RABAT
LES BRODERIES DE RABAT
LES BRODERIES DE RABATPAR
CHRISTIANE BRUNOT-DAVID
TOME 1
PRÉFACE DE HENRI TERRASSE
COLLECTION HESPÉRISINSTITUT DES HAUTES-ETLJDES MAROCAINES
N°IX 1943ÉCOLE DU LIVRE ~ RABAT
A Monsieur Pierre Villiers
Témoignage de mon affection
et de ma reconnaissance filiales.
PRÉFACE
L'Institut des Hautes-Études Marocaines a la satisfaction d'accueillir dans ses collections le
travail d'une de ses anciennes élèves, Madame Christiane Brunot-David qui, alors qu'elle faisait,
comme institutrice, son stage d'initiation au pays, avait choisi la broderie de Rabat comme sujet
de mémoire. Sous la direction de Monsieur Louis Brunot pour la partie ethnographique et
linguistique, sur mes conseils pour la partie artistique, elle avait fourni un excellent mémoire.
Nous lui avons demandé de reprendre et de compléter son étude aux fins de publication. C'est
donc le résultat d'un travail assidu de plusieurs années que Madame Brunot-David nous apporte
dans ce livre.
Aucun des arts familiaux du Maroc n'a fait l'objet J:une étude aussi complète que celle que
J aL le grand plaisir de présenter aujourd'hui. Trop souvent, - même sous le nom de corpus -_
on s'est contenté de donner sur les arts industriels du Maroc des études fragmentaires et de,~
anthologies qui, malgré leur mérite et leur utilité, sont loin de constituer une documentation
suffisante. Or, toute tentative de rénovation artistique qui n'a pas sa source dans des études
nombreuses et qui ne s'appuie pas sur des publications aussi complètes que possible est vouée à
l'échec et risque même de fausser l'orientation de la production artistique qu'elle entend arracher
à la décadence. En matière d'arts indigènes comme en toutes choses, l'à-peu-près et l'incomplet ne
sauraient conduire au succès. On ne peut espérer conserver et guider vers de nouveaux et meilleurs
destins que les arts et les techniques que l'on connaît à fond et que l'on est en mesure d'enseigner
parfaitement.
Le présent ouvrage qui étudie la broderie de Rabat sous tous ses aspects restera l'exemple
- et parfois le modèle - des études que nous devrions posséder sur tous les arts industriels ou
familiaux du vieux Maroc. Son intérêt est à la fois scientifique et pratique. Les historiens de l'art y
verront comment une technique et des formes importées ont évolué au Maroc et de quelle manière
elles ont vécu dans ce petit monde assez fermé de la bourgeoisie citadine de Rabat : c'est un
document précis à verser au dossier encore bien mince de l'histoire des arts que l'on considère trop
aisément comme mineurs. Par ailleurs, tous ceux qui auront charge de rénover et de faire vivre la
broderie de Rabat y trouveront, avec le commentaire nécessaire, toute la documentation graphique
dont ils ont besoin.
La broderie de Rabat apparaît dans ce livre replacée dans son cadre social: nous connaissons
la vie des ateliers où elle s'apprend, quelles chansons rythment, suivant les heures du jour, le travail
des jeunes brodeuses, comment toute cette activité féminine s'inscrit dans la vie sociale et familiale
VIII PRÉFACE
des citadins de Rabat. Qu'on ne prétende pas que pareille étude n'a d'autre utilité que son charme ~
aucun art, si humble et si utilitaire soit-il, ne doit s'étudier comme une simple production matérielle;
il est l'émanation de la vie des individus et des collectivités : en dehors de cette vie on ne sauraitle comprendre et le connaître vraiment.
Cette étude ethnographique n'a pas fait tort aux études techniques qui constituent la plusgrande partie du livre. Le texte a toute la sobriété, la clarté et la précision désirables. Ladocumentation graphique, presque toujours à grandeur d'exécution, est pratiquement complètepuisqu'elle comprend les thèmes élémentaires. les motifs complexes et des exemples de tous lestypes classiques de composition. L'étude sur le coloris compense par sa précision, dans toute lamesure du possible, l'absence de planches en couleurs à laquelle nous condamne la dureté des temps.
Quelques exemples d'adaptations modernes, très bien choisis, montrent comment il est possibled'employer la broderie de Rabat pour de nouveaux usages sans fausser son caractère, et parfoismême en créant en elle des ressources et une beauté jusqu'alors inconnues.
Peu de techniques musulmanes ont fait l'objet d'une étude de vocabulaire aussi complète.Il n'est pas un élément de décor, pas un procédé de technique, pas une nuance de couleur quin'apparaisse sous son nom arabe. Du tableau de ce vocabulaire à la fois technique et féminin leslinguistes tireront plus d'une conclwion. Et toutes celles qui s'occuperont de la broderie de Rabattrouveront, rassemblés et parfaitement notés, tous les termes de leur métier.
Madame Brunot-David a eu le mérite de retrouver et de dégager les grandes lignes de rhistoirede la broderie de Rabat. Elle a bien vu que, comme presque toutes les broderies citadines du Maroc.elle est de souche espagnole. Elle appartient à la dernière couche hispanique des arts marocains:celle qui fut apportée au début du XVIIe siècle par les Morisques expulsés d'Espagne. N,Ille part
ces apports de la Renaissance espagnole ne furent plus abondants et ne restent plus reconnaissablesqu'à Rabat. La broderie est l'aspect féminin du dernier grand fait de civilisation qui a compté avantnotre arrivée dans la vie de la petite cité atlantique.
Mais l'histoire de cette broderie est bien plus difficile à faire que celle des autres productionsde rart des Morisques. Tout d'abord ses antécédents espagnols nous sont mal connus; jusqu'àmaintenant l'Espagne s'est peu occupée dit trésor de ses arts populaires. Les broderies anciennes etmême récentes sont rares dans les musées de la Péninsule et les ouvrages qui traitent des broderie.~
hispaniques n'apportent encore qu'une documentation très clairsemée. Puisse cette étude cfun dérivé
d'une broderie espagnole, susciter un beau livre sur les broderies de Castille et d'Extramadoure !
Enfin la broderie de Rabat a évolué à la fois dans ses modèles, dans sa technique et dans sacouleur. Ce n'est pas la moindre de ses originalités. Toutes les broderies marocaines à pointscomptés, au contraire, sont restées assez proche,~ de leurs origines : leurs motifs étaient liés à unetechnique impérieuse. Elles apparaissent plus archaïqltes en toUs points que les broderies espagnolesmodernes; grâce aux loisirs indéfinis du harem, les femmes marocaines ont conservé les points detraits complexes. à double face, que les femmes espagnoles ont trop souvent remplacés par le pointde croix. La broderie de Rabat n'a pas connu la limitation et la sauvegarde d'une technique rigide.Elle y a sans doute plus perdu que gagné. Au moins son évolution est-elle significative entre touteset vraiment marocaine.
PRÉFACE IX
L'impression de ce livre a commencé au lendemain de l'armistice alors que nous étionspratiquement coupés de nos éditeurs français. En dehors des clichés photographiques qui furentexécutés dans la métropole, l'illustration, la composition et l'impression du livre ont été faites à
Rabat. Cette édition a demandé à tous beaucoup de bonne volonté et de patience. Au moins CClV;
qui ont travaillé à ce livre - et que je suis heureux de remercier ici - auront la satisfaction devoir que la publication réalisée par leurs soim est digne du beau sujet dont elle traite.
Il me reste en félicitant Madame Brunot-David d'avoir conduit son travail avec autant detalent que de probité, à proposer son livre en exemple. Tous les stagiaires à qui l'administration ala sagesse d'imposer la rédaction d'un mémoire sur un sujet marocain devraient, au lieu de laisserleur travail d'un an s'enfouir dans des dossiers administratifs ou dans des souvenirs personnels,reprendre avec ardeur l'étude qui leur fut proposée et, en lui accordant l'aumône de quelquesannées de travail, en faire un vrai livre. Ils seraient déjà récompensés de leur peine par toutes lesjoies de la découverte. Et qu'ils se persuadent que toute étude, si restreinte et si humble qu'elleparaisse, à condition qu'elle soit poussée à fond, accroît notre connaissance du Maroc et importe à
notre action sur le pays.
Je voudrais surtout que tous ceux qui par goût ou par métier ont charge des productions d'art
du Maroc sachent bien qu'il ne suffit pas d'aimer les arts marocains - ou d'en vivre - pour lessauver et leur donner une vie nouvelle ; là comme ailleurs raction est, dans son étendue et dans ses
résultats, à la mesure de la connaissance.
HENRI TERRASSE.
AVANT.PROPOS
Les broderies de Rabat n'ont fait jusqu'à présent l'objet d'aucune étude particulière.Prosper RICARD, dans son beau travail sur les broderies marocaines, et Jeanne J OVIN, dans unesynthèse rapide concernant les thèmes décoratifs et les origines des mêmes broderies, n'ont abordécelles de Rabat, au même titre que les autres, que pour leur consacrer un petit nombre de pageset quelques reproductions, très bien choisies d'ailleurs. Ces auteurs n'ont eu en vue que l'ensemble
des broderies marocaines.
Or il semble bien, d'après ce qu'ils rapportent et d'après ce que nous voyons encore aujourd'hui,que les broderies marocaines n'offrent guère de caractères communs et que, par conséquent, chaquegenre mérite une étude particulière et indépendante, en ml mot, une monographie.
La broderie de Rabat se présente en outre, à l'examen, non pas comme une productionartistique homogène et permanente, mais, tout au contraire, et à l'inverse de ce qui se passe pourles autres broderies du pays, comme un art profondément transformé au cours des siècles. Il estsans doute permis de parler de la « broderie de Rabat », mais il vaut mieux, pour être exact,employer l'expression « les broderies de Rabat» tant la différence est grande, pour ne pas direplus, entre les productions anciennes et les objets modernes.
Ces deux raisons, originalité et histoire des broderies de Rabat, légitiment à la fois le titre de
cette étude et le but qu'elle se propose.
Le but d'ailleurs est double. D'une part, on a essayé de faire une analyse aussi précise que
possible des techniques et de l'art des brodeuses, de montrer comment elles composent le décor et lecoloris, de marquer, en l'expliquant, l'évolution historique de leur art et d'indiquer la place quetient la broderie dans la société musulmane de Rabat. D'autre part, on a pensé faire œuvre utileen donnant assez de détails techniques pour que tout atelier, scolaire ou privé, puisse reconstituer àvolonté les plus belles broderies de Rabat ou s'en inspirer dans de nouvelles compositions. Notretravail est donc à la fois une étude et un corpus qui se complètent réciproquement et forment un
tout indivisible.
Le caractère historique et pratique donné à ce travail s'explique encore par la nécessité de fairesans tarder une sorte d'inventaire des productions diverses des broderies de Rabat en choisissant lesplus belles, les plus significatives et les plus instructives. La prospection des pièces est encorepossible quoique difficile ; elle ne le sera plus d'ici peu de temps lorsque les belles broderies seseront dispersées entre trop de mains ou auront été détruites.
XII LBS BRODERIES DE RABAT
Le recueil de planches que l'on a joint à cette étude donne, en grandeur naturelle, les motifset les compositions décoratives des meilleurs échantillons des hroderies de Rahat. Il représente nonpas les pièces telles qu'elles seront une fois exécutées, mais les dessins qu'il faut tracer sur les tissuspour ohtenir leur reproduction exacte en tenant compte de différents facteurs techniques. L'aspectde la pièce à reproduire, source du dessin en question, se trouve dans les planches photographiquesqui sont jointes à la fin du volume. En rapprochant des photos les dessins correspondants, oncomprendra aisément la nature du travail qui consiste à relever une hroderie et la différence quisépare le schéma de la réalisation effective.
Cependant les planches photographiques ne correspondent pas toutes à des planches de dessinet réciproquement. Les photos servent à illustrer à la fois le recueil de dessins et les explicationsd'ordre général concernant la nature, le hut, l'histoire des hroderies. On a pensé qu'il était inutilede donner pour chaque photographie le dessin technique qui lui correspond et, pour chaque dessin,une reproduction photographique de la pièce qui en est la source.
D'ailleurs, on remarquera que le recueil de planches est analytique. Il étahlit des senesprogressives 'ae motifs, voire d'éléments de motifs, comme s'il s'agissait d'une démonstrationrespectueuse de la règle d'exposition bien connue: aller toujours du simple au composé. Ce n'estque dans les dernières planches qu'on trouve des compositions d'ensemble reproduisant les plusbeaux morceaux du répertoire de Rahat : ces planches, seules, peuvent cocrespondre à des photos.
Pour que l'étude fût complète, il aurait fallu colorer les planches de dessins et même lesplanches photographiques. Mais les circonstanees actuelles n'ont pas permis ce qu'on aurait tortd'appeler un luxe. Afin de combler cette lacune, nous avons décrit en détail, à propos de lacomposition des coloris, la palette d'un certain nomhre de pièces, les plus suggestives.
Un travail de ce genre n'a pu être mené à hout sans l'aide de personnes compétentes oubienveillantes que nous voulons remercier ici très sincèrement.
Monsieur Henri Terrasse, directeur de l'Institut des Hautes-Études Marocaines, nous a donnédes encouragements et des conseils aussi précieux que nomhreux. Si l'ouvrage a quelque mérite,et s'il est publié, c'est à ce parfait directeur d'études qu'il le doit.
Madame Amor, fondatrice de l'école musulmane de filles de Salé, et sa sœur, MademoiselleBouillot, nous ont prodigué généreusement documents rares et explications délicates sur unetechnique et un art où elles sont devenues incomparahles.
A Messieurs Louis Brunot et Georges Colin, directeurs d'études à l'Institut des Hautes-ÉtudesMarocaines, nous devons des directives et des renseignements qui ont rendu possible l'étahlissement du lexique.
Monsieur Abd-el-Kader hen Farès nous a servi de truchement auprès de ses parentes,maîtresses-hrodeuses expertes, qui nous ont fourni obligeamment toutes les explications désirahles.
Il nous faut signaler tout particulièrement la compréhension aimahle avec laquelle Si MohammedDias, syndic du commerce des tapis et des hroderies, a mis à notre disposition les richesses sans cesserenouvelées de son magasin. Nous lui devons heaucoup.
AVANT-PROPOS XIII
Le Service des Arts indigènes, à la direction duquel Monsieur Baldoui a succédé à MonsieurProsper Ricard, a montré à notre égard une égale bienveillance en ouvrant toutes grandes les
armoires où sont conservées des pièces inestimables.
Nous ne saurions oublier Mohammed ben Daoud, répétiteur à l'Institut des Hautes-Études
Marocaines, ethnographe sans le savoir et délicieux folkloriste, qui nous a renseigné sur le rôlesocial de la broderie à Rabat et nous a aussi procuré des pièces brodées de toute valeur.
Madame Henri Terrasse nous a prêté sa collection personnelle de dessins de broderies et
quelques pièces remarquables ; elle nous a fait profiter, en outre, de son expérience consommée
dans un art qui en exige beaucoup.
Mesdames Max Chabert et Louis Brunot ont mis à notre disposition, fort obligeamment, des
broderies anciennes et rares.
Nous ferons une mention spéciale pour l'école musulmane de filles de Rabat où nous avons
toujours trouvé l'accueil le plus aimable au cours de nos enquêtes.
L'administration, représentée en l'occurrence par Monsieur Lucien Paye, Chef du Service de
l'Enseignement musulman, ne nous a ménagé ni les encouragements ni les moyens de travail
ni les facilités d'impression.
L'École du Livre, sous la direction de Monsieur Houlet pour ce qui concerne le tome 1, sou:'!
celle de Monsieur Lambinet pour ce qui concerne le tome II, a mené à bien le long et minutieax
travail qu'exige l'impression de notre étude et de son recueil de planches. (Ces dernières ont été
redessinées et héliogravées par le maître-ouvrier lithographe Barreau et le jeune Verdin apprenti
de 4" année).
Signalons enfin que l'Imprimerie Officielle a assuré, sous la direction technique de Monsieur
Lagrange, l'impression délicate des planches photographiques. On appréciera la finesse et le rendu
de ce travail.
A tous, j'exprime ici ma reconnaissance la plus vive.
Fès, le 31 mars 1943.
CHRISTIANE BRUNOT-DAVID.
BIBLIOGRAPHIE
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CHANTRÉAUX. _ Le tissage sur métier de haute-lisse à Aït-Hichem et dans le haut Sébaou, dans la
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DESPARMET, Le mal magique. - Le mal .magique, par DE~PARMET (Publications de la Faculté des
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DESTAING, Interdictions. _ Interdictions de vocabulaire en Berbérie, par E. DESTAING, dans Mélanges,RENÉ BASSET (Publiootions de l'Institut des Hautes-Études .marocaines, Tome XI), Paris, 1925.
XVI LES BRODERIES DE RABAT
DILLMONT. - Encyclopédie des ouvrages de dames, par THÉRÈSE DE DILLMONT, Paris, 1909.
Dozy. - Supplément aux dictionnaires arabes, par R. Dozy, Leide, 1927 (2" édition).
HARDY et BRUNOT. - L'enfant marocain (Editions du Bulletin de l'Enseignement public au Maroc, n° 63,janvier 1925), par GEORGES HARDY et LOUIS BRUNOT, Paris, 1925.
Hespéris. - Hespéris (Archives berbères et Bulletin de l'Institut des Hautes-IUudes marocaines).
I.B.L.A. - Bulletin trimestriel de l'Institut des Belles-Lettres arabes de Tunis.
JOUIN. - Les thèmes décoratifs des broderies marocaines (Collection Hespéris, Tome VII), par
JEANNE JOUIN, Paris, 1935.
LAOUST, Feux de joie. - Noms et cérémonies des feux de joie chez les Berbères du Haut et del'Anti-Atlas (Extrait d'Hespéris, année 1921), par E. LAOUST, Paris, 1921.
LAOUST, Mots et choses. - Mots et choses berbères, par E. LAOUST, Paris, 1920.
LEGEY. - Essai de folklore marocain, par la Doctoresse LEGEY, Paris, 1926.
MARÇAIS, Takroûna. - Textes arabes de Takroûna (Bibliothèque de l'École des Langues orientalesvivantes), par W. MARÇAIS et ABDERRAHMAN GUIGA, Paris, 1925.
MARÇAIS, Tanger. - Textes arabes de Tanger (Bibliothèque de l'École des Langues orientales vivantes),par W. MARÇAIS, Paris, 1911.
RICARD, Broderies. - Arts marocains : Broderies, par P. RICARD, Alger, 1918.
RICARD, Teintures. - Procéd'és marocains des teintures des laines (dans le Bulletin de l'Enseignementpublic au Maroc, n° 70, année 1925), par PROSPER RICARD, Paris, 1925.
GABRIEL-RoUSSEAU. - L"harmonie, les contrastes et la chimie des couleurs, texte des conférences faites
au personnel enseignant des écoles professionnelles musulmanes, avec planches en couleur
(Publications de la Direction générale de l'Instruction publique au Maroc), par GABRIEL-RoUSSEAU,
Rabat, 1939.
SIMONET. - Glosario de voces ibericas y latinas usadas entre los mozarabes, par D. FRANCISCO JAVIER
SIMONET, Madrid, 1888.
TERRASSE et HAINAUT. - Les arts décoratifs au Ma 'oc, par HENRI TERRASSE et JEAN HAINAUT, Paris, 1925.
WESTERMARCK, Mariage. - Les cérémonies du mariage au M'aroc (Publications de l'École supérieurede langue arabe et de dialectes berbères de Rabat, Tome VII), traduction J. ARIN, par EDWARD
WESTERMARCK, Paris, 1921.
WESTERMARCK, Survivances. - Survivances païennes dans la civilisation mahométane, traduction
française de ROBERT GODET, par EDWARD WESTERMARCK, Paris, 1935.
SYSTÈME DE TRANSCRIPTION
On reproduit ici, pour cet ouvrage, exactement le système de transcription que Monsieur Georges
S. Colin a employé dans son Recueil de textes en arabe marocain (Paris 1937) et dans sa Chrestomathie
marocaine (Paris 1939).
1. - CONSONNES
hamza. 1,
b ~3 - ~
~
Ü(prononcez ts). g
tj
~ f --.:?1) t q 0b t g -- g dur provenant de0 ou de
~d )
k ~r ) Jr )
emphatisé.
z ; J emphatisé.J
emphatisé. m (:; iJ
= n 1,;)s VS V h
$ j et Vemphatisé. IV ) consonne.
r/. if' j; et ) emphatisé. y ~consonne.
II. - VOYELLES
fi.ç
entre a et è ouvert.
entre i et é fermé.
9 entre u et 0 fermé.u - ou français.
~ voyelle de timbre neutre ; selon les conson nes qui l'entourent, elle a la valeur de e muet français
ou tend vers è ouvert ou 0 ouvert.
li a très bref ; c'est la valeur que prend souvent <1 au contact des laryngales.
~ Les voyelles longues sont surmontées d'un trait : li. 0, etc....
CHAPITRE PREMIER
LA BRODERIE DANS -LA SOCIÉTÉ MUSULMANE DE RABAT
§ l - La broderie, art citadin.
Contrairement au tissage des tapis, qui est un
art essentiellement rural (1), la broderie ne se
rencontre guère en dehors des villes. C'est un art
citadin, et la broderie de Rabat offre ce caractère
tout particulièrement.
Seules les femmes de bonne condition, JOUIS
sant d'une certaine honorabilité, s'adonnent â la
broderie. Il est curieux de noter à ce sujet qu'à
Salé - la sœur ennemie de Rabat - où l'on
a trouvé de très belles pièces de la broderie
de Rabat, et où celle-ci était fort bien exécutée
et fort en honneur, le point de Rabat était
le privilège de la haute bourgeoisie, alors que
le point de Salé était laissé aux gens du commun.
On comprendra cette primauté en songca;1!
aux qualités qu'exige de l'ouvrière la broderie de
Rabat. L'habileté manuelle ne suffit pas ; il faut
encore, en plus de la technique, un sens artistique
(1) Voir BRUNOT, Rabat, p. 182, note 6.
(2) C'est le quartier de l'üubira, où se parquaient lesruraux fraîchement immigrés. Eux seuls fabriquaient lesfameux tapis de Rabat.
(3) Voir BRUNOT, Rabat, pp. 181 et suivantes.
très sûr qui dicte la composition décorative ct
l'harmonie des couleurs dans les pièces de choix.
Ce sont les classes sociales ayant une certaine
aisance, des traditions et des besoins de luxe, qui
seules peuvent porter intérêt à un travail de ce
genre.
On ne s'étonnera pas alors que si le"
tapissières, rurales immigrées dans un seul
quartier de la ville (2), sont des salariées, les
brodeuses, tout au contraire, paient pour appren
dre leur art.
On s'explique encore, de ce fait, les rites de
l'éducation des fillettes : à l'occasion de la mise
sur la chaise d'enfant (à quatre mois), à l'occasion
du premier jeûne, .... on met aux mains des enfants
une aiguille, un dé, de la soie, afin qu'elles
deviennent de bonnes brodeuses.
On voit, par ces quelques traits, la place tout
à fait honorable que la broderie Occupe d:ms
l'opinion de la société citadine de Rabat. La
broderie est un art éminemment citadin (3).
A Kairouan, tout comme à Rabat, les fillettes des citadins, même les plus riches, vont chez des maîtresses.brodeuses. ou des .maîtresses-dentellières pour y apprendredes techlllqucs qlU font partie du programme d'éducationd'une je.tme fille. L~s ric~es ne consentent pas il apprendrela techl1lque du tapIS. VOIr I.B.L.A. no 3, juilIet 1941, p. 349.
LES BRODERIES DE RABAT
§ 2 - La broderie à la maison.
Les adultes, auxquelles la coutume musulmane
impose la claustration à partir de l'i\ge de la
nubilité, brodent forcément à _la maison. Dès
quatorze ou quinze ans, la fillette cesse d'aller
chez la maîtresse de broderie. Les femmes
brodent donc chez elles, ou bien encore emportent
leur ouvrage chez leurs amies très intimes quand
elles vont leur rendre visite.
On ne relève pas de superstitions concernant
les heures pendant lesquelles on peut broder, ce
qui surprend quelque peu quand on songe à
celles qui concernent la technique des tapis (4).
Cependant, à minuit, il est bon d'abandonner son
ouvrage pour « laisser dormir les génies »,
mwalïn-al-[artl. Il ne faut pas oublier que les
génies, jnün (5), jouent un rôle très important
dans la vie des femmes marocaines. Ce sont les
hôtes inévitables et invisibles des maisons, hôtes
qu'il ne faut pas mécontenter, mais à l'égard
desquels une certaine méfiance est indispensable.
On ne sait jamais, en effet, à quelles facéties ih;
peuvent se livrer.. C'est pour cette raison qu'on
ne laisse jamais un récipient découvert pendant
la nuit : les génies pollueraient ce qui s'y trouve.
De même, le soir venu, les femmes tendent leur
broderie en train sur une planche et posent par
dessus un objet pesant. Le lendemain, la broderie
est plus unie : on dit que le travail dort ;)S-.~[j;)l
irgQd. Mais si la brodeuse laisse son travail
abandonné sur le coussin à hroder et si elle
néglige de le couvrir, les démons viennent y
travailler la nuit et en enlèvent la « vertn
(4) Voir la magistrale étude de H. BASSET, La laine.(5) Sur les génies ou démons, jnîrn, voir tout le premier
chapitre de \VESTERMARCK, Survivances.(6) Sur la baraka, vair WESTERMARCK, Survivances,
pp. 111 et suiv. Tout travail en train ne réussit que grâce àla baraka avec laquelle on l'entreprend et on le poursuit.
(7) Le dimanche est le jour préféré pour commencerquelque chose. Ainsi, les fètes de mariage débutent presquerégulièrement par un dimanche.
(8) On désigne ainsi une période de sept jours et huitnuits qui va du 24 février au 4 mars et qui marque la fin
efficace », la baraka (6). Le matin venu, la
brodeuse retrouve son aiguille émoussée et « sa.
main est lourde» ; le travail devient mauvais.
Certains jours possèdent une vertu bénéfique
quand il s'agit de la mise en train d'un ouvrage.
Cette vertu est renforcée par ailleurs si on
commence le travail entre neuf et onze heures du
matin. Ces jours favorables sont par excellence le
dimanche et le lundi. Le dimanche étant le
premier jour de la semaine, personne ne devan·
cera la brodeuse qui commencera son travail ce
jour-là (7). Par ailleurs, c'est un lundi que fut
créé l'Archange Gabriel, SIdna JbrIl, qui révéla
le Coran au Prophète Mohammed, et dont
l'influence, de ce fait, est très grande dans la
croyance populaire. Un travail commencé sous
de tels auspices en bénéficiera nécessairement.
Alors qu'il est bon de broder le dimanche et
le lundi, certaines périodes, au contraire, ont un
pouvoir néfaste ; on se trouve toujours bien de
s'abstenir de toucher à un ouvrage quand elles
arrivent. Ces périodes sont notamment celles de
1,lsüm (8), de sanlira (9) et de J:zügüza (10).
Pendant les sept jours et les huits nuits qui
constituent la période appelée 1}.süm, on ne brode
pas et on s'abstient également de laver, de
blanchir les murs ou de balayer.
Pendant la SaIllira, il Salé, on ne touche pas
une aiguille, car toute femme qui contrevient à
cette coutume voit des verrues pousser sur son
doigt. Certaines femmes de Rabat partagent cette
croyance qui, d'une façon générale, n'est pas très
répandue.
de l'hiver. C'est une période néfaste, voir funeste, durantlaquelle on s'abstient de toutes sortes d'actions, telles quese raser, se baigner, acheter des balais neufs, balayer,naviguer... Voir Dozy, r, p. 287 ; LEGIlY, p. 25 ; LAOUST,Mots et choses, p. 187, note 1 et BRUNOT, La mer, p. 43.
(9) Sur cette fête, voir MARCAIS, Tanger, p. 152 et labibliographie qu'il donne sur ce sujet, même page, note 1.Voir aussi WESTERMARCK, Survivances, p. 206.
(10) Sur cette fête au Marac, voir BIARNAY, pp. 84 etsuiv. et LÉVI, Pratiques agricoles, dans les Archives berbères,Vol. 3, fasc. 1, p. 101 (nombreuses références, note 2).
LA BRODERIE DANS LA SOCIÉTÉ MUSULMANE DE l\ABAT
Enfin, il est préférable de ne pas entamer un
<ouvrage de broderie le jour de J.lagüza, premier
de l'an de l'année agricole qui tombe le 13 janvier
de notre calendrier. Cette interdiction ne reçoit
pas d'explication.
Par contre, le jour de la fête de giisQra (11),
comme il est bon, dans tous les métiers, de faire
un simulacre de travail, la brodeuse a le plu~
grand intérêt à exécuter un petit motif de
broderie sans aller plus loin. Elle est assurée ainsi
de bien broder toute l'année.
Les femmes de Rabat brodent rarement en
vue de cadeaux à faire. Il n'y a, en effet, que deux
objets qui soient exécutés dans cette intention :
le mouchoir et la ceinture de pantalon que hl
jeune épousée offre à son mari. En dehors de ces
deux objets, les femmes brodent pour l'ameuble
ment de leur maison, leur trousseau et la layette
des enfants à naître.
Quand une jeune mère attend son premier
enfant, toutes les femmes de sa famille, et
elle-même, brodent la layette, dont l'importance
est proportionnée à la situation de fortune des
intéressés. Cette layette peut être commencée à
partir du quatrième ou du cinquième mois de la
grossesse. Il s'agit là d'une layette d'apparat qui
ne sert que pour les grands jours. Elle est rangée
soigneusement le reste du temps et on la destine
aux autres enfants qui naîtront ensuite dans la
maison (12).
On ne relève pas d'interdictions relatives à !fi
broderie. Toutes les femmes peuvent broder dans
quelque situation qu'elles se trouvent : enceintes,
veuves, divorcées, etc....
Pour tracer le dessin de toutes ces pIeces
brodées à la maison, on a recours à la maîtresse
,de broderie. Celle-ci exécute le dessin chez elle
moyennant une rétribution proportionnée à la
(11) Cette fête a fait l'objet de nombreuses études. VoirBRUNOT, Rabat, p. 142, note 1 ; MARÇAIS, Takroûna, p. 349 ;WESTERMARCK, Survivances, pp. 178 et suiv. et LÉVI, Prati-
composition du dessin et aux dimensions del'ouvrage.
La faveur dont l'art de la broderie jouit dans
un grand nombre de maisons donne à la maîtresse
brodeuse un rôle qui n'est pas sans importance
dans la société féminine des villes. C'est un
personnage dont il convient de dire un mot.
§ 3 - La maîtresse-brodeuse.
On l'appelle mgallma. Elle reçoit les appren
ties m;)igallmai chez elle et ne se rend en aucun
cas au domicile de ses élèves. Elle tient école. Son
atelier (jar mgallma est un centre vers lequel
convergent les préoccupations des apprenties et
de leurs parents. C'est un pôle.
On trouve des maîtresses-brodeuses dans
toutes les catégories sociales, exception faite
évidemment, des plus basses classes. En outre, les
femmes qui, quelles qu'elles soient par ailleurs,
ne jouissent pas d'une réputation telle qu'on
puisse leur confier des fillettes, ne doivent pas
songer à s'installer comme maîtresses-brodeuses.
D'autre part, on ne rencontre pas de mgall.ma
parmi les femmes riches.
Leur vocation n'est pas commandée par
l'amour de l'art ou un instinct impérieux : seul
le désir de gagner de l'argent les a engagées dans
leur carrière et les y a maintenues quand elles ont
fait la preuve de leurs talents.
La maîtresse-brodeuse, gagnant ainsi quelque
argent, est en général recherchée en mariage par
des hommes de condition modeste qui comptent
sur l'appoint du salaire de leur femme pour
équilibrer le budget du ménage. Au cas où
l'ouvrière épouse un homme riche ou qui devient
riche, elle cesse d'exercer sa profession.
Il faut remarquer qu'on ne trouve ni négresses
ni bédouines parmi les maîtresses de broderie
ques agricoles, dans les Archives berbères, Vol. 3, fase. 1,p. 103.
(12) Voir ci-dessous §§ 26-30.
4 I.ES BRODERIES DE RABAT
Le salaire des travaux de dessin et de brode
rie sur commande constitue pour la brodeuse unbénéfice net car elle n'a jamais d'ouvrières à
rétribuer. S'il le faut, elle a recours parfois à ses
grandes apprenties à qui elle demande de l'aider.
sans contre-partie, à titre de service personnel.
La broderie sur commande se paie d'après le
poids de la soie employée, l'unité étant l'once
uqçya (16). L'acheteur fournit la matière première
et l'ouvrière son travail. Les prix sont différents
suivant que l'on désire une broderie monochrome
ou polychrome, celle-ci coûtant plus chère que
l'autre. La nature du tissu entre aussi en ligne
de compte dans la rétribution du travail : une
broderie sur tulle, étoffe délicate à orner, est d'unprix plus élevé que celle qu'on exécute sur lamousseline.
Il est impossible de trouver une certaine fixité
dans les prix pratiqués. Ils sont essentiellement
en rapport avec le coût de la vie, et, dans
l'époque troublée qui est la nôtre, ils changentconstamment, dans le sens de la hausse. Il està remarquer d'ailleurs que chaque maîtresse
brodeuse a son tarif propre et qu'aucun barème
des prix n'impose une règle commune. Cette
liberté est la source de différends entre ouvrières
et clientes. En cas de conflit, comme il n'y a pas
de chef de corporation chez les brodeuses, c'est
le prévôt des marchands, matl)assab, qui inter
vient pour donner de bons conseils et jouer un
rôle conciliateur entre les parties. Si le différendne peut être réglé à l'amiable, il réunit quelques
maîtresses-brodeuses connues et réputées auxquelles il demande d'expertiser le travail (15).
alors qu'on ne compte guère que des rurales
parmi les tapissières (13).
La différence essentielle qui existe entre la
bourgeoise qui brode pour son agrément et la
maallma vient du fait que la première ne sait que
tirer l'aiguille, tandis que l'autre sait dessinerktab les motifs de broderie, d'où son nom de
maallma-raqqlima : maîtresse qui dessine (14).
La maîtresse-brodeuse ne vit pas seulement
de ce que lui rapportent ses leçons. En dehors de
l'apprentissage, elle tire des revenus encore plus
importants du dessin et de la broderie slU'
commande. Les taux sur lesquels elle est rétribuée
varient suivant la composition du dessin ktQ.ba, la
nature de la pièce à décorer et le tissu sur lequel
sera exécutée la broderie. Le prix d'un rideau
sur tulle ou sur mousseline dite ma-qadd-aG..ljJh est
à peu près le double du prix d'un dessin de rideau
sur calicot. Pour les coussins, les prix diffèrent
suivant qu'il s'agit d'un grand coussin dit mb-adda,
ou d'un objet plus petit appelé b-dïdïya.
On peut constater encore, et cela va de soi,
que les prix varient suivant l'importance de labroderie : le dessin d'un napperon orné de deux
seules bandes décoratives à ses extrémités est
moins élevé que celui du mène napperon s'ilcomporte en plus un semis de motifs. Le prix du
dessin d'un châle de bain dit sQ.n est assez élevé,car pour être beau, cet objet doit être chargé d'unebroderie très fournie.
Depuis quelque temps, les maîtresses-ouvriè
res, au lieu de dessiner directement sur le tissu la
broderie des pans de rideaux, aj-jlij.il d-l-îzlir.
préparent d'avance des bandes dessinées que l'on
appliquera sur la toile ou la mousseline. Si la
cliente se croit compétente, elle choisit elle-même
le dessinl'ouvrière.
sinon, elle s'en remet au goût de
(13) Voir BRUNOT, Rabat, p. 181.(14) Dans le Sud-Algérien, les femmes tissent les tapis,
mais comme elles ne savent pas compter les points pourcomposer le dessin, elles travaillent sous la direction d'unhomme qui leur donne ses directives. C'est le reggâm. Il fautrapprocher ce mot de reqqâma ; tous deux signifient : quitrace un dessin.
(15) Voir BRUNOT, Rabat, p. 169.(16) L'once, mesure de poids pour les objets chers et
précieux, représente envIron 32 grammes. C'est la seizièmepartie de la livre, la petite livre qui correspond à 500 grammes environ. L'once a été aussi une monnaie de compte ;elle valait quatre centime••
LA BRODERIE DANS LA SOCIÉTÉ MUSUI,MANE DE RABAT 5
La rétribution de l'apprentissage est l'objet
d'un certain marchandage. Aucune règle ne pré
side à l'établissement du prix à convenir. D'autre
part, la maîtresse d'atelier tient compte de la
situation de fortune de la famille de l'apprentie.
C'est en venant présenter sa fille à la maîtresse
que la mère convient avec celle-ci d'une rétribu
tion mensuelle qui sera constante pendant toute
la durée de l'apprentissage. Chaque élève paie
selon ses moyens, depuis cinq francs par mois, si
elle est pauvre, jusqu'à vingt-cinq francs et même
plus, si elle est de condition aisée. Il est à
remarquer qu'aucune apprentie n'est admise gra
tuitement et cela pour deux raisons : la première
est que la broderie n'est pas un art pour pauvres
ses, la seconde est que l'initiation à un art est un
service d'ordre magique qui, pour être utile et
efficace exige une rémunération. Chaque mère
d'apprentie verse la rétribution promise mensuel·
lement à une date arbitrairement convenue avec
la maîtresse d'atelier. En cas de défaut de
paiement, après un ou deux rappels, la maîtresse
invite l'apprentie à rester dans sa famille.
Il faut ajouter à cette rétribution mensuelle
d'autres prestations. Une fois par an, la maîtresse
demande à ses apprenties leur contribution à
l'achat de nattes pour l'atelier (c'est le /J.(lqq
<Jl-1].$liifr) et, à un autre moment, une autre
contribution à l'achat de la jarre dans laquelle on
mettra l'eau destinée à étancher la soif des
fillettes (c'est le 1].iiqq-al-ma). De plus, à l'occasion
de chaque fête familiale chez une apprentie, la
coutume veut qu'on envoie à la maîtresse de
broderie un plat à goÎlter avec du pain et des
gâteaux. Ainsi qu'il sera dit plus loin, les fillettes
font encore de menus cadeaux à leur maîtresse ;'1
l'occasion de chaque fête religieuse.
Toutes ces coutumes tendent à créer une
ambiance favorable et amicale dans laquelle se
déroulent les rapports de l'ouvrière avec ses
apprenties, ambiance en dehors de laquelle on ne
conçoit guère de travail en commun, ni même
d'échanges commerciaux, dans la société musul
mane (17).
(17) Voir BRUNOT, Politesse, pp. 18 et 27.
L'APPRENTISSAGE DE LA BRODERIE
§ 4 - a) L'atelier.
La maîtresse-brodeuse reçoit ses apprenties
chez elle, dans une pièce réservée spécialement à
cet usage. La pièce ne porte pas de nom particu
lier, car elle n'a pas un aspect architectural
différent de celui des autres chambres. Aussi
l'atelier est-il appelé ljlir-msallma : maison de
maîtresse. On ne fait aucune distinction entre
l'atelier et la maison. L'atelier, comme toutes les
chambres des habitations marocaines, donne sur
un patio et n'est éclairé que par la porte ouverte.
quelquefois par deux fenêtres basses situées de .
part et d'autre de la porte. Chaque fillette s'assied,
où bon lui semble, sur les nattes dont le sol est
recouvert. Les enfants sont accroupies « en
tailleur », leur coussin à broder sur les genoux.
Le ménage de la pièce est fait chaque soir,
avant la sortie, par les apprenties. Après avoir
balayé, les fillettes rangent dans un coin leurs
coussins à broder, ornés chacun d'une marque
distinctive, et les enveloppent, avec leurs acces
soires, dans une grande pièce de calicot.
§ 5 - h) Pédagogie de l'apprentissaveb •
Le mot de pédagogie, que l'on emploie ici,pourra paraître impropre au regard des concep-
'LES BRODERIES DERAIlA'l'
tions que nous avons de l'éducation et de l'écoledans la société européenne. Mais si l'on examine
les choses de plus près; on doit reconnaître que,
dans la société musulmane de Rabat, l'atelier joue
pour les fillettes le même rôle que l'école coranique
pour les garçons.
Il a déjà été signalé que l'on tient la maîtresse
d'atelier comme une personne chargée de l'éduca
tion des enfants qu'on lui confie, tout autant quede l'apprentissage proprement dit. Aussi bien le
but visé par les parents, en mettant leurs enfants
à l'atelier, n'est pas tant de former des artistes
ou de bonnes oQvrières que tout simplement de
donner à la fillette une technique faisant partie
du programme d'éducation d'une jeune fille hien
élevée.
L'atelier n'est donc pas à vrai dire une
simple « école de broderie » comme l'ont cru,
au début du Protectorat, des administrateurs trop
pressés et mal renseignés, qui ont voulu en faire
des répliques officielles. C'est une maison d'accueildes enfants qui y apprennent, avec plus ou moinsde bonheur, une technique, beaucoup plus qu'un
métier, tout comme les jeunes filles de chez nous,
jadis, s'initiaient aux travaux féminins dans les
pensionnats de toutes catégories.
Sans doute, la part faite au métier estconsidérable, mais l'esprit de l'institution n'en
reste pas moins fortement empreint d'un souci
d'éducation.
§ 6 - c) Horaires et congés.
Les fillettes viennent à l'atelier le matin et
l'après-midi et prennent leur repas de midi chez
elles à la maison. L'heure de rentrée n'est pas très
rigoureuse : elle se situe en général aux environs
de huit heures (heure astronomique locale). La
maîtresse renvoie ses apprenties au moment de la
prière de midi. Elles reviennent à l'atelier une
heure et demie plus tard. Le soir, la sortie
s'effectue au moment où le soleil commence à être
bas sur l'horizon, un peu avant là prière ducrépuscule. C'est à ce moment que les fillettes
chantent la petite pièce que l'on trouvera plus
loin en annexe (Chanson II).
Certaines élèves sont accompagnées par unmembre de leur famille ou une domestique qui
vient également les chercher au retour, mais laplupart des apprenties se rendent toutes seules de
la maison à l'atelier et vice-versa. En cas d'absence
ou de retard, la maîtresse de broderie se renseigne
auprès des parents sur le motif de l'irrégularité
afin d'établir avec eux la surveillance des allées
et venues des apprenties. Cette organisation
répond au souci qu'ont les Musulmans de ne paslaisser les fillettes baguenauder dans la rue : ils
savent trop à quoi elles y sont exposées.
Le matin, les premières apprenties arrivées
font le ménage de la maîtresse et lui rendentd'autres menus services. Ceux-ci n'ont d'ailleurs
pas un caractère servile : ils répondent plutôt à
une coutume admise par tous, éminemment propre
à créer cette ambiance aimable qui doit présideraux relations des différents membres de la sociétémusulmane.
Alors que les élèves de l'école coranique ontcongé du mercredi midi au vendredi après la
prière de midi, que les tapissières travaillent levendredi et se reposent le dimanche, les apprenties brodeuses vaquent le vendredi.
En dehors de ce congé hebdomadaire, des
périodes de repos sont prévues à l'occasion des
fêtes religieuses et de quelques fêtes publiquesnon religiêuses.
A 3asQra (18), l'atelier vaque pendant deux
jours. Le matin du premier jour, les apprenties
viennent à l'atelier et exécutent un tout petit
motif de broderie afin, dit-on, de « purifier » le
travail de l'année. On sait que tout acte accompli
(18) Voir ci-dessus, p. 3, note 11. Cette fête tombe ledixième jour du mois de Moharram qui est le premier del'année.
LA BRODERIE DANS.'LASOCIÉ'l'É,MlUSULMANE DE RABAT 7
Ce jour-là a un retentissement certain sur tous les
actes de même nature qu'on accomplira dans
l'année.
Jadis, ce jour-là, les enfants se rendaient en
chœur au tombeau de Sidi-Maklouf (19) qui
domine, à l'extrémité du Mellah, la falaise de
l'oued, et elles y mangeaient des fruits secs, nos, , 't
quatre-mendiants. Cette coutume a ete proscn.e,
il y a encore peu de temps, par un cadi vigilant,
. 'f un J'our rendant unesous pretexte qu une emme, ,
visite pieuse au santon, était tombée du haut de
la falaise et s'était tuée. En fait, ce magistrat
profitait d'une occasion tragique pour supprimer
une cérémonie qui lui paraissait évidemment trop
peu orthodoxe (20).
Il n'y a rien gagné. En compensation, les
fillettes se rendent au cimetière d'EI-Alou (21) et
font une réédition de la fête, aussi peu orthodoxe,
de Lalla-Kessâba (22).
Pour le Mouloud (23), l'atelier vaque purement
t . . squ'à l'octaveet simplement pendant sep Jours JU . ,
de la fête.
Le premier jeudi de Rejeb (24), pour préparer
« la grande nuit », Ji-lïla ikblra d-JrjJb, les
mIettes ne viennent pas à l'école non plus que le
lendemain vendredi, jour de congé hebdomadaire.
Pendant le mois de Chaabane, les ateliers de
broderie ne manquent pas, comme chaque famille
et chaque corporation, d'organiser une fête dite
sihbilina (25). Celle-ci se déroule à l'intérieur de
la maison de la maîtresse-brodeuse, dans l'atelier
même, au contraire de ce qui se passe dans la
corporation des tapissières où l'on passe la fête
dans un jardin·hors de la ville. Les grandes élèves
apportent chacune à l'atelier deux mudd (26) de
semoule, c'est-à-dire de quoi confectionner deux
pains ronds, et quelque argent. Les petites élèves
n'apportent qu'un moudd et demi et un peu moins
d'argent que les grandes. La veille du jour fixé
pour sii3blina, on confectionne des galettes de pain
de fantaisie dits iJubZ-1l11ZpwwQq. (On Y met du
beurre, des graines de sésame, de la gomme
mastic "., chacun selon son goût). On prépare
aussi des macarons (;riJba et des gimblettes ka(lk.
Le lendemain matin, les fillettes arrivent de
bonne heure, toutes parées, apportant chacune un
v~rre pour boire le thé. Le mari de la maîtresse
d'atelier achète de la viande et la fait préparer
soit en rôti, soit en hachis.
Une fois réunies, les fillettes prennent ensem_
ble le petit déjeuner ft?)r composé d'un plat de
b?)-fJrl?)na (27) suivi de café au lait. On met le
samovar en train et l'on commence à s'amuser et
à chanter.
do t le nom est indiscu-(19) Sur ce santon musulman, n
tablement juif, voir BRUNOT, La mer, p. 56.
(20) Depuis l'instauration du Protectorat, nombreuscs
sont les mesures prises par les cadis et l~s pachas en
réaction contre les coutumes hétérodoxes et meme contre le
culte des saints.
(21) Ce cimetière s'étend de la hauteur ,(d'où son no:U1
d 1 d . brI'te la ville des vents de 1 Océan, jusqu aue a une qUI a
bord de la mer. De nombreux saints y sont enterrés. , ,
(22) S tt fête originale, voir LAOUST, Feux de JQle,
ur ce e B 'OT P 49. Elle vient d'être interditep. 44 et HARDY & nUl'< , .
à son tour.
(23) On dit aussi « Miloud ». C'est la n~ti:ité du
Prophète. Cette fête, qui n'a pas le cara~tère relIgIeux de
l'Aïd-el-Kebir et de l'Aïd-es-Sghir, est celébrée en grande.
Pompe au Maroc parce que la dynastie rég~~nte descen?' du
Prophète, Elle a lieu le 12 du mois de RabI louwel qUI est
le troisième mois de l'année musulmane. VOIr BnuNoT &
BEW-DAOUD, p. 23.
(2·1) Rejeb, septième mois de l'année musulmane, était
Un mois sacré chez les Arabes païens. Au Maroc, le peuple
le place comme premier mois de l'auuée. Il a conservé son
caractère sacré, C'est le « mois de Dieu» ; le mois suivant
est le « mois du Prophète ». La nuit du premier jeUdi de
cc mois est une « grande nuit ».
(25) Voir BRUNOT & BEN-DAOUD, premier texte.
(26) Le mudd, mesure de capacité, est d'uue conte.
nance variable selon les pays et aussi selou la substauce
qu'on mesure. Celui avec lequel on mesure la semoule est
plus petit que celui avec lequel on mesure les grains. Le
mudd en-nabawi ou mudd en-nbi « la mesure du Prophète »,
contient ce que peuvent renfermer les deux maius jointes,
. mài~ ouvertes et moyennement déployées, c'est-à-dire une
jointée. On s'en sert pour les aumôues religieuses.
(27) Mets composé de viande coupée en petits morceaux
qu'on fait revenir dans du beurre avec des épices variées.
Voir BRUNOT & BEN-DAOUD, p. 13, note 17.
8 LES BRODERIES DE RABAT
Vers dix heures, on distribue du tRé et des
gâteaux. A midi (le midi astronomique), on
déjeune avec de la viande rôtie ou en hachis :
c'est le ftiJr-d-<Jl-1Qwli. L'après-midi se passe à sebalancer sur l'escarpolette que l'on a suspendueà la porte de l'atelier en utilisant les trois
petites ouvertures s<Jmmlîsa ménagées au-dessus du
linteau. On chante des chansons appropriées enbalançant les fillettes les unes après les autres (28).
Celles qui ne peuvent s'amuser à l'escarpolette se
groupent selon leurs affinités et chantent ens'accompagnant de tambourins cylindriques en
poterie dits gwljl et ttl3r~ja.
Le moment de 1'3a~<Jr venu, on prend une
collation, <Jl-gda d-<J1-3tlsiya et on continue à
s'amuser jusqu'au crépuscule. Alors les parents
arrivent et emmènent leurs fillettes. Lorsqu'ellespartent, la maîtresse remet à chacune, pour les
femmes de la maison, un morceau du pain defantaisie, afin que si l'une d'elles est enceinte etqu'elle ait eu une envie de ce pain, elle reçoive
satisfaction.
Le lendemain, les enfants restent chez elles :
nhar-<Jn-nnha b-1Jah : il n'y a pas de fête sans
lendemain. Souvent, les enfants ont pris congé
également la veille de la fête.
Deux jours avant l'entrée du mois de
Hamadhan, les élèves s'absentent pour laisser à
leur maîtresse le loisir de nettoyer sa maison à
fond, car pendant le jeûne qui dure un mois on
n'aura guère le temps ni la force de faire de
grands nettoyages.
Par ailleurs, pendant le mois de Hamadhan,
les apprenties arrivent à l'atelier plus tard qu'à
l'ordinaire. Celles qui jeûnent restent à l'atelier à
l'heure du repas de midi. Les plus petites vont
(28) Sur la balançoire, voir MARCAIS, Tanger, p. 167,note 1, DESPARMET, Le mal magique, pp. 262 et 281, etBRUNOT, Judéo-arabe, p. 259, note 15.
(29) Voir BRUNOT'" BEN-DAOUD, p. 12.
(30) Voir ci-dessus, p. 7, note 26.
(31) Voir BRUNOT'" BEN-DAOUD, p. 14.
prendre leur nourriture à la maison comme•d'habitude.
La mi-carême (29) vaut une après-midi de
congé seulement. Ce jour-là, chaque fillette faitdon à la maîtresse d'un petit moudd de grain (30).
Pour le vingt-septième jour du carême, les
apprenties jouissent d'un jour de congé. Le lende
main de la « grande nuit de Hamadhan» (31), elles
apportent à leur maîtresse leur mensualité et le
casuel afférent à ce congé.
L'aïd-es-seghir, qui clôt le jeûne, donne droit
à cinq jours de congé.
A l'aïd-el-kebîr (32), les fillettes ont congé
pendant les trois premiers jours de la fête.
Beaucoup d'entre elles s'abstiennent de venir à
l'atelier le jour de l'octave. La coutume veut queles enfants offrent à leur maîtresse, à l'occasionde cette fête, une épaule du mouton qui a étéimmolé chez chacune d'elles. Avec toute cette
viande, la maîtresse (era un confit, 1Jl~3 (33). A cela
s'ajoute, comme dans les écoles coraniques, de
petits cadeaux en espèces.
Deux fêtes à caractère non musulman sont
encore l'occasion de vacances pour les ateliersde broderie ; ce sont la 1).agüza (34) pour laquelle
les fillettes ont deux jours de congé et la 3lin~ra (35)
qui leur donne droit à un jour.
En dehors de toutes ces fêtes que l'on peut
dire officielles, on trouve encore des congés
donnés à l'occasion de fêtes familiales, mariage,
naissance, imposition du nom, etc... Les apprenties, en général, ne prennent alors qu'une demi
journée de congé.
Chaque fois qu'une fillette commence un
ouvrage important, une petite fête a lieu à l'atelier.
Elle s'appelle <Jl-bdü : le début. Pendant une
(32) Voir BRUNOT'" BEN-DAOUD, p. 20 et BRUNOT, Rabat,p. 145.
(33) Sur la viande de conserve, voir BRUNOT, Rabat,p. 120, note 1.
(34) Voir ci-dessus, p, 2, note 10.
(35) Voir ci-dessus, p, 2, note 9.
l,A BRODERIE DANS LA SOCIÉTÉ MUSULMANE DE RABAT9
après-midi, les apprenties jouent, chantent et se
divertissent, buvant le thé que leur offre l'héroïne
de la fête. Il en est de même à l'occasion de
l'entrée à l'atelier d'une nouvelle apprentie.
De son côté, la maîtresse de broderie prend
elle aussi des congés. Elle ne reçoit pas les
fillettes, par exemple, le jour où elle va au bain.
De même, elle libère encore ses apprenties quand
elle est conviée à une fête familiale en tant
qu'invitée participante (36).
§ 7 d) Emploi de la journée.
En arrivant à l'atelier, les fillettes saluent la
maîtresse en lui baisant la main. Autrefois, elles
ne lui baisaient que le dos de la main, mais une
coutume récente veut qu'aujourd'hui les enfants
embrassent également la paume de la main, ainsi
qu'elles le font pour leurs parents.
Le matin, dès que les fillettes sont arnvees,
la maîtresse-brodeuse passe une sorte de visite de
propreté à laquelle tout le monde est soumis. Elle
regarde les oreilles de chacune, son cou, ses pieds,
sent ses mains et s'assure que les vêtements ne
sont pas tachés. Si cette inspection ne lui donne
pas satisfaction, elle renvoie la fillette à ses
parents pour qu'elle achève sa toilette.
Pendant ce temps, les apprenties se sont
mises à l'ouvrage, et, pour s'entraîner, chantent
des chansons dont on trouvera, à l'appendice,
quelques spécimens.
La discipline de l'atelier n'est pas très rigou
reuse. Le silence n'est pas de règle, et si la
maîtresse intervient, c'est pour faire baisser le ton
des bavardages plutôt que pour les faire cesser.
Munie d'un long roseau qui lui permet d'atteindre
les fillettes les plus éloignées d'elle, la maîtresse
en donne de petits coups sur la tête des récalci-
(36) li Y a deux sortes d'invitées dans les fêtes fam iliales musulmanes : les invitées participantes, les plushonorées, qui restent assises dans la pièce de réceptionparées et ornées pendant le temps que se déroule la fête,
trantes. Les corrections à l'atelier sont loin d'être
aussi dures qu'à l'école coranique. Alors que dans
cette dernière la bastonnade sur la plante des
pieds est chose courante, elle est complètement
inconnue à l'atelier. Un châtiment plus féminin
consiste en tapes sur les mains et en pinçons.
Cette punition est généralement réservée aux
gauchères ou aux élèves par trop inhabiles, dans
le but de les corriger. Le proverbe arabe ne dit-il
pas : « kull 3i1~rij zQiJbi : tout gaucher est
guignard ». On ne saurait donc apporter tropd'énergie à redresser un tel travers.
Il faut noter que les relations sont constantes
entre la maîtresse et les familles. C'est ainsi qu'une
mère, mécontente de la conduite de sa fille,
demandera à la maîtresse de rappeler l'enfant à
une plus stricte observance de ses devoirs (37).
La inaîtresse ne se contente pas, à cet effet, de
quelques observations brèves et sans couleur :
un moineau, qui volait au-dessus de la maison de
la fillette, est, dit-elle, venu lui conter que l'enfant
avait commis telle et telle fautes. Il est assez
amusant de remarquer qu'actuellement le moineau
est passé de mode et que le fil (sic) de la radio
est devenu un indicateur beaucoup plus sûr.
§ 8 - e) Enseignement de la technique.
Pour ce qui est de l'enseignement de la
technique proprement dite, il ne faut pas s'atten
dre à plus de méthode qu'on n'en trouve dans
l'enseignement coranique ou même dans l'ensei
gnement supérieur de la théologie et du droit à
l'intérieur des mosquées. Le caractère de CPtenseignement est qu'il est individuel. A chacune
des apprenties, la maîtresse donne, après la
rèussite d'un exercice, un exercice nouveau. Point
d'exposé théorique. Il n'est pourtant pas fait
et les personnes qui viennent simplement jeter und'œil et s'en vont sans même s'être dévoilées. coup
(37) Même attitude des parents à l'égard d "d'école coranique et dl" t't t u Llmtree IllS 1 U rice française.
10 LES BRODERIES DE RABAT
abstraction de l'élément essentiel de toute vraiepédagogie qui est le bon sens dans l'établissement'
d'une progression d'exercices allant des plus
faciles aux plus difficiles. Cet enseignement
devrait comporter deux parties : le dessin et la
broderie proprement dite. Que se passe-t-i! en
iait ?
Il faut signaler tout d'abord que l'enseign(,·ment du dessin en général, et du dessin appliqué
à la broderie en particulier, n'entre pas du toutdans les préoccupations de la maîtresse d'atelier.
Le fait est d'autant plus remarquable que la
broderie de Rabat ne peut s'exécuter que surdessin: les quelques ouvrières d'une habileté telle
qu'elles ont pu exécuter des travaux de broderie
sans les dessiner au préalable ont acquis une
réputation universelle qui les fait désigner à
l'admiration de toute la gent brodeuse.
On peut se demander les raisons de cet étatde choses qui est, par ailleurs, parfaitement admispar les intéressés. On considère le dessin debroderie comme une technique supérieure quepossèdent exclusivement les vraies maîtresses. On
est convaincu que seule une adulte, une profes~
sionnelle, puisse dessiner, mais pas une apprentie:
c'est au-dessus de ses facultés. En outre, il faut
remarquer que la maîtresse-brodeuse tire profit de
sa compétence en dessin : c'est elle qui, comme
il a été dit plus haut, compose et dessine lesouvrages exécutés ensuite par les femmes à lamaison. C'est pour elle une source de revenus nonnégligeable. Aussi a-t-elle des raisons, que l'on
comprend, de ne jamais enseigner le dessin de la
broderie. Elle consent à apprendre quelques
motifs très simples mais se réserve la décoration,la composition décorative.
S1 elle a une fille ou une nièce, elle leur
apprend à dessiner, quand elles savent broder,par pure affection. Il faut voir là un trait de la
psychologie de l'artisan marocain : il se refuse à
apprendre son art à d'autres qu'à ses proches.
Cette attitude, bien naturelle, est une des causes
de la décadence des arts indigènes, car souvent
la fille ne vaut pas sa mère, ni le fils, son père.
On veut savoir alors comment certaines
apprenties, qui n'ont aucun lien de parenté aVt'C
une maîtresse-brodeuse dessinatrice, deviennentelles-mêmes, plus tard, des maîtresses d'un artconsommé. Il est admis que de telles élèves sont
des sujets exceptionnels, qu'elles observent attentivement leur maîtresse et s'exercent chez elles àreproduire des dessins vus à l'atelier. On ditqu'elles « chipent le dessin ». Cette expression
suffit à montrer que l'enseignement du dessinn'entre pas dans le programme de l'atelier et n'estpas obligatoire.
Quant à ce qui est des exercices manuels, du
travail à l'aiguille, en voici la progression. Chaquefillette fixe sur son coussin mJJ<Jdda-dyql-<Jt-idmsqk,
à l'aide d'épingles flqil, un morceau de cotonnade,de cinquante centimètres environ. La partie qui
déborde le coussin est roulée et fixée sur le côtépar des épingles.
La maîtresse commence par enseigner le
point. Elle a dessiné, à cet effet, sur le tissuquelques éléments très simples d'un motif déco
ratif. La fillette brode avec une sorte de coton
mercerisé, le bakïr, que l'on remplace souventaujourd'hui par le /;Qwwiiy, fil de soie artificielle
fin et de qualité médiocre, rouge, noir ou vert.
Lorsque l'apprentie a acquis une certaine
régularité dans le point, elle abandonne le' coton
pour broder avec de la soie. La maîtresse lui faitexécuter des entre-deux de plus en plus compli
qués et des motifs dont l'importance va croissant.
Elle en arrive à broder des pièces entières.Une ieune fille de bonne condition· se doit de
broder certains objets chez sa maîtresse d'atelier"à savoir:
quatre portières izi}f, une rouge, une violette(zblbi), une jaune et une autre polychrome
quatre coussins JJdldlyiit, un rouge et trois.polychrom<'s ;
J.A BRODERIE DANS LA SOCIÉTÉ MUSULMANE DE RABAT 11
quatre coussins mbiiid rouges ou polychro
mes;
deux napperons mnq.dJl, un rouge et deux
polychromes ;
un châle de bain sq.n, dont la couleur à la
mode aujourd'hui est le violet zbïbi
deux paires de jarretières mriibJ(, une rouge
pour les sorties ordinaires et une polychrome pour
le jour du mariage ;
deux ou trois ceintures de pantalon ikJk, une
polychrome, une violette zbïbi et une autre rouge
ou verte.
Toutes ces pièces doivent figurer dans le
trousseau de la jeune fille à marier (38).
A une certaine époque, tout comme aujour
d'hui pour les broderies à points comptés, les
jeunes filles ne quittaient pas l'atelier sans
emporter avec elles une marquette iJllï;qa (Voir
Photos 1 a et b, 2 a et b)sur laquelle étaient repro
duits les motifs principaux de la broderie de
Rabat. C'était un objet précieux que chaque femme
gardait et montrait plus tard à ses filles et
petites-filles avec un certain orgueil. Cette coutume
a disparu aujourd'hui à Rabat, mais elle a subsisté
'à Salé par exemple, dont la broderie est à point.,
comptés.
§ 9 - f) Rites et cérémonies.
Lorsque la petite fille est en âge d'apprendre
à broder, sa mère va la présenter à la maîtresse
d'atelier. Celle-ci la fait asseoir et s'entretient un
moment avec elle d'aimables banalités qui essaient
de créer l'ambiance psychologique heureuse dans
laquelle viendra la discussion des conditions
d'apprentissage (39). On se met d'accord sur le
taux de la rétribution assez facilement, en fin de
conversation.
(38) Voir ci-dessous la description de ces objets,Chap. II, §§ 13, 14, 16, 19, 20 et 23.
(39) Voir BRUNOT, Politesse, p. 18.
(40) Voir BASSET, La laine.
L'entrée de la fillette à l'atelier est marquee
par une petite fête appelée fiij/J : ouverture (de
bon augure). La nouvelle apprentie offre le thé
et des gâteaux à tout le monde. Les camarades,
prévenues la veille, se sont parées. Tout l'atelier
passe l'après-midi à bavarder, rire et chanter.
Chaque mise en train d'un ouvrage important
sera, par la suite, l'occasion d'une cérémonie
semblable appelée bdu : commencement. La
coutume veut que la fillette, héroïne de la fête,
fasse un cadeau en espèces à sa maîtresse. Ce
cadeau, appelé lui aussi fiij/J ou bdu selon qu'il
s'agit de l'une ou l'autre des cérémonies portant
ces noms, varie suivant la situation sociale de la
famille de l'enfant. Il n'est jamais inférieur à un
demi-réal (deux francs cinquante) et s'élève
jusqu'à quatre réaux (vingt francs), parfois plus
si les parents de l'apprentie sont aisés.
L'achèvement d'un ouvrage important est
aussi l'objet d'une réjouissance à peu près sembla
ble. On trouve une certaine analogie, à ce point
de vue, entre les coutumes de l'atelier de broderie
et celles de l'école coranique : entrée du petit
garçon au msïd, pauses dans l'étude du Coran, fin
de l'étude....
Alors qu'on relève, dans le travail des tapis,
de nombreux rites à accomplir pour devenir une
bonne tapissière (40), il existe peu de choses de
ce genre en ce qui concerne la broderie. Celle-ci
est considérée comme un art d'agrément, non
comme un travail, et peu de superstitions s'y
rattachent. Cependant, comme on doit s'y attendre,
le mauvais œil (41) exerce ses ravages dans
l'atelier comme ailleurs. Si une femme omet de
dire en entrant, à plusieurs reprises : la bénédic
tion de Dieu soit sur toi et sur les fillettes (42),
si, de plus, elle regarde trop attentivement tout ce
qui se présente autour d'elle, il y a de fortes
. (41) Sur le n:auvais œil, voir BRUNOT, ludéo-arabe,p. 367, note 1, où 1 on trouvera une bibliographie importantedu sujet.
(42) Voir BRUNOT, Politesse, pp. 14 et 15.
12 LBS BRODERIES DE RABAT
chances pour qu'elle ait le mauvais œil. Sa
détestable influence se traduit immédiatement pardes pertes et des bris d'aiguilles, des baillements
sans fin, de l'irrégularité dans les points et des
querelles entre apprenties. Aussitôt la maîtresse
d'atelier jette sur le charbon d'un brasero alluméun peu d'alun ou de harmel ou encore une
mixture magique, appelée flisQ/J (43), pour conjurer
le mauvais œil. Il est à noter que les chrétiennesont généralement la réputation de ne pas avoir le
mauvais œil et que leur ignorance bien établie desrites à observer leur est une excuse pour les
gestes et les paroles risqués.
Quand une fillette Se pique le doigt en brodant,
elle frotte sa tête avec la partie qui saigne en
disant : « Que l'art de broder pénètre dans ma
tête ».
Le jour où l'apprentie va aux thermes, elles'abstient de broder : sa tête et son sang sont
lourds.
Les brodeuses de Rabat ont une dévotionspéciale pour [q.Ua aliisa aarylinJt-{}r-rli~ : Madame
Aïcha à la tête nue, dont le tombeau se trouve
près de la rue Bou-Qroun (44). C'était une
buhq.lfya (45) extatique, une simple d'esprit, qui
se tenait dans la rue Sidi-er-Roukni. Les fillettes
qui se rendaient à leurs ateliers riaient en
passant devant elle et lui disaient : « [q.Ua 1 dac
J1lalina 1 : Madame! bénis-nous! ;;) Elle leur répondait : « Allez maintenant, vous saurez bientôt toutvotre métier ». Depuis sa mort, les brodeuses lui
ont conservé une certaine dévotion. Elles serendent sur sa tombe munies d'un morceau
d'étoffe et d'une aiguillée de soie ; elles brodent
un petit motif en lui demandant d'intercéder
(43) Cette mixture contient un élément terreux et de lagomme ammoniaque ; elle a le pouvoir de rompre les charmes. Voir MARÇAIS, Takro/lna, p. 400.
(44) Rue commerçante, au centre de la ville, qui setermine en fourche, d'où son nom qui signifie : doté de(deux) cornes.
auprès de Dieu pour qu'elles deviennent ba·bilesdans leur art. Ce rite est à rapprocher de celui
des tolbas qui écrivent sur les murs du tombeau
d'un saint en demandant à celui-ci de les rendresavants.
§ 10 g) Relations entre maîtresses
et élèl;es après l'apprentissage.
Il est facile de voir que l'éducation et
l'instruction données à l'atelier créent entre la
maîtresse et ses apprenties les liens d'une amitié
qui dure après que la fillette a quitté l'atelier.
De fait, la maîtresse de broderie est reçue enamie, presqu'en parente, dans les maisons de ses
anciennes élèves. Elle reste intimement mêlée à lavie de la famille, elle est toujours invitée auxréjouissances familiales et, souvent même, c'estelle qui demeure auprès d'une ancienne élève
pendant les sept jours qui suivent son mariage,
jusqu'à ce que « s'envole la honte» (46). Chacune
de ces fêtes est l'occasion pour elle de recevoirun cadeau.
Par ailleurs, la maîtresse-ouvrière est la
conseillère attitrée que consulte son ancienne
apprentie lorsqu'elle veut faire exécuter un
ouvrage de broderie. Sa bénédiction est indispensable chaque fois qu'une ancienne élève entreprendun travail.
On peut citer enfin de nombreux cas où lamaitresse-brodeuse intervient dans la vie de ses
élèves comme un membre de la famille. Tout
démontre l'importance de son rôle dans la vieféminine de la cité.
(45) On appelle buhali les saints déments qui ne prennent aucun soin de leur personne. Voir MARÇAIS, TakrOlina,p. 211.
(46) Voir WESTERMARCK, Mariage, p. 275.
LA BRODERIE DANS LA SOCIÉTÉ MUSULMANE DE RABAT ...
L'EXPLOITATION COMMERCIALE DE LA BRODERIE
l~
§ Il - Les débouchés.
En dehors des broderies exécutées, sur
-commandes, par les maîtresses-brodeuses, il existe
une autre exploitation de la broderie qui peut
être qualifiée de commerciale. Certaines femmes
brodent chez elles des étoffes soit d'ameublement
soit d'habillement. Elles fournissent elles-mêmes
les matières premières et les confient pour la vente
à un intermédiaire, crieur public d;}llijl, boutiquer,
ou femme de condition modeste.
On peut voir chaque jour les femmes chargées
de la vente de ces objets. Elles sont assises sur un
trottoir de la Souika, leur petit étalage devant elles,
attendant patiemment l'acheteur ou l'acheteuse.
On trouve rarement de belles pièces dans les
broderies exécutées pour le commerce indigène :
les tissus de support et les soies sont de qualité
inférieure, les couleurs choquent souvent notre
goût et l'exécution du travail est loin d'être
impeccable. Ce caractère de médiocrité affecte en
général tout ce qui se fait pour le souq, comme le
pain, les vêtements, '" Tout cela est d'ailleurs à
l'usage des croquants, des pauvres gens qui n'ont
pas à la maison de femmes capables de confec
tionner elles-mêmes ces objets.
D'autres femmes travaillent à domicile pour
la clientèle européenne. Là encore il faut faire une
distinction entre les femmes qui brodent pour les
magasins et celles qui travaillent pour les particu
liers. Dans les deux cas, d'ailleurs, il s'agit de
bonnes ouvrières.
Comme toutes les broderies marocaines, celle
de Rabat connaît une assez grande vogue auprès
du public européen qui ne peut rester inscnsih]p
à son aspect particulièrement décoratif. Des
commerçants ont su exploiter ce goût des étranger:;
et ils présentent à leur clientèle différents objet,
d'ameublement, tels que coussins, napperons,
dessus de clavier, service à thé ..., et de petits
vêtements d'enfants. Toutes ces pièces sont exécu
tées par des brodeuses indigènes qui ne fournissent
que leur travail, le tissu et la soie étant donnés par
le magasin qui passe la commande.
Les particuliers font aussi travailler les
brodeuses indigènes, quelques-uns directement,
d'autres par l'intermédiaire des écoles officielles
de fillettes musulmanes. Les anciennes élèves de
ces établissements sollicitent souvent du travail et
s'adressent à leurs directrices qui leur procurent
des clientes européennes. Celles-ci trouvent par
ce moyen une certaine garantie pour la qualité
et le fini du travail commandé. Les écoles possèdent
un grand choix de modèles et leurs direetrice~;
peuvent conseiller l'acheteuse hésitante ou incom
pétente. En outre, les maîtresses-ouvrières de
l'école surveillent leurs anciennes élèves, activent
la marche du travail et assurent une exécution la
plupart du temps irréprochable. Les brodeuses
préfèrent travailler pour la clientèle européenne
qui les paie généreusement et ne les ohlige pas ù
engager elles-êmes de petits capitaux, puisqu'elles
ne fournissent pas les matières premil'res.
Il convient de faire remarquer que l'exploita
tion commerciale de la broderie, si elle a cré(~ des
revenus appréciables pour des familles peu aisées,
a été, par contre, un facteur d'ahütardisselllent et
de décadence d'uIl art qui ne soull're pas la médio
crité. Le bon marché qu'exige le souq et le g;)l\t
impératif et singulier de trop de e1ients européens
imposent aux ouvrières une déformation profes
sionnelle que seule l'école peut combattre.
LES BRODERIÈSDE RABAT
LA. MODE
§ 12 - Un facteur nouveau d'évolution.
En terminant ce chapitre sur le rôle de la
broderie dans la société féminine de Rabat,
il convient de parler d'un élément récent d'évolution rapide : la mode. Sans doute, la broderie de
,Rabat n'a pas été sans se transformer progessivement de génération en génération, suivant les
modifications du goût des citadins. Mais cette
transformation fut si lente et si peu perceptible
qu'aucun mot n'existait dans le parler local pour
l'exprimer. L'arrivée des Français a changé leschoses. Au contact des Européennes, les femmes
musulmanes n'ont pas manquer de constater leplaisir que ces étrangères éprouvent à changer
fréquemment leur manière de goûter et d'apprécierles objets dont elles se servent. Elles aussi, imitantles Françaises, se sont éprises de changement
malgré les remontrances des tenants de la tradition
~lasbiyin, et, prenant le mot avec la chose qu'ilexprime, elles ont enrichi leur vocabulaire du
terme mijc)a. Les amis de la mode ~~lib~Jl-.mijc)a
l'ont emporté sur les autres : ils avaient les
femmes avec eux.
Hélas ! la mode, pour bien dire, le goût effréné
du changement, n'a pas eu de conséquencesheureuses. On a commencé, sans grand mal, àorner de broderie des objets ou des parties d'objets
qui n'en avaient pas comme, par exemple, les bas
de jambes des pantalons féminins. Puis on ainventé des objets nouveaux qu'on a couverts de
broderie, comme le col à pointes rabattues dont
le nom gJrblita indique à la fois l'origine et ladate récente de son adoption ; on a eu aussi des,housses de phonographes brodées (Voir Photos.
41 et 52). Enfin, on a voulu imiter les brode~
ries reproduites sur les catalogues des grands
magasins, sans aucun souci des traditions locales
concernant la composition et le coloris. Une fois.les ponts rompus avec le passé, l'anarchie a
conduit les ouvrières dans les voies les plus
périlleuses : décors mièvres, sans aucune originalité, sans aucune saveur, et couleurs fades oud'une crudité éclatante que l'emploi des teinturesd'aniline a permis de pousser jusqu'à l'extrava.gance.
L'évolution, que montre une étude approfondie
de cet art, conduit d'une broderie ancienne, de
caractère robuste et somptueux, à une broderi~
moderne bien différente et, à notre goût, trèsinférieure. Il sera difficile, mais non impossible,
de lui redonner un jour la vigueur qui la caracté·
risait pendant la belle époque. Elle n'en reste pasmoins un art encore bien vivant, qui occupe de
nombreuses mains féminines, qui demeure une
marque de distinction des meilleures famillescitadines et qui tient de ce fait une place impor
tante dans la vie sociale de Rabat.
CHAPITRE II
LES OBJETS BRODÉS
La broderie de Rabat a été surtout et reste
encore une broderie d'ameublement, somptueuse
et massive. Elle est utilisée aussi pour l'ornemen
tation de quelques vêtements et de quelques
pièces de layette, assez rares d'ailleurs, où eIl,)
conserve tous ses caractères originels de broderied'ameublement.
A) OBJETS D'AMEUBLEMENT
Les objets d'ameublement garnis de broderie
sont les suivants (47)
§ 13 - Rideaux et portières.
Les rideaux et grandes portières, izlir, plur.
izgr, masquent complètement l'entrée des cham
bres. Le izlir mesure habituellement 2 m 90 sur
1 m 80, mais il en est de plus grands. Les portières
sont de plusieurs sortes ;
a) Rideau classique, dit izür mtJZz<Jr ; il est
garni, à la partie inférieure, d'une seule bande
brodée horizontale surmontée de gros motifs
arborescents (Voir Photo 7).
b) Rideau à montants monochromes, dit izür
b-<lt-twüU1a, comportant, selon les dimensions,
deux ou quatre motifs ascendants en forme de
(47) Voir RICARD, Broderies, pp. 22 et 23.
minaret, en plus de la bande horizontale de lapartie inférieure (Voir Photo 3).
c) Rideau à semis, dit izlir m<Jrsüs, orné, depuis
la bande inférieure jusqu'au sommet, d'un semis
de motifs, le plus souvent polychromes (Voir
Photos 5 a et b) ; c'est lé rideau de parade desjours de réception.
d) Rideau de ciel, dit izür d-<Js-sma. La mode
est passée des rideaux de ce genre qu'on ne voyait
que les jours de grandes cérémonies. Le rideau de
ciel était tendu horizontalement sur le plafond, à
la porte d'entrée de la chambre. Celle-ci s'encadrait
alors de deux autres rideaux verticaux perpendi
culaires au grand mur du fond et allant de ce
mur ,à son vis-à-vis ; on les relevait assez haut~àur .permettre la circulation des gens (48).
(48) Voir JOUIN, p. 3.
16 LES BRODERIES DE RABAT
e) Tenture murale, dite tobaza, employée
uniquement chez les Juifs. C'est une pièce, brodée
par les Musulmanes, que l'on tend, au Mellah, sur
un mur, le jour du mariage (Voir Photos 38 a et b).
§ 14 - Coussins, oreillers et traversins.
Ces objets servent aussi bien au couchage
qu'à l'ornement de la salle de réception, ce quis'explique par le fait que celle-ci est garnie, à
ses deux extrémités, de lits de parade.
a) La mb<Jdda (plur. m!Jiiid) est un traversin
que l'on place aujourd'hui à la tête du lit européen
namusïya, dont il tient toute la largeur. Il est
rectangulaire. Les objets de cette espèce, jadis
brodés sur les deux faces, ne le sont plus aujourd'hui que sur une seule. La broderie ne garnit que
les deux extrémités ou bien orne toute la surface(Voir Photos 21 a, 27 a, 29 a, 30 a, 31, 32 a et b
et 33).
b) La Jpddïya (plur. bdâdi) qu'on appelle
encore bdïdïya, est un coussin qu'on place en
multiples exemplaires sur les matelas longs et
étroits l/;wf (plur. l1).(}f) servant de divans, disposés
le long des murs. Il mesure environ 0 nt 60 sur
om 40. On n'utilise pas les coussins de ce genre
pour le couchage. Ils sont garnis de broderie aux
deux extrémités seulement ou bien entièrementbrodés. Ils ne sont pas munis, comme ceux de Fès,d'un manchon brodé masquant la partie nue entreles bandes ornées des extrémités (Voir Photo 23).
c) Le mnn<Jd (plur. msiinad) est le traversin
placé sur le faux-lit srïr dont il va être questionau paragraphe suivant. Le masn<Jd n'est brodé
qu'à ses deux extrémités (Voir Photos 18 a, 20 aet 30 b).
d) La str9nbŒya, coussin rond, ne sert qu'à
l'ornement des divans. Il était jadis en cuir brodé,
en velours ou en brocart. Ce n'est que depuis unevingtaine d'années seulement qu'on s'est mis à
confectionner des coussins de ce genre en les
ornant de broderie de Rabat. C'est un objet peu
commun, surtout s'il est brodé.
§ 15 - La bordure de lit.
La talmïta (plur. tlâmat) est une pièce d'étoffede 0 nt 75 de large, garnie, sur 0 m 45 environ, d'une
broderie qui s'étend sur toute la longueur. Lapartie nue est placée horizontalement sur le lit,
laissant tomber verticalement la partie brodée quicache ainsi le bord des matelas, avec le sommier
du lit européen, ou les poutres du faux-lit srïr.
C'est la tu'jïha d-<Jl-fr·âs : ce qui apparaît du lit
(Voir Photo 35). Si le lit a plusieurs matelas, on
donne à chacun sa t<Jlmïta. On trouve, quoiquerarement, de véritables dessus de lit entièrementbrodés (Voir Photo 37).
Le désir <l'orner la pièce avec des broderies st)
révèle dans l'invention du faux-lit, appelé srïr
ou encore friiS-i,blïs : le lit du diable. Il est placé
au fond et en travers de la pièce au-dessus
du véritable lit. On ne peut s'y coucher parce
qu'il est trop étroit et trop haut. Il se compose de
deux poutres parallèles assèz rapprochées allant
d'un mur à l'autre et soutenant un matelas léger.Ce lit est garni lui aussi, lui surtout, d'une bordure
t<Jlmïta, quelquefois de plusieurs, et c'est sa seule
raison d'être. Plus on est riche, plus on suspendde bordures superposées en cascade afin de garmr
ainsi le mur depuis le faux-lit jusqu'au vrai.
§ 16 - Napperons.
On traduit ainsi, faute de terme plus appro
prié, le mot mandïl (plur. mnlj.d<Jl) qui désigne
une pièce d'étoffe brodée diversement, carrée ou
rectangulairè, et servant à une grande variétéd'usages. -Les dimensions du napperon sont en
rapport avec sa destination. On voit des napperons
carrés de 40 centimètres de côté ou plus, dont onrecouvre les plateaux garnis de théières, de verres
LES OBJETS BRODÉS 17
-et de gâteaux ; le napperon cache le tout (Voir
Photo 15). D'autres, rectangulaires, de 1 m 25 sur
() m 85, servent à envelopper les vêtements que
les femmes emportent au bain (Voir Photo 26).
Des pièces du même genre sont étendues sur
les coffres pour en orner la partie supérieure
(Voir Photos 8, 9, 10, 12 a, 13 b et 14 b). De nos
jours, le mandïl devient une serviette de table
destinée à protéger les vêtements de parade aux
repas des grandes fêtes. Le napperon est souvent
orné simplement d'une bande de broderie à chaque
extrémité ; il est alors appelé .mandIl d-aj-jnqb,
ou 3iil-aj-jnqb (Voir Photos 8 et 9). Si la surface
de l'étoffe comprise entre ces bandes est garnie
d'un semis de motifs ou d'un quadrillage, il est
dit mandïl ma!süs (Voir Photos 11, 12 a, 13 b,
et 14 b).
§ 17 - Objets modernes.
On ne citera, à titre d'exemple, que la houssc
d'appareil de T.S.F. représentée par la Photo 52.
L'imagination de la brodeuse s'est donné libre
cours, aussi bien en ce qui concerne le dessin
qu'en ce qui concerne le coloris. Cet objet n'a
aucune valeur artistique, mais c'est un document.
B) OBJETS D'HABILLEMENT
Les objets d'habillement ne sont pas brodés
au seul gré de la fantaisie. Une tradition assez
sévère et généralement respectée veut que, seules,
certaines pièces du vêtement soient brodées et àdes endroits déterminés.
§ 18 - Mouchoir ou pochette.
Le mouchoir' sabnïya (plur. sbqni), est une
pièce d'étoffe carrée de 50 centimètres de côté
environ. Il est orné d'un encadrement brodé et de
quatre motifs arborescents aux quatre angles (Voir
Photo 42). On distingue le mouchoir d'homme
et le mouchoir de femme. Le premier est un
cadeau que l'épousée fait à son mari le jour de la
noce. Elle le brode elle-même. Il est monochrome.
Le second ne sert aux femmes que les jours de
cérémonie. Elles le portent passé à la ceinture,
plié en quatre, mais de façon que l'on voie les
quatre motifs de coin. Il était autrefois polychrome,
mais la mode est aujourd'hui au mouchoir mono
chrome ou bicolore.
Il faut signaler un mouchoir spécial du même-genre qUe l'on étend sur le giron de la fiancée
pendant que l'on procède à sa toilette nuptiale et
qu'on lui passe du henné aux mains. C'est la
sabnïya-d-aHwnna : le mouchoir du henné.
Citons enfin la sabnzya d-a/-mkQ{I/a repré
sentée par la Planche 70. C'était une pièce du
même genre que les précédentes que l'on plaçait
sur le mur, près du lit, et au centre de laquelle on
accrochait un étui à collyre, ce qui lui a valu
son nom. On n'en fait plus aujourd'hui.
Ces objets, que nous appelons « mouchoirs »,
ne servent en aucun cas à se moucher. Ce sont
en fait des mnqda/ (Voir ci-dessus § 161) carrés et
de petites dimensions. N'était leur format, on les
appellerait « pochette », mais on ne les met pas
dans une poche.
§ 19 - Ceinture de pantalon.
On l'appelle lakka (plur. lbk). Elle serre le
vêtement à la taille, en passant dans une coulisse
(Voir Photos 39 a et b et 40 a). Les extrémités de
cette pièce comportent un ornement de broderip.
assez important qui se prolonge sur les lisières
par un simple galon brodé également. Des pompons
18 LES BRODERIES DE RABAT
de soie encadrent sonvent latéralement la partiebrodée. L'objet se termine à chaque extrémité par
uile bande de dentelle à l'aiguille soutenant, une
frange, le tout formant la sQqda.
Autrefois, la coutume voulait que la fiancéeoffrît une ceinture de ce genre à son futur mari ;
elle était moins large que celle des femmes(15 centimètres au lieu de 25) et était brodée desoie rouge ou verte, et toujours monochrome.
Le nouveau marié ne portait cette ceinture que lejour de la noce. Aujourd'hllli, seules les femmesportent des ceintures de pantalons brodées, les
polychromes pour les cérémonies, les monochro
mes pour le tout-aller.
§ 20 - Jarretière.
On l'appelle ,rn3rb3t (plur. mrlib3t). Elle n'estpas élastique. C'est une pièce d'étoffe blanche,rectangulaire, longue et étroite. Elle sert à retenirau-dessous du genou, les houseaux ou bas de
chausses de toile s3rwQla (plur. srQw3l) dont les
femmes citadines se couvrent les jambes pour
sortir dans la rue (Voir Photo 40 b). La jarretière
du jour du mariage est polychrome, celle des
sorties ordinaires est monochrome, généralement
rouge. Les deux extrémités, qui pendent sur le côtéde la jambe, sont brodées et garnies de franges,
et les lisières, sur une longueur de vingt-cinqcentimètres environ à partir de chacun des bouts
de la pièce, sont ornées de pompons de soie.
§ 21 - Bandeau frontal.
C'est la alil;l;liba (plur. slil;iil;;},b), des femmes
et des jeunes filles. Cette pièce ressemble à la
ceinture décrite plus haut, mais s'en distingue parune bordure légère qui court de chaque côté sur
toute la longueur. Les deux extrémités sont
abondamment ornées de broderies.
§ 22- Voile de visage..
C'est le Wjm (plur. ltljmljl) , plece d'étofferectangulaire de 2 m sur 0 m 80. Il est brodé aux.
extrémités sur une longueur de 0 m 75 environ.Il né comporte ni frange ni pompons. Le voile
ainsi orné n'est utilisé que les jours de fête ou de
cérémonie ; l'un des pans est ramené sur la tête~
l'autre étalé sur la poitrine de façon à laisser surle visage la partie non brodée.
Le caprice féminin apporte, à cette partie
importante du costume, des modifications nom..'
breuses et éphémères.
§ 23 ---: Châle ou voile de bain.
Ce voile appelé sQu (plur. SUQU) , ne sert le plussouvent qu'à couvrir les épaules de la mariée à lasortie du bain. C'est une pièce de luxe que l'on
garde sans l'utiliser. Il est composé essentiellement
d'un grand rectangle de cotonnade de deux mètres
de long environ, garni abondamment de broderie
aux deux extrémités. La broderie se présente sous
l'aspect de deux triangles opposés par les sommets
(Voir Photo 44). Les extrémités sont bordées d'une
dentelle à l'aiguille hbka d-'lr-ranq.a, prolongéepar une frange de soie, le tout formant la 3Qqda.
Le châle de bain d'ancien style est devenu
extrêmement rare. Il était d'un prix élevé. Il est
remplacé par un objet qui lui ressemble faitd'un tissu, de soie japonaise brillante, brodé à l~
machine en Suisse. Ce châle moderne plaît par sanouveauté, d'un goût que nous n'apprécions pas,
et aussi par son bon marché.
§ 24 - Rohe de dessus.
La q"ssaba, m"ul;ijrïya ou dfïna, est· portéepar dessus le cafetan. C'est un vêtement très léger,en tissu transparent de mousseline ou de soie
(Voir § 31, il. Seule, la dHna, que porte la mariée
LES OBJETS BlIODÉS 19
le jour de la noce, est garnie d'un plastron de
broderie qui orne l'ouverture pectorale et le col
(Voir ci-dessous § 76).
§ 25 -- Fantaisies modernes.
a) Col pour femme, gJrbata (plur. griibJt) :
cravate. C'est un objet tout récemment introduit
dans le trousseau féminin, mais qui n'apparaît que
dans les cérémonies (Voir Photo 41 b). La pièce
est presque entièrement recouverte de broderie et
garnie à l'extérieur d'un petit picot à l'aiguille,
snïnlit.
b) Fausses manches kJimm (plur. kmlj.m).
La mode les a inventées tout récemment. Ce sont
des demi-manches de soie, artificielle le plus
souvent, analogues aux manches de lustrine
des employés de bureau. Elles sont maintenue:,;
au-dessus du coude par un lacet ordinaire passant
dans une coulisse ou par un lacet élastique. La
partie inférieure, seule, est ornée d'une broderie
assez large. Elle se termine par un picot à l'aiguille
(Voir Photo 41 a). Cet accessoire de toilette est
réservé pour les jours de cérémonie.
c) Pantalon de femme, SJrwq.1 (plur. srq.wJl).
II n'était jamais brodé autrefois, mais depuis
quelques année, à l'exemple, dit-on, de ce qui se
passe à Salé, les femmes de Rabat, du moins
quelques-unes, se sont mises à broder les pantalons
qu'on revêt pour les grands jours (Voir Photo 41 c).
C) OBJETS DE LAYETTE
Ces objets ne sont pas tous brodés. Ceux
qui le sont constituent une sorte de parure : la
décoration et le coloris procèdent dans l'ensemble
de la layette de la même inspiration, la décoration
et le coloris sont les mêmes dans toutes leI> pièces.
§ 26 - L'épaulière.
L'épaulière kJtiq.fïya (plur. ktq.tJf) ou httï[iya,
est une bande d'étoffe de 0 In 80 sur 0 In 20 qui passe
sur la nuque du bébé et revient sur la poitrine
en deux pans parallèles. Ces pans couvrent les
mains et les maintiennent collées au corps sous
l'emmaillotement. L'épaulière ne sert que pendant
la première semaine qui suit la naissance. La
broderie qui l'orne est d'une seule couleur, rouge
ou violette ; elle s'étend tout le long et d'un seul
côté de la pièce. Elle est composée généralement
d'une bande assez fournie surmontée de petitli
motifs floraux identiques et parallèles (Voir Photo
46 b).
§ 27 - Mouchoir de tête.
Le mouchoir de tête rçbQsQ, dim. rwTbsp, est
une pièce d'étoffe carré de 0 m 40 environ, ornée
soit d'une simple bordure de points de languette,
jQhra m9rjlina (49) ou d'un galon çif~ra, soit d'un
semis de motifs polychromes ; il est dit alors
mJrSÜS (Voir Photo 46 a). On pose ce mouchoir
sur la tête de l'enfant en guise de bonnet et on le
maintient avec le bandeau de front dont il est
traité ci-dessous.
§ 28 - Bandeau de front.
Le bandeau de front sJddq.da, plur. SJddqdqt,
est une pièce de toile de 0 m G5 sur 0 m DG, entière
ment couverte de broderie (Voir Photo 4G c).
Ce bandeau, qui maintient le mouchoir de tête
décrit ci~dessus, n'est mis à l'enfant que pendant
lès sept premiers jours; il est d'une monochromie
(49) Voir ci-dessous § 47.
20 LES BRODERIES DE RABAT
discrète parce qu'il ne faut pas attirer sur le
nourrisson l'attention maléfique des démons. Aprèsl'octave de naissance, on n'a plus de craintes aussI
fortes que pendant la première semaine, et onn'hésite pas à remplacer la broderie fade, passée,
bij.rad, par des compositions plus voyantes etpolychromes.
§ 29 - Pointe.
La pointe ma.(]u{jq (plur. m.(]linaq) n'est pas
un triangle mais un carré de 35 'Ym de côté.On la place, pliée en deux selon une des diagonales,
sur la nuque de l'enfant, les pans se croisant sur
la poitrine. Elle est maintenue en place par la
ceinture fij.iza qui serre le bébé à la taille. On
la garnit d'un encadrement très léger de broderie.
§ 30 - Cache-maillot
On l'appelle m,mdïl et il ressemble effectivement aux napperons du même nom, dont il a étéquestion plus haut: § 16 (Voir Photo 45). On pose
cette pièce sur l'enfant tout emmailloté pourle présenter aux visiteuses après l'octave de
naissance. On dit que le cache-maillot, le plus
souvent polychrome, a été brodé par la mère
lorsqu'encore jeune fille elle était en apprentissage.
CHAPITRE III
LES MATIÈRES PREMIÈRES
A) LE SUPPORT
§ 31 - Les étoffes de support.
Les broderies de Rabat sont et ont toujours
été exécutées sur des tissus importés d'Europe,~oit de lin assez rarement, soit de coton, c'est le casle plus fréquent, soit enfin de soie, exceptionnellement. Presque invariablement, les tissus brodés
sont de couleur blanche.
a) Le s(<JfW<Jl est une cotonnade solide, de
qualité supérieure, fine et brillante à la fois. Despièces anciennes de broderie ont été confectionnées avec cette étoffe. De nos jours, on ne l'emploie
plus que pour les grands rideaux rouges et pourla lingerie chez les gens très riches. Jadis, elle
était réservée aux vêtements des fiancés le jour
de leur mariage.
b) Le lundrïz est aussi une cotonnade de
qualité supérieure, assez légère. On l'emploieparticulièrement pour confectionner le voile de
bain (Voir § 23).
c) Le k<Jflilil!o est une cotonnade plus épaisse,
à grains, dont on se sert pour les coussins et les'
portières d'hiver.
d) Le Z<Jfdblin entre aussi dans la catégorie
des cotonnades épaisses et solides qu'on choisit
pour les coussins et les traversins. C'est une sorte
de satinette de coton. Il est blanc et parfois légère
ment teinté en jaune.
e) La hbka est un tulle serré qu'on emploieuniquement pour la confection des portières de
luxe. Ce tulle arrive souvent d'Europe déjà brodélégèrement, soit en blanc soit en couleur. Lesdessins de fleurettes et de rameaux apparaissentensuite dans le décor de la pièce brodée, mais lesouvrières n'y voient qu'un ornement de plusqu'elles jugent satisfaisant (Voir Photo 7).
f) Le ma-q<Jdd-3i'il1jh est une mousseline blanche qui offre le même caractère d'être déjà garnie
d'une broderie légère quand on l'achète. Cette
broderie est faite au point de chaînette. On s'en
sert pour les beaux rideaux et aussi pour le châlede bain (Voir Photo 44)..
g) La Jn<JI'zljya de nos jours est un calicot
·assez fin qui semble répondre à tous les besoins.des· brodeuses et des couturières. On s'en sert
pour la lingerie, les coussins, les bordures de lit,etc..., etc...
22 LES BRODERIES DE RABAT
h) Le 1)iiyiiti, qu'il faut mentionner pour
que l'énumération des étoffes soit complète, est
une mousseline peu recherchée par les brodeuses.
Il sert surtout pour les turbans.
i) La lq.Ua 1)19 est une étoffe mixte à raies
alternées de soie et coton, parfois de soie et laine.Quelques pièces anciennes sont brodées sur cetteétoffe (Voir Photo 4). Elle est peu employée de
nos jours comme support de broderie.
j) Le uriiq siih;Jl, étoffe de soie légère, rayée,
a été employée dans quelques pièces datant d'une
époque assez lointaine et devenues très rares.
C'étaient des rideaux, des napperons, des jarretières, des ceintures de pantalon. De nos jours,
l'étoffe qui porte ce nom est une soie unie, presque
transparente ; on ne l'emploie guère que pour la
confection des dessus de cafetan féminins des
jours de fête.
k) Le iqtiliiid et le :;Qwway sont des étoffesde soie artificelle ou de soie japonaise, brillanteset peu chères. Elles plaisent ainsi à l'œil non
éduqué. On les a employées d'abord pour faire
des vêtements, puis on n'a pas tardé à en faire
des coussins et des rideaux. C'est le luxe à bon
marché.
1) Le sïisdi. A la demande d'une clientèle
européenne, les ouvrières de Rabat brodent mainte
nant de petits burnous et des robes d'enfants surdes tissus de laine blanche, sorte de flanelle légère.
m) Pour des usages européens, on emploie
une étamine plus ou moins soyeuse, le tussor, le
crêpe de Chine, le crêpe marocain... qui, n'étantpas utilisés par la population musulmane, n'ont
pas encore de noms dans le vocabulaire techniquedu pays. Ces tissus sont donnés aux fillettes
des écoles officielles, tout particulièrement, pourqu'elles en fassent des napperons, des coussins,des châles de haute valeur artistique (Voir § 85).
On remarque que, d'une façon générale, les
ouvrières marocaines n'apportent que peu d'atten
tion à l'étoffe de support de leur broderie. Cette
attitude est regrettable à tout point de vue. Lesécoles musulmanes de filles ont réagi contre elle
et sont parvenues, dans une certaine mesure,
à corriger cette fâcheuse tendance. Elles ontdémontré, par exemple, que le choix du tissude support et celui de sa conleur ne sont pasindifférents. Elles ont éloigné de leurs ateliersles étoffes de soie brillantes qui, par contraste,
font paraître bien ternes les broderies dont elles
sont ornées. Elles ont éloigné aussi les étoffes
d'un blanc trop cru qui ne donnent pas toute sa
valeur au coloris de la broderie. En revanche,
elles ont introduit l'emploi de tissus nouveaux,comme l'étamine et le tussor, par exemple, tintésdiscrètement et toujours mats, qui permettent
d'établir une harmonie de couleurs entre le support
et lâ broderie et de donner à celle-ci le reliefdésirable (Voir § 85).
B) LE FIL
§ 32 - Le fil de soie..Le fil de soie Mt. Le fil employé pour la
broderie est uniquement un fil de soie qu'on achèteenroulé sur un segment de roseau, jasba, qui fait
office de bobine.
Le meilleur est fait de 1)rïr hindi soie
indienne. C'est une appellation dont les ouvrièresignorent le sens étymologique.
Le fil de 1)rïr sq~fi est fait d'une soie dequalité moyenne. On l'emploie, surtout en blanc,
pour la couture, la confection des boutons et desgalons et aussi en broderie.
LES MATIÈRES PREMIÈRES 2S
Le fil de 1,Irïr mkJrrJs, rugueux, est de qualité
inférieure. Il n'est pas homogène et présente très
irrégulièrement des nodosités qui le rendent peu
propre à la broderie fine.
Enfin, la soie artificielle, appelée indifférem
ment {Irïr Ijlibra « soie d'aloès », ou jdïdi « nouveau
genre », ou slj.ib « chenue », donne un fil trop
brillant mais de plus en plus employé en raison
de son bon marché.
Toutes ces soies sont teintes de couleurs
variées par le teinturier indigène, quand elles
ne sont pas achetées toutes teintes en Europe.
Le Maroc a eu autrefois une production indigène
de soie de très bonne qualité. Mais l'ignorance
des magnaudiers marocains a fait péricliter puis
disparaître une industrie qui aurait pu être
prospère. Actuellement, toute la soie employée
par les brodeuses est d'importation européenne.
§ 33 - Le fil de coton perlé.
Lorsque les fillettes commencent leur appren
tissage, on ne leur donne pas de fil de soie. On les
exerce à broder avec du fil de coton perlé, rouge
ou vert, parfois noir, appelé bakïr. De nos jours,
la soie artificielle dite :;Qwwliy fournit un fil àbon marché qu'on n'hésite pas à donner aux
fillettes pour leurs essais de broderie (Voir § 8).
CHAPITRE IV
L'OUTILLAGE ET LA TECHNIQUE
L'outillage de la brodeuse est d'une grande
d , .. 'Il d'un dé etsimplicité, Il se compose aIgU! es, .d'un petit coussin sur lequel on épingle le travall
en train,
§ 34 - Les aiguilles.
L "11 l'bra d-<Jr-l'qëm (plur. ibiiri) ,es aIgU! es .' ,, ' sont de deuxtoutes d'importatlOn europeenne, .
qui servent à broderdimensions. Les plus grosses,l , 'bra d-bo-m<Jsroh ;les portières, sont appe ees l ',' , '
, '11 . reprIser et seelles ressemblent à nos aIgU! es ah . llongé et très ouvert.caractérisent par un c as a
Les plus fines sont de deux genres : ibra-~-bQ-. d' ire et ibra 3alnhallQq(a, moyennes, a chas or ma ,
md<Jhhba, aiguille à chas doré.
Les aiguilles sont vendues en paquet kiigil(-
d l ' -' . 1 plus souvent les fillettes les-<J -Iban, malS, e '
achètent une par une chez le marchand le plus
proche.
L'esprit superstitieux des femmes veut que
l'aiguille ne porte son nom de ibra qu'après midi:
D 1 t " n l'appelle m<Jftiilza : celle qUIans a ma Inee, 0 .
ouvre.
La brodeuse enfile l'aiguille tS<Jrbl l-ibra avec
un fil simple, mais elle le double ensuite pour
broder. Le fil est donc utilisé sur deux brins à la
fois jüj tlliq, mais il n'est pas tordu m<Jfiül.
§ 35 - Le dé.
Le dé /:Ililqa (plur. ~lliiqç) est eelui des coutu
rières françaises ; il a un fond. Le dé en forme
d'anneau est réservé aux tailleurs masculins. Le dé
est de fabrication européenne. On l'achète chez
le boutiquier du voisinage.
§ 36 - Le coussin.
Le coussin mlpdda d-<Jt-t<Jmsijk, qui sert de
métier à broder, est de petite dimension, 0 m 50 de
long environ. Il est fait d'une cotonnade solide,
m<Jl'zijya ou z<Jrdbiin. On le bourre avec de la laine
le plus souvent, mais aussi, chez les pauvres, avec
de la paille. Le coussin est fait par la mère de
l'apprentie.
L'ouvrière fixe m<Jss<Jk la pièce, ou une partie
de la pièce, sur le coussin à l'aide d'épingles
ordinaires qu'on appelle pour la circonstance flïl
d~at-t<Jmsijk (plur. flijil) , ou encore à l'aide de
faüx-fils en tendant bien l'étoffe. L'épinglage se
fait sur trois côtés de l'étoffe; le quatrième, le plus
26 LES BRODERIES DE RABAT
rapproché de l'ouvrière, est libre. La brodeuse
commence le travail par la partie inférieure et,
pour broder, passe la main sous l'étoffe entre
celle-ci et le coussin. Lorsqu'elle a brodé aussiloin que sa main peut aller, elle enlève les épingles,
enroule la partie de l'étoffe qui vient d'être
travaillée et amène vers elle une nouvelle surfacede tissu qu'elle fixe comme prècédemment (Voir
JOUIN, Planche II).
§ 37 - Le dessin.
Pour dessiner kt<J/), la maitresse-brodeuseétend l'étoffe sur une table basse ou sur un carton
posé sur les genoux, et, à l'aide d'un crayon
ordinaire, trace la maquette à main levée. Elle n'a
ni calques ni transparents, ni patrons d'aucune
sorte. Avec une très grande habileté, elle exécuteles compositions les plus compliquées sans se
reprendre, sans effacer, n'écoutant que son génie,
tout en respectant néanmoins le style établi (VoirJOUIN, p. 9).
Le dessin préalable ktl;'ba est une des caractéristiques essentielles des broderies de Rabat. Cettetechnique s'oppose à celle des points comptés en
honneur à Fès, à Salé et à Meknès. Elle laisse une
plus grande liberté de composition, elle permetune plus grande rapidité d'exécution que la
technique des points comptés, mais elle exige
davantage de finesse dans le doigté et elle facilite
des évasions plus ou moins heureuses hors desrègles du style (Voir JOUIN, p. 8).
CHAPITRE V
LES
Les broderies de Rabat sont, ou ont été,
exécutées avec trois genres essentiels de points
UQrza : le point de feston, le point-plume et le
passé-pla1. Accessoirement, dans les pièces ancien
nes surtout, on trouve quelques autres points
POINTS
variés qui seront indiqués à la fin de cechapitre.
La nature du point sert à déterminer, à peu
près sûrement, l'âge de la broderie. Plusieurs
points peuvent être employés dans la même pièce.
A) POINTS CONSTITUTIFS
§ 38 - Passé-plat sans envers.
Ce point est le seul employé dans la broderie
moderne, d'où le nom de rqifm mJtlijq « broderie
ordinaire », donné à celle-ci. On l'appelle encore
rqifm tanjüwi « broderie tangéroise ». Il semble
bien que la broderie ancienne de Rabat a ignoré
ce point ou, du moins, qu'elle l'a peu employé (50).
Il aurait donc été importé. Dans le monde des
brodeuses, on dit qu'une tangéroise aurait monté
à Rabat un atelier, il y a une quarantaine d'années,
et qu'elle aurait introduit le nouveau point.
Quoi qu'il en soit, il reste évident qu'il a détrôné
tous les autres.
(50) Voir les marquettes anciennes, Photo 1 b et 2 a, etles Photos 4, 8, et 50 qui représentent des pièces égalementanciennes.
Pour l'exécution de ce point très connu on
renvoie à RICARD, Broderies, P. 17, en sign:lant
simplement que le passé-plat est à la fois facile
et rapide, mais exige de l'ouvrière une grande
régularité dans la tension du fil. Comme on lt'
remarque en examinant les planches 7, 9, 15, 16et 74, il est le plus souvent perpendiculaire g'o, . rzamSJggda (ou mqüdda), à l'axe de l'élément brodé
et petit recouvrir des surfaces qui vont de quelques
millimètres à deux centimètres dans la 1argeur.Dans les galons en dents de scie ligami'l t, , ,1 estoujours perpendiculaire à la direction de la lame
figurée. Par contre, lorsqu'il s'agit de galons ordi
nai.res c/Rra, le point est fréquemment bl'. .... a lque.ml/arr"!.
RICARD, Broderies, p. 18, fait remarquerl" 'Il' d fi - quealgUI ee e l, ftzla, est fixée par de 'ux ou trOIs
28 LES BRODERIES DE RABAT
points superposés à l'intérieur de l'élément àbroder puis amenée à l'endroit voulu. La broderie
couvre ensuite cette amorce. On trouve parfois un
fil qui, à l'intérieur sous la broderie, suit l'axe
du motif ou de l'élément de motif. Peut-être sc
trouve-t-on alors en présence d'une technique
ancienne qui ne connaissait pas le dessin préalable
au crayon, sur l'étoffe, de la partie à couvrir de
soie et se contentait de marquer, au fil, l'axe
du motif. Voir à ce propos, Photo 49 b où l'on
remarque sur le côté droit un tracé au fil d'un
motif qui n'a pas été exécuté ; il s'agit d'une
pièce certainement ancienne.
L'inconvénient du passé-plat sans envers
réside dans la facilité et la rapidité de son
exécution qui l'ont fait adopter par toutes les
ouvrières. Malgré le soin qu'elles croient avoir de
ne pas trop tendre le fil, elles sont entraînées,
par la vitesse de leur travail, à ne pas respecter
exactement les contours du dessin où à le déformer
en tirant sur le fil. Il en résulte que tous les angles
s'émoussent et que la plupart des lignes droites
deviennent d'es courbes. On s'en aperçoit lorsqu'on
compare les planches du Tome II de cet ouvrage
et les objets que les femmes brodent.
§ 39 - Point-plnme.
Ce point a été employé jusqu'à il y a quarante
ou soixante ans, dit-on, dans la broderie dite
que le précédent, mais son originalité provient de
l'q~m-;)t-tk;)k. Il procède de la même technique
ce qu'il ne va, de part et d'autre de l'élément
à broder, que du bord à l'axe médial, en faisant
avec celui-ci un angle de 45° environ. On obtient
ainsi une série de chevrons étroitement serrés les
uns contre les autres et dont les sommets, disposés
en ligne droite, marquent nettement l'axe du
motif (Voir Photos 7 G, 16 et 31 et PlanC,hes 1,2,
3, 4 et 618 ; voir aussi RICARD, Broderies, p. 23,
fig. 44).
L'exécution de ce point demande deux fois
plus de travail que celle du passé-plat, dont il a été
question dans le paragraphe précédent, mais il
possède une valeur décorative bien plus grande:
les éléments de la broderie prennent grâce àlui un relief nouveau, dû à l'arête médiale et au
jeu de la lumière sur des surfaces brillantescontrariées.
On trouve ce point dans les pièces anciennes
au moment de l'apparition des premiers motifs
floraux stylisés. Il a précédé, de toute évidence.
le passé-plat qui semble en être une simplification.
Dans le même rideau (Photo 5 b), on constate
que le semis de motifs est exécuté au point-plume
dans la partie inférieure et que l'ouvrière, pressée
évidemment de terminer un ouvrage d'ailleurs
très long, a brodé les motifs supérieurs au passéplat.
Le point-plume se rencontre normalement
dans des pièces anciennes, pour l'exécution des
motifs floraux de semis, à côté du point de feston
qui est réservé à la bordure principale.
On ne le trouve à côté du passé-plat qu'acci
dentellement, ce dernier point servant alors àl'exécution des galons, ou dans les conditions
fâcheuses qui ont été signalées plus haut.
Le nom de ce point qui signifie littéralement:
broderie des ceintures de pantalons, est singulier
et quelque peu énigmatique. On peut supposer qu'il
a été emprunté à une broderie orientale exécutée
sur des ceintures de pantalons, importées à Rabat
puis imitées. On sait qu'en Orient, et au Maroc
également, ces ceintures sont des objets de luxe
que les femmes brodent pour leurs bien-aimés(Voir § 101).
Une variante, assez rare d'ailleurs, du point
plume consiste simplement à maintenir le fil soit
perpendiculaire à l'axe général de l'élément brodé,
soit incliné à 45° environ. L'axe est encore dessiné
par la rencontre de deux fils opposés. Cette
disposition, que l'on n'utilise guère que pour les
galons, est dite Y9Tza-f-Y9Tza : point sur point.
LES POINTS 29
On peut d'ailleurs admettre qu'il s'agit véritable
ment de deux galons parallèles et accolés l'un àl'autre, chacun d'eux étant exécuté au passé-plat
droit mS<Jgg<Jd ou oblique m1)arr<J! (Voir Planche 30
et ci-dessous § 59).
§ 40 ~ Point de feston.
Ce point, que les brodeuses appellent i/Q!'za
b-<Jl-1JiJ!'!ia : point à anneau, est connu dans la
technique européenne (Voir DILLMONT, p. (2).
A Rabat, il offre cette originalité d'être exécuté
sur une hauteur d'environ cinq millimètres au
moins (Voir RICARD, Broderies, p. 35 et fig. 50).
Le tracé peut être un double trait au crayon,
limitant les bords du galon ou de la volute, ou,
dans les pièces très anciennes, un simple fil mar
quant l'axe de l'élément à broder (Voir Photo 49 b),
où l'on peut remarquer, à droite, un fil placé
comme guide pour l'exécution d'une partie qui n'a
pas été faite.
Le point s'exécute de gauche à droite en
maintenant le fil au-dessous de la ligne inférieure
avec le pouce gauche. Dans le cas du tracé au
crayon, l'ouvrière pique l'aiguille sur le trait
supérieur et la fait ressortir sur le trait inférieur
au-dedans de la boucle formée par le fil. Elle serre
le point sans froncer le tissu. Les points sont exécu
tés les uns à côté des autres sans aucun vide entre
eux. Dans le cas du tracé au fil, l'ouvrière doit
piquer l'aiguille exactement à la même distance
de part et d'autre du fil, avec une parfaite régula
rité, ce qui exige un coup d'œil exercé. Le point
de feston laisse un envers à la hroderie, ce qui
ne se produit pas avec le point-plume et lepassé-plat.
Le point de feston se trouve dans les pièces
de broderie de la première époque où il est
employé à l'exclusion de tous autres (Voir Photos
17, 18 b, 20 et Planches 52 à 65; voir aussi RICARD,
Broderies, fig. 49). Dans des pièces moins ancien
nes, il est employé pour la bordure principale
tandis que les motifs floraux de remplissage sont
exécutés au point-plume (Voir Photo 31).
§ 41 - Rôle des différents points.
Le~; points : passé-plat, point-plume et IJoint
de feston, que J'on vient d'étudier, donnent une
broderie dense, serrée, on serait tenté de dire
massive. Elle donne, grâce à l'abondance de la soie
employée, une impression de richesse, de somptuo
sité bien caractéristique.
Les autres points, dont il va être question
ci-dessous, ne servent qu'à une ornementation tout
accessoire. On les trouve nombreux ct variés dans
les pièces anciennes, mais ils ont disparu prc~;CJue
entièrement dans la broderie moderne ordinaire.
B) POINTS ACCESSOIRES
§ 42 - Point de piqûre. § 43 - Point de piqûre croisé.
Assez rare, il est celui que décrit DILLMONT,
P. 43, fig. 73. Cependant, il n'apparaît, à Rabat,
qu'en une seule ligne de points. On le remarque
dans le grand motif d'encadrement de la Plan
che 61 ct dans la Photo 31, où il est employé pour
marquer un axe.
Il est appelé s<Jnsla-d-<JHuli ou .~üka-d-;)I-~1l1i,
c'est-à-dire : grande arête de poisson. C'est exacte
ment, dans la vieille broderie de Rabat, l'enyers
dupointde ce nom indiqué par DILLMONT, PP. 43
et 44. L'ouvrière recherche non pas la face dite
endroit par cet auteur, mais la face dI'te elluers
30 LES BRODERIES DE RABAT
(Voir DILLMONT, p. 75, fig. 44) : « On introduit
« l'aiguille comme pour le point piqué ordinaire,
« on la passe sous le tissu, en obliquant un peu
« vers le second contour du dessin, et on la retire
« presque en face du premier point. Après avoir
« fait un point piqué, on fait remonter de nouveau
«l'aiguille sous l'étoffe et on la fait sortir à la« distance voulue pour faire un nouveau point. »
On trouve ce point dans les broderies les plus
anciennes où il est d'un emploi très fréquent.
D'abord utilisé une ligne sur deux dans de vieillesbroderies, peut-être tétouanaises (Voir Photos 47 h,
48 b et 49 b), il ne constitue plus dans le « Rabat
ancien » que l'axe des grands fleurons et de
certaines volutes intérieures (Voir Planche 52)
pour n'apparaftre finalement que dans l'axe de cesgrands motifs à la période où il s'accuse le plus
vigoureusement (Voir Photos 20 a, 22, 24 b, 27 a,etc... et Planches 54, 57, 58, etc...).
§ 44 - Point de trait.
Le point de trait est à double face ; il
constitue la technique de la broderie de Salé. On
l'exécute comme l'indique DILLMONT, P. 93, fig. 179et 180.
Ce point, très accessoire dans la broderie de
Rabat, sert surtout à couronner les galons en dentsde scie ligq.mi qui bordent la partie inférieure ou
latérale de certaines pièces (Voir Planche 72).Dans ce cas, le galon est appelé ligqmi d-al-q(jqa.
On trouve encore le point de trait sertissant depetits motifs carrés tel que celui de la Planche 17,fig. 81.
§ 45 - Point de chaînette.
Ce point est d'une technique connue et fortsimple (Voir DILLMONT, p. 123 et fig. 229). Il
est appelé fJQrza d-ma-qadd-aulçh, parce qu'on le
retrouve exécuté mécaniquement sur une étoffe du
même nom assez recherchée (Voir § 31 f). On
employait ce point dans les anciennes broderies où
il sertissait les têtes des gros fleurons de la bande'd'encadrement (Voir Planche 63). On le remarque
encore dans le napperon reproduit par la Photo 15et la Planche 71, où il constitue les cercles intérieurs exécutés au fil d'or.
§ 46 - Point de bonne vierge.
Ce n'est que le point de chaînette, décritci-dessus, dont chaque boucle est largemeent isolée
des autres. Il est fréquemment employé dans les
broderies anciennes comme élément de sertissageléger des fleurons de la bande d'encadrement.
On appelle une volute ainsi sertie: ka.sba-u-mÙïuna
(Voir Photos 20 a, 21 b, 22, etc... et les Planches 59.60, 64, etc...). Parfois les languettes de ce points'appuient sur une ligne de points de chaînette(Voir Planche 63).
§ 47 - Points divers pour bordurede lisière.
On se sert de ces points pour border l'étoffe
sur la lisière destinée ou non à être cousue à uneautre lisière, par exemple dans les napperons.
Ces points forment trois sortes de bordure
a) jQhra-m9rjiina, bordure au point de festonserré, ou point de boutonnière· (Voir DILLMONT,P. l8, fig. 37).
b) auqçqa-m9riiina, bordure au point de festonlâche, dont on ne trouve pas d'équivalent dans latechnique française.
c) auqi;qa,m9rjiina qdïma, bordure au point delanguette (Voir DILLMONT, p. 99, fig. 199 et Planches 70 et 71).
§ 48 - Point natté.
On l'appelle malwi rbiitc et il est identique aupoint de Salé à fils comptés. Il n'est guère employé,
et à l'exclusion de tout autre, que dans des broderies très particulières en marge de la techniquepurement l'bâtie (Voir Photo 34 b).
CHAPITRE VI
LES ÉLÉMENTS DU DÉCOR
§ 49 - Généralités.
L'analyse des compositions décoratives des
broderies de Rabat donne, lorsqu'elle est poussée
aux dernières limites, cinq éléments essentiels :
le galon, le cercle plus ou moins fermé, la volute,
la crosse et le pétale.
Ces éléments se combinent pour former
des entre-deux dits güza,
des fleurons divers réservés à la bordure,
des motifs floraux ou arborescents, plus
ou moins complexes, destinés à garnir les
vides laissés par la bordure.
§ 50 - Le galon.
On l'appelle q.afra (plur. q.fa~r) ou (Hitra.
C'est une bande qui n'a jamais plus d'un centimè
tre de largeur. II est rectiligne dans la plupart
des cas, mais parfois incurvé (Voir Planche 23).
Rectiligne, on le dispose horizontalement ou verti
calement _ on veut dire par là parallèlement aux
axes perpendiculaires de la pièce brodée, - ou
encore selon un angle de 45° environ avec ces
deux axes.
II entre dans la composition de motifs variés;
0) Dans l'entre-deux dit güza. Il sert alors il
limiter ce motif de part et d'autre comme entre
deux traits parallèles. On le trouve jouant ce rôle
tout au long de l'évolution des broderies de Rabat.
Dans cet emploi, il est exécuté au point de piqüre
croisé à l'époque des plus anciennes pièces (Voir
Photo 17). Plus tard, on ne le trouve qu'au point
de feston (Voir Photo 22 et Planches 34 et 35,
fig. 157 et 158). Ensuite, il est fait au passé-plat
droit msaggJd ou oblique m1)arraf (Voir Photos
32 b et 39 b ct Planche 36). On ne le rencontre
jamais au point-plume dans cet usage de limite de
l'entre-deux.
b) Dans le cloisonnage des entre-deux. Dans ce
cas, il est appelé de préférence (Hitra. On le trouve
dans ce rôle depuis l'époque la plus ancienne,disposé soit en chevrons (Voir Planches 34, 35, 36
et 38), soit en losanges ou en carrés (Voir Plan
ches 36, 37 et 39), soit en lignes brisées à dessins
plus fantaisistes (Voir Planches 45, 461, fig. 209
et 47).
Le galon employé à cet usage décoratif est
exécuté .au point de feston ou au passé-plat.
. c) Dans la composition même de l'entre-deux
par sa multiplication en lignes parallèles ObIiquc~
32 LES BRODERIES DE RABAT
(Voir Planche 34, fig. 152, 153 et Planche 35,
fig. 154) ou horizontales (Voir Planche 35, fig. 156
ct 157). Comme dans le cas précédent, le galon
qui entre comme élément essentiel de l'entre-deux
est exécuté au point de feston dans les anciennesbroderies ou au passé-plat dans les autres. Parfois,
un des côtés du galon est traité en dents de scie :on l'appelle alors ligq.mi (Voir Planche 36, fig. 162).
d) Le galon constitue l'armature et les bras
(qr(jn : cornes, ou iddïn : mains) des fleurons qui.se répètent en bordure des coussins, au-dessus de
l'entre-deux, et qu'on appelle brft)71t)a ou S;Jjra
(Voir Planches de 21 à 30). Il est exécuté, dans
ce cas, au point de feston, au point-plume ou au
passé-plat.
e) Le galon cloisonne ou garnit l'intérieur des
fleurons dont il vient d'être question. Il est alorsexécuté uniquement au point de feston ou au
point-plat. Un des côtés peut. dans ce cas, commelorsqu'il garnit un entre-deux, être traité en dentsde scie. Le galon s'appelle alors ligljmi (Voir
Planche 26).
f) On emploie enfin le galon pour donner de
l'ampleur à un motif. Il devient alors le support
de pétales stylisés qui, par leur foisonnement,
procurent plus de volume à la composition (Voir
Planches 6, Planche 10, fig. 52, 53, Planche 13,fig. 75 et Planche 16).
§ 51 - Le cercle.
Le cercle pur kasba mJ[wïya, véritable galon
circulaire, ou (ifiIra m;J[wïya, ne se trouve guère
que dans les anciennes brodedes en raison sansdoute de sa difficulté d'exécution. Il est toujours
exécuté au point de feston. Il semble bien être le
résultat d'une géométrisation de la volute et c'est
pourquoi il porte le même nom que cet élément.
a) Il constitue la tête rli~ qui surmonte l'axedes fleurons de bordure (Voir Planches 22, 23, 24).
Le cercle sera remplacé peu à peu par une figure
anguleuse (Voir Plauches 24,25, 26).
b) On trouve encore des cercles surmontant
un fleuron dépourvu d'axe nettement marqué (Voir
Planche 5, fig. 125).
,c) Ils garnissent aussi l'intérieur des entre
deux et des fleurons d'une époque relativementancienne (Voir Planche 23, Planche 34, fig. 153
et Planche 35, fig. 154).
d) On trouve le cercle non fermé, réduitparfois à un demi-cercle, selon les exigences de la
composition dans la fig. 99 de la Planche 19 et la
fig. 116 de la Planche 23. Il garde le nom de ki'isba.
e) On a l'impression que cet élément de
décor, d'abord peu important, puis oublié pendantquelque temps, reparaît exceptionnellement dans
des pièces de valeur comme point de départ de
riches compositions (Voir Planche 19). Dans lapièce que représentent la Photo 30 b et la Planche 59, le cercle, peu orné, constitue la partieessentielle d'un motif de remplissage. Dans celleque reproduit la Planche 70, le cercle, motif central
tl'une composition, se complique d'une bordure
de pétales. Dans le napperon que reproduisent la
Photo 15 et la Plànche 71, il est l'armature d'une
riche composition. Il est, dans ces trois cas, exécutéau point-plume. Le cercle de ce genre n'est plus
comparable, à cause de ses dimensions, à celui
des premières broderies. Aussi l'appelle-t-on d'un
nom différent, ~71n71ya : plateau pour servir le thé.
§ 52 - La volute.
C'est aussi une ki'isba (plur. kslib), véritablespirale, élément particulier et caractéristique de
la plus ancienne broderie de Rabat ainsi que de la
très vieille broderie de Tétouan (Voir Photos de
47 b à 50 b, 17, 18 et 30 a). Cependant, comme pout'
ce qui concerne le cercle (Voir ci-dessus § 51 e),
on a l'impression qu'après avoir subi une éclipse
assez longue, elle a connu un renouveau sporadique. Elle se rencontre alors à côté d'éléments
d'une technique et d'un dessin plus modernes
(Voir Photos 31 et 32 b). Dans les pièces anciennes,
LES ÉLÉMENTS DU DÉCOR
elle est exécutée au point de feston, tandis que
dans les broderies plus récentes, elle est traitée au
passé-plat.
La volute, d'une enroulement très souple à
l'origine, se raidit progressivement jusqu'à prendre
des formes anguleuses, rectilignes. Elle ne retrouve,
plus tard, sa souplesse que dans des pièces assez
modernes (Voir Planches 21 et 22).
Cet élément a été employé comme ornement
extérieur des fleurons de bordure depuis l'époque
du vieux Tétouan (Voir Planche 21 et Photo 49 b),
ou au remplissage intérieur des entre-deux et d,~
ces mêmes fleurons (Voir Planches 21, 22 et 34,
fig. 152).
Lorsque l'axe central des fleurons de bordure
se dessine vigoureusement en sortant du mntif,
deux volutes d'ornement sc placent de part et
d'autre, sous la tête de l'axe, et dessinent des
sortes de bras. La hrodeuse d'aujourd'hui les
apPelle des « cornes» qrijn ou des « mains »
iddïn. Par une évolution appauvrissante, ces
volutes, souples d'abord, puis géométrisées, ont
été remplacées par de simples galons rigides, en
même temps que les volutes d'ornement extérieures
au motif k3Cib d-al-ktrjf ont cédé la place d'abord
à des crosses puis à de simples triangles appelés
à disparaître ù leur tour (Voir Planches ()e 21
à 26),
§ 53 - La crosse.
ScIon le rôle qu'elle joue, elle prend le
nom de 3c1rq (plur. 3!'ijq) : racine, de idd : anse,
ou de kaïba : petite volute. RICARD, Broderies, p. 21,
a relevé le nom de j;m1)a : aile (plur. jnl1wiiM,
qui ~~cmhle oublié aujourd'hui, ce qui ne doit
provoquer aucun étonnement, car l'onomastique
de la broderie a un caractère d'imprécision ei
d'instabilité très naturel dans la langue tec:hniqne
des femmes.
Cet élément, dont l'évolution et l'usage sont
très variés, sc rapproche parfois de la volute et
semble en marquer un stade dans ses déformations
successives. Mais ce n'est là qu'une impression
difficile à transformer en certitude (Voir Planches 9 et 10).
Il est rare que la crosse soit sans symétrique.
Il faut remarquer, ceci dit, que la crosse a
une valeur décorative différente selon qu'elle est
employée dans des compositions à caractère
architectural qui dessinent l'essentiel, le principal
de la lJroderie d'une pièce, ou dans des composi
tions à caractère floral qui sc rencontrent dans le
remplissage des champs d'étoffes laissés libres.
a) Dans le premier cas, la crosse n'est sem
ble-t-il qu'un accessoire. On la trouve double et se
développant de part ct d'rmtre d'un tronc commun
(Voir Planche 22, fig. 111). Parfois deux crosses
voisines et opposées se recouvrent partiellement
(\'oir Plamrhe 24, fig. 118). Il arrive encore que
deux crosses, également voisines et opposées,
confondent leurs extrémités et forment comme un
demi-cercle (Voir Planche 25, fig. 121). Dans tous
ces cas, la crosse, appelée kii3ba d-c,i-kUJI : volute
d'épaules, est exécutée au point de feston et
couronnée de languettes au point de bonne vierge.
b) Dans le cas où la crosse entre dans des
compositions à caractère floral, elle prend une
plus g;'ande il1ljJOi'tance. Elle s'exécute alm's soit
au point-plume ~;oit au ])a5:-:é-plat. On ln trolJ\'C
accolée avec sa symétrique COnIme base d'lin
pclit moiii (Voir Planche 9, fig, 30). Elle sert a
l']m,iir des motifs 5i];1\11e5 en faisant saillie ùe pm't
ct d'autre de l'ensemble ; son extrémité est :;]o!'s
dirigée tantôt vers le haut, tantôt vers le bas
suivant les nécessités de la composition (Voir
Planches 9 et 10, fig. 52 et 53). La suite de l'évolu
tion voit l'extrémité de la crosse, jusqu'alors
libre et extérieure au motif, s'appuyer sur un de!>
élémenl~, de celui-eÏ et se souder itlni. Elle de"il'llL
ainsi progressivement un élément interne destiné
à supporter des pétales ou même des compos't'- ,lIOnssecondaires (Voir Planche 9, fig. 4;:i, 46, 47 ct Pbn-
che 10, fig. 48 ft 51). Tout porte ft Cl'Ol" 1le que a
34 LES BRODERIES DE RABAT
crosse interne, en se développant, s'est transformée
en un galon de lignes brisées tendant vers le
demi-cercle ou le fer-à-cheval, le tJi}f : le rond,
comme disent les brodeuses, qui permet d'amplifier
considérablement la composition du motif (Voir
Planche 10, fig. 48, 49, 52, 53, Planche 11, fig. 54
et 55, et les médaillons des planches suivantes).
§ 54 - Le pétale.
On désigne ici de ce nom l'élément le plus
simple de la broderie, composé essentiellement
d'un rectangle terminé à chacune de ses extrémités
par un triangle (Voir Planche 1, fig. 1). Il se
déforme peu ou prou selon les nécessités de la
composition. Il se déforme aussi, ses lignes s'arron
dissant, lorsque l'ouvrière trop pressée tend le fil
avec excès et ne suit pas exactement le dessin ;
il reprend alOl's insensiblement la forme foliacée
qui semble l'avoir inspiré. C'est le cas très fréquent
lorsque le pétale est exécuté au passé-plat. Il n'en
est pas de même, loin de là, lorsqu'il est exécuté
au point-plume. On ne le trouve jamais au point
de feston.
Chez l'ouvrière de Rabat, le pétale est consi
déré non pour sa forme, mais pour le rôle qu'il
joue. A la base d'un motif, sorte de pédoncule,
il est dit {ara (plur. (fQ3U). Surmontant des crosses.
des cercles, des galons, il devient 1)i'im/ia (collect.
~lamfi), c'est-à-dire « pois chiche» ; il peut aussi
sous cette appellation se trouver sous un élément
d'amplification qu'il garnit. Si ce sont des vides
qu'il garnit, on l'appelle balli}(a (collect. ballQ(,
plur.bliilaO, c'est-à-dire « gland ». Mais ces appel
lations n'ont rien de rigoureux. Il arrive assez
souvent qu'on les emploie les unes pour les autres.
On ne connaît pas de terme général comparable
à notre mot « pétale» et aussi commode. D'ailleurs,
la brodeuse ne considère presque jamais le pétde
isolé, mais plutôt le motif composé de pétales
dans son ensemble. Dans un trèfle (Voir § 56 a)
par exemple, les trois pétales n'ont pas de nom
parce qu'ils sont inséparables. De même, leI!
« glands » et les « pois chiches » vont le plus
souvent par séries; si on les distingue par ces deux
noms c'est parce que leur nombre et leur position
ne sont pas identiques.
Le pétale, élément si simple mais qui n'est
presque jamais employé isolément, est à la base
d'une multitude de combinaisons décoratives de
style floral, dont il est impossible de donner
une description plus démonstrative que l'examen
des Planches du Tome II. Grosso modo, on voit
les pétales se grouper selon un axe de symétrie
que nous dirons vertical, ou bien selon deux axes
de symétrie perpendiculaires l'un à l'autre. A ces
deux modes de développement s'ajoute celui des
motifs obliques très souvent inclinés à 45°.
1° Disposition des pétales sur un axe vertical
a) Le motif est plus ou moins étiré avec des
développements latérau.x très faibles (Voir Plan·
che 1, fig. 1 à 12 et Planche 49, fig. 215 et 218) ;
b) Un bourgeonnement latéral s'amorce plu3
touffu vers la base laissant fréquemment un
pédoncule isolé (Voir Planches 1 et 2, fig. 12 à 16).
On arrive ainsi à une composition de motifs
arborescents de plus en plus amples mais de même
caractère (Voir Planches 3 à 8). L'utilisation de
la crosse aide fortement au développement latéral
surtout quand elle est un élément de support (Voir
Planches 8 et 9) ;
c) Le développement de la base des groupes
de pétales à un seul axe, vertical, s'accentue et
donne aux motifs une assise qui devient horizon
tale (Voir Planches 10 et 11, fig. 54 et 55) ;
d) Le développement en hauteur en même
temps qu'en largeur s'obtient par des demi-cercles
QQf, qu'on peut supposer être des crosses soudées
par leurs extrémités, et qui supportent un foison
nement de pétales.
2° Disposition des pétales sur deux axes perpendiculaires :
LES ÉLÉMENTS DU DÉCOR 35
Le développement se poursuit par adhérence
des pétales les uns aux autres, dans les mêmes
conditions que ci-dessus mais dans quatre direc
tions. La symétrie aidant, on arrive rapidement
aux croix et aux médaillons (Voir Planches 11
à 16),
3 0 Disposition des pétales sur un axe incliné :
a) Les motifs inclinés midkki sont nombreux.
On remarquera notamment celui de la Planche 17.
fig. 84, très massif, qui sert à la composition d'une
bande horizontale de rideau-portière (Voir Plan
che 72) ;
b) On se sert encore de cette disposition dans
les motifs plus ou moins légers qui surmontent
parfois en ligne, espacés les uns des autres, des
entre-deux (Voir Planches 17 et 18, fig. 86, 87
et 88) ;
c) Les pétales groupés sur un axe isolé se
retrouvent enfin dans les semis de remplissage
(Voir Planches 64 et (iS).
..
CHAPITRE VII
LES MOTIFS DÉCORATIFS
La brodeuse de Rabat bâtit ses motifs décora_
tifs en partant d'un élément très simple t 'fl, • ,un re e,
une qU111Luple, une croix peu cOmpll'qu' ,ee, PU1~
elle ajoute un galon ou un demi-cercle , ou une
crosse, fait ,foisonner des pétales tout autour,
rabat le motIf sur sa base horizontal 1 "e, e repete
sur les côtés et, ne tenant compte dque e la
surface à garnir, compose des ensel bl 'fi'Il es 111 nl-
ment variés mais toujours dans le A
meme style.
Chaque nouvelle pièce de broderie peut ainsi
fournir des compositions de motifs 'n' d 't DI e I s. ans
l'impossibilité d'en établir un invent 'aIre complet
on a dû se borner, dans le Tome II' l ', a re ever
les plus belles ou les plus représent t'a Ives, et
dans les pages qui suivent, à mentionner les Plu~
connues en montrant surtout le J'ell des compo_
sîtions.
§ 56 - Les petits motifs.
Avant d'aborder l'étude des motif ., s presentant
une certa111e complexité et un volu '.
me Important
Il convient de signaler quelques t't ' '
, .,. . pe I s motIfs
qUI servent d elements de corn 't'POSI IOn ou d
remplissage.e
Il a été parlé plus haut des él' .ements SImples
tels que le galon, le pétale la volut 1' e, e cercle, la
§ 55 - Caractères généraux.
<'51) Voir à ce sujet ce que dit JOUIN, p, 10,
Avec les éléments qui ont été décrits dans le
chapitre précédent, la brodeuse forme des motifs
décoratifs, simples ou complexes, qui se combi
nent dans les grandes compositions.
Les éléments sont, comme on l'a vu, peu
nombreux. Les compositions décoratives, on le
verra dans le chapitre suivant, sont bâties selon
quelques types bien définis qui ne laissent guère
de place il la fantaisie. En revanche, les motifs
décoratifs sont d'une variété riche et abondante.
C'est à leur propos qu'on voit, au travail, l'imagi·
nation de la brodeuse.
La caractéristique des motifs de décor est très
apparemment une stylisation d'éléments floraux,
végétaux : quelques mots du vocabulaire technique,
rares, il faut l'ajouter, révèlent cette inspiration.
Mais l'emploi d'éléments purement géométriques
à côté des autres et la « géométrisation » des
éléments floraux ont fourni à l'ouvrière des thèmes
simples et abstraits qu'elle a combinés avec le seul
souci du décor et de la symétrie sans aucune
préoccupation de ressemblance quelconque avec
les végétaux naturels <51).
38 LES BRODERIES DE RABAT
:Crosse (Voir §§ 50 à 54). A cette série, il faut
joindre:
a) Le trèfle, bnïta ou bant (plur. bnat) ce
qui signifie « fillette » ; il est parfois pédonculé
(Voir Planche 1, fig. 2, 3 et 4). On le trouve très
fréquent et multiple dans toute la broderie au
point-plume et au passé-plat. Deux trèfles accolés
par la base et disposés en sens inverse donnent ce
qu'on appelle bant-f(jq·bant : trèfle sur trèfle,
ce qui n'est pas un hexagone régulier. La même
expression désigne des trèfles se surmontant les
uns les autres, eIl! ligne (Voir Planche <19, fig. 215).
Il en sera question de nouveau au sujet des
entre-deux.
b) La mouche, d<Jbblina ou dbïbna, formée
de quatre pétales en croix, apparaît surtout en
semis. On appelle encore de ce nom des fleurettes
à peine stylisées employées en semis. Si le motif
de semis est plus gros, il est appelé sabba :demoiselle, mais il porte aussi un autre nom
particulier que lui vaut non son rôle mais sa
forme.
e) La vasque, IIiililia (plur. Lz.F}Ii), motif en croix
ou à six et huit branches, se trouve toujours au
centre d'un motif, comme une vasque au milieu
d'un jardin (Voir Planche 11, fig. 59, 60, 61 et
Planche 13).
d) La quintuple, 1)miisïya, est formé de cinq
pétales disposés le long d'un seul axe (Voir Plan
che 1, fig. 5, 6 et 7). Elle est souvent munie d'un
pédoncule rars simple ou double. C'est un élément
extrêmement répandu dans la broderie au' passé
plat et au point-plume, soit pour remplir des vides,
soit pour servir à la composition de grands motifs.
Deux quintuples peuvent être accolées par leur
base commune et orientées en sens inverse ; on a
ainsi la « quintuple double» Lzmasïya, mziiuja
(Voir Planche 9, fig. 43).
e) Le couvercle, mk<Jbb, est composé d'un
trèfle garni de deux anses idd symétriques qui
partent du milieu du pétale central pour rejoindre
la base du trèfle sous-jacent. Le couvercle ne se
trouve qu'en série linéaire dans les broderies
modernes.
§ 57 - L'entre-deux.
On aborde ici, maintenant, l'étude des grands
motifs dééoratifs qui entrent dans la composition
des pièces de broderie.
L'entre-deux, appelé güza, se compose essen
tiellement de deux galons lj<Jfra parallèles limitant
un champ rectangulaire que l'on garnit de motifs
plus ou moins compliqués. Selon l'ampleur de
la pièce brodée, la largeur de l'entre-deux varie
depuis l'épaisseur des deux galons se touchant,
c'est-à-dire deux centimètres environ, jusqu'ù
dix-huit centimètres (Voir Planche 43, fig. 214).
La güza constitue toujours l'élément de support
d'une composition. C'est au-dessus d'elle, quel
quefois aussi au-dessous, que sont disposés les
motifs décoratifs de la pièce. Rien d'étonnant
alors à ce qu'on la rencontre à toutes les époques,
dans toutes les pièces brodées, sauf de rares
exceptions quand il s'agit de pièces carrées (Voir
Planches 70 et 71). Il est même possible de suivre
l'évolution de la broderie de Rabat par le seul
examen de l'entre-deux.
a) Au début de l'histoire de l'entre-deux, le
champ entre les deux galons est partagé en
triangles par un ou plusieurs galons plus petits
généralement, ljf~ra, disposés en ligne brisée régu
lière. Ce sont des chevrons, dans lesquels l'ouvrière
voit des arcs qwas, et dont les vides gal' (plur.
!iitran) sont remplis à l'aide d'éléments très géomé
triques, volutes, cercles, galons superposés simples
ou en dents de scie (Voir Planches 34, 35, 36,
fig. 152 à 163). Une mention spéciale se doit pour
l'entre-deux de la figure 155 dans lequel on voit
apparaître des motifs inclinés composés de crosses
d'un aspect original.
Les entre-deux de cette période sont exécutés
au point de feston. Dans les imitations plus
LES MOTIFS DÉCORATIFS 39
récentes, on utilise le passé-plat (Voir Planche 36,
fig. 163),
b) Par la suite, le cloisonnement subsiste
mais plus varié, en chevrons, en croix, en losanges,
etc ..., à l'aide de galons, et les vides se remplissent
de motifs d'inspiration fJorale, quintuples, trèfles,
vasques... (Voir Planches 36 et 37, fig. 164 à 167,
et Planches 38, 39 et 40, fig. 173 à 182). En consul
tant les dessins du Tome II et la légende qui les
accompagne, on se rendra compte de la grande
diversité des compositions d'entre-deux.
Les broderies dont il est question dans ce § b)
sont exécutées au point-plume ou au passé-plat.
e) Plus tard, le cloisonnement du champ à
l'aide de galons s'efface (52) en même temps
qu'une polychromie plus libre et plus variée
permet de distinguer les motifs du décor les uns
des autres. Le fond est constitué entièrement de
motifs semblables qui se répètent (Voir Planches
37 et 38, fig. 168 à 172). La figUl'e 169 représente
des « trèfle-sur-trUIe» bnïta-fi}q-bnïta, c'est-à-dire
des trèfles imbriqués. Dans la figure 168, on trouve
une composition analogue, mais on a ajouté deux
pétales sur le côté Ij,llilJ(-sèila-ktlj{-;;l-b;;nt ; des
glands sur les épaules du trèfle. La figure 170 est
constituée par des crosses penchées kslib mtJkkyin
;;vec des pétales ~l(lm.5 supplémentaires, qui vont
toucher le galon en haut, et des pétales frQsa
formant la base de chaque crosse. Ces trois gilza
et celle de la figure 171 sont les premières que
confectionnent les apprenties.
d) Cependant le souci d'ordonner le rem
plis;;age de l'entre-deux par un cloisonnement
réapparaît avec la substitution, aux anciens galons,
de branches feuillue:; parallèles ou en ligne brisée.
Dans ce cas, il s'agit d'entre-deux d'une largeur de
huit ù dix centimètres au moins. Parfois un galon
sunient, comme dans la Planche 43, fig. 196 et 197,
(52) On ne peut manquer de signaler une évolution du
même genre dans les zellijs. Dans les plus anciens, les
motifs colorés sont séparés les uns des autres par des
hagucttes hl anches qui constituent l'armature interne de la
mais c'est une exception. La branche feuillue
s'appelle sbüla : épi; elle est toujours inclinée dans
l'entre-deux. On renvoie ici à la Planche 42, fig. 192
et 193, et aux légendes qui les accompagnent.
Le cloisonnement, en fin d'évolution, se marque
simplement par des motifs inclinés complexes
q(~b (Voir Planche 43, fig. 198) quî remplacent les
rameaux feuillus. Les vides laissés par les motifs
inclinés sont remplis par une composition forméE'
de trèfles et d'une quintuple réunies par de"
éléments courbes.
Les branches feuillues disposées parallèlement
peuvent suffire à remplir tout l'entre-deux si,
partant de leur milieu, des motifs adventifs leur
donnent de l'ampleur. C'est le cas pour la fig. 191
de la Planche 41 où chaque rameau s'élargit à
l'aide de deux quintuples. Icî, on renvoie encore
à l'examen des Planches du Tome II et à la lecture
des légendes qui les accompagnent..
Les figures de la Planche 44 présentent des
compositions du même genre, plus riches encore.
Les motifs secondaires qui flanquent le motif
principal sont appelés iddin : anses.
f) Une forme d'entre-deux particulièrement
somptueuse est donnée par la fig. 214 de la Plan
che 48. Les galons sont soulignés d'une bordure à
crosses et l'entre-deux est garni de médaillons
nettement séparés les uns dcs anti'es.
§ 58 - Les montants.
On les nppcl!e (iïlas (plUl'. (wil/as) . il" "PD"", ,~<::. i 0.1-
tiennent à deux genres selon qu'il:; sont des
ornements de pièces à plat, coussins et napperons,
ou de pièces verticales comme les portières.
a) Dans les coussins et napperons, on voit
fréquemment l'entre-deux se retourner aux extré
mités de la pièce et remonter en SUI'''ant la l' ."•
• y l~lcre
composition. Ces baguettes disparaissent plus tard et 1 .
férents motifs du décor se touchent ne s d' t. es d1f
que par le contraste de leurs couleu~s. e 1S mguant plus
40 LES BRODERmS DE RABAT
du tissu sur une certaine longueur. Il forme ainsides montants au nombre de quatre (Voir Photos 8,
9, 13 a, 23 et 33). En général, ces montants, appelé"
encore dans ces pièces IlQmga : minaret, sontexactement du même dessin que l'entre-deux (Voir
Planches 61 à 67). Leurs extrémités sont ornéesd'un motif floral flill-at-tâlag plus ou moins important, et les côtés jnij.b sont ornés d'une légère
bande décorative (Voir Planches 51 et 65 à 67).JI arrive aussi que le dessin du. montant soitdifférent de celui de l'entre-deux (Voir Plan
che 62).
Les montants des pIeces à plat n'ont pris
d'importance réelle qu'à partir de l'apparition du
décor floral. On en trouve l'ébauche dans une pièce
très ancienne reproduite par la Photo 49 b ; elle
est alors réduite à un double galon effilé à son
extrémité. Les montants que l'on remarque dansles Photos 9, 13 a, et 23 sont plus développés maisencore modestes. En revanche, celui de la Planche 62, par exemple, a pris une place significative.
b) Dans les grandes portières, les montants,
quand il y en a et c'est un cas fréquent, constituent
un élément important de la composition d'ensem
ble (Voir Photo 3). Le montant comprend deux
parties symétriques verticales réunies et dominées
au sommet par une pyramide de style floral. Dans
les pièces plus modernes, le montant de portièrese termine par un motif très volumineux, qQbba :
coupole, qu'il semble supporter (Voir Photo 5 a et
Planche 30). La coupole est du même type queles motifs de la bande décorative qui surmonte
l'entre-deux.
§ 59 - La bande décorative.
Tout entre-deux, sauf très rares exceptions,est surmonté d'une bande décorative constituée
par des motifs semblables accolés ou rangés les
uns à côté des autres parallèlement et à intervalles
réguliers. Cette bande n'a pas de nom génériquedans le langage technique des ouvrières. Celles-ci
se contentent, pour la désigner, de donner le nomdu motif essentiel qui la constitue. Le dessin des
bandes décoratives se prête à la fantaisie, aussitrouve-t-on dans ce genre des compositions nom
breuses et variées qui caractérisent même lesétapes de l'évolution de la broderie.
a) Dans les pièces anciennes, qui sont descoussins ou des napperons, la bande décorative est
faite de gros motifs, des fleurons, pour employer
le terme dont Mademoiselle JOUIN Se sert dans son
étude. Les brodeuses les appellent !;;)jra d-b:lfeJarja
et quelquefois brçeJçeJa, c'est-à-dire, littéralement:arbre en broderie ancienne. Le diminutif fait
supposer qu'il a existé un terme b:lfeJat}a pourdésigner le motif dont il est question ici.
Quoiqu'il en soit, les motifs de ce nom donnentà la composition une allure massive, on diraitvolontiers architecturale. C'est l'époque de labareJat}a, de la vieille broderie (Voir Photos 8à 14 a, 47 b et Planches 52 à 67).
Le fleuron a d'abord une forme ovoïde, la
partie supérieure, légèrement effilée, étant cou
ronnée de volutes (Voir Photo 47 a). Il est limité
par deux galons séparés le plus souvent par une
ligne de points d~ piqûre croisés. L'intérieur,
surtout au début, n'est constitué que par desvolutes fortement spiralées, ou, au contraire, pardes galons mollement sinueux.
Un peu plus tard, on voit se dessiner un axe,
tantôt vertical si le motif est droit msaggad, tantôtoblique si le motif est penché mtakki. Cet axe, de
plus en plus net et vigoureux, coupe en deux le
motif et se termine par une tête rli.5. Sous la tête,deux volutes se développent en bras (Voir Planches 20 et 22). Le fleuron prend ainsi une allure
anthropomorphe beaucoup plus que florale. Il faitpenser à une poupée.
Ensuite, on entre dans une période de géométrisation qui voit les volutes se raidir et laisser
finalement la place à des cercles ou à des galonsrectilignes (Voir Planches 22 à 26). Il est à noter
que l'axe central, de plus en plus accusé, rest~
I~ESMOTIFS DÉCORATIFS
le seul élément dans lequel on trouve encore le
point de piqûre croisé si abondant à la première
époque. Il porte le nom caractéristique de SJll-sïfu :
il a dégainé.
L'influence du décor floral a modifié le fleuron
en ne lui laissant que l'allure générale de son
contour, son armature extérieure de galons (Voir
Planches 27 et 28). Les pétales stylisés, qui d'abord
sont un léger ornement externe des galons d'enca
drement, foisonnent par la suite dans les grands
motifs, réduisant de plus en plus l'armature recti
ligne (Voir Planche 29). Ils finissent par la faire
disparaître complètement (Voir Planche 31).
Le développement en surface des fleurons ~l
une limite imposée par les dimensions de la pièce
à broder et le nombre des fleurons qui doivent
y figurer. Il en résulte que ces motifs restent de
grandeur moyenne. Ils ne prennent un volume
considérable que lorsqu'ils sont isolés au sommet
des montants des grandes rideaux. Ce sont les
« coupoles» dont il a été question dans le para
graphe précédent.
Les fleurons sont exécutés au point de feston
dans les anciennes broderies, au point-plume ou
au passé-plat dans les autres. Les doubles galons
rectilignes du cadre, quand ils ne sont pas faits
au point de feston, ne le sont qu'au passé-plat.
Si alors, comme il arrive souvent, les deux galons
ne sont pas séparés par un point de piqûre, leur
séparation est marquée, comme dans le point
plume, par 1a rencontre des points sur le bord
commun des galons. On dit alors que la broderie
est exécutée point sur point: tJ9Tza-f-tJ9Tza (Voir
Planche 30).
b) Des bandes décoratives plus légères, com
posées de motifs floraux stylisés se répétant les
uns à côté des autres, remplacent, dans certaines
pièces, les fleurons dont il vient d'être question.
Elles ne se distinguent de l'entre-deux que par
l'absence des deux galons qui limitent celui-ci.
On les emploie soit immédiatement au-dessus de
l'entre-deux, comme les bandes de fleurons du
paragraphe précédent, soit au-dessous, commê
dans les rideaux, soit encore pour border des
montants ou les coupoles de ceux-ci (Voir Plan
ches 32, 33, Planche 34, fig. 150 et 151, Planches46
et 47). On appelle 3askJr celles, très nombreuses,
qui sont composées d'une série de motifs inclinés
(Voir Planches 32 et 33).
Toutes les bandes décoratives dont il vient
d'être parlé sont exécutées au point-plume ou au
passé-plat, jamais au point de feston. On les trouve
principalement dans le décor des portières et des
napperons.
§ 60 - Les motifs arborescents.
Ce sont des compositions de pétales autour
d'un seul axe vertical. Ils sont toujours exécutés
au point-plume ou au passé-plat. Leur hauteur
varie de deux à trente centimètres ; leur largeur
s'établit en proportion de leur hauteur et de la
surface d'étoffe à couvrir (Voir Planches de 1 à 11).L'ouvrière les appelle sJjra comme les fleurons
de la bande décorative dont il a été question au
paragraphe précédent. S'ils sont de petites dimen
sions, elle les appelle arbustes, sjfra.
Les motifs arborescents sont employés de
diverses façons :
a) On les voit apparaître entre les têtes des
fleurons composant une bande décorative au-dessus
de l'entre-deux, et entre les montants des rideaux
(Voir Photos 24 a et 27 a). On remarquera qu'ils
sont alors assez étirés dans le sens de la longueur;
b) On les place encore sur un rang !iJ{f, et
assez espacés les uns des autres immédiatement
au-dessus de la bande décorative qui surmonte
l'entre-deux. Dans ce cas, ils sont tantôt d'une
faible hauteur avec des développements latéraux
tantôtd\mvolume important constituant d~véritables arborescences (Voir Photo 7 a et b, et
Planche 74). Il s'agit, dans ce dernier cas d', unecomposition de grande portière ;
42 LES BRODERIES DE RABAT
c) On trouve aussi des lignes de motifs arborescents espacés sous le bord inférieur de l'entre-deux
des rideaux, 'lj-jlqil : les pans. Ils sont alors de
petites dimensions (Voir Photo 5 a et Planche 72d'une part, et Photo 7 a et Planche 74 d'autre
part) ;
d) Ces motifs de petites dimensions alternentparfois avec les gros, dont il a été parlé au § b
ci-dessus, sur la même ligne de base. Cette disposition laisse présager l'époque où un semis demotifs parsèmera toute la surface laissé libre par
les bandes décoratives (Voir Photo 16) ;
e) Le souci de remplir aussi richement qu~
possible le champ de tissu encadré par les bandes
massives a conduit l'ouvrière à multiplier ces
lignes de motifs décoratifs plus ou moins volumi
neux en les disposant en quinconce. Ce sont les
s'ljra d-ar-r~sslj.n : arbres du semis.
Parfois, la brodeuse utilise des motifs toussemblables entre eux, de faible importance : ilssont toujours disposés normalement à partir de labande d'encadrement, dans les coussins, ce quifait qu'ils se rencontrent tête à tête au milieu du
champ (Voir Photos 11 et 12 a, Planche 67, Photo
14 b, Planche 6i3, Photo 31 et Planche 61). Excep
tion : Photo 13 b, où il faut remarquer cependant
que la médiane de la pièce est marquée par deux
motifs floraux faisant saillie sur chaque lisière.
D'autre fois, les motifs de semis, dans les
grandes portières, restent tous dans la même direction. Mais, lourds et massifs à la base de la pièce,
ils vont s'amincissant au fur et à mesure qu'ils
s'étagent (Voir Photos 5 a et 6 b et Planches 72,
fig. 243, bis et ter).
§ 61 - Les médaillons.
On appelle ainsi, pour la commodité de la
classification, des compositions de pétales établiessnr deux axes perpendiculaires entre eux. Ils ont,
dans la langue technique des ouvrières, des nom~
particuliers, mais pas de nom générique.
Les plus simples sont des croix ou des motifs.
à rayons de six ou huit branches, les « vasques ;)dont il a été question au§ 56 (Voir Planche 11,
fig. 56 à 64).
Elles sont développées par un bourgeonnementde pétales, ou entourées d'éléments circulaires
permettant un nouveau foisonnement de motifs àpétales. Dans ce cas (voir Planches 12 à 16), on
a des rl)lima : carreaux de marbre.
Dans les compositions plus chargées imitées
des brocarts européens, on a des tli~a : tasses, noIliqu'on donne habituellement aux récipients de
métal hémisphériques. La tasse se compose d'un
motif floral flajra d-'lt-tiï~a encadré par des bandesde motifs en hexagone, en carré ou en cercle.
Elle n'est jamais isolée; elle est contiguë à d'autres« tasses » identiques (Voir Photo 32). Dans le casde l'hexagone de la Planche 49, les deux bandes
verticales, communes à deux motifs contigus sont
des Niska : chandeliers. On a alors une tli~a-3èila
~1I'iska. Dans le cas d'un encadrement circulaire,
on a une tli~a nuNura.
La hauteur des médaillons varie de deux à
trente-cinq centimètres (Voir Planches 11 et 15).
Ils sont exécutés au point-plume ou au passé-plat.
§ 62 - Les bandes obliques.
On les appelle l)unjiîr : poignard. Elles n'appa
raissent que dans des compositions assez récentes
de coussins. Elles coupent le champ du tissu enlignes obliques et parallèles, laissant entre elles
des espaces que l'on remplit avec des motifs
floraux. Ces bandes sont composées de mk'lbb :
couvercles, superposés les uns aux autres selon
l'axe de la bande.
Les bandes obliques ont été imitées d'une
étoffe d'importation très luxueuse, brochée d'or.Il faut noter que le mot l)unjiîr représente la
prononciation tangéroise de l)anj'lr : poignard,qu'on entend dans tout le reste du Maroc.
CHAPITRE VIII
LA COMPOSITION DÉCORATIVE
§ 63 - Aspect général.
La composition décorative des piècell brodées
est d'une très grande simplicité et d'une non moins
frappante uniformité, du moins dans l'ensemble.
Le caractère le plus apparent des broderies
est qu'elles ne constituent que le décor d'objets
à usages déterminés. Comme le fait remarquer
très judicieusement Mademoiselle JOUIN (p. 4)
« le décor est un serviteur non un maître >?
La tobaza des Juifs (Voir § 13 e) mise à part, avec
le rideau de ciel (Voir § 13 d) et peut-être aussi
la bordure du faux-lit (Voir § 15), les pièces
brodées n'ont pas pour fin l'ornementation des
chambres où on les aperçoit, comme nos tapisse
ries ou nos tableaux. Ces pièces sen'ent à des
fins pratiques et, même dépourvues de broderies,
elles existeraient pour des usages courants. C'est là
un facteur essentiel de la composition décorative.
Par ailleurs, on remarque une règle constante
qui semble présider à la disposition de la broderie
dans la plupart des objets. Elle impose une bordure
faite essentiellement d'un entre-deux (Voir § 57)
surmontée d'une bande décorative (Voir § 59) et,
souvent, un remplissage plus ou moins riche du
champ laissé libre par la bordure.
La composition décorative de l'ensemble d'une
pièce varie, dans ces limites, suivant l'objet brodé
et aussi suivant l'époque à laquelle il appartient.
L'usage auquel il est destiné, la position qu'on lui
donne sont encore des facteurs déterminants du
dessin dont on l'orne.
Pour la commodité de l'exposé, on étudiera
successivement la composition décorative des
pièces suspendues, des pièces à plat et des pièces
de vêtements.
A) PIÈCES
§ 64 - Leur composition.
Les pleces destinées à être suspendues, les
portières par exemple, sont presque toujours faites
de tissus légers. On trouve même des portières en
SUSPENDUES
tulle. Ces tissus ne possèdent pas par eux-mêmes
le «tornbant» suffisant ; il est nécessaire par
conséquent de les alourdir à la partie l'nf' .eneure
par des compositions de broderie massive.
44 LES BRODERIES DE RABAT
§ 65 - Composition des portières.
La composition décorative d'un rideau est àpeu près invariable quant à ce qui est des éléments
essentiels.
On trouve toujours à la partie inférieure,
à vingt centimètres environ de l'extrémité, unentre-deux güza assez massif, d'une dizaine de
centimètres de hauteur.
L'entre-deux est surmonté d'une bande demotifs non encadrés, 3iiskiJr ou sjiJr, qui prennent
leur assise sur le galon supérieur de l'entre-deux.
Au-dessous de l'entre-deux, une autre bande
décorative j/qil, plus large que celle du dessus et
moins chargée de broderie, se termine par de la
dentelle à l'aiguille siJbka et une frange de glands
de soie, l'ensemble portant le nom de 3Qqda (Voir
Photo 4 et Planche 74).
Ces trois éléments constituent l'essentiel du
décor. On y ajoute à peu près régulièrement une
ligne de gros motifs arborescents siJjra alternantavec d'autres motifs du même genre mais plus
petits sjïra d-binljthQm : arbustes d'entre eux.
Lorsqu'un rideau n'a pas d'autre ornement,
on le dit mtdZZJr, c'est-à-dire : vêtu d'un simple
pagne comme un baigneur au hammam. Malgré letriplement de l'entre-deux et la ligne de grosmotifs espacés, une grande partie du tissu reste
nue.
Fréquemment, l'entre-deux et la bande décoratie qui le surmonte se retournent verticalement
en suivant l'une des lisières du tissu. L'épanouis
sement de ce montant (alli3, à son extrémité, donne
naissance à un motif important, la coupole qQbba
(Voir Photo 5 a et Planches 29, 30 et 72, fig: 243 ter).
Certains rideaux très larges - par rapport
tout au moins à la largeur du tissu - exigent pourleur confection la réunion de plusieurs lés de
tissu. Les bandes verticales de lisières brodées
de chaque lé, rapprochées l'une de l'autre, sem-
blent être à l'origine de ces sortes de minaretsqui s'élèvent au-dessus de l'entre-deux jusqu'à une
certaine hauteur du rideau (Voir Photo 3).
Les portières qui ont ainsi des montants enplus des bandes décoratives horizontales sont
appelées izar b-Jt-twlilli3 : rideau à montants. Cenom est plus particulièrement réservé à ceux quin'ont pas de semis.
Enfin, les rideaux les plus ornés ont toute la
surface du tissu garnie d'un semis de motifs florauxqui s'ajoutent aux éléments déjà décrits. Ces
motifs, qui procèdent d'une même inspiration,
diminuent de volume au fur et à mesure qu'ils
s'élèvent vers le haut du rideau (Voir Photos 5 a,6 a et b, et Planche 72). Les portières de ce genre
sont appelées izar mJrSüs : rideau parsemé.
§ 66 - Composition des borduresde lit.
On a dit plus haut, § 15, la nature et la destination de ces pièces appelées tJlmna. La partie
tombante, qui cache le bord du matelas, est entière
ment recouverte de broderie compacte laissant
rarement apparaître le tissu de support, rq?m
miJglijq : broderie bouchée.
La composition moderne de la bordure de lit
comporte de bas en haut: un entre-deux, une large
bande de gros médaillons ta~lit et un rang demotifs en crosses inclinées k3ab. Les pièces quereprésentent les Photos 35 et 36 a et b, laissent
voir une richesse de composition encore plusgrande.
Lorsque la pièce constitue à la fois un dessusde lit horizontal et une bordure qui se rabatverticalement pour cacher le matelas, on a deux
compositions décoratives, une pour chaque partie
de la pièce (Voir Photo 37). Celle qui est horizon.tale ne reçoit qu'un semis de motifs assez gros,
celle qui tombe verticalement est lourdementchargée de soie.
LA COMPOSITION DÉCORATIVE 45
Lefaux~lit, comme il a été dit au § 15, est un
prétexte pour suspendre un nombre de bordures
de matelas aussi grand que possible. Chacune
d'elles est traitée exactement comme une bordure
utile. Le fond de la chambre est ainsi caché par
une cascade de bandes brodées, étroites dans le
sens de la hauteur mais qui se déploient d'un mur
à l'autre.
§ 67 - Composition de la tobaza.
Il s'agit d'une pièce d'étoffe rectangulaire de
1 m 80 sur 80 centimètres au plus, garnie de motifs
polychromes disposés en semis. Chaque motif
mesure de huit à douze centimètres de hauteur.
La tobaza, brodée par des Musulmanes mais à
l'usage exclusif des Juifs, est tendue contre ur;
mur les jours de noces de mariage au Mellah. Elle
ne sert qu'au décor de la chambre (53). On n'aper
çoit aucun style de composition, ni d'ailleurs
beaucoup de variété, dans ces pièces. On dirait
que la brodeuse musulmane manque d'inspiration
pour confectionner un ouvrage purement ornemen
tal, sans portée pratique et, par surcroît, destin{>
à des gens qui ne sont pas de sa religion.
B) PIÈCES A PLAT
§ 68 - Leur composition.
La composition des pleces à plat, exception
faite des napperons carrés, ne diffère de celle des
pièces suspendues que par le fait que le tissu
est brodé à ses deux extrémités, symétriquement
par rapport ù l'axe de la largeur.
§ 69 - Napperons rectangulaires.
Le napperon destiné à recouvrir un dessus de
coffre comporte essentiellement, à chacune de ses
extrémités, un entre-deux (Voir § 57) gaza. Cet
entre-deux est surmonté d'une bande décorative
de fleurons s<Jjra ou brçcjçcJa (Voir § 59), identiques
les uns aux autres et accolés par le côté (Voir ces
motifs dans les Planches 20 à 26 et les Photos 8, 9
et 10). A la place des fleurons, on peut trouver un
rang de motifs floraux identiques, et séparés les
uns des autres, ce qu'on appelle al-3i1sk<Jr : la trou
pe (militaire). La bande ainsi constituée forme une
masse assez lourde qui, éventuellement, fait tomber
(53) On trouve encore à Tétouan, dans les milieux
musulmans, des pièces brodées qui ne servent qu'à l'orne
ment de la chambre nuptiale. Voir JOUIN, p. 3.
verticalement les extrémités de la pièce de chaque
côté du meuble qu'elle recouvre. Dans les inter
valles ménagés entre les têtes des fleurons, des
motifs arborescents plus ou moins légers s'emboî
tent quelquefois, constituant une seconde ligne de
motifs plus clairsemés. C'est lù une composition
assez sobre par comparaison aux autres, comme
on va le voir. On a alors ce qu'on appelle un
m<Jndfl 3i11-aj-jnijb : un napperon (brodé) sur les
côtés (exclusivement).
L'entre-deux, disposé selon la largeur du tissu
rectangulaire, se retourne souvent le long de:;
lisières pour former quatre minarets .5()lJ13fl comp;;
rables aux montants (lila3 des rideaux (Voir Photo,,;
8, 11, 12 b, 13 a, 14 a et Planches 62 à 67).
Si les sommets des montants se rejoignent le
long de la lisière, on obtient un encadrement
parfait de la pièce.
Le champ laissé entre les bandes décoratiyes
peut être garni d'un semis !'J.~.~(in de motifs
d'importance variable disposés en quinconce (Voir
Photos 11, 12 a, 13 b et Planches 57 et 'jQ\
Le napperon est dit alors.m;)rsü.~ b-<Jr-!';)s's~~
si les motifs sont gros ou m<JrSlÏs b-<J(j (jb~b '.. - a un ~l
les motifs sont très petits.
46 LES BRODERIES DE RABAT
Le semis est, dans certains cas, composé de
petits motifs reliés entre eux par un simple point
de trait constituant ainsi une sorte de carrelage
(Voir Planche 49). Dans d'autres cas, on se trouve
en présence d'un quadrillage obtenu à l'aide de
lignes feuillues, chaque losange ou hexagone enfer
mant un motif arborescent. Le tout forme des tii~a
(Voir § 81 et Photos 32 a et b).
Si les lignes feuillues prennent le champ
du tissu en biais, parallèles les unes aux autres.
on a la composition dite <Jl-ounjür : le poignard,
d'origine récente ; les intervalles sont garnis de
motifs décoratifs plus ou moins gros, oiil$l$a,vasques, ou r /Jiima, carreaux (Voir §§ 56, 61 et 62).
On remarquera une composition identique dans
les coussins (Voir § 72).
En tenant compte de ce que, la plupart
du temps, l'entre-deux est doublé à sa partie
inférieure par une bande de motifs espacés - tout
comme dans la portière - on peut résumer
ainsi la composition du napperon classique, toute
semblable à celle du rideau, en énumérant les
parties qui se superposent dans l'ordre suivant :
pans jlqil, entre-deux güza, ligne arborescente
siisker" minaret ~Qmsa, remplissage r<Jssqn.
§ 70 - Napperons carrés.
Lorsqu'il s'agit de napperons destinés, par
exemple, à recouvrir un plateau préparé pour
servir le thé, la forme carrée devient préférable
et alors la broderie se dispose selon deux axes
de symétrie perpendiculaires l'un à l'autre et se
croisant au centre géométrique de la pièce. Cette
disposition appelle inévitablement l'apparition de
motifs disposés selon les diagonales et convergeant
vers un motif central (Voir Planches 70 et 71).
Dans un napperon tel que celui que représente
la Photo 15, on voit que le motif central domine
toute la composition, faisant penser à celle des
napperons carrés de Meknès. Il en est de même
du napperon représenté par la Planche 70.
La bordure d'encadrement des pièces de ce
genre s'amenuise, quand elle ne disparait pas, et
n'est en tout cas qu'un accessoire sans importance.
§ 71 - Coussins classiques.
Sauf de très rares exceptions, les coussins
sont brodés sur les deux faces, le décor de chaque
face étant identique à celui de l'autre (Voir § 14).
Leur composition décorative - à l'exception des
plus modernes - procède toujours des mêmes
principes qui vont être exposés; seul, le mode de
pliage de la pièce peut laisser supposer, à tort,
des compositions différentes.
Le décor consiste essentiellement en un entre
deux (Voir Planches 34 à 48) et une ligne de
fleurons le surmontant (Voir Planches 52, 54, 55
et 56). Les plus anciens coussins ne présentent
pas de décor plus riche : les deux extrémités du
tissu rectangulaire reçoivent la même broderie.
Rien ne semble donc distinguer la composition
essentielle des coussins de celle des napperons
dont il a été parlé plus haut.
Deux cas se présentent pour le pliage de la
pièce:
a) L'ouvrière a partagé la pièce en deux parties
égales et encadre chacune d'elles de la composition
décorative décrite ci-dessus. La Photo 17 montre
une partie de ce travail. A ce moment le pliage
peut se faire de deux façons :
Première façon: Les deux extrémités brodées
du tissu dans le sens de sa largeur sont retournées
et rabattues sur la médiane de la pièce et assem
blées en laissant une ouverture, {umm : bouche,
en vue du remplissage du coussin. Cette ouverture
se trouve par conséquent au milieu d'une des faces
de l'objet et non sur le côté. On a alors deux
bandes de broderie symétriques qui garnissent
toute la surface (Voir Photos 18 a, 20 b et 22, et
Planche 52) ;
L.\ COMPOSITION DÉCORATIVE 47
Seconde façon : Le tissu est simplement plié
largeur sur largeur ; chaque face représente alors
un rectangle encadré de broderie. L'ouverture de
remplissage se trouve sur le côté (Voir Photos 21 a,29 a et 30 b, et Planches 56, 58, 59 et 60). Le champ
laissé libre à l'intérieur de l'encadrement peut
rester nu, ou, au contraire, être orné de motifs
plus ou moins importants. Tantôt, on place deux
ou frois médaillons (Voir Photo 29 a et Planche 59),
tantôt, les têtes de fleurons se touchant presque,
on dispose une savante combinaison de remplis
sage (Voir Planche 60) ou un petit vol de mouches
(Voir Photos 28 a et b et Planches 55 et 6(5) ;
b) L'ouvrière, au lieu de broder deux rectangles
dans la pièce, se contente de composer une simple
bordure à chaque extrémité: entre-deux surmonté
d'une bande décorative de fleurons. Généralement,
dans ce cas, l'entre-deux se retourne en suivant
les lisières, comme dans les napperons étudiés
au § 58, pour former des montants se terminant
en pointe (Voir Photos 23, 24 a et 28 a). On plie
la pièce largeur sur largeur, les deux montants se
touchant et on laisse sur le côté l'ouverture destinée
au remplissage du coussin. Le champ reste Souventnu ou peu garni.
§ 72 - Coussins modernes.
Le décor classique qui vient d'être décrit
a été remplacé, à une époque toute récente par
un cloisonnage de lignes feuillues encadrant des
motifs assez volumineux (Voir Photos 32 a et b).
L'entre-deux a été réduit à un simple galon. On
trouve aussi, comme dans le napperon, des lignes
de feuilles coupant en niais le champ du coussin
(Voir § 1)9).
Ce mode décoratif tend à charger la pièce
outre mesure. Le tissu de support est complètement
masqué, comme dans les bordures de lit (Voir § 66).
C) PIÈCES DE VÊTEMENTS
La composition décorative des pièces de
vêtements varie avec la nature de l'objet brodé ct
l'usage auquel il est destiné.
§ 73 - Objets à pans retombants.
Les jarretières, les ceintures de pantalon, le
bandeau frontal, le voile de visage, ont été décrit'>
aux §§ 19 à ~2. Ces objets comportent une broderie
massive à leurs extrémités en raison de ce que les
pans sont appelés à pendre plus ou moins verticale
ment. On remarque toujours, à la partie inférieure,
un large entre-deux brodé surmonté d'une-compo
sition riche, même lourde, qui va s'effilant vers
le haut comme si on voulait ménager une transition
entre la partie ornée et le reste de la pièce qui
reste entièrement nu (Voir Photos 39 a et b, et
40 b).
§ 74 - Mouchoir ou pochette.
C'est une pièce carrée (Voir § 18) qui ressem
ble, en plus petit, au napperon carré. Il s'en
distingue néanmoins d'une façon frappante par sa
composition décorative. Comme il est destiné fi
être plié en quatre et glissé avec une négligence
élégante dans la ceinture, les quatre angles seuls
restent apparents. De ce fait, à l'inverse de ce
qui se passe dans les napperons, la bordure
joue le rôle essentiel, tandis que le motif central
peut disparaître parce qu'inutile. Les angles sont
largement garnis par un motif arborescent s<Jjra
d-<Jr-rukna, dont l'axe est une des diagonales ducarré (Voir Photo 42).
§ 75 - Châle de bain..
Cette pièce rare (Voir § 21) et de composition
très variable, présente, dans ses meilleurs échan.
48 LES BRODERIES DE RABAT
tiUons, deux masses triangulaires opposé~s de
broderie très chargée (Voir Photo 44).
Partant de la composition du napperon et de
celle du mouchoir-pochette, une artiste françaisecompose, à l'imitation des châles de Manille, un
nouveau châle splendide. C'est un objet de ce
genre, exécuté à l'école musulmane de filles de Salé,sous la direction de Madame Amal' et de sa sœurMademoiselle Bouillot, que représente la Photo 51.
§ 76 - Plastron de la robe de dessus.
La robe de dessus dfïna (Voir § 22), véritable
M'l'plis, quand elle doit être revêtue par la fiancée
le jour de ses noces, est brodée sur la poitrine,le long de l'ouverture et autour du col. Le plastron
ainsi formé s'appelle tQq b-Jl-gQfza u-r-riyi'jla :
ouverture au point (de broderie) et pièce d'argent.Cette expression trouve son explication dans la
composition de la broderie. De chaque côté del'ouverture pectorale tQq jusqu'à la taille, et autourdu col, s'alignent, l'un contre l'autre, six ou sept
rangs de broderie. D'abord une bordure de petits
motifs très légers, dJpblina, des mouches, puis
deux rangs de points de chaînette formant une
SJnsla chaîne, puis une bande de points d'épine.
mJrwlizi, enfin deux nouveaux rangs de points de
chaînette. C'est là une composition qui peut varier.Chaque rang se retourne à l'extrémité inférieure
de l'ouverture pectorale du vêtement pour rejoin-
dre son symétrique et fait le tour du col. A rangle
formé par le rang extérieur, au moment oùUs'incurve pour contourner le col, on .place unmotif circulaire qui rappelle la pièce de cinq
francs, d'où son nom riyq.la, de riyq.l écu.
La garniture de ce plastron est exécutéesurtout avec de la soie blanche. On utilise aussi
quelquefois le fil d'or sqiilli.
§ 77 - Col, fausses-manches, pantalon.
On n'en fait mention que pour signaler l'indi
gence de leur broderie. Il n'existe pour l'ornemen
tation de ces pièces aucun principe, aucune
tradition (Voir § 25 et Photos 41 a, b et c).
§ 78 - Pièces de layette.
Il reste peu à dire après la description qui
en a été faite plus haut (Voir §§ 26 à 30). Elles sont
sobrement garnies d'une bordure légère et parfois
d'un semis de petits motifs discrets. On ne se
trouve pas ici en présence de règles de composi
tion plus ou moins impératives, mais simplement
devant une fantaisie qui indique le souci de lamère de laisser sur chaque pièce une marque de
son affection pour le nouveau-né. Seul, le cachemaillot est traité comme un napperon parce qu'il
en a les dimensions et parce qu'il est largementdéployé (Voir Photo 45).
CHAPITRE IX
LA COMPOSITION DU COLORIS
A) LA TEINTURE
§ 79 --- Teintures chimique et végétale.
Les procédés de teinture employés en vue de
la broderie ont une influence indéniable sur le
coloris et sa composition en déterminant les
gammes de couleurs mises en jeu par les ouvrières,
leur variété, leur solidité.
A l'époque actuelle, les brodeuses ont à leur
disposition des soies qui viennent d'Europe toutes
teintes avec des produits chimiques de bonne ou
de mauvaise qualité. Les brodeuses peuvent aussi se
servir de soies teintes à Fès d'une façon sommaire
avec des poudres chimiques iJ9bra : poudr'e, ou
/ibüga rQmïya : teinture importée. Enfin, l'industrie
locale indigène leur fournit des soies colorées il
la teinture végétale (ou animale: cochenille) selon
d'anciennes techniques.
Les marchands de soie vendent indifférem
ment ces trois sortes de soie, mais il reste établi
heureusement dans l'esprit des maîtresses-bro
deuses et de leur clientèle éclairée que seule la
teinture non chimique, la /ibliiga baldïya : du pays,
donne des tons agréables et des couleurs qui ne
passent pas ma-iksaf-Si. En outre, il est à remar-
quel' que seule la belle soie blanche de la qualité
hindi (Voir § 32) peut être teinte par les procédés
indigènes. Ni la soie grège 1).rfr-al-1)dmm, ni la soie
artificielle .~übra, pour des raisons différentes, ne
supportent la teinture « du pays ». II en résulte
que la plus belle soie et la mieux colorée à la
fois est celle qui est traitée par les teinturiers de
Rabat.
II n'empêche que la soie artificielle et les
couleurs d'aniline de la plus détestable qualité
font les délices d'une clientèle de néo-citadins
dépourvus de goût et attirés par l'éclat agressif
de la camelote européenne à bon marché. II est
inutile d'ajouter que les couleurs d'aniline de cette
espèce ne durent pas et ne résistent ni au lavage
ni aux rayons du soleil.
Les colorants chimiques s'ils sont bons Ac, , cou-
tent aussi cher que les colorants végétaux' de 1, pus,
ils exigent de la part du teinturier des connais-
sances techniques spéciales et une installation
matérielle dont l'artisan indigène n'a meA me pas
l'idée. Il ne reste donc que les colorants h' .c lmlques
les plus inférieurs à concurrencer la t . teln urevégétale.
50 LES BRODERIES DE RABAT
Il n'est pas étonnant, dans ces conditions, que
la teinturerie indigène ait pu se maintenir - sans
monopole il est vrai - et l'on doit s'en féliciter.
Les artisans de Rabat tiennent à honneur de
conserver les vieilles traditions qui ont donnéles coloris des pièces très anciennes, admirables
encore dans leur fraîcheur.
§ 80 - Teinture indigène.
On ne s'occupera ici que de la teinture
de la soie obtenue avec des substances végé
tales (ou animale : cochenille), c'est-à-dire de la
teinture indigène. L'étude de la technique qui la
concerne demanderait un développement considé
rable débordant les limites de ce travail. Aussi secontentera-t-on de ne l'aborder que dans la mesureoù elle explique le choix et la composition des
coloris employés dans la broderie de Rabat.
Aussi bien, on doit signaler que les procéd63marocains de teinture ont fait l'objet d'une étude
très poussée de M. PROSPER RICARD, publiée dansle Bulletin de l'enseigne,ment public du Maroc,
n° 70, de décembre 1935. A notre connaissance,
c'est le seul travail complet qui ait été écrit sur
un sujet aussi délicat, aussi minutieux. Nous yrenvoyons le lecteur, en indiquant toutefois que
l'auteur et son collaborateur, le maître-teinturierKOUADRI, n'ont envisagé que la teinture de la laine.
La teinture de la soie se fait dans les mêmesateliers et avec les mêmes ouvriers que celle de
la laine. Elle emploie aussi les mêmes substances
colorantes et, en gros, les mêmes procédés. La
seule différence notable qui sépare la techniquede la teinture de la soie de celle de la teinture de
la laine, réside dans le fait que la première n'exige
pas de températures élevées, tandis que la seconde
exige des températures du bain colorant allantjusqu'à 40 et 50 degrés.
(54) On remarquera, par exemple, en lisant dans laRevue africaine, 1'" et 2' trim. 1941, p. 101, un article d~
M'" CHANTRÉAUX, sur le tissage en Kabylie, que les procédés
§ 81 - Matières tinctoriale..
Les matières tinctoriales employées à Rabat,
et que l'on retrouve dans toutes les industriesindigènes de la teinturerie en Afrique du Nord (54),
sont au nombre de sept : l'indigo, la garance, la
cochenille, la gaude, le daphné, le henné et l'écorcede grenade.
a) L'indigo, nïl, est un produit obtenu par
la fermentation des feuilles de l'indigotier. Il seprésente sous l'aspect d'une poudre bleue compri
mée. L'indigo, matière d'importation au Maroc,donne un bleu plus ou moins riche suivant qu'il
provient d'Egypte, de l'Inde ou de Java. On trou
vera dans RICARD, Teintures, pp. 4061 et 407, unedescription minutieuse de la préparation de lateinture à l'indigo. On obtient avec l'indigo detrès beaux bleus profonds, plus ou moins foncés
selon la durée de l'immersion de la soie dans lebain colorant.
b) La garance, fuwwa, croit spontanément et
en abondance dans la région de Marrakech. On la
cultive également. Ses racines, séchées et pilées,
donnent une matière colorante renfermant de lapurpurine et de l'alizarine. On obtient avec ce
produit une gamme riche de teintes allant du rosecrevette au grenat (Voir RICARD, Teintures, p. 407).
c) La cocltenille, qSinlya, vient surtout d'Espagne. Cet insecte, desséché et pulvérisé, donne debeaux rouges, plus éclatants que ceux de lagarance.
d) La gaude, liri')n, sorte de réséda sauvage,croît spontanément au Maroc. Elle donne unebelle gamme de jaunes plutôt clairs.
e) Le daphné, la++li.+, est aussi une plantespontanée de l'Afrique du Nord. On s'en sert pourla teinture en jaune tirant sur le vert.
f) Le henné, 1J-anna, est d'un usage trèsrestreint car il est cher. Il donne des tons roux.
ct les matières de la teinturerie sont dans la montagne berbère à peu près identiques à ceux des cités marocaines.
LA COMPOSITION DU COLORIS 51
g) L'écorce de grenade, qsijr-iJr-rummwiin,
séchée et pilée, donne selon qu'on pousse plus ou
moins la teinture, un noir très chaud ou des
nuances or et noisette.
§ 82 -- La technique du teinturier.
Les matières tinctoriales énumérées ci-dessus
fournissent les couleurs fondamentales, plus ou
moins foncées selon la durée de l'immersion de la
soie dans le bain colorant. On les combine, pour
obtenir les tons voulus, en plongeant la soie dans
deux ou trois bains successifs. On obtient ainsi
une très riche variété de couleurs. Parfois, dans le
but d'obtenir des couleurs encore plus nuancées,
le teinturier ajoute aux matières tinctoriales citées
une très petite quantité de teinture chimique.
Mais cet apport est si faible que, tout en modifiant
légèrement le ton, il n'enlève à la couleur végétale
ni sa chaleur ni son velouté.
Un seul mordant est employé pour la teinture
de la soie, c'est l'alun SJbb, qui ne modifie en rien
la tonalité du coloris.
B) LES COULEURS
§ 83 - Les gammes de coloris.
Les couleurs que l'on utilise principalement
dans les broderies de Rabat sont les suivantes (55) ;
a} Le BLEU, iJZfJq, terme général qui désigne
aussi le gris. Mais le gris n'est pas employé
le bleu céleste, iJZriJq smliwi ;
le bleu pâle, iJZriJq fiJQQf ;
le bleu de France à reflets violacés, iJl-si1lja
le bleu indigo en général, nIli ;le bleu indigo moyen, légèrement foncé sïba
mJglijqa, c'est-à-dire armoise foncée (fermée) ;
le bleu indigo clair, sïba 11lJftQ~lU, armoise claire
(ouverte) ;
le bleu violet, ;)Zpq bW, de la giroflée, du
violier ;
le bleu turquoise, tirant sur le vert, iJZriJq qraqf,
couleur du geai bleu (alias : chasseur d'Afrique)
le bleu marine très foncé, braya.
b) Le VERT, ;)bQiJf ;
le vert ordinaire, zïti, couleur d'huile d'olive non
raffinée;
(55) Il ne faut pas s'étonner des noms que les Rbatisdonnent aux couleurs des teintures quand il les compare àcelles de certains objets ou de certains animaux. L'onomastique française est tout aussi capricieusee que celle des
le vert tendre à reflets jaunâtres, rb(fs-Jj-jiJnrw,
herbe du Paradis ;le vert-de-gris, Z9n jljri, de zQnjar, vert-de-gris;
le gros vert, b;)rsü{z, couleur de cardon ;
le vert mousse, iwzzi, de biJzz, mousse;
le vert citron pas mûr, lï.mi, de nm, citron doux;
c) Le ROUGE, al]miir ;
le rouge cochenille violacé, yq.smïn-;)s-siJrq, jas-
min d'Orient ;le cochenille rose tendre, siiq(fqf ;
le rouge ponceau, sk;)rn;)( ;
le rouge cerise corsé, d<Jmm-iJ[-gzljl, sang de
gazelle;
le rouge corail, m9rjani
le rose tartre cendré, (Jrtarf
le brun rougeâtre, lüzï, de la nuance du tégument
de l'amende sèche, lüz ;
le brun chocolat, tSiJklatç ;
le brun canelle, qiirfi, de qiirfa, canelle ;
le châtain foncé, dubbiini ou dubban taba, cou
leur de tabac ;
le rouge fard, iil.zmiir-iJl-siikkri ;
brod!"uses,et ~es so~ers de Rabat. Voir RICARD, Teinturesp. 419, qu on s est fait un devoir de reproduire ici en parti~
et aussi en le complétant, les teintures de la soie étant lusvariées que celles de la laine. p
52 LES BRODERIES DE RABAT
le rouge Bordeaux, dïdi
le vieux rose foncé, .1;ulm~~ mJglQq, couleur d~
pois chiche foncée ;
le vieux rose clair, 1).iim~~ mJftij1).
le rose chair, ZJbdi, beurre frais ;
l@ rose, warfj~, couleur de la fleur;
le vermillon, aiisli, couleur de miel.
d) Le JAUNE, J~fJr ;
le jaune pur, ocre, blibQr~
le jaune clair, kbrïii, couleur de soufre
le jaune verdâtre, qii~bi, couleur de roseau mûr;
le jaune bleuté, kamûni, couleur de cumin ;
le jaune d'or, dJhbi, de dhJb, or ;
le jaune abricot, mJSmij.si, de mOlsmij.s, abricot;
le jaune mordoré, gJra~, couleur chair de courge;
le jaune mimosa, q~q/lini ;
le jaune banane, bij.nij.ni ;
le jaune pus, q(1).ç, de q(1)., pus
l'orangé roux, im~wnniya, passé au henné;
le chamois, fjhiir-Jj-jmJl, dos de chameau
le gris taupe, t9bbi, de t9bb, gros rat;
e) Le VIOLET offre peu de nuances ;
le violet franc, zb'ïbi, couleur de raisin sec
le violet mauve, qiilb-Jl-1).jiir, améthyste ;
le violet ardoisé, aiinq-1).mij.Jn, gorge de pigeon.
f) Le NOIR, k1).iil
le noir à reflets bruns, bJrnlita.
§ 84 - Le choix des couleurs.
Les couleurs qu'on vient d'énumérer n'ont
pas été de tout temps employées ni toujours dansla même mesure. La mode s'impose dans le choix
des couleurs comme dans la composition des
pièces brodées. Certains tons, tt-ès en honneur
aujourd'hui, n'étaient pas ou étaient peu employés
autrefois. Cependant, il est certain que le jauneet le rouge jouissent d'une préférence marquée
dans les broderies récentes ou peu anciennes,tandis que le bleu foncé régnait dans les pièces
anciennes.
De nos jours, ce sont trop fréquemmentles couleurs les plus vives où les plus nouvellesqui attirent les femmes du peuple. Celles-ci lesemploient sans beaucoup de discernement, pour
bien dire, sans goût. Par contre, les maîtresses-bro
deuses fidèles aux bonnes traditions recherchent
les tons classiques dont l'énumération vient d'être
faite. Ces tons s'harmonisent presque naturelle
ment, parce qu'ils sont plus chauds qu'éclatantset plus profonds que les couleurs d'aniline. On
reviendra sur cette question dans l'étude qui suit,
de la composition du coloris.
C) LA COMPOSITION DU COLORIS
§ 85 - Coloration du tissu desupport.
Il faut signaler tout d'abord que le tissu de
support des broderies de Rabat, anciennes 0\1
modernes, est toujours blanc. Les quelques vieille~
pièces brodées sur cotonnade jaune que l'on a
trouvées soulignent, par leur extrême rareté, la
généralité de l'emploi du tissu blanc. C'est là untrait commun à toutes les broderies marocaines,
exception faite pour celle de Tétouan, à caractèrefloral, importée d'Alger il y a un siècle.
La tradition qui impose le blan-e comme
couleur du tissu élimine un facteur important del'harmonie générale, d'autant plus que le blanc
employé est toujours mat et laisse par conséquent
à la soie du décor tout son brillant sans concurrence. Dans l'affaire, toute faute de goût qui
résulterait d'une discordance entre la couleur dufond et celle de la broderie devient impossible..
LA COMPOSITION DU COLORIS 53
Mais il n'en reste pas moins que l'emploi du blanc
dans le tissu de support diminue sensiblement la
richesse du coloris de la composition de l'ensem
ble : il prive les tonalités différentes de la broderie
des contrastes ou des appuis qu'un fond judicieu
sement coloré pourrait leur procurer en les faisant
Taloir davantage (56).
Certaines directrices d'écoles ont tenté de
porter remède à cette déficience en employant
comme supports des tissus dont la coloration, la
texture et la matière donnent une valeur et un éclat
nouveaux à la broderie. C'est le cas pour les pièces
que représentent les Photos 10, VI b, 1'1, 27 a ct /l,
29 a et 51, exécutées sous la direction de Madame
Amor et de Mademoiselle BouiIlot. La Photo 10
reproduit un des~us de coffre traité dans la plus
pure des traditions locales, mais les mêmes artistes
en ont augmenté considérablement la valeur en
introduisant des éléments de coloris nouveaux :
le fond est un tissu de soie naturelle d'un brillant
discret et d'un beau ton rouge brique, et les frises
décoratives sont traitées en gris argent rehnussé
de touches d'or vért.
Pour ce qui concerne la broderie proprement
dite et la composition de son coloris, remarquons
d'abord qu'elle est tantôt monochrome et tantôt
polychrome avec tous les degrés qui séparent
la monochromie absolue des anciennes pièces
de la polychromie désordonnée de pièces toutes
récentes.
§ 86 - Monochromie ancienne
et moderne.
L'ancien Rabat, comme l'ancien Tétouan dont
on le distingue à peine, est monochrome avec,
quelquefois, des touches de la couleur complémen
taire de la masse brodée. La broderie reproduite
par la Photo 49 a est tout entière exécutée en soie
bleu-indigo très foncé. Celle de la Photo 48 a est
(56) Sur la queition des harmonies et des contrastes des
d'un bleu-violet rehaussé, dans l'entre-deux et dans
les motifs de la bande, de touches jaune-d'or.
Les Photos 17 et 18 a montrent d'anciens Rabat
entièrement bleu-indigo foncé. Le coussin de la
Photo 20 b est traité tout entier en rouge grenat.
On constate, dans les pièces les plus anciennes,
l'emploi exclusif du bleu très foncé et du rouge
grenat.
La monochromie se retrouve à toutes les
époques de l'évolution de la broderie de Rabat,
alors que les ouvrières ont à leur disposition une
palette qui s'enrichit chaque jour.
La broderie reproduite par la Photo 5 a est
rouge cochenille.
Le rideau de la Photo 7 a est brodé en vert
herbe, ce qui constitue une rareté, le vert étant
peu employé.
Celui de la Photo 4 a est exécuté en vieux
rose.
La Photo 24 b représente un coussin rouge
cerise.
Le coussin de la Photo 28 a est vieux-rosQ
soutenu.
La Photo 31 montre un coussin jaune légère
ment orangé.
La ceinture de la Photo 39 a est rouge lie
de yin.
Le châle de bain de la Photo 44 est bleu
indigo-clair.
Les pièces de layettes des Photos 46 a, b et c
sont violet-fol'lcé.
La ceinture originale que montre la Photo 43
est d'un blanc teinté mauve.
Ces exemples montrent que la monochromie
est fréquente dans tous les genres de broderies et
à toutes les époques.
§ 87 - Polychromie alternée.
Mais une polychromie tantôt simple ta t't. . , no
complexe, se remarque dans les broderies d'appa-
couleurs, voir l'étude très poussée de GADRI REL- OUSSEAU.
54 LES BRODERIES DE RABAT
rat en prenant, selon les époques, des caractères
particuliers. Si on se reporte aux anciennes brode
ries de Rabat ou de Tétouan, on s'aperçoit que
la polychromie est apparue de bonne h.eure et a
consisté dans une alternance des couleurs des
motifs semblables, chacun d'eux ne recevant qu'une
seule teinte. C'est le cas des pièces représentées
par les photographies suivantes :
Photo 47 a (Vieux Tétouan) : Entre-deux àéléments alternativement bleu foncé et banane, les
deux galons d'encadrement étant violet de giroflée;
les fleurons sont successivent : bleu foncé, banane,
bleu foncé, jaune légèrement vert ;
Photo 50 a : Vieille broderie de Rabat à motifs
alternativement bleu foncé et rouge ;
Photo 50 b : Même composition que ci-dessus
traitée en vert et rouge ;
Photo 21 a : Entre-deux monochrome grenat
et motifs alternativement rouges et bleu foncé ;
Photo 22 : Succession des teintes sur une des
faces du coussin, de gauche à droite : rouge vif,
jaune pus, rouge vif, bleu marine, rouge vif, vert
jaunâtre, rouge vif, jaune. Sur l'autre face : bleu
marine, rouge, vert, rouge, jaune, rouge. bleu mari
ne, rouge;
Photo 23 : Succession des teintes des quatorze
petits motifs d'une face : rouge vif, ocre jaune,
lie de vin, rouge vif, vert-herbe, rouge vif, bleu
marine, rouge vif, jaune, violet, rouge vif, vert
herbe, rouge vif, bleu marine. Sur l'autre face, onze
motifs un peu plus volumineux que ceux dont on
vient de donner le coloris : rouge, bleu marine,
rouge, jaune, lie de vin, rouge, vert, rouge, bleu
marine, rouge, jaune.
Dans toutes les broderies dont il vient d'être
fait mention, les teintes employées sont toutes d'uu
ton franc. Ce sont les trois couleurs fondamentales,
bleu, jaune et rouge, avec très peu de leurs combi
naisons : vert et lie de vin. La dominante est le
rouge très fréquemment. Il ne semble pas y avoir
de règle d'alternance rigide ou de succession dans
les coloris des motifs. Pas davantage on n'aperçoit
de règle concernant le nombre et la proportion
des teintes employées. Seul, le goût personnel de
l'ouvrière paraît avoir présidé à la composition
du coloris.
Les compositions de ce genre caractérisent une
époque qu'on peut considérer comme la seconde
dans l'évolution de la broderie de Rabat. On verra
plus loin, § 100, que ces compositions de coloris
correspondent à des compositions décoratives
également caractéristiques.
§ 88 - Polychromie interne.
Au moment où des motifs géométriques ou
floraux très stylisés s'ajoutent à la bande décora
tive de bordure pour garnir plus ou moins le centre
de la pièce, une nouvelle forme de polychromie
intervient. Le cadre reste monochrome ou à poly
chromie alternée alors que les nouveaux motifs
renferment chacun des éléments de couleurs
variées. C'est le cas des pièces représentées par
les Photos 8, 12 a, 30 a et b.
Puis les fleurons eux-mêmes de la bordure
son affectés par cette évolution du coloris. L'arma
ture externe de galons reste d'une seule teinte,
généralement rouge ou jaune, mais la polychromie
s'installe dans les éléments de remplissage, en
conservant cependant une certaine alternance d'un
motif à l'autre, souvenir de l'époque antérieure.
C'est le cas de la pièce représentée par la
Photo 24 a.
Les entre-deux de cette période sont le plus
souvent constitués par une ligne brisée régulière
sïr-u-aji, isolant de part et d'autre des triangles
gar égaux entre eux (Voir Planches 52, 64 et 65).
En se reportant à la Photo 12 a, on voit nettement,
par l'alternance des z@nes claires et foncées, la
manière dont est traité le coloris dans les vides
triangulaires en question.
LA COMPOSITION DU COLORIS
On note à cette époque un enrichissement
de la gamme des couleurs di! à l'utilisation de
nuances nouvelles : vieux rose, bordeaux, vert
jeune-pousse.
La composition du coloris de cette période
correspond assez étroitement à une phase de
l'évolution du décor, celle du début de l'inspira
tion florale.
§ 89 - Épanouissement de la
polychromie.
C'est dans les napperons que représentent les
Photos 15 et 16 que l'on voit le mieux s'épanouir
une polychromie riche et harmonieuse. On y
compte jusqu'à dix teintes par objet. Comme
précédemment aucun canon du coloris n'apparaît.
Seul, le goût de l'ouvrière, parfait en l'occurrence,
a prèsidé à l'harmonie et au contraste des cou
leurs. La polychromie se trouve jusque dans
l'intérieur de chaque motif et on ne distingue pas
de ton dominant. Très exceptionnellement, on
relève l'emploi discret du fil d'or pour ,ehausser
les motifs circulaires importants.
§ 90 - Le coloris dans les imitations
de brocart.
Dans les broderies postérieures imitées des
brocarts d'importation, on trouve encore une
bonne tenue de la composition du coloris. La
Photo 32 b représente un coussin exécuté dans
une dominante jaune légèrement orangé ; les
motifs inscrits dans le quadrillage sont d'un rouge
violacé qui s'harmonise parfaitement avec le ton
dominant.
§ 91 - Influence de la technique de lateinture sur la composition du coloris.
Toutes les soies employées à la confection
des broderies dont il vient d'être parlé étaient des
soies naturelles teintes avec des substances végé-
tales ou avec de la cochenille. Ces produits
colorants ont toujours donné des tons chauds et
rabattus à la fois. Les chaudrons de cuivre dans
lesquels on préparait la teinture ont dû exercer
eux-mêmes une influence sur le velouté de la
couleur, en raison des réactions chimiques du
métal dont ils étaient faits. Il en est résulté que
les teintes les plus opposées théoriquement ne
parviennent jamais à se heurter violemment. Il y a
là un facteur d'harmonie qui s'ajoutait, et parfois
pouvait suppléer, au goùt de l'ouvrière dans le
choix des teintes. C'est pourquoi les vieilles brode
ries ne donnent jamais l'impression désagréable
d'une faute de goùt.
§ 92 - Influence des colorantschimiques.
L'introduction des colorants chimiques aux
tons vifs et tranchés, attrayants en même temps
pour des yeux neufs, a révélé l'absence d'un canon
de la composition des coloris, et la décadence a
commencé.
C'est d'abord un bariolage tel que les motifs,
colorés au petit bonheur, perdent leur valeur
respective et ne se distinguent plus les uns des
autres. Toute pièce de broderie est un vrai kaléi
doscope (57). Puis brusquement la mode change,
et les jeunes s'engouent de couleurs fades et ternes
bah;}t, celles que nous désignons par des adjectifs
en « âtre ». Ces couleurs accompagnent d'ailleurs
un dessin pauvre et maigre qui n'a plus aucun
rapport avec le dessin architectural des belles
broderies.
§ 93 - Rôle des écoles de filles.
Les écoles officielles de filles ont tenté et
essaient toujours de réagir contre le mauvais goût
en inculquant à leurs élèves le sens de l'harmonie
des couleurs. Elles se sont donné comme règle de
(57) Voir JOUIN, p. 20.
LES BRODERIES DE RABAT
n'employer que des soies naturelles, teintes avec
des matières végétales ou à la cochenille. En outre,
elles donnent comme modèles aux enfants de
vieilles broderies harmonieusement colorées dont
les reproductions se vendent avec profit à uneclientèle européenne. La sûreté de goût de telle
directrice d'école l'a autorisée à rechercher des
compositions de coloris toutes nouvelles quiauraient pu être l'aboutissement normal de la
belle broderie. On les trouve dans les pièces que
montrent les Photos 13 b et 14 b ; voir aussi § 85
et Photo 10.Les enfants obéissent et acquièrent une notion
à la fois esthétique et intellectuelle des règlesdont l'observation fait, à leurs yeux, la valeur
mercantile de leur travail. Malgré la difficulté
que présente une tâche rénovatrice de ce genre,
il est permis d'espérer que les jeunes filles reprendront les anciennes traditions et redresseront le
sens d'une évolution actuellement fourvoyée.
L'ÉVOLUTION
CHAPITRE X
DE LA BRODERIE A RABAT
§ 94 - Hypothèse d'une origineespagnole.
Il est difficile, dans l'état actuel de nos
connaissances relatives aux broderies marocaines,
d'attribuer à celle de Rabat une origine certaine
et d'indiquer avec une sûreté parfaite les étapes
de son évolution. Cependant on possède un certain
nombre de données de ce problème, que son caraco
tère énigmatique rend plus attachant, données
que l'on retrouve d'ailleurs dans d'autres problè
mes que pose l'histoire de la civilisation marocaine.
C'est devenu un axiome que les manifesta"
tions culturelles du Maroc, dans la plupart des
domaines, sont des reflets, des souvenirs ou
des survivances de celle de l'Espagne musulmane.
De fait, l'histoire de la civilisation marocaine est
intimement liée à celle de la Péninsule ibérique
du VIIle au XVII" siècles. Après 1610, les influen
ces espagnoles musulmanes s'atténuent, bien que
maintenues par les Moriscos, puis elles disparais
sent complètement au Maroc. Elles ne se révèlent
que par l'évolution, dans le cadre marocain, des
apports culturels des émigrés d'Espagne.
Pour ce qui est de la broderie, art citadin,
on est logiquement amené à supposer que celle
de Rabat a été apportée dans le quartier des
Andalous, où elle se cantonnait avant 1912, par les
Moriscos venus d'Espagne en vagues d'émigrations
successives jusqu'au début du XVIIe siècle.
Cette hypothèse trouve une confirmation au
moins apparente dans le fait que la plus ancienne
broderie de Tétouan, si proche de la très vieille
broderie de Rabat, s'est développée elle aussi dans
une ville peuplée de réfugiés d'Espagne.
Comme le fait d'ailleurs remarquer Mademoi
selle JOUIN, pp. 1 et 2, les broderies marocaines
de tous genres n'existent que dans les villes ayant
reçu des Maures d'Espagne.
Par ailleurs, il faut remarquer qu'en Espagne,
encore de nos jours, on brode sur un coussin
comme à Rabat. En outre, le nom de la plus
ancienne broderie de Rabat est le mot espagnol
même qui désigne la broderie : b<Jf(JiieJa. Enfin,
l'action d'enfiler une aiguille s'exprime à l'aide dw.
verbe espagnol s<Jri<Jl qui a le même sens.
Cet ensemble de faits qui ont trait à l'histoire. . ,à la technique ou au lexique, sans constituer la
preuve indiscutable de l'origine espagnole de la
broderie à Rabat, constitue une présomption assez
forte qu'on ne saurait écarter.
LES BRODERIES DE RABAT
§ 95 - Conservatisme du début.
L'art de la broderie ainsi importé au Maroc
devait y subir les influences du nouveau milieu
dans lequel on l'avait transplanté.
Au début de leur séjour, et pendant longtemps.
les Moriscos débarqués à Rabat (Salé-le-Neuf)
n'ont eu que peu de rapports culturels avec les
autochtones qui leur étaient bien inférieurs de ce
point de vue. L'histoire dit même que des luttes
fréquentes eurent lieu entre les nouveaux venuset les indigènes. Aujourd'hui encore les premiers
constituent une population un peu à part, une
sorte d'aristocratie reconnue, qui habite son quar
tier et qu'on appelle « les Andalous ».
Isolés des habitants du pays par leur niveau
de civilisation, les Moriscos le furent aussi de
l'Espagne redevenue chrétienne. On sait commentla piraterie salétine, dont les armateurs habitaientRabat, a illustré l'inimitié irréductible des Musulmans d'Espagne, rejetés en Afrique, à l'égard de
leurs anciens compatriotes (58).
Il devenait inévitable, dans de pareilles condi
tions, que l'art de la broderie conservât, à l'abri
d'influences étrangères, son caractère originel et
n'évoluât, du moins pendant longtemps, que sur
un rythme fort lent.
§ 96 -Influence du milieu marocain.
Néanmoins, les nouveaux habitants de Rabat
en réalité ils furent les véritables fondateurs
de la cité - ne pouvaient manquer d'établir
quelques relations avec les tribus avoisinantes qui
les ravitaillaient. Insensiblement, la ville se peupla
de ruraux qui s'urbanisèrent et qui remplirent
auprès des Andalous les emplois les plus divers.
Les femmes issues de ces tribus, à titre de servan
tes, de nourrices, de concubines, voire d'épouse~
légitimes, s'introduisirent dans les gynécées et
(58) Voir BRUNOT, La mer, p. 152.
prirent part aux travaux domestiques, par consé
quent à ceux de la broderie.
Les nouvelles initiées ne pouvaient qu'ignorerl'inspiration primitive de l'art qu'elles prati
quaient, et leurs maîtresses, de plus en plusséparées de la source de leur broderie, oubliaient
progressivement le sens primitif du décor qu'ellestraçaient. Les unes ne comprenaient pas, les autres
ne comprenaient plus, mais toutes professaient
un respect religieux de la tradition artistique,
respect scrupuleux que l'on retrouve en maintes
circonstances analogues.
A partir de ce moment, la bordure des pièces
de broderie se fige en des thèmes qui n'évoluent
plus. Mais, en revanche, les ouvrières innovent en
cherchant à garnir de motifs variés le champ detissu laissé libre entre les éléments de bordure ouentre les bandes de broderie. C'est l'occasiond'emprunts et de changements de techniques.
En même temps, le vieil instinct africain, épris
de géométrisation et de stylisation à l'extrême,
se libère de l'emprise des modèles anciens : l'on
voit alors nettement les thèmes décoratifs devenir
de pures abstractions qui acquièrent une vie
propre, se développent et se combinent pour
réaliser des conceptions également abstraites.
Il est difficile de mesurer l'influence exercée
sur l'évolution de la broderie par les esclavesnoires, qui n'ont sans doute pas été admises à
l'honneur de broder, et, plus particulièrement,
par les filles des concubines noires qui, elles, onteu leur place parmi les enfants du maître de la
maison. Si l'on en juge par ce qui se passe
aujourd'hui sous nos yeux, il faut supposer que
cet élément ethnique a exercé son influence sur le
coloris qu'il aime varié et brillant.
§ 97 - Influences européennes.
Un facteur très puissant d'évolution a été,
pour la broderie de- Rabat, l'importation, à la fin
du XVIIIe siècle ou même plus tard, de tissus
L'ÉVOLUTION DE LA BRODERIE A RABAT 59
luxueux provenant d'Europe. Ceux-ci ont plu
inévitablement tout de suite par leur couleur, leur
richesse et la nouveauté de leur décor. Aussi les
brodeuses ont-elles essayé de les imiter, avec plus
ou moins de bonheur, tout au moins d'en copier
des éléments qu'elles ont tenté de marier aycc
ceux du décor traditionnel.
Les brocarts européens, imités des draps de
Damas, d'inspiration sûrement orientale, sont cer
tainement à l'origine des hroderies quadrillées de
losanges qui enserrent eux-mêmes des médaillons
de style floral. C'est par l'Europe, dans ce
cas, que le Maroc connaît l'Orient sans s'en
douter.
Par ailleurs, les tulles et les mousselines
importés tout garnis de fleurettes et de branchages
semblent être à l'origine d'un décor floral de
remplissage qui s'est stylisé dès le premier jour
et dont l'introduction constitue la grande révolu
tion du décor à cette époque, celle que nous allon5
appeler la troisième.
§ 98 - Schéma de l'évolution.
On yoit ainsi se dessiner l'histoire des brode
ries de Rabat. Au début, c'est un art transplanté
en terre étrangère. Il se maintient aussi jalouse
ment que possible dans son originalité première :
la broderie est massive, puissante, on serait tenté
de dire architecturale. Cet art ne subit ensuite
qu'une évolution interne sans conséquence impor
tante mais assez marquée cependant pour qu'on
puisse parler d'une seconde période.
Brusquement, apparaît une technique nouvelle
et une inspiration sans doute orientale qui créent
une nouvelle broderie riche en motifs floraux
stylisés et en coloris variés. Confinée d'abord
dans un rôle secondaire de remplissage, elle
devient de plus en plus envahissante et chasse
la broderie primitive. C'est la troisième période
de l'évolution des broderies de Rabat.
Puis l'art des brodeuses subit une influence
extérieure, celle de modèles nouyeaux que lui offre
l'Europe, et c'est alors une quatrième période
qui s'ouvre. Les modèles choisis sont de qualité ;
ils orientent la broderie vers des chemins impré
vus mais sans l'appauvrir. D'architecturale, ellc
devient plus florale, tout en conservant les règles
essentielles de composition de la broderie primi
tive et sa somptuosité tout entière.
La dernière étape est moins heureuse. Le
Maroc largement et brusquement ouvert à l'Europe
au début du XX" siècle est inondé d'objets de toute
espèce et de toute valeur esthétique ; par surcroît
ils sont bon marché. D'autre part, une clientèle
européenne se crée pour les objets d'art marocain
et les acquiert sans discernement à de hauts prix,
faussant constamment le goût des ouvrières. Les
Marocains délaissent les belles productions de la
broderie de Rabat et lui préfèrent la camelote
européenne, tandis que les Européens accordent
leur prédilection à la camelote marocaine.
Tous ces facteurs amorcent une décadence
qu'on arrêtera, il faut l'espérer. C'est un phéno
mène inéluctable: la déchéance, qui peut entraîner
la disparition, attend les arts et les techniques qui
ont perdu le sens de leurs origines et n'ont pas
su évoluer sainement avec le temps.
Si l'histoire des broderies de Rabat s'est bien
déroulée selon le schéma ainsi tracé, il est permis
d'en fixer les étapes de la façon qui va suivre.
§ 99 - Première période :
La broderie originelle.
A l'origine, comme il a été dit plus haut, on
doit supposer une broderie espagnole qui, trans
plantée. à l'étranger, a subi une évolution différente
de celle qu'eHe a eue dans son milieu propre.
Il est impossible, en raison de ces évolutions
divergentes, d'affirmer avec une rigueur scienti
fique une parenté entre les broderies modernes de
GO LES· Bl\ODERIES DE RABAT
Rabat et d'Espagne. Il est nécessaire par consé·
quent de remonter aussi loin que possible dans
l'histoire des broderies espagnoles, dans l'inten
tion d'y trouver des compositions semblables ou
identiques aux plus anciennes broderies de Rabat.
En opérant de la sorte, on est conduit à
penser, malgré l'insuffisance des documents, que
les vieilles broderies des gilets espagnols d'Extra·madoure et de Lagartera, en Castille, sont les
ancêtres des broderies de Rabat et de Tétouanreproduites par les Photos 17, 18 a, 20 a, 47 b, 48 a,
49 a et 50 a. De fait, dans la mesure où il est
permis de préjuger de l'ancienneté relative d'un
groupe de coussins par l'état de vétusté dans
lequel nous les trouvons, ces pièces sont les
documents les plus anciens de ceux que nous
possédons parmi les broderies de Rabat et de
Tétouan.
A cette époque, - très probablement le XVIIesiècle - la composition décorative, dans les deux
villes, comporte uniquement un entre-deux cou
vrant complètement la partie du tissu de fond sur
laquelle il se trouve, limité des deux côtés par un
galon, le tout surmonté, sans solution de continuité,
par des fleurons, droits ou penchés, étroitement
soudés les uns aux autres par leurs faces latérales.
On a ainsi un ensemble compact, somptueux et
lourd (Voir les Photos indiquées plus haut). LesPhotos 50 a et b montrent particulièrement l'inten
tion de souder les motifs sans leur laisser dégager
ce qu'on pourrait appeler une tête. C'est l'époque
du rqç,m b<Jfdiida. Or ce dernier mot, espagnol,
signifie « brodée » et sans doute a signifié « bro
derie », et il n'est plus employé à Rabat, de nos
jours, que pour désigner la broderie la plus
ancienne. On peut y voir une preuve nouvelle de
l'origine espagnole de la broderie primitive de
Rabat.
Dans les compositions de ce genre, qui sont
celles d'une époque, le champ délimité par l'enca
drement de la bande décorative reste nu et blanc.
L'élément de broderi'eimportant est le galon eri
volute tel qu'on le trouve sur les vieux gilets
espàgnols. Les points employés sont le point de
feston iJ9fza b-<JI-lJQr~a et le point de piqûre croisés<Jnsla-d-al-1Jül (Voir §§ 40 et 43) . La proportiondans laquelle ce dernier point est employé dimi
nue d'importance au fur et à mesure que la
broderie évolue. Alors que dans les vieilles brode
ries de Tétouan il alterne régulièrement avec lepoint de feston, selon des lignes parallèles (Voir
Photos 47 a, 48 b et 49 b), il arrive, dans IIlS anciens
Rabat, à ne plus servir que d'éléments de remplis
sage des axes des fleurons.
Toutes les pièces de cette époque présentent
un endroit et un envers non identiques. On peut
tenir pour assuré que la broderie était exécutéesans dessin préalable au crayon : l'axe des volutesétait indiqué sur le tissu par un trait léger au fil,
comme on peut s'en rendre compte en examinant
le côté droit de la Photo 49 b ; la brodeuse, fort
habilement, suivait ce trait en lecc)Uvrant.
Le coloris des pièces de cette période est
monochrome bleu indigo ou rouge foncé, avec de
rares variantes.
C'est cette broderie à caractères bien définis
et, répétons-le, d'origine espagnole, qui s'est trans
formée parfois lentement, parfois par à-coups,
pour donner des productions qui finissent par ne
plus lui ressembler aujourd'hui.
Remarque importante : on ne trouve dans ce
genre de broderie que des coussins.
§ 100 - Seconde période :
Tendance à la géométrisation.
Par la suite, l'influence du milieu africain
commence à s'exercer : un besoin de symétrie
apparente et affirmée se manifeste par le dessin
très net d'un axe central rectiligne dans chaque
fleuron de la bordure (Voir Photo 18 b et Plan-
L'ÉVOLUTION DE LA BRODERIE A RABAT 61
ehes 52 et suivantes). En même temps, l'axe se
prolongeant au-delà du motif, la tête de celui-ci
se aégage donnant une composition décorative
plus aérée.
On assiste à une géométrisation progressive
des volutes enfermées dans le cadre du fleuron.
Tout démontre, jusque dans les maquettes qui
nous sont restées (Voir Photos 1 a et b et 2 a et b),
que l'ouvrière respecte le cadre général du fleuron,
à l'intérieur duquel sa fantaisie s'exerce plus
librement. En réalité, cette fantaisie, bridée par
l'instinct géométrique et simplificateur du milieu
africain, rompt ]a volute ondoyante et la ramène
successivement à des cercles parfaits (Voir Plan
che 55), à des demi-cercles (Voir Photos 20 b. 21 a.29 a et b, 30 b et Planche 56), puis à un quadril
lage, gama : damier (Voir Planches 57, 58 et 59).
Insensiblement le remplissage se simplifie etn'est plus constitué que par des bandes horizon
tales en dents de scie ligqmi (Voir Photos 22,24 a,27 a et b, 28 a, 30 a et Planche 610).
En même temps, l'entre-deux subit une évolu
tion de même nature.
On a encore affaire à une hroderie avec
envers, exécutée au point de feston, le point de
piqûre croisé servant uniquement dans le remplis
sage des grands axes.
Une légère fantaisie apparaît avec des sortes
de languettes exécutées au point de bonne-vierge
mgïllIw, qui sertissent les fleurons de la bordure
(Voir Photos 22, 23, 29 a ct Planches 55 à 58).
Il est impossible de savoir de façon certaille
si le dessin était tracé au préalable sur l'étoffe,
soit au fil, soit au crayon, soit avec tout autre
matière colorante. Les ouvrières les plus habiles
de nos jours prétendent exécuter certaines pièce';
rares sans dessin, en se hornant il tracer avec la
pointe de l'aiguille le contour de chaque élément
au moment de l'exécuter: la régularité est obtenue
en comptant les fils. Il n'est pas téméraire de
penser qu'on se trouve là en présence d'une
ancienne technique qui aurait persisté à côté de
la pratique, aujourd'hui généralisée, du dessin
préalable au crayon.
Quant au coloris, pendant cette période
d'évolution africaine, il s'enrichit de nuances
nouvelles telles que le jaune et le vert. On n'a pas
encore affaire à une véritable composition des
couleurs, mais plutôt à une simple alternance,
d'ailleurs harmonieuse, dans la coloration des
motifs (Voir § 87).
Le genre de broderie qui vient d'être décrit
n'est pas distingué, par les ouvrières, de celui,
plus ancien, qui fait l'objet du paragraphe précé
dent. Elles l'appellent également rqçm-bdf(Weja.
§ 101 - Troisième période:
Apparition d'une nouvelle broderie.
Dans une nouvelle phase de l'évolution, appa
rait le souci, jusqu'alors inconnu, du garnissage
des vides laissés entre les têtes des fleurons et de
ménager une transition entre la bande massive
ment brodée et le fond du tissu qui restait
complètement nu (Voir Photos 27 Cl et b, et 28).
Lorsque l'objet brodé est assez petit pour que les
fleurons des deux bandes opposées se rapprochent
et même se touchent, il suffit de peu de chose
pour remplir tout le champ du tissu (Voir Photos
29 a et b, 30 b et Planches 59 et 60).
Cette innovation n'aurait guère affecté le
caractère originel de la broderie si elle n'avait été
l'occasion d'introduire, d'abord dans le dessin des
motifs secondaires de remplissage, puis progressi
vement dans tout le décor, une technique et une
inspiration entièrement nouvelles, d'un caractè['~
profondément différent de celui de la première
époque. On peut affirmer qu'une seconde brorlerie
de Rabat naît alors, va grandir à côté de l'ancienne
et finalement se substituer à elle.
Les éléments de remplissage sont d'abord très
légers et géométriques (Voir Photos 28 a, 30 b et
Planches 59, 64 et 65). Les petits motifs en question
62 LES BRODERIES DE RABAT
s'exécutent soit au point de feston comme l'ensem·
ble du décor, soit au point-plume ou au passé-plat.
Puis on voit apparaitre en abondance des
motifs de remplissage absolument nouveaux quant
à leur inspiration, le point dans lequel on les
exécute et la composition de leur coloris. Ce sont
des motifs floraux exécutés au point-plume ou au
passé-plat et dont la polychromie s'accentue
rapidement.
Malgré les apports nouveaux, la composition
initiale subsiste comme on peut le voir en exami
nant les Photos 31 et 32 b. On y remarque encore
l'encadrement massif, qui caractérisait les brode
ries de la première époque, et qui persiste en
limitant un semis de garnissage plus ou moins
riche. Il est à noter d'ailleurs que la coexistence
des deux genres de broderies sur la même pièce
se retrouve encore de nos jours. Dans des pièces
toutes modernes, dont on regrdte parfois le carac
tère décadent, la brodeuse respecte la composition
primitive en dépit de quelques modifications dans
le détail des fleurons (Voir Photo 33).
Parallèlement à l'évolution du dessin, on
remarque une évolution radicale de la technique
caractérisée par un changement essentiel du point
de broderie. Dans la première période, on utilisait
presque exclusivement le point de feston, point
lourd qui couvrait entièrement la partie à garnir
du tissu de support et contribuait admirablement
à donner aux vieilles broderies de Rabat leur
aspect riche et puissant.
L'introduction des motifs floraux stylisés
coïncide avec l'apparition du point-plume qui
permet de simuler la nervure axiale du pétale par'
la simple disposition des points de part et d'autre
d'une ligne médiane idéale.
L'entre-deux brodé et les fleurons continuent.
pendant un certain temps à être exécutés au point
de feston, mais celui-ci ne tarde pas à être
remplacé par le point-plume ou le passé-plat qui
couvrent autant que l'autre la surface de tissu àgarnir mais qui sont d'une technique plus facile
et plus rapide. Leur emploi généralisé sur toutll
l'étendue de la pièce offre l'avantage de donner
à icelle-ci le même aspect sur les deux faces
il n'y a plus désormais d'endroit et d'envers.
On est alors dans une ère toute nouvelle de
la broderie, celle que les ouvrières appellent rqÇm
;}l-lk;}k : la broderie des ceintures de pantalons.
Il est difficile de donner une date à l'intro
duction de cette broderie au nom si singulier.
L'ancienne, d'origine espagnole, était absente des
ceintures de pantalons. On est alors fondé à croire
que la seconde a été empruntée avec la mode de
broder ces ceintures. Or cette mode est tout
orientale. D'autre part, le point de broderie en
question, celui qu'on appelle « point des ceintures
de pantalons » est particulier à Rabat. On peut
donc supposer que ce point et ce genre de brode
rie ont été apportés, après le XVIIe siècle, époque
de la b;}rl/.li.l/.a, par des Orientaux qui n'ont résidé
qu'à Rabat. On songe alors aux maîtres-charpen
tiers et aux artilleurs que le Sultan de Turquie
envoya à Sidi Mohammed en 1767 et qui furent
installés à Rabat et à Salé (Voir BRUNOT, La mer,p. 167). Ont-ils amené des femmes avec eux qui
ont montré des ceintures brodées à celles de
Rabat qui les ont imitées ? Il faut aussi penser
aux esclaves blanches que l'on faisait venir de
Turquie, c'est-à-dire, à l'époque, des Balkans, pour
peupler les harems marocains. D'autres suppositions sont possibles.
§ 102 - Quatrième période :
La broderie courante.
La tradition primitive une fois rompue sur
ce point d'ordre technique, l'ouvrière se permet
des licences d'abord timides comme celle qui
consiste, par exemple, à tendre en oblique les fils
du passé-plat, puis plus hardies comme celle qui
consiste à utiliser dans le même motif le passé
plat et le point-plume. On arrive, au bout de
l'évolution, en ce qui concerne la technique, à la
,:ÉVOLUTION DE LA BRODERIE A RABAT 63
disparition de tout point autre que le passé-plat.
C'est l'ère du rqëm-m<JtlÇiq : broderie courante,
qu'on appelle encore, on ne sait plus exactement
pourquoi, rqë,m-tanjawi : broderie tangéroise.
En même temps, le goût du moindre effort
fait négliger la structure géométrique et anguleuse
des éléments du décor qui dégénèrent en ovales.
Cette évolution est mise en évidence dans les
Pliotos 5 a et b, 6 a et b, qui représentent les deux
lés d'une même portière. La pièce étant d'impor
tance, l'exécution a dû en être longue, et on voit
nettement, à l'examen du travail, que la patience
'de l'ouvrière a fini par se lasser. Alors que le bas
du rideau est exécuté au point-plume sur un dessin
pur et ferme, les motifs, depuis le milieu jusqu'à
la partie supérieure de la pièce, sont exécutés an
passé-plat et se déforment au détriment de leur
valeur esthétique et de celle de la pièce tout
entière.
L'invasion du passé-plat dans la technique
coïncide avec l'adoption d'une composition déco
rative qui donne au remplissage du champ limité
par la bordure une importance de plus en plus
grande au détriment de cette bordure. Celle-ci
disparaît en fin de compte.
C'est, de toute évidence, l'imitation sans doute
tardive des brocarts européens du XVIIIe siècle
eux-mêmes d'origine orientale - qui est la càuse
de cette évolution. Le champ entouré par la
bordure se remplit d'un quadrillage de rameaux
feuillus formant des losanges qu'on remplit à
leur tour avec des motifs complexes (Voir Pho
tos 32 a et b).
La tendance à enrichir la broderie conduit
l'ouvrière à ne plus laisser apparaître du tissu de
support que des surfaces de plus en plus réduites,
voire à couvrir entièrement l'étoffe. Alors, pour
distinguer les motifs les uns des autres ct leur
donner du relief, la polychromie entre en jeu.
Jeu dangereux quand l'industrie des couleurs
fournit à l'ouvrière une palette de tons d'une
infinie variété. On arrive au kaléidoscope.
§ 103 - Cinquième période:
La broderie d'aujourcrhui.
On arrive ainsi à une broderie moderne qui
n'a plus rien de commun avec celle des premier~
jours.
La pratique généralisée du traçage du décor
au crayon sur le tissu à broder provoque une
altération de ce décor, qui n'est pas voulue mais
qui semble inévitable tant elle est courante. La
maîtresse-brodeuse, celle qui dessine, ne manque
ni de goût ni de compétence, c'est indéniable.
Mais elle agit sans tenir compte des effets du
travail de l'ouvrière. Elle représente sur le tissu
non pas un canevas pour cette ouvrière, mais la
broderie telle qu'elle sera une fois terminée. Or, si
habile que soit l'exécutante, elle est obligée de
tirer quelque peu sur le fil ; de ce fait, elle donne
souvent une surface brodée plus étroite que celle
indiquée au crayon. Il faudrait donc, ou bien que
l'ouvrière débordât le schéma proposé et piquât
régulièrement son aiguille au-delà du trait, ou
bien que la dessinatrice établît, comme nous
l'avons fait dans le recueil de Planches du Tome II,
un tracé plus technique qu'esthétique laissant un
certain jeu de réduction à l'ouvrière.
Quand, par surcroît, la dessinatrice s'inspire
de broderies exécutées pour en tracer de nouvelles,
ou quand elle les copie plus ou moins partielle
ment, sans tenir compte de ce facteur important de
rétrécissement inévitable, elle arrive à composer
des maquettes de plus en plus grêles.
Ainsi s'explique la naissance d'une broderie
filiforme qui ne semble pas déplaire à la clientèle
marocaine. Notre goût préfère la broderie massive
ct somptueuse qui est dans la vraie tradition.
Nous recommandons par conséquent une méthode
qui consiste à retrouver derrière chaque broderie
le desslnexad et pur de sa composition. Ce dessin
n'est .pas celui qu'on obtiendrait en reproduisant
simplement les contours des surfaces déjà brodées;
il est plus large et plus net; c'est un schéma plus
64 I.ES BRODERIES DE, RABA'!'
ferme; Comparer, par .exemple, la Planche 74 et
la Photo 4 qui concernent, le même rideau.
Une autre cause d'altération profonde de la
broderie à Rabat réside dans la surabondance,
sur le marché, de tissus d'importation brillants,
laids et bon marché. Ils plaisent, ils fascinent et
font une concurrence victorieuse aux broderies
du pays. La mode s'en mêlant, chez une popula
tion brusquement placée dans des conditions
économiques confortables, le goût se déprave et
les ouvrières les plus fidèles dans leur cœur aux
vieilles traditions se trouvent obligées de profaner
leur art pour satisfaire une clientèle aussi exigeante
que peu compétente.
Enfin, cette clientèle, très élargie tout d'un
coup, et un grand nombre d'ouvrières, sont d'une
origine ethnique et d'un milieu social tout à fait
étrangers aux Andalous qui ont apporté et déve
loppé la broderie à Rabat. Rien d'étonnant alors
que les tradiTions de cet art leur soient étrangères
à leur tour et qu'elles restent incomprises. La
composition décorative, la structure des motifs, le
coloris, la technique, tout ce qui caractérisait
l'ancienne ef somptueuse broderie de Rabat dispa
raît, dans la population hétérogène de quartiers
surpeuplés, pour laisser la place à une imitation
puérile de l'Europe dans ce qu'elle offre de moins
beau. C'est ainsi qu'un objet d'une laideur aussi
ridicule que la housse d'appareil de T.S.F., repré
sentée par la Photo 52, excite l'admiration et
l'envie des femmes de la rue où il a été brodé (59).
(59) On doit mentionner ici, à côté des broderies donton vient de parler, celle qui a pour nom melwi rbati, comme le point avec lequel on l'exécute. C'est un point natté àfils comptés absolument identique à celui des broderiesmodernes de Salé (Voir Photo 34 a et b). Tout laisse croireque l'on a affaire à une broderie en honneur à Salé etréimportée à Rabat, d'ailleurs peu développée.
§ 104 -L'avenir d~ la broderie
de· Rabat.
Si la partie est compromise, elle n'est pas·
irrémédiablement perdue. Il existe heureusement
encore d'excellentes maîtresses de broderie. Encou
ragées et guidées, elles pourraient former des
apprenties et ressusciter, à l'imitation des relieurs
de Fès, un art qui va disparaître si l'on n'y prend
garde.
Eh outre, le~ écoles officielles de filles obtien
nent des résultats peut-être meilleurs et certaine
ment plus rapides dans la rénovation des broderies
marocaines. Véritables conservatoires des arts
mineurs féminins, elles ont exercé jusqu'ici une
influence, qu'on ne saurait estimer trop haut,.
grâce à la présence de femmes remarquables par
leur talent et leur désintéressement. Les écoles de
filles remettent en honneur les traditions esthéti
ques et les belles techniques des premiers temps
de la broderie ; elles font reprendre aux jeunes
filles le goût et le sens exacts de leur art ; elles
font remonter à cet art la pente dangereuse de
son évolution jusqu'au point où il s'est fourvoyé.
Partant de là, la broderie de Rabat suivra alors
le chemin normal d'une heureuse destinée, àcondition toutefois qu'elle trouve une clientèle
marocaine avertie et soucieuse de conserver un
art charmant et puissamment original même
lorsqu'il imite.
En sens inverse, l'influence de la broderie de Rabatinspire l'ouvrière de Fès qui a confectionné la ceinturereprésentée par la Photo 43. Sa composition très géométriqueemprunte de nombreux éléments à la broderie de Rabat.Le point est un passé-plat, mais il est exécuté à fils comptés,ce qui est une technique de Fès.
APPENDICES
jjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjj
1
CHANSONS DES ATELIERS DE BRODERIE
CHANSON 1
Au couciler du soleil, l'atelier doit arrêter le imuail.
al~mudd;m f-ali-Ii{JJnsa,w-ut-tri//.1a ma-kammalt-Si.l-amqallaq ya-kaflilitJo (60).ba-/.1al'mat-an-nbi,al-muddan ma-yuddan-si.
msallamti ya-/.1bïbti 1talqi/ni nJimsi (bis).ra/.1at sdms-al-sasi,u-tq{Jwwa wliMi.
Le muezzin est sur le minaret au moghreb,Mais ma tâche, je ne l'ai pas finie.L'énervant calicot (60).Grâce au Prophète,Le muezzin n'appellera pas encore à la prière.~
CHANSON II
Ma maîtresse, ô mon amieLaisse-moi partir (bis).Le soleil de l'après-midi se couche (61),Et prend force mon désir de retourner chez moi.
CHANSON III
La maîtresse cilante, lorsque le travail est en retard
laillaküm ya-bnlit 1ra at-trMa ma-tbat,man qallat-sasdi,If,abt al-/Janzlit.
A Dieu ne plaise ô fillettes 1La tâche ne passera pas la nuit (inachevée.)A cause de mon p,eu de chance,J'ai trouvé (comme apprenties) des souillons.
CHANSON IV
Si, au contraire, la tâcile est terminêe, la maîtresse cilante
qaffab 1 qarrab 1 ya-bnat 1 Il approche, il approche, ô fillettes 1ra at-tri//.1a ma-tbat. La tâche ne passera pas la nuit (inachevée.)man ktnt-sasdi, A cause de ma grande chance.fiabt al-/.1adgat. J'ai trouvé des (fillettes) diligentes.
(60) Voir Lexique.(61) Il s'agit du .moment où le soleil s'àpproche de
l'horizon et ressemble a un globe rouge au-dessus de la mer.
68 LES BRODERIES DE RABAT
CHANSON V
lQlla-sJtti ! ya-sJtti !jlibJk-aUah tsiiunni.hüma jüj wqna wiibdi,biirkJt-liliah tJnzel slindi.
Madame Setti, ô Setti ! (62)Allah t'a amenée pour que tu m'aides.Elles sont deux et moi je suis seule,La bénédiction de Dieu vient à moi (63).
CHANSON VI
Uas ! tlas ! ya-sgïli !kif Uas ~i')r-Jn-nbi.
kull-gri,n dzïdnib-J.5-~iilatÇJ slil-;Jll-nbi.
rvIonte ! monte ! mon ouvrage (augmente),Comme est monté le rempart du Prophète (614).Chaque petit point (de broderie) augmente pour
[moi (la bénédiction.)Par la formule : Bénédiction sur le Prophète (65).
Ce petit poème s'adresse au
mblirka ! ya-mblirka !ljlirJt-bïk Jl-mlljika./:!9rmJt-siiisa u-fatma,u-zohra bJnt-Jn-nbi.
CHANSON VII
coussin sur lequel on brode.
Bénie ! ô bénie ! (mon ouvrage, mon coussin).Les anges t'entourentGrâce à Aïcha (66) et Fatma (67),Et Zohra fille du Prophète.
CHANSON VIII
tait. Les fillettes qui chantent Clomparent lu
o enfants! qui errent (désœuvrées) !Maintenant va venir à vous Yamna (68).La croyante, les croyantes.Elle vous prendra et vous remuera,Avec vos petits dés,Et vos petites aiguilles,Et vos petits coussins.Le samedi vous est tombé dessus, ô celles de ce
[côté-là (69),Et un petit paquet de navets (à nous) de ce
[côté-ci (70).
La moitié de l'atelier chante à l'autre moitié qui seautres aux juives du samedi oisives :
a-ulljdi ! hliima !dijba djikum yiimna,u-l~mümna u-I-mümniit.tMzkum u-tri')jkum.b-/:!lïqlitkumu-b-ibiriitkumu,mJilddlitkum.ta/:! salïk éJs-sJbt ya-dljk-Jj-jiha !u-qbï(a d-Jl-lJft ya-hijd-Jj-/ïha 1
z<lrbi ! z<Jrbi ! ya-ididti !kif iZJrbu l-ibirlitJI-mJsriyin f-Jl-kwitJtat,Jl-mJfmiyin f-Jz-zb'ibliil.JNiiliitÇJ sul-Jn-nbi 1 (bis)
CHANSON IX
Hâte-toi ! Hâte-toi ! Petite main !Comme se hâtent les petites aiguillesAchetées dans les petits (paquets de) papier,Que l'on jette aux petites ordures.Bénédiction sur le Prophète ! (bis)
(62) Sainte évoquée fréquemment par les femmes, bienqu'elle n'ait pas son tombeau à Rabat. Voir BIlL, Une épitaphe tlemcénienne du XV, siècle, dans la Revue africaine, 1935,p. 249.
(63) Ce qui signifie: par la bénédiction de Dieu, je feraià moi seule le travail de deux personnes.
(64) Pour le populaire, il s'agit des remparts de la villede Médine où le Prophète est enterré.
(65) QU8Ild on est au plus fort d'un traTail, ou vers la11n, ou dit es-salato al-en-nbi : bénédiction sur le Prophète,
pour que ce traTaii devienne plus facile grâce au Prophète.
(66) Aicha, dernière femme du Prophète.
(67) Fatma, appelée aussi Zohra est la flile du Prophèteet de LaUa Khadidja, première femme de Mohammed. Ellefut la mère de Hassan et Hosséin.
(68) La mère du Prophète.
(69) Vous êtes oisives comme des Juives le samedi.
(70) Nous sommes laborieuses. Le navet est blanc, IHIs"feuilles sont vertes, couleurs de bon augure.
msall;Jlnti santri}ja,rlij;llha ,~9!tlin, (bis)rlih lij.b<Js qa{tlinb-<Js-s{ïfa u-l-qiJtlin.
CHANSONS DES ATELIERS DE BRODERIE
CHANSON X
Ma maîtresse est une santroja (71),Son mari est sultan, (bis)Il porte un cafetanGarni de tresse et de cordonnet.
69
z;nbu ! zarbu ! ya-ididütiimrnlikum 1].Qriya.i<Jddzha l-<Js-slilümau-l...makka 3i'ii~IYa.
CHANSON XI
Hâtez-vous ! Hfltez-vous ! Mes petites mainsVotre mère c'est Horiya (72).Elle l'emporte (votre travail) à Salama (73)Et à La Mekke (chère comme) mes yeux.
(71) Vieux mot dont on a oublié le sens concret. Unehrodede particulièrement délicate et fine est vantée sous ct>nom. On compare ici la brodeuse à cette chose parfaite.
(72) Une hourie, ange du Paradis.(73) Une des portes de La Melle.
II
LEXIQUE DES TERMES ARABES
Il a semblé utile, en terminant cet ouvrage,de rassembler le vocabulaire technique des brodeuses en un lexique qui contient tous les vocablesarabes relevés dans le tome 1 et dans le tome IIde l'ouvrage.
L'utilité de ce travail est double : d'une part,il permet de parler métier avec les ouvrières,d'autre part, il renseigne sur leurs conceptionsartistiques.
Sans doute, le le:dque des brodeuses présentet-il les caractères communs à tous les vocabulairestechniques dont le plus frappant est l'oubli absoludu sens étymologique des termes spéciaux : uneb;mt n'est plus « une fille », une f!masïya peutavoir plus de cinq branches, une 1).liska n'a riende commun avec un chandelier.
Mais il offre encore des aspects assez particuliers qui en font l'intérêt : il manque, dans unecertaine mesure, de la fixité et de l'unité qu'onremarque dans les vocabulaires techniques desmétiers masculins.
Ainsi, certains termes que M. Prosper RICARDa relevés en 1913 ont disparu, au moins danscertains ateliers, ou sont peu employés. Ceux quifigurent ici ne seront peut-être plus connus dansquelques lustres.
Ainsi encore, chaque maîtresse-ouvrière, si elleadmet un fond commun de vocabulaire technique,se permet de concrétiser dans des expressionsoriginales les comparaisons qu'elle peut faireentre les motifs qu'elles reproduit et les objets quil'entourent,
Lorsqu'on en vient à établir le vocabulaireexplicatif des vieilles broderies, on se trouve enprésence d'un flottement pénible pour l'enquêteur,et pour la brodeuse tout autant. C'est qu'il s'agitalors de décrire non pas ce que font les ouvrièrestous les jours, mais d'interpréter des compositionsoubliées depuis longtemps, qui ne leur sont pasfamilières et qu'elles ne songent pas à imiter touten les admirant. Rien d'étonnant à cela.
Ces caractères spéciaux les plus frappantss'expliquent par le cloisonnement par ateliers del'activité artisanale des femmes. Les ouvrièresrestent chez elles et se rencontrent peu souventavec d'autres ouvrières. L'atelier est rigoureusement familial. Chacune d'elles est donc libre, sanss'en douter et sans vouloir en abuser, de donneraux motifs qu'elle brode les nOInS qui lui paraissent les plus conformes soit à la tradition, soit àsa logique personnelle.
Ces appellations, comme on s'en doute, sontfortement colorees par la nature des pensées féminines. Les ouvrières, recluses selon les traditionsmusulmanes, songent naturellement et uniquementaux choses du ménage, à la cuisine, à la toilette,à la maison. Aussi voit-on de nombreux termestechniques qui ne sont que des noms de gâteaux,de bijoux, d'ornements architecturaux. Il fautajouter d'ailleurs que ces noms sont ceux d'objetsagréables et beaux.
Ainsi se révèle dans le lexique des brodeuses,délicatement puéril, sans rigidité excessive, mêmeun peu flou, la pensée des femmes et leur modede vie.
NOTA. - Les nombres précédés du signe § reportent aux paragraphes du Tome 1. Les nombresfractionnaires reportent au Tome Il : le numérateur indiquant le numéro de la planche et lesdénominateurs ceux des figures.
~!ibra, plur. ibari : aiguille. Voir MARÇAIS, Tanger.
p.502.ibra d~<Jf-rqçm : aiguille à broder. § 34.ibm d-bQ-m<Jsf(1). : grosse aiguille à broder les
rideaux, dont le chas est long en forme de fente.Voir Cr'
ibm d-bQ-nQq(a : aiguille à broder moyenne àchas rond, Voir ..Id; .
ibmau{nha md<Jhhba : aiguille à chas doré.ka/R( d-<Jl-ibari : paquet d'aiguilles. Voir .65'.S<Jri<J1 l-ibra : enfiler une aiguille. Voir jJ ...Le matin, jusq~'à midi, l'aiguille est a~;e~ée
m<Jfta1).a. § 34. VOIr ~.
72 LES BRODERIES DE RABAT
0)\ud;m, plur. udnïn : petits ornements extérieurs
d'un gros motif. 25/122. - 45/205. - 53/224.De üdan : oreille.
))izar, plur. izl)r : rideau de porte, portière. § 13.
izar mtazzar : rideau garni d'une simple bandedé~orative à sa partie inférieure. §§ 13 et 65.Le mot mtazzar, participe actif du verbe ttazzarsignifie : qui a ceint un pagne autour de ses rein'>au bain manre et n'a d'autre vêtement. li est de lamême racine que izar.
izar b-at-twlil113 : rideau dont le décor comporte,en plus de la bande inférieure, des montants enforme de minaret. § 65. Voir F'
izar marSüs : rideau dont le décor comporte, enplus .de ia bande inférieure et des montants,un semis de motifs qui occupe toute la surface
du tissu. § 65. Voir J).izar d-as-sma : rideau tendu horizontalement
sous ie plafond. § 13.Le mot izar désigne encore les draps de lit et
la pièce d'étoffe de coton dont s'envelopp.ent lesfemmes de condition moyenne pour sortIr horsde la maison.
0 uL-!
bq.nqni (couleur) : jaune banane. § 83.Mot de formation récente tiré du français
« banane » passé dans le dialecte sous la formebq.nljn. Le nom arabe de ce fruit, müz, n'est plusconnu au Maroc qu'à Tétouan.
baJJnl)q. Voir~.
l.\--!
al-bdu : petite fête intime dans l'atelier à l'occasion de la mise en train d'un ouvrage par uneapprentie. § 9.
De bdü : commencement. Masd. de bda f. a.« commencer, se mettre à ».
J..\-.t(J:J.rïr) mbaddal : soie de couleurs différentes.
Se dit lorsqu'on emploie un coloris varié dansl'exécution des motifs.
Dans le langage courant, mbaddal signifie « quiest changé, remplacé par autre chose », ou« qui est alterné ».
)..L-!Voir ci-dessus 1..À.!.
~brljya : bleu marine très foncé. § 83.
~..H
blirad : froid. Se dit d'une broderie dont lescouieurs fanées ont perdu tout éclat. § 28. Contrai·re : na~l1J:J.. Voir~ .
Le sens habituel du mot est « froid », et de là,« sans intérêt, sans lustre » et « manquant d'animation. »
J'y--!barr/.ar/.a : genre de broderie, le plus ancien. On
dit rq(fm-barr/.ar/.a : broderie genre ancien ; güzad-Uarr/.lir/.a : entre-deux genre ancien ; JJaddïya-dbarr/.ar/.a : coussin en broderie ancienne, etc... VoirPlanches 21, 22, 24, 25, 26, 36 et 61.
D'après RICARD, Bl'oderies, p. 21, ce mot a désigné ce que nous appelons « fleuron » dans notreétude, gros motif répété en ligne sur l'entre-deux.§ 59. Quelques brodeuses seulement, appeléesà reproduire les pièces anciennes, conserventaujourd'hui ce vocable avec le sens de « fleuron ».Pour les autres, ce motif s'appelle saira : arbre.Voir)~ .
Cependant, le diminutif brcr/.ift/.a n'est pas effacédu vocabulaire technique avec le sens de « fleuronde style ancien. » §§ 50, 51, 59, 60, 69, 99, 100.
Le mot reproduit l'espagnol bordada : brodée(au fém.), étymologiquement : bordée.
..L.irbafl1lita : noir à reflets bruns. § 83.Épithète invariable qui vient du substantif
b!:Jrnata désignant un drap noir. C'est l'espagnol« bruneta » qui, aujourd'hui vieilli, avait le mêmesens. Voir COLIN, Btymologies, p. 59, § 7, dansHespéris 1926, 1er Trim.
.!~bakïr : fil de coton perlé, rouge ou vert, avec
lequel les fillettes apprennent à broder. §§ 8 et 33.Ce mot apparaît en arabe hispaniqu.e avec le
sens de « précoce ». Voir Dozy, I, p. 106.
~
ballota, plur. bllilat, dim. bliflta, coUeet. balll)t :pétale' stylisé qui, en série, sert principalement àgarnir des galons droits ou courbes, à l'extérieur.
LEXIQUE DES TERMESARi\BES 73
Cet élément n'apparaît que dans la broderie moderne. Voir 111. ~ 113, 5, 6, 7, 8. 2/17 à 24. - 3/26, 27, 29. - 5/29. - 8/32. 9/36, 39, 42, 46. - 11/54, 55, 64, 69. - 12170,71. -- 13172. -- 16/80. - 18/90 à 93. - 19/99. 27/133, 134. - 32/139 à 144. - 36/166. - 37/168"170,171. - 511221,222. -- 66/237.
Comparer {iir3 et i).iim:j. Voir t.l et~. _Sens habituel : gland du chêne. De la : chene,
bourgeon, pompon du capuchon, pendentif deboucle d'oreille, globe de l'œil, etc ... Sur ce motd'origine romane, voir SIMONET, p. 415.
~.\_~
b;)I/t, plur. bnat, dim. bnïta : trèfle, petit motifde broderie moderne composé de trois pétalesstylisés avec ou sans pédoncule commun. §§ 56,57. Voir aussi 112, 3, 4, 6, 13, 14, 15, 16. - 2117à 24. - 3/21Ï, - 4/28. - 6/30. - 9/36, 38, 40, 44,45,47. - 10/48. - 13177. - 17/83, 84. - 18/92,95, 97. - 19/98. - 28/135. - 30/137. - 37/168à 171. - 38/172 à 177. - 39/178, 180. - 40/184.411187 à 190. - 42/192 à 195. - 43/196. - 49/215.- 69/240.
bI/lia {i)q bnïta : série de trèfles superposés.b;)IZi m;)q/i)ba : trèfle renversé, c'est-à-dire dont
la pointe est dirigée vers la partie inférieure dumotif. Voir ~h .
Sens habituel : fille, fillette. Le diminutif bnïiaest une forme andalouse. Voir MARÇAIS, Tanger,p. 228.
~-~-~
büh;Ji : terne, mat. Contraire: na.5iii).. Voir ~ .Se dit d'une broderie aux couleurs trop claires etfades.
b,/lhtQn : motif central de décor d'un napperon.501220.
Ce nom a été d'abord donné à une étoffed'importation décorée. Nous n'en voyons pasl'origine.
_uL
tQj : ornement qui couronne l'extrémité d'unmotif décoratif. 20/107.
Sens habituel : diadème.
~--..-j'
iii!Jtïya, plur. tii~ltïyüt : chemise de femme, àouverture pectorale. § 31.
Littéralement : (chemise) de dessous. L'antonyme {i)qçya désigne une blouse d'homme. Lachemise d'homme, à ouverture scapulaire, se ditiSamïr.
..s~'trïya : lustre, est le nom donné à tout motif dont
quelques éléments latéraux retombent à la façondes cristaux des lustres vénitiens. Voir 2/25. _.3/27. - 60/231.
-h~'
is;)kla(ç (couleur) : brun chocolat. § 83.De tf;;;klat : chocolat, venu de l'espagnol : cho
colate. On entend aussi stlk{at.
d-i'i;)kka, plur. tk;)k : ceinture de pantalon, en
étoffe, glissant dans une coulisse. §§ 8,19,39 et 101.Sur ce mot, voir BRUNOT, Vêtements, p. 95.rqïjm-;)t-tk;)k : genre de broderie, caractérisé
par l'emploi du point-plume, dont on orna d'abordles extrémités des ceintures de pantalon. § 39.
/" ..-..s-===_JmtJklâ, fém. mbkkya : penché, incliné. Se dit
de tout motif dont l'axe principal est incliné(de 45° habituellement) sur celui de la pièce oucelui de la bande décorative qui le supporte. §§ 54,57 et 59.
3ask;)r midklâ : ligne d'ornements floraux inclinés surmontant un entre-deux.
kii3ba mtJkkya : motif en crosse incliné.Voir 2/21 et 22. - 17/83 et 84. - 18/93 et 97.
_ 211110. - 2i/117. - 33/146, 148 et 140. 47/211 et 212.
Sens habituel : accoudé sur le côté, penché,accoté.
J-~-j'
iJ/leqa, plur. bUçqiit : marquette, pièce d'étoffesur i;quelle l'apprentie relève un certain nombrede motifs qui lui serviront de modèles. § 8.
Ce mot est à rapprocher de tS;)l/üq : chiffon,signalé par LERCHUNDI, mais inconnu à Rabat, àFès et à Tanger. Le complexe ts est devenu normalement ts dans le langage féminin de Rabat, cequi représente la prononciation habituelle de 0 .Voir MARÇAIS, Tanger, p. 257.
s.-.(1}.rïr) jdïd : (soie) artificielle. § 32. Synonymes,
voir~ et l"""'""LittÙaiement': soie nouvelle.
LES BRODERŒS DE RABAT
o.J-"?'"griina : motif de remplissage entre deux bandes
parallèles obliques. § 61. C'est un carreau rolimadéformé par l'obliquité des bandes.
Ce mot désigne habituellement la « grenouille ~
à la place de jrana connu mais peu employé. Ondit cependant m<Jrzijya d-<Jj-jrlina pour désignerpar la marque de fabrique - une sorte de cotonnade connue sous ce nom dans tout le Maroc.
~
juaba, plur. jaab : segment de roseau sur lequelon enroule le fil de soie et qui sert ainsi de bobine.§ 32.
Sens habituel : tube, tuyau.
jlijil, toujours au pluriel : partie inférieure d'unrideau ou d'un napperon, au-dessous de l'entredeux. §§ 65 et 69. Voir 2/18. - 8/32 et 34. -11/54. - 19/98. - 34/150. - 72/243. - 74/245.
Sens habituel : pan de vêtements. Sur ce mot,voir MARÇAIS, Tanger, p. 251.
gijl<JS : 1° droit, en parlant d'un motif. S'opposeà mt<Jkki : penché ;
2° « posé sur » en parlant d'un motif qui ensurmonte un autre. Voir 118. - 2/22. - 28/135.
Sens habituel : assis. Sur ce mot, voir MARÇAIS,
Tanger, p. 443.
(dMr)-<Jj-jm<J1 : gris chamois. § 83.Littéralement : dos de chameau.ai1nq-<Jj-jm,al. Voir~ .
~
j<Jnb, plur. jnijb : 1° extrémité brodée d'un cous·sin ou d'un napperon. On dit : ID'<Jndïl d-<Jj-jnijbou m<Jndïl alil-aj-jnijb pour désigner un napperonqui n'est brodé qu'aux extrémités, le reste du tissurestant nu. Contraire : .marsüs. §§ 16 et 69 ;
2° jnijb d-l-izar : bande de broderie légère quisuit la lisière verticale du rideau. § 58 ;
3° Côté d'un chevron, on a : janb ai1la-fardi,côté d'un chevron simple '; janb mzauj, côté double d'un chevron ; ja·nb ailla-s<Jbaa, côté à septéléments. Voir 24/117. - 27/132. - 34/152 et 153.
Sur ce mot, voir MARÇAIS, Tanger, p. 253.
~jna/J., plur. jan/J.fn et jnijwQ./J. : motif de broderie
en forme de crosse disposé latéralement. § 53.Littéralement : aile.
~
jQhra1mQrjana : bordure de lisière au point defeston ou au point de boutonnière très serré. § 47.Voir DILLMONT, p. 18, fig. 37.. Voir ci-dessous~ .et ~.r' Voir 32/141 et 55/226.
Littéralement : perle blanche, grain de corail,début d'une répétition indéfinie de ces termesindiquant l'alternance des couleurs. L'expressions'est maintenue même si la bordure est d'une seulecouleur.
j~
güza, plur. güzli.t et gwazi : 1° entre-deux,élément essentiel des compositions décoratives debroderie. §§ 49,50,56 et 57. Voir 30/137. - 311138.- 32/142 à 45/206 ;
2° motif ovale (Voir 13/73), dans lequell'ouvrière voit une tabatière du genre appelé güza (faited'une noix de coco ; persan güz : noix).
~
qi1lb-al-/J.jur (couleur) : violet mauve. § 83. C'estla couleur de l'améthyste trouvée au cœur qillb deson obus /J.ji1r.
/J.rïr : soie. § 32.
/J.rïr mbaddal : soie de couleurs différentes.Voir J~ .
/J.rïr ~abra : soie artificielle. Voir.r .
/J.rïr jdïd : soie artificielle. Voir ~ .
1}.rïr l-iqtiliad : soie artificielle. Voir ~;.
1}.rïr sijib : soie artificielle. Voir~ .
1}.rïr mkarns : soie naturelle grossière. VoirJ'.f./J.rïr sqiffi : soie naturelle de qualité moyenne.
Voir~.
/J.rïr hindi : soie naturelle de qualité supérieure.Voir w'W> •
/J.rïr al-Mmm : soie grège. Voir \:>./J.arrar : soyer. Comp. 1}.i1rrijr, gargotier qui fait
la soupe dite /J.arïra.
LEXIQUE DES TERMES ARABES 75
'-:-'J-'>
mdiJrab ; composition décorative utilisée pourle garnissage du napperon entre les deux bandesbrodées des extrémités. Ce sont des sortes delosanges allongés, (alia (Voir U"'l1), limités pardes rameaux feuillus et encadrant de gros motifsarborescents.
Sens habituel : niche de l'imam à la mosquée.
-:t.r-tliiJrïf : décor fait de bandes parallèles et obli
ques. Voir RICARD, Broderies, P. 22..miJarrdf : en oblique ; ÛQrza ,miJlirrfa : point
oblique, en biais. Contraire: msaggad. §§ 38 et 50.b';}lliJta mM l'l'fa : pétale oblique. Voir 32/143.
De iJorf : biais, oblique.
ueJ.r-Mrqolia : petit motif (Voir 11158 et 12/68), qui
fait penser, d'après les ouvrières, au dessin dumême nom dont les femmes ornent quelquefoisleur menton avec le fard noir dit iJlirqoli.
Sur ce mot, voir Dozy, Supplément, J, p. 274.
iJlisbi, plur. iJlisbiyïn : qui est simple dans samise, bien qu'il ait les moyens de se vêtir luxueusement. De là : qui se refuse à suivre la mode etreste fidèle aux traditions. § 12.
~
(talia slila) iJaska : se dit d'un motif de garnissage composé d'une sorte de losange fait derameaux feuillus circonscrivant un motif arborescent. §§ 61, 62 et 69. Voir 311138. - 49/218 et 219.Voir Jl1 .
Sens habituel de iJliska : chandelier.
,-11 1 _
~Ililqa, plur. iJlaqç : dé à coudre, à broder. § 35.Celui des brodeuses a un fond, tandis que celuides tailleurs est un anneau. Tous deux portent lemême nom. Sur ce mot, voir MARÇAIS, Tanger,
p.267.
Voir yb- :J~ .\~
slinq-~mlj.m (couleur) : violet ardoise. § 83.Littéralement : cou (gorge) de pigeon. Cette
expression est connue dans tout le Maroc. A Tanger et Fès, on dit aussiiJm~mi : couleur de pigeon.
..r--liiJmlir : rouge, terme générique. § 83.
i../~
iJlimlia, plur. iJlimliiït, coll. iJlimli, dim. hmïsa :pétale stylisé placé en série pour garnir de~ gaionsdroits ou courbes. §§ 54,57,62. Voiril et rrCe pétale stylisé est pour la brodeuse lm « poi~chiche » (sens habituel de 1Jlimli,a). Voir MARÇAIS,Tanger, p. 268. Voir 111, 6 et 12. - 5/29. - 9/45et 46. - 10/48 et 49. - 11/64. - 12/69. - 13/72et 73. - 16/80. - 171861. - 29/136. - 33/147. 34/151. - 38/172. - 39/179 et 181. - 40/186.
iJamliç (couleur) : vieux rose. § 83.Littéralement: couleur de pois chiche.
v--lzanna : henné (lawsonia inermis). § 81.C'est le classique ~l...:..>- .mlzlinni (couleur) : orangé roux. § 83.Littéralement : teint au henné.
J.r~
iJiil, fut a : passer, en parlant d'une couleur. § 79.Synonyme plus employé: ksaf. Voir~.
Sur Nil, voir MARÇAIS, Tanger, p. 272.
~j'l-;~
lzayati : genre de cotonnade fine, sorte de mousseline, dont on se sert particulièrement pourconfectionner les turbans et les tuniques légèresrecouvrant les cafetans. § 31. Le mot est connudans tout le Maroc.
r-'>
Jwborç : ocre jaune. § 83. De .!Jabor « sureau »et -aus~i « genêt d'Espagne à fleurs jaunes. » VoirDozy, Supplément, Il, p. 348.
~.!Jabm, plur. .!Jwata.ID : 1 0 motif central de peti
tes dimensions, en volute, au milieu d'un fleuronsajra et de couleur différente ;
2 0 motif carré ou rond, de dimensions variablesservant aU développement du décor. Voir 2/24. ~19/102. - 20/107, 108 et 109. - 28/135. - 39/179._ 40/186.
Sens habituel : anneau, bague.
76 LES 'BRODERIES DE RABAT
.i..>
l)Jddïya, plur. bdiidi, .dim. bdïdlya .. coussinqu'on dispose sur les divans. § 14.
mlpdda, plur. mbliid : oreiller. § 14.mlpdda d-dt-tdmsq.k : coussin sur lequell'ouvriè
re fixe l'ouvrage à broder. § 36. Voir :.:J-,. .Sur ces mots, voir §§ 3, 8, 13, 31, 36, 58, et
consultèr MARÇAIS, Tanger, p. 276.
~-'~/>
Ipfsüfi (couleur) : gros vert. § 83.Littéralement : qui tient du cardon {lJfsüf.
j->lpzzi (couleur) : vert mousse. § 83.Littéralement: qui tient de la mousse {Inz.
v..o.r>'(g9fza b-Jl) b9Na : (point de) feston. § 40.Littéralement : point à boucle. Le mot {lQNa
désigne plusieurs objets en forme d'anneau, telsque boucles d'oreilles, heurtoir de porte.... VoirMARÇAIS, Tanger, p. 278.
1Jrï~ât : points de bonne vierge qui entourentun motif arrondi. Voir 20/104. C'est le diminutifplur. de .(].9f~a.
~
.(].i'iHa, plur. {I~J.~, dim. .(].~~~a : petit élément dequatre, six ou huit branches en étoile qui se placetoujours au milieu d'une composition, comme unevasque .(].aHa se place au centre d'une cour oud'un parterre. §§ 56, 57, 61 et 69.
On dit aussi nJH-.(].i'iHa : demi-vasque, lorsquele motif est coupé par une ligne selon l'un desdeux axes perpendiculaires.
La .(].liHa se trouve dans un très grand nombrede compositions. Voir 118 et 13. - 2/19 et 25. 3/27. - 8/34. - 9/37 et 41. - 10/51. - 11/55,56, 59 et 62. - 12/66 à 71. - 13172 à 77. - 14178.- 15/79. - 18/91. - 19/101. - 27/132 et 133. 28/135. - 291136. - 311138. - 34/151. - 361/164à 166. - 38/174 à 177. - 39/180 et 181. - 40/182à 186. - 411187. - 42/192 à 194. - 43/197 et198. - 44/200. - 45/203 à 205. - 50/220.
~J'(]'ctJf : vert, terme générique. § 83. Voir MARÇAIS,
Tanger, p. 281.
,-.....(1;lrïr) Jl-Mmm : (soie) grège. §79.Le mot .(].amm qualifie un produit brut, non
travaillé, non raffiné : soie, étoffe, sucre, cire. Surce mot, voir MARÇAIS, Tanger, p. 285.
~...:>
lJmiisïya, plur. 1,)miisiyiil : quintuple, petit motifformé de cinq pétales groupés sur un seul axe.§§ 56 et 57.
.(].miisïya mziiuja : quintuple double. Voir Z; j j .De .(].iimsa : cinq. Ce nom est donné aUSSI à un
fusil ou à un revolver à cinq coups, à une flûte deroseau longue de cinq entre-nœuds, à la distancecouverte par un chameau en cinq jours, etc... On aoublié le sens étymologique du nom pour ne pluspenser qu'au motif composé d'un petit nombre depétales disposés selon un seul axe ; on parle ainside 1)miisïya sbaaïya, à sept pétales.
Voir 115, 6 et 7. - 2/17, 21, 22, 23 et 25. - 4/28.- 6/30. - 9/43 à 47. - 10/48. -12/71. - 13176et 77. - 14178. - 16/80. - 18/94. - 281135. 32/142. - 34/151. - 38/172 et 173. - 401185.411188 et 190. - 42/193. - 66/237.
J-~\_:>
1)unjii{ (prononciation tangéroise de 1)JnjJ{ :::::poignard) : désigne une étoffe d'importation,venue sans dOllte par Tanger, brochée, dont lesmotifs essentiels coupent le tissu en biais parallèles et se recourbent parfois à leur extrémité. Onappelle 1)unjii{ le décor de broderie imitant cettedisposition. Voir 42/192.
Ramenant le mot à sa prononciation de Rabaton a eu .(].JnjJf pour désigner des motifs qui serecourbent par le bas. Voir 20/105 et 107. 35/155.
0-·w...mJ.(].ni)q, plur. .m1)iinJq : pointe faite d'un carrê
de toile plié selon une diagonale, que l'on placesur la nuque ou sur la tête du nouveau-né. § 29.
A Fès et Tanger, en Algérie, c'est babni)q qu'onprononce. Voir Dozy, Supplément, J, p. 55.
Mt, plur. 1)yi)t : fil, terme générique. § 32.
(JZ{Jq) 1)ïli (couleur) : bleu violet. § 83.De 1)ïli : giroflée, violier.
LEXIQUE DES TERMES ARABES 77
I,;!-! ,)
dJbbuna, plur. dbubJll, coIlecL dJbbun, dirn.dbïbna : mouche, nom donné à de petits motifsfloraux plus ou moins stylisés dont on parsèm~
le champ du tissu à l'intérieur de la bordure brodée. § 56. Voir 11157. - 17/81. - 19/100. 221111. -- 53/224. - 72/243.
(,}->,)
dulllluni ou dubbull-tuba (couleur) : chùtainfoncé, couleur de tabac. § 83. Au Maroc dulllIundésigne la fumée en général, et non le tabac. - -
~),)
(IJl'biiz : nom donné à une serIe d'élémentssemblables entourant un motif circulaire. Voir19/101, 102 et 103.
Sens habituel : balustrade. Sur ce mot, voirDozy, Supplément, J, p. 430.
lr~)
drZlla, plur. d[ij.ill : robe de dessus légère queles femmes mettent sur leur cafetan. §§ 24 et 76.Celle de la mariée, le jour des noces, est garniequelquefois d'un plastron brodé.. Tanger dit d[lll. Sous ces deux aspects, le motse retrouve dans les villes marocaines avec lemême sens. Voir '--'.;'..~ et ,~.. .,/
nlllJlli : qui pend, qui est suspendu. Se dit desmotifs légers qui semblent suspendus au motifprincipal sur les bords. Voir 3/26 et 27.
Voir \.;........ t- .
(iQr, plur. (iwur : élément de décor en forme dedemi-cercle (parïois en angle droit, voir 29/136,)supportant des pétales et circonscrivant d'autreséléments. § 53. Voir 7/31. - 8/32. - 9/45 et 46.10/48 et 52. - 11154 et 55. - 12/69 et 71.13172 et 77. - 15179. - 19/98. - 29/136. 37/171. - 38/173. - 39/181.
Sens habituel : rond, cercle.(/lir-mBallma : atelier de brodeuse. § 4. Littéra
lement : maison de maîtresse. On ne met pasl'article au second terme du complexe ; de mêmeque dans l'expression Qur-[<Jbbura : atelier depoterie (exactement : atelier de potiers) ; parcontre, on dit (lur-<Jd-db<Jg : tannerie.
tJQwifr : bordure légère des petites pièces. Voir321144.
(tufia) mQQura : motif en forme de médailloncirculaire. § 61. Voir (j:u, .
Sur les mots de cette racine, voir MARÇAIS,Tange!', p. 365.
....?~~.,)
dzdi (couleur) : rouge bordeaux. § 83. Ce motétait andalou avec le sens de « couleur de mûre ».Voir Dozy, Supplément, J, p. 481 et SIMONET,p. 175.
dJlzbi : doré. § 83. De dll<Jb : or, métal.
il.-~' ..)
rU!}. plur. ryi}!} 1 0 élément terminal de l'axed'un fleuron. §§ 51 et 59 ;
2° motif floral qui surmonte légèrement unmontant au-dessus de la qQbba. § 58 et 59.
Sens habituel : tête, sommet. Voir MARÇAIS,Tangel', p. 304. Voir 1110 et 14. - 2119. - 3/26.-- 7/31. - 211109. -- 22/111. - 24/118 et 119.-23/124. -- 2G/127. - 29/13G. - 30/137. - 311138.- 511221.
rçbps(J, sans plur. courant, dim. l'wzbsl) : mouchoir de tête du nouveau-né, maintenu par lebandeau sJddij.da. § 27.
De l'espagnol « rebozo » : partie du manteanqui cache le visage quand on en relève les panssur l'épaule. A rapprocher aussi de l'espagnoll'ebociiÎo, sorte de mantille que les femmesportaient en quelques provinces pour se couvrirla bouche et le menton.
Ce mot n'est employé que dans les vieillesfamilles andalouses de Rabat. Les arabes immigrésne le connaissent qu'au diminutif pluriel: l'wzb.5iit,désignant vaguement les pièces de layette.
1.....;...~~ i
./
nwrb<Jt, plur. l1ll'ub<Jt : jarretière, longue pleced'étoffe rectangulaire dont les extrémités sontbrodées. Elle sert à maintenir les houseaux detoile qui couvrent les jambes des femmes. § 20.
De rbJ( : attacher.
~..)
rbïj3-Jj-j<Jnna (couleur) : vert-herbe du Paradis.e'estcà-dire vert tendre à reflets jaunâtres. § 83.
mru&a : carrée, est le nom donné à tout motifcarré qui peut d'ailleurs porter d'autres noms.Voir 3/27. - 11156.
78 LES BRODERIES DE RABAT
~->-,
\ -'
r0ama; plu~. rbamat : carreau de marbre ;m~hf. decorahf complexe de la catégorie desm~daIllons. §§ 61 et 69. On l'appelle aussi 1i<mf/f;Jq ;VOl: 0':'';'"'' et aussi c..'.r'7"" Orana.
C'est le terme habituel pour désigner les « carreaux de marbre » des carrelages des belles maisons. Voir 12/69 et 71. - 13/72, 76 et 77. -14178.-'-- 15/79. - 31/138. - 39/180. - 40/185. 411188. - 48/214. - 53/224.
V)fdssq.n : ensemble des motifs assez gros qui
garnissent un tissu à l'intérieur de la bordurebrodée. Voir 2/22.
mJrSüS : parsemé, garni d'un semis de motifs.izar mJfsÜs : portière parsemée. §§ 13 et 65 ; voir) il.
mJudïl mJl'SUS : napperon parsemé. § 16'.Voir J:;... .
Contraire : 3i1l-<Jj-jnijb ; voir ~.mJrsüs b-Jr-f<Jssijn : garni de motifs assez gros.
§ 69.mJrSÜS b-Jd-d<Jbbiin : parsemé de petits motifs.
§ 69. Voir d,) .Dans le langage courant, r<Jss signifie : arroser,
asperger, et m<Jfsüs : arrosé, aspergé.
d'Espagne, on relève rqJ.m avec le sens de « coudre », et f<Jqqam avec celui de « brodeur ». VoirDozy, Supplément, I. p. 549. Dans le Sud-algérien,le l'aggam est l'homme qui dirige le travail destisseuses de tapis.
C'-,~)
mkna : angle, dans un décor de broderie. saira{-rukna : fleuron d'angle dans la composition d'uncoussin. Voir 17/85 et 86. - 25/122.
rkïna, dim. du précédent : motif d'angle desmouchoirs-pochettes. Voir 18/94.
Sens habituel : angle intérieur, angle rentrant.Voir MARÇAIS, Tanger, p. 314.
f.:}-")
rummwlin grenade (collect.) . qSQr-ar-rum-mwlin : écorces de grenade, malicorium. § 81.Sur qSQr : écorce, voir MARÇAIS, Tanger, P. 428.
~)fanga ou sJbka d-<J!'-ranga : dentelle à l'aiguille
dont on orne le col des chemises, les manchesles jambes des pantalons. § 21. On en fait aussides entre-deux pour la lingerie. Cette dentelle estparticulière à Rabat et provient probablement del'époqu~ où les Maures étaient à Ronda, en Espagne. VOIr BRUNOT, Rabat, pp. 181 et 182 et RICARDBmdel'ies, p. 130. "
'-:-'jz,bïbi (couleur) : violet franc. §§ 8 et 83.Littéralement : couleur de raisin sec zbUJ'
(collect.). L'adjectif zbïbi était andalou. Voir Dozy.Supplément, J, p. 578.
J~)riyijla : ornement de broderie en forme de
disque rappelant le riyiJ-l ou pièce de cinq francsen argent. Il apparaît dans la garniture du plastron de la tunique féminine dfîna. § 76.
'-:-'))
!,Qba : motif décoratif consistant en une senede trèfles imbriqués. Ce nom est aussi celui d'uneétoffe d'importation décorée, comportant le motifen question qui a été copié par les brodeuses.Voir 5/29. - 311138. - 41/198. - 49/219.
l'Jfda, plur. nfdijt : élément décoratif tout enlongueur qui, en s'assemblant à d'autres, r<Jfda,forme un axe de motif. Voir 2/24.
De rfed : porteir, lever.
~)rqJ.m : broder une étoffe. Broder du cuir se dit:
(rJz.rq~m : broderie, genre de broderie.rq~m-bJtf/aga : ancienne broderie au point de
feston. Voir ,-p..r. . ~
rq~m-at-tkak : broderie au point-plume. VoirJ.1;.rq~m mJ(IQq ou (anjawi : broderie courante au
passé-plat. Voir~ .rq~m as-sabba : broderie qu'on fait exécuter
aux jeunes filles. Voir 3/26.fq~m d-<Jf-!,oba : genre de broderie. Voir 5/29.rJqqama : brodeuse et, particulièrement, bro
deuse qui dessine, kt<Jb, le dessin préalable. § 3.Ce n'est qu'à Rabat que « broder» se dit rq<Jim,
ce qui se trouve en classique. Dans les autresvilles du Maroc, on emploie (f<JZ. Dans l'arabe
ZJbdi (couleur)§ 83.
J-!jjaune du beurre frais, zabda.
y,EXIQUE DES TERMES ARABES 79
Voir J..ir .
l . ,0-:-'))
Z<Jfd1Jlin : sorte de satinette de coton très solide,blanche, quelquefois crème, employée pour la~onfection des coussins et des traversins. § 31.
A Fès, ce mot désigne une étoffe de soie trèsforte, un tissu broché à la grande tire, dont onfaisait les ceintures de femmes. Voir RICARD,Métiers de Fès, dans Hespéris, 1924, 2" Trlim.,p. 218. Ce vocable est d'origine persane. VoirDozy, l, p. 585.
0))iJZf<Jq (couleur) : bleu ou gris, terme générique.
'§ 83. Sur ce mot, voir MARÇAIS, Tanger, P. 319.
~l)
~j'~. )
zçmjq.ri (couleur) : vert-de-gris. § 83.De zi)njqr : vert-de-gris.
l:>~)mzauj : doublé ; se dit d'un petit motif doublé,
les deux éléments se touchant par la base. Contraire : mf<Jrdi.
omasïya mzauja : Voir 9/43. - 12171. - 16/80.qQs mzauj : Voir 27/184.baUo(a mzauja : Voir 321139. - 511221.qa,ma mzauja : Voir 35/159.
0J)!?9Wway soie artificielle, japonaise ou euro-
péenne, très brillante, importée sous forme detissu ou de fil. §§ 8, 31 et 33.
~.)
zUi (couleur) : d'huile d'olive, zït, non raffinée,c'est-à-dire, vert ordinaire. § 83.
sbüla, plur. sbQil : motif décoratif en forme derameau feuillu rectiligne. Dans les entre-deux ilest toujours oblique ; dans les motifs de se~is,il est droit. § 57. Voir 9/44. - 10/51. - 311138.411191. - 421192 et 194. - 43/197.
Sens habituel : épi. Le motif et l'épi ont decommun que les feuilles de l'un, comme les grainsde l'autre, sont serrés les uns contre les autres,et implantés obliquement sur la tige. Les ouvrières ne rapprochent pas ce terme de sbüla :poignard à lame droite, auquel on pense lorsqu'onsai.t que des motifs portent le nom de O<JnjJf ;pOIgnard recourbé.
i,;..r-~~
sabnïya, plur. sbq.ni, dim. sbïniya : mouchoirbrodé - dans lequel on a garde de se moucher _sorte de pochette. § 18. On appelle aussi de' cenom le foulard de tête des femmes. Voir MARÇAISTanger, p. 327. De l'espagnol sabanilla : petit~pièce de linge, mouchoir, serviette, atour que lesfemmes de Navarre mettent à leur coiffure.
sJbnïya d-Jl-mk91Jla : napperon ancien qu'onplaçait jadis sur le mur, près du lit, verticalementet au milieu duquel on accrochait un étui à colIyr~m k 9bla. Voir 70/241.
sJttatïya : sextuple ; élément décoratif fait decinq pétales, monté sur un pédoncule. Voir 1/6.
De sJtta : six.
Voir .fi"'~ .
,;-'
srïr, plur. srqlr faux-lit, très étroit, placé aufond de la chambre et au-dessus du lit ; prétexteà développer des tentures le long du mur. Onl'appelle encore ffas-iblïs : le lit du diable. §§ 14et 15. Voir rJ'.I .
Sur les différents sens de ce mot, voir Dozy,Supplément, l, p. 644.
J...i',;-'
sJrwq.l, plur. srqwJl : culotte ample d'hommeou de femme. § 26.
sJrwqla, plur. srqw<Jl : houseaux ou bas-dechausses avec lesquels les citadines masquent legalbe de leurs mollets lorsqu'elles sortent dulogis. § 20. Sur ces deux mots, voir BRUNOT,Vêtements, p. 107.
s(r9nbïya, plur. s(afam : coussin rond et plat.§ 14. - On entend aussi s(pmbïya. Fès dit :s(<Jf,mïya, p~ur. s(apD/. Sur ce mot, d'origineitalienne, VOIr BEN-CHENEB, p. 49.
Voir, J. ,1.=.. .-".-'
Voir ~.
80 LES BRODERIES DE RABAT
J-L-sqlilli : fil d'or. § 76. Il s'agit d'un fil dont l'âme
est en soie, entourée d'une fine lamelle d'or.Littéralement : sicilien.
mSJggJd : droit, perpendiculaire. Contraire :mtJkki. Syn. ,mqiJ.dd. §§ 38, 50, 59.
Y9fza mSJggda : point perpendiculaire à l'axedu motif brodé. Contraire : .m1Jiirr{a.
sbiila mSiJggda : épi, rameau feuillu, droit.
,-(,}-=....
SJkkln : galon qui coupe une composition.Voir 49/219. Sens habituel : sabre, et plus souvent, couteau.
Voir ~.
l-,-_
smliwi : bleu céleste. § 83. De smiJ. : ciel.
v-'snlnlit, ou snlin (toujours au plur.) : picot à
l'aiguille. §§ 23 et 24. De SJnna, plur. snlin : dents.Voir MARÇAIS, Tanger, p. 337.
mJsnJd, plur. msilllJd : traversin du lit appelé
srl1' (Voir J;:"")' § 14. De snJd : s'appuyer.
J--~
sJnsla d-Jl-1},iit, plur. sniJ.siJl : motif au point depiqüre croisé. SYn. : siika d-Jl-1},iit. § 43. Voir20/108. - 211109. - 25/122. On appelle aussi decette façon une ligne fine au point de chaînette.§ 76.
siJnsla : garniture au point de chaînette. Voir19/102. - 22/111.
De sJnsla : chaîne, colonne vertébrale, et sJnslad-Jl-1},iit : grande arête de poisson.
rJ-1~slintfi}ja : nom qu'on donne, pour la vanter, à
une broderie particulièrement fine et délicate. Lesens concret de ce mot est oublié.
Voir 0)-,.
<-?j....,rsiisdi : lainage fin, sorte de flanelle, d'importa
tion. § 31.Ce mot est connu sous cette forme au Maroc et
en Algérie. Dans ce dernier pays, on note aussi laforme siisti, ce qui permet de penser que le motest l'ethnique dérivé de Soussa, ville tunisienne,alias Sousse, célèbre, à une certaine époque, pourses burnous. Cette ville avait donné son nom, parailleurs, à une toile de lin fine appelée siisi. VoirDozy, Supplément, l, p. 701.
.1-.'--......sIr-u-aJl : ligne brisée régulière.Littéralement: va et viens (Prononcer: sIrwiJ.ji).Deux éléments rectilignes qui se suivent en V
droit ou en V renversé forment un « chevron »appelé qi}s, c'est-à-dire « arc ». Voir U'"~ .L'espace laissé entre les deux branches d'un chevron est dit giJ.f : trou, caverne. Voir ),Jo.-i.
Chaque branche du chevron est dite : qtçb ; verge,bâton. Voir J~ .
Voir 34/15i et 152. - 35/156. - 45/203, 204et 205.
~~
SJll-Slfl! : motif en baguette servant d'axe pourun développement décoratif. Voir 17/87. - 25/122.
Littéralement : il a dégaîné son sabre.
~} l_..:..,sqI!, plur. snij.n : voile de bain, à l'usage des
femmes. §§ 3, 8, 23 et 75.Sur ce mot, qui désigne aussi une pièce de vête
ment masculin, voir BHUNOT, Vêiements, p. 111.
sabba, plur. Siibbm : motif de semis assez gros,garnissant le champ du tissu entre les bordures.Ce nom est donné en raison du rôle joué dans ledécor et non en raison du dessin du motif qui estvarié.
Sens habituel : demoiselle.Voir 1/12. - 3/261. - 11157. - 17/81 et 82.
19/99. - 29/136. - 32/142. - 43/199. - 45/206.- 641235. - 65/236. - 67/238.
J~
sJbka : 10 tulle ; 2 0 dentelle à l'aiguille, appelée encore siJbka d-Jr-ran(ia ou simplement ran(ia.Voir ~j,.
Ce mof....désigne habituellement les « filets» detout genre.
LEXIQUE DES TERMES ARABES
J~
sJJfa, collect. : sjJ!', dim. sjïra : 1 0 motif arborescent quelconque ;
2 0 fleuron; lorsqu'il s'agit des anciennes broderies, ce mot a pour synonyme b(iJrJ.çrJ.a. Voir lf"..r. .§§ 59. 60, 61, 62 et 65.
Sens habituel : arbre. Les femmes prononcentSJjfa.
Voir 1/8, 13 à 16. - 2/17, 18, 22 et 24. - 3/26et 27. - 4/28. - 5/25. - 6/30. - 7/31. - 8/32à 34. - 9/44 à 47. - 10/48 à 52. - 11/54 et 55.12/661, 69 et 70. - 13174. - 14/78. - 17/83 à 85.- 18/88. -- 19/98. - 20/107 et 109. - 21/110. 221111 et 112. - 23/113. - 24/117 et 118. 25/122 à 125. - 26/128. - 27/132 et 133. 29/136. - 31/138. - 33/14(j. - 34/150 et 151. 48/214. - 72/243. - 741245.
~
sJddfjda, plur. SJddfjdij.t : bandeau de front quiserre le mouchoir de tête du nouveau-né. §§ 27et 28. De SJdd : tenir, maintenir.
J.-j·r~
s,)1·t.JI (l-ibm) : enfiler une aiguille.Les femmcs prononcent s;;rtJI. Les ruraux
immigrés dans la ville emploient le mot ZJlbg.Voir MARÇAIS, Tanger, p. 321.
Dozy, Supplément, l, p. 747, donne J-b ,__:." .enfilcr des grains de chapelet, et fait dériver ceverbe du substantif espagnol « sartal » : cordonde choses enfilées, chapelet, collier. BEAusiHERdonne. J:-:>';':-" avec l~.même sens. A Rabat, onemplOIe sJrta pour deSIgner un cordon de chosesenfilées. Voir BRUNOT, Notes texicologiques sur levocabulaire lllal'ilime de Rabat et Salé, Paris 1920,P. 618.
êJ-.w(ibm d-) b{j-m,JSri)~l : grosse aiguille à broder
les rideaux, semblable à nos aiguilles à repriser,dont le chas est long, en forme de fente, ce qui luivaut son nOI11. § 34. Voir..r.1 .
,--~i;-.:-.,
1",-\ .::..},,_.:c.s(J!,wJI : sorte de calicot de qualité supérieure,
fin et brillant. Les gens riches l'emploient pourleur lingerie de coton ; jadis on le réservait auxvêtements de la mariée le jour de la noce. Lesfemmes prononcent stJ!,wJl. § 31.
SUl' ce mot, d'origine persane, voir BEN-CHENEB,p. 51.
s{pl : travail en train non terminé. § 2.as-s{pl irg9d : la broderie en train est abandon
née pour un certain temps, en sommeil.Se dit de tout objet : pièce à broder, chaussure,
vêtement à coudre, etc...
J...:-.,sJqqa : séparation, fente ; partie du tissu de
fond qu'on laisse en blanc, en forme de trait, pourséparer deux motifs. Voir 31/138. De SJqq : fendre.
~_L':-"
~lrïI' sqijfi : soie de qualité moyenne, employéesurtout en blanc pour la couture et les galons ;sert aussi à confectionner les boutons. § 32. Les
femmes prononcent sl[çfi. Voir ~::>-.
\. .- ..L:..lJ=.w
!ikJrnJt (couleur) : rouge ponceau. § 83. Sur cece m~t à'origine romane (cp. français : écarlate),voir SIMONET, p. 190, et COLIN, Romania, sigillat.
Voir ~"-".
i-':-"masmlÏm : groupe de petits points de croix
ornant un motif décoratif. Voir 53/224.Sens habituel : bouquet de fleurs. Voir MARÇAIS,
Tanger, p. 349.
.~ülw d-JI-1züt : motif au point de piqûre croisé.§ 43. Syn. sa'nsla d-al-~lüt. Voir J--;"...
Sens habituel : l'pine, arête. Voir MAnçAIS,Tanger, p. 351.
.~ïba lnJgli)qa (couleur) : bleu indigo moyen,légèrement foncé. § 83.
.~ïba maftQ~lll (couleur) : bleu indigo clair. § 83.sïbi (couleur) : d'absinthe.De S'iba : armoise, absinthe ; ainsi appelée à
cause dé sesreflets blancs qui font penser à unechevelure grisonnante.
(1}.rïr) sqib : soie artificielle. § 32. Voir ::>-..1 '.r~...o
et 3,:>-.UÙéralement : soie chenue.
82 LESBROOERIES DE RAnAT
J-~
~ (1}.rïr) ~âbra : soie artificielle. § 32. Voit ~,.r. et~.
Littéralement soie agave. La comparaison estpéjorative.
~baù : teindre.~baùa : teinture. § 79.~biiùa baldïya : teinture indigène, à base végé
tale (ou animale : cochenille). § 79. S'oppose auterme suivant : ~baùa rijmïya : teinture chimiqued'importation européenne, à base d'aniline. § 79.Syn. gQbra. Voir y;6 .
~<Jbbiig, plur. s<Jl},baga : teinturier. § 79.<J1i-Ii<Jbbagïn : la rue des teinturiers.
-~
lioff, plur. Iif9f : rang, rangée, ligne de motifssemblables. § 60. Sens habituel : rang.
J-If--.c
<J.~f<Jr : jaune, terme générique. § 83.
~1i9mBa, plur. IimiiBt: : petit montant de broderie
qui suit la lisière du tissu dans les coussins et lesnapperons. §§ 58 et 69.
De IiQInBa : minaret. Sur cc mot, voir MARÇAIS,Tanger, p. 360.
0.4..0li<Jm!Jjq, plur. Iinad<Jq, dim. snïdaq (avec s non
emphatique) : grand motif complexe. Voir 13175et 40/184. On le confond parfois avec le carreauroama.
De !i<Jll(!ijq : caisse, coffre, boîte. Sur ce mot,voir MARÇAIS, Tanger, p. 360.
,.1-''-'0\".1 ..
lil;nzya, plur. liwani : motif rond de dimensionimportante. Voir 19/101, 102 et 103.
Sens habituel : plateau de métal pour servir lethé. Etymologiquement, ce mot signifie « chinoise », les premiers plateaux de porcelaine, imitésensuite en métal ,ayant été importés de Chine.
(L"(lama : remplissage d'un fleuron ou du champ
du tissu avec des galons ou des motifs disposésen damier. § 100.
De (lama : jeu de dame, emprunté à l'espagnol.Voir 24/119. - 26/127. - 35/158 et 159.
37/167. - 40/183. - 41/187. --'- 49/217. - 69/240•
J+~
(lfra, plur. (lfat:r, dim. (lfçra : galon de broderie.§§ 27, 38, 50 et 57.
Sens habituel : tresses de soie ou de lisièresqui prolongent les tresses de cheveux des femmes.Voir Dozy, Supplément, II, P. 10.
Voir 13173 et 75. -18/97. - 19/102. - 22/111.-'-- 28/135. - 37/167. - 39/179.
Voir ));) .
U"'L1(a!ia, plur. (alii'it, dim. twçlia : médaillon com
posé d'un encadrement de rameaux feuillus autourd'un motif arborescent. §§ 61, 62 et 69.
(alia Biila-1}.aska : médaillon dont l'encadrementest fait de lignes droites. Voir~ .
(alia m(lQura : médaillon circulaire. Voir ));) .Sens habituel : récipient de métal en forme
de bol.Voir 2/18. - 12/69, 70 et 71. - 13176.
28/135. - 311138. - 49/218 et 219. - 50/220.
(9l7bi (couleur) : gris taupe. § 83.De (Qbb, collect. : gros rat. Sur ce mot, d'origine
romane (français: taupe), voir SIMONET, p. 537.
• 1r-~
(obaza : tenture brodée, en usage chez les Juifspour la décoration d'une salle de réception le jourd'un mariage. §§ 13 et 67.
C'est le mot vieil espagnol « tobaja », qui a pouréquivalent moderne toaUa ; il désigne une sortede petite couverture de parade qu'on tend sur lesoreillers d'un lit. Il faut supposer que le mot a étéemprunté avant le XVIe siècle alors que le i espagnol se prononçait comme le j français, c'est-à-direavant l'expulsion des Juifs. Il se pourrait aussique le mot ait été emprunté, mais c'est moinsprobable, après le XVIe siècle, à une des provincesqui ont conservé la prononciation ancienne de j.
(<Jr(art: (couleur) rose tendre, cendré. § 83.De (<Jr(ar : tartre.
LEXIQUE DES TEi\MES ARABES' 83
?<-j 1,\:..r(rQnja, dim. (rçnja : motif de garnissage alter
nant entre les fleurons d'une bordure. Voir 2/20,21 et 23. - 9/41. - 14/78.
Sens habituel : cédrat.
~1tiilii3, plur. (wiilii3 : montant, motif de broderie
qui s'élève verticalement dans les rideaux deporte. On appelle aussi quelquefois de ce nom lapartie de l'entre-deux d'un coussin ou d'un napperon qui se retourne en suivant la lisière du tissu.§§ 13, 58, 65 et 69. De (la3 : monter.
Voir 1/13. - 9/47. - 29/136 - 30/137. 511221 et 222. - 66/237. - 69/240.
J-L1(rqçm) 111d(U)q : broderie courante au passé
plat. C'est celle de nos jours. §§ 38 et 102. Syn.rqÇlll (anjiiwi. Voir c=-1 .
Sens habituel : courant, ordinaire, banal.
, 1.1-':-"-""
(dIlbi)ra, plur. (niibdr : 1 ù motif carré, assezvolumineux, qui constitue le centre d'un décor ouqui se répète dans une bande. Voir 3/27. - 11161.- :~9/171\ et 179. - 411187 à 189. - 43/196. 6{i1/237 ;
2 0 motif eirculaire appelé aussi f!;ïsa. Voir20/107.-- 25/125. - Voir aussi :,~.
Ce mot, - féminin de t<Jnbi)'( ; tambour demusique militaire - ne se trouve, à notre connaissance, que dans le langage technique des brodeuses.
~_'-.b
rqiJm (wzjiiwi : broderie tangéroise, § 38, qu'onappelle plus fréquemment rqç111 lIld(li)q : broderiecourante. Voir ,-i.ü, .
. \~...7-.:o
(i)q : ouverture pectorale d'un vêtement du colil la taille. § 7G.
SUI' ce mot, voir Dozy, Supplément, II, p. 70.
0.1-r;
3arq, plur. 3ri)q, dim. 3rlyçq : crosse, élémentcourue de motif décoratif. § 53. nd:j:j 3iirq :demi-crosse. Voir 9/35. Sens habituel : tendon,racine. Voir MARÇAIS, Tanger, p. 379.
Voir 1/13. - 2/22. --- 9/37 à 47. - 10/48 à 52.- 11154. - 12/71. - 13/73 et 76. - 14/78. -
16/80. - 18/91 à 98. - 27/132 et 133. - 32/140.- 33/147. - 34/151. - 40/182 et 184. - 43/198.
1113arfaq : garni de crosses qui se rejoignent.Voir 9/35. - 14/78. - 40/182. - 411190. _43/197.
0.1-Z3uryiin : nu ; se dit d'un motif lorsqu'il est indé
pendant, isolé, des compositions dans lesquellesil entre habituellement.
.1-~~
siisk<Jr : alignement de motifs semblables, inclinés parallèlement, au-dessus d'un entre-deux ou lelong d'une autre composition.
3iisk<Jr mt<Jkki. Voir ...s(~' .3askrlya, dim. 3sikrlya : chacun des motifs de
l'alignement. De 3usbr : troupe militaire.Voir 17/84. - 18/90,93,94 et 9G. - 32/145.
33/140 et 148. -" 39/181. - 40/182. - 44/200. 44/201.
J-,~_r;
3i1sfi (couleur) : vermillon. § 83.Littéralement : couleur de miel.
3i"i,~,~iiba, l)lur. sasasJb : bandeau frontal desfemmes et des jeun~s 'filles. § 21. Celui des nourrissons est dit .~ddd(jda. Du dass. ~_r; : lier,
serrer. Voir :).:., .
~_r;
3uqçqa-,ll1ofjana : bordure de lisière au point defeston lâche. Chaque languette mesure deux outrois millimètres ; un espace d'un millimètresépare deux languettes. § 47. Voir f'=-:- et ~:f:-J'" .
si1qçqç (couleur) : cochenille ros~ tendre. !i 43.C'est le nom d'une plante spontanee qui a cettecouleur.
De 3iiqçq et suqçqu : pierre précieuse de couleurrouge, "gathe ou cornaline ; de là : verroterie,et : perle jaune en clinquant.
~\_Lr;
3pqda : frange inférieure des rideaux de portect des ceintures de pantalon. C'est un filet garnide pompons. §§ 19 et 23.
Sens habituel : nœud.
V,.;-L~
Sclqraisa : crabe, nom donné à un motif danslequel on veut voir des pinces de crabe. Voir D/37.__ 19/98. -" 34/150. .
LES BRODERIJi:S DE RABAT
"'"J-:==''';
<Jl-ii1).miir <Jl-aiikkri (couleur) : rouge de fard.§. 83. De ai1kkar : fard vermillon. Voir MARÇAIS.Tanger. p. 388.
,~
aillja (couleur) : bleu de France à reflets violacés. § 83. Ce mot, invariable - qu'il soit substantifou employé comme qualificatif - désigne la couleur bleue-violette très foncée dans toutes lestechniques.
rl~
maallma, plur. ,maallmiit : maîtresse-ouvrière, engénéral. A Rabat, si l'on n'ajoute aucun termeexplicatif, ce mot signifie: maîtresse-brodeuse. § 3.
m3allma rJqqama maîtresse-brodeuse quidessine. Voir ,),.
1/gar-maallma : atelier de brodeuse. §§ 3 et '1.
Voir " ~ .//
illdtaallma, plur. m<Jtaallmlit : apprentie. § 3.
r-~
al'tmm;}f garnir, remplir de motifs décoratifsle champ du tissu entre les bandes brodées desextrémités.
Sens habituel : remplir, garnir, équiper.
aiimara : garnissage des vides laissés entre desmotifs importants. Voir 9/42.
Autres sens : charge de fusil, garniture de vêtement, équipement, équipage d'un navire, etc...
aanq-<Jj-jm<Jl : cou de chameau, ou : ai:inqb<Jllij.r<Jj, cou de cigogne. Nom donné à un élémentaxial de petits motifs décoratifs. Voir 1113 et 16.- 2/19, 21, 24 et 25. - 8/34. - 9/39.
\.:T=~
aain, plur. ayün chas, trou de l'aiguille. ibraaainha md<Jhhba : aiguille à chas doré. § 34.
~iJ9bra : poudre chimique d'importation servant
à la teinture. §§ 79 et 82. Syn. ~bliya rijmïya.Voir ~.
Sen's 'habituel : poudre, poussière. Voir MARÇAIS,Tanger, p. 399.
j.;-iiJ9rza, plur. Y9!,zlit : point de couture, de bro
derie, de cordonnerie. §§ 38 et suivants.Y9rza [j-<Jl-{IfN.5a : point de feston. § 40. Voir
if';-'Y9rZia-f-iJ9rza : se dit lorsque les points de deux
éléments contigüs se touchent régulièrement selonune ligne idéale. §§ 39 et 59.
gr<Jb-<Jl-iJ9rza : coudre, faire des points.<Jl-iJ9rza : quantité de soie nécessaire à la garni
ture aamlira d'un vêtement.
Jj_ë
d;}mm-;}l-iJzij.l (couleur) rouge cerise corsé.§ 83. Littéralement : sang de gazelle.
--.LL.6
m;}iJli}q : 10 en parlant d'une couleur: « foncé >.§ 83. Voir ~. Contraire : m<Jftl)1). : clair.Voir ~.
2 0 en parlant d'une broderie : « très chargé >.!,qifm m<Jgll)q : broderie massive qui couvre entièrement le tissu de fond.
Le verbe yl;}q : fermer, boucher, est connu maispeu employé avec ce sens à Rabat. On l'emploiepresque uniquement avec le sens de « mange~
beaucoup ». Voir MARÇAIS, Tanger, p. 405.
).>..i.
gar, plur. gifran : vide laissé dans un motif dedécor, particulièrement les triangles que forme depart et d'autre une ligne brisée régulière. § 57.Voir 28/135. - 311138. - 36/166. - 39/178.
Sens habituel : grotte, trou où se nichent lessouris, les serpents...
~.>..i.
mglwun : bordure de l'ouverture pectorale d'unvêtement sans boutons, faite d'une ganse traitéeau picot, c'est-à-dire formant une boucle extérieureà peine ouverte tous les centimètres.
(kaaba~u-) mgzuna : volute en spirale ou encercle surmontée de points de bonne vierge. § 46.Dans le dialecte, myzuna signifie encore : fille dejoie, chahuteuse.
On trouve giwan avec le sens de « surexcitationdes forces affectives et intellectuelles, exaltation·de l'âme qui abouti à l'extase mystique >. Lemême mot signifie « objet de prédilection, goûtpréféré », et de là « appât pour un poisson ». Onse trouve ici devant un vieil emprunt à l'espagnol« gana », dont on n'a conservé qu'un pluriel
LEXIQUE DES TERMES ARABES 85
considéré ultérieurement comme singulier. Plustard, « gana » a été de nouveau emprunté sansmodification phonétique. Voir Dozy, Supplément,II, p. 232.
c->:_~
{tç;iJ : cadeau fait à la maîtresse-ouvrière par lamère de la nouvelle apprentie lorsque celle-cientre à l'atelier. § 9. Même coutume à l'écolecoranique.
Littéralement : ouverture,.signe de bon augure.lll<J{tijiJ : 1 0 clair, en parlant d'une couleur. § 83.
Contraire: lll<Jg/i)q. Voir~ ;2 0 peu chargé, léger, en parlant d'une broderie
laissant apercevoir par endroit le fond du tissu.Contraire : m<Jg/ijq.
m<J{tli~lU : aiguille. § 34. Ainsi appelée, du matinjusqu'à midi, par euphémisme. Voir DESTAING,
Interdictions de vocabulaire en berbère, dansMélanges René Basset, T. II, Paris 1925, p. 261.
Le verbe {ta~l, avec le sens de « ouvrir », n'cstemployé que s'il s'agit d'une porte fermée à clé.On l'emploie encore dans les formules de souhaits.
'-'\....:.\-~
{ma, plur. {tqU : aiguillée de fil. § 38. VoirMARÇAIS, Tanger, p. 408.
Autre sens : mèche.lll<J{WI : tordu, en parlant du fil formé par la
torsion de plusieurs brins. § 34.
)J~
(j<lnb aii/a-) {JNli : galon simple d'un chevron,son antagoniste étant double, triple ou quadruple.Voir 34/152. Voir ~~.
bJI!Ç;(a lll{Jrda : (pétale) isolé. S'oppose àmZlillj : jumelé. Voir 51/221.
Sur ces mots, voir MARÇAIS, Tanger, p. 411.
j -,t-~
sïr-u-liji b-<ll-{Jrz ligne brisée composée, c'està-dire dont chaque élément est brisé lui aussi.Voir 45/203 et 204.
Sur {Jrz, voir MARÇAIS, Tanger, p. 411.
V..:-:tujïha-d-Jl-frlis : garniture du lit. Voir 0..>-••. -'
frlis-iblïs, ou encore srïr (Voir ;-_) : faux-lit,très étroit, placé au fond de la chambre etau-dessus du lit ; prétexte à développer des tentures le long du mur. § 15.
Littéralement : le lit du diable.
trt
fara, plur. fri)aa : pétale stylisé employé surtoutà la partie inférieure des motifs. §§ 54 et 57.Comp. bJ(lfl(a et ~liJ.mlia, sous ~ et if'? .
Sens habituel : rameau.Voir 111, 8 et 14. - 2/19 et 24. - 3/27.
9/39. - 13/74. - 17/82. - 19/98 et 103.27/133. - 32/139, 140 et 145. - 411190.
0rtf;)rq : séparation entre deux motifs.{l(lli.~a d-<Jl-{<Jrq : motif en croix qui sert à
séparer des motifs se répétant dans une composition. Voir 40/185.
m;;{rflq : partagé. Se dit d'un motif coupé endeux, dans un sens ou dans l'autre, par un galonou par une chaîne au point de piqûre croisé.Voir 25/122. - 36/160.
J--tfsïsa, plU!'. "~[jis : petits motifs de formes varia
bles dans lesquels les brodeuses voient la représentation des piècettes d'argent, du même nom,qui ornent le bandeau de front des fillettes. Voirll1GI3 et 64. - 12167. - 23/113. - 25/125. 34/153. - 66/237. Voir synon. (Jnb:Ç;ra sous~ .
Le demi-motif, en demi-cercle, est dit : nJHfsïsa. Voir 23/113.
J~~
fliilla : genre, disposition, aspect général d'unebroderie.
On emploie encore ce mot pour la coupe d'unvêtement, la disposition intérieure d'une maison,etc... Voir 0,} .
~
i.T~
f;}cf.çlç (couleur) : bleu d'argent, c'est-à-dire bleupflle. § 83.
De j';}cf.(la : argent (métal) en général, et, plusparticulilTcment, alliage d'argent et de cuivre àun titre assez bas. Le mot habituellement employépour désigner l'argent métal est IIQqra. VoirMARÇAIS, Tanger, p. 480, mais on ne forme pasd'adjectif relatif avec ce mot.
flïl, plur. f[(jU : épingle ordinaire.fUtU d-Jt-iJmsqk : épingles, de taille moyenne
du même genre que les autres, avec lesquelles onfixe l'étoffe à broder sur le coussin. §§ 8 et 38.
De l'espagnol « alftler », épingle.
86 LES BRODERIES DE RABAT
J.J~
fJlq, plur. Ilaq : brin en parlant du fil. § 34.
l-,_~
fuwwa : garance. § 81. Ce mot était andalou.Voir Dozy, Supplément, II, p. 286.
j.J~
flj.iza, plur. tlj.izlit : bande d'étoffe formant ceinture et servant à l'emmaillotement des nourrissons.§ 29. On se demande si ce mot peut être rapproché de l'espagnol « faja » qui a le même sens.
qQbba, plur. qbJb gros motif décoratifterminant un montant dans les rideaux richementbrodés. §§ 58 et 65. Sens habituel: coupole.
Voir 28/135. - 30/137. - 311138. - 39/180 et181. - 72/243.
ma-qiJdd-ai1lçh : mousseline blanche d'importation, garnie de fleurs et d'entrelacs blancs oucolorés, exécutés mécaniquement au point dechaînette ; cette mousseline est rebrodée à lamain pour en faire des portières. §§ 3 et 31.
tJQrza (ou rqçm) d-ma-q:Jdd-aiîlçh : point dechaînette. § 45. Le sens de cette expression estoublié. On l'explique de la façon suivante : Nepeut l'acquérir (que le riche).
mqiidd : droit, perpendiculaire. Syn. mSiJggJd.
Voir _\L..,. § 38.De qadd : être en équilibre.
L~~
qJrbii(a, plur. qriibJt, et, plus souvent, gJrbli(acol en toile de soie artificielle, noir brodé blancparure féminine d'origine toute récente.
De l'espagnol « corbata » : cravate.
J-.;:,~
(güza d-JI-) qrliSiJI : entre-deux composé dedeux lignes brisées régulières qui se croisent enformant une série de losanges. § 57. Voir 39/178.On voit dans ces losanges l'image des petitsbiscuits qui portent le nom de qiJrsala, plur.qrasJl. Voir MARÇAIS, Tanger, p. 243.
1,r;(güza d-JI-) mqli(J( : entre-deux divisé en
parallélogrammes réguliers par des motifs obliques, galons ou rameaux. § 57. On voit dans toutparallélogramme (Voir 37/169) l'image des petitsbiscuits qui portent le nom de mJqr9(.a, plur.'mqarJ(;
-'::r~
qiirfi (couleur) : brun canelle. § 83.De qarta : canelle. Le mot était andalou. Voir
Dozy, Supplément, II, p. 334.
0~iJZfJq-qraqç (couleur) : bleu turquoise. § 83.Contraction de JZriJq-sJrqrliqç : bleu de geai
SJrqraq, alias « chasseur d'Afrique ».
.)...JJ~
qJrmüd : double rangée de pétales stylisésflanqués d'arcs, encadrant la bande inférieure debroderie d'une portière. On ne trouve ce décorque dans les broderies surchargées de l'époqueactuelle.
Sens habituel : tuiles (collect.).
IJJ~
qiJrn, plur. qr{jn galon placé sous la tête desfleurons dans les vieilles broderies. §§ 50, 52 et 59.
Sens habituel : corne. Nous penserions plutôt àdes bras qu'à des cornes. Il faut ajouter que cesbras portent d'autres noms.
qJssaba, plur. qsas<Jb : robe de dessus pourfemmes. § 24. Généralement, ce mot désigne unechemise de femme et surtout une blouse de lainegrossière de jardinier. Voir BRUNOT, Vêtements,p. 125, et MARÇAIS, Tanger, p. 427.
,.l'-'~~'-" ..
qsmlya cochenille. § 81.
qsïni (couleur) : rouge cochenille. De l'espagnol « cochinilla ». La cochenille est importéed'Espagne.
Voir ,:f)'
LEXIQUE DES TERMES ARABES 87
~
qi'i.~bi (couleur) : jaune verdâtre, couleur deroseau mÎ1r. § 83. De qpb : roseau.
.L-.a~
Ou'Ir) l-iqtiijlid : soie artificielle. On dit aussiiqti$lid, sans plus. Ne se dit qu'en parlant destisssus et non du fil. Il faut voir là un emprunt,au vocabulaire de l'Orient moderne. du mot.)t~ l : économie.
q(ifb, plur. q,<J(blin ou qtliib : 1 0 bande de motifsidentiques se superposant en ligne oblique. § 57.Voir 10/52. - 311138 ;
2 0 côté d'un chevron. Voir 43/198.Sens habituel : verge, broche. Classique~ .
L 1dqiJ(sa : séparation. C'est un élément, souvent un
simple pétale, qui sépare deux partie d'une composition. Voir 3/27. On pourrait tout aussi biendire que cet élément joint les deux parties, lesrelie. (Comparer avec notre terme d'architecture :joint de dilatation, qui désigne une séparation etnon une jonction.)
Voir 4/28. - 5/29. - 6/30. - 7/31. 8/32et 34. - 9/42. - 10/52. - 12171. - 13172. _15179. - 16/80. - 20/107. - 211109. - 23/113.- 24/117. - 25/125. - 271132 et 134. - 28/135.- 30/137. - 311137. - 32/144. - 34/151 et 152.- 35/154 et 156. - 36/161 et 162. - 38/173, 174et 177. - 421194. - 43/194. - 43/196 et 197.
t.r9qlis : pied d'un motif décoratif, ensemble de
pétales qui en constitue la partie inférieure.Sens habituel : fond.Voir 2/24. - 5/29. - 9/46 et 47. - 10/48 à 50.
- 12171. - 16/80. - 18/97. - 19/98. - 32/145.- 44/200 et 202.
0.J~
(lig(lmi d-<Jl) qçqa : (galon en dents de sciesurmontées d'un) losange en quatre points detrait, chaque côté du losange se prolongeant parun autre point de trait. §44. Voir ,j) .
flililt-<Jl-qi'jqa : genre artichaut. Se dit d'un motifbordé de crosses qui le font ressembler à un artichaut sauvage. Voir J-a-? Voir 16/80.
De qçqa : artichaut sauvage épineux.
Voir 0J~'
t·;-~giJf3Ç (couleur) : jaune mordoré. § 83. De gras,
collect., courge. Voir MARÇAIS, Tanger, p. 424.
~_;~_9
jaune pus. § 83.qifbf- (couleur)De qçb : pus.
,::'Li.__\.-;1,;, ..
qf-qllini (couleur) : jaune mimosa. § 83.De qçqllin : mimosa odorant à fleurs jaunes,
acacia farnesiana.
m;JqlÇib : renversé, retourné. Se dit d'un petitmotif, surtout le trèfle, lorsque sa pointe, au lieud'être normalement dirigée vers le haut, est retournée vers le bas. De ql<Jb : retourner. Voir ~~ .Voir 4/28. - 9/44. - 28/135. - 69/240.
J-~~
qiJfla, plur. qfq1i, dim. qfIyla : fermeture. C'estun motif composé d'un galon semi-circulairecoiffant un seul élément d'un autre motif, d'untrèfle ou d'une quintuple par exemple. Le galonest presque toujours surmonté de pétales.
lldij$-q<Jjla : demi-fermeture. C'est le mêmemotif dont le galon ne fait qu'un quart de cercle.
De qf<JI : fermer, obturer.Voir 7/31. - 9/45 et 46. - 10/48. - 11155.
12/69 et 70. - 13176 et 77. - 14178. - 19/98. 27/132 et 134. - 28/135. - 29/136. - 33/147et 148. - 39/180. - 411187, 188 et 189. - 421192,193 et 195. - 44/201 et 202.
V.J-9
qQs, plur. qwlis : chevron droit ou renversé.Une ligne brisée est une série de qwlis. § 57.
Sens habituel : arc.
Voir ~.
Voir ;.J~'
88 LES BRODERIES DE RABAT
~ ---..,....:=mk<Jbb : petit motif composé d'un trèfle bnila,
flanqué de deux arcs en anse yidd. Il n'apparaitqu'en ligne qtçb ; on dit de cette ligne qu'elle estconstituée de mk<Jbb-fljq-mkebb. §§ 56 et 62.
Sens habituel : couvercle conique du plateauou du récipient sur ou dans lequel on présenteun mets ; il a l'aspect d'un entonnoir, ce qui a dûlui valoir son nom.
kbrW (couleur) : jaune soufre. § 83.De kbril : soufre.
ktab : dessiner une broderie avant de l'exécuter.On dit, par exemple, ka-naklab al~andïl : jedessine le napperon. §§ 3 et 37.
kti'jba : dessin préalable d'une broderie.De ktab : écrire. Remarquer que rqam, qui
signifie aujourd'hui « broder », a eu le sens de« écrire » en classique, en même temps que celuide « broder ».
,-;;.:.u~=,
ktaf, plur. kt(j.f : partie latérale et oblique dansle haut d'un motif.
Littéralement : épaule. Voir MARÇAIS, Tanger,p.446.
Voir 7/31. - 22/111. - 23/113. - 24/118 et119. - 26/128. - 25/124. - 26/127. - 29/136.
ktlj.f d-as-sajra : sortes de bras du fleuron.Voir 25/122.
yidd sala kt(j.f-al-banl : une anse (galon courbe)sur un pétale latéral de trèfle.
kU3ba d-al-klijf : volute ornant le côté obliqued'un fleuron. § 52.
lïgijmi .mk<Jltaf : galon en dents de scie surmontées d'un W très ouvert au point de trait.
kalt(j.fïya, plur. klijlaf, dim. kallïfiya : épaulière,pièce de layette. § 26.
... C-,VJ--
(/Jrïr) mkdrras : (soie) naturelle de qualitéinférieure, dont le fil n'est pas égal et lisse. § 32.
Voir r'Sens habituel : qui accroche. Les nodosités de
cette soie accrochent le bout des doigts quand onétire le fil. Voir Dozy, Supplémenl, II, p. 456.
~~
kaniif/.!) : cotonnade assez épaisse et à jrains.§ 31. De l'espagnol « cruzado » : croisé.
~kSaf : passer et perdre son éclat, en parlant
d'une couleur. § 79. Syn. /Jal, voir J.)- .kasaf : passé, en parlant d'un tissu coloré.Sur ce mot, voir MARÇAIS, Tanger, p. 450.
~kusba, plur, blib, dim. ksïba : motif comportant
un élément courbe, volute ou crosse.Sens habituel: cheville du pied. Voir MARÇAIS,
Tanger, p. 451.Voir 9/47. - 10/48. - 16V80. - 18/96 et 97.
20/107. - 211109. - 22/111 et 112. - 24/117 et118. - 27/132. - 28/135. - 29/136. - 311128.321140, 141 et 144. - 33/147 et 149. - 34/152. 37/170. - 40/182 et 183. - 411188. - 42/193. 43/199. - 45/206. - 46/207. - 511221.
1: .; c..,
kligçt d-al-ibari, plur. kwagat : paquet d'aiguilles.§ 34. Voir yI .
De kiïgç( : papier. Voir MARÇAIS, Tanger, p. 451.
•. C--,
r--kamm, plur. kmiïm : fausses-manches de soie
brodées. § 24 b. .Sens habituel : manche, en général.
C--,\.)~
kamüni (couleur) : jaune bleuté. § 83.De kamün : cumin.kamüni se dit aussi de toute personne qui
n'obéît qu'après avoir été battue, parce que lecumin ne donne tout son parfum qu'après avoirété pilé.
lq.lla-/JIQ : étoffe blanche, à raies alternées desoie et coton, peu employée de nos jours commesupport de broderie. § 31.
Littéralement : Madame Hlou.
,-ullijm, plur. llljmijl : voile de visage des femmes
et des jeunes filles. § 22.
LEXIQUE DES TERMES ARABES 89
l/Jaf, plur. l/J9f : matelas étroit qui court le longdu grand mur de la pièce et sert de divan. § 14.A Fès, on l'appelle sdiJr.
De l/Jaf : enrouler, pour envelopper. la1JfiJt/Jaikha : eUe a enroulé son haïk autour de soncorps. Le subst. l/Jaf a dû désigner d'abord l'enveloppe de toile blanche des matelas en question,puis les matelas eux-mêmes.
~ Jy-
lJ;;a; : daphné, plante tinctoriale, appeléeencore garou ou saint-bois, la thymélée de Pline,le laurier de Gnide de Linné. § 81. Le mot estconnu dans toute l'Afrique du Nord. Voir Dozy,Supplément, I, p. 19 qui orthographie ; 1; 1 .Dans les dialectes marocains, l'article est agglutinéau mot.
..ui
lig1jmi : galon en dents de scie. §§ 38, 50 et 51.Voir 25/124 et 125. - 26/128. - 36/160 et 162.
- 66/237. - 72/243.
lig1jmi d-iJl-qi}qa : galon en dents de sciesurmontées d'un losange au point de trait. Voir,--,:~-~ .
lig1jmi mkiJtliJ{ : galon en dents de scie surmontées d'un \'1 très ouvert au point de trait.
1 1...a._~_
blmzta, plur. tlamJ( : bordure de lit. §§ 15 et 66.Autre sens : travail de la ménagère qui consiste
à parer la chambre en étirant complètement leshousses et les tentures. Masd. de lJmmJt,
, , ' 1))_._.\....
lundrzz : étoffe de coton légère, de qualité supérieure, avec laquelle on confectionne le châle debain. § 31. C'est le nom marocain de « Londres ».
. 1)":--
liizi (couleur) : brun rougeâtre, de la nuance dutégument de l'amande sèche. § 83.
De lüz : amande.
<s;-JmJlwi : 1° en rond, circulaire. cfRra (kasba)
miJlwzya : galon circulaire dont tous les pointsaboutissent au centre. § 31. Voir 18/97. - 20/107 ;
2° nom donné à un motif assez rare. Voir45/205 ;
3° InJlwi rbiîtli : point natté utilisé dans ungenre de broderie très spécial. § 48.
Sens habituel : entortillé.
,\ ".J-.\_JI.:-~ ..
liron : gaude, plante tinctoriale. § 81. Motmaghrébin. Voir Dozy, Supplément, II, p. 561.
.._\_J\ ..
lïmi (couleur) : vert citron pas mûr. § 83.De Hm, collect. : citron ovoïde allongé, de
saveur douce.
\:.-t-~)_·~
silqçqa-m()rjana et j9hra-m9rjana : bordures aupoint de feston ou au point de languette. § 47.Voir 18/37. - 70/241. - 71/242.
slÏqçqa désigne une perle ~~une en clinquant,ji}hra, une perle blanche, mOrJana, un morceau decorail. On a fait alterner des groupes de troispoints jaunes avec des groupes de points rouges,d'où : silqçqa-morjana ; ou bien on a laissé desespaces blancs coupés par des groupes de pointsrouges, d'où : jQhra-morjana. Par la suite, toutebordure au point de feston ou de languette, mêmesans alternance de couleurs, a conservé ces noms.
VoÏ;' .~.>- et J=- .m(;rj~ni (couleur) de corail.De m9rjan : corail.
.;;"'_J,lj.r0
mJl'ziilja : cotonnade assez fine, calicot, d'unUSR'"e l:~urant en lingerie. On en fait aussi descou~sins, des bordures de lit et d'autres piècesbrodées. § 31.
nrJrwazl : point d'épines ou point d'arêtes. § 76.VoÎi' DILLMONT, p. 21, fig. 46.
Le mot signifie : originaire de Merw. On leretrouve sous la forme mrQzlya désignant un metsrare composé de viandes et de raisins secs.
miJssiJk: fixér, à l'aide d'épingles, l'étoffe qu'onbrode, sur le coussin ad hoc.
m!pdda d'iJt-tJll7sqk : coussin sur lequel la bro
deuse fixe son ouvrage. § 361. Voir S.d>..Le mot « épingle» se rend par flïl. Voir 1.
90 LES BRODERIES. DE RABAT
iJ'-:--mJsmqsi (couleur) : jaune abricot. § 83.De mJsmijs, collect. ; abricot.
J-~J..V
mJndïl, plur. mnijdJl ; napperon, pièce d'étofferectangulaire ou carrée à aspects et usages multiples. §§ 16 et 69. Voir JOUIN, p. 4.
mJndïl d-Jj-jnlj.b ; napperon rectangulaire dontles deux extrémités seules sont brodées. Voir~.
mJndIl mJtsûs : napperon garni à la fois dedeux bandes brodées aux extrémités et d'un semis
de remplissage entre ces bandes. Voir J) .Sur ce mot, d'origine romane, voir SIMONET,
p. 331.
ml)r/.a : mode, fantaisie. § 12.
fi.Qlib.Jl-ml)r/.a : les gens qui suivent la mode.Contraire : IJiisbiyin. Voir~ .
Emprunt à l'espagnol « moda », à moins quece ne soit au français « mode », auquel un aspectespagnol a été donné en raison de la fréquencedes emprunts faits à la langue de la péninsule.
nblj.la, plur. nblj.il ; motif franchement circulaire. Voir 19/99, 100 et 101.
Sens habituel : bracelet.
11,Jh.la, dim. nlJIla : motif en forme de palmestylisée. De nJh.la ; palmier. Voir 1/9, 10 et 11. 2/19 et 21. - 9/39 et 47. - 53/224.
~....:W
nliliiilJ (couleur) ; pure, vive, chaude. Contraire;blj.rJd ou biihJt. Voir ".f. et~ .
Classique ~ Li : pur, sans mélange.
.r..a-JmJnli9rzya, plur. ,m,Jnliljriyüt ; tunique légère
que les femmes portent sur le cafetan. Elle estparfois brodée. § 24. Voir ~" et~ .
Le mot est connu avec ce sens dans tout leMaroc, jusque chez les Berbères. Voir Dozy,Supplément, II, p. 679.
(ibra do) blj-nQqta : aiguille à coudre ordinaire,dont on se sert aussi pour broder, à chas rond oupresque rond. § 34. Voir .f.l .
v---jnamusïya, plur. namusïylit : lit européen avec
sommier et baldaquin. § 14.Le mot vient de namûs ; moustique. Il a dft dési
gner d'abord, comme au Liban, une moustiquaire,avant de désigner, par métonymie, un lit à moustiquaire, puis un lit européen avec ou sansmoustiquaire. Il faut ajouter que le Marocain nese sert pas ordinairement de moustiquaire.
nIl ; indigo. § 81-nIla : poudre d'indigo. La nila ou indigo qui
sert à azurer le linge se présente sous deuxaspects ; nila fqsïya, de Fès, en pierre, et nilarl).mïya, d'Europe, en poudre dans un sachet.La nUa des blanchisseuses n'est pas celle desteinturiers.
nUi (couleur) : bleu indigo. § 83.
(IJrïr) hindi ; soie naturelle de qualité supé.
rieure. §§ 32 et 79. Voir j ...Littéralement ; originaire de l'Inde, h;md.
~)
tujïha d-3l-friis : bordure du lit, la partie quel'on en voit lorsqu'on est dans la chambre. § 15.Ce mot désigne encore ; le dessus du panier, cequ'on offre à la vue du client. Singulatif verbalde ujjJ'h, peu employé, avec le sens de « mettreen évidence ».
Voir 0~1 .
")'Wll!1r/.Ç (couleur) ; rose, couleur de la fleur. § 83.De WJrr/. ; rose (fleur).
0)'urliq-slihJl ; étoffe de soie de qualité supérieure.
§ 31.
LEXIQUE DES TERMES ARABES 91
.....sj)
uq1fy.a, plur. awiiq : once, mesure de poids. § 3.L'once n'est utilisée que pour peser les objets devaleur et en petite quantité. Elle vaut trente-deuxgrammes environ et constitue la seizième partiede la livre. Voir MARÇAIS, Tanger, p. 497.
..\._J -'
mwulda, se dit d'une quintuple qui prend appuisur une ligne de motifs et s'y engage par unpétale. Voir 18/94. - 34/151.
Voir t'Il.~.
Voir V.r...\...)
idd ou yidd, plur. iddïn : anse. §§ 53 et 62.1° élément de composition décorative constitué
par un galon en arc surmonté ou non de pétales ;2° simple pétale placé latéralement et symétri.
quement à un autre ;3° développement complexe de pétales sur un
côté d'une composition et symétrique à un autretout semblable.
Voir 118, 12, 14 et 16. - 2/18, 20, 23 et 24. 5/29. -- 8/32. - 9/38 à 46. - 10/48 à 52. 11154 et 55. - 12170 et 71. - 13173 et 74. 15179. - 17/85. - 18/92 et 94. - 20/107 et 108._ 22/111. - 25/122, 126 et 128. - 271132. 34/151. - 38/175 et 177. - 411187 et 191. 42/193 et 194. - 44/201. - 49/218 ;
4° bras des fleurons. Voir 25/124.Sens habituel : main, anse.
I.;r~--!.
yq.smïn-as-sarq : rouge cochenille violacé. § 83.Littéralement : jasmin d'Orient.
III
INDEX ALPHABÉTIQUE
Baise-main 9Balançoire 8Banane (couleur) 5Bande décorative 40, 41, 43, 44, 45, 54 et 61Bandes obliques 42Bandeau frontal 18, 19 et 47Baraka 2Bariolage 55Bédouines SBeurre (couleur) 52Biais (lignes en) 47Blanc (tissu) 52Bleu . . . . . . .. 50, 51 et 53Bou-fertouna 7
A
Abricot (couleur) .Absences .Achèvement .Achoura 3 etAïd-Kebir .Aïd-Seghir . .Aiguilles .. . . . . . . .. 2, 12 etAiguillée .Alternance (coloris) 53 etAlun .Ameublement .Ancienne (broderie) : 28, 29, 30, 32, 40, 46, 52,
53,54 etAndalous 57, 58 etAniline 49 etAnse 33, 38 etAnsra 2 etApprenties 3, 5, 9 etApprentissage .Arborescents (motifs) .. . . . . . . . . . . . . . . 41, 44 etArbres .Arbustes .Arc .Architectural 33, 40 etArmature 32 etArmoise .Artichaut .Artificielle (soie) .Assiduité .Atelier .Axe des motifs 30, 32, 40, 46, 60 et
B
P'~e;
526
11688
2527615115
61645239S
395
45414138594151512265
61
Page;
Bordeaux (rouge) 52Bordure .. . . . . . . . . . . . . .. .••.•......... 58, 61 et 63Bordure de lit 16, 44 et 47Branches feuillues 39Bras (des fleurons) 32, 33 et 40Brocart .. 55, 59 et 63Brun (couleur) 51Burnous 22
cCache-maillot 20Cadeaux 3, 5, Il et 17Calicot. 29Canelle (couleur) 51Carré (napperon) 46
g:~~~~l~~e d~' ;~~~i~~··.·.·.·.·.·.·.·.· .3; 'ü,' i7; ïs: 47' ~t :~Céleste (bleu) .. 51Cercle 32, 34, 38, 40 et 61Cérémonies 11 et 18Cerise (couleur) 51Chaabana 7Chaînette (point de) 30 et 48Châle de bain 4, 11, 18 et 47Chamois (couleur) 52Chandelier (motif) 42Chansons . . . . . . . . . . . 6 et 9Châtain ·························· 51Châtiments 9Chaudron (du teinturier) 55Chevron . . . . . . . .. 31 et asChimique (teinture) 49 et 55Chocolat (couleur) 51Citron (couleur) 51Cloisonnement ........•......................... 39Cochenille 51Coffre (dessus de) 45Col 14, 19 et 48Coloris . . . . . . . . . . . .. 14, 79
et suivantes.Commande ······· 4Commencement d'un ouvrage.................... IlCommerce ..•...•... 13Composition décorative 31, 32, 37, 38 et 43Congés' . 6Consèrvatlsme 58Contrastes (des couleurs) 55Coton perlé 23Couleurs . " " 51
Il<! LES BRODERIES DE RABAT
PagesCoupole (motif) 40, 41 et 44Courante (broderie) '. .. 63Courge (couleur) 52Coussin 4, 16, 39, 40, 41, 46 et 47Coussin à broder 2, 5, 10, 29, 30 et 25Couvercle (motif) .. 38 et 42Croix 35 et 42Crosse . . . . . . . . . . . . .. . . . . . .. 33, 34, 38 et 39Cumin (couleur) 52
D
Daphné 50Damier 61Dé 25Décadence . . . . . . . . . .. 13 et 14Décor : Voir Composition décorative.Dents de scie 27, 30, 32, 39 et 61Dentelle 18 et 44Dessin 3, 4, 10, 26, 60 et 63Diagonales " 46Dimanche 2Discipline 9Domir.ante (couleur) 52
E
Ecarlate 51Ecole coranique 6 et 9Ecoles de filles 13, 22, 53, 55 et 64Eléments (du décor) 37Emploi du temps 9Encadrement . . . . . . . . . . . .. 46Entre-deux ; 10, 31, 32, 38, 39, 41, 43, 44, 45, 46,
54 et ~1
Envers....... .. 29 et 61Epaule.............. 83Epaulière 19Epi 39Epingles 25Espagne " 57 et 60Etamine 22Etoffes............ 22Etudiants (Tolba) 12Européens .. . . . . .. 13, 14, 22, 56, 58, 59 et 63Evolution 31, 33, 54 et 57
F
Fard (rouge) 51Fès 26, 49 et 64Feston (point de) ; 28, 29, 31, 32, 33, 34, 38, 41,
60, 61 et 62Fêtes familiales 12Fiancés 18Fil 10, 22 et 23Fils comptés 30 et 61Filiforme . . . . . . . . . . . .. 63Fillette (motif dit) 38 et 39Fleuron 32, 33, 40, 42, 45, 47, 54 et 60Floral .. .. . . .. 28, 33, 34, 37, 40, 41, 42, 55, 59 et 62Fondamentales (couleurs) 51Franges 18 et 44
Pagu,
G
Galon 19, 22, 27, 31, 33, 37, 38, 40 et 41,,Garance 50Gauchère 9,Gaude 50Gazelle (sang de) couleur........................ 51Geai bleu (couleur) 51Génies 2Géométrisation 37, 40, 58 et 60Gland (motif) 39 et 44Giroflée 51,Grège (soie) 49Grenade (écorce de) 51Grenat 50 et 53Grenouille (motif) 42Gris 51 et 52
H
Habillement ........•.............•............ '" 17Hagouza ....••.•...'..•.•.....•.'........... 2 et 8Harmonie des couleurs .•......•.•.'.............. 55Henné 17, 50 et 52Herbe (couleur vert-herbe) 51Heures propices 2 et 18Housse d'appareil de T.S.F. 17 et 64Horaires . . . 6,Hasoum 2
1
Imitation 59Importation .. .. 21, 23, 25, 49, 55 et 64Incliné (motif) 35 et 38Indigo " . . . . . . . . .. 50 et 51Interdictions ...•." ..,.... . ..•...•. " .. 2,Interne (polychromie) 54
JJarretières 11, 18 et 47Jasmin (couleur) 51Jaune . . . . . 50 et 52Jours propices 2'Juifs 16 et 45
K
Kabylie 50Kairouan........................................ 1Kaléidoscope , , , . . .. 55 et 63
LLaine 2, 22 et 50,Lalla Aïeha 12Lalla I{essaba 7Languette (point de) 30 et 33Layette 3, 19 et 48Ligne brisée . .. . . .• . . . . 31, 39 et 54Lisière '.......... 30Lit........................................ 16 et 43Losange . " 31, 39, 46, 59 et 63Lundi..... 2:
INDEX ALPHABÉTIQUE 95
Pages
Maîtresse-brodeuse 2, 3, 9, 10, 11, 12, 49, 52 et 64~,'Ianches 19 et 48Marbre (Carreau de) motif 62 et 461,lariée 18 et 48Marquette . . . . . . . . . . .. 11Marrakech 50Matelas-divan........... 16Médaillons '. . . . . . .. 35, 39, 42 et 59Meknès 26 et 46Mi-Carême . . . . . 8Miel (couleur) 52Mimosa (couleur) 52Minaret 40, 44 et 45Mode 14, 19, 52 et 64Modernes (objets) 17, 29, 33, 47, 52, 53, 55 et 63Mohatasseb 4Monochromie . . .. 53 et 60Montants (motif) 15, 39, 44 et 45Mordant 51:Moriscos 57 et 58Motifs décoratifs 37Mouche (motif) 38, 47 et 48Mouchoir 17, 19 et 47Mouloud (fête du) 7Mousse (couleur vert-mousse) 51Mousseline 4, 22 et 59lUoudd 7
PagesPériodes néfastes 2Pétale .. . . . . .. 34, 39, 41 et 42Picot........................ 18Pigeon (couleur gorge de) 52Piqûre (point de) 29, 31, 40, 60 et 61Plastron 48Plat (pièce à) ..............•............. 39 et 45Pliage du coussin 46Pochette 17 et 47Points 27Points comptés 26Point-plume 28, 31, 33, 34, 37, 38, 42 et 62Point de languette 30Pointe (de layette) 20Pois-chiche (motif) 34Pois-chiche (couleur) 52Polychromie 39, 53, 54, 55, 62 et 63Pompons ············ 18Ponceau (couleur) 51Portière (rideau) .. 10, 15, 22, 25, 40, 41, 42, 43 et 44Poudre colorante 49Prestations 5Pus (couleur) 52
QQuadrillage 17 et 63Quintuple 38
R
sSainte 12Salé 1, 26, 30 et 64Semis 15, 17, 19, 28, 38, 42, 44, 45, 48 et 62Serviette 17Soie 21, 22, 23, 49 et 55Soufre (couleur) 52Stylisation 58Superstitions 2, 12 et 25Support (tissu de) 21 et 63Suspendues (pièces) 43 et 45
Raisin sec (couleur) 52Ramadhan (mois de) 8Rameaux (motifs) 42 et 63Rat (couleur de) 52Rejeb (mois de) 7Remplissage 47, 58 et 61Rétribution 3 et 4Rideau: Voir Portière.Rites ················ IlRiyala (motif) 48Robe 18 et 48Rose (couleur) 50 et 52Roseau (couleur) 52Rouge 50 et 51
N
Napperon .. 11, 16, 20, 30,39, 41, 42, 45, 46, 47, 48 et 55Natté (point) 30 et 64Négresses 3 et 58Noir 51 et 32Noisette (couleur) 51Nuances 51 et 52
oOblique 27, 31, 46 et 63Œil (mauvais) 11Once 4Onomastique 33 et 51Or (fil d') 30 et 48Or (couleur) 51 et 53Orangé (couleur) 52Ordinaire (broderie) . . . . . . .. 27Oreillers 16Ornementation des chambres 43 et 45Oubira (quartier de) 1Outillage 25Ouverture des coussins 46
p
Pans de rideaux 3 et 44Pans de vêtements ~7
Pantalon 14, 17, 19 et 48Passé-plat 27, 28, 32, 33, 34, 38, 39, 41, 42 et 62Passer (couleur) , 49Pédoncule . . . .. 38 et 39
T
Tabac (couleur) .Tangéroise (broderie) .
5127 et 63
96 LES BRODERIES DE RABAT
Page,Tapissières o............. 1, 2 et 4Tartre (couleur) o............................... 51Tasse (motif) o................................... 42'.raupe (couleur) o......................... 52 et 46Technique o............................. 9, 25 et 51Teinture 23, 49 et 55Terne (couleur) 55Tête (de motif) o..................... 32, 40 et 61Tétouan 30, 32, 45, 53, 54 et 60Tinctoriales (matières) GOTissu 21, 43 et 52Tobaza o ••••••••••••• •••••••••••••••••••••• 43 et 45Tracé o......................... 28 et 29Tradition o... . . . . .. 56 et 58Trait (point de) 30 et 46Traversin o....................................... 16Trèfle 37 et 38Trousseau .. Il
PagesTulle 4, 42 et 59Turquoise (bleu) . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. 51Tussor............ 22
vVasque (motif) 38 et 42Végétales (teintures) 49 et 50Vermillon 52Vert 50 et 51Vert-de-gris 51Vêtements 22 et 47Vides 38, 39 et 54Vierge (point de bonne) 30 et 61Violet............................................ 51Violier.............. 51Voile de visage ..............•............. 18 et 47Volute . . . . . . .. 30, 32, 33, 38, 40, 60 et 61
•
IV
ORIGINE DES DESSINS AU TRAITFIGURANT AU TOME II DE L'OUVRAGE
1. - Dessins du Service des Arts indigènes
Planche 1 : Fig. 4, 14 et 15. - Pl. 2 : Fig. 17,20 (retouchée), 23 (retouchée), 25. - Pl. : 8 :Fig. 34 (retouchée). - Pl. 50 : Fig. 220 (retouchée). - Pl. 66 : Fig. 237. - Pl. 68 : Fig. 239.Pl. 619 : Fig. 240. - Pl. 70 : Fig. 241.
II. ~ Collection de de$sins de l'Ecole musulmane
de filles de Dar Moulay~Rachid il Rabat
Planche 9 : Fig. 44 à 47 (retouchées). - Pl. 10 :Fig. 48 à 52 (retouchées). - Pl. 11 : Fig. 55(retouchée). - Pl. 12 : Fig. 70 et 71 (retouchées).- Pl. 13 : Fig. 72 .à 77 (retouchées). - Pl. 14 :Fig. 78 (retouchée). - Pl. 15 : Fig. 79 (retouchée). - Pl. 16 : Fig. 80 (retouchée). - Pl. 27 :Fig. 132 à 134 (retouchées). - Pl. 28 : Fig. 135(retouc11ée). - Pl. 29 : Fig. 136 (retouchée). Pl. 31 : Fig 138 (retouchée). - Pl. 32 : Fig. 145.- Pl. 37 : Fig. 171 (retouchée). - Pl. 38 : Fig.172 et 173. - Pl. 39 : Fig. 180. - Pl. 40 : Fig. 182.- Pl. 41 : Fig. 189 et 191. - Pl. 42 : Fig. 192à 195. - Pl. 43 : Fig. 196 à 198. - Pl. 44 : Fig. 201et 202.
III. - Collection de deuins de Madame Terrasse
Planche 1 : Fig. 13 et 16. - Pl. 10 : Fig. 53. Pl. 11 : Fig. 58, 64 et 65. - Pl. 12 : Fig. 68. Pl. 17 : Fig. 82 et 85 à 87. - Pl. 26 : Fig. 131. Pl. 32 : Fig. 141, 142 et 144. - Pl. 33 : Fig. 147et 148. - Pl. 34 : Fig. 151. - Pl. 38 : Fig. 174 et176. - Pl. 39: Fig. 178 et 179. - Pl. 40 : Fig. 183à 186. - Pl. 41 : Fig. 187, 188 et 190. - PI. 43 :Fig. 199. - PI. 44 : Fig. 200. - Pl. 45 : Fig. 203
à 206. - Pl. 46 : Fig. 208 et 209. - PI. 47 : Fig. 210à 212. - Pl. 48 : Fig. 213. - Pl. 49 : Fig. 219. Pl. 57 : Fig. 228. - Pl. 65 : Fig. 2361.
IV. - Collection de dessins de Madame Amor
Planche 64 : Fig. 235.
V. ~- Dessins relevés par l'auteur
Planche 11 : Fig. 57, 60 et 61. - Pl. 12 : Fig. 66et 69. - Pl. 18 : Fig. 88 et 89. - Pl. 22 : Fig. 112(sur une pièce de Madame Amor). - PI. 25 : Fig.124 (sur une pièce de Madame Chabert). - PI. 36 :Fig. 160 et 164. - Pl. 38 : Fig. 175. - Pl. 51 :Fig. 221 (sur une pièce de Madame Amor). PI. 52 : Fig. 223 (sur une pièce du Musée desOudaya). - PI. 53 : Fig. 224 (sur une pièce deSi Mohamed Dias). - PI. 54 : Fig. 225 (sur unepièce du Musée des Oudaya). - Pl. 55 : Fig. 226(SUl' une pièce du Musée des Oudaya). - Pl. 56 :Fig. 227 (sur une pièce du Musée des Oudaya).PI. 58 : Fig. 229 (SUI' une pièce de Si MohamedDias). - PI. 59 : Fig. 230 (sur une pièce du Muséedes Oudaya) . .- Pl. 60 : Fig. 231 (sur une piècedu Musée des Oudaya). - Pl. 61 : Fig. 232 (surune pièce de Madame Chabert). - Pl. 6Q : Fig.233 (sur une pièce de Si Mohamed Dias). _PI. 63 : Fig. 234 (sur une pièce de Madame Amor)._ Pl. 67 : Fig. 238 (sur une pièce de Si MohamedDias). - PI. 71 : Fig. 242 (sur une pièce du Muséedes Oudaya). - Pl. 72 : Fig. 243 (sur une piècede Madame Brunot). - Pl. 73 : Fig. 244 (sur unepiècedè Si Mohamed Dias). - Pl. 74 : Fig. 245(sur une pièce de Si Mohamed Ben-Daoud).
Les autres figures, qui représentent des motifs de détail, ont été empruntées aux planchesmentionnées ci-dessus.
TABLE DES MATIÈRES
Préface .Avaut-propos . .
Pagel
VIIXI
Bibliographie . .Système de transcription .
Pagls
XVXVII
CHAPITRE 1er• - LA BRODERIE DANS LA SOCIÉTÉ MUSULMANE DE RABAT
§ 1. - La broderie, art citadin .§ 2. - La broderie à la maison .§ 3. - La maîtresse-brodeuse .
L'APPRENTISSAGE DE LA BRODERIE
§ 4. - a) L'atelier .§ 5. - b) Pédagogie de l'apprentissage .§ 6. - c) Horaires et congés .§ 7. - d) Emploi du temps de la journée ..§ 8. - e) Enseignement de la technique ..
1 § 9. - f) Rites et cérémonies 112 § 10. - g) Relations entre maîtresses et3 élèves après l'apprentissage.. 12
EXPLOITATION COMMERCIALE DE LA BRODERIE
5 § 11. - Les débouchés 1356 LA MODE99 § 12. - Un facteur nouveau d'évolution. . . . 14
CHAPITRE II. - LES OBJETS BRODÉS
A. - OBJETS D'AMEUBLEMENT
§ 13. - Rideaux et portières. . . . . . . . . . . . . . 15§ 14. - Coussins, oreillers et traversins. . . . If!:§ 15. - Bordure de lit 16§ 16. - Napperons .....................• 16§ 17. - Objets modernes........ 17
B. - OBJETS D'HABILLEMENT
§ 18. - Mouchoir ou pochette 17§ 19. - Ceinture de pantalon 17§ 20. - Jarretière 18
§ 21. - Bandeau frontal .,. . . . . . . . . . . . . • . . 18§ 22. - Voile de visage 18§ 23. - Châle ou voile de bain .•.......••• 18§ 24. - Robe de dessus 18§ 25. - Fantaisies modernes 19
C. - OBJETS DE LAYETTE
§ 26. - L'épaulière ..•..................• 19§ 27. - Mouchoir de tête 19§ 28. - Bandeau de front 19§ 29. - Pointe 20§ 30. - Cache-maillot 20
CHAPITRE III. - LES MATIÈRES PREMIÈRES
A. - LE SUPPORT. B. - LE FIL
§ 31. - Les étoffes de support. . . . . . . . . . .. 21§ 32. --, Le fil de soie 22§ 33. - Le fil de coton perlé 23
CHAPITRE IV. _ L'OUTILLAGE ET LA TECHNIQUE
§ 34. - Les aiguilles 25§ 35. - Le dé 25
§ 36. - Le coussin ..................•.•• 25§ 37. - Le dessin ..... " .... .........•..• 26
103 LES BRODERIES DE RABAT
CHAPITRE V. - LES POINTSPagea
A. - CONSTITUTIFS. B. - ACCESSOIRES
§ 38. - Passé-plat sans envers .§ 39. - Point-plume .§ 40. - Point de feston .§ 41. - Rôle des différents points .§ 42. - Point de piqûre .
2728292929
§ 43. - Point de piqûre croisé .§ 44. - Point de trait .§ 45. - Point de chaînette .§ 46. - Point de bonne vierge .§ 47. - Points de bordures de lisières .§ 48. - Point natté .
PaJ8'l
293030303030
CHAPITRE VI - LES ÉLÉMENTS DU DÉCOR
§ 49. - Généralilés 31§ 50. --.:. Le galon 31~) 51. - Le cerele 32
§ 52. - La volute 328 ii3. - La crosse 33§ 54. - Le pétale 34
CHAPITRE VII. - LES MOTIFS DÉCORATIFS
§ 55. - Caractères généraux 37§ 56. - Les petits motifs 37§ 57. - L'entre-deux 38§ 58.' - Les montants 39
§ 59. - La bande décorative . . . . . . . . . . . . . . 40§ GO. - Les motifs arborescents 41§ 61. - Les médaillons 42§ 612. - Les bandes obliques. . . . . . . . . . . . .. 42
CHAPITRE VIII. - LA COMPOSITION DÉCORATIVE
§ 63. - Aspect général 43
A. - PIÈCES SUSPENDUES
§ '64., -;-:-, L,e,ur, cmnposition 43§'65.. - Compositions des portières , 44§'66. -.,- Composition des. bordures de lit. . .. 44§ 67. - Composition de la tobaza... .. 45
B. - PIÈCES A PLAT
§ 68., - Leur compositiop. 45§ 69., - Napperons rectangulaires 45
§ 70. - Napperons carrés 46§ 71. - Coussins classiques 46§ 72. - Coussins modernes 47
C. - PIÈCES DE V~TEMENTS
§ 73. - Objets à pans retombants 47§ 74. - Mouchoir ou pochette 47§ 75. - Châle de bain............. 47§ 76. - Plastron de la robe de dessus. 48§ 77. - Col, fausses-manches, pantalon 48§ 78. - Pièces de layette 48
CHAPITRE IX. - LA COMPOSITION DU COLORIS
A. - LA TEINTURE. B. - LES COULEURS
§ 79. - Teintures chimique et végétale 49§ 80. - Teinture indigène 50§ 81. - Matières tinctoriales. . . . . . . . . . . . .. 50§ 82. - Technique du teinturier 51§ 83. - Les gammes de coloris 51§ 84. - Le choix des couleurs 52
C. - LA COMPOSITION DU COLORIS
§85: '- Coloration du tissu de support .... 52
§ 86. - Monochromie ancienne et moderne... 53§ 87. - Polychromie alternée 53§ 88. - Polychromie interne 54§ 89. - Epanouissement de la polychromie... 55§ 90. - Le coloris dans les imitations de
brocart •..•.••• 55§ 91. - Influence de la technique de la tein
ture sur la composition du coloris. 55§ 92. - Infiuence des colorants chimiques.. 55~ 93. - Rôle des écoles de mIes 55
TABLE DES MATIÈRES
CHAPITRE X. - L'ÉVOLUTION DE LA BRODERIE A RABAT
101
Pages
§ 94. - Hypothèse d'une origine espagnole.. 57§ 95. - Conservatisme du début 58§ 96. - Influence du milieu marocain. . . . .. 58§ 97. - Influences européennes 58§ 98. - Schéma de l'évolution 59§ 99. - Première période : La broderie ori-
ginelle 59§ 100. - Seconde période : Tendance à la
géométrisation . .§ 101. - Troisième période : Apparition
d'une nouvelle broderie .§ 102. - Quatrième période : La broderie
courante .§ 103. - Cinquième période : La broderie
d'aujourd'hui .§ 104. - L'avenir de la broderie de Rabat ..
Pages
60
61
62
6364
APPENDICES
1. - Chansons des ateliers de broderie. . .. 67II. - Lexique des termes arabes ... . . . . . .. 71
IV. - Origine des dessins du Tome II 97III. - Index alphabétique 93
ACHEVÉ D'IMPRIMER
SUR LES PRESSES DE
L'ÉCOLE DU LIVRE
- A RABAT
LE 15 OCTOBRE 1943
VISA DI: CENSURIt AU MAROC (RABAT) N" 5.883 DU 10 MARS 1943
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PHOT. 1. - 0) j\fafll'Jellc ; l» Délails du précédent.
(Collcet. Madmnc Amor.)
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PHOT. 3. - Montants de rideau.
(Collect. Madame Arno,..)
PUOT. O. - a) Hideau ; /)) Détails du précédent.
(Voir Planches 4, 30 et 72 .)
(Collcct. Madame Bl'unot.)
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PIlOT. 6. - a) el b) Détails d'un rideau.(Voir Phot. 5 et Planches 4, 30 et 72 .)
(ColleeL. Madame BruIlOL.)
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PITOT. 7, - Cl) Rideau; b) D<"lails du Jlrecédent.(Voir Planches 5 ct 37, fig. "16g.)
(Collect. Dias.)
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PHOT. 8. ~ Napperon ancien.(Voir Planches 3,21 et 62.).
(Collcct. Dias.)
• •
PHOT. g. - Napperon ancien.(Col/ect. Dias.)
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PHOT. 10. - Napperon.
(Col/cet. Madame Amor.)
PHOT. II. - Napperon.
(Collecl. Madame A mol'.)
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PHOT. 12. - a) Napperon; b) Détails du précédent.
(Voir Planche 67·)
(Collcct. Dias.)
PnOT. 13. - o.) Détails du suivant; û) Napperon.
(Voir Planche 22, fig. 112.).
(CoUeet. Madame Arno!'.)
a
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PHOT. 14. - a) Détails du suivant.(Voir Planche 2, Dg. 22, Phot. 2 a), et Planche G3.)
û) Napperon.(Voir Planche G3.)
(Collect. Madame A mol'.)
a
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PITOT. J5. - Grand napperon.(Voir Planche 7r.)
(CoUeet. des Arts indigènes.)
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PHOT. 16. - Fragment de napperon.
(Collcet. Madame Amor.)
PnOT. Ij. - Coussin àncien.(co llecl . des Arts indigènes.)
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. ,&. _ 0) Co0"'" anci'" ; ù) Dé'",h dn p'éd·
den
l.(Co
ueeL des Arts indigènes.)
b
11111111111111111111111111111111111111111111111111111111111
PHOT. 19. - Détails, entre-deux, du précédent.(Voir Planche 34, fig. 152, et Planche 52.)
jjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjjJ
','
PilOT. 20. - a) Bordure de coussin ancien ;, ù)'J)rlails dll prrcrdcnl.
(Voir Planche 25, fig. 122, et Plauche 54.)
(Col/ccL. des Arls il/digèl/cs.)
a
b
PIlOT. 21. - a) Coussin ancien; b) Détails du précedent.
(Voir Plan ehes 23, 55 et 56.)
(Colleet. des A rts indigènes.)
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PHOT. 22. - Détails de coussin ;mcien.(Voir Planche 25, fig. 124, et Planche 36, fig. 160.)
(Col/cet. Madame Chabert.)
PHOT. 2~. - Petit coussin déployé.
(Coll cet. Dias.)
PIlOT. 24. - a) CousRin ; b) Détails de" bordure de eomsin.(Voir Planche 24, fig. IIg, Planche' ·~5,. ng::nr, el Planche 5R.)
(Collec/.. Dias.)
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PHOT. 25. - a) Bordure de coussin ancien:· b) Nnpperon nncien.(Voir Planche 2, Dg. 18.)
(Col/ccl. Dias.)
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PHOT. 26. - o.) Coussin ancien; bJ Napperon ancien .
. ./ (Colleet. Dias.)
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PHOT. 27. - a) Coussin b) Délails du précédent.
{Collecl. lvladame Amo!'.)
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PITOT. 28. - a) Coussin !J)Coussin.
(Col/cet. Dias.)
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1'110'1'. 29. - a) Coussin b) Dél;lils dù précédent.
(CollccL Mw/urne 11 mor.)
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a) Coussin.
(Voir Planche 60.)
(CoUeet. Dias)
PHOT. 30
. b) CoussIn.
(Voir Planche 59.)
(CoUcet. dcs Arts indigènes.)
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PTH)T. 3I. - Coussin.'
(Voir Planche 61.)
(Collcet. Madamc Chabcl'I.)
PUOT. 32. - a) et LJ) CO\l!'sins à décor cloisonné.
(Col/cct. Maùamc Chabert.)
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-- c .1'1101'. 33. - OUSSIn.
(Colzect. Madllme Challer/.)
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PHOT. 311. - a) DpI ails du suivant b) Coussin à point natté.
(Colleet. Dias.)
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PHOT. 3G. - Bordure de IiI.
(Colleet. Dias.)
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PITOT. 36. - a) Détails de bordure de lit ;(Phot. 35.)
b) Détails de l'enlre-deux de eelte bordure.
a
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PHOT. 37. - Dessus de lit.
(Col/cet. Dias.)
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PIlOT. 38. - a) el b) Tentures murales pour israéliles.
(CoUcet. Dias.)
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PITOT. 39' - a) Ceinture.de.p'lOlalon.
• o. (Colleet. dcs .1r/s indigèncs.)
ù) Ceinllire de panlalon.
(Collee/.. Mai/ame Amor.)
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, .,:
PIlOT. 40. - a) Ceinture ~le pimtalon.
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b) Jarrelière.
(Voir Planche 3G, fig. IG4.)
(CoUeet. Dias.)
(Colleet. des Arts indigènes.)
PITOT. 4r. - a) Fausse manche; b) Col d'apparat; c) Pantalon de femme.
a
b
c
PITOT. 42. - Mouchoir-pochette.
PlIOT. !13. - Ceinture de panlalon .
. .~.':(Colleet. Madame Amo,..)
PHOT. 44. - Châle de bain;
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PUOT. Ml. - Cache-maillol.
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..PHOT. l16. - Pièces de 1:l~eLle.
Ca) Voile de tête; b) Epaulière; c) Bandeau frontal.)
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c
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PnOT. !Iï' - a) Di'iails du sllivnnl ; 1». Bordure de coussinE'n viE'UX Habat ou vieux Tétouan.
(CoUcet. Dias.)
b
(Collcet. Dias.)
PHOT. 119. - a) COllssin en vieux Télouan ou vIeux Habal
/») DIÇlails du préeédent.
a
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PHOT. 50. - a) Fragment dé broderie ancienne
b) Détails du précédent.(Voir Planche 35, fig. 155, ct Plallche 53.)
(Collee/. Dias.)
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PIlOT. 51. - Châle moderne P?ùi' damés chréLiennes.
(Collect. Madame Amor.)
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PHOT, Cl:>., - Housse de « radio »,