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Stratégies d’exploration fonctionnelle et de suivi thérapeutique Les marqueurs tumoraux sériques dans les cancers de l’ovaire et du col utérin Serum tumoral markers in ovarian and uterine collar cancers N. Callet Unité de gynécologie, centre René-Huguenin de lutte contre le cancer, 35, rue Dailly, 92210 Saint-Cloud, France Reçu le 17 juin 2004 ; accepté le 17 juillet 2004 Disponible sur internet le 9 décembre 2004 Résumé Plusieurs types de marqueurs tumoraux sont utilisés dans les cancers gynécologiques, en fonction du type histologique de la tumeur. Les dosages de CA 125, SCC et Cyfra 21-1 sont les marqueurs tumoraux des formes histologiques les plus fréquentes des cancers de l’ovaire et du col utérin. Néanmoins, leur utilisation dans le cadre de la surveillance et de l’évaluation des réponses aux traitements doit obéir à des critères stricts fondés essentiellement sur la connaissance de leurs cinétiques. L’interprétation des résultats doit se faire au vu des autres éléments cliniques et radiologiques. © 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés. Abstract Different types of tumour markers are currently proposed for monitoring gynaecologic cancers. CA 125, SCC and Cyfra 21-1 are the reference markers used in the most frequent histological forms of ovarian and uterine cervix cancers. However, the clinical value of these markers should be improved by using their kinetics, half-life and doubling times, rather than single values. Assays results should always be interpreted in the light of clinical and radiological data. © 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Marqueurs tumoraux ; Cancer de l’ovaire ; Cancer du col utérin Keywords: Tumour markers; Ovarian cancer; Cervix cancer 1. Introduction De nombreux marqueurs sont utilisés en pathologie can- céreuse gynécologique. Dans les tumeurs ovariennes des types histologiques les plus fréquents, le CA 125, l’ACE (antigène carcinoembryonnaire) et le CA 19-9 sont utilisés [7]. L’ a-fœtoprotéine, l’hCG dimérique et les chaînes b-hCG libres sont des marqueurs des tumeurs germinales de la femme. Parmi ces dernières, les tumeurs trophoblastiques consti- tuent une exception par rapport à la plupart des cancers en ce sens que dans ces tumeurs la b-hCG possède une valeur dia- gnostique, pronostique et de surveillance. Le SCC (squa- mous cell carcinoma antigen), le Cyfra 21-1 sont des mar- queurs associés aux cancers du col utérin. En dehors des tumeurs germinales et trophoblastiques, aucun marqueur tumoral sérique n’a une sensibilité ni une spécificité clini- ques suffisante pour pouvoir être utilisé en dépistage ou en diagnostic des cancers gynécologiques. L’intérêt clinique de ces dosages réside essentiellement dans la surveillance des tumeurs traitées. Le présent exposé ne concernera que les mar- queurs des cancers de l’ovaire et du col de l’utérus les plus fréquents. 2. Les marqueurs sériques des cancers de l’ovaire Malgré d’importants progrès thérapeutiques, notamment en matière de chimiothérapie, le cancer de l’ovaire reste un Adresse e-mail : [email protected] (N. Callet). Immuno-analyse & Biologie spécialisée 19 (2004) 366–369 http://france.elsevier.com/direct/IMMBIO/ 0923-2532/$ - see front matter © 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.immbio.2004.07.004

Les marqueurs tumoraux sériques dans les cancers de l’ovaire et du col utérin

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Stratégies d’exploration fonctionnelle et de suivi thérapeutique

Les marqueurs tumoraux sériquesdans les cancers de l’ovaire et du col utérin

Serum tumoral markers in ovarian and uterine collar cancers

N. Callet

Unité de gynécologie, centre René-Huguenin de lutte contre le cancer, 35, rue Dailly, 92210 Saint-Cloud, France

Reçu le 17 juin 2004 ; accepté le 17 juillet 2004

Disponible sur internet le 9 décembre 2004

Résumé

Plusieurs types de marqueurs tumoraux sont utilisés dans les cancers gynécologiques, en fonction du type histologique de la tumeur. Lesdosages de CA 125, SCC et Cyfra 21-1 sont les marqueurs tumoraux des formes histologiques les plus fréquentes des cancers de l’ovaire et ducol utérin. Néanmoins, leur utilisation dans le cadre de la surveillance et de l’évaluation des réponses aux traitements doit obéir à des critèresstricts fondés essentiellement sur la connaissance de leurs cinétiques. L’interprétation des résultats doit se faire au vu des autres élémentscliniques et radiologiques.© 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Abstract

Different types of tumour markers are currently proposed for monitoring gynaecologic cancers. CA 125, SCC and Cyfra 21-1 are thereference markers used in the most frequent histological forms of ovarian and uterine cervix cancers. However, the clinical value of thesemarkers should be improved by using their kinetics, half-life and doubling times, rather than single values. Assays results should always beinterpreted in the light of clinical and radiological data.© 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Mots clés : Marqueurs tumoraux ; Cancer de l’ovaire ; Cancer du col utérin

Keywords: Tumour markers; Ovarian cancer; Cervix cancer

1. Introduction

De nombreux marqueurs sont utilisés en pathologie can-céreuse gynécologique. Dans les tumeurs ovariennes des typeshistologiques les plus fréquents, le CA 125, l’ACE (antigènecarcinoembryonnaire) et le CA 19-9 sont utilisés [7]. L’a-fœtoprotéine, l’hCG dimérique et les chaînes b-hCG libressont des marqueurs des tumeurs germinales de la femme.Parmi ces dernières, les tumeurs trophoblastiques consti-tuent une exception par rapport à la plupart des cancers en cesens que dans ces tumeurs la b-hCG possède une valeur dia-gnostique, pronostique et de surveillance. Le SCC (squa-mous cell carcinoma antigen), le Cyfra 21-1 sont des mar-

queurs associés aux cancers du col utérin. En dehors destumeurs germinales et trophoblastiques, aucun marqueurtumoral sérique n’a une sensibilité ni une spécificité clini-ques suffisante pour pouvoir être utilisé en dépistage ou endiagnostic des cancers gynécologiques. L’intérêt clinique deces dosages réside essentiellement dans la surveillance destumeurs traitées. Le présent exposé ne concernera que les mar-queurs des cancers de l’ovaire et du col de l’utérus les plusfréquents.

2. Les marqueurs sériques des cancers de l’ovaire

Malgré d’importants progrès thérapeutiques, notammenten matière de chimiothérapie, le cancer de l’ovaire reste unAdresse e-mail : [email protected] (N. Callet).

Immuno-analyse & Biologie spécialisée 19 (2004) 366–369

http://france.elsevier.com/direct/IMMBIO/

0923-2532/$ - see front matter © 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés.doi:10.1016/j.immbio.2004.07.004

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cancer de mauvais pronostic, cela étant lié à son diagnosticdans la plupart des cas à un stade avancé. En effet, il n’existepas de signes cliniques spécifiques et la découverte de la mala-die se fait le plus souvent à des stades Figo (fédération inter-nationale de gynécologie et obstétrique) III ou IV, entraînantainsi des mauvais résultats au niveau de la survie des patien-tes (Tableaux 1,2). Dans les tumeurs ovariennes, le choix dumarqueur circulant à utiliser est conditionné par le type his-tologique de la tumeur (Tableau 3). Les principaux mar-queurs utilisés dans le cancer de l’ovaire sont : le CA 125pour les adénocarcinomes séreux, l’ACE, le CA 19-9, leCA 125 pour certains adénocarcinomes mucineux [7].

Le CA 125 est une glycoprotéine appartenant au groupedes mucines, produit par le gène MUC16 [9]. La structure dece marqueur est connue depuis peu, c’est une glycoprotéinede très haut poids moléculaire mais qui possède des caracté-ristiques spécifiques par rapport à d’autres mucines classi-ques. Sa concentration est exprimée en unités/ml et pour la

plupart des auteurs sa valeur seuil est de 35 U/ml. La demie-vie du CA 125 est de cinq à dix jours [4]. Le dosage isolé duCA 125 n’est pas un bon outil de dépistage ni de diagnosticde malignité des tumeurs ovariennes puisqu’il existe des varia-tions de la concentration du CA 125 dans d’autres patholo-gies non cancéreuses (Tableau 4). Néanmoins, couplé àl’échographie pelvienne, le dosage de CA 125 présente unintérêt majeur puisqu’une concentration élevée associée à unemasse pelvienne échographiquement suspecte signe la mali-gnité dans 80 % des cas [12] (Tableaux 5,6).

La concentration de CA 125 lors du diagnostic de la mala-die ou avant l’intervention chirurgicale est corrélée avec lestade de la maladie et la taille tumorale. Bien que contestépar certains, la concentration de CA 125 au diagnostic ducancer représente pour beaucoup un élément pronostique, unevaleur élevée de CA 125 lors du diagnostic impose une sur-

Tableau 1Principaux symptômes révélateurs de tumeurs malignes primitives de l’ovaire

Circonstances de découverte ProportionAugmentation du volume abdominal 28,5Ascite 12,5Métrorragies 15,0Troubles digestifs 6,5Troubles urinaires 4,0Altération de l’état général 2,8Examen systématique 1,5

Tableau 2Classification des cancers de l’ovaire (FIGO)

Stade I prolifération limitée aux ovairesStade II tumeur atteignant un ou deux ovaires et étendue aux organes

pelviensStade III tumeur d’un ou deux ovaires avec atteinte du péritoine

au-delà du pelvis et/ouStade IV atteinte ganglionnaire rétropéritonéale ou inguinale tumeur

d’un ou deux ovaires avec métastase à distance

Tableau 3Marqueurs sériques selon les types histologiques des cancers ovariens

Types histologiques Fréquence(%)

Marqueurs sériques

Tumeurs épithélialesSéreuses 85 CA 125Mucineuses 15 ACE, CA 19.9, M-CSFEndométrioïdes

raresCA 125 parfois

Cellules claires Pas de marqueursIndifférenciées Pas de marqueursTumeurs germinalesGerminomes

rares

Carcinomes embryonnaires hCG, b-hCG libre,a-fœtoprotéine

Tératomes variableTumeurs du sinus endodermiqueTumeurs mixtesGonadoblastomesTumeurs de la granulosa Inhibine, estradiol

Tableau 4Élévations non spécifiques du CA 125

Pathologies hépatobiliairesInsuffisance rénaleTuberculoseEndométrioseGrossessePériode menstruelleImprégnation estrogéniqueInflammation des séreuses et épanchements non cancéreuxAtteintes vasculairesTraitements par interféron

Tableau 5Marqueurs sériques des cancers du col utérin

Fréquence MarqueursCancers épidermoïdes 70 à 90 %

des casSCC (squamous cell carcinomaantigen)Cyfra 21-1

Cancers glandulaires 10 à 15 %des cas

ACE et CA 125

Formes mixtes etneuroendocrines

rares NSE (énolase neuronespécifique), chromogranine A

Tableau 6Classification Figo des cancers du col utérin

Stade I carcinome strictement localise au colstade IA : invasion est identifiée au microscopestade IB : lésions limitées au col ou infra clinique> stade IA

Stade II atteinte tumorale dépassant le col sans atteinte de la totalitédes paramètres ou atteinte du vagin sans le 1/3 inférieur

stade IIA : atteinte vaginale sans atteinte des paramètresstade IIB : atteinte proximale des paramètres

Stade III atteinte complète des paramètres ou atteinte du 1/3 inférieurdu vagin

stade IIIA : atteinte 1/3 inférieur du vagin sans atteintedes paramètresstade IIIB : atteinte paramètres + retentissement rénal

Stade IV extension en dehors du pelvis ou atteinte rectale ou vésicalestade IVA : atteinte des organes du voisinagestade IVB : métastases a distance.

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veillance ultérieure rapprochée [5]. La surveillance des patien-tes traitées pour cancer de l’ovaire a schématiquement deuxobjectifs : dépister précocement une récidive chez les patien-tes en rémission complète apparente et évaluer l’efficacité destraitements mis en œuvre en cas de rémission partielle. L’ana-lyse des résultats de CA 125 au cours de la surveillance despatientes devrait avant tout reposer sur les données de sa ciné-tique, notamment sur l’étude de la pente de décroissance(demie-vie) durant le traitement initial et sur son temps dedoublement en cas de reprise évolutive.

L’acte chirurgical entraîne des modifications des cellulesmésothéliales et provoque ainsi une réascension transitoiredu CA 125. Cette notion est importante à considérer afin dene pas doser ce marqueur trop tôt par rapport à l’interventionchirurgicale. Un délai supérieur à trois semaines est souventrecommandé. Au cours de la chimiothérapie postopératoire,ou lors des chimiothérapies dites d’induction (avant tout actechirurgical), l’évolution du CA 125 et notamment sa décrois-sance rapide et régulière constitue un critère prédictif pré-coce et fiable de l’efficacité thérapeutique, ainsi que de lachimiosensibilité de la tumeur. Les tumeurs agressives gar-dent des concentrations relativement élevées pendant les troisà quatre premiers cycles de chimiothérapie ou présentent unenormalisation tardive des marqueurs [8]. Ces critères incitentpour la plupart des auteurs à la poursuite de la chimiothéra-pie avec quelques cures supplémentaires [5]. L’élévation duCA 125 au cours de la surveillance doit être retenue commesigne d’alerte et doit être confirmée par un dosage ultérieur.Une augmentation du CA 125 selon une courbe exponen-tielle indique une reprise évolutive, le temps de doublementdu CA 125 est corrélé au délai de diagnostic clinique desrécidives. Le délai moyen, toutes tumeurs confondues est deun à six mois, quatre mois en moyenne pour les lésions chi-miosensibles et un mois pour les lésions chimiorésistantes[5]. L’élévation du CA 125 doit en particulier faire recher-cher des récidives intrapéritonéales ou des métastases à dis-tance.

On ne possède pas actuellement de marqueurs satisfai-sants en termes de sensibilité clinique dans les tumeurs ova-riennes non séreuses. Le CA 125 peut parfois être élevé.D’autres marqueurs tumoraux peuvent être utilisés notam-ment l’ACE [2]. L’ACE est une glycoprotéine appartenant àla superfamille des immunoglobulines, et qui intervient dansun des mécanismes d’adhésion intercellulaire. La valeur seuilpour l’ ACE est de 5 ng/ml avec les techniques radio-immunologiques. Il existe une ascension de l’ACE corréléeavec l’extension tumorale dans 70 % des cancers mucineuxovariens. Le CA 19-9 est un antigène circulant appartenant àla famille des mucines dont la valeur seuil est de 37 U/ml, ilpeut également être augmenté dans les tumeurs mucineusesde l’ovaire.

Devant l’absence des marqueurs de référence pour lestumeurs ovariennes d’histologie autre que séreuse, d’autresmarqueurs potentiels ont été étudiés notamment la moléculed’adhésion sICAM-1 (forme soluble de I’Inter-CellularAdhesion Molecule 1) et le facteur de croissance M-CSF

(Macrophage Colony Stimulating Factor) [2]. Dans cestumeurs ovariennes non séreuses, notre série de 34 patientesn’a pas montré de relation statistique de sICAM-1 avec lesstades Figo ou le type histologique des tumeurs, seul l’âgedes patientes au diagnostic était corrélé positivement à laconcentration sérique de sICAM-1 [2]. Au cours de la sur-veillance post-chirurgicale, les variations de sICAM-1 se sontavérées d’interprétation difficile du fait de la multiplicité pos-sible des origines tissulaires de cette molécule. Dans notregroupe de patientes, sICAM-1 était constamment mais fai-blement élevée, sa concentration ne devenant nettement anor-male qu’en cas de progression de la maladie. Au total, cettemolécule ne semble donc pas présenter d’intérêt clinique pourla surveillance des patientes porteuses de tumeurs non séreu-ses.

Le M-CSF, encore appelé CSF-1, est un facteur de crois-sance de la lignée monocyte–macrophage dont des concen-trations circulantes élevées ont été rapportées dans différentsadénocarcinomes [6]. Dans notre groupe de 34 patientes por-teuses de tumeurs ovariennes non séreuses, M-CSF était cor-rélé avec le stade Figo et l’évolution de la maladie. Au dia-gnostic, M-CSF était élevé (> 450 pg/ml) dans 82 % des cas.En cas de progression du cancer, la concentration de M-CSFétait comprise entre 600 et 3000 pg/ml. Ce marqueur mérite-rait donc d’être étudié dans de plus grandes séries de patien-tes dont la tumeur ovarienne n’exprime pas le CA 125 car ilse comporte comme un marqueur tumoral classique [2].

3. Les marqueurs sériques des cancers du col utérin

Plusieurs marqueurs sériques sont utilisés dans les can-cers du col utérin, mais leur utilisation n’est pas recomman-dée en routine par les standards, options et recommandationsde la fédération des centres de lutte contre le cancer [13].Pour les tumeurs épidermoïdes, qui constituent la forme his-tologique la plus fréquente des cancers du col utérin, le SCC(squamous cell carcinoma antigen) et le Cyfra 21-1 sont lesmarqueurs tumoraux à utiliser. Le SCC est une ov-serpine(inhibiteur de sérine protéase), codée par deux gènes très pro-ches, SCC A1 et SCC A2. Ce marqueur donne lieu à des aug-mentations non spécifiques en cas d’insuffisance rénale et depathologies bénignes pulmonaires, ORL, ou hépatiques chro-niques. Dans les adénocarcinomes, il faut utiliser des mar-queurs liés à ce type histologique, c’est-à-dire l’ACE, leCA 19,9 ou le CA 125 [1,14].

Le Cyfra 21-1 est un marqueur d’utilisation plus récentedans cette localisation que le SCC. L’immunodosage duCyfra 21-1 reconnaît un fragment circulant de la cytokéra-tine 19, et dans notre expérience, ce marqueur est performantdans les cancers épidermoïdes du col. Des augmentations nonspécifiques du Cyfra 21-1 sont observées en cas de patholo-gies pulmonaires bénignes ou d’insuffisance rénale.

Nous avons comparé le SCC et Cyfra 21-1 dans une sériede 79 cancers du col utérin [3,10]. Nos résultats montrentune concordance entre les deux marqueurs dans 65,8 % descas, avec des élévations isolées du Cyfra 21-1 dans 11 % des

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Page 4: Les marqueurs tumoraux sériques dans les cancers de l’ovaire et du col utérin

cas. Nous avons noté une corrélation statistiquement signifi-cative entre la concentration du Cyfra 21-1 et le volume tumo-ral, l’extension de la tumeur ou l’existence des métastases(stades FIGO), avec une augmentation dans 100 % des casdu Cyfra 21-1 dans les stades avancés de la maladie (stadesFigo III et IV). Chez les patientes dont le cancer suit uneprogression continue, non contrôlable par les thérapeutiquesactuelles, les deux marqueurs sont corrélés avec l’existencede cette progression. En cas de récidive, l’augmentation deCyfra 21-1 s’est montrée dans notre série de patientes plusprécoce que celle du SCC. Durant les traitements, la concen-tration sérique des marqueurs SCC et Cyfra 21-1 possède unevaleur prédictive vis-à-vis de la réponse thérapeutique [3,11].

Dans les adénocarcinomes du col, les dosages de CA 125et d’ACE peuvent être considérés comme des facteurs indé-pendants de pronostic [1].

4. Discussion

La surveillance des femmes atteintes des cancers del’ovaire ou du col utérin se fait de façon variable selon leséquipes en fréquence et dans ses modalités. Néanmoins, pourla plupart d’entre elles, cette surveillance est trimestrielledurant la première année, puis semestrielle pendant cinq ans.La surveillance est avant tout clinique, mais elle est égale-ment biologique avec des dosages sériés des marqueurs asso-ciés aux différents types histologiques, aidés d’examens radio-logiques comme le scanner abdominopelvien souvent annuelou à la suite de signes d’appel cliniques. Dans notre pratiquequotidienne, les dosages de marqueurs tumoraux font partieintégrante de la surveillance des tumeurs cancéreuses gyné-cologiques, ces dosages ne font cependant pas partie desrecommandations en ce qui concerne les cancers du col uté-rin [13]. Devant une élévation isolée d’un marqueur tumoral,sans signes cliniques associés et sans anomalies à l’imagerie,se pose très souvent le problème de la reprise d’un traitementantitumoral. Les nouvelles techniques d’imagerie (IRM et plusrécemment TEP-scan) peuvent apporter une aide au clinicienen identifiant les récidives, cependant nombreuses sont lespatientes qui présentent seulement dans un premier temps uneélévation des marqueurs tumoraux sans autre point d’appel.Ce problème n’est pas seulement celui du médecin, il est aussicelui de la patiente qui sait qu’elle a un résultat d’examensanguin anormal et qui constate que le médecin ne lui donnepas de traitement immédiatement. Cette situation est difficileà vivre chez ces patientes déjà fragilisées psychologique-ment par leur passé et le vécu de leur maladie.

5. Conclusion

Faut-il traiter ou non les patientes en présence d’une élé-vation isolée d’un marqueur tumoral ? La réponse à cette ques-tion est très variable d’une équipe à l’autre. Des études sont

en cours (protocoles de l’EORTC, European Organisationfor Research and Treatment of Cancer), pour pouvoir com-parer les résultats sur la survie globale entre deux groupes depatientes, traitées ou non, à la suite d’une élévation isoléed’un marqueur tumoral. Par ailleurs, les études clinicobiolo-giques comportant des paramètres de la cinétique des mar-queurs tumoraux (demie-vie de décroissance et temps de dou-blement) devraient rendre leur utilisation plus performantepour le dépistage des rechutes et l’évaluation de l’efficacitédes traitements, mais les critères d’interprétation des résul-tats de cinétique ne sont pas encore parfaitement formalisés.

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