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Les problèmes personnels reliés à l'usage des drogues illicites chez les décrocheurs en comparaison avec les étudiants

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Les problèmes personnels reliés àl'usage des drogues illicites chez les décrocheurs encomparaison avec les étudiantsAuthor(s): Daniel CousineauSource: Canadian Journal of Public Health / Revue Canadienne de Sante'e Publique, Vol. 87, No.5 (SEPTEMBER / OCTOBER 1996), pp. 329-332Published by: Canadian Public Health AssociationStable URL: http://www.jstor.org/stable/41993814 .

Accessed: 15/06/2014 03:52

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Les problèmes personnels reliés à

l'usage des drogues illicites chez les

décrocheurs en comparaison avec les

étudiants

Daniel Cousineau, MD , PhD

La consommation abusive de drogues est associée à des problèmes de santé chez les adolescents. Ces difficultés peuvent se manifester sous forme d'anxiété ou de dépression,1 et elles peuvent être même reliées au suicide.2 Une étude de Santé Québec révèle que près de deux fois plus de jeunes suicidaires ont consommé des drogues en comparaison avec les non sui- cidaires.3 La gravité de cette situation souligne le besoin de mieux documenter les facteurs associés à l'usage abusif des drogues. Ces causes encore mal définies s'avèrent multiples et appartiennent à la fois au domaine biologique, psychologique et social.4 Concernant l'aspect biologique, une étude sur l'impact de la nature du pro- duit a été récemment réalisée chez les étu- diants du Québec.5 Les données de cette recherche révélaient que les proportions de jeunes qui mentionnent des problèmes per- sonnels reliés aux drogues augmentaient progressivement parmi les usagers de cannabis, d'hallucinogènes, d'inhalants et de cocaïne. Ces résultats soulèvent la possi- bilité que le pouvoir toxicomanogène des drogues soit un facteur étiologique impor- tant pour la présence de difficultés reliées à l'usage de ces substances.

Un rôle de la nature de la drogue comme facteur responsable des difficultés associées à l'usage de ces substances n'exclue pas une influence émanant des caractéristiques du consommateur. Cette recherche antérieure sur les psychotropes fut réalisée en milieu scolaire,5 et les résul- tats ne peuvent donc s'appliquer qu'à la population estudiantine. Or, au Québec, le quart des jeunes ne terminent pas leurs

Correspondance : Dr Daniel Cousineau, Direction de la santé publique des Laurentides, 1000 Labelle, St-Jérôme, QC J7Z 5N6

études secondaires.6 Les décrocheurs représentent ainsi une proportion impor- tante des adolescents pour lesquels nous connaissons moins bien la problématique des psychotropes. Or, la consommation de drogues s'avère plus probable parmi les jeunes qui manifestent des problèmes so- ciaux comme le décrochage scolaire.7 Cette étude vise donc à documenter l'usage des drogues parmi les décrocheurs, ainsi que les problèmes reliés à la consommation de ces substances. Ces résultats seront alors comparés avec ceux obtenus chez les étu- diants.

MÉTHODOLOGIE

Les données chez 3 212 étudiants furent recueillies lors d'une recherche antérieure réalisée en 1992 avec l'aide d'un question- naire auto-administré distribué durant une heure régulière de cours.5 Ces adolescents étaient âgés de 10 à 21 ans et fréquentaient quatre établissements scolaires dans une ville de 30 000 habitants localisée au nord de Montréal. Le même questionnaire fut ensuite complété par 435 décrocheurs âgés de 11 à 21 ans et vivant dans la même ville que celle desservie par les quatre établisse- ments scolaires. Ces participants furent sol- licités avec l'aide d'affiches publicitaires placées dans des commerces et des jour- naux locaux, moyennant une rémunération financière de 10 dollars. La période de recrutement eut lieu durant deux étés con- sécutifs et dura 14 mois, soit entre juillet 1993 et août 1994. Les décrocheurs par- ticipèrent à cette enquête en se présentant dans les locaux d'un organisme commu- nautaire local.

La consommation de psychotropes fut estimée en soumettant quatre questions différentes aux adolescents, leur deman-

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ABRÉGÉ

La consommation de drogues et les pro- blèmes personnels reliés à l'usage de ces subs- tances ont été évalués parmi les décrocheurs et les étudiants. Les résultats provenant d'un questionnaire auto-administré chez 435 décrocheurs ont été comparés avec ceux obtenus parmi 3 212 étudiants lors d'une étude antérieure. La consommation de drogues s'avère significativement plus élevée chez les décrocheurs que chez les étudiants. Les proportions de jeunes de sexe masculin ou féminin qui mentionnent des problèmes personnels reliés à l'usage des psychotropes s'élèvent progressivement parmi les consom- mateurs de cannabis, d'hallucinogènes, d'inhalants et de cocaïne, et ce tant chez les décrocheurs que chez les étudiants. De plus, les proportions de décrocheurs ou d'étudiants qui mentionnent des difficultés avec les psy- chotropes varient de façon inversement pro- portionnelle avec les pourcentages d'usagers de ces produits. Ces résultats suggèrent que l'identification de la nature de la drogue représente un indice de la fréquence des problèmes personnels reliés à l'usage des psy- chotropes, et que les adolescents à risque for- ment des groupes restreints d'utilisateurs.

ABSTRACT

The consumption of psychoactive drugs and the personal problems related to sub- stance use were evaluated among school dropouts and students. Results obtained from a self-administered questionnaire among 435 school dropouts were compared with those obtained in a previous study among 3,212 students. Drug consumption is significantly higher in school dropouts than in students. The proportions of male or female youths who report personal problems related to drug use increase progressively among the consumers of cannabis, hallucino- gens, solvents and cocaine for each of the two groups. Moreover, the proportions of school dropouts or students who mention difficul- ties with psychotropic drugs vary inversely with the percentages of users for these prod- ucts. These results suggest that the identifica- tion of the drug type represents an index for the frequency of personal problems related to drug use, and that adolescents at risk form small groups of consumers.

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DROGUES CHEZ LES DÉCROCHEURS

dant s'ils avaient utilisé durant les 12 mois précédant l'étude soit du cannabis (mari- juana, haschisch, pot), soit des hallu- cinogènes (acide, LSD, mescaline, PCP, champignons magiques), soit des inhalants (colle, aérosol, popper, essence) ou soit de la cocaïne. Chaque question comportait un choix de «oui» ou «non» comme réponse.

La présence de problèmes personnels reliés à l'utilisation des psychotropes fut évaluée en posant la question suivante, qui comportait un choix de «oui» ou «non» comme réponse : «La consommation d'alcool ou de drogues te cause-t-elle des problèmes ?» Les tests statistiques utilisés pour l'analyse des résultats sont la com- paraison des proportions entre deux groupes indépendants et la régression linéaire simple.8

RÉSULTATS

Les réponses nécessaires pour l'analyse des résultats furent obtenues pour 95,8 % des décrocheurs et 95,1 % des étudiants. Parmi les étudiants, les garçons et les filles formaient des pourcentages comparables de répondants, tandis que les garçons sont proportionnellement plus nombreux parmi les décrocheurs. En conséquence, la proportion de décrocheurs de sexe mas- culin est significativement plus élevée que celle observée chez les étudiants, avec des valeurs de 69,2 % et 47,8 % respective- ment. Comme corollaire, la proportion de décrocheuses, soit 30,8 %, s'avère signi- ficativement plus faible que celle de 52,2 % enregistrée chez les étudiantes. Il faut cependant souligner que les âges moyens varient peu entre les décrocheurs et les étudiants de sexe masculin ou féminin. Parmi les garçons, l'âge moyen des décrocheurs est de 16,4 ans, compara- tivement à une valeur de 16,1 ans chez les étudiants. Parmi les filles, les âges moyens chez les décrocheuses et les étudiantes s'établissent respectivement à 16,1 et 15,8 ans.

Le tableau I présente les pourcentages pour les usagers de drogues chez les étu- diants et les décrocheurs de sexe masculin, ainsi que les pourcentages d'usagers rap- portant des problèmes personnels reliés à l'usage de ces substances. Le tableau II montre les mêmes données, mais cette fois-

TABLEAU I Pourcentages pour les usagers de drogues et pour les usagers mentionnant des

problèmes reliés à la consommation des psychotropes chez les étudiants et les décrocheurs de sexe masculint

Pourcentages d'usagers Pourcentages d'usagers avec des problèmes Substance Étudiants Décrocheurs Étudiants Décrocheurs Cannabis 22~5 67,5»

~~ ÏP

~~ 31,3*

Hallucinogènes 13,2 55,6* 17,8 36,9* Inhalants 5,6 19,2* 15,1 43,1* Cocaïne 7,2 17,9* 23,6 53,7* Un produit 14,2 22,9* 6,4 21,8* Deux produits 7,7 31,4* 16,8 28,4* Trois produits 4,8 14,2* 23,2 39,5* Quatre produits 1,1 7^9* 2^5 62,5* Un astérisque indique une différence significative entre les étudiants et les décrocheurs. t Les proportions sont présentées selon la nature du produit ou selon le nombre de produits con-

sommés.

TABLEAU II Pourcentages pour les usagers de drogues et pour les usagers mentionnant des

problèmes reliés à la consommation des psychotropes chez les étudiants et les décrocheurs de sexe féminint

Pourcentages d'usagers Pourcentages d'usagers avec des problèmes Substance Étudiants Décrocheurs Étudiants Décrocheurs Cannabis 22,8 50,7* 16,6 36,7* Hallucinogènes 10,8 50,7* 18,8 38,2* Inhalants 6,6 22,3* 27,0 50,0* Cocaïne 4,9 14,9* 26,5 45,0* Un produit 15,6 16,4 6,9 27,3* Deux produits 7,8 24,6* 16,9 27,2* Trois produits 3,3 13,4* 32,1 50,0* Quatre produits 1,0 8,2* 35,3 54,5* Un astérisque indique une différence significative entre les étudiants et les décrocheurs t Les proportions sont présentées selon la nature du produit ou selon le nombre de produits consommés.

ci pour les étudiants et les décrocheurs de sexe féminin. Les décrocheurs de sexe mas- culin ou féminin présentent des valeurs sig- nificativement plus élevées comparative- ment aux étudiants pour les pourcentages d'usagers de cannabis, d'hallucinogènes, d'inhalants et de cocaïne, ainsi que pour les proportions d'utilisateurs de ces substances qui citent des problèmes personnels reliés aux psychotropes. Un phénomène similaire persiste lorsqu'on examine l'utilisation du nombre de drogues. En effet, les décrocheurs mâles se caractérisent par une augmentation significative par rapport aux étudiants pour les pourcentages d'usagers consommant soit une, soit deux, soit trois ou soit quatre drogues, et ils présentent une élévation significative pour les propor- tions de ces quatre groupes d'utilisateurs mentionnant des difficultés personnelles. Ces mêmes augmentations significatives sont observées parmi les décrocheuses, sauf pour la proportion d'usagers d'une seule substance qui s'avère comparable à celle obtenue chez les étudiantes.

Les valeurs exposées aux tableaux I et II pour les étudiants et les décrocheurs de sexe masculin ou féminin indiquent une tendance progressive à la baisse pour les pourcentages de consommateurs de cannabis, d'hallucinogènes, d'inhalants et de cocaïne, ainsi que pour les pourcentages d'utilisateurs de une, deux, trois ou quatre substances. Par contre, on observe pour ces mêmes groupes une augmentation gra- duelle pour les proportions de consomma- teurs mentionnant des problèmes person- nels reliés à l'usage des psychotropes. Ce phénomène prévaut tant chez les décrocheurs que chez les étudiants de sexe masculin ou féminin. Ces données sug- gèrent l'existence d'une relation inverse entre la prévalence de l'utilisation des drogues et la présence de difficultés lorsque cet usage est caractérisé soit en fonction de la nature du produit ou soit en fonction du nombre de substances consommées. La relation entre ces deux variables, soit la prévalence de l'usage et la prévalence pour les problèmes est illustrée à la figure 1 pour

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DROGUES CHEZ LES DÉCROCHEURS

Figure 1 . Relation entre les pourcentages d'usagers de drogues chez les ado- lescents de sexe masculin ou féminin et les pourcentages d'usagers mentionnant des problèmes personnels reliés à l'usage des psy- chotropes. Cet usage est caractérisé pour chacune des quatres drogues (cannabis, hallucinogènes, inhalants, cocaïne), ainsi que pour le nombre de produits utilisés qui varie de un à quatre. La par- tie supérieure illustre les valeurs obtenues chez les étudiants, tandis que la partie inférieure montre celles obtenues chez les décrocheurs.

les étudiants et les décrocheurs de sexe masculin ou féminin. L'analyse de régres- sion révèle des corrélations négatives entre ces deux variables tant chez les étudiants que chez les décrocheurs. De plus, pour ces deux groupes d'adolescents, les valeurs observées ne diffèrent pas entre les garçons et les filles. Ces résultats suggèrent que l'accroissement des difficultés personnelles associées aux psychotropes correspond à des groupes de plus en plus restreints d'usagers. En d'autres termes, la gravité du problème varierait inversement avec son ampleur, et ce tant chez les décrocheurs

que chez les étudiants de sexe masculin ou féminin.

DISCUSSION

Les données de cette recherche provien- nent d'un questionnaire auto-administré. Les prévalences pour l'usage des drogues et la présence de problèmes associés à l'utilisa- tion de ces substances sont donc basées sur une déclaration spontanée des répondants. Cette approche introduit un élément de subjectivité dans l'analyse des résultats. Ce facteur revêt une certaine importance en

raison du phénomène du déni inhérent à la problématique des psychotropes,9 qui si- gnifie que les répondants pourraient mi- nimiser l'existence de troubles reliés à l'usage de ces produits. La prévalence pour ce genre de difficultés pourrait alors être sous-estimée. Une étude antérieure a cependant démontré que les valeurs obtenues avec le questionnaire utilisé dans cette recherche se comparaient avec celles rapportées par d'autres auteurs.10 Il a égale- ment été mentionné dans une autre étude11 que le profil de consommation de drogues mesuré avec cette approche chez les adoles- cents du Québec se rapprochait de celui observé chez les jeunes Ontariens.12 Ces similarités militent en faveur de la validité du questionnaire auto-administré utilisé dans cette enquête. Toutefois, des proto- coles différents basés sur des mesures plus objectives s'avèrent nécessaires.

Les décrocheurs répondirent au même questionnaire que celui utilisé chez les étu- diants, mais dans des circonstances dif- férentes. Les étudiants participèrent à l'étude durant une heure régulière de cours, tandis que les décrocheurs furent sollicités par des affiches publicitaires. Ces approches différentes suggèrent que l'ensemble des étudiants figurent dans l'échantillonnage, comparativement à une proportion des décrocheurs. Il s'avère impossible de caractériser le profil de con- sommation de drogues chez les décrocheurs qui n'ont pas répondu à cette sollicitation. Toutefois, certaines données tendent à démontrer la représentativité de ces répondants. En effet, l'âge moyen des décrocheurs se compare à celui des étudi- ants, et ce tant chez les garçons que chez les filles. De plus, la proportion de garçons parmi les décrocheurs dépasse de façon sig- nificative celle observée chez les étudiants. Or, ce portrait semble conforme à la réa- lité, puisque davantage de garçons que de filles abandonnent le milieu scolaire.6 La période de collecte des données diffère également entre les décrocheurs et les étu- diants. Un intervalle de deux ans subsiste entre les deux groupes. On pourrait alors émettre l'hypothèse selon laquelle les valeurs plus élevées observées parmi les décrocheurs résulteraient en fait d'une aug- mentation spontanée de la problématique des psychotropes parmi l'ensemble des

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DROGUES CHEZ LES DÉCROCHEURS

adolescents. Il est cependant peu probable qu'un accroissement aussi important ait pu se produire au cours de cet intervalle.

Cette étude démontre un usage accru de drogues chez les décrocheurs comparative- ment aux étudiants, de même qu'une pré- valence plus élevée de difficultés associées à la consommation des psychotropes. Ce phénomène observé parmi des décrocheurs qui ont un âge comparable à celui des étu- diants et qui habitent dans la même ville suggère une influence des caractéristiques du consommateur sur la problématique des psychotropes. C'est ainsi que les motifs sous-jacents à l'abandon scolaire pourraient partager certaines caractéris- tiques communes avec les facteurs favorisant l'usage des drogues.13 Il a été récemment proposé que l'accroissement des problèmes en fonction du produit pourrait résulter du pouvoir toxico- manogène des drogues.5 En effet, certaines substances seraient plus susceptibles de provoquer une dépendance chez l'usager.14 Toutefois, cette recherche démontre que la majorité des adolescents utilisent plus d'une drogue, et que les prévalences pour les difficultés associées aux psychotropes s'élèvent progressivement avec le nombre de produits consommés. Ces observations peuvent jeter des doutes quant au rôle réel de la nature des drogues comme indice de la prévalence des problèmes personnels. On pourrait ainsi rétorquer que ces diffi- cultés résultent principalement de la con- sommation de substances multiples. Il demeure difficile d'analyser les influences respectives de la polytoxicomanie et de la nature du produit sur les difficultés per- sonnelles rapportées par les usagers. En effet, les données de cette étude indiquent que les décrocheurs ou les étudiants qui consomment uniquement soit des inhalants ou soit de la cocaïne représen- tent moins de 1 % des usagers. Ces effec- tifs s'avèrent trop faibles pour établir la relation entre la fréquence de l'usage de chacune des drogues consommées isolé- ment et la prévalence de problèmes per- sonnels reliés aux psychotropes. Toutefois,

l'analyse des résultats indique que même parmi les consommateurs de plusieurs substances, la fréquence des troubles reliés aux psychotropes continue à augmenter progressivement chez les usagers de cannabis, d'hallucinogènes, d'inhalants et de cocaïne. Cette observation tend à con- firmer la validité de l'identification de la nature du produit comme indice de la gravité de la consommation.

Cette étude démontre une relation inverse entre les prévalences pour l'usage des drogues et la présence de difficultés associées aux psychotropes. Cette situation prévaut autant pour la nature du produit que pour le nombre de substances consom- mées, et elle s'avère constante chez les étu- diants et les décrocheurs de sexe masculin ou féminin. Ces résultats suggèrent que l'utilisation des substances les plus toxico- manogènes est préconisée par des groupes de plus en plus restreints d'usagers. Une hypothèse a été proposée pour décrire ce phénomène.5 Selon cette théorie, les ado- lescents connaîtraient le danger des drogues et ils éviteraient l'utilisation des produits les plus susceptibles de leur causer des difficultés. Une étude appuie cette pos- sibilité, puisqu'elle démontre que les jeunes déclarent avoir de bonnes connaissances sur les drogues.15

La gravité des troubles reliés à l'utilisa- tion des drogues illicites ne doit pas occulter l'importance du tabagisme. La nicotine provoque une dépendance physique et psychologique,14 et l'usage de la cigarette représente ainsi une toxico- manie. Le tabac demeure cependant une drogue légale, alors que le cannabis, les hallucinogènes, les inhalants et la cocaïne s'avèrent des substances illicites. Les stratégies destinées à contrer l'usage du tabac diffèrent donc de celles axées contre la consommation de produits illicites. Concernant les drogues illicites, une inter- action entre le produit, l'usager et son environnement représente une dynamique bien documentée.4 Les programmes des- tinés à contrer l'usage abusif des drogues doivent donc considérer l'influence des

caractéristiques du consommateur ainsi que celles de son milieu. Les résultats de cette recherche tendent à démontrer l'importance qu'occupe également le pro- duit. Les inhalants et la cocaïne semblent plus particulièrement reliés à une préva- lence élevée de problèmes personnels. Le potentiel de dépendance pour ces subs- tances est bien connu,14 et les messages promotionnels pourraient peut-être inté- grer davantage ces connaissances.

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Reçu : 8 décembre 1995 Accepté : 6 mars 1 996

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