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Lycée G. EIFFEL – J.B. – Les servitudes – 2017/2018 1/14
Les servitudes d’intérêt privé
1 Présentation des servitudes
1.1 La définition
Une servitude est une charge imposée à un bien immobilier bâti ou non pour l’usage
ou l’utilité d’un bien immobilier appartenant à un autre propriétaire (article 637 du code
civil).
La servitude permet :
d’assurer l’utilisation d’un bien (par exemple : un droit de passage pour
accéder à une parcelle enclavée) ou le respect de l’intimité dans les relations de voisinage (exemple : servitude de vue) ,
d’améliorer l’utilisation d’un bien.
Pour que la charge constitue une servitude, il ne faut pas qu’elle soit imposée à la
personne ou en faveur de la personne propriétaire du bien, mais seulement à un immeuble
au profit d'un autre immeuble.
En conséquence, pour qu'il y ait servitude, il faut qu'il y ait deux immeubles
appartenant à des propriétaires différents sans pour autant que les deux immeubles soient
contigus.
La cour de cassation a jugé qu'une charge qui ne procurait aucun avantage au fonds
dominant, ne saurait constituer une servitude.
Le fonds qui profite de la servitude est le fonds dominant, celui qui la subit est le
fonds servant.
C’est une restriction au droit de propriété.
1.2 La nature des servitudes
La servitude est un droit :
réel : La charge est attachée à un bien et non à une personne. Ce lien est soit
actif soit passif. La servitude est transmise lors de la cession de la propriété
concernée,
immobilier : Il porte sur des terrains nus ou bâtis.
accessoire : les servitudes ne peuvent être séparées du fonds (propriété) auquel
elles sont attachées.
Les servitudes sont tellement liées à l’immeuble qu’elles ne peuvent être constituées
ou modifiées conventionnellement que par un acte authentique, c’est-à-dire par un acte
notarié.
Les servitudes sont dites actives pour le fonds dominant bénéficiaire, ou dites passives
pour le fonds servant débiteur.
Les immeubles dépendant du domaine privé de l'Etat ou des collectivités locales
peuvent être grevés de servitudes comme les biens privés. Cela n'est pas le cas du domaine
public qui est inaliénable et imprescriptible. Par contre les terrains privés destinés à être
incorporés au domaine public peuvent, dans le contrat de vente, faire l'objet d'une servitude au
profil des vendeurs.
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1.3 Les caractères des servitudes
1.3.1 Les servitudes apparentes
Les servitudes apparentes se manifestent par un signe extérieur qui est en général une
construction (exemple : servitude de vue par présence d'une fenêtre).
1.3.2 Non apparentes
Les servitudes non apparentes ou occultes sont invisibles, rien ne permet de les déceler
(exemple : servitude non aedificandi).
1.3.3 Continues
Les servitudes continues sont celles dont l’usage est ou peut être continuel sans avoir
besoin du fait actuel de l’homme (art. 688 alinéa2 du code civil). La servitude de vue existe
par le seul fait de la présence d’une fenêtre.
1.3.4 Discontinues
Les servitudes discontinues nécessitent l’intervention actuelle de l’homme pour être
exercées (exemples : servitude de passage, de puisage…) ;
1.4 Création des servitudes
1.4.1 Les servitudes naturelles
Elles découlent de la situation des lieux. Position du fonds servant par rapport au fonds
dominant.
1.4.2 Les servitudes établies par le fait de l'homme
1.4.2.1 Conventionnelles
Les propriétaires peuvent établir sur leur propriété n’importe quelle servitude, y
compris afin d’écarter ou de modifier une servitude légale, à condition qu’elle ne soit pas
imposée à la personne mais au terrain et qu’elle ne soit pas contraire à l’ordre public.
Les principales servitudes conventionnelles sont constituées de modifications
apportées aux servitudes légales, de servitudes de passage (en dehors du cas de l’enclave), de
servitudes non aedificandi ou non altius tollendi (interdiction de bâtir ou interdiction de bâtir
au delà d’une certaine hauteur).
La convention peut-être :
un acte authentique, reçu et signé par un notaire et publié aux hypothèques.
Un titre recognitif rappelant un titre constitutif.
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1.4.2.2 Par prescription acquisitive
Une servitude ne peut s’acquérir par prescription trentenaire que si elle est continue et
apparente. Cette possession doit être continue, non interrompue, paisible, publique, non
équivoque (ne permettant pas de mettre en doute la qualité de propriétaire) et à titre de
propriétaire (article 2229 du C.C.).
Une servitude de vue, qui existe du fait de la présence d’une ouverture donnant sur le
fonds voisin, est continue et apparente.
Une servitude de passage est certes apparente mais n’est pas continue car elle n’est
exercée que par l’intervention de l’homme ; elle ne peut donc s’acquérir par prescription
trentenaire.
Une servitude non altius tollendi est continue mais non apparente.
Celui qui revendique l’acquisition d’une servitude par prescription trentenaire doit
apporter la preuve de la possession trentenaire au moyen d’un acte de notoriété (art. 2229 du
code civil).
1.4.2.3 Par destination du père de famille
Il y a servitude par destination du père de famille lorsque la division d’un terrain qui a
appartenu à un même propriétaire, a fait naître une servitude : servitude de passage, servitude
de vue, … Ainsi, pour exister, la servitude par destination du père de famille doit résulter
directement de la séparation en deux d’une propriété et de l’existence d’un aménagement
réalisé avant séparation.
1.4.3 Les servitudes imposées par la loi
Les servitudes légales s’imposent dans les rapports entre les propriétaires en l’absence
de volonté expresse contraire. En effet, ces servitudes ne sont pas d’ordre public et peuvent
ainsi être écartées par un accord entre voisins, leurs bénéficiaires renonçant aux avantages
qu’elles leur confèrent.
Les servitudes légales sont par exemple :
la servitude de vue
la servitude de désenclavement
la servitude de recul des plantations
1.4.4 Mode d'acquisition
Caractère Titre Prescription Destination du
père de famille
Continue Apparente Art. 690 Art. 690 Art. 692
Non apparente Art. 691
Discontinue Apparente Art. 691
Non apparente Art. 691
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1.5 L’exercice des servitudes
Le propriétaire du fonds dominant peut, à ses frais, prendre les mesures ou faire tous
les ouvrages nécessaires pour user de la servitude et pour la conserver, à moins d'une
stipulation contraire de l'acte constitutif de la servitude.
À la fin de la servitude, il doit, à la demande du propriétaire du fonds servant, remettre
les lieux dans leur état antérieur.
Le propriétaire du fonds dominant ne peut faire de changements qui aggravent la
situation du fonds servant.
Le propriétaire du fonds servant ne peut rien faire qui tende à diminuer l'exercice de la
servitude ou à le rendre moins commode; toutefois, s'il a un intérêt pour le faire, il peut
déplacer, à ses frais, l'assiette de la servitude dans un autre endroit où son exercice est aussi
commode pour le propriétaire du fonds dominant.
Si le fonds servant vient à être divisé, cette division ne porte pas atteinte aux droits du
propriétaire du fonds dominant.
1.6 L’extinction des servitudes
La servitude s'éteint:
Par la réunion dans une même personne de la qualité de propriétaire des fonds
servant et dominant.
Par la renonciation expresse du propriétaire du fonds dominant. Dans ce cas, le
notaire doit établir un acte authentique et le publier au bureau des hypothèques
afin de le rendre opposable à l’acquéreur du bien au profit duquel la servitude
était établie, ainsi qu'aux tiers.
Par l'arrivée du terme pour lequel elle a été constituée.
Par impossibilité de l’exercer.
Par le non-usage pendant 30 ans, que la servitude soit légale ou
conventionnelle. Mais la servitude légale de passage en cas d’enclave ne
s’éteint pas par le non-usage.
2 Les servitudes dites légales
2.1 Ecoulement des eaux (Art. 640 à 645 du C.C.)
2.1.1 Eaux de ruissellement
Le fonds inférieur est tenu de recevoir les eaux qui s’écoulent naturellement du fonds
supérieur.
Le propriétaire du fonds supérieur ne doit pas aggraver la servitude sauf dans des cas
très limités dans l’intérêt de l’agriculture ou de l’industrie.
L'article 641 prévoit l'aggravation de cette servitude avec comme corollaire la faculté
pour le propriétaire du fonds inférieur d'être indemnisé.
Le propriétaire du fonds inférieur ne doit rien faire qui empêche cet écoulement
naturel.
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Dans le cas de sondage ou travaux souterrains, les eaux qui résultent de ces travaux et
qui s’écoulent naturellement vers le fonds inférieur doivent être reçues par ce dernier. Le
propriétaire du fonds servant peut demander des indemnités si cela procure des dommages.
Les eaux pluviales appartiennent aux propriétaires des fonds qui les reçoivent.
2.1.2 Egout des toits (servitude stillicide)
Tout propriétaire doit édifier le toit de ses bâtiments de telle sorte que les eaux de pluie
s’écoulent sur son terrain ou sur la voie publique.
Si les eaux s’écoulent directement du toit chez le voisin, ce dernier peut exiger la
réalisation de travaux de nature à remédier à la situation.
La servitude est respectée si les eaux tombées sur le toit d’un propriétaire sont
recueillies par des installations puis se déversent sur son propre fonds pour se répandre
ensuite, par le seul effet de la pente du sol, vers les fonds voisins inférieurs.
On peut acquérir, à titre de servitude, le droit de verser sur le fonds voisin les eaux
pluviales qui proviennent de son toit, créant ainsi une dérogation à l’article 681 du Code civil.
Comme cette servitude est continue et apparente, elle est susceptible de s’établir par titre, par
destination du père de famille ou par prescription.
En effet, la servitude est acquise par le propriétaire du toit si le voisin a subi pendant
trente ans sans réagir un écoulement provenant directement de la toiture en cause.
Si des décisions anciennes avaient pu admettre une présomption simple de propriété de
l'espace laissé pour la chute des eaux pluviales au profit de celui qui a élevé le bâtiment, la
Cour de cassation a depuis rappelé qu'il n'existe pas de présomption légale au profit du
propriétaire du bâtiment dont le toit fait saillie de la propriété de la bande de terrain située au-
dessous de la saillie du toit et il appartient à celui qui la revendique d'en faire la preuve.
(COUR D'APPEL Pau 20.03.2006 : Dalloz 2006, n°44, p.3038 - note de MEMETEAU
GERARD)
2.2 Droit de passage (Art. 682 à 685 du C.C.)
Le Code civil prévoit qu’un propriétaire qui n’a sur la voie publique aucun accès ou
une issue insuffisante, pour une exploitation agricole, industrielle ou commerciale, ou encore
pour la réalisation d’une opération de construction, peut demander à son voisin un passage
suffisant pour accéder à sa propriété.
Le droit de passage représente une contrainte pour le voisin, c’est pourquoi la loi lui
reconnaît un droit à indemnité. Cette indemnité est versée par le titulaire du droit de passage.
L’indemnité due au voisin doit être fixée avant l’établissement du droit de passage. Elle doit
être proportionnée aux dommages occasionnés au voisin. En pratique, cette indemnité peut
prendre la forme d’un versement en capital ou annuels.
La personne qui utilise cette servitude devra également prendre à sa charge tous les
frais d'entretien du chemin.
Le passage doit être pris sur la ou les propriétés à travers lesquelles le chemin est le
plus court ou le moins dommageable pour le fonds servant.
Lycée G. EIFFEL – J.B. – Les servitudes – 2017/2018 6/14
Si l’enclave provient d’un partage, le passage doit être consenti par le propriétaire des
parcelles provenant de ce partage. Il n’y a pas, alors, d’indemnité.
Lorsque l'enclavement disparaît, la servitude disparaît également, quelle que soit son
origine, y compris si elle émane d'un acte.
La servitude s’étend aux canalisations et câbles aériens nécessaires à l’exploitation du
fonds.
Une servitude de passage est certes apparente mais n’est pas continue car elle n’est
exercée que par l’intervention de l’homme ; elle ne peut donc s’acquérir par prescription
trentenaire.
La servitude de passage acquise par convention ou par destination du père de famille
est soumise à la prescription extinctive de trente ans.
La servitude légale de passage en cas d'enclave ne s'éteint pas par non-usage.
2.3 Les vues et les jours (Art. 675 à 680 du C.C.)
Une vue permet d’aérer la pièce et de voir sur la propriété voisine.
Il existe deux sortes de vues :
o Une vue droite est crée lorsqu’il est possible de voir sur la propriété
voisine sans se pencher ou tourner la tête.
La distance à respecter entre le mur où l’ouverture est pratiquée et la
limite de la propriété voisine est de 1,90 mètre.
Dans le cas d’une fenêtre, la mesure doit s’effectuer à partir du
parement extérieur du mur et dans l’axe de la fenêtre jusqu’à la limite
de propriété.
o Une vue oblique est crée lorsqu’il faut se pencher ou tourner la tête
pour avoir une vue sur la propriété voisine.
La distance à respecter est de 0,60 mètre, mesurée depuis l’angle de la
fenêtre jusqu’au point le plus proche de la limite de la propriété voisine.
Dans le cas d’un balcon ou d’une terrasse, la mesure doit s’effectuer au
plus court entre le rebord du balcon ou de la terrasse et la limite.
Un jour est une ouverture ne laissant pénétrer que la lumière. Le jour ne doit
pas pouvoir s’ouvrir, ne doit pas être transparent, peut être créé sur tout mur
d’habitation pour éclairer une pièce ou un escalier. Ces jours doivent être
garnies d'un treillis de fer dont les mailles auront un décimètre d'ouverture au
plus et d'un châssis à verre dormant.
Lycée G. EIFFEL – J.B. – Les servitudes – 2017/2018 7/14
Cependant, les jours doivent être établis à 2,60 mètres au dessus du plancher de
la pièce que l’on veut éclairer si c’est un rez-de-chaussée, et 1,90 mètre s’il
s’agit d’un étage.
Ces règles ont par conséquent pour objet de préserver l’intimité du voisin.
Dans certains cas, des vues ou des jours peuvent se situer à des distances inférieures à
celles prescrites par la loi.
Si votre voisin ouvre une fenêtre à moins de 1,90 m de la limite de votre propriété, ou ne
respecte pas la distance minimale de 0,60 m prescrite pour les vues obliques, vous pouvez
exiger la suppression de cette ouverture pendant 30 ans, délai au-delà duquel le voisin
bénéficiera d’une servitude de vue et où vous ne pourrez plus rien dire. Vous ne pourrez bâtir
une construction (même si elle ne comporte pas de fenêtre côté voisin) qu’à 1,90 m de
l’ouverture voisine (Cass. civ. 25-10-1972, J.C.P. 1973-2-17, 491 et D. 1973-756).
De même en préparant sa succession, un propriétaire divise son terrain sans tenir
compte des distances réglementaires. Si, après sa mort, vous achetez une parcelle du terrain,
vous devrez supporter une servitude de vue par destination du père de famille : vous ne
pourrez pas bâtir ou planter des arbres sans respecter les distances de vue réglementaires
depuis les ouvertures du voisin.
2.3.1 Définition de la vue droite
Il n’y a pas de définition de la vue droite, mais on peut retenir la suivante : la vue droite est
l’espace balayé par le regard, lorsqu’on se place dans l’axe de l’ouverture et qu’on regarde
droit devant soi, sans se pencher à gauche ou à droite.
Comme le montre le schéma ci-contre, la vue droite, pour
un observateur placé au milieu de la fenêtre, est l’espace
visuel compris entre les lignes perpendiculaires à la fenêtre,
AB et CD.
Autrement dit, dans tout l’espace de vision entre les deux
lignes perpendiculaires AB et CD, il doit y avoir au moins
1,90 m de distance entre l’ouverture et le fonds voisin.
Dans l’exemple ci-contre, il y a bien 1,90 m entre l’œil de
l’observateur et la limite séparative, mais non entre A et B
où il y a seulement 1,70 m. Si l’observateur se place en A
(au coin de la fenêtre), la distance de vue (AB) est
inférieure au minimum légal.
Conséquence : la « vue » est irrégulière et le voisin peut faire boucher la fenêtre.
Lorsque la limite séparative est constituée par un mur qui
appartient à l’observateur, la distance se calcule jusqu’à la
façade extérieure du mur (côté voisin). La distance AB
doit être de 1,90 m au moins.
1,90
Fonds voisin
A
B
C
D
Fenêtre
1,70
Fonds voisin
A
B
C
D
1,90
Fenêtre
Fenêtre
Limite
A
B
1,90
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Si le mur appartient au voisin, la distance se mesure jusqu’à
la façade intérieure du mur, c’est-à-dire visible de
l’observateur.
Si la distance est légèrement inférieure à 1,90 m, l’acquisition
de la mitoyenneté peut, peut-être, permettre de respecter la
distance légale, car elle fait reculer la limite séparative au
milieu du mur, qui correspond à la limite séparative des deux
fonds.
La vue d’un balcon ou d’une terrasse
Lorsqu’il y a un balcon ou une terrasse, comme l’observateur
peut se placer à tout endroit de cet espace avancé, on se trouve à
nouveau en présence d’une vue droite et non pas d’une vue
oblique ; il devra donc toujours y avoir 1,90 m au moins entre le
point le plus avancé de la terrasse et la limite séparative.
Lorsqu'une ouverture est prolongée par un balcon ou une
terrasse accessible (cas de la porte-fenêtre), la distance se
mesure de la partie la plus extérieure du balcon ou de la terrasse.
Cette distance doit être respectée par rapport à chaque
côté de la terrasse.
2.3.2 La vue oblique
C’est l’espace balayé par le regard lorsqu’on se place au
milieu de la fenêtre et qu’on se penche à gauche ou à
droite.
Sur le schéma ci-dessous, ce sont les zones situées de part
et d’autre des lignes perpendiculaires au mur, AB et CD.
Pour la vue oblique, le code civil (art. 679) exige une
distance minimale de 0,60 m. Cette distance se calcule à
partir des points A et C dans un arc de cercle dont le rayon
fait 0,60 m.
B
Fenêtre
Limite
A
1,90
B
Fenêtre
Limite
A 1,90
Terrasse
Limite
1,90
Limite
Terrasse 1,90
Fenêtre
A
B
C
D espace de
la vue
oblique
espace de
la vue
oblique
Fenêtre
A C
0,60 m 0,60 m
Lycée G. EIFFEL – J.B. – Les servitudes – 2017/2018 9/14
Il faut qu’entre tout point de cet arc de cercle (B, B’, B’’
etc…) et le point A, il y ait au moins 0,60 m.
Les termes de l’article 678 du code civil ne sont pas limitatifs : ils s’appliquent non seulement
aux fenêtres et balcons, mais aussi aux terrasses, plates-formes ou autres exhaussements de
terrain d’où l’on peut exercer une servitude de vue sur le fonds voisin (Cass. civ. 29-11-1983,
J.C.P. 6-7-1984 Prat. P. 363).
2.3.3 L’ouverture dans un mur de clôture
On ne peut pas pratiquer d’ouverture dans un mur de clôture qui sépare deux fonds. Que le
mur soit privatif ou mitoyen. Il se trouve en limite séparative et la distance est donc toujours
inférieure à 1,90 m.
Bien entendu, il pourra en être autrement si les deux propriétaires sont d’accord pour qu’une
ouverture soit pratiquée dans le mur (mitoyen ou privatif).
Il sera bon, dans ce cas, d’établir un acte notarié ; comme il s’agit de la création d’une
servitude conventionnelle de vue, celle-ci est seulement opposable à tous (acquéreurs,
héritiers du voisin) si elle a fait l’objet d’un acte authentique publié au bureau des
hypothèques.
2.3.4 Cas particuliers
- Lorsque deux propriétés sont séparées par un espace commun (ruelle, chemin, cour,
rivière…), la distance légale de 1,90 m ne se compte, non pas à partir du milieu de cet espace
commun, mais de la limite opposée (Cass. civ. 12-4-1972, Bull. civ. 1972-11-155).
- Lorsque la fenêtre ou le balcon donne sur un mur fermé (mur aveugle de la maison voisine),
la distance légale n’a pas à être respectée, si aucune vue n’est possible sur le fonds voisin
(Cass. civ. 3-7-1969, Bull. civ. 1969-3-551, p. 412).
- Si la vue ne donne que sur le toit du voisin, il en est de même (Cass. req. 7-11-1849, D.P.
1849-1-295), sauf si ce toit comporte un vasistas permettant de voir dans la pièce qu’il éclaire.
- On peut avoir un vasistas à moins de 1,90 m de la limite séparative s’il ne permet de ne voir
que le ciel et non le fonds voisin (Cour d’appel de Metz, 13-4-1853, D.P. 1854-5-705).
- La distance de 1,90 m n’a pas à être respectée par rapport
à la limite séparative si la vue donne sur un passage
dépendant du fonds voisin, mais que le propriétaire
observateur peut emprunter à titre de servitude et où le
voisin ne peut donc bâtir (art. 678 du code civil). Elle se
calcule de la fenêtre jusqu’au côté opposé du passage.
B"
B'
Limite
A
Fenêtre
B
Fonds voisin
0,60 m
B
Fenêtre
Limite
A
1,90
Lycée G. EIFFEL – J.B. – Les servitudes – 2017/2018 10/14
Les règles d’urbanisme vous obligeant à construire soit en
limite séparative, soit en retrait d’au moins 3 m, vous ne
pourrez édifier votre bâtiment en limite séparative.
2.3.5 Que faire si le voisin ne respecte pas la distance légale.
Il faut l’assigner en suppression de l’ouverture devant le tribunal de grande instance (recours
obligatoire à un avocat), qui ordonnera cette suppression.
2.4 Distances légales des plantations
2.4.1 Les arbres de plus de deux mètres
Les arbres de plus de deux mètres de hauteurs doivent être plantés à plus de deux
mètres de la limite séparative.
2.4.2 Les arbres de moins de deux mètres
Les plantations d’une hauteur inférieure à deux mètres doivent être plantées à au
moins cinquante centimètre de la limite séparative.
Les hauteurs sont prises à partir du sol naturel. Les distances sont comptées au plus
court à partir de l’axe de l’arbre (au pied) jusqu’à la limite séparative.
La hauteur de deux mètres doit être respectée en toute circonstance. Les arbres
poussent, cela implique que la taille doit se faire à une hauteur bien inférieure.
Si les distances précédentes ne sont pas respectées, seul le tribunal d’instance est
compétent pour décider l’arrachage de l’arbre planté irrégulièrement ou sa réduction à la
hauteur légale.
Cependant, après trente ans, la situation est acquise par prescription, l’arbre ne peut
plus être coupé. La durée démarre à partir du moment où la hauteur devient illicite.
Le voisin, sur la propriété duquel avancent branches et racines, peut faire couper les
branches par le propriétaire de l’arbre et couper lui-même les racines. Ce droit est
imprescriptible.
Le voisin peut également demander des dommages pour les dégâts causés par les
racines.
Couper soi-même les racines peut mettre en danger la vie de l’arbre, causer un
préjudice, c’est un acte qui engage votre responsabilité.
Le voisin peut recueillir les fruits qui tombent naturellement sur son terrain mais ne
doit pas les cueillir.
La jurisprudence considère que la mesure doit être effectuée, à partir du centre du
tronc, pris au niveau du sol, jusqu’à la limite séparative des propriétés.
A
B
Fenêtre
Limite
3,00
Construction nouvelle
0,50
Lycée G. EIFFEL – J.B. – Les servitudes – 2017/2018 11/14
Le code de la voirie routière interdit toute plantation (arbre ou haie) à moins de 2
mètres de la limite du domaine public. Il impose aussi des servitudes de visibilité aux endroits
dangereux.
3 Servitudes particulières
3.1 La servitude de cour commune
3.1.1 Définition
On peut définir la servitude de cour commune comme une charge imposée à un fonds
pour que la nouvelle construction soit faite de façon à laisser libre un espace entre cette
nouvelle construction et les constructions voisines.
Article L471-1
"Lorsqu'en application des dispositions d'urbanisme la délivrance du permis de
construire est subordonnée, en ce qui concerne les distances qui doivent séparer les
constructions, à la création, sur un terrain voisin, de servitudes de ne pas bâtir ou de ne pas
dépasser une certaine hauteur en construisant, ces servitudes, dites "de cours communes",
peuvent, à défaut d'accord amiable entre les propriétaires intéressés, être imposées par la voie
judiciaire dans des conditions définies par décret."
Cette servitude est soumise aux articles L471-1 à L471-3 et R471-1 à R471-5.
3.1.2 Application de la servitude de cour commune
Comme l'indique le code de l'urbanisme, c'est à l'occasion de la délivrance d'un permis
de construire que la création d'une servitude de cour commune peut être envisagée, car le
permis de construire tient compte de la distance entre les constructions.
Il a été admis que la servitude de cour commune pouvait être accordée à l'occasion de
l'octroi d'un permis modificatif.
Des indemnités sont dues par les bénéficiaires des servitudes aux propriétaires des
terrains grevés. Elles sont fixées, à défaut d'accord amiable, par voie judiciaire.
3.1.3 La servitude de cour commune au sens de l'article 637 du Code civil
L'article 637 du Code civil est ainsi rédigé : "Une servitude est une charge imposée sur
un héritage pour l'usage et l'utilité d'un héritage appartenant à un autre propriétaire."
La servitude de cour commune n'est donc pas une servitude au sens du Code civil, car
elle est imposée par l'administration au nom de considérations d'urbanisme et non dans le
cadre de rapports privés entre propriétés privées.
3.1.4 La servitude de cour commune par un accord amiable
L'accord amiable est un moyen de création de cette servitude.
Lycée G. EIFFEL – J.B. – Les servitudes – 2017/2018 12/14
La Cour de Cassation a admis que l'accord pouvait être implicite, mais il prendra le
plus souvent la forme d'un accord écrit, qui sera remis avec les pièces du pétitionnaire au
permis de construire.
La servitude ainsi instituée ne pourra pas se voir appliquer les règles relatives à
l'extinction des servitudes prévues par le Code civil.
Il n'est pas nécessaire que les parcelles concernées soient contiguës et il suffit que les
terrains soient voisins et définissent un espace contigu et homogène.
La servitude peut concerner un immeuble d'habitation et d'une manière générale peut
frapper des immeubles construits.
La servitude de cour commune n'emporte pas création d'une servitude de passage, par
elle-même.
3.2 La servitude de tour d'échelle
C’est celle qui permet de passer sur la propriété voisine et d’exécuter à partir de celle-
ci des travaux sur les immeubles (murs, bâtiments) dont on est propriétaire.
Le fait est qu’il n’en est pas question dans le code civil et qu’à défaut d’un accord de
bon voisinage permettant de réaliser ainsi les travaux ou de l’existence d’un contrat
permettant à un voisin de s’en prévaloir, ce sont les juges qui sont conduits à en définir le
régime.
Ils décident ainsi que :
Les travaux doivent être nécessaires et indispensables pour permettre le
maintien en bon état de conservation une construction existante.
Il doit s’agir de travaux de réparation ou d’entretien, mais pas de travaux
de construction d’un nouvel immeuble.
Lycée G. EIFFEL – J.B. – Les servitudes – 2017/2018 13/14
L’accès chez le voisin suppose que toute tentative pour effectuer les travaux de chez
soi, même au prix d’une dépense supplémentaire, se soit révélée impossible. Les modalités de
passage, la marge d’empiétement et le temps d’intervention doivent être aussi restreints que
possible, le juge pouvant en définir les limites.
Le propriétaire voisin est en droit d’obtenir des dédommagements au titre des
détériorations éventuelles et des troubles de jouissance inhérents au chantier.
Le refus de tour d’échelle peut être jugé abusif.
3.3 La servitude de surplomb.
Cour de cassation 3ème chambre civile Rejet 12 mars 2008 N° 07-10.164 :
Prescription trentenaire en matière de servitude de surplomb.
Les faits :
Le cas d'espèce intéressait une construction édifiée en limite de propriété. Au siège du
litige, une corniche (usuellement c'est le débord de la toiture ou la gouttière) se trouve en
surplomb par rapport au terrain du voisin. Ce dernier propriétaire y voit un empiétement et
demande sa disparition. Pour résister à cette prétention, il est invoqué, avec succès, une
servitude dite de surplomb acquise par prescription - la corniche a été édifiée depuis au moins
trente ans. Un pourvoi est alors formé. Fondamentalement, le pourvoi, assis sur l'article 637
du code civil, conteste qu'une corniche puisse présenter une utilité réelle pour le fonds
prétendument dominant.
La solution de la chambre civile :
La chambre sociale rejette le pourvoi et admet l’existence d’une servitude de surplomb
qui aurait été acquis par prescription.
Lycée G. EIFFEL – J.B. – Les servitudes – 2017/2018 14/14
Mais attendu qu'ayant relevé que la corniche avait été édifiée il y a plus de trente
ans avec l'immeuble, lequel, de type "chartreuse", ancien et de caractère, formait un tout
sur le plan architectural dans lequel elle s'intégrait pour être surmontée d'une balustrade
en pierre dans laquelle était intégré un fronton et souverainement retenu qu'elle présentait
un avantage pour l'usage et l'utilité du fonds des époux X..., en ce qu'elle faisait partie de
l'architecture même de leur immeuble, la cour d'appel, abstraction faite d'un motif
surabondant relatif à l'agrément, en a exactement déduit que le fonds des époux X..., qui
pouvaient se prévaloir d'une possession utile, bénéficiait d'une servitude de surplomb sur le
fonds voisin acquise par prescription