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HAL Id: hal-01893445 https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01893445 Submitted on 19 Oct 2018 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entiïŹc research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinĂ©e au dĂ©pĂŽt et Ă  la diïŹ€usion de documents scientiïŹques de niveau recherche, publiĂ©s ou non, Ă©manant des Ă©tablissements d’enseignement et de recherche français ou Ă©trangers, des laboratoires publics ou privĂ©s. Les vases grecs Alexandra Attia To cite this version: Alexandra Attia. Les vases grecs. UniversitĂ© de Lausanne: section d’archĂ©ologie et des sciences de l’antiquitĂ© et MusĂ©e historique de Vevey. Le goĂ»t des belles choses: collection archĂ©ologique de David Doret (1821-1904), pp.51-63, 2015, 978-2-940331-46-8. hal-01893445

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Submitted on 19 Oct 2018

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L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, estdestinĂ©e au dĂ©pĂŽt et Ă  la diffusion de documentsscientifiques de niveau recherche, publiĂ©s ou non,Ă©manant des Ă©tablissements d’enseignement et derecherche français ou Ă©trangers, des laboratoirespublics ou privĂ©s.

Les vases grecsAlexandra Attia

To cite this version:Alexandra Attia. Les vases grecs. UniversitĂ© de Lausanne : section d’archĂ©ologie et des sciences del’antiquitĂ© et MusĂ©e historique de Vevey. Le goĂ»t des belles choses : collection archĂ©ologique de DavidDoret (1821-1904), pp.51-63, 2015, 978-2-940331-46-8. ïżœhal-01893445ïżœ

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David Doret

1. Le nom cĂ©ramique vient du grec kerameikos qui signifie argile, d’oĂč le nom de cĂ©ramique donnĂ© au produit de cet artisanat.

Les «vases grecs »

Qu’est-ce qu’un vase grec ?

Le terme « vase grec » est employĂ© pour dĂ©signer la vaisselle d’ar-gile produite en GrĂšce ancienne ; il rassemble par extension toute la production manufacturĂ©e exportĂ©e ou assimilĂ©e que l’on retrouve autour de la MĂ©diterranĂ©e. Ainsi parle-t-on par exemple de « vases grecs d’Italie du Sud ». Certains de ces vases portaient un dĂ©cor figu-rĂ© et Ă©taient destinĂ©s Ă  une Ă©lite fortunĂ©e tandis que d’autres d’une facture plus simple avaient un usage quotidien. UtilisĂ©s pour stoc-ker, transporter, verser et boire dans le cadre du symposion – banquet –, ils Ă©taient aussi disposĂ©s dans les tombes ou en offrandes dans les sanctuaires.

La cĂ©ramique 1 est donc un tĂ©moignage fondamental. Plus rĂ©-sistante aux effets du temps, elle est une fenĂȘtre ouverte sur la vie publique et privĂ©e des populations anciennes par l’évocation de leurs univers social et culturel, de leurs croyances, mais aussi par sa diffusion parfois Ă  grande Ă©chelle, sur les Ă©changes et les relations commerciales antiques.

La redĂ©couverte des vases grecsLa dĂ©couverte des citĂ©s vĂ©suviennes – Herculanum en 1738 et Pom-pĂ©i en 1748 – suscite l’admiration et la curiositĂ©. On assiste dans ce sillage Ă  la multiplication des campagnes de fouilles en Italie du Sud et en Etrurie ; jusqu’à devenir systĂ©matiques, ces derniĂšres at-teignent parfois une ampleur considĂ©rable, comme l’illustrent dĂšs 1828 les fouilles de la nĂ©cropole Ă©trusque de Vulci, sous l’égide de Lucien Bonaparte, prince de Canino.

De la fascination de l’Antique qui se diffuse rapidement via les AcadĂ©mies et la tradition du « Grand tour » prend forme une vĂ©ritable anticomanie. Le marchĂ© de l’art alimentĂ© par tant de dĂ©couvertes rĂ©jouit les amateurs fortunĂ©s qui constituent leurs collections, futurs jalons des grands musĂ©es europĂ©ens.

DĂšs sa redĂ©couverte Ă  la fin du XVIIIe et au dĂ©but du XIXe siĂšcle, le « vase grec » est marquĂ© par l’ambivalence de son statut, Ă  la fois objet esthĂ©tique et objet de savoir. PrisĂ© des antiquaires, qui y voient

Alexandra Attia

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un rĂ©vĂ©lateur des pratiques sociales de l’AntiquitĂ©, il suscite l’intĂ©rĂȘt des collectionneurs Ă©clairĂ©s.

AdmirĂ© pour sa beautĂ© et la puretĂ© de ses lignes, il est considĂ©rĂ© comme le tĂ©moin du « bon goĂ»t » des Anciens. La multiplication des recueils gravĂ©s dĂšs le XVIIIe siĂšcle, reflets de collections rĂ©elles ou constitution de « collections gravĂ©es », achĂšve d’en Ă©tablir le prestige.

Structuration de la disciplineSi l’on a cherchĂ© dĂšs la structuration de la discipline archĂ©ologique, au dĂ©but du XIXe siĂšcle, Ă  Ă©tablir diffĂ©rentes taxinomies Ă  la ma-niĂšre des sciences naturelles afin d’organiser les connaissances rela-tives aux « vases grecs », ce n’est vĂ©ritablement qu’au dĂ©but du XXe siĂšcle, sous l’égide du savant britannique Sir John Davidson Beazley (1885-1970) que la discipline acquiert sa dimension « scientifique ».

J.D. Beazley rĂ©volutionne la dĂ©marche en prĂ©conisant un contact direct avec les Ɠuvres ; il se lance Ă  la recherche d’un maximum de donnĂ©es objectives sur les objets – provenance, lieu de dĂ©couverte et de conservation
– Ă  l’échelle internationale, en prenant soin de considĂ©rer les collections dans leur globalitĂ© sans distinction de qualitĂ©, ce qui le conduit Ă  la reconnaissance d’ensembles homogĂšnes et de particularitĂ©s rĂ©gionales.

Il faudra attendre la fin des annĂ©es 1960 et les travaux du nĂ©o-zĂ©-landais Arthur Dale Trendall (1909-1995) pour que cette mĂ©-thode soit appliquĂ©e de maniĂšre systĂ©matique Ă  la classification de la cĂ©ramique d’Italie du Sud, contribuant ainsi Ă  la dĂ©finition des principaux styles rĂ©gionaux, Ă  savoir, l’ « apulien », le « lucanien », le « campanien », le « paestan » et le « sicĂ©liote », au sein desquels se distinguent diffĂ©rentes personnalitĂ©s artistiques, le plus souvent dĂ©-signĂ©es de maniĂšre conventionnelle.

Cette mĂ©thode d’attribution stylistique, hĂ©ritĂ©e des sciences naturelles, est basĂ©e sur une combinaison d’observations trĂšs atten-tives aux rapports entre corps et fond, corps et posture, corps et vĂȘtement, au jeu des proportions, Ă  la constitution des anatomies ainsi qu’à l’organisation des parties ornementales et permet parfois d’établir un classement des vases par mains d’artistes, dĂ©signĂ©s la plupart du temps par des noms de convention.

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David Doret

La collection de « vases grecs » de David DoretC’est vraisemblablement au cours de ses nombreux voyages en Italie que David Doret acquiert de nombreux «vases grecs » ; ces derniers viennent complĂ©ter une collection d’antiquitĂ©s dĂ©jĂ  consĂ©quente et traduisent son affection pour l’art antique en gĂ©nĂ©ral qu’il dĂ©ve-loppe sans doute au cours de sa formation Ă  l’architecture et aux Beaux-arts.

Sa collection de « vases grecs » est un assemblage hĂ©tĂ©roclite d’objets de datation, de style et de qualitĂ© diverse, si bien qu’il est difficile aujourd’hui de percevoir les critĂšres ayant conduits Ă  leur acquisition, si ce n’est l’esthĂ©tisme mĂȘme de certains d’entre eux.Cette collection est d’autant plus difficile Ă  apprĂ©hender que les quarante-sept vases qui constituent cet ensemble sont malheureu-sement, comme c’est souvent le cas des collections rassemblĂ©es dĂšs la fin du XVIIIe et au XIXe siĂšcle, orphelins de contexte et de pro-venance, ce qui rend aujourd’hui difficile leur lecture et impossible leur datation de maniĂšre prĂ©cise.

La cĂ©ramique corinthienne (625-550 av. J.-C)C’est Ă  Corinthe Ă  la fin du VIIe siĂšcle av. J.-C. que naĂźt la technique de la figure noire 2. Cette technique consistait Ă  rendre les figures en vernis noir sur le fond d’argile rĂ©servĂ©, les dĂ©tails Ă©tant notĂ© au moyen d’incisions et rehaussĂ©s de rouge et de blanc. La production corinthienne est majoritairement reprĂ©sentĂ©e par de petits vases Ă  parfum au dĂ©cor miniaturiste – aryballe globulaire, alabastre – et par des cratĂšres Ă  colonnettes au dĂ©cor parfois narratif.

La production corinthienne est illustrĂ©e dans la collection Doret par une pyxis cylindrique Ă  couvercle Ă  bouton (A 32). La totalitĂ© de la surface du vase est dĂ©corĂ©e. Les flancs concaves du vase consti-tuent un large bandeau sur lequel se dĂ©ploie le dĂ©cor figurĂ© : une file d’animaux rĂ©els – panthĂšre, cervidĂ©, lion et chouette – que l’on retrouve sur le couvercle surmontĂ© d’un bouton de prĂ©hension. À l’époque archaĂŻque c’est Ă  Corinthe que cette forme, ornĂ©e de frises animales hĂ©ritĂ©es du proto-corinthien, est la plus rĂ©pandue.

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2. La technique Ă  figures noires consistait Ă  rendre les silhouettes en vernis noir sur le fond d’argile rĂ©ser-vĂ©. Les dĂ©tails Ă©tant notĂ©s au moyen d’incisions et rĂ©haussĂ©s de rouge et de blanc pour les carnations fĂ©minines.3. Parmi eux le cĂ©lĂšbre Euphronios, EuthymidĂšs, Phintias.

Les peintres de coupes attiques de la fin de l’archaĂŻsme (480-450 av. J.-C.)La technique de la figure rouge fut inventĂ©e Ă  AthĂšnes vers 530 av. J.-C. – sans doute par le Peintre d’AndokidĂšs –. Cette nouvelle technique oĂč les figures rĂ©servĂ©es dans l’argile se dĂ©tachent du fond en vernis noir supplante peu Ă  peu la technique de la figure noire 2 employĂ©e jusqu’alors et s’impose en quelques dĂ©cennies comme le type majeur de dĂ©cor sur la cĂ©ramique figurĂ©e.

Les dĂ©tails dĂ©sormais tracĂ©s au pinceau ou au vernis diluĂ© per-mettent de rendre les anatomies avec une plus grande souplesse. AprĂšs une phase d’expĂ©rimentation, ceux que l’on nomme les Pion-niers 3 exploitent les nouvelles possibilitĂ©s techniques en donnant du volume aux corps dans des scĂšnes riches de raccourcis laissant entrevoir une perspective certaine. À la fin de la pĂ©riode archaĂŻque et durant la premiĂšre dĂ©cennie du Ve siĂšcle av. J.-C. on assiste au

A 32 A 11

Pyxis cylindrique à couvercle à bou-ton corinthien avec décor animalier.

Provenance : CorintheTerre cuiteh. 5,3 cmPremier quart du VIe s. av. J.-C.

Fond et pied d’une coupe attique, Ă  figures rouges. Comaste de profil, la tĂȘte regardant vers le bas, mar-chant vers la droite. Il tient un bĂąton noueux dans la main droite et un skyphos dans la main gauche.

Provenance inconnueTerre cuiteh. 4,4 cmDĂ©but du Ve s. av. J.-C. (480-450 av. J.-C.)

A 32 A 11

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développement considérable des coupes à figures rouges et avec lui à la spécialisation de peintres.

La trĂšs belle coupe fragmentaire (A 11) dont le tondo est dĂ©corĂ© d’une figure de cĂŽmaste tenant un skyphos est caractĂ©ristique de cette production. Le grand soin apportĂ© au traitement des traits du visage et de l’anatomie, ainsi que l’adaptation de la composition Ă  la forme ronde du mĂ©daillon traduisent la grande maĂźtrise du peintre. Il est Ă©galement intĂ©ressant de souligner l’adĂ©quation du dĂ©cor liĂ© au comos Ă  l’usage du vase, la coupe Ă©tant le vase Ă  boire incontournable du symposium.

La cĂ©ramique Ă©trusqueLa cĂ©ramique Ă©trusque est variĂ©e et adopte au fil des Ă©poques un style diffĂ©rent Ă  l’image de l’évolution des techniques et du goĂ»t. L’Etru-rie connaĂźt au milieu du VIIe siĂšcle av. J.-C. un essor Ă©conomique et culturel et dĂ©veloppe une production massive de bucchero dans le dernier tiers du VIIe siĂšcle et la premiĂšre moitiĂ© du VIe siĂšcle av. J.-C. pour sa propre consommation et pour l’exportation –Latium, Campanie, Sardaigne, Carthage et Gaule mĂ©ridionale – ; majoritai-

A 2, A 1, A 17, A 223 (de gauche Ă  droite).

Amphore fragmentaire Ă©trusque Ă  figures rouges surpeintes. DĂ©cor : une femme ailĂ©e Ă  gauche tour-nĂ©e vers la droite et un jeune homme nu de profil en marche vers la gauche tenant de la main gauche un thyrse horizontal au-dessus de sa tĂȘte en direction de la figure fĂ©minine tandis que son himation est posĂ© sur le bras droit.Provenance inconnue

Terre cuiteh. 26,7 cmDeuxiĂšme tier du Ve s. av. J.-C. env. 470-440 av. J.-C.

CratÚre en calice fragmentaire étrusque surpeint. Dé-cor: « Amour et psyché » (?) Cygne et personnage ailé.

Provenance inconnueTerre cuiteh. 22,5 cmIVe s. av. J.-C.

A 2 A 1

Plat à pied bas à lÚvre retombante, étrusque, à figures noires. Décor géométrique. Groupe Genucilia.

Provenance inconnue Terre cuiteh. 5,5 cmIVe s. av. J.-C.

Céramique à vernis noir sans décor figuré. Urne ciné-raire? Impasto avec anse rubanée.

Provenance: Italie ( ?)Terre cuiteh. 11 cmÂge du fer (?)

A 17 A 223

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4. Cette technique consiste Ă  recou-vrir la surface du vase d’un engobe qui devient noir lors de la cuisson et Ă  appliquer par la suite un dĂ©cor peint en rouge. Des incisions laissant transparaĂźtre le noir sous-jacent sont mĂ©nagĂ©es Ă  la surface afin de noter les dĂ©tails. Cette technique n’est pas Ă©trusque mais hĂ©ritĂ©e de la technique attique dite « de Six », utilisĂ©e Ă  la fin du Ve siĂšcle av. J.-C.

rement de la vaisselle de table – vases à boire, à verser et à conserver le vin – les formes sont d’inspiration grecque ou autochtones.

L’amphore Ă  anses carĂ©nĂ©es Ă©trusque Ă  figures rouges (A 2) proche du groupe de Praxias est un bel exemple des capacitĂ©s techniques Ă©laborĂ©es en Étrurie entre 480 et 460 av. J.-C., puisque le dĂ©cor mettant en scĂšne des figures ailĂ©es a Ă©tĂ© rĂ©alisĂ© selon la technique de la surpeinture 4. Une petite production de cĂ©ramique surpeinte se dĂ©veloppe Ă  Vulci. La cĂ©ramique Ă  figures rouges dĂ©veloppĂ©e Ă  AthĂšnes vers 530 av. J.-C. est rarement utilisĂ©e en Etrurie avant la fin du IVe siĂšcle av. J.-C. Elle est souvent jugĂ©e sĂ©vĂšrement au regard de sa qualitĂ© moyenne, consĂ©quence d’une production de masse. Le cratĂšre en calice (A 1) en est la parfaite illustration.

Entre le IVe et le milieu du IIIe siĂšcle av. J.-C. se dĂ©veloppe une production d’assiettes Ă  tige ou de plats Ă  pied, fabriquĂ©s en sĂ©rie Ă  Cerveteri ou FalĂ©ries, rattachĂ©s au Groupe de Genucilia. On en connaĂźt plusieurs exemplaires dĂ©corĂ©s de motifs gĂ©omĂ©triques et de profils fĂ©minins, provenant gĂ©nĂ©ralement de dĂ©pĂŽts funĂ©raires. Le plat Ă  vasque peu profonde muni d’une gorge reposant sur un pied (A 17) atteste de cette production. Le mĂ©plat est ornĂ© d’une frise composĂ©e de cinq postes noires, tandis qu’à l’intĂ©rieur du mĂ©daillon sont disposĂ©es quatre languettes dirigĂ©es vers le centre marquĂ© d’un point ; entre les languettes, un motif de « W ».

Le dĂ©veloppement des ateliers Ă  figures rouges en Italie du SudLa production de cĂ©ramique Ă  figures rouges en Italie du Sud est foisonnante. Il semble qu’elle fasse son apparition dans la seconde moitiĂ© du Ve siĂšcle av. J.-C. en mĂȘme temps que la fondation de la colonie panhĂ©llenique de ThouroĂŻ par les athĂ©niens en 443 av. J.-C. Plusieurs hypothĂšses tentent d’expliquer cette coĂŻncidence, impu-table pour les uns Ă  la prĂ©sence de cĂ©ramistes athĂ©niens parmi les colons, ou bien encore au retour d’artisans magno-grecs formĂ©s Ă  AthĂšnes afin de concurrencer les ateliers attiques de maniĂšre directe. Si l’influence de la cĂ©ramique attique est perceptible dans tous les ateliers au dĂ©but de la production, les cĂ©ramistes italiotes s’en af-franchissent rapidement afin de crĂ©er un langage original sur des vases destinĂ©s Ă  une clientĂšle grecque et indigĂšne, pour une diffu-sion locale ou Ă  plus grande Ă©chelle.

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La production « apulienne » est sans conteste quantitativement la plus reprĂ©sentĂ©e dans nos musĂ©es et bien illustrĂ©e au sein de la collection Doret, par les deux pĂ©likĂ©s (A 24 et A 68) et un trĂšs beau canthare Ă  anses bifides (A 12) Ă  tĂȘte de femme, un cratĂšre en calice (A 225) dont l’iconographie de la face A, faite de rinceaux spiralĂ©s oĂč Ă©merge une protomĂ© masculine barbue, Ă©voque, par les efflores-cences vĂ©gĂ©tales le baroque apulien.

À partir du deuxiĂšme tiers du IVe siĂšcle av. J.-C. on assiste au dĂ©veloppement de grands centres de production en Campanie et Ă  partir du deuxiĂšme quart du IVe siĂšcle av. J.-C., Ă  Paestum, au sud de la Campanie.

Les spĂ©cificitĂ©s de la production dite « campanienne » transpa-raissent davantage dans le choix des typologies et des dĂ©cors secon-daires que dans l’iconographie Ă  proprement parler. La collection Doret compte plusieurs objets de fabrication « campanienne » – l’amphore-situle Ă  anse torsadĂ©e (A 23), l’oenochoĂ© Ă  tĂȘte de femme (A 7) et l’hydrie (A 226) proche du « Libation group » – et un cratĂšre en cloche sans doute de fabrication paestane (A 4).

La diffusion Ă  grande Ă©chelle de la cĂ©ramique « apulienne » en Italie du Sud influence les autres centres producteurs – on parle alors d’apulianisation – si bien qu’il est parfois difficile de distinguer l’origine de certains objets, surtout lorsqu’ils s’agit de sĂ©ries dont le contexte de dĂ©couverte nous est inconnu. C’est le cas des lĂ©cythes Ă  dĂ©cor rĂ©ticulĂ© (A 26, A 27, A 28, A 222) ou bien encore du lĂ©cythe miniature Ă  figures rouges (A 10).

Le « style de Gnathia » et la cĂ©ramique surpeinteAu milieu du IVe siĂšcle av. J.-C., se dĂ©veloppe en Apulie, une nou-velle technique dĂ©corative qui consiste Ă  appliquer Ă  la surface de vases en vernis noir des rehauts de plusieurs couleurs – rouge, jaune et blanc –. Ce procĂ©dĂ© est nommĂ© par G. Minervini en 1846 « Style de Gnathia » d’aprĂšs un groupe de vases dĂ©couverts Ă  Fasano, aux environs de la citĂ© messapienne de Gnathia.

Les travaux rĂ©cents de T.B.L. Webster et de J.R. Green ont mis en Ă©vidence l’existence d’autres centres producteurs en dehors de Ta-rente, en Étrurie, Ă  MĂ©taponte, Ă  Paestum et en Sicile, rendant ainsi l’appellation inexacte. La production, oĂč ont Ă©tĂ© identifiĂ©s peintres et ateliers, est divisĂ©e en trois phases : ancienne (360-330), moyenne

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A 225, A 226, A 68, A 23, A 12, A 4, A 24, A 7, A 10. A 28. A 26 (de gauche Ă  droite)

CratĂšre en calice apulien Ă  figures rouges. Proche du «Patera Painter». DĂ©cor face A : Ă  gauche, une femme drapĂ©e et parĂ©e, assise tenant une grande tige vĂ©gĂ©tale dans la main droite et prĂ©sentant de sa main gauche un grand coffret. En face d’elle, Eros, nu et richement parĂ©, debout la regardant, est reprĂ©sentĂ© le pied droit posĂ© sur un rocher. Il

tend de sa main droite, en direction du personnage fĂ©minin, un Ă©ventail et de sa main gauche, une couronne dĂ©corĂ©e de points et sur laquelle est suspendue une bandelette. DĂ©-cor face B: le buste d’une femme de face, au visage ovale, sortant d’une fleur, entourĂ© de rinceaux; ses cheveux sont bouclĂ©s et lĂąchĂ©s en

partie sur ses Ă©paules, elle porte un chignon au dessus de sa tĂȘte.

Provenance inconnue Terre cuiteh. 47 cmDeuxiÚme moitié du IVe s. av. J.-C.

A 225

Hydrie campanienne Ă  figures rouges proche du «libation group». ScĂšne de rencontre amoureuse au-tour d’un loutĂ©rion. À gauche, une jeune femme drapĂ©e d’un chiton tient sur sa tĂȘte un coffret dĂ©corĂ©; au centre, un jeune homme Ă  demi drapĂ©, couronnĂ© de laurier, tient un bĂąton de sa main droite derriĂšre son dos et esquisse un geste de la main droite en direction d’un personnage fĂ©minin assis qu’il regarde. au centre de la scĂšne, un personnage fĂ©minin

assis, vĂȘtue d’un chiton, les cheveux dissimulĂ©s sous un saccos, regarde le jeune homme de gauche en rete-nant de sa main un pan de sa drape-rie. À droite de la jeune femme, une femme debout, couronnĂ©e et parĂ©e lui tend une couronne de la main droite et tient un alabastre – vase Ă  parfum – de la main gauche. DĂ©cor face B: palmettes entrelacĂ©es.

Provenance inconnueTerre cuiteh. 44 cmDeuxiĂšme tiers du IVe s. av. J.-C.

A 226

PĂ©likĂ© apulienne Ă  figures rouges. Sur les faces A et B, une figure fĂ©minine en buste, coiffĂ©e d’un cercyphale, de profil, tournĂ©e vers la gauche.

Provenance inconnueTerre cuiteh. 19,7 cmIVe s. av. J.-C

Amphore-situle campanienne, Ă  anse torsadĂ©e Ă  fi-gures rouges. DĂ©cor face A, un jeune homme habil-lĂ© d’une tunique courte, tenant une lance de la main gauche. DĂ©cor face B, jeune homme nu, tenant une lance de la main gauche.

Provenance inconnue.Terre cuiteh. 30,3 cmIVe s. av. J.-C.

A 68 A 23

Canthare apulien à vasque évasée et à anses bifides à figures rouges.

Provenance inconnueTerre cuiteh. 16,7 cmDernier quart du IVe s. av. J.-C.

A 12

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(340/330-325) et tardive (325-270). Il semblerait que cette produc-tion ait subsistĂ© jusqu’au dĂ©but du IIe siĂšcle.

La premiĂšre pĂ©riode de production tarentine produit en majori-tĂ© des petits vases – skyphoi, canthares, lĂ©cythes, oenochoĂ©s – avec parfois des vases aux formes locales – askos, epychisis. Certaines zones godronnĂ©es ou reliefs prĂ©sents au niveau des attaches des anses laissent transparaĂźtre les liens existants avec les modĂšles mĂ©talliques.Les vases produits sont de qualitĂ© variable. Certains objets trahissent une production de masse par la rĂ©pĂ©tition de motifs mĂ©caniques, souvent liĂ©s Ă  l’iconographie dionysiaque.

L’oenochoĂ© trilobĂ©e (A 8) et la profusion de ses motifs dĂ©coratifs liĂ©s Ă  la vigne, rouges, blancs et jaunes, attestent des possibilitĂ©s pic-turales et dĂ©coratives que permet cette technique. L’oenochoĂ© (A 5) prĂ©sente quant Ă  elle un dĂ©cor plus sommaire limitĂ© Ă  l’épaule.

CratĂšre en cloche Ă  figures rouges paestan (?). DĂ©cor face A: un coq debout. DĂ©cor face B: un chien. assis.

Provenance inconnueTerre cuiteh. 13,5 cmIVe s. av. J.-C.

A 4

OenochoĂ© apulienne Ă  figures rouges. DĂ©-cor: figure fĂ©minine en buste, coiffĂ©e d’un cercyphale, de profil, tournĂ©e vers la gauche.

Provenance inconnue Terre cuiteh. 20 cmIVe s. av. J.-C.

A 24

OenochoĂ© Ă  embouchure trilobĂ©e Ă  figures rouges. DĂ©cor: tĂȘte de femme, de profil, coif-fĂ©e d’un cercyphale regardant vers la droite.

Provenance inconnueTerre cuiteh. 10 cmIVe-IIIe s. av. J.-C.

A 7

Petit lĂ©cythe Ă  figures rouges. DĂ©cror: tĂȘte de femme de profil.

Provenance inconnueTerre cuiteh. 8,7 cmDernier tiers du IVe s. av. J.-C.

A 10

Petits lecythes aryballisques apuliens ou cam-paniens à décor réticulé.

Provenance inconnueTerre cuiteA 28 : h. 6,8 cmA 26 : h. 13,1 cmIIIe s. av. J.-C.

A 28, A 26

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Le monde gréco-romain

La production de cĂ©ramique Ă  vernis noir hors d’AthĂšnesAu IVe siĂšcle av. J.-C. se dĂ©veloppe une production de cĂ©ramique Ă  vernis noir, Ă  l’instar de celle produite en GrĂšce et importĂ©e Ă  partir du Ve siĂšcle av. J.-C. Ces cĂ©ramiques sont enduites d’un engobe qui vire au noir lors de la cuisson en atmosphĂšre rĂ©ductrice. On identifie plusieurs centres producteurs – en Campanie, en Etrurie et en Sicile – au regard de leurs spĂ©cificitĂ©s – type de pĂąte, technique employĂ©e et mode de cuisson. DĂšs le IIIe siĂšcle av. J.-C., de nom-breux ateliers se dĂ©veloppent au Portugal, en Espagne et en Afrique du Nord. Dans les premiĂšres dĂ©cennies du IIIe siĂšcle av. J.-C., la cĂ©ramique Ă  vernis noir rencontre un fort succĂšs et supplante la cĂ©ramique figurĂ©e jusqu’au Ier siĂšcle av. J.-C.

Les tombes livrent frĂ©quemment de beaux exemples de cĂ©ra-miques Ă  vernis noir, Ă©galement attestĂ©es dans les zones d’habitats, mais de maniĂšre fragmentaire.Les vases Ă  vernis noir composent le service du banquet avec les vases Ă  boire ou Ă  verser – coupe, guttus, askos, oenochoĂ© (A 21)– et les vases Ă  manger – bol et patĂšre (A 37- A 40).

Le guttus Ă  filtre Ă  panse cĂŽtelĂ©e et bec en tĂȘte de lion rugissant (A 60) est reprĂ©sentatif de cette production. Cette forme ancienne est particuliĂšrement travaillĂ©e, en atteste sa dĂ©coration plastique et sa panse godronnĂ©e, inspirĂ©e de la cĂ©ramique mĂ©tallique, influence Ă©galement prĂ©sente sur le lĂ©cythe aryballisque (A 61).

A 21

OenochoĂ© Ă  vernis noir. Une mĂ©duse est reprĂ©-sentĂ©e de face, au-des-sous de l’anse.

Provenance inconnueTerre cuiteh. 14,2 cmIVe-IIIe s. av. J.-C.

A 21