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Cas clinique
Localisation inhabituelle pulpaire d’un kyste trichilemmal proliférant
Proliferating trichilemmal tumor of the pulp of a finger: Case report and review of the literature
Y. El Hassani a, J.-Y. Beaulieu a, E. Tschanz b, P.-S. Marcheix a,*a Service de chirurgie de la main, hôpital universitaire de Genève, rue Gabrielle-Perret-Gentil 4, 1211 Genève 14, Suisseb Service de pathologie clinique, hôpital universitaire de Genève, rue Gabrielle-Perret-Gentil 4, 1211 Genève 14, Suisse
Reçu le 15 octobre 2012 ; reçu sous la forme révisée le 17 octobre 2012 ; accepté le 4 février 2013Disponible sur Internet le 28 fevrier 2013
Résumé
Le kyste trichilemmal est une tumeur bénigne, développée aux dépens du follicule pileux, localisée surtout au niveau du cuir chevelu. Nousrapportons une observation clinique d’une localisation inhabituelle au niveau de la pulpe d’un doigt, confirmée par un examen anatomopa-thologique. Le principal diagnostic différentiel dans le cas rapporté était un panaris. Ce kyste provient probablement de la matrice unguéale, dont lakératinisation est similaire à la kératinisation trichilemmal. La biopsie-exérèse chirurgicale a permis une bonne évolution clinique.# 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Mots clés : Kyste trichilemmal ; Doigt ; Tumeur proliférante ; Anatomie pathologique
Abstract
Trichilemmal cyst is a benign tumor, developed from hair follicle, located mainly at the scalp. We report a clinical case of unusual location at thefinger pulp confirmed by histology. The main differential diagnosis in this reported case was a whitlow. The origin of this cyst is probably the nailmatrix whose keratinization is trichilemmal. Surgical excision biopsy allowed a good clinical outcome.# 2013 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
Keywords: Trichilemmal cyst; Finger; Tumor; Pathology
Disponible en ligne sur
www.sciencedirect.com
Chirurgie de la main 32 (2013) 117–119
1. Introduction
Le kyste trichilemmal constitue une tumeur bénigne,développée aux dépens du follicule pileux [1]. La localisationla plus habituelle de cette tumeur se situe au niveau du cuirchevelu. Cependant, d’autres localisations ont été décrites etdes cas isolés ont été rapportés dans la littérature [2,3]. Nousrapportons dans cette observation une localisation inhabituelleau niveau de la pulpe d’un doigt, qui nous a posé un problèmediagnostique, aussi bien clinique que radiologique.
2. Observation clinique
Le cas est survenu chez un jeune patient âgé de 30 ans,cuisinier, droitier et en bonne santé. L’anamnèse ne retrouvaitpas de traumatisme, même mineur, au niveau du deuxième
* Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (P.S. Marcheix).
1297-3203/$ – see front matter # 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservhttp://dx.doi.org/10.1016/j.main.2013.02.002
rayon de la main gauche. Ce patient avait été suivi pendant troissemaines pour périonyxis. Le médecin traitant avait instauré untraitement local par acide fucidique. Devant la péjorationclinique et l’augmentation progressive de la taille de cettetuméfaction, le patient avait été adressé en polyclinique dechirurgie de la main pour une prise en charge spécialisée.
L’examen clinique montrait une tuméfaction du bord radialde la pulpe du deuxième rayon de la main gauche, douloureuseet inflammatoire (Fig. 1). Le premier diagnostic évoqué avaitété un panaris, mais nous n’avions pas retrouvé de signespouvant faire évoquer un phlegmon de la gaine digitale del’index. Les aires ganglionnaires étaient libres. Il n’existait pas,non plus, de troubles vasculonerveux au niveau de ce rayon.
Le bilan inflammatoire était négatif avec des leucocytesà 9,1 G/L (Normes 4–11 G/L) et une C-réactive protéine à9,1 mg/L (Normes 0–10 mg/L). Le bilan radiologique montraitune érosion osseuse du bord radial de la phalange distale de cerayon (Fig. 2).
és.
Fig. 2. Empreinte de la tumeur sur la corticale radiale de la phalange distale del’index gauche.Preoperative imprint of the tumor on the distal phalanx cortex of the left indexfinger.
Fig. 3. Coupes anatomopathologiques, coloration hémato-éosine standard.Anatomopathological slices.
Fig. 1. Aspect clinique préopératoire de la pulpe.Preoperative clinical appearance of the finger pulp in the preoperative period.
Y. El Hassani et al. / Chirurgie de la main 32 (2013) 117–119118
Devant un aspect clinique et radiologique nous orientantvers un panaris pulpaire associé à une ostéite sous-jacente, lepatient a été programmé au bloc opératoire pour traiter cetteinfection. Cependant, l’exploration chirurgicale a mis enévidence une collection granuleuse, rougeâtre, friable, peuhémorragique, bien délimitée, se décollant facilement. Devantun aspect atypique, une biopsie-exérèse de la lésion a étéréalisée avec une analyse bactériologique et anatomopatholo-gique. Les suites opératoires ont été simples, avec unecicatrisation propre sans écoulement. L’analyse bactériolo-gique de notre échantillon n’a pas confirmé le caractèreinfectieux de cette lésion, avec l’absence de germe à l’examendirect et des cultures négatives. L’examen histologique a mis enévidence une structure kystique intradermique, tapissée d’unépithélium malpighien avec une kératinisation trichilemmale
sans couche granuleuse (Fig. 3). Le diagnostic retenu a été unkyste trichilemmal prolifératif sans signe de malignité.
3. Discussion
Les kystes trichilemmaux représentent des lésionskératinocytaires [2]. Ces kystes se développent à partir dufeuillet externe du follicule pileux [1,4]. Ils sont le plussouvent observés au niveau des zones pileuses, avec uneprédilection féminine. La localisation préférentielle de ceskystes est le scalp [2,5]. Ces kystes peuvent être solitaire(30 %) ou multiple (70 %), ils augmentent progressivementde taille et peuvent se surinfecter [3,6,7]. Chirurgicalement, ils’agit d’un kyste bien délimité et encapsulé, ce qui facilite larésection chirurgicale [8].
Il existe cependant des particularités avec des localisationsinhabituelles. Ainsi Avinoach et al. ont rapporté un cas de kystetrichilemmal au niveau de la vulve chez une patiente de 65 ans[9]. Selon ces auteurs, l’explication la plus probable à ce casétait une origine hormonale. Les localisations au niveau desextrémités sont encore plus rares. Seuls deux cas ont été
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rapportés dans la littérature. Le premier était situé au niveau dudos de la main, à distance d’un traumatisme. L’explorationchirurgicale avait mis en évidence un fragment métallique [3].Le deuxième cas était localisé au niveau de la pulpe de l’index,également à distance d’un traumatisme [2].
Les principaux diagnostics différentiels dans notre casclinique étaient un panaris et un kyste épidermoïde surinfecté.En effet, les kystes trichilemmaux et épidermoïdes sont deslésions kératinocytaires. Ils présentent des similitudes clini-ques, et le diagnostic différentiel ne peut être établi que sur labase de l’histologie. Le plus souvent pour les kystesépidermoïdes, il s’agit d’une kératinisation épidermoïdeconventionnelle, alors que les kystes trichilemmaux correspondà une kératinisation trichilemmale [2,5]. La kératinisationtrichilemmale est une forme de maturation cellulaire observéeau niveau des couches externes du follicule pileux [3]. Lakératinisation de la matrice de l’ongle est similaire à lakératinisation trichilemmale. Dans ce cas clinique, nouspouvons donc suspecter que l’origine de ce kyste provenaitde la matrice unguéale [10].
Saida et al. ont classé le développement des lésionstrichelemmales en trois stades. Le stade 1 correspond à unkyste trichilemmal adénomateux, le stade 2 correspond à unkyste trichilemmal prolifératif épitheliomateux, et le stade3 correspond à un kyste trichilemmal prolifératif malincarcinomateux [11]. Ainsi, le kyste trichilemmal est unetumeur bénigne qui peut présenter des atypies cellulaires et desmitoses anormales, donnant à cette tumeur un caractère malin.Weiss et al. ont rapporté un cas de métastase lymphonodalesecondaire à un kyste trichilemmal [1].
L’évolution des kystes trichilemmaux est controversée.L’équipe de Fernandez-Figueras a étudié la relation avec lesgènes p53 et p27. L’étude de l’altération p53 montre en effet desrésultats similaires entre kyste trichilemmal et carcinomes àcellules squameuses trichilemmaux. Cependant l’expression dup27 Kip1 (Cyclin-dependant kinase inhibitor) dans le kystetrichilemmal module la réaction oncologique et diminuel’agressivité tumorale [8,12]. Ainsi le traitement recommandé
de ces kystes est une résection complète, avec des margessaines [3].
Déclaration d’intérêts
Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts enrelation avec cet article.
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