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Fruits, vol. 61 (1) 39 Article original Quality management in the pineapple industry of Martinique. Abstract –– Introduction. The pineapple industry in Martinique is implementing a significant reor- ganization, as already achieved in other food sectors, to comply with new requirements for food secu- rity and environmental protection: quality management at all levels of the industry and introduction of new pineapple varieties. Based on the analysis of the current practices, needs for changes and tools for the implementation of a new production system are proposed by the authors. Materials and methods. A typology of the farms is proposed after an analysis of the practices and the strategies of the farmers. A steering committee, including most stakeholder representatives, builds a system of quality management based on the Agriconfiance ® norms. New pineapple varieties are evaluated both for processing and the fresh market. Results and discussion. Gaps between recommendations and actual practices are very variable but generally large: there are too many inputs, either pesticides or fertilizers or both. The system of management is based on a contract between the association and the producer. The rules are described in two codes of practice, one for fruit production in the fields, the other for fruit processing. A traceability system has been implemented, allowing records and fore- casts at plot level. New pineapple varieties have also been tested in the processing plant of the asso- ciation, with better results than the old variety Smooth Cayenne. Conclusion. The reorganization of the pineapple industry in Martinique results from economical considerations. Its implementation required the development of a global system for the quality management and a traceability system at plot level to ensure food security. Reducing the variability of agricultural practices and getting clo- ser to the recommendations will increase the quality of the production. To do so, a guide book for good practices will be elaborated. The new pineapple varieties allowing better yield after processing and quality of product, fresh or processed, will also be determinant for a successful reorganization of the industry. Martinique / Ananas comosus / crop management / food security / environmental protection / variety trials / fruits / quality Management de la qualité dans la filière ananas en Martinique. Résumé –– Introduction. À l’instar d’autres secteurs de produits destinés à l’alimentation humaine, une restructuration profonde de la filière ananas martiniquaise s’accomplit pour répondre à de nou- velles exigences de sécurité alimentaire et de protection de l’environnement : management de la qua- lité sur l’ensemble de la filière et exploitation de nouvelles variétés d’ananas. À partir de l’analyse des pratiques actuelles, les auteurs ont évalué les besoins de changements, puis proposé quelques outils pour la mise en œuvre d’un système de production. Matériel et méthodes. Des enquêtes ont permis de connaître les pratiques et stratégies actuelles des producteurs d’ananas et d’établir une typologie des exploitations. Un comité de pilotage associant des représentants de l’ensemble de la filière élabore le système de management de la qualité en se basant sur la norme Agriconfiance ® . De nouvelles variétés sont en cours d’évaluation pour couvrir au mieux les besoins en ananas de qualité pour la transformation ou pour la vente en frais. Résultats et discussion. Les écarts constatés entre recommandations et pratiques culturales sont apparus très variables mais souvent importants : trop d’intrants en général, soit les pesticides, soit les engrais, soit les deux. Le système de management appliqué repose sur un contrat entre une coopérative et les producteurs. Les règles de qualité sont fixées dans deux cahiers des charges, l’un concernant la qualité de la production au champ, l’autre, la qualité du fruit pour l’usine. Un système de traçabilité à l’échelle de la parcelle a été élaboré. Il permet la prévision et l’enregistrement de toute activité liée à la production, avec la parcelle comme unité de base. Enfin, de nouvelles variétés hybrides sélectionnées par le Cirad ont pu être testées dans le nouveau processus de transformation de la coopérative, donnant de meilleurs résultats que l’ancienne variété Cayenne lisse. Conclusion. La restructuration de la filière ananas en Martinique résulte avant tout de considérations économiques. Cette démarche a conduit au développement d’un programme global d’assurance qualité, avec instauration d’un système de traçabilité parcellaire, des- tiné à garantir la sécurité alimentaire. Une homogénéisation des pratiques culturales est nécessaire, en se rapprochant des recommandations pour améliorer la qualité. Elles pourraient être rassemblées dans un guide de culture spécifique. L’adoption de nouvelles variétés d’ananas permettant d’obtenir de meilleurs rendements de transformation ainsi qu’une qualité accrue du produit frais ou transformé sera aussi un élément déterminant du succès de la démarche. Martinique / Ananas comosus / conduite de la culture / sécurité alimentaire / protection de l’environnement / essai de variété / fruits / qualité a Pôle de Recherche Agronomique de la Martinique (PRAM), Cemagref, BP 214, 97285 Lamentin Cedex 2, Martinique, France b Pôle de Recherche Agronomique de la Martinique (PRAM), Cirad-Flhor, BP 214, 97285 Lamentin Cedex 2, Martinique, France [email protected] Management de la qualité dans la filière ananas en Martinique Frédérique SAUDUBRAY a , Jean-Pierre HORRY b , Paul-Alex MARIE-ALPHONSINE b , David CROS b , Alain SOLER b * * Correspondance et tirés à part Reçu le 11 août 2004 Accepté le 19 octobre 2005 Fruits, 2006, vol. 61, p. 39–53 © 2006 Cirad/EDP Sciences All rights reserved DOI: 10.1051/fruits:2006004 RESUMEN ESPAÑOL, p. 53 Article published by EDP Sciences and available at http://www.edpsciences.org/fruits or http://dx.doi.org/10.1051/fruits:2006004

Management de la qualité dans la filière ananas en Martinique · 2015-05-29 · Management de la qualité des activités agricoles Un comité de pilotage « qualité » a été

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Fruits, vol. 61 (1) 39

Article original

Quality management in the pineapple industry of Martinique.Abstract –– Introduction. The pineapple industry in Martinique is implementing a significant reor-ganization, as already achieved in other food sectors, to comply with new requirements for food secu-rity and environmental protection: quality management at all levels of the industry and introductionof new pineapple varieties. Based on the analysis of the current practices, needs for changes andtools for the implementation of a new production system are proposed by the authors. Materialsand methods. A typology of the farms is proposed after an analysis of the practices and the strategiesof the farmers. A steering committee, including most stakeholder representatives, builds a systemof quality management based on the Agriconfiance® norms. New pineapple varieties are evaluatedboth for processing and the fresh market. Results and discussion. Gaps between recommendationsand actual practices are very variable but generally large: there are too many inputs, either pesticidesor fertilizers or both. The system of management is based on a contract between the association andthe producer. The rules are described in two codes of practice, one for fruit production in the fields,the other for fruit processing. A traceability system has been implemented, allowing records and fore-casts at plot level. New pineapple varieties have also been tested in the processing plant of the asso-ciation, with better results than the old variety Smooth Cayenne. Conclusion. The reorganizationof the pineapple industry in Martinique results from economical considerations. Its implementationrequired the development of a global system for the quality management and a traceability systemat plot level to ensure food security. Reducing the variability of agricultural practices and getting clo-ser to the recommendations will increase the quality of the production. To do so, a guide book forgood practices will be elaborated. The new pineapple varieties allowing better yield after processingand quality of product, fresh or processed, will also be determinant for a successful reorganizationof the industry.Martinique / Ananas comosus / crop management / food security /environmental protection / variety trials / fruits / quality

Management de la qualité dans la filière ananas en Martinique.Résumé –– Introduction. À l’instar d’autres secteurs de produits destinés à l’alimentation humaine,une restructuration profonde de la filière ananas martiniquaise s’accomplit pour répondre à de nou-velles exigences de sécurité alimentaire et de protection de l’environnement : management de la qua-lité sur l’ensemble de la filière et exploitation de nouvelles variétés d’ananas. À partir de l’analysedes pratiques actuelles, les auteurs ont évalué les besoins de changements, puis proposé quelquesoutils pour la mise en œuvre d’un système de production. Matériel et méthodes. Des enquêtes ontpermis de connaître les pratiques et stratégies actuelles des producteurs d’ananas et d’établir unetypologie des exploitations. Un comité de pilotage associant des représentants de l’ensemble de lafilière élabore le système de management de la qualité en se basant sur la norme Agriconfiance®.De nouvelles variétés sont en cours d’évaluation pour couvrir au mieux les besoins en ananas dequalité pour la transformation ou pour la vente en frais. Résultats et discussion. Les écarts constatésentre recommandations et pratiques culturales sont apparus très variables mais souvent importants :trop d’intrants en général, soit les pesticides, soit les engrais, soit les deux. Le système de managementappliqué repose sur un contrat entre une coopérative et les producteurs. Les règles de qualité sontfixées dans deux cahiers des charges, l’un concernant la qualité de la production au champ, l’autre,la qualité du fruit pour l’usine. Un système de traçabilité à l’échelle de la parcelle a été élaboré. Ilpermet la prévision et l’enregistrement de toute activité liée à la production, avec la parcelle commeunité de base. Enfin, de nouvelles variétés hybrides sélectionnées par le Cirad ont pu être testéesdans le nouveau processus de transformation de la coopérative, donnant de meilleurs résultats quel’ancienne variété Cayenne lisse. Conclusion. La restructuration de la filière ananas en Martiniquerésulte avant tout de considérations économiques. Cette démarche a conduit au développement d’unprogramme global d’assurance qualité, avec instauration d’un système de traçabilité parcellaire, des-tiné à garantir la sécurité alimentaire. Une homogénéisation des pratiques culturales est nécessaire,en se rapprochant des recommandations pour améliorer la qualité. Elles pourraient être rassembléesdans un guide de culture spécifique. L’adoption de nouvelles variétés d’ananas permettant d’obtenirde meilleurs rendements de transformation ainsi qu’une qualité accrue du produit frais ou transformésera aussi un élément déterminant du succès de la démarche.Martinique / Ananas comosus / conduite de la culture / sécurité alimentaire /protection de l’environnement / essai de variété / fruits / qualité

a Pôle de Recherche Agronomique de la Martinique (PRAM), Cemagref, BP 214, 97285 Lamentin Cedex 2, Martinique, France

b Pôle de Recherche Agronomique de la Martinique (PRAM), Cirad-Flhor, BP 214, 97285 Lamentin Cedex 2, Martinique, France

[email protected]

Management de la qualité dans la filière ananas en MartiniqueFrédérique SAUDUBRAYa, Jean-Pierre HORRYb, Paul-Alex MARIE-ALPHONSINEb, David CROSb, Alain SOLERb*

* Correspondance et tirés à part

Reçu le 11 août 2004Accepté le 19 octobre 2005

Fruits, 2006, vol. 61, p. 39–53© 2006 Cirad/EDP SciencesAll rights reservedDOI: 10.1051/fruits:2006004

RESUMEN ESPAÑOL, p. 53

Article published by EDP Sciences and available at http://www.edpsciences.org/fruits or http://dx.doi.org/10.1051/fruits:2006004

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F. Saudubray et al.

1. Introduction

Sécurité alimentaire, protection de l’envi-ronnement, traçabilité des produits, qualitéaccrue sont des problématiques qui préoc-cupent actuellement les producteurs d’ana-nas de Martinique. À l’instar d’autres sec-teurs de produits destinés à l’alimentationhumaine, une restructuration profonde de lafilière ananas martiniquaise est en coursd’accomplissement pour répondre à ces nou-veaux engagements de la profession vis-à-vis des consommateurs. Tout le secteur ana-nas se reconstruit autour de ces objectifs :l’usine de transformation Socomor1 proposede nouveaux produits (crush et cubes asep-tiques à la place des tranches traditionnel-les) et adopte un système d’assurance qua-lité basé sur les norme ISO 9002. Lesexploitants diversifient leur production sui-vant la destination des récoltes (usine oufrais) et cherchent à modifier leurs pratiquesen lien avec la nouvelle politique contrac-tuelle développée par l’État [contrat territo-rial d’exploitation (CTE), puis contrat d’agri-culture durable (CAD)] et à mettre en œuvrela norme Agriconfiance® [1].

La recherche agronomique accompagnecette restructuration en aidant la filière ana-nas sur trois aspects de la démarche entre-prise :

– en recueillant et en analysant les infor-mations concernant les pratiques et straté-gies des producteurs, en tant qu’individus,afin de mieux cerner les domaines où desefforts particuliers doivent être réalisés etd’être sûr que la démarche entreprise cadreraau mieux avec leurs objectifs,

– en participant, au sein d’un comité de pilo-tage, à l’élaboration du système de manage-ment de la qualité (création de cahiers descharges et de systèmes de traçabilité parcel-laire),

– en mettant au point de nouvelles variétésmieux adaptées aux marchés et aux nou-veaux processus de transformation, desti-nées à améliorer la compétitivité de la filièregrâce à une reconversion variétale partielle.

2. Matériel et méthode

2.1. Analyse des pratiques et stratégies des producteurs

La méthodologie utilisée a été basée sur lestravaux de Capillon et Sébillote [2] pour défi-nir une typologie à partir de l’étude des sys-tèmes de production des exploitations. Parailleurs, la définition et la mise en œuvred’outils pour une normalisation (Agricon-fiance®, CAD, etc.) a nécessité de mieuxconnaître les pratiques des agriculteurs, cesdernières étant « par essence même, le refletde la diversité des situations et des projetsdes agriculteurs » [3–5]. En effet, la connais-sance et la compréhension des pratiques,des stratégies et des modalités de prise dedécision des agriculteurs sont indispensa-bles pour mesurer l’acceptabilité sociale,technique, économique et financière desmesures qui pourront être prises.

Des informations ont été recueillies grâceà des entretiens semi-directifs conduitsauprès de la moitié des producteurs d’ana-nas martiniquais [6]. Lorsque cela a été pos-sible, les déclarations des agriculteurs ontété confrontées avec des observations réa-lisées sur l’exploitation. En effet, selon Mille-ville [7], « la confrontation systématique du‘dit’ et du ‘fait’ se révèle à l’expérience unmoyen assez pertinent pour éclairer les rai-sons des choix techniques. S’exprime alorsl’intervention de contraintes multiples quiexpliquent que le ‘réalisé’ diffère du ‘sou-haitable’ ou du ‘prévu’ ».

Le niveau de précision des informationsrecherchées a été déterminé selon lesconcepts d’ « ignorance optimale » et de« degré acceptable d’imprécision » [8] :

– Le « degré d’ignorance optimale » résumele principe selon lequel il est fait le meilleurusage du temps disponible, l’attention étantportée sur ce qui est important et ce qui l’est

1 La Socomor est une société coopérativeagricole localisée à Morne Rouge, Martini-que. C’est l’unique organisation de produc-teurs d’ananas de la Martinique et elle béné-ficie, à ce titre, depuis 1976, d’un soutiencommunautaire à la production d’ananastransformés.

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L’ananas en Martinique

Fruits, vol. 61 (1) 41

moins étant négligé. Cela revient implicite-ment à ignorer une partie des informationspotentiellement disponibles, en admettantqu’il n’est pas nécessaire de tout savoir.

– Le concept de « degré acceptable d’impré-cision » recommande d’apprécier le niveaude détail nécessaire ou l’ordre de grandeurde la précision des informations jugées utiles.

Ainsi, notre objectif étant de préparer lamise en place d’une politique de productionde fruits de qualité et de mesures de pro-tection de l’environnement, les pratiquesplus particulièrement étudiées ont porté surles modalités de traitements phytosanitaires(défense des cultures, lutte contre les adven-tices), de fertilisation et de travail du sol (pers-pective de lutte contre l’érosion). Cependant,même si nous avons analysé les « manièresde faire » et leur justification pour ces diver-ses pratiques, nous avons dû les situer ausein de l’ensemble de l’itinéraire techniquepour comprendre la stratégie du producteurd’ananas. Il nous a donc fallu égalementcaractériser cet itinéraire technique.

Pour analyser les données recueillies,l’itinéraire technique appliqué par chaqueagriculteur a été découpé en une successiond’opérations techniques. Les opérations tech-niques ont été regroupées par thème :fertilisation, traitement phytosanitaire, etc.Chacun de ces thèmes a donné lieu à uneanalyse descriptive, à une comparaison despratiques constatées avec les techniquesprescrites, ainsi qu’à une analyse compara-tive de la manière de faire des différentsplanteurs ; il a été alors possible de regrou-per et/ou de différencier les exploitationspar une analyse factorielle des correspon-dances multiples.

2.2. Management de la qualité des activités agricoles

Un comité de pilotage « qualité » a été misen place ; il comprend des producteurs, deschercheurs et du personnel d’encadrementde la Chambre d’agriculture en plus des cadreset techniciens de l’usine de transformation ;celle-ci met aussi en œuvre, par ailleurs, sapropre démarche interne basée sur la certi-fication ISO.

Ce comité est assisté par des consultantsspécialistes de la mise en œuvre de tellesdémarches en milieu agricole. Il a pourtâche de réaliser une « analyse de maîtrisedes dangers » et de créer une base docu-mentaire pour un système de managementde la qualité en y intégrant les spécificitésde la culture de l’ananas en Martinique,milieu insulaire de très petite taille caracté-risé par son état de territoire de l’Unioneuropéenne et donc soumis aux change-ments radicaux de la réglementation concer-nant les produits phytosanitaires. Enfin, lecomité doit proposer les mesures d’appuiaux producteurs, notamment de formation,et le calendrier pour la mise en place dusystème.

2.3. Base de données « producteurs » pour la traçabilité parcellaire

2.3.1. Programmation informatique

La base de données « producteurs » est géréepar le logiciel Access de Microsoft.

2.3.2. Base de données « producteurs »

La base de données « producteurs » contientdes éléments essentiels permettant le suivides opérations entrant dans la définition del’itinéraire technique :

– coordonnées géographiques de chaqueexploitation,

– inventaire du parcellaire de chaque pro-ducteur en relation avec le système d’infor-mation géographique (SIG) de la Socomor,

– gestion des parcelles incluant toutes lesdonnées relatives aux activités agricolesqu’elles soient prévues ou réellement effec-tuées,

– formulaire de paramétrage de l’itinérairetechnique permettant d’adapter cet itiné-raire à la situation de chaque producteur enfonction des recommandations officielles,

– prévision et enregistrement de récoltes(couplage avec le logiciel de pesée de laSocomor),

– enregistrement des températures encontinu sur les sites représentatifs des zonesde production pour la prévision de récolte,

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F. Saudubray et al.

– calcul des flux prévisionnels de matièrepremière (fruits) entrant à l’usine,

– calcul des besoins en intrants pour l’ensem-ble de la coopérative.

2.3.3. Module de prévision de récolte

Un module de prévision de récolte basé surle modèle « Aloha pineapple » ([9, 10] etTouron J., Fournier P., commun. pers., 2000)permet de prévoir les dates de récolte desananas en utilisant les sommes de tempéra-ture calculées à partir des relevés quotidiensde températures ; ces relevés permettent eneffet d’évaluer, pour une zone donnée,l’intervalle entre la date du traitementd’induction florale (TIF) des plants d’ana-nas et la récolte des fruits.

2.4. Nouvelles variétés

En complément de l’accompagnement de ladémarche décrite précédemment, de nou-velles variétés, aptes à couvrir les besoins enananas de qualité pour la transformation etla vente en frais, pourraient être proposées.Ces variétés sont issues d’un programmed’hybridation classique entre la variété

Cayenne lisse et la variété Péroléra. Cayennelisse est la variété la plus répandue sur lesmarchés ; elle a de bonnes caractéristiquesagronomiques et organoleptiques. La variétéPéroléra a des caractéristiques de couleurparticulièrement attrayantes (peau rouge etchair d’un jaune profond). Un certain nom-bre d’hybrides « Cayenne × Péroléra » inté-ressants ont été sélectionnés. Le principalhybride proposé actuellement aux produc-teurs pour une reconversion variétale par-tielle a été nommé « Flhoran 41 ». Cethybride est en cours de test pour déterminerson potentiel agronomique et commercialen frais ou en transformation ; pour cettetransformation, il fait l’objet de tests gran-deur nature en usine avec le système defabrication de cubes et crush aseptique.

3. Résultats et discussion

3.1. Analyses des pratiques

3.1.1. Exemple de la fertilisation

À partir d’entretiens avec les producteurs, ila été possible de proposer un récapitulatif

Tableau I.Fertilisation pratiquée par les agriculteurs par rapport aux préconisations.

Modalitésde fertilisation

Préconisation de laChambre d’agriculture pour la

variété Cayenne lisse

Pratiques des agriculteurs

Apport d’engrais liquide Pulvérisation d’urée et de sulfate de potasse tous les mois à partir d’un mois

après plantation et jusqu’à un mois avant le TIF

Augmentation progressive des doses

Tous les agriculteurs pulvérisent de l’urée et du sulfate de potasse et respectent les dates d’application

27 % augmentent progressivement les doses37 % appliquent des doses constantes

37 % « hésitent » entre les deux pratiques

Apport d’engrais solide Trois apports d’un engrais12 – 4 – 24 + 4

(500 kg,1100 kg, 1100 kg)

Tous les agriculteurs apportent des engrais solides :• 34 % en un ou deux passages

• 45 % font trois passages• 21 % en apportent en quatre ou cinq fois

Apports moyens d’azote (N) en 1er cycle

600 kg en 1er cycle(soit 10 g par plant par cycle)

Moyenne par exploitation : 824 kgMoyenne pondérée par ha : 688 kg

Apports moyens de potasse (K2O) en 1er cycle

1104 kg en 1er cycle(soit 18,4 g par plant par cycle)

Moyenne par exploitation : 1296 kgMoyenne pondérée par ha : 1144 kg

Rapport [K2O / N] 1,84Entre 2 et 2,5 selon les ouvrages

Moyenne = 1,6673% des exploitations ont un rapport K2O/N < 1,80

17 % respectent les prescriptionsK2O/N total = 0,5324 × K2O/N pulvérisation + 0,9414

(avec R2 = 0,7886)

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L’ananas en Martinique

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des pratiques de fertilisation appliquées enpremier cycle de culture (tableau I). Il enressort que les planteurs d’ananas fertilisent,en azote et en potasse, beaucoup plus quenécessaire : l’apport moyen en azote estsupérieur de 37,5 % à la quantité préconiséepar la Chambre d’agriculture et l’apport moyenen potasse est supérieur de 17,5 % à la quan-tité conseillée (figure 1). Seuls 30 % desagriculteurs appliquent des quantités pro-ches de celles préconisées. À l’opposé, plusde 10 % d’entre eux appliquent plus du dou-ble des doses prescrites.

Pour une bonne croissance de la planteet des fruits, le rapport [K2O / N] doit êtrecompris entre 2 et 2,5 selon les recomman-dations techniques. Dans l’ensemble, lesplanteurs d’ananas de la Martinique appli-quent, en raison d’apports d’azote excessifs,une fertilisation présentant un rapport[K2O / N] trop faible ; en effet, pour 73 %des itinéraires techniques le rapport [K2O /N] est inférieur à 1,80, le rapport moyen de[K2O / N] étant 1,63. Parmi les 17 % d’itiné-raires techniques en adéquation avec lesprescriptions techniques, il y a tous ceuxsuivis par les grandes exploitations.

En conclusion, 1/3 des producteurs d’ana-nas de la Martinique appliquent des dosesd’engrais nettement supérieures aux techni-ques prescrites. Cette pratique de surfertili-sation concerne 25 % de la surface plantéeen ananas.

Près des 2/3 des agriculteurs, qui occu-pent cependant uniquement 1/3 de la sur-face cultivée en ananas en Martinique, nerespectent pas l’équilibre préconisé entreles apports de potasse et ceux d’azote (rap-port [K2O / N] appliqué en pulvérisationtrop faible).

3.1.2. Exemple des pratiques de désherbage

Le désherbage est avant tout chimique etvariablement raisonné (figure 2).

Les planteurs d’ananas utilisent les herbi-cides « en généralisé » de deux manières dis-tinctes : raisonnée ou systématique.

– Pour un désherbage chimique généraliséeffectué de façon « raisonnée », ils adaptentl’emploi d’herbicides à la quantité d’herbeà détruire ou en fonction du temps qu’ils

peuvent ou non consacrer à la culture. Celapermet de limiter les coûts et évite d’endom-mager les plants d’ananas.

– Un désherbage chimique généralisé effec-tué de façon « systématique » se fait « toutesles x semaines » pour éviter le désherbagemanuel et/ou les traitements lors du deuxièmecycle.

Le plus souvent, l’utilisation d’herbicidesest associée à du sarclage manuel. Surce poste, les pratiques mises en œuvre

y x= 1,43 + 20,4

R2 = 0,773

350

300

250

200

150

100

50

0

0 50 100 450 200K

O(k

gp

ar

mo

is)

2

N (kg par mois)

Valeurs prescrites par la chambre d’Agriculture(intervalle de + ou – 10 %)

Figure 1.Apports mensuels de K2O et N appliqués par les producteurs d’ananas martiniquais selon des informations recueillies par enquêtes.

Figure 2.Répartition des d’agriculteurs en fonction des pratiques de désherbage qu’ils appliquent en plantation d’ananas à la Martinique, selon des informations recueillies par enquêtes.

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F. Saudubray et al.

permettent de regrouper les planteurs entrois catégories :

– ceux qui minimisent le sarclage manuel :ce sont des planteurs qui estiment son coûtde revient trop élevé par rapport à un dés-herbage chimique (coût de la main-d’œuvre)ou qui trouvent ce travail trop pénible,

– ceux qui utilisent le sarclage manuel encomplément de l’utilisation d’herbicides,

– ceux qui font un sarclage manuel maxi-mum parce qu’ils n’ont « pas confiance »dans les herbicides (peur d’abîmer les plan-tations) et/ou veulent limiter au maximumles coûts des intrants.

Le désherbage chimique peut être réaliséen généralisé sous forme de « pulvérisations »sur l’ananas ou en jet dirigé directement surles « taches » d’herbes, à l’aide d’appareils àdos. Le nombre de traitements, en moyenneégal à six tous herbicides confondus, estassez variable (figure 3). Le désherbagechimique est peu pratiqué avant plantationet trop utilisé en cours de végétation.

Seuls 23 % des planteurs réalisent un dés-herbage avant plantation, comme cela estgénéralement préconisé. C’est lors de cedésherbage que certains planteurs (10 %)emploient du bromacil, non homologuépour l’ananas. Même si l’utilisation de ceproduit est tolérée avant plantation, l’impactenvironnemental de son utilisation peut êtreimportant car les exploitations qui l’utilisentreprésentent 53 % de la surface cultivée enananas. D’ailleurs, au cours des dernièresannées, le bromacil a été détecté pour neufanalyses d’eau réalisées sur la zone de pro-duction d’ananas, dont deux fois avec desquantités supérieures à la norme légale de0,1 µg·L–1.

En cours de végétation, les planteursd’ananas utilisent en moyenne plus d’amé-tryne que ce qui est prescrit [moyenne géné-rale entre (12 et 20) L·ha–1 pour une pres-cription de 10 L·ha–1]. La moitié des planteursutilise au total plus de 12,5 L·ha–1 d’amé-tryne (figure 4).

2

4

6

8

10

12

No

mb

red

’ap

plic

atio

ns

d’h

erb

icid

es

Numéro de l’exploitation

24 7 6 18 5b 23 28 4 22 29 30 32

0

Nombre de passages en jet dirigé Nombre de passages en généralisé

Figure 3.Nombre d’applications d’herbicides effectuées pendant le premier cycle de production d’ananas, en fonction des exploitations étudiées en Martinique par enquêtes.

Dose

de

diu

ron

en

1cycle

(kg

•ha

)

er

–1

Dose d’amétryne en 1 cycle(L•ha )

er

–1

0

5

10

15

20

25

30

0 10 20 30 40 50

Doses recommandéespar la chambre d’Agriculture

Figure 4.Quantités d’amétryne et de diuron appliquées pendant le premier cycle de production par des planteurs d’ananas en Martinique, selon des informations recueillies par enquêtes.

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Pour le désherbage au diuron, les plan-teurs respectent généralement les recom-mandations : 67 % des planteurs utilisent4 kg·ha–1 ou moins de diuron, alors que larecommandation est égale à 5 kg·ha–1. Tou-tefois, 20 % des planteurs appliquent desquantités supérieures au double de la quan-tité totale prescrite (figure 4).

Certains producteurs utilisent égalementde la cycloxydime (figure 5) ; cet herbiciden’est pas homologué pour la culture del’ananas et il est appliqué le plus souvent enjet dirigé sur les chiendents.

L’analyse des pratiques des producteursd’ananas vis-à-vis du désherbage a doncmis en évidence un recours aux produits desynthèse relativement important par rap-port à une sarclage manuel peu utilisé ;75 % des producteurs d’ananas respectentles doses prescrites et au moins 50 %d’entre eux utilisent des produits nonhomologués.

3.1.3. Typologie des producteurs en fonction des pratiques culturales

L’analyse des données recueillies au traversdes questionnaires a permis d’établir unetypologie des producteurs d’ananas à partirdes itinéraires techniques pratiqués. Ainsi,l’analyse statistique de l’ensemble des varia-bles jugées discriminantes pour chaque thème(préparation du sol, fertilisation, traitementsphytosanitaires, production de rejets, etc.) apermis d’identifier, en fonction des prati-ques agricoles, cinq grands types de pro-ducteurs d’ananas :

• Un premier type, que nous avons nommé« proche-références-plus », concerne 20 %des exploitations et 60 % de la surface occu-pée par l’ananas en Martinique ; cette caté-gorie est celle qui applique au mieux lesrecommandations techniques de la Cham-bre d’agriculture :

– la fertilisation pratiquée est proche desrecommandations : les doses d’applicationde N et K2O sont en dessous des recom-mandations ; le rapport [K2O / N] est prochedes recommandations ; les pulvérisations sontfaites avec des doses croissantes jusqu’auTIF ;

– le désherbage (chimique ou mécanique)est effectué avant plantation ;

– un désherbage raisonné se fait à dosesmoyennes en cours de végétation ;

– les pratiques phytosanitaires sont varia-bles en ce qui concerne les nématicides : leterbufos, produit non homologué, est utilisépar une partie des planteurs ;

– les insecticides, parathion-méthyl et disul-foton, sont utilisés à des doses moyennes,inférieures aux recommandations ;

– le TIF se fait en un ou deux passages,mais avec uniquement de l’urée ;

– la production d’un rejet est conduite dediverses façons : en moyenne, une surferti-lisation est appliquée, mais le rapport [K2O /N] est plus proche des recommandationsque celui pratiqué par les autres types deproducteurs. Les doses de parathion-méthylutilisées sont très inférieures aux recom-mandations ; il n’y a pas d’utilisation dedisulfuton ou celle-ci est effectuée à desdoses proches de celles prescrites. L’utilisa-tion d’herbicides est très variable.

• Le deuxième type de producteurs d’ana-nas a été nommé « proche-références avecrejet » ; il est propre à 27 % des exploitationset 19 % de la surface ; il applique un itinérairetechnique proche des recommandations,

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Numéro de l’exploitation

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Figure 5.Nombre d’applications de cycloxydime effectuées pendant le premier cycle de production d’ananas, en fonction des exploitations étudiées en Martinique par enquêtes.

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excepté en ce qui concerne le rapport[K2O / N], le mode d’application des engraisliquides et l’utilisation de nématicides :

– les doses d’apport en éléments fertilisantssont proches des recommandations, maisdéséquilibrées car le rapport [K2O / N] esttrop faible et les pulvérisations se font àdoses constantes entre la plantation et leTIF; la fumure de fond est systématique ;

– les produits de lutte contre les parasitessont appliqués avec des doses moyennes àfortes, avec de l’éthoprophos et du para-thion-méthyl parmi les plus fortes doses,même si celles-ci restent toujours inférieuresou égales aux doses prescrites; parfois, lecadusaphos, produit non homologué maisdont une extension d’homologation devraitprochainement être formulée, est utilisé ;

– le désherbage chimique se fait seulementen cours de végétation avec des doses moyen-nes en herbicides ;

– le TIF est effectué avec des pratiquesvariables ;

– la sortie d’un rejet est assurée soit avecune faible fertilisation et sans autre produitphytosanitaire que le parathion-méthyl, soitavec une fertilisation fortement azotée etune utilisation de disulfoton, mais sans her-bicides.

• Le troisième type de producteurs d’ana-nas identifié a été nommé « proche-référen-ces sans rejet » ; il est présent pour 20 % desexploitations et 5 % de la surface ; son iti-néraire technique est proche de celui dutype 2 pour ce qui est de la fertilisation etdu désherbage, mais il en diffère par l’utili-sation des produits phytosanitaires ; cesplanteurs ne suivent pas en général la pro-duction des rejets :

– la fertilisation est semblable au type 2 ;

– un désherbage chimique est effectué, maisseulement en cours de végétation et avecdes doses modérées en herbicides, qui sonten moyenne inférieures aux recommanda-tions ;

– l’utilisation des produits phytosanitairesest variable avec, en moyenne, plus dedisulfoton et moins de parathion-méthyl etd’éthoprophos que préconisé ;

– le TIF est effectué en un ou deux passa-ges, avec seulement de l’urée.

• Le quatrième type de producteurs d’ana-nas, ou « ferti-trop », concerne 13 % desexploitations et 9 % de la surface ; la ferti-lisation est appliquée à trop fortes doses etelle est déséquilibrée, même lors de la sortiedu rejet :

– la fertilisation diffère beaucoup desrecommandations : les doses sont trop for-tes, le rapport [K2O / N] est trop faible et lespulvérisations d’engrais liquides se font àdoses constantes entre la plantation et leTIF ;

– le désherbage chimique est effectué seu-lement en cours de végétation avec desdoses moyennes en herbicides ;

– l’utilisation des produits phytosanitaires estvariable ; en moyenne, les doses de disul-foton appliquées sont faibles et celles deparathion-méthyl sont modérées ;

– le TIF se fait en un seul passage ;

– la fumure de fond est raisonnée ;

– la sortie d’un rejet est assurée avec unefertilisation forte en azote, sans utilisationd’herbicides et avec des doses moyennes enproduits phytosanitaires.

• Le cinquième type, nommé « phyto-trop »,gère 20 % des exploitations et 7 % de lasurface ; il est caractérisé par une utilisationde fortes doses de produits phytosanitaires(insecticides et herbicides), y compris lorsde la sortie du rejet :

– les désherbages chimiques sont fréquentset ils sont faits à fortes doses en cours devégétation ;

– les produits phytosanitaires sont utilisésà fortes doses : celles de parathion-méthylet disulfoton sont supérieures aux recom-mandations ; les doses d’éthoprophos sontproches de celles préconisées par la Cham-bre d’agriculture ;

– la fertilisation est variable, parfois prochedes recommandations et parfois éloignées ;en moyenne, les doses sont fortes ;

– la pratique du TIF est variable ;

– la fumure de fond se fait à 1 t·ha–1 dechaux magnésienne ;

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– la sortie d’un rejet est assurée avec unefertilisation forte en azote, sans utilisationd’herbicides et avec de fortes doses de pro-duits phytosanitaires.

La comparaison entre les pourcentagesd’exploitations et de surfaces, liés aux pra-tiques de ces différents types de producteurs,traduit l’existence de différences structurel-les fortes entre les plantations d’ananas enMartinique. Elle met en évidence le fait queles agriculteurs qui respectent le mieux lesprescriptions techniques gèrent généralementde grandes exploitations. Cela peut s’expli-quer par l’emploi de spécialistes, techni-ciens ou ingénieurs, par les grandes socié-tés, ainsi que par l’adoption de modalités degestion différentes.

L’intensification de la culture observée audébut des années 90 [11] s’est poursuiviejusqu’en 2000 avec, pour conséquence, desdéviations importantes par rapport auxrecommandations officielles dans l’utilisationdes intrants. Cette diversité de pratiques,parfois éloignées des recommandations [12,13], aura des conséquences importantes surles mesures à prendre pour la mise en placed’un système de management de la qualitédont les axes forts sont sécurité alimentaire,traçabilité et protection de l’environnement.

3.2. Sécurité alimentaire et traçabilité

La mise en œuvre du système de manage-ment de la qualité est une décision collectivede la profession ; elle est basée sur unedémarche participative de l’ensemble desacteurs de la filière ananas.

3.2.1. Management de la qualité des activités agricoles de la filière

Le système de management de la qualité desactivités agricoles mis en place par la Soco-mor repose sur un contrat de culture « ana-nas pour l’industrie » entre les producteurset la coopérative. Ce contrat oblige les pro-ducteurs à respecter deux cahiers des char-ges mis au point par le comité de pilotageaprès une étude AMD (analyse et maîtrisedes dangers pour la qualité du produit). Iloblige la coopérative Socomor à assurer desservices de haut niveau, notamment la mise

en place du système de management de laqualité et des actions à entreprendre sur leterrain, ainsi que la formation des produc-teurs. Ce contrat définit le mode de gestiondes non conformités, les actions correctivesà entreprendre et la gestion des déchets deproduction et de transformation.

– Le premier cahier des charges, ou cahierdes charges « technique ananas industriel »(document interne Socomor), définit les exi-gences concernant le choix des parcelles etdes techniques de production issues del’AMD. Il définit également des recomman-dations techniques non contraignantes tellesque le mode d’application des traitementsou l’équipement à utiliser. Il détermine lesexigences en terme de traçabilité à l’échellede la parcelle. Un guide de culture accom-pagne ce cahier des charges pour préciserles recommandations relatives aux prati-ques culturales et pour permettre unehomogénéisation des techniques de cultureextrêmement variables d’un producteur àl’autre, comme l’avait montré l’état des lieuxde la filière.

– Le second cahier des charges, ou cahierdes charges « qualité ananas industriel » (docu-ment interne Socomor), est relatif à la qualitédes fruits livrés à la coopérative pour latransformation. Il détermine les critères qua-litatifs qui doivent être respectés et le moded’agréage permettant de vérifier le respectde ces critères et de calculer les réfactionséventuelles.

L’ensemble de ces cahiers des charges estlargement documenté selon le principehabituel d’un système de management de laqualité. Toutes les procédures sont décritesdans les documents internes de la coopéra-tive. Toutes les opérations sont enregistrées.Des audits internes assurent non seulementle respect des cahiers des charges par lesproducteurs, mais ils permettent égalementune évaluation par les producteurs de laqualité des services et des prestations de lacoopérative. Une formation permanenteactualisant leurs connaissances en matièrede management de la qualité permet uneamélioration continue de la qualité de laproduction.

Enfin, des audits externes devraient per-mettre à terme d’obtenir un label ou une

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« indication géographique protégée » parrapport aux référentiels officiels autorisantune meilleure identification du produit mar-tiniquais sur les marchés internationaux.

3.2.1.1. Cahier des charges « technique ananas industriel »

Le cahier des charges « technique ananasindustriel » définit les exigences techniquesà respecter par le producteur, ainsi que desrecommandations applicables en fonctiondes situations individuelles des producteurs.

– Choix des parcelles

Le choix des parcelles doit être déterminéen fonction de critères tels que le relief, l’alti-tude, les caractéristiques du sol ou la loca-lisation. Des recommandations sont préci-sées pour le choix de l’assolement et duprécédent cultural pour éviter des contami-nations éventuelles par des résidus de pro-duits phytosanitaires interdits et respecterles cahiers des charges « clients spécifiques »(exemple : cas des produits destinés à l’ali-mentation des bébés).

– Suivi des parcelles

Après la caractérisation des parcelles, ilfaut assurer une traçabilité des opérationsculturales grâce à l’utilisation d’une ficheparcellaire.

– Pratiques culturales

Dans le cahier des charges « techniqueananas industriel », des exigences strictessont décrites concernant la préparation dusol (déclaration des dates), les densités etl’origine des plants, les amendements et lafertilisation en ce qui concerne le respectdes exigences réglementaires européenneset françaises, le délai de traitements avantTIF, ainsi que les doses à déclarer sur la ficheparcellaire. Ces exigences sont assorties derecommandations permettant une certainesouplesse dans l’élaboration de l’itinérairetechnique. Elles se retrouvent dans le guidede culture.

– Traitements phytosanitaires

Pour les traitements phytosanitaires, lesexigences concernent le respect des règle-ments communautaires et la déclaration destraitements sur la fiche parcellaire. Outre les

méthodes d’application et le matériel utilisé,le recours à des analyses de résidus réaliséespar la Socomor est recommandé.

– Activités lors de la récolte

Les producteurs doivent préparer lesfruits avant livraison à l’usine en retirant lacouronne. Des délais optimaux entre larécolte et la livraison sont imposés. Le modede transport est également une exigencequant à l’identification des lots, la hauteurde stockage dans les bennes et les soinsapportés aux fruits.

3.2.1.2. Cahier des charges« qualité ananas industriel »

Le cahier des charges « qualité ananasindustriel » définit les principaux défauts desfruits tels qu’ils peuvent être libellés soitdans le Codex Alimentarius, soit dans desouvrages spécifiques sur la qualité de l’ana-nas réalisés pour d’autres filières ananas[14]. Dans ce document, sont mentionnéstous les défauts externes (blessures, coupsde soleil, choc ou écrasement, déforma-tions, salissures des fruits stockés) ou inter-nes [maladies fongiques (pourriture molle àCeratocystis sp. ou taches noires à Peni-cillium f.), brunissements internes, translu-cidité (fruits vitreux)] pouvant avoir unimpact sur la qualité et la quantité finale duproduit transformé.

Le mode d’agréage déterminé en accordavec les producteurs est également décritdans ce cahier des charges. Les défauts sontobservés sur un échantillon brut, puis sur lesfruits « cylindrés ». Une partie des fruits peutêtre purement et simplement rejetée. Desfruits présentant de légers défauts peuventêtre agréés partiellement. L’ensemble con-duit à définir un pourcentage de réfactionsur le tonnage brut livré.

Enfin, le cahier des charges « qualité ana-nas industriel » fait référence au Guide desbonnes pratiques hygiéniques du JO, juillet1999, et à la Directive européenne 93-43.

3.2.2. La traçabilité parcellaire

Les recommandations concernant les prati-ques culturales existent et pourtant desdéviations importantes ont été observées

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dans l’analyse de ces pratiques. Il apparaîtnécessaire de mettre en place un système detraçabilité interne à la filière qui permettrade suivre, parcelle par parcelle, la mise enœuvre des recommandations techniques ;ce système de traçabilité devrait permettreaussi, dans une certaine mesure, un affichage,pour les clients de la Socomor, de pratiquesrespectueuses de principes aujourd’hui incon-tournables de sécurité alimentaire et de res-pect de l’environnement.

La traçabilité parcellaire est l’un des élé-ments important de ce système de manage-ment de la qualité pour lequel la recherchea pu apporter une contribution importanteà travers la réalisation d’une base de don-nées simple d’utilisation « MARTAnanas »,relative aux producteurs et à leurs parcelles.Cette base est gérée par la coopérativeSocomor.

Les éléments pris en compte pour cettetraçabilité sont la parcelle, la prévision desopérations culturales, la diffusion de fichesmensuelles de prévision des opérations cul-turales producteur par producteur, la pro-duction de fiches de traçabilité complètes,ainsi que l’enregistrement des données con-cernant les livraisons de fruits.

– La parcelle, unité de base de production,est située dans le contexte « filière, produc-teur, plantation ». Elle est créée dans la basede données à partir d’une déclaration duproducteur précisant sa localisation exacte,sa date de plantation, son nombre de plants,son itinéraire technique. La Socomor utiliseun système d’information géographique(SIG), notamment pour les déclarations desurfaces plantées faites à l’administration(Direction de l’agriculture et de la forêt).

– Pour la prévision des opérations cultura-les depuis la plantation jusqu’à la destruc-tion des plants, la base de données déduit,de la date de plantation, une date probablede traitement d’induction florale (TIF), tou-tes les opérations culturales y compris l’appli-cation d’intrants, l’utilisation des pesticideset les besoins en eau. Elle donne une datede récolte probable en fonction de l’itiné-raire technique recommandé pour le pro-ducteur concerné, de la date de plantationet des relevés de températures quotidienspermettant d’évaluer l’intervalle entre le TIF

et la récolte en calculant la somme des tem-pératures correspondantes pour une zonedonnée (adapté du logiciel « Aloha pineap-ple » ([9, 10] et Touron J., Fournier P., com-mun. pers., 2000). La base de données pré-voit aussi un tonnage récolté en fonction descycles précédents cultivés sur la même par-celle et de coefficients de correction prenanten compte la croissance végétative pour lecycle en cours.

– Des fiches mensuelles de prévision desopérations culturales producteur par pro-ducteur sont également utilisées pourl’enregistrement des données réelles par leproducteur ; elles permettent une actualisa-tion mensuelle de la base de données.

– Des fiches complètes de traçabilité, par-celle par parcelle, présentant l’ensemble desopérations et évènements ayant eu lieu ainsiqu’un bilan minéral de la fertilisation sontproduites.

– L’enregistrement des données concernantles livraisons de fruits via une connexionavec le logiciel de pesée de la coopérativepermet d’avoir un tableau comparatif desflux prévisionnel et réel entrant à l’usine. Ils’ensuit une meilleure gestion des opéra-tions de transformation (tonnages à traiterquotidiennement et personnel requis).

Des éléments additionnels, comme uncalcul des besoins en intrants de l’ensemblede la filière, permettent une gestion plusefficace de la centrale d’achat de la coopé-rative.

3.3. Nouvelles variétés

Actuellement, la culture de l’ananas en Mar-tinique repose sur l’exploitation d’une seulevariété, la Cayenne lisse, et l’essentiel de sesdébouchés est la transformation par la Soco-mor. Cependant, un facteur déterminantpour la pérennité de la filière ananas seraitsa capacité de diversification qui, outre latransformation, s’appuierait sur le dévelop-pement d’une production de fruits frais des-tinés aux marchés locaux ou d’exportation.De plus, le développement de variétés inno-vantes pourrait accroître la compétitivité dela production martiniquaise, quant à la qua-lité intrinsèque du produit et à la réductiondes impacts environnementaux. Dans ce

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cadre, les recherches menées par le Ciradpermettent de proposer de nouvelles varié-tés mieux adaptées aux marchés ; la qualitéde leur fruit est alors améliorée pour laconsommation en frais locale, voire pourl’exportation ; ces variétés peuvent égale-ment être propices aux processus de trans-formation car elles permettent une augmen-tation des rendements.

Ce sont des sélections clonales issues dumatériel collecté au cours des missions deprospection du bassin amazonien au coursdes années 80 à 90 [15] ou des variétés hybri-des créées dans le cadre d’un programmed’amélioration génétique [16].

3.3.1. Sélections clonales

Au sein des clones de type Cayenne collec-tés au cours de prospection, le Cirad a sélec-tionné deux clones originaires de Guyanefrançaise (GF090 et GF449), qui, conservantles qualités intrinsèques du clone cultivéen Martinique (Champaka), présentent unrapport [sucre / acidité] plus élevé (respec-

tivement 1,45 et 1,35 contre 1,06 pourChampaka). Ces deux clones pourraientavantageusement se substituer au type localtant pour la transformation que pour laconsommation en frais.

3.3.2. Variétés hybrides

Les hybrides proposés dans le cadre d’unereconversion variétale martiniquaise sontissus d’un vaste programme de croisementsfaisant intervenir le Cayenne lisse et lesvariétés colombiennes Péroléra et Manzanaqui est un clone rouge orangé de Péroléra.Le programme d’amélioration a eu pourobjectif d’ajouter aux qualités du Cayennedes caractères propres aux Péroléra etManzana : une forte teneur en acide ascor-bique, une chair jaune d’or plus ferme, moinsjuteuse et peu fibreuse et une forme trèscylindrique du fruit [16].

Après de nombreux cycles d’évaluationet de sélection au sein des milliers d’hybri-des produits, trois hybrides ont été retenus :Flhoran 41, Flhoran 53 et Flhoran 55

Figure 6.Présentation des fruits de trois hybrides d’ananas sélectionnés par le Cirad et retenus pour un développement en Martinique (industrie et/ou fruit frais) .

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(figure 6). Les fruits sont d’un poids simi-laire à Cayenne lisse (1,3 à 1,9 kg). Les qua-lités organoleptiques ont été amélioréesavec une teneur en sucre plus élevée quechez Cayenne pour une acidité comparable.Ces hybrides ont également hérité d’uneforte teneur en acide ascorbique de (14 à18) mg·100 mL–1, soit deux à trois fois plusélevée que celle des fruits du Cayenne. Lapulpe présente les caractéristiques recher-chées de fermeté et de couleur (aspectvisuel plus attrayant), conduisant, notam-ment pour la transformation, à une amélio-ration significative de la tenue à la découpe(figure 7).

Par ailleurs, les fruits de Flhoran 41 etFlhoran 53 présentent une forme cylindri-que très marquée les rendant parfaitementadaptés au cylindrage en usine. Enfin, àmaturité, le fruit de Flhoran 41 se colorenaturellement en rouge orangé, caractèred’autant plus marqué que les températuressont fraîches. Cette caractéristique visuelle,très attractive, le démarque clairement auxyeux des consommateurs des autres variétésdu marché.

Flhoran 53 semble être l’hybride le mieuxadapté à la transformation et devrait permet-tre une augmentation significative des ren-dements en usine. Flhoran 41 est un produitmixte permettant aussi bien la transforma-tion en usine que la vente en frais : les ren-dements en cubes obtenus en tests usinesont de 63,3 % pour Flhoran 41 contre seu-lement (30 à 40) % pour les fruits de Cayennelisse ; sur le marché du frais, les qualitésorganoleptiques et visuelles de cet hybridepourront contribuer à une augmentation dela qualité des produits mis en marché.

Le fruit de Flhoran 55 est de forme glo-bulaire, ce qui le rend impropre à la trans-formation en tranches ou en cubes. Enrevanche, son taux record de sucre (près de18 °Brix, avec un rapport [sucre / acidité] de1,6) en fait une variété très intéressante pourle marché du frais. Cet hybride est cepen-dant handicapé par une production de rejetfaible et tardive, compromettante pour sondéveloppement.

À terme, le développement de nouvellesvariétés hybrides résistantes aux ravageurset parasites pourrait contribuer à la réduc-

tion des nuisances environnementales. Enparticulier, la création de variétés tolérantesaux nématodes répondrait à la doublenécessité d’une meilleure préservation dumilieu et viendrait pallier l’absence denématicides homologués, selon la législa-tion européenne, en culture d’ananas.

4. Conclusion

La décision de restructurer la filière ananasde Martinique résulte avant tout de consi-dérations économiques : la compétitivité decette filière est faible devant les produitsindustriels à bas coûts des producteurs asia-tiques. La profession a longtemps été sou-tenue grâce aux aides nationales et euro-péennes, car les coûts élevés de productionen Martinique sont en grande partie liés auxcharges salariales que supportent les pro-ducteurs face à des producteurs d’autrespays non soumis aux mêmes contraintes.Ces aides s’amenuisant d’année en année,la survie de la filière passe par des innova-tions techniques (nouveaux produits, nou-velles variétés), mais aussi la mise en avantd’une spécificité qui préconise une produc-tion respectueuse de la sécurité alimentaireet de la protection de l’environnement.

Des recommandations techniques exis-tent déjà, mais une partie non négligeabledes agriculteurs (environ 1/3) met en œuvredes pratiques pouvant avoir des conséquen-ces néfastes sur l’environnement et sur laqualité du fruit et, donc, potentiellement, surla santé humaine. Une homogénéisation despratiques se rapprochant de recommanda-tions visant des objectifs de qualité est

Figure 7.Transformation en cube de l’ananas (coopérative Socomor, Martinique).

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nécessaire ; celles-ci pourraient être rassem-blées dans un guide de culture adapté. Cettedémarche a conduit au développement d’unprogramme d’assurance qualité avec instau-ration d’un système de traçabilité parcellaire,destiné à garantir la sécurité alimentaire.

La mise au point de nouvelles variétésmieux adaptées aux marchés et aux nou-veaux procédés de transformation devraitpermettre dans un premier temps d’amélio-rer la compétitivité de la filière grâce à unereconversion variétale partielle. La mise aupoint de nouveaux itinéraires techniquesplus respectueux des exigences de protec-tion de l’environnement pour ces mêmesvariétés devrait faciliter dans un deuxièmetemps la mise en œuvre d’un système demanagement de la qualité. Enfin, à plus longterme, la création de variétés résistantes outolérantes aux principaux parasites de l’ana-nas à intégrer dans un système de culturespécifique permettra de réduire au strictminimum l’impact d’intrants dangereuxpour le milieu.

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Fruits, vol. 61 (1) 53

Manejo de la calidad en el industria piñera en Martinica.

Resumen –– Introducción. La industria piñera de Martinica se está reorganizando profunda-mente como lo hicieron otros sectores de alimentación humana par cumplir con los nuevosrequisitos de seguridad alimenticia y de protección del environamiento : Manejo de calidad atodos los niveles de la industria y introducción de nuevas variedades de piña. Un análisis delas técnicas agrícolas usuales de los productores permitió a la autores de proponer unos cam-bios necesarios así que un nuevo sistema de producción. Material y métodos. Una topolo-gía de las fincas ha sido elaborada a través del análisis de las técnicas agrícolas usuales y delas estrategias de los productores. Un comité piloto incluyendo representantes de la mayorparte de los actores de la industria, propone un sistema de manejo de la calidad refiriéndosea las normas Agriconfiance®. Nuevas variedades de piña han sido evaluadas para transforma-ción o para el mercado fresco. Resultados y discusión. Se notan diferencias variables ygeneralmente amplias entre las recomendaciones y los usos reales: demasiado insumos, seafertilizantes, sea pesticidas o los dos. El sistema de manejo de calidad está basado en un con-trato entre la cooperativa y el productor. Las reglas se encuentran en dos códigos de prácti-cas, uno para la producción de la fruta en el campo y el otro para la transformación. Unsistema de trazabilidad ha sido elaborado permitiendo el registro y previsión al nivel de laparcela. Nuevas variedades de piñas fueron utilizadas para transformación dando mejoresresultados que la variedad Cayena lisa. Conclusión. La reorganización de la industria piñeraen Martinica resulta de problemas económicos. Esta implementación necesitó el desarrollo deun programa global de seguridad de calidad con un sistema de trazabilidad al nivel de par-cela para garantizar la seguridad alimenticia. Una homogeneización de los usos es necesaria,refiriéndose a recomendaciones técnicas para mejorar la calidad. Podrían ser agregadas a unaguía técnica específica. El uso de nuevas variedades con mejor rendimientos de transforma-ción será también un elemento importante del suceso de la reorganización.

Martinico / Ananas comosus / manejo del cultivo / seguridad alimentaría /protección ambiental / ensayos de variedades / frutas / calidad