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MINISTERE DE LA COOPERATION INSEE
DDE Département de la Coopération Administrative Service de Coopération
SOMMAIRE
N° 25 - Mars 1981
Pages
- EDITORIAL 3
- R. CLAIRIN Quelques réflexions sur la collecte démographique 5
- J.L. DUBOIS Utilisation de la Banque "ARIEL" d'information sur les ménages 27
- J.P. LISSILLOUR Mini-ordinateurs de bureau Eléments pour le choix et l'installation pour la réalisation d'études et de petits dépouillements d'enquêtes statistiques
44
- M. SURGERS Quelques remarques à propos de "Living Standard Measurement Study"
Problèmes conceptuels et méthodologiques 60
- R. DECOSTER Statistique et politiques de développement 71
- P.A. YOUM Note de lecture sur : "L'importance du risque dans les modèles de planification agricole" 91
- LISTE DES ARTICLES PARUS DANS LES NUMÉROS 21 A 24 100
STATECO : Bulletin de Liaison non officiel des Statisticiens et Economistes exerçant leur activité en Afrique
Directeur de la Publication : Jean HOSSENLOPP
Secrétariat de la Rédaction : INSEE - Service Coopération 18, boulevard Adolphe Pinard
Mine BONJOUR 75675 PARIS Cedex 14
Tirage : 1 000 exemplaires
ISSN 0224 - 098X
- 3 -
EDITORIAL
Jean HOSSENLOPP
Chose promise, chose due ; le problème de la collecte statistique, au
moins en démographie, est enfin posé. Son enjeu est d'importance et il constitue,
avec certains problèmes de dépouillement informatique et des considérations d'en-
semble bien documentées, l'essentiel du présent numéro de STATECO.
Avec la parution, quelque peu tardive, de ce numéro 25 et de l'article
de Rémy CLAIRIN "Quelques réflexions sur la collecte démographique", des réactions
variées devraient se faire jour et aboutir, soit à nuancer fortement les arguments
et conclusions de l'article (priorité insuffisante à l'analyse démographique ?..),
soit à la révision des priorités pour les démographes africanistes et, peut-être,
à la mise en chantier d'un "manuel de collecte". D'ores et déjà une place est pré-
vue dans le numéro 26 pour faire écho aux réactions des lecteurs.
Les enquêtes de consommation auprès des ménages, quant-à-elles, sont
traitées par Jean-Luc DUBOIS sous l'angle de leur dépouillement par le logiciel
général actuellement le mieux adapté à ce type de données : "Utilisation de la
banque "ARIEL" d'information sur les ménages". Il faut bien voir, cependant, que
la banque ARIEL codifie, traite et tabule les fichiers, mais qu'elle n'est pas un
logiciel d'apurement de fichier (la fonction saisie-contrôle sera peut être abor-
dée dans un article ultérieur).
Avec l'article de Jean-Pierre LISSILLOUR "Eléments pour le choix et
l'installation d'un mini-ordinateur de bureau" sont abordés certains problèmes,
assez nouveaux, de ces petits outils informatiques (ni la micro-, ni la pico-
informatique ne sont traitées ici).A noter cependant que les considérations déve-
loppées reflètent l'expérience, assez réussie, de l'INSEE en ce domaine et que
l'utilisation des mini-ordinateurs n'est donc envisagée que comme complément à la
"grosse" informatique ; mais rien n'interdit d'envisager par ailleurs un premier
équipement "mini" (souvent extensible) pour un petit service (ou une direction
régionale isolée) sous l'évidente réserve de l'adaptation des volumes de saisie
et de traitement.
- 4 -
Le champ des préoccupations s'élargit fortement avec les réflexions de
Marc SURGERS "Quelques remarques à propos du Living Standard Measurement Study"
introduites par Gérard WINTER. Ces considérations sont en outre "chargées d'ave-
nir", dans la mesure où elles s'inscrivent dans la préparation des références
conceptuelles de base pour les statistiques des années 80 ou 90.
En ce sens, elles constituent déjà une ébauche de réponse à quelques-
unes des nombreuses questions fondamentales posées par Renaud DECOSTER dans
"Statistique et politiques de développement". Ces questions se sont précisées à
travers 4 années d'expérience asiatique de l'auteur (ONU - CESAP) et les avis
très libres qu'il exprime n'engagent évidemment ni ses employeurs, ni l'INSEE,
ni le Ministère de la Coopération.
On trouvera enfin la rubrique "Note de lecture" qui donne une longue
analyse de Prosper Aliou YOUM (ancien élève du CESD) sur l'ouvrage : "L'importance
du risque dans les modèles de planification agricole", ainsi qu'une liste des
articles de STATECO pour l'année 1980.
Peut être une collaboration plus étroite avec le CESD fournira-t-elle
l'occasion de développer ces "Notes de lecture" ? En tout état de cause, nous
tenterons aussi de développer la présentation de résumés et de leur traduction
(anglais et espagnol) dans le sens de l'essai réalisé ici pour l'article de
Jean-Pierre LISSILLOUR ; là-aussi nous tiendrons le plus grand compte de l'avis
des lecteurs.
- 5 -
QUELQUES REFLEXIONS SUR LA COLLECTE DEMOGRAPHIQUE
(PLUS PARTICULIEREMENT EN AFRIQUE TROPICALE)
par Rémy CLAIRIN
INTRODUCTION
La présente note a été rédigée à la suite de plusieurs missions effec-
tuées à l'occasion d'une enquête démographique nationale à passages répétés réa-
lisée dans un pays africain en 1978 et 1979.
De grands espoirs avaient été fondés sur cette opération dont on avait
pu penser qu'elle marquerait un réveil de l'activité de collecte démographique en
Afrique tropicale francophone après une longue stagnation. La méthode utilisée
était relativement nouvelle et n'avait jamais été appliquée jusqu'au bout au ni-
veau national dans un pays de cette région.
Malheureusement, l'exécution de cette enquête soulève un certain nom-
bre d'observations critiques des plus sérieuses.
Une première remarque à faire est que l'on ne peut réussir partout et
toujours et que la seule façon d'éviter les déceptions est de ne rien entrepren-
dre et donc de ne rien espérer.
Que faire lorsque les difficultés rencontrées semblent de nature à
compromettre une opération ? On constate en pratique que devant une situation de
ce genre, on adopte généralement une des deux attitudes suivantes :
- soit abandonner purement et simplement en espérant que le temps ap-
portera l'oubli. Ce qui d'ailleurs se produit généralement et explique le nombre
élevé de dossiers inexploités,ou dont les résultats ne sont pas publiés,qui dor-
ment paisiblement dans les archives ;
- soit parvenir au prix d'efforts opiniâtres à obtenir des résultats
à peu près plausibles, en se limitant à une fraction seulement des objectifs que
- 6 -
l'on s'était fixés au départ et en procédant à des corrections, estimations et
ajustements audacieux tout en couvrant d'un voile pudique ce qui n'a pas marché.
Ces réactions -trop humaines- sont à courte vue. Un échec peut être
utile à condition d'en rechercher objectivement les raisons et d'en tirer des
leçons pour l'avenir. En l'occurrence, ce que l'on a observé peut fournir une
excellente occasion de méditer sur les problèmes posés par l'observation démo-
graphique dans les pays du Tiers Monde. On peut espérer que cela amène à prendre
un nouveau départ. En effet, on assiste peut-être aujourd'hui à la fin d'une épo-
que -qui a duré un quart de siècle- influencée par une "doctrine" qui a certes
donné des résultats précieux mais est aujourd'hui dépassée.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, il n'est sans doute pas inutile
d'élever le débat en posant le problème de la coopération dans le domaine de la
démographie.
CARACTERES DE LA RECHERCHE DEMOGRAPHIQUE
Pour un extra-terrestre, il semblerait évident que la démographie,
science dont l'objet est l'espèce humaine, ait partout et toujours soulevé un
intérêt passionné parmi les habitants de notre planète. Or, on sait qu'il n'en
était rien dans le passé, à part quelques exceptions, et que ce n'est même pas
toujours le cas actuellement.
En France, notamment, la démographie a longtemps été "une science sau-
vage, sans maîtres" suivant le mot d'A. SAUVY. Dans notre pays, cette discipline
a éprouvé des difficultés considérables à s'intégrer dans l'édifice bonapartiste
de notre système d'enseignement.
Certes l'époque est révolue où la simple mention des termes "démogra-
phie" ou "démographe" soulevait une douce hilarité, ce qui était encore parfois
le cas il y a une vingtaine d'années. Mais on a souvent l'occasion de constater
que des lumières, mêmes sommaires, sur ce sujet ne sont pas considérées comme par-
ties intégrantes de la culture générale de l'honnête homme.
- 7 -
De toute façon, la démographie souffre d'un très grave handicap : la
grande inertie des phénomènes ; ce qui leur donne un caractère en partie inéluc-
table et est la principale raison de l'intérêt souvent distant qu'on leur porte.
Actuellement, la grande majorité des chômeurs (et des mobilisables) de
l'an 2000 sont déjà nés, ainsi que la totalité des retraités (à 65 ans) de l'an
2005. Une action visant à modifier les facteurs de l'évolution n'agira que très
progressivement et les effets ne s'en feront vraiment sentir qu'à une époque où,
conformément d'ailleurs aux lois fondamentales de la démographie, les responsables
actuels seront décédés ou, au moins, retraités. Une telle action n'a rien de spec-
taculaire et est d'un rendement très faible sur le plan de la propagande.
Même en se limitant à la simple description de la situation actuelle
et à l'estimation des tendances présentes, on observe dans beaucoup de cas une ca-
rence impressionnante. Pour certains pays africains, les dernières données dispo-
nibles sur les tendances démographiques remontent à 1960 - 1962. En outre, leur
qualité est sujette à caution étant donné la façon dont elles ont été obtenues.
Il en résulte qu'il arrive que la fourchette où l'on peut penser que se situe le
taux d'accroissement annuel va de 1,5 à 3,0 %. A court terme, la différence est
faible, mais plus on avance dans le temps, plus elle devient importante. Par exem-
ple, pour un pays qui compte en 1980 5 millions d'habitants, la population s'élè-
verait en l'an 2000 à 6,7 millions d'habitants avec un taux de 1,5 % et à 9 mil-
lions avec un taux de 3 %, ce qui représente une certaine différence.
La prise de conscience de cette carence aboutit le plus souvent à l'en-
voi en mission d'un démographe paré du titre prestigieux d'expert. Après quelques
semaines de séjour dans le pays, il risque de s'entendre dire quelque chose de ce
genre : "Vous devez maintenant avoir une idée du chiffre de notre population et
des tendances générales de l'évolution". Lorsqu'il avoue honnêtement son ignorance
il doit constater une dégradation très nette de son image de marque, et ses capa-
cités risquent d'être jugées encore plus sévèrement lorsqu'il présentera des pro-
positions pour peu que celles-ci soient pratiques et réalistes.
En effet, si elle n'exclut pas les grandes opérations, l'observation
démographique implique pour être efficace un effort continu et assez obscur de
collecte des données de base.
- 8 -
Car, malgré les brillants progrès réalisés dans le domaine de la démo-
graphie mathématique, des modèles, de la théorie des sondages ou de l'analyse des
données, tout l'édifice repose en fin de compte sur une opération fondamentale qui
consiste à joindre des, individus, à les interroger, et à noter leurs réponses, à
enregistrer des événements et à inscrire leurs caractéristiques, activité oü les
gains de productivité sont infimes et où les techniques de travail ne diffèrent
guère de celles des scribes pharaoniques.
Certes, les pays développés disposent de spécialistes brillants de la
science démographique, ce dont on ne peut que se féliciter. Mais l'outil le plus
efficace qu'ils possèdent, c'est l'état civil. En France, les données essentielles
sur le mouvement de population sont le fruit du labeur de milliers de secrétaires
de mairie modestes et consciencieux, et le coût de cet enregistrement est tout à
fait marginal.
Bien entendu, ce système n'a pas été créé et n'a pas été rodé en un
jour. C'est le fruit d'une évolution séculaire. Cela illustre quelques principes
qu'il est bon d'avoir à l'esprit si on veut obtenir des résultats durables dans
le domaine de l'observation démographique : continuité dans l'action, utilisation
dans la mesure du possible de l'infrastructure existante, participation de la
population.
LA COOPERATION FRANCAISE EN MATIERE DE DEMOGRAPHIE
Il faut bien reconnaître que ces principes sont trop souvent perdus de
vue dans les multiples efforts entrepris sur le plan international pour pallier
la carence dans ce domaine. Cette action mérite bien d'autres critiques, mais il
faut en tenir compte, tout en souhaitant qu'on la réforme de fond en comble. Dans
ce concert international, la France joue-t-elle le rôle qui devrait lui revenir
tant sur le plan qualitatif que sur le plan quantitatif ? On ne peut malheureuse-
ment pas répondre par l'affirmative.
Il y a quelques années (exactement dans le numéro du "Monde" daté des
26 et 27 décembre 1976) Alfred SAUVY a publié un article sur la participation
française (ou plutôt la non-participation) aux activités de coopération sur le
plan international.
- 9 -
C'était un cri d'alarme intitulé de façon percutante "l'Art de se dé-
truire". Il semble avoir provoqué à l'époque quelques remous, apparemment vite
apaisés.
Le ton général de l'article était donné par son premier alinéa :
"Il n'est jamais agréable de dénoncer une défaillance de son pays. La
tâche est plus délicate encore quand il s'agit de relations internatio-
nales, car la France sacrifie légèrement non seulement son influence et
son prestige, mais des positions-clefs".
Nous en extrayons les passages suivants qui concernent la démographie :
"La France est, on le sait, à l'avant-garde de la science démographi-
que ; il est bien peu de domaines scientifiques où la première place
puisse être revendiquée par notre pays; l'influence française a été
considérable dans le monde, qu'il s'agisse des méthodes, de l'analyse
de la population, de la connaissance des phénomènes ou de la démogra-
phie historique. Des résultats importants ont été obtenus, mais il ne
s'agira bientôt que d'un souvenir".
"Il existe un Fonds des Nations-Unies pour les Activités en matière de
Population (F.N.U.A.P.) qui exerce dans le monde une action importante,
dont nul ne conteste plus la nécessité. La contribution dérisoire de la
France, 100 000 dollars, est inférieure au dixième de celle de la
Belgique. La France se trouve loin du Danemark (2 millions), du Royaume
Uni (4 millions), de la Norvège (5 millions), du Canada (5), de la
Suède (7), de l'Allemagne Fédérale (7), des Pays-Bas (8), du Japon (9),
etc ... En face de sa contribution de 100 000 dollars, la France béné-
ficie d'apports quinze fois plus importants de la part du Fonds pour
les activités de langue française dans le domaine de la population".
"Du fait de cette carence difficile à croire, diverses institutions
francophones sont menacées".
(L'auteur donne ensuite quelques exemples)
- 10 -
Bref, le moins que l'on puisse dire est que ce n'est pas un bilan très
brillant (et la situation ne s'est certainement pas améliorée depuis).
Cette carence est-elle compensée par une assistance bilatérale de qua-
lité très élevée, en particulier en Afrique Noire ? Elle pourrait certainement
l'être. Les ressources existent sur le plan intellectuel, la nature des relations
de la France avec ces pays permet d'associer étroitement les instances locales et
facilitent l'adaptation au milieu.
Mais il semble que ces possibilités soient mal exploitées.
L'assistance des Nations-Unies fait preuve d'un excès de rigidité doc-
trinale qui s'ajuste mal à la diversité des situations et veut couler toutes les
populations dans le même moule. La coopération française souffrirait plutôt d'un
manque de doctrine et d'un empirisme excessif.
LE PASSE
Avant les années 1950, la situation de l'observation démographique dans
les pays d'Afrique francophone était aussi peu brillante que dans la grande majo-
rité des pays sous-développés.
Il existait cependant quelques éléments qui auraient sans doute pu être
mieux utilisés. C'étaient essentiellement les "recensements administratifs",
créés en vertu d'une loi de 1902 prévoyant, non sans optimisme, un recensement an-
nuel de l'ensemble de la population.
Les critiques adressées à ces dénombrements du point de vue de l'éthi-
que démographique sont bien connues et sans doute justifiées : la plus grave est
le fait que ces opérations avaient des incidences fiscales, en raison de l'exis-
tence d'un impôt de capitation. Bien qu'ils aient été effectués en général de fa-
çon assez expéditive par rassemblement de la population concernée, ils représen-
taient pour les fonctionnaires qui en étaient responsables une charge de travail
assez lourde.
Mais on est sans doute allé trop loin dans le procès qui leur a été
fait et surtout la critique a été trop systématique.
Les premiers statisticiens démographes affectés dans ce qui était alors
l'Afrique française n'ont pas toujours reçu un accueil très chaleureux de la part
d'une administration qui défendait ses prérogatives avec d'autant plus d'énergie
qu'elle les sentait menacées par la marche du temps.
On contesta donc l'utilité des enquêtes démographiques en arguant que
l'on disposait déjà de données fiables sur les populations.
La riposte des démographes fut une démolition systématique des recense-
ments administratifs illustrée par des exemples savoureux et bien choisis
d'inexactitudes voire d'absurdités.
Il faut donc tout de même reconnaître que ces opérations avaient le
mérite d'exister. Elles ont permis de construire des bases de sondage certes im-
parfaites, mais irremplaçables, pour la réalisation des enquêtes.
Enfin,même si les chiffres étaient de qualité inégale, ils n'étaient
pas,dans l'ensemble,aussi mauvais qu'on le proclamait. On peut avouer maintenant
que, dans quelques cas, des responsables d'enquêtes démographiques, ayant des in-
quiétudes à propos de certains résultats qui pouvaient sembler aberrants, ont
étouffé leurs scrupules et sont allés faire un pointage des données du recensement
administratif et que l'impression qui s'en est dégagée fut, en général, plutôt
favorable.
Il est même possible qu'en ce qui concerne la détermination des âges,
les recensements administratifs présentent de réels avantages par rapport aux
enquêtes démographiques -et à fortiori aux recensements proprement dits- puisque
les mêmes personnes sont suivies dans le temps.
En tout état de cause, il est regrettable que cette énorme masse de
documentation n'ait pas été exploitée.
- 12 -
En fait, dans ce domaine et dans d'autres, une collaboration entre ad-
ministrateurs et statisticiens aurait pu et pourrait encore, dans la mesure où ce
système existe toujours, être très fructueuse. Des propositions concrètes ont
d'ailleurs été faites dans ce sens, notamment en Haute-Volta. La première chose à
faire serait d'inclure dans le programme de formation du personnel administratif
des éléments de démographie théorique et pratique adaptés aux besoins.
Notons également que l'état civil avait été introduit dans les pays qui
nous intéressent, mais n'était obligatoire que pour certaines catégories.
LES ENQUETES DEMOGRAPHIQUES
Si l'on fait abstraction de quelques essais dus à des pionniers travail-
lant isolément, l'enquête démographique de Guinée (1954 - 1955) marque le point de
départ de l'application des méthodes scientifiques modernes à l'étude des popula-
tions des territoires français d'Afrique.
On s'y inspirait d'expériences un peu plus anciennes entreprises dans
quelques territoires britanniques et belges dont on avait pris connaissance à l'oc-
casion d'un séminaire organisé à Ibadan (Nigeria) en 1953.
Les principes directeurs étaient les suivants :
- opération à caractère purement statistique, dirigée par du personnel
indépendant de l'Administration ;
- caractère confidentiel des renseignements individuels obtenus, point
sur lequel on insistait particulièrement, notamment pour se démarquer des recense-
ments administratifs ;
- utilisation de la méthode des sondages aléatoires ;
- détermination des éléments du mouvement de la population, essentiel-
lement par interrogatoire rétrospectif, c'est-à-dire en enregistrant les naissan-
ces et les décès qui se sont produits au cours d'une période de référence d'un an
précédant le jour de l'enquête.
- 13 -
Avec une grande audace, qui s'est révélée payante, il fut décidé de
frapper un grand coup en entreprenant d'emblée une vaste opération à l'échelle
nationale. La Guinée fut choisie comme terrain d'expérience et les opérations sur
le terrain se déroulèrent dans la première moitié de 1955.
On partait vraiment à zéro et le personnel à tous les échelons était
totalement inexpérimenté. Il y avait certes un risque sérieux d'échec. Mais ces
craintes ne se matérialisèrent pas.
Les sceptiques -nombreux- furent donc déçus et l'enquête de Guinée fut
considérée comme un succès. Certes, par la suite, le progrès des techniques d'a-
nalyse fit ressortir que la qualité des résultats était moins bonne qu'il n'avait
semblé au premier abord. Les principaux défauts étaient les déformations de la
pyramide des âges et la délimitation de la période de référence pour l'enregistre-
ment des événements. Malgré ces réserves, l'opération, même imparfaite, consti-
tuait un immense progrès par rapport au désert où l'on se trouvait précédemment.
La cause était entendue et, pendant la décennie qui suivit, tous les
territoires français de l'Afrique Occidentale et Equatoriale firent l'objet d'en-
quêtes nationales du même type, à l'exception de quelques zones limitées, pour
la plupart désertiques. Le scepticisme avait fait place à une confiance parfois
excessive, les crédits étaient obtenus sans difficulté et il faut reconnaître que
les responsables faisaient preuve d'un enthousiasme exaltant.
Puis les choses se calmèrent, la mode changea. L'époque des enquêtes
nationales semblait révolue. On assista plutôt à la réalisation d'études plus ap-
profondies portant sur des régions limitées.
D'autre part, des recensements démographiques nationaux eurent lieu
dans la plupart des pays à la suite de l'intervention de l'Organisation des
Nations-Unies.
Les enquêtes postérieures à celle de Guinée ont été marquées par des
améliorations notables dans l'élaboration du questionnaire, le choix des sujets
abordés, la formulation des questions et la technique d'interrogatoire. D'autre
part, des progrès considérables ont été réalisés dans la rentibilisation des don-
nées collectées, grâce à la mise en oeuvre de méthodes nouvelles d'analyse, d'a-
justement, de recoupement et d'estimations indirectes.
- 14 -
Mais il a fallu reconnaître que l'on avait pratiquement atteint un op-
timum et que les enquêtes démographiques classiques présentaient certaines limita-
tions inhérentes à leur nature même. Un de leurs handicaps est le fait que l'on
enregistre les événements démographiques qui se sont produits au cours d'une pério-
de de référence (un an).
Ce qui présente un double risque d'erreurs :
- mauvaise délimitation de la période de référence ;
- omission d'événements qui se sont produits au cours de ladite pério-
de, ou, plus rarement, enregistrement d'événements qui ne devraient pas l'être.
C'est essentiellement en vue de pallier ces deux risques d'erreur, que
l'on a imaginé les enquêtes à passages répétés, qui constituent en quelque sorte
au moins une ébauche d'observation longitudinale.
Le principe de ces enquêtes est simple : au cours du premier passage
on procède à une enquête de type classique avec interrogatoire rétrospectif por-
tant sur une période de référence d'un an. Aux passages suivantstqui ont lieu à
intervalles réguliers (six mois par exemple), on enregistre les événements qui se
sont produits depuis le passage précédent, ce qui élimine la première source
d'erreurs (délimitation de la période de référence). Quant à la seconde, on obser-
ve en particulier que le risque le plus sérieux (omission de décès) est -en
principe- considérablement réduit, sinon totalement supprimé, en procédant à un
pointage de toutes les personnes recensées au passage précédent et en demandant
ce que sont devenus les manquants (décédés ou émigrés).
C'est l'avantage essentiel de l'enquête à passages répétés qui, par
contre, crée de nouveaux problèmes : traitement des migrants, détermination de
la population de référence, rapprochement et comparaison des renseignements obte-
nus aux divers passages, exploitation informatique, etc ...
Par ailleurs, comme le confirme l'expérience récentetces enquêtes ris-
quent de présenter les autres défauts et insuffisances des enquêtes classiquesien
particulier les problèmes pratiques du travail sur le terrainedont la solution ne
s'apprend pas dans les manuels.
- 15 -
BILAN DES ENQUETES DEMOGRAPHIQUES CLASSIQUES (A PASSAGE UNIQUE)
Il faut avant tout porter à leur actif qu'elles ont été, et malheureu-
sement restent encore souvent, les seules sources de données sur un certain nom-
bre de populations. Il y a un quart de siècle, elles étaient l'unique solution
face à une situation d'urgence caractérisée par :
- la prise de conscience, quelque peu tardive, de l'importance des
facteurs démographiques, et de l'urgence d'obtenir des données ;
- l'absence d'une infrastructure statistique adéquate, le manque de
personnel qualifié, l'obstacle d'une tradition administrative routinière ; cela
provoquait chez certain,par réactioneun grand enthousiasme pour l'innovation, qui
se traduisait par le fait qu'il était beaucoup plus facile d'obtenir des crédits
assez généreux pour des opérations ayant le prestige de la nouveauté que des
moyens beaucoup plus modestes pour assurer le fonctionnement de services de type
plus traditionnel.
La contribution de ces enquêtes à la connaissance des réalités afri-
caines a été considérable, mais leurs défauts ne sont pas moins indéniables.
- Elles ont été relativement très coûteuses, car elles nécessitaient
la mise en place d'une organisation particulière, le recrutement et la formation
d'un personnel spécial dont la durée d'emploi était assez brève, enfin les trans-
ports ont été remarquablement onéreux.
- La rentabilité de cet effort a été finalement plutôt faible, le per-
sonnel d'exécution est licencié à l'issue de l'opération d'où un gaspillage de sa
formation et de son expérience, souvent le personnel d'encadrement quitte le pays,
les données collectées ne servent pas de base à des études ultérieures, et il est
impossible de contrôler leur validité sur le terrain.
- Or, par la force des choses, ces renseignements sont de qualité iné-
gale. Leurs défauts n'apparaissent qu'à l'occasion de l'exploitation et de l'ana-
lyse. On ne peut alors que les constater et les déplorer.
- Les résultats ainsi obtenus ne s'appliquent qu'à une période bien
déterminée. Ils ne permettent pas de suivre l'évolution dans le temps. Or, dans
- 16-
trop de cas, on doit reconnaître que les principaux intéressés ont eu l'impression
qu'une enquête démographique avait réglé la question ; c'est pourquoi, lorsqu'on
recherche les données sur les mouvements démographiques de certains pays, on voit
ressortir des résultats vieux de 15 ans et plus.
- Enfin, dans la très grande majorité des cas, ces opérations ont été
organisées et dirigées par du personnel étranger au pays concerné dans lequel,
souvent, il mettait le pied pour la première fois ; on ne peut me soupçonner
d'hostilité à l'égard de ce personnel, mais je suis convaincu que sa participa-
tion, justifiée par la situation ancienne, l'est beaucoup moins actuellement.
Un des inconvénients majeurs a été que, faute de temps et parce qu'ils
étaient appelés à d'autres fonctions, les intéressés ont dû quitter le pays sans
y laisser d'héritier. D'où une absence de continuité.
Ce manque de continuité s'observe tragiquement dans un autre domaine,
c'est celui du "savoir-faire" (du "know-how", comme disent les économistes dis-
tingués). Celui-ci semble s'être perdu, ou plutôt dilué peu à peu au fil du temps.
Les déboires d'enquêtes récentes sont une illustration remarquable.
L'une d'entre elles avait un caractère expérimental, c'était la premiè-
re du genre entreprise au niveau national en Afrique Noire avec des moyens finan-
ciers assez importants.
L'objectif principal de l'opération était de connaître avec une préci-
sion suffisante les éléments du mouvement de la population au niveau de cinq gran-
des strates : Capitale d'Etat
Région Forestière zone rurale
centres urbains
Région de Savane zone rurale
centres urbains.
Il était prévu de procéder également à une étude des mouvements migra-
toires. On a utilisé comme base de sondage les résultats du recensement général
de la population réalisé trois ans auparavant. L'échantillon tiré correspondait
à une population (au recensement) d'environ 40 000 personnes dans chacune des
5 strates.
- 17 -
L'élaboration d'un plan de sondage pour un ensemble aussi diversifié
et hétérogène comme le sont la plupart des populations des pays africains n'était
pas des plus faciles. Pour les gros villages et les centres urbains, il fallait
procéder à des tirages aréolaires au second degré en utilisant les documents du
recensement général de la population.
L'exécution de ce plan posait un problème de cartographie nécessitant
une formation spéciale des agents chargés du tirage. Malheureusement, ce point a
été complètement perdu de vue. Or, on ne le répétera jamais assez, si on ne dis-
pose pas d'une cartographie adéquate, la collecte démographique se fait dans le
brouillard (c'est au moins aussi vrai pour les recensements que pour les enquêtes)
Chose encore plus grave, certaines instructions données au personnel
d'exécution allaient à l'encontre des principes mêmes de l'application de la
théorie des sondages.
Le résultat est que pour la totalité des strates urbaines et pour en-
viron 65 % des strates rurales, l'échantillon tiré n'est pas représentatif. Même
avec des relevés impeccablement corrects, il serait donc impossible de faire une
estimation sans biais, puisque la fraction de sondage effective est inconnue.
La situation peut cependant être redressée, dans la mesure où il est
peut-être possible de calculer à posteriori la probabilité de tirage de chaque
unité étudiée ; de toute façon, cela demandera du temps.
Passons maintenant au travail de collecte qui a comporté trois passa-
ges à six mois d'intervalle (et a été suivi d'une "campagne de vérification" en
septembre 1979).
Ce travail avait été préparé de façon minutieuse, mais en bureau. Au-
tant la lecture des instructions était réconfortante, autant une visite sur place,
alors que le deuxième passage était sur le point de s'achever, a révélé une situa-
tion inquiétante. Cela résultait de la combinaison d'une formation théorique ap-
profondie en démographie et d'un manque d'expérience pratique, d'où une prise en
compte insuffisante des problèmes du contrôle sur le terrain jugés apparemment
subalternes- ("l'intendance suivra"). On peut également remarquer qu'un progrès
technique mal assimilé ou utilisé abusivement peut aboutir à une régression : les
- 1S -
premiers résultats du premier passage n'ont été disponibles sous forme de tableaux
informatiques que plusieurs mois après la fin des opérations sur le terrain.
Or, les estimations des effectifs de population déduites de ces résul-
tats étaient inférieures aux chiffres du recensement qui s'était déroulé trois
ans auparavant. Ce fait, pourtant aveuglant, avait été purement et simplement
ignoré, parce qu'aucun contrôle, aucune comparaison, même sommaire, n'avaient eu
lieu, faute d'avoir effectué au fur et à mesure les totalisations les plus simples.
Une remarque analogue pouvait être faite à propos des taux bruts de
mortalité obtenus dans les différentes strates et dont, en général, le niveau
était anormalement bas.
Lorsque ces constatations pessimistes, ainsi que quelques autres, ont
été faites, les deux premiers passages étaient terminés, il ne restait donc qu'une
possibilité : profiter du troisième passage pour sauver ce qui pouvait l'être. Le
rapport rédigé à cette occasion insistait sur le point suivant :
"Le plus grand soin doit être apporté au contrôle et à l'encadrement
du travail sur le terrain ... Je crois que c'est réalisable compte tenu
des renforts en personnel dont peut disposer le responsable de l'opéra-
tion".
Effectivement, les résultats du troisième passage, ainsi que la quali-
té des notes, remarques et instructions rédigées par les superviseurs indiquent
que cette dernière phase s'est déroulée dans des conditions très satisfaisantes.
On ne peut que regretter qu'il n'en ait pas été de même auparavant. S'il est ré-
confortant de constater qu'en particulier "dans le domaine de l'enregistrement
des décès, point noir de toute étude démographique", cette équipe a redécouvert,
de façon indépendante, des solutions élaborées il y a un quart de siècle, on peut
estimer d'un autre côté qu'on aurait pu se dispenser de cet effort et profiter
d'emblée d'une expérience déjà ancienne et respectable.
Quelques exemples illustreront la mauvaise qualité des résultats obte-
nus aux deux premiers passages.
- 19 -
En ce qui concerne l'effectif de la population, la comparaison n'a pu
être faite que pour les villages de moins de 600 habitants, étudiés exhaustivement
et pour lesquels le tirage a été effectué de façon correcte (ces unités représen-
tent environ 35 % de l'échantillon des strates rurales).
A la suite du dernier passage et des vérifications qui ont suivi, on a
décelé deux types d'erreurs :
- sous-dénombrement des individus dans les localités étudiées ;
- omission pure et simple de parties entières de villages échantillons:
quartiers, hameaux et surtout campements. Cette grave carence s'explique par
l'absence d'une reconnaissance préalable des unités de l'échantillon.
Voici les chiffres obtenus :
1er passage : 31 515 personnes
2ème passage : 31 947 personnes
3ème passage : 36 963 dont 2 387 appartenant à des parties de village
entièrement omises.
Les chiffres du premier et du deuxième passage ne diffèrent pas signi-
ficativement. Entre le deuxième et le troisième passage on observe un accroisse-
ment de 15,7 % qui se décompose comme suit :
8,2 % pour l'accroissement de la population des localités déjà
recensées
7,5 % représentant la population des parties de localité omises.
En ce qui concerne le taux brut de mortalité, on a les chiffres sui-
vants (estimations provisoires) pour l'ensemble de l'Etat moins la Capitale.
- 20-
Taux brut de mortalité (pour 1 000)
OBSERVATION
RÉTROSPECTIVE
1er PASSAGE
Observation
entre le ler et le 2e passage
suivie
entre le 2e et le 3e passage
10,2 12,0 17,4
_.
Si l'on retient le chiffre du troisième passage (qui est vraisembla-
ble), la sous-estimation aurait été de 40 % au premier passage (enquête rétros-
pective classique) et de 30 % au deuxième passage (avec utilisation du principe
de l'enquête à passages répétés).
Cela illustre le fait que l'enquête à passages répétés n'est pas une
panacée. Si l'on s'était arrêté au deuxième passage, ou si, en l'absence de si-
gnal d'alarme, on avait continué sur sa lancée, l'opération n'aurait apporté
qu'un bénéfice plus que douteux et absolument sans commune mesure avec les frais
engagés.
QUELQUES PROPOSITIONS
Je me suis un peu étendu sur le cas de cette enquête menée au niveau
national parce qu'il est particulièrement exemplaire. Mais on pourrait aussi ci-
ter des opérations beaucoup plus limitées dans l'espace et considérablement moins
coûteuses où l'on peut faire des constatations analogues. L'impression générale
est celle d'une dégradation au niveau de la collecte. Si l'on ne souhaite pas
éprouver des déboires du même genre aux environs de l'an 2000, il serait peut-
être temps d'accorder quelques instants de réflexion aux orientations à donner
à l'effort de collecte, source de toute la connaissance démographique.
On peut avancer quelques principes qui ne semblent guère contestables.
- La collecte démographique doit être essentiellement le fruit d'un
effort continu, graduel et progressif plutôt que de faire l'objet d'opérations de
prestige sporadiques.
- 21 -
- Il doit exister une coordination aussi étroite que possible entre
les activités intéressant la démographie à titre principal ou accessoire. Une
opération n'est jamais vraiment rentable si elle n'est pas le point de départ
d'une autre activité de collecte ou d'observation.
- La collecte doit être l'affaire des services nationaux avec, bien
sûr, toute l'assistance technique extérieure souhaitable, mais les services na-
tionaux doivent rester les maîtres d'oeuvre.
- Enfin, à qualité égale, il faut rechercher la solution la moins coû-
teuse, ce qui peut sembler une vérité première, mais ne semble pas tellement évi-
dente d'après ce que l'on observe en pratique.
Ce qui précède implique l'existence d'un Service National Démographi-
que disposant d'un personnel stable d'enquêteurs. Ce Service doit disposer d'an-
tennes régionales disposant de moyens adéquats.
Le Service National :
- doit avoir un droit de regard sur toute enquête ou étude à caractère
principalement ou accessoirement démographique menée dans le pays, ceci en vue
d'assumer une bonne coordination et aussi de veiller à ce que le pays lui-même
soit le destinataire prioritaire de l'information recueillie ;
- toujours dans cette optique de coordination, ce Service devrait fai-
re l'inventaire de toutes les données disponibles (on fait parfois des découver-
tes étonnantes à cet égard). Cela implique avant tout la constitution d'un fi-
chier des localités (opération qui implique la mise en oeuvre de moyens impor-
tants). Beaucoup de déboires rencontrés lors de l'exécution de l'enquête à passa-
ges répétés auraient été évités si un tel fichier avait été disponible. Les car-
tes, plans et croquis établis à l'occasion du recensement -ou d'enquêtes- de-
vraient être conservés et archivés, en liaison avec la constitution de ce fichier
Parmi les actions en matière démographique, il y en a qui sont clas-
siques :
- la première est la diffusion de l'état civil. Quel que soit l'inté-
rêt de l'état civil sur le plan administratif et social, il est certain qu'il fau-
dra attendre assez longtemps pour qu'il soit pleinement "opérationnel" du point
- 22 -
de vue des besoins du démographe. Cela n'ôte rien à son caractère prioritaire,
d'autant plus que, couplée avec des enquêtes, cette opération peut être extrême-
ment fructueuse pour les deux parties.
En ce qui concerne les recensements :
- Il y a tout d'abord les recensements administratifs dont il a déjà
été question. On a vu que la collaboration du Service de la Démographie à leur
amélioration peut présenter des inconvénients du fait de la méfiance de la popu-
lation vis-à-vis des contraintes administratives et, en particulier, de l'imposi-
tion. Mais, puisque ce système existe, autant l'utiliser au mieux.
- Si l'on passe aux recensements démographiques "authentiques", on
sait queppendant longtemps, leur nécessité ne semblait pas évidente aux démogra-
phes africains (ou africanistes) francophones. Ils estimaient que les recense-
ments administratifs donnaient des ordres de grandeurs de la taille des locali-
tés, satisfaisants pour les besoins de l'administrationet que les enquêtes par
sondage permettaient d'obtenir tous les renseignements démographiques avec une
précision suffisante.
L'ennuyeux c'est qu'au bout de quelques années on a pratiquement ces-
sé de procéder à de telles enquêtes.
Puis la Division de la Population de l'Organisation des Nations-Unies
est entrée en lice avec des moyens de financement substantiels qui ne sont certes
pas à dédaigner.
En contrepartie, cet organisme insiste pour que tous les pays du Mon-
de s'alignent sur un certain nombre de principes auxquels on attribue un carac-
tère universel.
L'un de ces principes est que le recensement général de la population,
répondant à de sacro-saintes normes très strictes, est la pierre angulaire de
toute la démographie. C'est une position que l'on peut certainement discuter, à
condition de ne pas être candidat à un poste d'expert auprès de la Division de
la Population des Nations-Unies. Les seuls pays où les recensements de la Popu-
lation sont pleinement satisfaisants sont ceux qui, comme les pays de l'Europe
- 23 -
du Nord, disposent de registres permanents de population. Même dans les autres
pays industrialisés, cette méthode apparaît souvent comme quelque peu archaïque
et elle gagnerait à être mieux adaptée à une situation qui a évolué depuis le
XIXe siècle.
Ces recensements sont des opérations extrêmement lourdes et coûteuses,
faisant intervenir un personnel très nombreux recruté pour une période très brè-
ve, donc de qualité très inégale et ayant reçu une formation sommaire. Il y a une
perte d'information énorme, puisqu'à chaque recensement, on repart à zéro sans
tenir compte des données individuelles obtenues précédemment. Ceci, en raison
du caractère confidentiel de ces renseignements, principe proclamé très haut,
mais dont on peut bien souvent douter qu'il soit bien respecté en pratique.
C'est pourquoi un recensement général de la population considéré comme
une opération isolée et indépendante constitue un énorme gaspillage de ressources.
Par contre, il trouve sa justification s'il constitue le point de départ d'un pro-
gramme cohérent d'observation échelonné dans le temps.
On notera également qu'il faut éviter de surcharger le formulaire de
questions pour lesquelles on peut s'attendre à obtenir des réponses de qualité
médiocre.
Dans les pays en développement, ces problèmes se posent, bien entendu,
avec beaucoup d'acuité, bien que cela ne ressorte pas nettement des rapports et
études en la matière. Il semble que la position adoptée soit la suivante : il y
a des dogmes qui ne se discutent pas. Il est infiniment préférable d'échouer en
respectant ces dogmes que d'obtenir des résultats corrects en les contredisant.
Parmi ces dogmes, il faut citer celui de la simultanéité, qui impli-
que que les observations sur le terrain sont réalisées de façon aussi instanta-
nées que possible. Les avantages de ce principe sur le plan théorique sont évi-
dents : on veut obtenir une "photographie" de la population à un instant bien
déterminé. Mais son application pratique soulève des problèmes souvent inextri-
cables; c'est la raison essentielle qui impose l'utilisation d'un personnel nom-
breux et peu qualifié et les difficultés rencontrées font qu'en fait on constate
souvent que les opérations sur le terrain durent des semaines, si ce n'est des
mois.
- 24 -
C'est un sujet sur lequel il y aurait beaucoup à dire; mais on consta-
te un remarquable manque de réflexions originales, malgré le grand nombre d'opé-
rations de ce genre effectuées dans des conditions très diverses.
Bien entendu, les meilleures réflexions théoriques faites dans un
bureau confortable ne valent pas une bonne expérience. Les déboires de l'enquête
à passages répétés exposés ci-dessus ont eu au moins pour conséquence une prise
de conscience des difficultés de la collecte démographique. Il y a dans le pays
concerné une bonne équipe maintenant expérimentée. Un Recensement Général de la
Population doit se dérouler d'ici trois ans. C'est dès maintenant que sa prépa-
ration devrait commencer, en prévoyant dès le départ que ce recensement devra
permettre la mise en place d'un système permanent de collecte des données démo-
graphiques.
OBSERVATION D'UN "PANEL"
Dans l'immédiat, l'opération la plus efficace serait l'observation
d'un panel (échantillon permanent) de villages ou autres unités. Cela consiste-
rait, à la suite d'un recensement, à sélectionner des villages, des grappes de
villages, ou des parties d'agglomération répartis dans tout le pays, qui feraient
l'objet de visites régulières (un ou deux passages par an, par exemple) par le
personnel de la démographie.
Les avantages de cette méthode sont évidents :
- rentabilisation du travail initial ; délimitation des unités, con-
tacts avec la population, plans, liste des bâtiments, ménages, etc ... ;
- bonne connaissance du milieu par l'enquêteur, climat de confiance
avec les habitants ;
- amélioration progressive de la qualité de la collecte, grâce à cet-
te meilleure familiarité avec le milieu et possibilité de rectifier les erreurs
passées ;
- personnel qualifié et expérimenté, jouissant d'un emploi stable et
ne passant qu'une partie de son temps en tournées ;
- économies considérables résultant de l'utilisation des bureaux ré-
gionaux de la statistique et frais de transports très réduits ;
- 25 -
- ce programme permettrait de suivre l'évolution des tendances démogra-
phiques et aussi d'étudier le problème, très mal connu, des fluctuations non sys-
tématiques des taux démographiques.
En contre-partie, sa réalisation présentera certainement d'épineux
problèmes pratiques, moins sérieux d'ailleurs que ceux soulevés par l'enquête à
passages répétés. Le plus grave sera posé par le renouvellement de l'échantillon.
Dans ces conditions, les choses pourraient se présenter comme suit :
- préparation du recensement (en mettant l'accent sur la cartographie)
- recensement général de la population ;
- suivi immédiatement, en tout cas le plus tôt possible, d'une enquê-
te par sondage à deux objectifs :
- contrôle de couverture (prioritaire) et de qualité ;
- collecte des données de mouvements ;
ensuite viendraient la mise sur pied d'un "panel". Il serait, du point de vue
théorique, souhaitable qu'il soit constitué par l'échantillon de l'enquête par
sondage post-censitaire, ou d'un sous-échantillon. En pratique, il est fort pos-
sible que l'on soit amené à préférer un échantillon composé d'unités ou de "grap-
pes" de taille supérieure aux unités de l'enquête par sondage.
COMMENT BENEFICIER DE L'EXPERIENCE PASSEE ?
Le seul fait qu'une enquête ait eu lieu pourrait indiquer un certain
regain d'intérêt dans la collecte démographique qui sortirait ainsi de la léthar-
gie où elle était tombée après sa floraison de la décennie 1954 - 1964.
Les expériences récentes (soit d'enquête nationale, soit d'études ré-
gionales) démontrent amplement que la nouvelle génération de "collecteurs" démo-
graphiques n'a pas profité, au moins lors du lancement de ces opérations,de l'ex-
périence des vétérans de la campagne 1954 - 1964 et c'est la faute de ces der-
niers.
- 26 -
Dans l'abondante bibliographie démographique, on ne trouve en effet
pas d'ouvrage, de manuel ou autre publication, récent et à jour qui permettrait
à un débutant de profiter de cette expérience. Les rapports sur les enquêtes qui
pourraient être particulièrement intéressants à cet égard, puisqu'ils traitent
de cas réels, glissent en quelques pages ou en quelques lignes sur les problèmes
pratiques rencontrés lors du travail sur le terrain et les solutions qu'on leur
a apportées.
On ne saurait donc trop recommander de charger un Groupe de Travail
de s'efforcer de faire la synthèse de l'expérience de toutes les personnes, -et
il y en a beaucoup- qui ont travaillé dans ce domaine.
Ces expériences sont des plus variées, tant du fait de la diversité
des milieux géographiques et des populations concernées que des tempéraments et
psychologies des divers responsables. En face d'une situation donnée, chacun
réagit à sa façon et invente ses propres "trucs".
L'élaboration d'un tel ouvrage ne sera pas facile. Il est essentiel
de ne pas perdre de vue son aspect essentiellement pratique et de se placer dans
l'optique d'un débutant qui "débarque". Il devra donc être très général, tout en
restant cohérent. Ce doit être un ouvrage de synthèse, classé par sujet et non
un catalogue d'expériences particulières.
Les présentes réflexions n'auront pas été inutiles si elles permet-
tent de prendre conscience du déséquilibre qui caractérise la recherche démogra-
phique ; l'analyse des données a fait des pas de géant, tandis que la collecte
des dites données stagnait ou même se dégradait. Pour chaque responsable d'opé-
ration de collecte qui peine pour rassembler les éléments de base, on voit fon-
dre des escadrons d'analystes qui dissèquent ces données : c'est, de toute évi-
dence, le monde à l'envers.
- 27 -
UTILISATION DE LA BANQUE "ARIEL" D'INFORMATION
SUR LES MENACES
Par Jean-Luc DUBOIS
O. PRESENTATION GENERALE
La décennie des années 1980 semble être à la recherche d'une approche,
aussi fine que possible, de la connaissance du comportement des ménages dans le
monde, et de la mesure de leur niveau de vie. Malgré les très nombreux problèmes
statistiques issus de la collecte des informations ou du traitement des données
qui ne sont pas toujours résolus de façon précise et universelle, des projets in-
ternationaux sont en préparation (programme d'enquêtes nationales intégrées auprès
des ménages (NHSCP), enquêtes sur les niveaux de vie de la BIRD), et des enquêtes
nationales sont en cours de réalisation (Cameroun, Mauritanie, Niger) ou de trai-
tement informatique (Brésil, Côte d'Ivoire, Tunisie).
Cet article a pour objectif de présenter de façon simple la méthode
d'approche et les principes d'utilisation du système informatique qui ont permis
la mise en place d'une banque de données, nommée ARIEL, et dite d'information à
partir des résultats d'enquêtes sur les ménages effectuées au Brésil (1976), en
Côte d'Ivoire (1979), en Tunisie (1980) et au Pérou (projet 1981).
L'enquête sur le budget et la consommation des ménages de Côte d'Ivoire
servira d'illustration à quelques-uns des exemples indispensables à une bonne com-
préhension du texte. Il s'agit d'une enquête par sondage à deux degrés réalisée pen-
dant toute l'année 1979 auprès de 2 160 ménages représentatifs des diverses ré-
gions de Côte d'Ivoire : la ville d'Abidjan, le milieu urbain, le milieu rural de
la forêt ouest, le milieu rural de la forêt est, le milieu rural de la zone de
savane. Son but est d'étudier et de mesurer l'évolution du niveau de vie des ména-
ges depuis l'indépendance en se référant aux enquêtes de 1963 et d'évaluer la qua-
lité de la vie actuelle sous ses divers aspects relatifs à l'alimentation, la nu-
trition, le budget, les emplois et les activités, le patrimoine ... Pendant une
année, 4 320 semaines d'enquête ont été ainsi relevées dans des questionnaires ap-
propriés. Ceci fournit environ 4 millions d'observations réparties en une quinzai-
ne de niveaux statistiques différents qui concernent chacun des aspects évoqués
- 28 -
ci-dessus. Pour simplifier le travail de traitement, et, d'une certaine manière,
l'accélérer, on a pris en compte chacun des trimestres de façon indépendante en
dépouillant 1 080 semaines d'enquête à chaque fois. Les diverses procédures de
cohérence et les algorithmes de calcul mis au point sur le premier trimestre sont
ensuite utilisés de façon systématique sur les autres trimestres, les analyses an-
nuelles étant effectuées une fois les quatre trimestres regroupés.
La réalisation effective de cette enquête a imposé la mise en place
d'une structure informatique nouvelle et efficace comprenant un atelier de saisie
et une équipe de gestion des bandes de données et des programmes. Mais elle a aus-
si imposé le choix d'un système informatique apte à effectuer l'apurement des don-
nées par contrôle des cohérences et l'analyse statistique des résultats. Après
étude des diverses possibilités, le choix s'est finalement porté sur le système
ARIEL qui présentait de sérieux avantages :
- il avait déjà été utilisé avec succès pour le dépouillement de ce ty-
pe d'enquête ; notamment au Brésil où 55 000 ménages avaient déjà été
enquêtés. Il était de plus déjà implanté à la FAO afin d'y bâtir une
banque de données sur la nutrition ;
- il avait été conçu dans un pays en voie de développement, le Chili,
par une équipe de techniciens issus de l'université de Santiago, dont
le but était de faire en sorte que les cadres statisticiens des pays
en voie de développement puissent prendre totalement en charge l'u-
tilisation d'un système au maniement facile, ne nécessitant pas de fai-
re systématiquement appel à des experts étrangers ;
- il permettait la mise en place d'une banque d'informations, accessi-
ble à tout instant par des utilisateurs potentiels et adaptable au
devenir et aux besoins de la recherche économique ou sociologique en
Côte d'Ivoire pour les années à venir.
C'est dans ce contexte que fut installée la banque d'information ARIEL
dont il convient d'examiner les deux aspects importants :
- d'une part, celui concernant son organisation interne, c'est-à-dire
relatif aux principes qui ont guidé sa conception et à la manière dont
sont enregistrées les données ;
- 29 -
- d'autre part, celui concernant le traitement des résultats enregis-
trés en utilisant les instructions existantes.
I. MISE EN PLACE DE LA BANQUE D'INFORMATION
1.1. Les principes sous-jacents à la conception de la banque
Les idées qui ont prévalu dans l'organisation interne de la banque sont
de deux ordres :
- diminuer autant que possible le travail de manipulation des fichiers
enregistrés sur bandes magnétiques. Ce travail, qui est très lourd dans
le cas d'enquêtes aussi complexes que celles concernant le budget, la
consommation et l'activité des ménages, nécessite une importante struc-
ture de gestion. Les risques de perte, d'écrasement de fichiers devien-
nent alors plus élevés et les conséquences en sont graves. En regrou-
pant l'ensemble de ces fichiers à l'intérieur d'un disque mobile on di-
minue d'autant ces risques et on rend la manipulation des données sta-
tistiques nettement plus facile et immédiate pour l'utilisateur ;
- donner à l'utilisateur qui le souhaite (qu'il soit statisticien,
sociologue, économiste ou autre) la possibilité de travailler lui-même
sur les données enregistrées à l'aide d'instructions simples afin de
mener à bout, suivant le cheminement de sa recherche, ses propres ana-
lyses. On réduit ainsi, dans une certaine mesure, la traditionnelle op-
position entre informaticien et statisticien ou plus généralement entre
informaticien et utilisateur. L'informaticien s'intègre dans une équipe
de gestion de la banque d'information qui se charge de l'alimenter en
données et d'y gérer les espaces occupés.
Mais tout ceci implique une organisation logique des données à l'inté-
rieur de la banque qu'il convient d'effectuer lors de l'étape appelée "structura-
tion de la banque d'information".
- 30 -
1.2 . La structuration de la banque d'information
Pour la comprendre, il importe, en premier lieu, de présenter sous for-
me de définitions quelques-uns des divers concepts qui y sont utilisés :
1.21. Les concepts de base
L'unité d'observation : c'est l'unité statistique observée lors de l'en-
quête. Il peut s'agir de ménages mais aussi de personnes, de produits, d'activités
de logements, etc ...
L'objet explicatif : il s'agit d'une unité statistique déduite par re-
groupement de plusieurs observations de même unité d'observation. Ainsi, par exem-
ple, les groupes sociaux regroupent des ménages de même type, les groupes de com-
mensalité regroupent des personnes ayant l'habitude de manger ensemble.
Les variables de base : ce sont celles qui sont retenues lors de la
conception des questionnaires et qui sont relevées lors de l'enquête. Elles expri-
ment les caractéristiques des observations. Il s'agit par exemple de l'âge, du
sexe, du poids d'une personne.
Les variables déduites : elles s'obtiennent par combinaison d'opéra-
tions logiques arithmétiques des variables de base. Ces variables qui sont créées
à partir des variables relevées lors de l'enquête sont en fait indispensables à
l'élaboration des principaux tableaux et des analyses statistiques. Ainsi, par
exemple, on obtiendra la "classe de revenu du ménage" en découpant la variable de
base "revenu" en classes.
La donnée : c'est la valeur prise par une variable pour une observa-
tion quelconque. Autrement dit, à chaque observation correspond une et une seule
valeur de la variable, on l'appellera "donnée" (cette valeur peut être nulle ou
inexistante, mais son emplacement existe toujours). Ainsi, par exemple, la valeur
"3" est la valeur de la donnée correspondant à l'observation "ménage n° 2" et à
la variable "taille du ménage" (voir schéma 1).
- 31 -
Le thème : il regroupe l'ensemble des données, variables et observa-
tionsif qui sont relatives à un même type d'unité d'observation ou d'objet explica-
tif. Un thème, par définition, peut contenir jusqu'à 990 variables dans la banque
d'information . En fait, celui-ci pourrait être représenté sous la forme schémati-
que d'une table dans laquelle les lignes correspondraient aux observations et les
colonnes aux variables. La donnée étant à l'intersection de l'observation et de la
variable, on conçoit alors qu'il y aura au moins autant de thèmes qu'il y a de
types d'unités d'observations différentes.
Dans l'enquête de Côte d'Ivoire, il y a une douzaine de thèmes corres-
pondant à des unités d'observation de nature différente et on peut en prévoir au-
tant correspondant à des objectifs explicatifs.
Le tome : c'est l'ensemble qui regroupe plusieurs thèmes. Dans la ban-
que d'information ARIEL, sa contenance maximale est de 99 thèmes. Dans une même
banque des tomes différents permettent d'enregistrer plusieurs enquêtes à la fois,
chacune ayant son secteur réservé.
SCHEMA 1. EXEMPLE DE THEME
Thème n° 1
Unité d'observation : Le Ménage
Numéro du ménage
Localisation Taille (nb. géographique de personnes)
Revenu (CFA)
Observation -____> 1 :ABIDJAN ABIDJAN1 4 1......--.J 100 000
2 BOUAKE 3 70 000
3 ABIDJAN 5 120 000
4 DALOA 10 80 000
5 ADIAKE 8 50 000
variable donnée
- 32 -
1.22. L'articulation des unités d'observation
Chaque unité d'observation ou objet explicatif définit un niveau d'ob-
servation différent. Ces niveaux induisent une articulation logique unique qui les
relie entre eux et du même coup établit des relations entre les divers ensembles
de données. Ceci peut être représenté sous forme schématique
SCHEMA 2. EXEMPLE D'ARTICULATION DES UNITES D'OBSERVATION OU OBJETS EXPLICATIFS
Niveau de l'observation Unité d'observation :
1 énage
2 Groupe de comme alité Equipe de travail
3
4 Plat
5 Produit< > Dépensee--------eActivité
Dans cet exemple, il y a cinq niveaux d'observations différents numéro-
tés de 1 à 5. Ces niveaux sont en relation, symbolisée par des flèches correspon-
dant à des liaisons précises d'ordre économique ou social : plusieurs produits
composent un plat, une personne mange plusieurs plats, plusieurs personnes forment
un ménage....
Les relations qui existent entre unité d'observation de niveau équiva-
lent se réalisent par concordance. On vérifie par des tests d'homogénéité la cor-
respondance des valeurs des variables d'une même observation. Ainsi, par exemple,
à un produit donné correspondra une dépense.
Les relations qui existent entre unité d'observation de niveau diffé-
rent se réalisent par agrégation des valeurs des variables de plusieurs observa-
tions si l'on monte vers des niveaux plus élevés ou par affectation à plusieurs
observations des valeurs d'une même variable si l'on descend vers les niveaux in-
férieurs. Ainsi, par exemple, le poids d'un plat s'obtiendra par agrégation des
poids des produits qui le composent. De même, le lieu de résidence du ménage pour-
ra être affecté aux personnes qui composent ce ménage.
- 33 -
Il va sans dire que l'articulation des niveaux d'observation correspond
exactement à l'articulation des thèmes dans la banque d'information, puisque par
définition un thème regroupe l'ensemble des observations relatives à une même uni-
té d'observation.
1.23. La structuration des variables et l'enregistrement des données
Après avoir conçu l'articulation des divers thèmes par un démarche in-
tellectuelle logique sous une forme équivalente au diagramme exposé ci-dessus, on
définit dans la banque les variables qui sont contenues par chacun des thèmes et
dans lesquelles seront enregistrées les données collectées. Ceci s'opère par l'u-
tilisation d'une instruction par variable. Cette structuration prend un peu de
temps car elle nécessite d'examiner une à une toutes les variables relevées lors
de l'enquête, mais elle prépare l'enregistrement des données qui pourront trouver
leur place dans la banque. Les données qui ont été saisies sur bandes magnétiques
ou cartes perforées sont enregistrées dans la banque au moyen d'une instruction
qui les classe par variable et par thème. La banque est alors disponible pour son
utilisation axée sur le contrôle de la qualité des données, l'analyse statistique
et la publication des résultats.
2. UTILISATION DE LA BANQUE D'INFORMATION
Dans les paragraphes précédents a été exposée la manière selon laquelle
le statisticien ou plus généralement l'utilisateur potentiel peut, de lui-même,
préparer la banque d'information à son utilisation immédiate en y concevant l'or-
ganisation logique interne, qui n'est en fait que la traduction en termes formels
de la réalité économique ou sociologique, et en y réalisant la structuration des
variables relevées lors de l'enquête.
Examinons à présent comment s'en servir pour mener à bien les analyses
statistiques désirées.
- 34-
2.1. Les principes guidant la démarche de l'utilisateur
On conçoit facilement quels sont les principaux souhaits de celui qui
désire avoir un outil aussi performant que l'est une banque de données :
- utiliser un système simple dont les instructions en langue française
(lorsqu'il s'agit d'utilisateurs francophones) soient facilement com-
préhensibles. On évite ainsi le langage trop ésotérique d'origine an-
glaise qui est celui des informaticiens et auquel n'est pas toujours
préparé le statisticien non spécialement formé à son usage ;
- avoir un accès immédiat à toutes les données enregistrées en les con-
sidérant soit de façon ponctuelle (lorsqu'on veut, par exemple, connaî-
tre le ménage de revenu Ri), soit comme des sous-ensembles (lorsqu'on
veut connaître les ménages de revenu supérieur à Ri et de taille infé-
rieure à un nombre n). Ceci permet de découvrir ou vérifier la valeur
de certaines données et de connaître la forme des distributions des
variables qui les concernent ;
- avoir la possibilité de créer à volonté de nouvelles variables à par-
tir de n'importe laquelle des variables de base, de façon à faire évo-
luer la recherche et l'analyse statistique en cours, en fonction de
premiers résultats et de nouvelles options.
De par sa conception, la banque d'information ARIEL répond de façon
assez efficace à chacun de ces souhaits. Il ne reste plus alors pour l'utiliser
de façon optimale, qu'à réaliser les quatre étapes suivantes :
1. vérification de l'enregistrement des données et de la structuration
des variables dans chacun des thèmes en demandant un listage de leur
état ;
2. réflexion approfondie sur le type d'étude ou d'analyse que l'on veut
mener ainsi que sur les objectifs auxquels celle-ci doit répondre ;
3. repérage des variables de base qu'il est indispensable d'utiliser
et des variables qu'il convient de créer à partir de celles-ci pour
mener l'étude à son terme ;
- 35 -
4. choix parmi les outils statistiques fournis par la banque de ceux
qui seront nécessaires pour effectuer les analyses statistiques. Les
outils statistiques sont en fait le résultat des instructions spécifi-
ques de la banque d'information,
2.2. Exposé des principales instructions de la banque
Pour des raisons de commodité pédagogique, on a regroupé l'ensemble de
ces instructions autour de trois pales qui sont, en fait, les illustrations de
trois finalités différentes :
- l'étude des variables et de leurs relations ;
- la création et le transfert de variables ;
- la recherche de sous-ensembles de données.
2.21. Les instructions d'étude des variables et degeurs relations
Ce sont les plus importantes pour l'analyse statistique des données à
l'intérieur d'un même thème :
A ) Certaines instructions sont relatives à l'étude de la distribution
des données d'une variable :
CENTILES : permet de saisir l'allure de la distribution. On obtient
pour une variable qualitative, la liste des modalités et la fréquence correspon-
dante, pour une variable quantitative, la valeur et les effectifs qui correspon-
dent à des seuils fixes en pourcentage (1 %, 5 %, 50 %, ...) ainsi que la moyenne,
l'écart-type et les coefficients d'asymétrie et d'aplatissement.
FREQUENCES : permet d'avoir une vision globale des variables. On
obtient, pour les variables qualitatives, le nombre d'observations, les fréquences
absolues et relatives par modalité, et la fréquence des réponses effectives; pour
les variables quantitatives, le nombre d'observations, la somme, l'écart-type et
la moyenne.
HISTOGRANNE : donne l'histogramme correspondant à la distribution
classée d'une série quantitative.
- 36 -
LISTAGE : permet d'examiner une à une les valeurs de la distribu-
tion en listant les observations souhaitées et les variables correspondantes.
B ) Certaines instructions permettent la sortie des tableaux sous les
trois formes possibles :
TABLEAU : donne un tableau croisant une variable qualitative avec
une ou plusieurs variables quantitatives. Ainsi, par exemple: par région, le nom-
bre de ménages, de personnes, le revenu total.
CONTINGENCE : donne un tableau de contingence croisant deux varia-
bles qualitatives. Chacune des cases contient alors le nombre d'observations ou
l'effectif correspondant à une modalité de chacune des deux variables.
Par exemple : le nombre de ménages par région et par ethnie.
QUANTIFIE : donne un tableau de contingence croisant deux variables
qualitatives dont le résultat est quantifié par une variable quantitative. Chaque
case déterminée par les modalités des deux variables qualitatives contient la va-
leur correspondante d'une variable quantitative prise pour l'effectif de la case.
Par exemple : le revenu par région et par ethnie.
STATISTIQUES : est une instruction de complément que l'on utilise
en même temps que les instructions de tableau pour indiquer les statistiques que
l'on souhaite trouver dans les cases des tableaux : effectif total, somme, moyenne
écart-type, coefficient de variation, pourcentage ligne, pourcentage colonne, ...
C ) Enfin, certaines instructions permettent d'évaluer l'importance
des relations pouvant exister entre variables :
DIAGRAMME : permet d'étudier la distribution de deux variables quan-
titatives en dessinant le nuage de points correspondants.
REGRESSION : permet d'ajuster une droite de régression multiple en-
tre plusieurs variables quantitatives. On obtient l'équation de la droite, les va-
leurs des tests de STUDENT pour les coefficients de régression, le coefficient de
corrélation et les résultats du test de FISHER sur l'adéquation du modèle à la
réalité.
- 37 -
CLASMULTIPLE : effectue une classification multiple en ajustant un
modèle de régression linéaire entre une variable quantitative et plusieurs varia-
bles qualitatives. Ceci revient, en fait, à effectuer une analyse de variance. On
obtient l'équation correspondante du modèle ainsi que les diverses valeurs du coef-
ficient de corrélation et du test de FISHER.
COMPOSANTES : effectue une analyse en composantes principales entre
une variable qualitative (l'ensemble des observations) et plusieurs variables quan-
titatives.
DESTINATION : cette instruction complète les trois précédentes et
sert à injecter dans la banque d'information les valeurs ajustées par les modè-
les de régression ou les valeurs des facteurs obtenus par l'analyse en composan-
tes principales. Ceci ouvre la porte à toute éventuelle étude économétrique plus
approfondie.
STATISTIQUES : utilisée dans ce cas, cette instruction permet d'ob-
tenir la courbe et le coefficient de concentration de GINI entre deux variables
quantitatives cumulées. Elle permet aussi de mettre en oeuvre l'analyse des cor-
respondances entre deux variables.
2.22. Les instructions de création et de transfert des variables.
Trois instructions ont pour but de corriger certaines des valeurs pri-
ses par les variables de base, ou de créer de nouvelles variables à partir de
celles-là :
TRANSFORMATION : cette procédure permet de remplacer les valeurs
de certaines données d'une ou de plusieurs variables par de nouvelles valeurs.
Cette procédure est très utilisée pour effectuer les corrections sur la distribu-
tion des données d'une variable ne satisfaisant pas aux divers tests de cohéren-
ces mis au point pour apurer les fichiers.
DECOUPAGE : permet de découper en classes la série des valeurs
d'une variable quantitative. En fait, elle réduit à une variable qualitative ce
qui à l'origine était une variable quantitative.
- 38 -
Ainsi, par exemple, à partir de la variable "revenu du ménage" on crée-
ra la variable "classe de revenu".
CREATION : permet de créer une nouvelle variable à partir d'une ou
de plusieurs variables de base en utilisant les divers opérateurs mathématiques
que sont l'addition, la soustraction, la division, la multiplication, le logarithme
l'exponentiel et les opérations logiques : inférieur à, supérieur à, égal à, ...
Une seule instruction a pour but de créer de nouvelles variables par
sommation ou agrégation et, selon les besoins, transfert d'un thème à l'autre ;
elle se décompose en deux parties :
AGREGATION : qui agrège les données des observations d'un thème
d'origine jusqu'à un certain niveau d'observation.
Par exemple : la variable "revenu du ménage" sera obtenue par la sommation des
"revenus individuels" des personnes composant ce ménage et dont les données se
trouvent dans le thème ayant la personne pour unité d'observation.
DESTINATION : qui transfère les données précédemment agrégées dans
le thème de destination dont le niveau d'observation correspond à celui des don-
nées agrégées.
Par exemple, la variable "revenu du ménage" sera transférée dans le thème de des-
tination ayant le ménage pour unité d'observation.
Nous ne pouvons nous étendre sur l'ensemble des applications pratiques
que permet l'ensemble de ces deux instructions, notons cependant la possibilité
d'effectuer des agrégations dans le même thème et des agrégations de variables
bouléennes.
2.23. Les opérations définissant des sous-ensembles de données
Par souci de clarté dans l'exposé, nous avons présenté dans un troisiè-
me paragraphe ces opérations qui, en fait, ne sont pas des instructions indépen-
dantes, mais qui se combinent à l'ensemble des instructions exposées ci-dessus,
afin d'effectuer les divers traitements statistiques sur des sous-échantillons de
données et non pas sur l'ensemble recueilli.
-39-
Ces opérations sont les suivantes :
inférieur à non inférieur à
supérieur à non supérieur à • • •
égal à ... non égal à • • •
Par leur utilisation on peut sélectionner l'ensemble des données satis-
faisant aux contraintes de plusieurs variables et effectuer sur celui-ci l'une des
analyses statistiques souhaitées. Par exemple, on recherchera une loi d'ENGEL en
effectuant la REGRESSION entre les variables "Logarithme du revenu du ménage" et
"Logarithme de la dépense de produits alimentaires" pour le sous-ensemble défini
par la variable "Région" égale à savane, la variable "trimestre" non égale au
troisième trimestre, la variable "taille du ménage" non supérieure à deux.
2.3. Un exemple d'utilisation de la banque d'information
Cet exemple illustre la démarche recommandée dans le paragraphe 2.1. de
cet article. Il s'agit de mettre au point la procédure la plus efficace combinant
les diverses instructions en un cheminement unique pour satisfaire aux objectifs
recherchés. Supposons qu'il faille utiliser le modèle doublement logarithmique de
la loi d'ENGEL liant la dépense en produits alimentaires (Y) des ménages d'Abidjan
à leur taille (X1) et à leur revenu (X2). Autrement dit qu'il nous faille ajuster
le modèle :
Log Y = a Log XI + b Log X2 + C
Pour ce faire, repérons tout d'abord les diverses variables de base in-
dispensables :
- pour les dépenses alimentaires des ménages, dans le thème dont l'uni-
té d'observation est le produit, se trouve l'ensemble des produits ache-
tés par les responsables de cuisine. Il conviendra de sommer les va-
leurs dépensées pour ces produits par ménage d'Abidjan et d'envoyer le
résultat dans une nouvelle variable "total des dépenses en produits
alimentaires" dans le thème dont l'unité d'observation est le ménage ;
- 40 -
- pour les dépenses alimentaires en plats, produits ou boissons ache-
tés individuellement sur les lieux du travail, ou lors d'un déplace-
ment, sélectionnons les dépenses effectuées par chacun des membres du
ménage. Il conviendra de sommer les valeurs dépensées et d'envoyer le
résultat dans une nouvelle variable "total des dépenses individuelles
alimentaires" dans le thème dont l'unité d'observation est le ménage ;
- pour connaître la valeur de la variable "taille du ménage" affectons
dans le thème dont l'unité d'observation est la personne, une variable
bouléenne qui prendra la valeur 1 pour toutes les personnes des ménages
d'Abidjan. En sommant cette variable par ménage, on obtient alors la
valeur de la variable "taille du ménage" que l'on envoie dans le thème
dont l'unité d'observation est le ménage ;
- on supposera, pour simplifier, que le revenu du ménage déclaré se
trouve déjà dans le thème ménage. Nous avons donc maintenant toutes
les variables nécessaires dans le même thème pour construire la varia-
ble "dépenses alimentaires du ménage" en additionnant les deux varia-
bles "total des dépenses en produits alimentaires" et "total des dépen-
ses individuelles alimentaires".
Le modèle de régression peut alors être ajusté et se situera dans le
thème dont l'unité d'observation est le ménage.
Cette démarche peut être représentée de façon simplifiée par le schéma
ci-après qui retrace l'ensemble des instructions nécessaires.
- 41 -
SChEMA 3. EXEMPLE D'ENChAINEMENT D'INSTRUCTIONS
Instruction Variables concernées
Sous-ensemble Unité
d'observation
AGREGATION (par ménage) Dépenses en produits Ménage d'Abidjan alimentaires
DESTINATION
Total des dépenses en produits alimen-taires
produit
ménage
AGREGATION (par ménage) Dépenses alimentaires Abidjan plats, produits individuelles boissons
DESTINATION
Total des dépenses ménage individuelles alimen-taires
CREATION Un pour tous Personne = I personne
AGREGATION (par ménage) Un pour tous Abidjan personne
DESTINATION Taille du ménage ménage
CREATION Dépenses alimentai- Total des dépenses ménage res du ménage en produits alimen-
taires Total des dépenses individuelles ali-mentaires
DIAGRAMME Revenu du ménage. dépenses du ménage ménage
DIAGRAMME Revenu du ménage. taille du ménage ménage
REGRESSION Revenu du ménage. dépenses du ménage ABIDJAN ménage
Taille du ménage
- 42 -
9. QUELQUES REFLEXIONS SUR LA BANQUE D'INFORMATION
Le système ARIEL s'avère être un outil de travail particulièrement ef-
ficace pour le traitement d'enquête. Les enquêtes sur le budget et la consommation
des ménages n'en sont qu'un cas particulier, mais peut-être celui où son utilisa-
tion est optimale en raison de la nécessité d'articulation de très nombreux ni-
veaux d'observation différents.
Il permet d'effectuer la quasi-totalité des étapes indispensables au
traitement de données, à savoir :
- de contrôler l'exhaustivité des observations à enregistrer ;
- d'effectuer le contrôle de, cohérences entre plusieurs intervalles
d'un même thème ;
- de vérifier les correspondances entre observations et les cohérences
entre variables de plusieurs thèmes différents ;
- d'analyser statistiquement les données recueillies ;
- de publier des tableaux.
Certaines améliorations sont encore souhaitables comme, par exemple,
la possibilité de trier, à l'intérieur de la banque, des observations suivant des
variables choisies ...
La manipulation simple du système qui existe actuellement en version
française, anglaise, espagnole et portugaise semble le prédisposer à effectuer
un travail systématique de dépouillement d'enquête et de recherche statistique
dans un grand nombre de pays en développement. Cependant, il serait souhaitable
qu'une version pour mini-ordinateur puisse être mise au point car la capacité de
256 K qu'il nécessite apparaît comme un handicap compte tenu des possibilités in-
formatiques de certains pays.
Enfin, il semble que, plus que le système lui-même, on ait affaire à
l'existence d'une nouvelle méthode de pensée et de saisie de la réalité dont les
implications sont importantes tant au niveau de la définition des concepts utili-
sés que des outils statistiques. L'introduction systématique de la notion d'unité
- 43 -
d'observation, la recherche de l'articulation logique des niveaux d'observation
différents ont des conséquences dans toutes les étapes de la conception d'une en-
quête, qu'il s'agisse de la définition de ses objectifs, du dessin des question-
naires, du mode de codification ou, évidemment, du traitement informatique des
données.
Développer cet aspect essentiel demande une réflexion approfondie et
ne peut être que le fait d'un article complémentaire.
-44-
Résumé de l'article :
"ELEMENTS POUR LE CHOIX ET L'INSTALLATION
D'UN MINI-ORDINATEUR DE BUREAU"
L'utilisation de mini-ordinateurs pour les études statistiques et le
dépouillement de petites enquêtes peut conduire à des investissements très varia-
bles selon le type d'équipement envisagé. On s'intéresse ici â la catégorie la
plus simple, celle des mini-ordinateurs compacts de la taille d'un bureau. Ces
équipements aux possibilités relativement limitées offrent l'avantage d'être di-
rectement prêts à l'emploi et utilisables par un utilisateur final au terme d'une
formation n'excédant pas 15 jours. Ils peuvent trouver leur place aussi bien dans
les services déjà automatisés que dans ceux qui ne le sont encore pas.
L'article présente tout d'abord les conditions d'emploi de ces machi-
nes, aussi bien sur le plan technique (conditions de développement des applica-
tions), que sur le plan de l'organisation (utilisation ou non en libre service) et
donne un ordre de grandeur des besoins en personnel au cours du développement du
projet. Cette partie s'appuie sur les expériences menées à l'INSEE depuis 1976.
Elle est illustrée par deux exemples concrets présentés en annexe. Les spécifica-
tions techniques développées dans la suite peuvent servir de base pour l'établis-
sement d'un cahier des charges en vue de l'acquisition d'un équipement. Il con-
vient toutefois de préciser que dans cette optique, l'article n'est pas exhaustif.
En effet, outre les conditions financières, il y aurait lieu de considérer la qua-
lité des prestations offertes par les constructeurs : assistance technique, main-
tenance, formation et documentation ; services sans lesquels un équipement risque
de devenir rapidement inutilisable.
- 45 -
Summary of the art