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Ondes de surface
Michel Talonâ
Fevrier 2006
Resume
On introduit le sujet des ondes de surface, ondes de gravite seproduisant a la surface dâun fluide. On etudie dâabord la theorie lineaire,conduisant a une propagation dispersive, puis la theorie non lineairesimplifiee appelee theorie en eau peu profonde. Enfin on etudie unmodele tenant compte a lâordre le plus bas a la fois de la dispersionet de la non linearite, lâequation de Kortewegâde Vries. On montreque dans ce cas des solitons peuvent se propager sans deformation.Cet expose sâappuie principalement sur lâouvrage de G.B. Whitham,Linear and nonlinear waves Wiley (1974).
LPTHE Universite Paris VI â CNRSâDâapres des notes de Gary Jacques & Benjamin Salles (2005) et de Lionel Bergerat &
Maxence Pierrard (2006)
1
Table des matieres
1 Motivation. 3
2 Introduction. 6
3 Etablissement des equations. 63.1 Equations de la dynamique et de conservation. . . . . . . . . 73.2 Conditions aux limites. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
4 Linearisation. 114.1 Approximation lineaire. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 114.2 Solution des equations. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 124.3 Relation de dispersion. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
5 Etude de la propagation. 145.1 Transformation de Fourier. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 155.2 Methode de la phase stationnaire. . . . . . . . . . . . . . . . 165.3 Vitesse de phase, vitesse de groupe. . . . . . . . . . . . . . . 175.4 Comportement a proximite du front dâonde. . . . . . . . . . 185.5 La fonction dâAiry. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20
6 Theorie nonâlineaire. 236.1 Theorie en eaux peu profondes. . . . . . . . . . . . . . . . . 236.2 Methode des caracteristiques. . . . . . . . . . . . . . . . . . . 246.3 Solution de proche en proche. . . . . . . . . . . . . . . . . . . 256.4 Un exemple tres simple. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 276.5 Resolution des equations en eaux peu profondes. . . . . . . . 296.6 Le probleme du bris du barrage. . . . . . . . . . . . . . . . . 306.7 La propagation dâun paquet dâondes. . . . . . . . . . . . . . . 32
7 Solitons. 357.1 Equation de Korteweg â de Vries. . . . . . . . . . . . . . . . . 357.2 Le soliton. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37
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1 Motivation.
En 2005 et 2006 lâuniversite Paris VI a demande aux chercheurs deses laboratoires, particulierement aux chercheurs du CNRS, dâaccueillir desetudiants de Licence et de Maıtrise pour des stages leur permettant de se faireune idee de lâactivite de recherche dans les laboratoires.
Jâai pense que des etudiants de Licence, ayant donc une connaissancerelativement faible de la physique moderne, mais ayant demande a faire unstage dans un laboratoire de physique theorique, pourraient trouver interet aetudier un sujet de physique extremement classique, mais neanmoins nontrivial au niveau mathematique. Le sujet des ondes de surface mâa paru etrelâun des sujets celebres de la physique classique, sur lequel sâest illustre LordRayleigh, permettant de mettre constamment en rapport lâintuition phy-sique qui est toujours proche et evidente dans ce domaine, et le formalismemathematique. Ce rapport est precisement ce qui fait la nature specifiquede la physique theorique, par opposition avec la physique experimentaleou les mathematiques appliquees, meme si bien sur il ne sâagit plus dâunsujet de recherche actuel dans les laboratoires de physique theorique. Cechoix a ete renforce par lâexistence dâun ouvrage magnifique, ecrit par lâundes plus grands specialistes modernes du sujet, G.B. Whitham, âLinear andnon linear wavesâ lequel illustre parfaitement lâinteraction permanente entreles problemes physiques et le formalisme mathematique, ainsi que lâart depasser a vitesse vertigineuse de lâexpose elementaire dâun probleme a desconsiderations a la pointe de la recherche.
Lâun des objets, tres pragmatique, que jâavais assigne a ce stage, etaitaussi la decouverte de TeX, et les etudiants ont appris quâils pouvaient enquelques heures acquerir une aisance suffisante pour mettre en forme lesnotions de physique quâils avaient acquises. Etant donne la qualite des notesquâils avaient redigees, je suis parti du texte de Lionel Bergerat et MaxencePierrard, que jâai edite, commente et augmente pour atteindre lâexpose sui-vant1, qui me paraıt un peu plus accessible que le chapitre correspondant dulivre de Whitham, lequel est, il faut lâavouer, un peu âraideâ.
Une autre motivation est, bien sur, le fait que de nombreuses notionsintroduites ciâdessous dans lâetude des ondes de surface, ont aussi des appli-cations importantes dans la physique moderne, en particulier en mecaniquequantique ou en optique, et vont donc enrichir la comprehension des sta-giaires quand ils les rencontreront en Licence ou en Maıtrise au cours desenseignements traditionnels. Notamment :
1Tout un chacun peut en faire ce quâil souhaite, mais jâaimerais quâon me communiqueles erreurs eventuelles â [email protected]
3
â La propagation dispersive. Les ondes de surface ont une celeritedependant de leur longueur dâonde. Le meme phenomene se produiten optique pour la propagation dans un milieu dispersif. Cela conduita des difficultes bien connues pour comprendre la propagation desâpulsesâ et en particulier la maniere dont se manifeste la causalite et laforme du front dâonde. Dans ce contexte les travaux de A.Sommerfeldet L. Brillouin sont des classiques.2
â Vitesse de phase et vitesse de groupe. La propagation dispersiveconduit aussi a la distinction entre vitesse de phase et vitesse degroupe qui est un chapitre traditionnel de lâenseignement ! Les ou-vrages usuels etaient generalement cette discussion par des argumentsa la fois peu convaincants, peu generaux et physiquement peu clairs.Whitham consacre plusieurs pages au sujet, presente de nombreuxarguments, dont certains tres generaux, en fait relies a sa theorie desâequations de Whithamâ. Ici nous utilisons la methode de la phasestationnaire, qui est un outil tres important dans toute la physique,pour comprendre ce sujet. Câest lâapproche originale de Lord Rayleigh.Lâetudiant retrouvera peut etre cette methode pour comprendre lepassage a la limite classique dans lâintegrale de chemin en mecaniquequantique.
â La fonction dâAiry. Lâetude du front dâonde mene naturellement ala fonction dâAiry. Cette fonction apparaıt dans de nombreux do-maines de physique. Dâune part elle est solution de lâequation deSchrodinger pour le potentiel V(x) = x et a ce titre intervient danslâetude des conditions de raccordement aux âturning pointsâ pourlâapproximation BKW en mecanique quantique. Dâautre part elle ap-paraıt en optique physique dans lâetude de la transition entre zoneeclairee et ombre geometrique, ou de la repartition lumineuse au-tour des caustiques. Son etude asymptotique pour les grandes va-leurs de lâargument est un cas particulier de lâetude asymptotique enpresence dâune singularite irreguliere. Les developpements asympto-tiques ne sont pas valables tout autour du point singulier mais uni-quement dans des âsecteurs de Stokesâ. En fait G. Stokes a decouvertprecisement ce phenomene en etudiant lâequation dâAiry. Pour desvaleurs positives de lâargument la methode du col permet de trouverun comportement exponentiel decroissant, alors que pour des valeursnegatives la methode de la phase stationnaire donne une approxima-tion sinusoıdale. Le phenomene de Stokes est justement le fait quela sinusoıde nâest pas le prolongement analytique de lâexponentielle
2Voir le livre âOpticsâ de A. Sommerfeld, Academic Press (1972), Section 22
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decroissante.â Les solitons. Les propagations de solitons en physique non lineaire
trouvent des applications de plus en plus repandues. On croit quâellesinterviennent dans la propagation a longue distance des tsunamis,sans deformation ni attenuation, mais aussi dans la propagationdu signal lumineux dans certaines fibres optiques, et dans dâautresdomaines de lâoptique non lineaire. Le sujet est en lui meme redevabledu traıtement par les methodes des âsystemes integrablesâ qui sontun des domaines de recherche de notre laboratoire. Ces methodespermettent en particulier de trouver des solutions tres generales delâequation de Kortewegâde Vries, mais en fait les memes techniquespermettent de resoudre des modeles de mecanique statistique, etc.
Le sujet est aussi motive par le souci dâintroduire meme tres brievementles stagiaires a la mecanique des fluides, par exemple en etablissant lesequations du mouvement qui vont etre etudiees. La partie centrale, et aussila plus delicate de lâexpose traıte de la methode des caracteristiques quia ete introduite par le grand mathematicien B. Riemann pour resoudre leprobleme de la propagation unidimensionnelle de gaz compressible3. Lâunedes consequences est la possibilite de trouver, dans ce genre de problemes,des ondes de choc, dont lâetude plus approfondie necessite de recourir a lathermodynamique (Rankine et Hugoniot). Inutile de dire a quel point ce sujeta des applications pratiques4 importantes. Du point de vue mathematique,câest un des domaines les plus importants en mathematiques appliquees, latheorie des equations aux derivees partielles non lineaires hyperboliques.Face a la complexite de la situation generale, il est dâautant plus remarquablede noter lâhabilete dont Riemann a fait preuve pour trouver des solutionsconcretes !
Esperant que tout ceci justifie suffisamment lâetude de ce sujet, en parti-culier par le melange tres satisfaisant de mathematiques et de raisonnementphysique, je crois utile de noter que les stagiaires ont apparemment prisplaisir a cette etude, et y ont raisonnablement bien reussi.
Michel Talon
3Voir âMecanique des Fluidesâ Sections 94â97 Landau et Lifchitz, Editions Mir (1971)4Voir âPhysics of shock waves and high temperature hydrodynamic phenomenaâ Zeldo-
vich & Raizer, Dover (2002)
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2 Introduction.
Le but de ce travail sera dâetudier la theorie des ondes de gravite a lasurface dâun fluide, suppose non visqueux et incompressible. Par simpliciteon nâetudiera pas les ondes âcapillairesâ qui dependent des effets de tensionsuperficielle et permettent de comprendre des effets interessants tels quela vague dâetrave dâun navire. On obtiendra les equations qui decriventlâevolution de la surface libre, et qui forment un systeme couple non lineairetres complique.
Nous commencerons par lineariser ces equations, ce qui permet dâob-tenir des solutions ondulatoires assez simples. Le point notable est le faitque cette propagation est dispersive, câest a dire que la celerite des ondesdepend de leur longueur dâonde. De ce fait lâevolution temporelle dâun pa-quet dâondes est non triviale. Nous etudierons le profil dâun train dâondepar deux methodes dâapproximations, lâune utilisant la methode de la phasestationnaire, lâautre utilisant la fonction dâAiry - que nous etudierons - estvalable pres du front dâonde.
Ensuite, nous aborderons lâetude des aspects non lineaires en nous li-mitant a une theorie simplifiee, la âtheorie en eaux peu profondesâ. Pourcela, nous introduirons la methode des caracteristiques, qui sâaverera etre unpuissant outil de resolution de ce probleme. Le phenomene nouveau, com-mun a beaucoup dâequations differentielles non lineaires, est que lâevolutiontemporelle peut mener a la generation âspontaneeâ de singularites.
Puis nous presenterons le soliton. Il sâagit dâune vague localisee qui sepropage sans etalement (en depit de la dispersion) ni deformation (en depitdes non linearites). Cette solution apparaıt dans le cadre dâune approximationdes equations exactes du mouvement, lâequation de Kortewegâde Vries,contenant a lâordre le plus bas, a la fois des termes dispersifs et des termesnon lineaires, et qui se trouve etre âintegrableâ, ce qui permet de trouver dessolutions a N solitons. Toutefois nous nous arreterons a lâoree de ce sujet.
3 Etablissement des equations.
On etudie ici un volume elementaire de fluide incompressible et non-visqueux dv situe au point x, de masse volumique Ï dans un repere cartesiende coordonnees x1, x2, y, avec un vecteur vitesse u de coordonnees u1, u2, v.La coordonnee verticale est notee y et la vitesse verticale v. On note aussi j levecteur unitaire vertical.
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3.1 Equations de la dynamique et de conservation.
Etablissons les equations liees au principe fondamental de la dynamiquemÎł = F. Rappelons que lâon suppose que le fluide nâest pas visqueux, doncles seules forces agissant sur dv sont la gravite et la pression. La particuleetudiee est soumise a une force exterieure F = (âÏgjââP)dv ou ââP · dvrepresente les forces de pression exterieure sur le volume elementaire defluide. En effet la force sur la surface dx2dy en x1 +dx1 est âP(x1 +dx1)dx2dyselon la direction de x1, tandis que sur la face opposee on a +P(x1)dx2dy etdonc au total ââx1Pdv. Dâautre part lâacceleration est la derivee totale de lavitesse de la particule. Or une fonction g de la particule varie non seulementpar âtg mais aussi parceque la particule se trouve en t + dt au point x + udt etdonc g varie encore de
âuiâxigdt. On ecrit encore la derivee âtotaleâ sous la
forme :Dgdt
=âgât
+ (u · â)g
On ecrit mÎł = Ïdv[âu
ât+ (u · â)u] = Ïdv
Du
Dt. Ainsi, en divisant par Ïdv, on
a :Du
Dt= âgjâ 1
ÏâP =
âu
ât+ (u · â)u (1)
Dâautre part, on a suppose le fluide incompressible. Pour cette raisonon peut ecrire :
â · u = 0 (2)
En effet lâequation de conservation pour un fluide compressible sâecrit :
âÏ
ât+ div (Ïu) = 0
Ainsi (Ïu1)(x1 + dx1)dx2dyâ (Ïu1)(x1)dx2dydt est la quantite de masse sor-tant durant dt par les deux faces opposees de surface dx2dy, ce qui vautâx1(Ïu1)dvdt. Idem pour les deux autres paires de face. La masse totale sor-tant durant dt du cube dv est donc div (Ïu)dt. La masse totale dans le cube,Ïdv diminue dâautant, si bien que âtÏdvdt est lâoppose de la quantite ci-dessus.Par definition un fluide est incompressible si Ï est constant, alors lâequationde conservation se reduit evidemment a div u = â · u = 0.
On va maintenant supposer que le mouvement est irrotationnel, soitrot u = âĂ u = 0. On peut justifier cette hypothese dans le cas ou le fluidenâest pas visqueux, par le raisonnement suivant : soit Ï = âĂ u. On verifieaisement que :
(u · â)uââ(12
u2) = âuĂ (âĂ u)
7
si bien que lâequation (1) sâecrit encore :
âu
ât+â(
12
u2) + Ï Ă u = â1ÏâPâ gj (3)
En prenant le rotationnel des deux termes de lâequation, comme le rotationneldâun gradient est nul, on obtient :
âÏ
ât+âĂ (Ï Ă u) = 0 (4)
On verifie explicitement que :
âĂ (Ï Ă u) = (â · u)Ï â (â · Ï)u + (u · â)Ï â (Ï Â· â)u
or â · Ï = 0 identiquement et â · u = 0 par hypothese. Il reste doncâÏ
ât+ (u · â)Ï = (Ï Â· â)u. Soit :
DÏ
Dt= (Ï Â· â)u
Ï = 0 est une solution evidente de cette equation. En outre si u est supposeconnu, câest une equation differentielle lineaire pour Ï dont la seule solutionsâannulant en un point est nulle partout. Par exemple lâequation yâČ = y a lasolution C exp(x) qui vaut 0 si elle sâannule en un point. Or on suppose quele mouvement est irrotationnel dans les conditions initiales, et donc le reste.
Physiquement cet argument nâest pas tres satisfaisant car on a negligela viscosite, or on sait bien que des tourbillons sont generes sous lâeffet de laviscosite au voisinage dâun obstacle dans un flot irrotationnel. Dâun autre coteon sait que ces tourbillons sont localises dans une âcouche limiteâ entourantlâobstacle, et dans le âsillage turbulentâ. Au dela lâenergie des tourbillons sedissipe sous lâeffet de la âcascade turbulente de Kolmogorovâ, si bien que dansla quasi totalite du flot le mouvement est bien irrotationnel, precisement acause de la dissipation turbulente. Câest ce qui justifie reellement lâhypothesetout a fait usuelle du flot irrotationnel dans un grand nombre de problemesdâhydrodynamique.
PuisqueâĂu = 0, on peut introduire un potentiel Ï tel que u = âÏ (lerotationnel dâun gradient etant toujours nul). On parle encore dâecoulementpotentiel. De plus, lâincompressibilite â · u = 0, implique âÏ = 0 câest a direque le potentiel est harmonique. Rappelons que lâequation de Laplace est uneequation elliptique, typiquement on peut donner des conditions au bordarbitraires sur la peripherie dâun volume simplement connexe, lâequation de
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Laplace determine alors Ï a lâinterieur de ce domaine. Les phenomenes depropagation sont au contraire lies aux equations hyperboliques que lâondefinira plus loin. Pour le moment rien ne permet de comprendre lâorigine desondes de surface. Plus bas nous verrons quâelles se produisent precisement entenant compte des conditions aux limites tres particulieres a la surface libre.
Lâequation (1) se reecrit en utilisant le potentiel Ï :
ââÏ
ât+â(
12
u2) = â1ÏâPâ gj (5)
Integrant cette equation, en sachant que ây = j, on a :
Ït +12
u2 +Pâ P0
Ï+ gy = C(t) (6)
On peut ajouter au potentiel Ï une fonction arbitraire de t qui disparaıt dansla definition u = âÏ, et donc profiter de cet arbitraire pour absorber laconstante dâintegration C(t). On obtient ainsi lâequation du mouvement sousla forme :
Pâ P0
Ï= âÏt â
12(âÏ)2 â gy (7)
Notons que dans le cas statique uniforme, Ït = 0 et âÏ = 0 notre equationse reduit a lâequation âhydrostatiqueâ bien connue P = P0 + Ïg|y|. Dâautrepart pour un flot stationnaire Ït = 0 elle se reduit a lâequation de BernoulliP + 1/2Ïu2 + Ïgy = C, câest a dire grosso modo la conservation de lâenergie.
3.2 Conditions aux limites.
Soit f (x1, x2, y, t) = 0 lâequation de la surface libre, ou si lâon prefere,sous forme resolue, y = η(x1, x2, t). Nous exprimons la condition que cettesurface est bien a tout instant la surface libre du fluide en ecrivant que lacomposante normale a la surface de la vitesse du fluide est exactement egalea la vitesse normale de deplacement de la surface. Bien entendu il peut y avoirun deplacement arbitraire tangentiel du fluide, la seule condition necessaireporte sur les vitesses normales a la surface libre.
Exprimons dâabord les coordonnees du vecteur normal en un point de lasurface dâequation f = 0 a t fixe. Un deplacement (dx1, dx2, dy) dans le plantangent est tel que lâon reste sur la surface, f (x1 + dx1, x2 + dx2, y + dy) = 0,
ce qui donne au premier ordre (on ecriraâfâxi
= fxi ) :
dx1fx1 + dx2fx2 + dyfy = 0
9
Lâequation du plan tangent est donc : x1fx1 + x2fx2 + yfy = 0. On en deduitlâexpression du vecteur normal a la surface :
n = (n1, n2, n3) =1â
f 2x1
+ f 2x2
+ f 2y
(fx1 , fx2 , fy)
La projection normale de la vitesse du fluide est donc :
vn = (u · n) =(fx1u1 + fx2u2 + fyv)â
f 2x1
+ f 2x2
+ f 2y
Il est plus delicat dâobtenir la vitesse de deplacement de la surface f = 0quand t varie, mesuree le long de la normale. Soit vn cette vitesse, si le pointP = (x1, x2, y) est sur la surface f = 0 au temps t, alors le point P + (vndt)nest sur la surface f = 0 au temps t + dt, câest a dire :
f (x1 + vndtn1, x2 + vndtn2, y + vndtn3, t + dt) = 0
Au premier ordre ceci donne fx1vnn1 + fx2vnn2 + fyvnn3 + ft = 0 soit :
vn =âftâ
f 2x1
+ f 2x2
+ f 2y
Lâegalite de la vitesse normale du fluide a celle de la surface sâecrit donc :
DfDt
= ft + u1fx1 + u2fx2 + vfy = ft + (u · â)f = 0 (8)
ou D est la derivee âtotaleâ en suivant le fluide. Autrement dit cette equationsignifie que si une particule de fluide est sur la surface, et quâon la suit alâinstant t + dt elle est encore sur la surface. Elle a pu glisser le long de lasurface au premier ordre en dt mais nâa pas pu sâeloigner normalement a elleau premier ordre.
Si lâon utilise la forme resolue, y = η(x1, x2, t) de lâequation de la surface,cela revient a prendre f = ηây donc fx1 = ηx1 , fx2 = ηx2 , ft = ηt et fy = â1. Lacondition aux limites a la surface libre sâecrit donc ηt + u1ηx1 + u2ηx2 â v = 0valable pour y = η(x1, x2, t), et dans laquelle on peut remplacer u = âÏ. Dememe lâequation de la dynamique (7) se simplifie sur la surface libre puisqueP = P0, la pression atmospherique, et y = η, donc Ït + 1/2(âÏ)2 + gη = 0.On a donc sur la surface libre deux conditions :
ηt + Ïx1ηx1 + Ïx2ηx2 = Ïy
Ït +12(Ï
2x1
+ Ï2x2
+ Ï2y ) + gη = 0
}pour y = η(x1, x2, t) (9)
10
La condition aux limites sur le fond est tout a fait similaire, si ce nâestque le fond est une surface dâequation y = âh0(x1, x2) independante dutemps, et lâon a donc simplement :
Ïy + Ïx1h0x1 + Ïx2h0x2 = 0 pour y = âh0(x1, x2) (10)
Plus trivialement si le fond est plat h0 est constant, et Ïy = 0 pour y =âh0. A priori, le fait que Ï est harmonique, joint aux conditions aux limitesportant sur les derivees de Ï au bord du domaine (conditions de Neumann)permet de determiner Ï a lâinterieur du domaine âh0 < y < η a constantepres. Evidemment le probleme est bien plus redoutable, car les equations(9) expriment aussi η en fonction de Ï. Câest pourquoi nous allons dâabordobtenir une approximation linearisee de ces equations et nous verrons alorsquâelles determinent bien une solution convenable.
4 Linearisation.
Nous montrons dâabord comment lineariser les equations des ondes desurface, puis nous etudions longuement la solution qui en resulte.
4.1 Approximation lineaire.
Le systeme (9) est non lineaire, mais il contient sous forme quadratiquedes quantites qui sont supposees etre petites, notamment la vitesse u du fluideet le deplacement η de la surface libre. Ne gardant que les termes du premierordre on abandonne le terme Ïx1ηx1 + Ïx2ηx2 dans la premiere equation, etle terme 1/2(âÏ)2 dans la deuxieme, câest a dire quâon neglige lâenergiecinetique du fluide dans le bilan dâenergie. Les equations ainsi obtenues nesont lineaires quâen apparence, car on doit les appliquer en y = η. Si lâondeveloppe ces equations autour de y = 0 en puissance de η on engendre destermes dâordre superieur. Comme les equations sont homogenes dâordre 1,tous les termes dâordre superieur sont au moins dâordre 2, et la linearisationconsiste a les abandonner tous, câest a dire a ecrire les conditions aux limites,non pas en y = η mais en y = 0. On obtient alors le systeme lineaire :
ηt = ÏyÏt + gη = 0
}pour y = 0 (11)
En derivant la deuxieme equation on peut eliminer η, soit Ïtt + gÏy = 0 sury = 0. Supposant le fond plat, on a donc le systeme complet dâequations
11
lineaires : Ïtt + gÏy = 0 sur y = 0
âÏ = 0 dans le fluideÏy = 0 au fond
(12)
4.2 Solution des equations.
Recherchons des solutions de (12) ayant un comportement ondulatoireen x1, x2 pour η et donc pour Ï qui lui est couple. On pose donc :
η = A ei(k·xâÏt) (13)
Ï = Y(y) ei(k·xâÏt)
ou (k · x) = k1x1 + k2x2. Comme Ï est harmonique et que : âÏ = âk2Ï +
YâČâČei(k·xâÏt) nous trouvons pour Y lâequation Y
âČâČ â k2Y = 0 ou k2 = k21 + k2
2,et donc Y(y) est une combinaison lineaire de exp(ky) et de exp(âky).
Ceci est une propriete generale de lâequation de Laplace, si une solutiona un comportement ondulatoire dans une direction, elle a un comportementexponentiel dans lâautre et les vecteurs dâonde sont similaires dans les deuxcas. On tire de la tout de suite une propriete importante pour la suite : si lalongueur dâonde des ondes de surface est grande devant la profondeur h0, ladependance en y de Ï et donc de la vitesse u sera faible. En fait dans lâap-proximation en eau peu profonde on neglige completement la dependance eny de u. Dans le cas oppose, et comme Ïy doit etre nul au fond, Ï doit essen-tiellement decroıtre exponentiellement vers le fond, et le champ de vitesse uconcerne essentiellement une couche pres de la surface libre dâepaisseur dumeme ordre que la longueur dâonde.
Etudions plus precisement la solution quand le fond est plat : YâČ(y =
âh0) = 0. La combinaison lineaire appropriee dâexponentielles est Y âcosh[k(h0 + y)] car Y
âČ â sinh[k(h0 + y)] sâannule bien en y = âh0. On obtientainsi lâexpression de Ï :
Ï = Ct cosh[k(h0 + y)]ei(k·xâÏt)
Comme Ït = âgη, on peut exprimer cette constante a lâaide de A :
Cte =âigA
Ï cosh(kh0)
ce qui nous donne lâexpression finale du potentiel des vitesses :
Ï =âigA
Ï cosh(kh0)cosh[k(h0 + y)]ei(k·xâÏt) (14)
12
Nous nâavons pas encore utilise la premiere equation de (12), mais nousverrons plus bas quâelle donne uniquement une relation entre k et Ï laârelation de dispersionâ.
Ces expressions sont encore plus simples quand la hauteur dâeau esttres grande. On peut alors prendre h0 = ââ, et Ï est evidemment unepure exponentielle decroissante (y < 0) : Ï = â igA
Ïeky ei(k·xâÏt) Supposant
k = (k, 0), câest a dire k2 = 0, on a donc, voir Fig. (1) :
u1 =kgA
Ïeky+i(kx1âÏt), uy =
âikgAÏ
eky+i(kx1âÏt)
Comme dans lâapproximation lineaire u1 est la vitesse dâune particule defluide selon x1, et uy selon y, on peut integrer ces equations pour obtenir (ona utilise Ï
2 = gk qui se deduit de Ïtt + gÏy = 0) quand kA << 1 (la hauteurde vague tres petite devant la longueur dâonde) :
x1 = a + A exp(âk|b|) sin(Ït â kx1), y = b + A exp(âk|b|) cos(Ït â kx1)
ce qui est le resultat bien connu : les âparticulesâ dâeau decrivent des cerclesde centre (x1 = a, y = b).
-15
-10
-5
0
0 10 20 30 40 50
âvecteurâ u 1:2:3:4
FIG. 1 â Champ de vitesses dans le fluide a t fixe.
4.3 Relation de dispersion.
Il nous reste a exploiter la premiere equation (12) qui decrit la dyna-mique de la surface libre, soit Ïtt + gÏy = 0. Or, avec les solutions ci-dessus
13
nous avons Ïtt = âÏ2Ï tandis que Ïy = k tanh(kh0) Ï (pour y = 0) dans le
cas dâune profondeur finie, et Ïy = kÏ quand h0 ââ.Ainsi, la condition a la surface libre est toujours satisfaite pourvu que Ï
et k soient lies par la ârelation de dispersionâ :
Ï2 = (gk) tanh(kh0) (15)
qui sâecrit Ï2 = (gk) dans le cas h0 = â. Sous forme resolue en Ï on a donc
Ï(k) = ±â
(gk) tanh(kh0) = ±W(k) ou Ï(k) = ±â
(gk).La relation de dispersion se simplifie dans les deux limites de lâeau peu
profonde, h0 << λ , soit (kh0) << 1, ou de lâeau profonde, h0 >> λ . Dansle premier cas on a tanh(kh0) ⌠(kh0) et donc Ï = ±ck avec c =
âgh0, ou
c est la celerite des ondes et est constante : il nây a pas de dispersion. Dansle second cas, on a tanh(kh0) = 1 et Ï prend la meme forme que dans lecas h0 = â. La celerite des ondes depend constamment de leur longueurdâonde, il y a dispersion. Dans Fig.(2) on voit a gauche la loi de dispersioncorrespondant a h0 fini, qui est lineaire sans dispersion pour k petit, et a droitela loi pour h0 infini qui est toujours dispersive. Les deux lois se confondentpour k grand.
w(k)Legend
0
0.02
0.04
0.06
0.08
0.1
0.0002 0.0004 0.0006 0.0008 0.001
k
w(k)Legend
0
10
20
30
40
20 40 60 80 100 120 140 160 180 200
k
FIG. 2 â Relations de dispersion pour h0 fini et infini.
5 Etude de la propagation.
Les equations de propagation etant lineaires se resolvent naturellementpar transformation de Fourier. Cependant le caractere dispersif de la relationentre Ï et k rend les choses compliquees.
14
5.1 Transformation de Fourier.
Le systeme (12) etant lineaire, la solution generale est combinaisonlineaire des solutions ondulatoires que nous avons decrites, ce que lâon peutexprimer comme une integrale de Fourier. Par simplicite on se limitera aucas unidimensionnel, k = (k, 0) et x = (x, 0). On a donc la solution generalepour la surface libre :
η(x, t) =â« +â
ââ[ei(kxâWt)F+(k) + ei(kx+Wt)Fâ(k)]dk
ou lâintegrale est rendue compliquee par le fait que W depend de k. Les deuxfonctions F±(k) sont fixees par les conditions initiales, câest a dire par lesvaleurs arbitraires de η(x, t) et ηt(x, t) a t = 0, la formule ciâdessus exprimantalors η(x, t) pour tout t. Les conditions initiales sont :
η(x, 0) =â« +â
ââeikx[F+(k) + Fâ(k)]dk
ηt(x, 0) =â« +â
ââ(âiW(k))eikx[F+(k)â Fâ(k)]dk
A titre dâexemple, choisissant les conditions initiales ηt(x, 0) = 0 etη(x, 0) = η0(x) on a F+ = Fâ = F donc η0(x) = 2
â« +âââ eikxF(k)dk, soit par
transformee de Fourier inverse :
F(k) =14Ï
â« +â
ââη0(x)eâikxdx
La solution pour tout t est alors :
η(x, t) =â« +â
ââ2 cos[W(k)t]eikxF(k)dk (16)
En particulier on peut traıter le cas ou η0 est un âpulseâ infiniment fin, en
prenant η0(x) = ÎŽ(x) (fonction de Dirac) : on a F(k) =14Ï
et donc :
η(x, t) =1Ï
â« +â
0cos[kx] cos[W(k)t]dk (17)
Evidemment cette expression nâest pas evaluable simplement vu la forme deW(k).
15
5.2 Methode de la phase stationnaire.
Il sâagit dâune methode generale, due a Lord Kelvin, pour evaluerapproximativement les integrales de Fourier ci-dessus. Lâidee est quâuneintegrale de Fourier telle que
â« +âââ exp(ixÏ(k)) F(k)dk pour x grand, recoit des
contributions importantes uniquement dans les regions dâintegration ou laphase Ï(k) est stationnaire, câest a dire dÏ/dk = 0. On dit aussi que Ï a unpoint critique. La justification physique est que, si on nâest pas sur un pointcritique, la phase xÏ(k) oscille rapidement sur un petit intervalle de variationsde k (donc ou on peut considerer F(k) constant), et ce dâautant plus que x estgrand, ce qui conduit a des interferences destructives et une contribution trespetite. En un point critique k0, on ecrit Ï(k) = Ï(k0) + (kâ k0)2α + · · · et onevalue simplement la contribution du voisinage de k0 comme :
F(k0) eixÏ(k0)â« +â
ââeixα(kâk0)2dk = F(k0) eixÏ(k0)+i Ï
4
âÏ
xα(18)
On a translate k â k0 + k dans lâintegrale, puis utilise,â«
exp(âk2)dk =â
Ï
dâou par changement dâechelle sur k,â«
exp(âak2)dk =â
Ï
a , pour a > 0.Enfin par prolongement analytique on a etendu le resultat pour a imaginairepur, et on a note que
âi = exp(iÏ/4).
Une justification plus serieuse de ce calcul est obtenue comme suit.Notons que le resultat ciâdessus se comporte en 1/
âx pour x grand. Nous
allons voir que les contributions que nous avons negligees sont au plus en1/x, câest a dire sont plus petites que les contributions dominantes aux pointscritiques par au moins un facteur 1/
âx. Ainsi se trouve etabli le calcul (18)
pour x grand.La contribution la plus inquietante est celle des zones dâintegration ou
lâon nâa pas de point critique. Considerons doncâ« b
a exp(ixÏ(k)) F(k) ou lâonsuppose que Ï nâa pas de point critique sur [a, b], donc est une bijection surcet intervalle. Posons Ï = Ï(k) et inversement k = K(Ï) et exprimons notreintegrale en fonction de Ï, avec Ïa = Ï(a) et Ïb = Ï(b). Nous avons donc acalculer : â«
Ïb
Ïa
exp(ixÏ)F(K(Ï))Ï âČ(K(Ï))
dÏ
qui est de la formeâ«
exp(ixÏ)G(Ï) dÏ avec G parfaitement regulier. Maisalors posant xÏ = Ï notre integrale vaut :
1x
â« xÏb
xÏa
eiÏ G(Ï/x) dÏ
Lâintegrale est majorable par une constante, et on a bien un resultat en 1/x.
16
Des lors on peut se limiter a calculer des integrales au voisinage immediatdes points critiques. Nous avons calcule une telle integrale en (18), dâune parten negligeant tous les termes dâordre superieur, dâautre part en etendant ledomaine dâintegration sur ]ââ, +â[, alors quâil est a priori limite autour dupoint critique, ce qui fait un ecart dâordre 1/x par lâargument ci-dessus.
Reste la contribution des termes dâordre superieur, tant dans le develop-pement de lâexponentielle que de F(k). On a le droit de developper cesfonctions autour de k0 tant que le domaine dâintegration est petit, puisdâetendre le domaine dâintegration, ce qui donne des expressions du genreâ«
k2 exp(iαxk2)dk (les puissances impaires sâannulent pas symetrie). Or cetteintegrale se calcule a partir de (18) en derivant par rapport a x et vaut donc(i/(2αx))
â(iÏ)/(αx). On voit que chaque puissance de k produit un facteur
1/â
x supplementaire.Appliquons la methode de la phase stationnaire a lâevaluation de la
surface libre η(x, t) qui est donnee par une integrale de Fourier :
η(x, t) =â« +â
ââei(kxâW(k)t)F(k)dk (19)
On suppose que x et t sont simultanement grands, par exemple x/t fixe et xgrand. Seuls comptent les points ou la phase est stationnaire :
ddk
(kxâW(k)t) = 0 =â xt
=dÏ
dk=
dW(k)dk
= vg(k)
ou lâon voit apparaıtre la vitesse de groupe bien connue vg(k). Ce calcul montreque pour un rapport x/t donne, x et t tendant vers lâinfini, la seule valeur dek qui compte dans lâintegrale est celle pour laquelle la vitesse x/t est egale avg(k). Si par exemple W(k) =
âgk on a vg(k) = 1/2
âg/k. Cette vitesse doit
etre soigneusement distinguee de la vitesse de phase vÏ = Ï/k, qui dans notreexemple vaut
âg/k câest a dire le double de la vitesse de groupe.
Appliquant la formule (18), avec α = W âČâČ(k0)/2, on obtient lâexpressionde la surface libre η(x, t) a lâapproximation de la phase stationnaire :
η(x, t) = F(k0)ei(k0xâÏt+ Ï
4 )
â2Ï
t | W âČâČ(k0) |,
xt
= W âČ(k0) (20)
On remarque la decroissance en1â
tde lâamplitude des vagues.
5.3 Vitesse de phase, vitesse de groupe.
Un mouvement ondulatoire complique de la surface libre se presentegeneralement sous la forme η(x, t) = Ί(x, t) cos Ï(x, t) ou Ï(x, t) est une
17
phase variant rapidement, generalement de la forme kx â Ït + Ï0, tandisque Ί est une fonction variant lentement quâon appelle lâenveloppe. Direque Ï varie rapidement, et Ί lentement câest dire que k et Ï sont tres grandsdevant âxΊ et âtΊ. Evidemment une telle separation peut etre relativementfloue, point sur lequel on ne sâattardera pas. En outre en general k est aussiune fonction a variation lente de (x, t), tandis que Ï est une fonction de k(relation de dispersion).
Dans un tel cas on appelle vitesse de phase vÏ le rapport Ï/k. Sasignification physique est que si un observateur se deplace par rapport a lasurface libre a la vitesse vÏ il observe toujours la meme phase Ï câest a dire setrouve toujours au meme endroit de la sinusoıde cos Ï . Par contre lâenveloppedes oscillations evolue autour de lui. Comme k = k(x, t), vÏ va aussi evoluerlentement.
La formule (20) a la structure ciâdessus. Outre une decroissance lenteglobale en 1/
ât elle possede une enveloppe variant lentement, et de meme k
varie lentement. En fait fixons une valeur de k0 et considerons un observateurqui se deplace par rapport a la surface libre avec la vitesse de groupevg = (dÏ/dk)(k0), si bien que x = vg(k0)t. Clairement k0 est la valeur quiresout W âČ(k) = x/t donc lâamplitude enveloppe, Ï, et k, qui dependent tousde k0 sont constants. Lâobservateur voit un paysage constant autour de lui,excepte bien sur la phase rapide cos(k0xâÏ(k0)t + Ï/4). Les vagues a courtelongueur dâonde defilent sous lui, mais lâenveloppe est fixe. Voila qui definitla signification physique de la vitesse de groupe. Notons cependant quâadâautres parties du profil enveloppe, correspondant a des valeurs differentesde k0 sont associees des vitesses de groupe differentes.
Enfin considerons un element de profil enveloppe correspondant a unintervalle [k0, k0+ÎŽk0]. On retrouve le meme profil en tous les points ou x/t =vg(k0) et donc, a t fixe, pour les valeurs de x dans lâintervalle [tvg(k0), tvg(k0) +tvâČg(k0)ÎŽk0]. Cette intervalle a une largeur t|W âČâČ(k0)|ÎŽk0 augmentant lineaire-ment avec t. Câest lâetalement du paquet dâonde, qui va de pair avec sadecroissance generale en 1/
ât. Cet etalement se produit dans toutes les
propagations lineaires dispersives (mais non dans les propagations a celeriteconstante) car les ondes de differentes frequences constituant un paquet sedeplacent a vitesse differente, entraınant lâetalement du paquet.
5.4 Comportement a proximite du front dâonde.
Appliquons la methode de la phase stationnaire au cas ou la relation dedispersion est donnee par (15). Dans ce cas la Figure (3) represente la vitessede groupe en fonction de k. On voit tout de suite que lâequation x/t = vg(k)possede une solution et une seule pour chaque valeur 0 < x/t < c0 et nâen
18
possede aucune si x/t > c0, ou c0 =â
gh0.
60
80
100
120
140
160
180
200
220c0
0 0.0002 0.0004 0.0006 0.0008 0.001
FIG. 3 â Vitesse de groupe en fonction de k.
Ainsi la vitesse de groupe maximale pour la propagation des ondes desurface est c0, ce qui veut dire que, a t donne, la valeur maximale de x ou lâonpeut observer une enveloppe notable est c0t. On appelle cette zone le frontdâonde, câest a dire le point ou lâonde commence a se manifester. Clairementla valeur de k correspondante est voisine de 0, ce qui correspond a un regimetres peu dispersif (on a presque Ï = c0k). Au contraire pour x << c0t on estdans le regime de grand k, câest a dire dâeau profonde, ou Ï =
âgk qui est
tres dispersif. Pour k petit, on a :
Ï = W(k) =
âgk(kh0 â
13(kh0)3) = k
âgh0
â1â 1
3(kh0)2 = kc0 â Îłk3
avec c0 =â
gh0 et Îł =c06
h20. Notons que pour k = 0 on a W âČâČ = 0 (pas de
terme en k2) donc on ne peut pas appliquer directement la methode de laphase stationnaire, il faut appliquer une technique similaire faisant intervenirla fonction dâAiry. Par contre nous allons voir que pour k petit, les resultatsobtenus par la methode de la phase stationnaire se fondent dans ceux obtenusa lâaide de la fonction dâAiry.
Considerons donc lâintegrale (19) dans les cas ou x est voisin de c0t etou donc le point critique de la phase est en k = 0. Remplacant W(k) parkc0 â Îłk3 la surface libre au voisinage du front dâonde est donnee par :
η(x, t) = F(0)â« +â
ââexp
(ik(xâ c0t) + iÎłk3t
)dk
19
Autrement dit, generiquement le point critique est quadratique, ici il estcubique. Il existe une theorie de la classification des points critiques modulodeformation, câest la theorie des catastrophes5 de Thom. Ici nous rencontronsla premiere espece de point critique differente du cas standard, le cas quadra-tique. La formule (18) nâest valable que pour des points critiques quadratiques.Lâintegrale ciâdessus se ramene simplement a une integrale bien connue, quidefinit la fonction dâAiry :
Ai(z) =12Ï
â« +â
ââei(sz+ 1
3 s3) ds =1Ï
â« +â
0cos (sz +
13
s3) ds (21)
Le changement de variables s = (3Îłt)13 k et z =
xâ c0t
(3Îłt)13
donne immediatement
lâexpression de la surface libre :
η(x, t) =2ÏF(0)
(3Îłt)13
Ai
(xâ c0t
(3Îłt)13
)(22)
Connaissant le graphe de la fonction dâAiry, Figure (4), on voit quelle estla forme du front dâonde : la surface libre devient exponentiellement petitepour x > c0t, presente une valeur maximale en x = c0t, puis presente uncaractere ondulatoire avec une vitesse de phase c0 pour x < c0t, tout endecroissant lentement en 1/(c0tâ x)1/4 quand on sâeloigne du front dâonde.La decroissance generale au cours du temps est en 1/t1/4 ce qui veut dire quele front dâonde decroıt moins rapidement que le reste du systeme ondulatoire( qui est en 1/t1/2). Au cours du temps lâonde de surface tend a exister surtoutau niveau du front dâonde, ce qui correspond bien aux observations.
5.5 La fonction dâAiry.
Nous allons montrer quel est le comportement de la fonction dâAirypour z > 0 grand et z < 0 grand, ce qui permet de comprendre son graphe.En outre nous allons montrer que, pour k0 petit mais non nul, le calcul parla methode de la phase stationnaire produit un resultat qui se raccorde bienavec lâexpression donnee par la fonction dâAiry. Autrement dit il nây a pas dediscontinuite quand on passe du point critique quadratique au point critiquecubique a k0 = 0.
La fonction dâAiry possede des developpements asymptotiques pour
5Voir Techniques and Applications of Path Integration L. S. Schulman Dover Chapitre 16
20
FIG. 4 â Fonction dâAiry et approximations en +â et ââ : allure du frontdâonde
|z| grand, prenant deux formes differentes selon que z > 0 ou z < 0 :
Ai(z) ⌠12â
Ïzâ1/4 exp
(â2
3z3/2)
, z > 0
Ai(z) ⌠1âÏ
zâ1/4 sin(
23 |z|
3/2 + Ï
4
), z < 0
(23)
En realite la Figure (4) montre a quel point ces approximations sont ex-cellentes immediatement des que |z| > 1.5. Le point remarquable de cesapproximations est que le developpement asymptotique pour z > 0 nâestpas le prolongement analytique du developpement pour z < 0. En effetle sinus est la demiâdifference de deux exponentielles. Seule, lâune dâentreelles figure, analytiquement prolongee dans lâexpression pour z > 0. Cecisâappelle le phenomene de Stokes et est caracteristique des developpementsasymptotiques autour de points singuliers irreguliers. Ici il est immediat queAi(z) est solution de lâequation differentielle f âČâČ(z)â zf (z) = 0 qui a un pointsingulier irregulier a lâinfini.
Pour obtenir ces developpements, on applique encore la methode dela phase stationnaire, mais cette fois ci a la phase i(sz + s3/3). Le pointcritique est obtenu quand s2 + z = 0 câest a dire, pour z < 0 aux deuxpoints s = ±
ââz. Appliquant la formule (18) avec W âČ = s2 + z, W âČâČ = 2s, et
sz + s3/3 = â± |z|3/2 et ajoutant la contribution des deux points critiques,on obtient 1/
âÏ 1/|z|1/4 cos(|z|3/2 â Ï/4) ce qui est lâexpression (23) pour
z < 0.Pour z > 0 il nây a pas de point critique dans le domaine dâintegration,
21
ce qui laisse presager que lâintegrale est petite. Il existe une variante de lamethode de la phase stationnaire, la methode du col, due a P. Debye, quipermet de traıter le probleme. Lâidee est de deformer le contour dâintegrationdans le plan complexe. Si on sâarrange pour que les contributions en ±ârestent exponentiellement petites, comme on ne rencontre pas de pole,lâintegrale ne va pas changer. Il est aise de voir que exp i(sz + s3/3) estexponentiellement petit quand s va vers lâinfini dans les deux secteurs 0 <arg(s) < Ï/3 et 2Ï/3 < arg(s) < Ï. On laisse donc les extremites du chemindâintegration dans ces secteurs. Autour du point critique s = i
âz on peut
poser s = iâ
z + t donc i(sz + s3/3) = â2/3z3/2 ââ
zt2 + it3/3. Donc si onsâeloigne avec t reel, la quantite a integrer decroıt exponentiellement, alorsquâelle croıt exponentiellement dans le sens de t imaginaire pur. Ceci est lephenomene bien connu quâune fonction analytique ne peut avoir de maxi-mum du module en un point, on a necessairement un portrait en forme deselle. La methode du col consiste a deformer le chemin pour quâil passe parle col, câest a dire decroisse autour du point critique. Ici il suffit de prendreun chemin avec t reel, qui se termine dans les secteurs ci-dessus. On a alorsune integrale gaussienne autour du point critique, qui se calcule par la memeformule (18) et donne immediatement lâexpression (23) pour z > 0. Notonsque le second point critique en s = âi
âz ne se trouve jamais proche du
chemin dâintegration, dâou le phenomene de Stokes.Utilisant lâexpression asymptotique de la fonction dâAiry pour z < 0 on
obtient lâapproximation (excellente) de la surface libre η(x, t), en arriere dufront dâonde :
η(x, t) ⌠2â
ÏF(0)[(3Îłt(c0t â x))]â14 sin
[23
(c0t â x)32
(3Îłt)12
+Ï
4
](24)
Câest cette expression que nous voulons comparer a lâapplication de lamethode de la phase stationnaire pour k petit. Rappelons que nous devonsresoudre lâequation vg(k) = c0 â 3Îłk2 =
xt, ce qui donne :
k = 屉
c0t â x3Îłt
, W âČâČ(k) =dvg
dk= â6Îłk
Reportant dans lâequation (20), pour chacune des deux valeurs de k on repro-duit exactement le calcul de lâexpression asymptotique de la fonction dâAiryet on retrouve donc bien le meme resultat que dans lâequation (24). Le do-maine de validite des approximations se recouvre parfaitement, permettantdâavoir une solution valable aussi bien pres que loin du front dâonde, sous laforme de deux formules approximatives qui se recollent. Ceci aussi est unelecon importante que lâon peut tirer de lâetude des ondes de surface.
22
6 Theorie nonâlineaire.
Les effets non lineaires deviennent determinants quand la profondeurdâeau devient du meme ordre ou plus faible que la longueur dâonde desvagues. Par contre dans ce cas on peut dans un premier temps negliger leseffets dispersifs, ce qui mene a une theorie non lineaire simplifiee appeleeâtheorie en eaux peu profondesâ.
6.1 Theorie en eaux peu profondes.
Rappelons les equations formulees dans la premiere partie de cetteetude :
â · u = 0Du
Dt=
âu
ât+ (u · â)u = â1
Ïâpâ gj
On considere la composante verticale de lâacceleration faible (â1Ï
âpâyâ g ' 0)
Dâou pâ p0 = Ïg(η â y), ce qui est lâequation hydrostatique usuelle pour lapression. En projetant sur lâhorizontale, avec u = (u1, u2, v) et x = (x1, x2, y) :
âui
ât+â
j
ujâui
âxj+ v
âui
ây= âg
âη
âxi
On peut supposer que les ui ne dependent pas de y, car lâechelle de variationsignificative est la longueur dâonde, qui est bien plus grande que la profondeur.
Lâequation precedente devient :âui
ât+â
ujâui
âxj+ g
âη
âxi= 0 La signification
physique de cette equation est quâune tranche dâeau comprise entre x etx + dx est acceleree en bloc uniquement par la difference de pression quiregne sur les deux faces, et celle-ci ne depend que de la difference de hauteurdâeau entre les deux faces, puisque la profondeur y se simplifie entre lescontributions opposees.
En integrant sur un volume lâequation de conservation locale â · u = 0on obtient la conservation du flux sortant a travers nâimporte quelle surfaceclose : âź
u · dS = 0
Prenant un volume âcylindriqueâ de la forme [x1, x1 + dx1]Ă [x2, x2 + dx2]Ă[âh0, η] le flux sortant de la face x1 = x1 + dx1 est (u1h)(x1 + dx1)dx2, caron suppose que u1 ne depend pas de y, tandis que le flux sortant de la face
23
opposee est â(u1h)(x1)dx2 laissant une contribution nette âx1(hu1)dx1dx2.Idem pour les deux faces verticales perpendiculaires. Le flux sortant par laface haute du cylindre est vdx1dx2 ou v est la vitesse verticale au niveau de lasurface, qui vaut âth dans notre approximation. On obtient ainsi :
âhât
+2â
i=1
â
âxi(hui)
avec h = h0 + η la profondeur totale.Par simplicite dans la suite on etudie exclusivement le probleme unidi-
mensionnel (u = ui et x = xi, i = 1) :
ht + hux + uhx = 0ut + uux + ghx = 0
}(25)
6.2 Methode des caracteristiques.
Considerons un systeme dâequations aux derivees partielles en x, t nonlineaire que lâon peut mettre sous la forme :
âtf + Aâxf = 0 (26)
ou f est un vecteur a n composantes (dans le cas qui nous interesse n =2) et A une matrice n à n dont les elements aij dependent des fonctionsinconnues fi(x, t). Introduisons une valeur propre λ et le vecteur propre agauche correspondant α = (α1, · · · , αn) ou λ et les αi dependent a priori desfj :
αA = λα
Supposons λ reel.Multipliant a gauche6 par la matrice ligne α on obtient lâequation scalaire
αâtf + αAâxf = αâtf + αλâxf = 0 soit :
α · â(λ)f = 0
ou nous avons note â(λ) = âtf +λâx. Si on considere une courbe (C), appeleecaracteristique le long de laquelle on a dx/dt = λ (supposant bien surlâequation resolue ! et donc les fi puis λ connus pour chaque (x, t)) alors â(λ)
6On ne pourrait pas faire des manipulations similaires en combinant les equations adroite, car les derivations ne commutent pas avec les composantes des vecteurs propres
24
est la derivee le long de cette courbe, puisque pour toute fonction g la deriveele long de la courbe est :
dgdt |(C)
=âgât
+dxdt
âgâx
= â(λ)g
On dit que le systeme dâequations aux derivees partielles est hyper-bolique si la matrice A possede partout des valeurs propres reelles et desvecteurs propres a gauche correspondants lineairement independants. Dansce cas par chaque point (x, t) vont passer n lignes caracteristiques, et sur cha-cune on aura une contrainte αj · â(λj)f = 0. Ces contraintes sont lineairementindependantes, par hypothese (meme aux points ou deux valeurs proprescoıncident exceptionnellement) et permettent de construire les solutions fi deproche en proche comme nous allons le voir ci-dessous.
Qui plus est il se trouve souvent en pratique (et câest toujours le caspour n = 2) que lâon puisse trouver des âfacteurs integrantsâ Ïj tels que lescontraintes prennent la forme :
1Ïj
αj(âtf + λâxf ) = dIj
On doit donc avoir dIj = 0 sur la caracteristique (C)j câest a dire Ij constant.On appelle alors les Ij les invariants de Riemann, car Riemann a introduit cettemethode des caracteristiques pour resoudre le probleme des flots gazeuxunidimensionnels compressibles. Dans ce cas il est aise dâetendre lâargumentci-dessous du cas infinitesimal au cas fini, câest a dire de comprendre commentles equations Ij = Cj permettent en fait de determiner completement lasolution, y compris de trouver les caracteristiques.
6.3 Solution de proche en proche.
Supposons la solution connue sur une surface (ÎŁ) et montrons commenton peut la propager sur une surface (ÎŁ + ÎŽÎŁ) un peu plus tard.
Puisque f1 et f2 sont connus sur ÎŁ on y connaıt la matrice A et ses deuxvaleurs propres λ± quâon peut supposer constantes dans le voisinage de P.Les caracteristiques (C±) sont deux segments de droite de pente λ± passantpar P et qui coupent (ÎŁ) en P±. Sur chaque caracteristique on a lâequationα± · ÎŽ f = 0 ou α
± sont les vecteurs propres a gauche correspondants. Soit :
α+1 f1(P) + α
+2 f2(P) = α
+1 f1(P+) + α
+2 f2(P+)
αâ1 f1(P) + α
â2 f2(P) = α
â1 f1(Pâ) + α
â2 f2(Pâ) (27)
25
ÎŁ
x
t
P
PPâ
+
(C ) (C )+ â
FIG. 5 â Propagation le long des caracteristiques.
Par hypothese α± sont independants donc ce systeme determine bien f (P)
en fonction des membres de droite qui sont connus.On peut faire cela tout le long de (ÎŁ + ÎŽÎŁ) tant que les caracteristiques
(C±) intersectent (ÎŁ) comme sur le dessin. Ceci permet de connaıtre f sur(ÎŁ + ÎŽÎŁ) et donc dây connaıtre les pentes λ±. On peut alors determinerde proche en proche a la fois la propagation de f et les caracteristiques,qui permettent de continuer la determination de cette propagation. Dâunecertaine maniere on peut dire que le âchampâ α
±1 f1(P) + α
±2 f2(P) se propage
inchange sur les caracteristiques (C±) de maniere infinitesimale.Sâil existe des invariants de Riemann I± qui restent constants sur
(C±) on peut faire le meme genre de deduction, mais de maniere finie. Sila caracteristique (C+) qui maintenant est une courbe finie coupe (ÎŁ) enP+ et de meme pour Pâ alors f (P) est determine par les deux equationsI±(P) = I±(P±) ou les membres de droite sont connus. Frequemment lesconditions initiales sont telles que ces membres de droite sont tres simples,par exemple constants, et que lâon peut determiner a la fois f (P) et la formedes caracteristiques a partir de cette information. Clairement on peut aussidire que la quantite I±(f ) se propage inchangee le long de la caracteristique(C±). Qui plus est le trace du reseau de caracteristiques permet de discu-ter la nature des conditions initiales pemettant de determiner la solutionulterieure, et le domaine dans lequel cette solution ulterieure est determinee.Essentiellement il faut que la surface (ÎŁ0) des conditions initiales coupetoujours correctement les caracteristiques, et dans le cas ou (ÎŁ0) est finie, lasolution ne sera determinee que dans un cone borde par des caracteristiques(C±) appropriees issues du bord, ce qui est lâexpression de la causalite de la
26
propagation des solutions dâune equation hyperbolique.
6.4 Un exemple tres simple.
Nous allons considerer dâabord le cas particulierement simple des ondesde densite se propageant uniquement de gauche a droite a la celerite c. Ainsila solution de la theorie lineaire est de la forme Ï(x, t) = f (x â ct) ou f estune fonction quelconque determinee par les conditions initiales. Clairementa t = 0 on doit avoir f (x) = Ï0(x). Lâequation dâondes correspondantes estÏt + cÏx = 0 qui est une equation du premier ordre, ce qui correspond a lapropagation dans un seul sens. On introduit une non linearite dans cetteequation en supposant que la celerite c depend de lâamplitude de lâonde,c = c(Ï). Lâequation dâonde sâecrit alors :
Ït + c(Ï)Ïx = 0
ou c(Ï) = c0 + Ïc1 + · · · . Nous sommes dans le cas n = 1 de notre theoriegenerale et nous allons voir que la methode des caracteristiques fournit lasolution generale.
La matrice A est 1x1 et donc a une seule valeur propre c(Ï). La theorienous dit alors de considerer les caracteristiques (C) qui sont les courbesayant en tout point (x, t) la pente c supposant connu Ï(x, t) en ce point.Nous allons voir que Ï est tout simplement lâinvariant de Riemann sur cettecaracteristique. En effet :
dÏ
dt |(C)=
âÏ
âxdxdt
+âÏ
ât= Ït + c(Ï)Ïx = 0
Mais alors comme Ï est constant sur la caracteristique, la pente c(Ï) estconstante, si bien que (C) est une droite ! Dans ce probleme toutes les ca-racteristiques sont des droites de pente positive. Une telle droite coupe lâaxedes x (conditions initiales a t = 0) en un point Ο ou la densite vaut Ï0(Ο), etla densite garde cette meme valeur partout sur la droite : Elle a donc pourequation, en posant c(Ï0(Ο)) = F(Ο) :
x = Ο + F(Ο)t (28)
Ceci determine completement la solution en tout point (x, t) : il suffit deresoudre lâequation x = Ο + F(Ο)t qui donne Ο en fonction de (x, t) (ce quirevient a determiner sur quelle caracteristique se trouve le point), on sait alorsque la densite en ce point vaut Ï0(Ο).
Lâanalyse ci-dessus est lâexemple le plus simple de la determinationsimultanee de la solution et des caracteristiques, que nous allons entreprendre
27
plus bas dans le cas plus complexe de la theorie en eaux peu profondes. Vu lasimplicite des formules il est bon de verifier par un calcul explicite que lâon abien obtenu la solution de lâequation de depart. Notons Ï0(Ο) = f (Ο) et doncÏ(x, t) = f (Ο(x, t)), Ït = f
âČ(Ο)Οt , Ïx = f
âČ(Ο)Οx, donc
Ït + c(Ï)Ïx = fâČ(Ο)[Οt + F(Ο)Οx]
En prenant la differentielle de lâequation (28) : dx = dΟ + tFâČ(Ο)dΟ + F(Ο)dt.
De plus, dΟ = Οxdx + Οtdt, donc dx = (1 + tFâČ)(Οxdx + Οtdt) + Fdt, soit
dx(â1 + Οx(1 + tFâČ)) + dt(F + (1 + tF
âČ)Οt) = 0
x et t sont des variables independantes, leurs coefficients doivent donc etreseparement nuls ; on trouve ainsi
Οx =1
1 + tFâČ et Οt = â F1 + tFâČ
Ainsi on a bien Οt + F(Ο)Οx = 0 et donc Ït + c(Ï)Ïx = 0.Le diagramme des caracteristiques nous permet de discuter les effets
tres interessants de la propagation dans le cas non lineaire. Supposons quelâon ait a t = 0 une bosse de densite, localisee. Comment se propage tâelle ?Toutes les caracteristiques issues, a t = 0 dâorigines Ο hors de la bosse, ont unepente constante egale a c0. Par contre, supposant que c(Ï) est une fonctioncroissante de Ï (c1 > 0), les caracteristiques dâorigine Ο dans la bosse ont unepente dx/dt plus forte, ce qui dans le diagramme (6) ou x est en abscisse et ten ordonnee, se traduit par des caracteristiques plus plates. Le sommet dela bosse correspond aux caracteristiques les plus plates. Or lâequation (28)signifie physiquement que chaque partie de la bosse dâamplitude Ï se propagele long de sa propre caracteristique, câest a dire avec sa propre vitesse c(Ï).Le sommet de la bosse se propage plus vite que sa base. Si lâon intersectele diagramme (6) par une ligne t = Ct suffisamment proche de t = 0 onretrouve une bosse deformee ou le sommet avance par rapport a la base.Pour une certaine valeur de t on entre dans la zone ou les caracteristiquesse recoupent. Ceci veut dire que pour (x, t) donnes il nây a plus une seulesolution Ο a lâequation (28) mais au moins deux, autrement dit il y a au moinsdeux valeurs de Ï possibles pour certaines valeurs de x. De fait le sommet dela bosse a depasse sa base, et il sâagit des regions en x sous ce phenomene.Evidemment, ceci est impossible physiquement, il se forme une discontinuite,la partie haute de la bosse tombe brutalement sur la partie basse. Pour le casdes ondes de densite ou de pression, ceci sâappelle une onde de choc. Pour lecas des ondes de surface, il sâagit dâune vague qui se brise. Bien entendu, si
28
c1 < 0 le meme phenomene se produit, mais a lâarriere de la bosse. Nousvoyons que dans le cas dâune theorie non lineaire simple comme ci-dessus,toute condition initiale localisee produit ineluctablement au bout dâun certaintemps une onde de choc.
Ï
x
t
(x)
FIG. 6 â Diagramme caracteristique
6.5 Resolution des equations en eaux peu profondes.
Le systeme decrivant le mouvement en eau peu profonde, equation (25)peut sâecrire sous forme matricielle, comme dans lâequation (26) :(
htut
)+(
u hg u
)(hxux
)= 0 (29)
On determine les valeurs propres λ de la matrice A en resolvant lâequationdet(Aâ λ I) = 0, ce qui donne λ± = u±
âgh. Les vecteurs propres a gauche
correspondants (α±1 , α
±2 ) sont tels que :
(α±1 , α
±2)(u h
g u
)= λ±
(α±1 , α
±2)
Les composantes des vecteurs propres sont determinees a une constante pres.Posant α
±1 = â
g, on trouve α±2 = ±
âh. si bien que les deux vecteurs propres
sont :(â
g,â
h)
et(â
g,ââ
h).
Selon la theorie generale on multiplie lâequation (29) a gauche par lesvecteurs propres ligne, ou ce qui revient au meme, on multiplie les deux
29
lignes de lâequation (25) par les composantes de ces vecteurs propres pourensuite sommer ces deux lignes :
âght ±
âhut + (
âgu±
âhg)hx + (
âgh±
âhu)ux = 0
â âg(ht + λ±hx)±
âh(ut + λ±ux) = 0
Ce sont les deux contraintes sur les deux caracteristiques (C±) dâequationdx/dt = λ±. Il se trouve que ces contraintes possedent un facteur integrantevident. En effet divisant par
âh on isole les variables u et h et on a lâidentite :â
gh
dh± du = d(2â
gh± u)
valable quels que soient les differentielles du et dh et en particulier quand ilsâagit des derivees ât + λ±âx de h et u le long des caracteristiques (C±). Câestdire quâil existe deux invariants de Riemann :
I± = 2â
gh± u (30)
qui sont constants le long des caracteristiques correspondantes. Prosaıque-ment on verifie immediatement que lâequation (ât + λ±âx)I± = 0 se rameneaux contraintes ci-dessus. Le reste de la solution consiste a examiner la dispo-sition geometrique du reseau des caracteristiques, et tirer parti de la constancede I± pour calculer u et h pour toutes valeurs de (x, t).
6.6 Le probleme du bris du barrage.
Ce probleme est lâexemple le plus simple ou tout est exactement calcu-lable par la methode ci-dessus sans aucune difficulte. On suppose que pourt = 0 on a h = h0 et u = 0 pour x < 0 et h = u = 0 pour x > 0, câest adire quâon a un barrage de hauteur h0. A cet instant le barrage se brise et ilfaut determiner la solution pour t > 0. Les (Câ) ont une pente negative oupositive et les (C+) une pente positive toujours plus grande que celle des(Câ). La famille des (C+) coupe lâaxe des x sur x < 0 et donc lâinvariant deRiemann I+ = 2
âgh + u vaut la valeur constante 2
âgh0. Elle intersecte la
famille des (Câ) du fait de la superiorite de ses pentes. Comme 2â
gh â uest constant sur (Câ) a la fois u et h y sont constants, donc aussi λâ, si bienque les (Câ) sont des droites.
En particulier pour les caracteristiques (Câ) qui coupent x < 0 on aussiIâ = 2
âgh0, ce qui impose h = h0 et u = 0 dans toute cette zone, et aussi
que les (C+) y sont rectilignes. La derniere (Câ) de ce type est issue de z = 0
30
et a donc lâequation x = ââ
gh0t. Nous apprenons que pour x †ââ
gh0t ona toujours h = h0 et u = 0, câest a dire que la perturbation due au bris debarrage recule avec la vitesse maximale
âgh0 vers les x < 0.
Les autres caracteristiques (Câ) forment un âeventailâ de droites issuesde x = 0, t = 0, bordees par deux droites x = â
âgh0t et x = +ct ou c est
la celerite avec laquelle le front dâonde avance vers x > 0. Pour x > ct onnâa pas dâeau, h = 0, et juste sur le front dâonde on a u = c et h = 0. Lefront dâonde appartient donc a la derniere caracteristique (Câ) de pente c etdâinvariant Iâ = âc. Un point du front dâonde appartient aussi a la dernierecaracteristique (C+) issue de x = 0 et dâinvariant I+ = 2
âgh + u = c =
2â
gh0, ce qui permet dâidentifier c = 2â
gh0. Le front dâonde avance deuxfois plus vite vers les x > 0 quâil ne recule vers les x < 0.
Les droites (Câ) de lâ eventail ont lâequation x = λ t avec une pente λ
telle que ââ
gh0 †λ †2â
gh0. Cette pente vaut aussi u ââ
gh et dâautrepart on est necessairement sur une (C+) donc u + 2
âgh = 2
âgh0. Eliminant
u entre ces deux equations on obtient la forme de h comme fonction de x a tfixe, precisement :
h =19g
(2â
gh0 âxt)2
autrement dit la surface libre est une parabole variant de h = h0 au frontarriere a h = 0 au front avant. De plus le sommet de la parabole est sur lefront avant, câest a dire que la tangente est verticale en x = 2
âgh0t. De meme
on peut eliminer h pour obtenir :
u =23(â
gh0 +xt)
ce qui evolue de u = 0 au front arriere a u = 2â
gh0 au front avant comme ilconvient, en passant par la valeur curieuse u = 2
3
âgh0 a lâemplacement du
barrage x = 0.Dans la zone ou les (C+) intersectent lâeventail elles sâincurvent neces-
sairement. On peut les determiner : leur pente vaut u +â
gh = 4/3â
gh0 +x/(3t) = dx/dt. Cette equation sâintegre en x = 2
âgh0t + Ct1/3, ou C est
la constante dâintegration. On voit que les (C+) qui sont des droites depente
âgh0 pour x assez petit voient leur pente augmenter jusquâa devenir
paralleles a la caracteristique du front dâonde en traversant lâeventail.Il est remarquable que dans ce probleme aucune discontinuite nâest
generee, la seule curiosite etant lâexistence dâun eventail de caracteristiques(Câ) toutes issues de lâevenement âbris du barrageâ. Il est aussi remarquableque lâon obtienne la solution complete sans aucun calcul, simplement enanalysant la structure du diagramme de caracteristiques, voir le schema (7).
31
x=âct
Câ
Câ
Câ
C+
C+
x
t
x=2ct
FIG. 7 â Courbes caracteristiques.
6.7 La propagation dâun paquet dâondes.
Nous allons maintenant decrire la propagation dâun paquet dâondeslocalise, un âpulseâ dans la theorie en eau peu profonde, ce qui est le principalobjet de cette section. Nous supposons donc que a t = 0 lâeau a une hauteurconstante h = h0 sauf dans une region âX < x < +X ou h = h0 + η(x).En outre nous supposons que le pulse se propage de la gauche vers la droite.Comment exprimer cela ? Un point (x, t) loin de la perturbation appartient
(Câ)
x
A
B
C
D
âX +X
t
(C+)
FIG. 8 â Courbes caracteristiques.
a deux caracteristiques (C±) rectilignes de pentes respectives ±â
gh0, et
32
dâinvariants de Riemann 2â
gh0, câest a dire quâen un tel point h = h0 etu = 0. Câest pourquoi nous avons dessine les deux lignes x = ±X + t
âgh0
qui sont deux caracteristiques rectilignes (C+) issues de points ou h = h0et qui donc se propagent avec la celerite c0 =
âgh0. Il est possible que des
points issus deâX < x < +X se propagent plus vite que c0 et donc depassentla ligne x = X + c0t comme on le voit sur la figure (8) mais supposer que lepulse se deplace de gauche a droite câest supposer que tous les points telsque A, a gauche de x = âX + c0t ne sont pas atteints par la perturbation etque lâon y a donc u = 0 et h = h0. Câest cette hypothese qui fixe la solutionsuivante.
Elle implique que toute caracteristique (Câ) passe par un point tel que Ade la figure et donc possede un invariant de Riemann Iâ = 2
âgh0. Par la suite,
deux choses peuvent se produire : ou bien (Câ) passe par un point tel que Bet vient toucher lâaxe des x en un point Ο , et dans ce cas Iâ = 2
âgh(Ο)âu(Ο),
ou bien elle traverse completement la zone perturbee en se courbant, passepar les points tels que C, et redevient une caracteristique rectiligne de penteâc0 qui coupe lâaxe des x au dela de X ce qui est conforme avec la valeur 2c0de son invariant de Riemann. Finalement en un point tel que D en avant de lazone perturbee on a aussi u = 0 et h = h0 et des caracteristiques rectilignes.
Notant que tout Ο de [âX, X] appartient a une (Câ), on voit que notrehypothese de propagation de gauche a droite fixe en fait la valeur de lavitesse u(Ο) en fonction de la hauteur du pulse h(Ο). On va noter H(Ο) lafonction qui decrit la condition initiale, câest a dire la valeur de h(Ο) pour t = 0.On peut fixer H(Ο) de facon arbitraire, mais alors u(Ο) est completementdetermine. Evidemment ceci ne serait pas vrai si supposait une propagationa la fois a gauche et a droite, meme dans la theorie lineaire. En principelâequation de propagation est du second ordre et on peut fixer arbitrairementh(Ο) et u(Ο). Supposer un mouvement de gauche a droite câest prendre unereduction de lâequation a une equation du premier ordre, similaire a lâequationÏt+c(Ï)Ïx que lâon a etudiee plus haut, et de ce fait u(Ο) nâest plus une donneeindependante. Finalement, Iâ = 2
âgh(Ο) â u(Ο) = 2
âgh0 nous donne la
valeur de la vitesse :
u(Ο) = 2(â
gH(Ο)ââ
gh0)
Dans la section suivante, pour introduire lâequation de Kortewegâde Vriesqui est une equation du premier ordre decrivant un mouvement de gauche adroite, on se servira precisement de cette determination de la vitesse pourreduire le systeme de la theorie en eau peu profonde.
Il est maintenant aise de resoudre completement le systeme. Les ca-racteristiques (C+) issues de Ο â [âX, X] ont un invariant de Riemann
33
I+ = 2â
gH(Ο) + u(Ο) = 2â
gh + u et coupent les (Câ) dâinvariants deRiemann Iâ = 2
âgh0 = 2
âghâ u constants en des points tels que B et C. Il
en resulte que u et h sont constants sur ces caracteristiques (C+) donc lespentes λ+ = u+
âgh sont aussi constantes et toutes les (C+) sont rectilignes.
Puisque u et h sont constantes, on a h = H(Ο) et u = 2(â
gH(Ο) ââ
gh0).Finalement λ+ = u +
âgH(Ο) = 3
âgH(Ο) â 2
âgh0, et lâequation de (C+)
est x = Ο + λ+t, ce qui determine implicitement Ο comme fonction de (x, t).On peut aussi voir comment se courbent les (Câ) en des points tels queB. En effet on y a λâ = u â
âgh =
âgH(Ο) â 2
âgh0 a comparer avec la
pente non perturbee λâ = ââ
gh0. On voit que la pente augmente de la quan-tite
âgH(Ο) â
âgh0 > 0 donc les (Câ) se courbent vers le haut, et si elles
sortent de la zone perturbee câest avec une translation verticale. Resumonsnos resultats :
h = H(Ο)u = 2
âgH(Ο)â 2
âgh0
x = Ο + [3â
gH(Ο)â 2â
gh0]t(31)
Physiquement, il faut noter que la propagation produit, comme onle voit sur la figure (8) le meme genre de phenomene que dans le cas desondes de densite. Les caracteristiques (C+) issues des Ο ou H(Ο) est grandont une pente plus elevee que les caracteristiques ou H(Ο) est moindreet les rattrapent. Il en resulte que lâequation x = Ο + λ+t ne determineplus uniquement Ο connaissant x (a t donne) câest a dire quâil y a plusieurspoints initiaux Ο correspondant a des hauteurs H(Ο) differentes pour lameme position x. Intuitivement lâequation x = Ο + λ+t signifie que la partiede la vague de hauteur H(Ο) sâest propagee a la vitesse λ+ le long de lacaracteristique (C+) et sans aucune modification de sa hauteur. Le hautde la vague se deplace en gardant sa hauteur, mais plus rapidement que lebas. Rapidement il rattrape le bas qui etait parti avec un avantage, et il existeplusieurs solutions a lâequation x = Ο + λ+t. Evidemment ceci est impossible,la vague se brise.
Nous pouvons maintenant tirer quelques conclusions de lâetude de latheorie en eau peu profonde. Dâune part les caracteristiques (C+) sont enfait des lignes selon lequelles se propagent des perturbations de gauche adroite, et de meme les (Câ) sont des lignes selon lesquelles se propagent lesperturbations de droite a gauche. Dans cette theorie, il nây a pas de dispersionet attenuation du paquet dâonde, comme dans la theorie lineaire. En faitla hauteur reste constante sur chaque caracteristique. Par contre le pulse sedeforme inevitablement ce qui conduit a des singularites. Le fait experimentalque toutes les vagues ne se brisent pas prouve que la theorie en eau peuprofonde nâest pas satisfaisante. Le but de la section suivante est de montrer
34
quâon peut resoudre ce probleme, mais la solution est pire que le mal, parceque dans la theorie de Kortewegâde Vries, aucune vague ne se brise !
7 Solitons.
Nous presentons dâabord une justification de lâequation de KortewegâdeVries, suivie par la presentation de la solution a un soliton.
7.1 Equation de Korteweg â de Vries.
En 1838, J. Scott Russel observe dans un canal la propagation sansdeformation dâune onde avec une vitesse dependant de son amplitude : lesoliton. Mais ce nâest quâen 1895 que les Neerlandais D. Korteweg et G.de Vries expliquent lâexistence de cette onde solitaire par la theorie : uneequation traduisant la non-linearite et le phenomene de dispersion.
Nous partons de la theorie en eau peu profonde, dont nous allonsextraire les effets non lineaires a lâordre le plus bas, et que nous allons reduirea une equation decrivant purement une propagation de gauche a droite.Comme nous lâavons vu, dans ce cas la vitesse initiale est determinee voirlâequation (31) :
u = 2â
ghâ 2â
gh0 ℠0, h = h0 + η ℠h
La premiere des equations (25) sâecrit :
ht = ηt + uηx + (h0 + η)ux = 0
Utilisant notre expression de la vitesse et en particulier ux =gηxâ
g(h0 + η)nous pouvons completement eliminer u et obtenir une equation du premierordre pour η uniquement, decrivant la propagation de droite a gauche :
ηt + [3â
g(h0 + η)â 2â
gh0]ηx = 0 (32)
Notons que cette equation est tres similaire a lâequation des ondes dedensite, Ït + cÏx = 0, avec une celerite c qui nâest autre que la pente λ+ descaracteristiques (C+) que nous avons bien identifie a la vitesse de propagationdes perturbations de droite a gauche. Cette equation est la reduction desequations en eau peu profonde que nous recherchions. Il reste a la simplifieren gardant lâeffet non lineaire de dependance de la celerite en fonction de
35
lâamplitude au plus bas ordre. Pour cela on developpe la racine carree pour η
petit :
3â
g(h0 â η) = 3â
gh0(1 +η
h0)
12 = 3c0(1 +
12
η
h0)
On obtient la forme simplifiee de lâequation (32) :
ηt + c0(1â3η
2h0)ηx = 0 (33)
Nous voulons maintenant modifier cette equation pour y introduireles effets de la dispersion a lâordre le plus bas. Rappelons que nous sommestoujours dans lâhypothese dâune eau peu profonde, donc dâune longueurdâonde grande par rapport a h0. Nous avons vu que, dans ce cas, la theorielineaire predit une celerite c0 =
âgh0 tres peu dependante de la longueur
dâonde. En fait la relation de dispersion est Ï = c0kâ Îłk3, valable pour k petit,câest a dire λ grand. Une equation lineaire decrivant un mouvement de droitea gauche avec cette loi de dispersion est :
ηt + c0ηx + γηxxx = 0 (34)
ou lâon rappelle que lâon avait Îł = c0h20/6, ce qui veut dire que pour la vitesse
de groupe, vg = dÏ/dk = c0(1 â (kh0)2/3), le terme correctif est une trespetite correction dispersive si λ >> h0.
Il est donc naturel de modifier lâequation lineaire simple7ηt + c0ηx = 0
en y ajoutant, dâune part la petite correction non lineaire â(3c0ηηx)/(2h0)(petite si η/h0 << 1) et dâautre part la petite correction dispersive γηxxx.On obtient ainsi par combinaison des equations (33) et (34) lâequation deKortewegâde Vries :
ηt + c0
(1 +
3η
2h0
)ηx + γηxxx = 0 (35)
Cette equation admet une solution se propageant sans deformation, commenous allons le voir, et en fait se trouve etre une equation appartenant a touteune hierarchie dâequations dotees dâune structure extremement riche, sujetque nous nâaborderons pas.
7On peut douter de la legitimite dâintroduire des approximations dans une equation, no-tamment quand le plus petit terme non lineaire peut provoquer des singularites dramatiques,ainsi que nous lâavons vu. Dâautre part, il existe des theoremes sur le comportement dessolutions dâequations differentielles analytiques par rapport a une variation analytique desparametres, dont la consequence pour notre probleme est de rejeter les singularites au loin,et qui plus est toute la demarche des physiciens consiste bien a introduire des equationsapproximatives pour representer la complexite du phenomene reel.
36
7.2 Le soliton.
On se limitera a trouver la solution de cette equation pour un uniquesoliton se propageant a une vitesse U. Nous allons voir que U peut etre choisiarbitrairement, mais que la hauteur du soliton en depend, deux proprietesbien differentes de celles des solutions traditionnelles.
On pose η = h0ζ(X) avec X = xâUt. On a donc :
ηt = âh0UζâČ(X)
ηx = h0ζâČ(X)
ηxxx = h0ζâČâČâČ(X)
Ce qui nous donne, en reportant dans (35), avec Îł =c06
h20 :
16
h20ζ
âČâČâČ+
32
ζζâČâ(
Uc0â 1)
ζâČ= 0
En integrant :16
h20ζ
âČâČ+
34
ζ2 â
(Uc0â 1)
ζ + G = 0
ou G est une constante dâintegration. Puis en multipliant par ζâČ, pour ensuite
integrer et multiplier par 4 :
13
h20ζ
âČ2 + ζ3 â 2
(Uc0â 1)
ζ2 + 4Gζ + H = 0
ou H est une deuxieme constante dâintegration. Cette equations a exactementla meme forme quâun probleme de dynamique en dimension 1, et se resout
donc de meme. On isole ζâČ(
=dζ
dX
):
1â3
h0dζ
dX=
â2(
Uc0â 1)ζ2 â 4Gζ âH â ζ3
On en deduit :
X =â« h0â
3â2(U
c0â 1)ζ2 â 4Gζ âH â ζ3
dζ (36)
Cette integrale est une integrale elliptique, elle definit ζ comme une fonctionelliptique de X.
37
En fait nous ne sommes pas interesses par la solution generale, maispar une solution qui represente un pulse8 et donc telle que ζ sâannule pourx â ±â. Si lâon tient compte de cette condition dans les deux integrationsci-dessus, nous voyons que les constantes dâintegration G et H sont nulles.Mais alors ζ
2 se factorise sous le radical, qui passe du dege 3 au degre 1,si bien que lâintegrale cesse dâetre elliptique pour devenir trigonometrique.Posant α = 2(U/c0 â 1), lâintegrale (36) devient :
X =â«
h0
ζ
â3(α â ζ)
dζ
Cette integrale est elementaire, et on peut inverser ζ = ζ(X) :
ζ = αsech2
(â3α
4h20X
)=
α
cosh2â
3α
4h20X
(37)
Ce qui nous donne en revenant aux notations initiales :
η(x, t) =2h0(U
c0â 1)
cosh2
[â3( U
c0â1)
2h20
(xâUt)
] (38)
Comme nous lâavions annonce ceci represente une solution localisee, sedeplacant a la vitesse arbitraire U mais dont la hauteur maximale η0 (obtenuequand x = Ut) depend de U selon la formule :
η0 = 2h0(Uc0â 1)
Notons aussi que la largeur du soliton depend de U via le facteur dâechelledans le cosh2, de sorte que les solitons plus petits sont aussi plus larges, etenfin que les equations impliquent que U > c0, mais que U/c0 ne peut etrebeaucoup plus grand que 1, sinon η serait du meme ordre que h0.
Lâequation de Kortewegâde Vries etant non lineaire, il est hors de ques-tion de presenter des solutions a n solitons comme combinaison des solutionsa un soliton que nous avons presentees. Cependant, on peut produire dessolutions exactes, qui dans la limite t â ±â se presentent sous la forme den solitons largement separes et se deplacant chacun avec sa propre vitesse
8Pour les applications aux tsunamis, aux solitons optiques, etc. voir le site web :http ://people.deas.harvard.edu/ jones/solitons/solitons.html
38
Ui, et donc chacun dâentre eux ayant sa propre hauteur deduite de Ui par laformule ci-dessus. Dans un regime de temps intermediaires, la solution prendune forme complexe representant âlâinteraction des solitonsâ.
Ainsi donc dans une seule solution exacte se trouvent decrits nonseulement plusieurs solitons mais aussi toute lâhistoire de leur interaction.Il se trouve que les differents solitons presents dans les conditions initialesressortent inchanges en taille et vitesse dans lâetat final, le seul effet de lâinter-action etant dâintroduire des dephasages, câest a dire des retards. Ci-dessousnous presentons lâimage dâune collision de deux solitons, ou lâon voit le plusgrand rattraper le plus petit, une interaction se produire, et les deux solitonsemerger inchanges. Ces proprietes surprenantes sont dues a lâintegrabilite delâequation de Kortewegâde Vries, câest a dire le fait quâil existe une infinitede quantites conservees dans le mouvement, ce qui contraint les solitons agarder leurs proprietes individuelles.
FIG. 9 â Propagation de deux solitons.
39