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56 DIRT-TRACK DIRT-TRACK 57
MÁRQUEZ
S’il finit la superfinale au tas,
Marc Márquez fut le héros du
Superprestigio, collectionnant
les victoires de manches
et régalant le public par son
attaque à outrance.
Quel show !
21 h, superfi nale. Le Palau Sant
Jordi de Barcelone est à point.
Les 6 000 spectateurs sont en
transe, et hurlent leurs
encouragements à Marc
Márquez, qui tient la dragée haute au n° 1 mondial de
la discipline, l’Américain Brad Baker. Mais à deux tours
de l’arrivée, dans le premier gauche, les deux ténors
se percutent, et Márquez est éjecté de sa CRF 450.
Le champion du monde MotoGP s’envole, comme
quinze fois durant la saison 2013 (!), et s’écrase au sol
sur l’épaule gauche. Celle qu’il s’était déboîtée au
warm-up du GP de Silverstone. Tout le monde retient
son souffl e, même Brad Baker, qui se retourne de
dépit après ces dix tours d’un baston titanesque.
« Je ne voulais pas que ça se termine comme ça »,
témoignera-t-il à sa descente du podium.
Heureusement, ce diable de Márquez est solide, et
remonte illico sur sa machine, avant de s’en coller une
seconde, moins méchante, le tour d’après.
La superfi nale est perdue, et la logique est respectée :
C’est Brad “the Bullet” Baker qui a gagné. Mais comme
au GP d’Australie, où Márquez fut disqualifi é suite
à une erreur de son team, il a l’incroyable capacité de
zapper cette déconvenue pour rejoindre Baker dans
son tour d’honneur, lui serrer la pogne et saluer
le public. « De vraies qualités de leader, résumait le
vice-président du HRC Shuhei Nakamoto à Valence,
extrêmement rares à 20 ans. » Un Nakamoto qui a dû
transpirer en voyant son champion risquer l’hosto
à trois semaines des essais de Sepang. Mais Marc
Márquez a l’étoff e d’un héros, et il vient de le prouver
une nouvelle fois ce soir.
Un pur moment de rock’n’roll
Un quart d’heure après l’arrivée, Kenny Noyes, Tito
Rabat et Marc Márquez, couverts de sueur et de
mousseux, font face à une horde de journalistes pour
la conférence de presse. Ils sont hilares. « Où est passé
Brad Baker ? » questionne quelqu’un. « Il est en train de
discuter avec une des umbrella girls », s’esclaff e Marc
Márquez. Eclat de rire général. Les trois pilotes
présents n’en reviennent pas du panard qu’ils ont pris
et de l’intensité des bagarres en piste. « Tu t’es fait
mal ? », demandai-je à Marc. « Oui, un peu »,
grimace-t-il, avant d’éclater de rire, en faisant
comprendre qu’il plaisantait. « C’est vrai que la première
chose, c’est que tout le monde ait survécu, car le
dirt-track, ça peut être chaud. Mais c’est la course, et les
accrochages arrivent. Je suis super content qu’on ait pu
organiser cet événement, et qu’autant de pilotes de GP
aient répondu présent. Mais je veux une revanche contre
Brad l’an prochain ! »
ÁLES TRAVERS DE
DIRT-TRACKLE SUPERPRESTIGIO DE BARCELONEPar notre envoyé spécial Thomas Baujard, photos Juan Pablo Acevedo & TB
GoPro sur le casque,
hotshoe métallique sur la
botte gauche pour glisser
en appui, pas de frein
avant et équerre de la
mort: Márquez, la classe !
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DIRT-TRACKÉPREUVE OU COURSE
� Comme en GP, Márquez n’a pas été avare de fi gures en tout genre. Ici face à l’Hispano-Américain Kenny Noyes (9). � Bel exemple de fair-play entre Baker et Márquez avant le début de la Superfi nale. � Trois mécanos du staff MotoGP de Márquez bichonnent sa CRF 450. Ici, petite modif de pression à la pompe à pied. � Super ambiance entre les pilotes, qui avaient visiblement plaisir à se retrouver pour une bonne bourre sans pression. � Contrairement au dirt US, où le départ se fait sur la ligne avec des feux, les pilotes étaient lâchés en bout de piste au moyen d’une herse type cross.
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Brad, lui, envisage carrément d’apprendre l’Espagnol pour « mieux communiquer avec les locaux (et les locales…) » pour son second séjour hors des Etats-Unis en 2015. « Franchement, les pilotes de GP présents m’ont surpris par leur vitesse dans une discipline qui n’est pas la leur. Surtout Marc, qui était en passe de gagner jusqu’à ce qu’on se percute. Je voulais lui faire l’inter pour le bloquer en sortie de courbe, quand il a jeté sa moto d’un coup sur l’angle. Je n’ai pas pu l’éviter. Même sans cet incident, je pense que j’étais en mesure de gagner à la régulière, mais Marc a roulé vraiment fort. »
La passion du dirt-track« Brad Baker n’est pas le premier venu », explique le Texan Merle Sherb, instructeur au Boot camp de Colin Edwards, et conseiller spécial de Bradley Smith pour ce dirt-track. « Comme Kenny Roberts il y a trente ans, il vient de gagner le Grand National Championship aux USA, ce qui fait de lui le number one de la spécialité. Quartermile (400 m), half-mile (800 m), Indy mile
(1600 m, à 200 km/h sur des Harley XR 750 dépourvues de frein avant !) : c’est lui le meilleur. D’ailleurs, sur des tracés de référence comme Springfi eld, où ça roule trois secondes plus vite au tour grâce à la nature de la terre, à machines égales, il réalise les mêmes chronos que ses glorieux aînés : Scott Parker, Jay Springsteen et Chris Carr. Il a une équipe réduite au minimum, cinq personnes, mais elle est effi cace. Et un super senti de l’assiette de la moto, ce qui est primordial en dirt, car les conditions de piste changent tout le temps. Regarde, même ici, les teams de Márquez et Baker n’ont pas arrêté de bosser sur leur moto. »« Théoriquement, on est là pour s’amuser », précise Marc Márquez dans le parc coureurs à l’issue des essais. Mais quand on voit la moitié de son team de GP présent dans le minuscule enclos qui lui sert de box, on a du mal à le croire. « Il n’y a pas tant de préparation que ça sur la moto, assure Santi Hernández, son chef mécano. Regarde, le moteur n’est pas tapé, l’échappement est d’origine… »
La bourre d’anthologie
que se sont livré Baker et
Márquez dix tours durant
a enfl ammé le Palau Sant
Jordi. On en veut encore !
Victimes de la mode,
Maverick Viñales
(dragon), Alex Rins
(casino) et Aleix
Espargaró (Barbie)
soignent leur look.
25 manches en trois heures : les spectateurs n’ont même pas eu le temps d’aller aux WC !
LE SUPERPRESTIGIO DE BARCELONE
SPORT 59
Johann Zarco a relevé le défi (contrairement à Jorge Lorenzo, Pol Espargaró, Valentino Rossi…)Forçat de l’entraînement et
déterminé tel Arnaud Vincent (qu’on avait vu briller il y a une dizaine d’années sur une 500 CR au Guidon d’or à Bercy),
Johann Zarco faisait ses débuts en dirt-track
à l’occasion de ce Superprestigio. « Je ne m’amuse pas parce que je suis en 14”1, je m’amuserai quand je serai en 13 ! », bougonnait-il aux essais, alors qu’il n’était qu’à six dixièmes de la pole… et handicapé par une bonne gastro. Il atteindra tout de même les phases finales de la catégorie GP,
contrairement à des pointures comme Bradley Smith ou Jonas Folger. Son coach Laurent Fellon lui avait mitonné une YZF 450 aux petits oignons : « Yamaha nous a fourni la moto. C’est Youri, de Tech 3, qui a préparé les suspensions. J’ai installé des coupelles pour ramener l’angle de colonne de 27,5 à 24° pour gagner en maniabilité et éviter que l’avant ne croise. Pot Arrow, plaquettes arrière CL Brakes et biellette d’amorto rallongée. On perd 2 cm de hauteur de selle, et on gagne en motricité. C’est Alzamora qui nous a invités. Il était chaud pour qu’on roule, mais moins pour qu’on s’entraîne sur leur piste de dirt avant la course ! C’est des malins, ces Espagnols ! »
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La chaude piste
Construire une piste de dirt-track de 200 m de long dans une enceinte type Bercy, c’est un sacré défi technique. « Aux USA, les organisateurs ont
beau prendre le même type de terre d’une année sur l’autre, ils n’arrivent pas toujours au même résultat en termes de grip ou de tenue », explique Kevin Clark, le spectaculaire flagman (porteur du drapeau
à damier) officiant sur le championnat US et dépêché au Superprestigio. « Tu dois avoir un certain pourcentage de glaise, de sable, de gravier, de sel (pour que l’humidité reste dans le sol), et surtout ne pas foirer l’arrosage pour que la piste soit bonne. Ce matin aux essais, non seulement il y avait une poussière de fou, mais en plus, des crevasses étaient en train de se former. Cependant, l’organisation s’est dépouillée en allant chercher du sel et en arrosant abondamment avant les courses, ce qui a donné un beau spectacle. »
Johann Zarco, ici
encadré par Tito Rabat
et Alex Rins, n’a pas fait
semblant, et attaqué
jusqu’à fi nir au tas,
comme Márquez.
Un angle de fou, de la
souplesse, une recherche
de motricité à l’extérieur
et une préhension
du guidon atypique :
technique, ce Baker.
DIRT-TRACKLE SUPERPRESTIGIO DE BARCELONE
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Il n’empêche qu’entre les manches, les deux mécanos qui l’assistent vont jouer sur la précharge de l’amortisseur, la pression des pneus, et même monter le Michelin pluie avant à l’envers pour obtenir plus de grip.Ça marche, puisque Márquez, qui, outre son talent, a sa piste d’entraînement de dirt à Ruefa, a fait main basse sur trois des quatre fi nales regroupant les pilotes de GP. Tandis que Baker survole la catégorie
Open réservée aux spécialistes du dirt. « Il n’est pas dépaysé par le format de la piste, reprend son compatriote Merle Sherb, car l’hiver, il court dans ce type de stade. Mais il faut tout de même se faire au type de terre utilisé ici (cf. encadré). » Brad est d’accord : « Lors des essais, c’était trop sec, donc glissant et extrêmement poussiéreux, à tel point que mon asthme a commencé à me gêner. Après arrosage, en course, la piste est devenue plus prévisible, mais aussi plus lente ,
Wayne Rainey sur Twitter : « Profi te de Barcelone, Brad, et tords les tous. » Mission accomplie ! Wayne Rainey sur Twitter : Wayne Rainey sur Twitter : Wayne Rainey « Profi te de Barcelone, Brad, et tords les tous. » Mission accomplie ! Brad, et tords les tous. » Mission accomplie ! Brad, et tords les tous. »
� Avec un départ de course toute les trois minutes entre les réfections de piste, il y a eu des étincelles. Ici, c’est le pilote de vitesse espagnol Xavi Fores qui s’étale devant le pilote de speedway anglais Christian Iddon (21), et les pilotes de GP Rins (42), Simon et Bautista. � Les fi ls de Wayne Gardner, Remy et Lucas, on mis du gaz chez les juniors. Remy, l’aîné, termine deuxième. Tous les juniors étaient chapeautés par Kenny Noyes, qui possède une école de dirt-track sur le circuit d’Aragón. � Les djeuns roulaient tous sur des Kawa 140 4-T qu’on trouve aux USA et en Asie. Ici le vainqueur Gerard Riu (2) devant Remy Gardner (87). � Les fans de Marc Márquez, Catalans comme leur idole, avaient fait le déplacement. Même les plus jeunes !
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DIRT-TRACKLE SUPERPRESTIGIO DE BARCELONE
ce qui nous a conduits à adapter le braquet. Crucial, car durant les 13 secondes du tour, on reste sur le second rapport. »Second rapport qu’il emmenait systématiquement au rupteur juste avant de balancer la moto en courbe, preuve d’une démult’ pile-poil. Car Brad connait toutes les fi celles. Ainsi, c’était le seul pilote dont la 450 KTM disposait d’un pot court débouchant sous le moteur « pour plus de souplesse et de couple à bas régime. » Le plus effi cace à l’accélération malgré des trajectoires plus amples que ses rivaux en sortie, on sentait Baker réglé comme du papier à musique et prêt à manger du Márquez dès sa dernière manche Open, alors qu’il avait roulé moitié moins que l’Espagnol en série. « Quatre manches, soit 40 tours en tout seulement, pas évident de garder sa concentration », concédait l’Américain, avec une pointe d’intox tant on le sentait en confi ance.
Pourtant, c’est bien Marc Márquez, plus à l’aise pour jaillir d’une herse de motocross que d’une grille de départ de MotoGP, qui réalisait le holeshot.
Le MotoGP sauce dirt-trackHyper agressif sur sa CRF 450, et d’une mobilité sans égale pour trouver l’adhérence, comme sur sa RCV de GP, Márquez contient le number one deux tours durant avant de se faire faire l’exter. Mais il va direct au contact pour tasser Brad et conserver son leadership. Quand Baker repasse, il mise sur des trajectoires hyperserrées et met un angle impressionnant en entrée de courbe pour remonter, harceler, et repasser son rival. Jusqu’à ce que Brad le percute et gagne. Mais Márquez s’en fi che, tant il s’est régalé : « Au freinage, c’est le contraire du MotoGP : tu n’as pas de frein avant, et tu dois stopper la moto par un petit coup de frein arrière qui la met en travers. »
Pourtant, si Márquez doit fi nalement s’incliner face à Baker, il reste le véritable héros du show. « Avec le développement de l’électronique, jusqu’à Casey Stoner, on pensait qu’il n’était plus possible d’être le plus rapide en GP en faisant glisser sa moto à l’accélération, comme on le faisait sur nos 500 2-temps, témoignait récemment le triple champion du monde Kenny Roberts. Márquez a repris ce fl ambeau, et ses sorties de virage serré en travers comme ses freinages en glisse font aujourd’hui la diff érence sur bitume. » Nul doute que grâce au dirt, que Márquez pratique à fond lors de l’intersaison, il dispose de l’entraînement idéal. Ce qui
va lui permettre d’attaquer les essais de Sepang 2014 aff ûté comme un scalpel début février.Brad Baker pense qu’en matière de dirt aussi, les pilotes de GP vont s’améliorer, et lui donner davantage de fi l à retordre en 2015. « Et Valentino Rossi, il était où ? », demande Moto Journal à Marc Márquez, qui a appelé personnellement ses petits camarades à venir tourner en rond. « On s’en était vaguement parlé il y a quelques mois, mais il m’a dit qu’il était en vacances. »L’an prochain, Valentino, il va falloir que tu quittes ton ranch pour venir défi er Brad Baker ! ●
RÉSULTATSJUNIOR1. Gerard Riu (E) ; 2. Remy Gardner (Aus) ; 3. Genis Gelada (E) ; 4. Luca Gardner (Aus) ; 5. Salvador Gelada (E) tous sur Kawasaki…OPEN1. Brad Baker (USA, KTM) ; 2. José Pedro Gómez (E, Yamaha) ; 3. Merle Scherb (USA, Yamaha) ; 4. Dani Ribalta (E, Kawasaki) ; 5. Tom Neave (GB, Honda)…CATÉGORIE SUPERPRESTIGIO1. Marc Márquez (E, Honda) ; 2. Tito Rabat (E, Honda) ; 3. Kenny Noyes (USA, Suzuki) ; 4. Aleix Espargaró (E, Yamaha) ; 5. Lorenzo Baldasarri (I, Kawasaki)…SUPERFINALE1. Brad Baker ; 2. Tito Rabat ; 3. Kenny Noyes ; 4. Aleix Espargaró ; 5. José Pedro Gómez ; 6. Merle Scherb ; 7. Dani Ribalta ; 8. Marc Márquez.
Kevin Clark,
spectaculaire fl agman
sur les courses US, salue
la victoire du home boy.
Brad Baker : « Marc Márquez est l’une de mes idoles. C’était trop bon de se battre contre lui. »Brad Baker : « Marc Márquez est l’une de mes idoles. C’était trop bon de se battre contre lui. »
� Pour le plaisir, une dernière photo de Márquez, repose-pied par terre… Ce type défi e les lois de l’adhérence !� Brad encadré par Rabat et Noyes sur le podium de la superfi nale. Et rejoint par Marc Márquez… qui fut à deux doigts de le taxer.
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