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Le nématode des Citrus, Tylenchulus semipenetrans Cobb, est un nématode semi-endoparasite sédentaire in- féodé aux racines des Citrus. Ce nématode provoque plusieurs dégâts, principalement une perte de vigueur des plantes, des chloroses, une diminution de la surface foliaire, une défoliation et des die-back (Kallel et Abdel- wahed, 2004). Ce parasite associé aux racines du bigara- dier, porte-greffe le plus utilisé dans la région méditerra- néenne, est largement distribué dans le monde, dans le bassin méditerranéen et dans la plupart des vergers du Cap bon principale région agrumicole en Tunisie qui en sont infestés. Plusieurs moyens de lutte ont été étudiés contre ce ravageur. A cet égard, la lutte chimique a été considérée longtemps le seul moyen pour diminuer la population des nématodes phytoparasites en général. Cependant, elle est difficile à mettre en œuvre sur les plantes pé- rennes tel que les Citrus, surtout que les matières actives sont incapables d’éradiquer le parasite dans le sol étant donné qu’elles sont inefficaces contre les œufs des né- matodes. De plus, elle affecte considérablement le po- tentiel biotique des micro-organismes utiles du sol étant donné, son large spectre d’action. Par ailleurs, les rési- dus chimiques qui persistent dans les sols traités se sont avérés nocifs pour l’environnement, la santé humaine et animale. La reconversion des vergers de Maltaise dans la région du Cap bon, où l’infestation par le nématode est généralisée malgré la production de plants indemnes de la pépinière, n’est possible que par l’utilisation de porte greffes résistants tel que le Poncrius trifoliata (Kal- lel et al., 2006) ou certains de ces hybrides et/ou la mise en œuvre des moyens de lutte biologique durable (Siko- ra et Schuster, 1989). La connaissance des ennemis na- turels du nématode permet de concevoir dans les ver- gers infestés une stratégie de lutte à la fois efficace et respectueuse de l’environnement, dans le but de dimi- nuer la population de nématode au dessous du seuil de tolérance de l’arbre. A coté de la bactérie hyperparasite Pasteuria (Fattah et al., 1989; Walter et Kaplan, 1990; Elekçioglu, 1995; Sorribas et al . , 2000; Gené et al ., Nematol. medit. (2010), 38: 135-146 135 COMPORTEMENT DE LA COMMUNAUTÉ DES CHAMPIGNONS PRÉDATEURS ISOLÉE DANS LA RHIZOSPHERE D’AGRUMES INFESTÉE PAR TYLENCHULUS SEMIPENETRANS S. Kallel 1 et M. Labiadh Institut National Agronomique de Tunisie, 1087 Mahrajène, Tunisie Résumé. Douze souches de champignons prédateurs isolés à partir de la rhizosphère des arbres des Citrus infestés par Tylenchulus semipenetrans ont été identifiées et évaluées sur leur capacité de croissance, leur activité prédatrice et leur interaction avec les ra- cines des Citrus. L’étude montre que les espèces Arthrobotrys oligospora, A. conoides, A. musiformis, les trois souches du genre Meristacrum et Monacrosporium rutgeriensis ont une croissance rapide alors que A. dactyloides et Monacrosporium cionopagum ont une croissance lente et ceci à différentes températures testées 16,5, 20, 25 et 30 °C. Seules les deux souches de Meristacrum SKAN MC et MCCB ont pu croître à la température extrême de 35 °C. En outre, M. cionopagum, a montré le meilleur pourcentage de capture à 25 °C, en effet il a pu capturer plus de 80% de larves de T. semipenetrans en 72 heures. Par ailleurs, les racines des Ci- trus, ont montré un effet attractif sur la vitesse de croissance de la majorité des champignons prédateurs isolés (les Meristacrum SKAN MC, MCCB, les deux souches A. conoides RGA, C, A. oligospora LA, A. dactyloides ADCB et M. cionopagum CBM). Mots-clés: Citrus sp., nematode des Citrus, antagonistes naturels, lutte biologique. Summary. Behaviour of the community of nematode trapping fungi isolated from the rhizosphere of Citrus naturally infested with Ty- lenchulus semipenetrans. Twelve strains of nematode trapping fungi were isolated from the rhizosphere of Citrus naturally infest- ed by Tylenchulus semipenetrans. The fungi were identified and evaluated for their growth ability, their predation activity and their interaction with Citrus roots. The study showed that the fungus species Arthrobotrys oligospora, A. conoides, A. musiformis, three strains of the fungus Meristacrum sp. and Monacrosporium rutgeriensis grew rapidly, while A. dactyloides and Monacrospori- um cionopagum had slow growth at 16,5, 20, 25 and 30 °C. Only two strains of Meristacrum (SKAN MC and MCCB) grew at the extreme temperature of 35 °C. Monacrosporium cionopagum gave the highest percentage (80%) capture of the second stage juve- niles of T. semipenetrans after 72 hours at 25 °C. Further, the roots of Citrus affected the growth speed of the majority of the ne- matode trapping fungi isolated: Meristacrum (SKAN MC, MCCB), A. conoides (RGA, C), A. oligospora (LA), A. dactyloides (AD- CB) and M. cionopagum (CBM). Keywords: Biological control, Citrus sp., Citrus nematodes, natural antagonists. 1 Auteur correspondant, e-mail: Kallel.sadreddine@inat. agrinet.tn

PAR TYLENCHULUS SEMIPENETRANS

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Le nématode des Citrus, Tylenchulus semipenetransCobb, est un nématode semi-endoparasite sédentaire in-féodé aux racines des Citrus. Ce nématode provoqueplusieurs dégâts, principalement une perte de vigueurdes plantes, des chloroses, une diminution de la surfacefoliaire, une défoliation et des die-back (Kallel et Abdel-wahed, 2004). Ce parasite associé aux racines du bigara-dier, porte-greffe le plus utilisé dans la région méditerra-néenne, est largement distribué dans le monde, dans lebassin méditerranéen et dans la plupart des vergers duCap bon principale région agrumicole en Tunisie qui ensont infestés.

Plusieurs moyens de lutte ont été étudiés contre ceravageur. A cet égard, la lutte chimique a été considéréelongtemps le seul moyen pour diminuer la populationdes nématodes phytoparasites en général. Cependant,elle est difficile à mettre en œuvre sur les plantes pé-rennes tel que les Citrus, surtout que les matières actives

sont incapables d’éradiquer le parasite dans le sol étantdonné qu’elles sont inefficaces contre les œufs des né-matodes. De plus, elle affecte considérablement le po-tentiel biotique des micro-organismes utiles du sol étantdonné, son large spectre d’action. Par ailleurs, les rési-dus chimiques qui persistent dans les sols traités se sontavérés nocifs pour l’environnement, la santé humaine etanimale. La reconversion des vergers de Maltaise dansla région du Cap bon, où l’infestation par le nématodeest généralisée malgré la production de plants indemnesde la pépinière, n’est possible que par l’utilisation deporte greffes résistants tel que le Poncrius trifoliata (Kal-lel et al., 2006) ou certains de ces hybrides et/ou la miseen œuvre des moyens de lutte biologique durable (Siko-ra et Schuster, 1989). La connaissance des ennemis na-turels du nématode permet de concevoir dans les ver-gers infestés une stratégie de lutte à la fois efficace etrespectueuse de l’environnement, dans le but de dimi-nuer la population de nématode au dessous du seuil detolérance de l’arbre. A coté de la bactérie hyperparasitePasteuria (Fattah et al., 1989; Walter et Kaplan, 1990;Elekçioglu, 1995; Sorribas et al., 2000; Gené et al.,

Nematol. medit. (2010), 38: 135-146 135

COMPORTEMENT DE LA COMMUNAUTÉ DES CHAMPIGNONS PRÉDATEURS ISOLÉE DANS LA RHIZOSPHERE D’AGRUMES INFESTÉE

PAR TYLENCHULUS SEMIPENETRANS

S. Kallel1 et M. Labiadh

Institut National Agronomique de Tunisie, 1087 Mahrajène, Tunisie

Résumé. Douze souches de champignons prédateurs isolés à partir de la rhizosphère des arbres des Citrus infestés par Tylenchulussemipenetrans ont été identifiées et évaluées sur leur capacité de croissance, leur activité prédatrice et leur interaction avec les ra-cines des Citrus. L’étude montre que les espèces Arthrobotrys oligospora, A. conoides, A. musiformis, les trois souches du genreMeristacrum et Monacrosporium rutgeriensis ont une croissance rapide alors que A. dactyloides et Monacrosporium cionopagum ontune croissance lente et ceci à différentes températures testées 16,5, 20, 25 et 30 °C. Seules les deux souches de Meristacrum SKANMC et MCCB ont pu croître à la température extrême de 35 °C. En outre, M. cionopagum, a montré le meilleur pourcentage decapture à 25 °C, en effet il a pu capturer plus de 80% de larves de T. semipenetrans en 72 heures. Par ailleurs, les racines des Ci-trus, ont montré un effet attractif sur la vitesse de croissance de la majorité des champignons prédateurs isolés (les MeristacrumSKAN MC, MCCB, les deux souches A. conoides RGA, C, A. oligospora LA, A. dactyloides ADCB et M. cionopagum CBM).

Mots-clés: Citrus sp., nematode des Citrus, antagonistes naturels, lutte biologique.

Summary. Behaviour of the community of nematode trapping fungi isolated from the rhizosphere of Citrus naturally infested with Ty-lenchulus semipenetrans. Twelve strains of nematode trapping fungi were isolated from the rhizosphere of Citrus naturally infest-ed by Tylenchulus semipenetrans. The fungi were identified and evaluated for their growth ability, their predation activity andtheir interaction with Citrus roots. The study showed that the fungus species Arthrobotrys oligospora, A. conoides, A. musiformis,three strains of the fungus Meristacrum sp. and Monacrosporium rutgeriensis grew rapidly, while A. dactyloides and Monacrospori-um cionopagum had slow growth at 16,5, 20, 25 and 30 °C. Only two strains of Meristacrum (SKAN MC and MCCB) grew at theextreme temperature of 35 °C. Monacrosporium cionopagum gave the highest percentage (80%) capture of the second stage juve-niles of T. semipenetrans after 72 hours at 25 °C. Further, the roots of Citrus affected the growth speed of the majority of the ne-matode trapping fungi isolated: Meristacrum (SKAN MC, MCCB), A. conoides (RGA, C), A. oligospora (LA), A. dactyloides (AD-CB) and M. cionopagum (CBM).

Keywords: Biological control, Citrus sp., Citrus nematodes, natural antagonists.

1 Auteur correspondant, e-mail: Kallel.sadreddine@inat. agrinet.tn

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2005), plusieurs champignons parasites et prédateurssont associés au nématode des Citrus (Stirling et Man-kau, 1977; Walter et Kaplan, 1990; Gené et al., 2005).Les Myzocytium, Rhirophidium, Meria coniospora (Stir-ling et Mankau, 1977), Haptoglossa heterospora, Catena-ria anguillulae sont les principaux champignons para-sites des larves de T. semipenetrans. Par contre, Paecilio-myces lilacinus, P. marquandii et Pochonia clamydosporiasont liés aux œufs du nématode (Walter et Kaplan,1990; Gené et al., 2005). Les champignons prédateursde T. semipenetrans les plus fréquents, appartiennentaux genres Arthrobotrys (A. conoides, A. dactyloides, A.oligospora, A. arthrobotryoides, A. javanica, A. superba etA. musiformis), Monacrosporium (M. gephyropagum) etDactylaria (Stirling et Mankau, 1977; Walter et Kaplan,1990; Gené et al., 2005). Etant donné, qu’après l’éclo-sion, la juvénile (J2) de T. semipenetrans peut rester plusde 2 semaines dans le sol avant d’infester les racinesnourricières. Les champignons prédateurs lorsqu’ilssont actifs paraissent les plus intéressants pour diminuerl’inoculum du nématode dans le sol. Les champignonsprédateurs se développent en tant que saprophytes grâ-ce à leurs mycéliums végétatifs et en tant que parasitesen formant des structures pour piéger les nématodescomme les anneaux constricteurs et les hyphes adhésifs.Cependant, l’efficacité de capture est tributaire de plu-sieurs facteurs principalement les facteurs abiotiquestels que la température, le pH et la salinité (Kallel et al.,2008) et les facteurs biotiques notamment les antago-nistes du sol (Labiadh et Kallel, 2008). Tous les travauxeffectués sur la rhizosphère des arbres des Citrus infes-tés par le nématode se sont restreints à des études des-criptives des microorganismes associés à T. semipene-trans sans aborder les interactions entre ces champi-gnons et les autres organismes du sol affectant leurs ac-tivités. C’est dans ce cadre que s’inscrit notre étude, quia pour but d’étudier l’activité des ennemis naturels duT. semipenetrans, principalement les champignons pré-dateurs se trouvant dans la rhizosphère des Citrus, afinde comprendre l’équilibre entre les antagonistes et T.semipenetrans dans la rhizosphère des Citrus. Pour cefaire notre travail s’intéresse à deux grands volets, lepremier comportera l’étude de la croissance et l’activitéprédatrice des souches de champignons et le deuxièmeportera sur l’étude de leur interaction avec les racinesdes Citrus.

MATÉRIELS ET MÉTHODES

Culture et origines des deux souches. Les champi-gnons faisant l’objet de cette étude ont été isolés de larhizosphère des Citrus, à partir de trois biotopes diffé-rents des régions agrumicoles de la Tunisie, le Cap bonsitué au Nord Est, Ras El djebel au Nord et le Sahel àl’Est de la Tunisie. Ces champignons sont maintenus aulaboratoire de l’I.N.A.T sur un milieu gélosé Corn MealAgar (CMA) (8,5 g de Corn Meal Agar et 8,5 g d’agar

dans un litre d’eau distillée). Les souches de champi-gnons sont repiquées sur milieu CMA, sous hotte stéri-le, en prélevant une conidie sous loupe binoculaire avecune aiguille portant à son extrémité un bout de gélose(B’Chir et Namouchi, 1988). Les boites sont maintenuesà l’étuve sous une température de 25 °C. Au bout dequelques jours, le champignon envahit toute la boite.Cette technique est répétée au moins une fois par moispour garder de jeunes souches pour les essais.

Isolement des champignons de la rhizosphère. Leséchantillons prélevés de la rhizosphère des Citrus sonthomogénéisés au laboratoire par agitation et malaxagedans le sac de plastique qui a servit à la conservation.Des échantillons de sol et de racine de bigaradier infes-tés par T. semipenetrans sont prélevés séparément à l’ai-de d’une spatule désinfectée et déposés au milieu desboites de Pétri de 85 mm contenant un milieu d’eau gé-losé (WA).

Pour chaque parcelle trois boites contenant du sol ettrois boites contenant des racines constituent les répéti-tions. Après quelques jours, les hyphes mycéliens deschampignons croissent, les œufs de T. semipenetrans éclo-sent et les juvéniles du nématode à coté des nématodesbactériophages se déplacent sur l’eau gélosé. Les champi-gnons prédateurs forment des pièges qui capturent lesnématodes et des conidiophores qui supportent des coni-dies. Les conidies situées sur des conidiophores émisd’un piège capturant les juvéniles de T. semipenetranssont prélevée et déposées sur milieu CMA. Différentessouches de champignons prédateurs sont alors purifiéespar des repiquages successifs sur des boites de CMA. Àpartir de la rhizosphère de Citrus infestées par T. semipe-netrans, douze souches de champignons prédateurs ontété isolées, appartenant aux genres Arthrobotrys, Mona-crosporium et Meristacrum, et des champignons parasitesappartenant au genre Paecilomyces et Myzocytium.

Identification des champignons. Les douze souches dechampignons prédateurs sont identifiées par des carac-tères morphologiques et morphométrique sur des pré-parations microscopiques colorées, conformément à laclé d’identification établit par Peloille (1979). La tech-nique de coloration consiste à mettre un bout de gélosed’une culture du champignon sur la lame puis, unegoutte de bleu coton est déposée, l’objet est par la suitecouvert par une lamelle. La préparation est ensuite dé-posée sur une plaque légèrement chauffée afin de fairefondre la gélose permettant l’observation sous micro-scope. La taille du conidiophore, le nombre de conidiesportées sur le conidiophore et l’aspect du conidiophoreont été pris en considération, ainsi que la longueur, lalargeur et le nombre de cellules contenu dans les coni-dies mais aussi la taille des chlamydospores et le type depiégeage élaboré par le champignon. Les caractéris-tiques morphométriques des souches ont été examinéeset mesurées à l’aide d’un microscope OLYMPUSAX9602.

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Effet de la température sur la croissance des champi-gnons. La croissance des différentes souches de champi-gnons a été mesurée aux températures de 16,5 °C, 20 C,25 °C, 30 °C et 35 °C. Les différentes souches sont ense-mencées par la technique de repiquage monoconoidalesur un milieu CMA. Cinq boites de Pétri renfermant uneconidie de chaque souche de champignon sont ensuiteincubées à la température testée. Le diamètre des hyphesest mesuré tous les jours. Pour les températures ex-trêmes de 35 °C, une rondelle de milieu CMA contenantl’hyphe de 9 mm de diamètre prélevée par un emporte-pièce, de chaque champignon prédateur a été déposéeau milieu de la boite de Pétri contenant un milieu CMA.Le champignon est considéré inhibé lorsque l’éclosiondes conidies ou la croissance mycélienne est arrêtée pen-dant les 9 premiers jours d’incubation. La souche dechampignon prédateur est alors transférée à 25 °C et lediamètre des hyphes est mesuré journalièrement.

Efficacité de capture des champignons prédateurs. L’ef-ficacité de piégeage des champignons prédateurs a étéévaluée sur sept espèces de champignons CBM, MS,RGA, LAT, MCRJ, ARJ et ADCB. Le taux de captureest évalué par l’inoculation de boites de Pétri de 50 mmde diamètre contenant un milieu WA, complètement oc-cupé par le champignon prédateur, avec 0,5 ml de sus-pension contenant environ 50 juvéniles de T. semipene-trans. Les répétitions sont constituées de cinq boite dePétri pour chaque champignon. Le suivi du taux decapture se fait toutes les 48 heures par le comptage desnématodes capturés, des nématodes immobiles et desnématodes libres.

Les juvéniles faisant l’objet de cette étude ont été ex-traites à partir des masses d’œufs de T. semipenetransprélevées à l’aide d’une aiguille à partir de racinesd’arbres de bigaradier provenant de vergers infestés dela région du Cap Bon (Nabeul). Les masses d’œufs denématode sont ensuite placées dans un tamis à maillesde 1 mm sur une double épaisseur de papier cellulo-sique; les tamis eux-mêmes ont été disposés dans desboîtes de Pétri de 90 mm de diamètre contenant del’eau distillée puis mis à incuber à 25 °C. Les J2 émer-geant après les premières 48 heures ont été écartées. LesJ2 fraîchement éclos après les 48 heures suivantes ontété récupérées.

Attractivité des racines de Citrus aurantium aux cham-pignons prédateurs. Une rondelle de milieu CMA conte-nant l’hyphe de 9 mm de diamètre prélevée à l’emporte-pièce, de chaque champignon prédateur a été déposéeséparément, au milieu d’une boite de Pétri contenant unmilieu WA. Dans cette même boite de Pétri, de part etd’autre du bout d’hyphe, un bout de radicelle de biga-radier de 30 mm de longueur a été déposé alors quel’autre coté reçoit un bout de plastique de même lon-gueur. Une fois déposé sur le milieu gélosé, une faibleforce est assignée avec une pince de manière à ce que laradicelle ou le morceau de plastique soit intimement en

contact avec le milieu. Le rayon de l’hyphe du champi-gnon prédateur est mesuré de chaque coté tous les 24heures.

Les racines utilisées dans cette étude ont été obte-nues à partir des graines de bigarades prélevées au moisde mars 2008 de la région du Cap bon. Les fruits sonttrempés pendant trois heures dans de l’eau de Javel à2%. Puis, les graines ont été récupérées et lavées dansde l’eau distillée stérile. Ces graines ont été ensuitedésinfectées dans une solution de CaOCl à 35 g/litred’eau distillé stérile pendant 18 heures. Après désinfec-tion, les graines ont été relavées plusieurs fois dans del’eau distillée stérile. Les graines de bigaradier ont étédisposées dans des boites de Pétri sur du papier filtreWhatman imbibé d’eau distillée stérile. Pendant la pé-riode de germination, seules les boites de Pétri conte-nant des graines saines ont été gardées. Après 46 jours,les graines germées ont été prélevées et les radicelles de30 mm de longueur de chaque graine renfermant lacoiffe et la zone pilifère ont été découpées sous flux la-minaire avec une lame stérile.

Occupation de la rhizosphère par les champignons pré-dateurs. A la fin de la croissance des différentes espècesde champignons prédateurs, des morceaux de racines debigaradier, issues du même lot ayant servi à l’essai précé-dent, ont été déposés dans des boites de Pétri. Après 7 et15 jours, les racines ont été observées et prélevées puisfixées à la Navachine, déshydratées à l’éthanol et inclusesdans de la paraffine. Des coupes longitudinales de 16 à20 µm d’épaisseur collodionnées sont colorées au Héma-toxyline et au Picro indigo carmin (Kallel et al., 2005)puis montées entre lames et lamelles dans du baume deCanada. L’observation des différentes coupes histolo-giques a été réalisée sous microscope.

Analyses statistiques. Les données chiffrées sont ana-lysées par le logiciel SPSS. Les moyennes relatives à lacroissance des champignons à différentes températures(16,5, 20, 25, 30 et 35 °C) sont comparées par le test deDuncan après l’analyse de la variance à la probabilité deP = 0,05. Les valeurs de taux de capture sont préalable-ment transformées par la fonction Arc Tangente puissoumises à l’analyse de la variance et une comparaisonmultiple de moyenne par le test Student-Newman-Keuls(SNK) à la probabilité de P = 0,05. Les données rela-tives à l’attractivité des racines sont soumises au test Tde Student au seuil de 0,05.

RESULTATS

Identification des champignons. Les mesures morpho-métriques et le système de piégeage ont permis de mon-trer que les souches appartiennent au genre Arthrobotrys(A. musiformis, A. oligospora, A. dactyloides, A. conoides),au genre Monacrosporium duquel nous avons isolé deuxsouches, M. rutgeriensis et M. cionopagum, et trois

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souches du genre Meristacrum. Les différentes souchesde champignons prédateurs de nématodes, isolées de larhizosphère des Citrus de différentes régions agrumicolede Tunisie (Tableau I), sont déposées sous le code de ARJpour A. musiformis, LAT et LA pour A. oligospora, AD etADCB pour A. dactyloides, RGA et C pour A. conoides,le genre Monacrosporium duquel nous avons isolé deuxsouches, MS pour M. rutgeriensis et CBM pour M. ciono-pagum et trois souches MCRJ, SKANMC et MCCB pourle genre Meristacrum dans la collection de l’Institut Na-tional Agronomique de Tunisie.

Etude de l’effet de la température sur la croissance deschampignons. La cinétique de la croissance des champi-gnons prédateurs à différentes températures 16,5; 20; 25et 30 °C, diffère d’une souche de champignon prédateurà l’autre. Deux groupes de champignons prédateurs sontprésents dans la rhizosphère des Citrus, un ensemble de

champignons à croissance rapide formé par les Merista-crum (MCRJ, SKANMC, MCCB), A. oligospora (LAT,LA), A. conoides (C, RGA), M. rutgeriensis (MS) et A.musiformis (ARJ) et un ensemble à croissance lenteconstitué d’A. dactyloides (AD, ADCB) et M. cionopagum(CBM) (Fig. 1). La durée de développement pour enva-hir toute la boite de Pétri à 25 °C est de 8 à 11 jours pourles champignons à croissance rapide et de 25 à 29 jourspour les champignons à croissance lente.

Chaque souche de champignon prédateur a montréune gamme de températures optimales de croissancedifférente l’une de l’autre: 30 °C pour les souches deMerictacrum et A. conoides, entre 25 et 30 °C pour M.rutgeriensis et les deux souches d’A. dactyloides, entre20 et 30 °C pour A. musiformis et les A. oligospora et 25°C pour M. cionopagum (Tableau II).

A 35 °C, la germination des conidies n’a pas eu lieupour toutes les souches de champignons sauf les deux

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Tableau I. Les souches de champignons prédateurs isolées de la rhizosphère des Citrus en Tunisie.

Nomenclature Abréviation RégionsMonacrosporium rutgeriensis MS Sahel(Sidi Bou ali)Monacrosporium cionopagum CBM Cap Bon (Menzel bouzelfa)Arthrobotrys musiformis ARJ Bizerte (Ras Djebel)

LAT Cap Bon (Menzel bouzelfa)Arthrobotrys oligosporaLA Cap Bon (Menzel bouzelfa)ADCB Cap Bon (Menzel bouzelfa)Arthrobotrys dactyloidesAD Cap Bon (Menzel bouzelfa)RGA Cap Bon (Menzel bouzelfa)Arthrobotrys conoidesC Cap Bon (Menzel bouzelfa)SKAN MC Cap Bon (Nabeul)MCRJ Bizerte (Ras Djebel)

Meristacrum sp.

MCCB Cap Bon (Menzel bouzelfa)

Tableau II. Variation de la durée de la croissance mycélienne (en jours), en fonction de latempérature, de Meristacrum (MCRJ, SKANMC, MCCB), d’Arthrobotrys oligospora (LAT,LA), d’A. conoides (C, RGA), de Monacrosporium rutgeriensis (MS), d’A. musiformis (ARJ),d’A. dactyloides (AD, ADCB) et de Monacrosporium cionopagum (CBM) aux températures de16,5, 20, 25 et 30 °C.

Température en °CChampignon

16,5 20 25 30 35

MS 14,214 a* 7,857 b 6,583 c 6,5c -MCRJ 6,71 a 5,29 b 4,17c 3,5 d -

SKAN MC 8,93 a 6,29 b 4,57 d 3,5 e 5,71cMCCB 9,58 a 6,21 b 4,5 d 3,5 e 5,5 c

ARJ 13,28 a 5,071 b 4,5 b 5 b -LA 10,1 a 4,643 b 4,625 b 4,5 b -

LAT 9,7 a 4,571 c 5,25 b 4,5 c -RGA 12,5 a 6,643 b 6,4 b 4,8 c -

C 12,5 a 6,571 b 6,5 b 5,5 c -AD 38,917 a 17,786 b 16,333 c 15,5 c -

ADCB 40,917 a 21,583 b 18 c 18,375 c -

CBM 49,833 a 19,857 bc 17,1 c 21,333 b -

*Les chiffres dans les différentes lignes précédant des lettres différentes sont significativementdifférents selon le test de Duncan à la probabilité P = 0,05.

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souches appartenant au genre Meristacrum provenantdu Cap bon; SKAN MC et MCCB (Fig. 2A). Lesmêmes boites de champignons prédateurs qui ne se sontpas développés après 9 jours à la température de 35 °C,ont été mise à la température de 25 °C optimale decroissance mycélienne, seul le genre Meristacrum prove-nant de la région Ras El Djebel (Bizerte) a montré unereprise d’activité après 3 jours et a envahit toute la boitede Pétri au bout de 9 jours (Fig. 2A). Il n’y a pas eu de

reprise à 25 °C pour les Arthrobotrys et les Monacrospo-rium, ce qui montre que la température de 35 °C nonseulement elle inhibe la germination mais aussi elle estlétale pour les conidies de ces champignons.

Les deux souches de Meristacrum, SKAN MC etMCCB se sont développées à 35 °C, à partir du mycé-lium et ont pu envahir tout le milieu au bout de 13 jours(Fig. 2B). Les hyphes d’A. conoides (RGA) ont pucroître à cette température extrême mais ce champignon

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Fig. 1. Evolution de la croissance mycélienne de Meristacrum (MCRJ, SKANMC, MCCB), d’Arthrobo-trys oligospora (LAT, LA), d’A. conoides (C, RGA), d’A. musiformis (ARJ), d’A. dactyloides (AD,ADCB), de Monacrosporium rutgeriensis (MS) et de M. cionopagum (CBM) aux températures de 16,5, 20,25, 30°C. Les barres correspondent aux intervalles de confiance à P = 0,05.

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n’a pu envahir que 70% de la boite au bout de 24 jours,puis sa croissance s’est arrêtée (Fig. 3B). La croissancemycélienne de ce champignon a été rétablie à 25°C. Letransfert à une température de 25 °C, a permis la crois-sance mycélienne d’A. conoides (C) ainsi que les deuxsouches de A. dactyloides (AD et ADCB) qui ont pu oc-cuper le milieu après 10 jours, 24 et 29 jours respective-ment (Fig. 2B). La température de 35 °C a inhibé irré-versiblement, le développement des hyphes d’A. oligo-spora (LAT, LA), de M. rutgeriensis (MS), d’A. musifor-mis (ARJ) et de M. cionopagum (CBM). En effet, ceschampignons n’ont pas pu croître même après leurtransfert à 25 °C, la température optimale de croissance.

Etude de l’efficacité de capture des champignons préda-teurs. Monacrosporium cionopagum a montré le meilleurpourcentage de capture à 25 °C sur le milieu agar. En ef-fet, ce champignon prédateur a pu capturer plus que80% des juvéniles de T. semipenetrans en 72 heures,contrairement aux autres champignons ayant un pour-centage de piégeage élevé mais tardif, puisque la majorité

d’entre eux n’ont pu atteindre 80% de larves piégéesqu’après 9 jours d’incubation (Fig. 3). Après 24 heuresd’incubation à 25 °C, on observe une différence significa-tive entre M. cionopagum ainsi que le champignon dugenre Meristacrum (MCRJ) et les autres souches de cham-pignons. En effet, M. cionopagum a pu, en 24 heures,capturer 34% des juvéniles présentes dans la boite, dû àune rapidité dans la formation d’un grand nombre depièges seulement en 24 heures. Dans le même contexteon trouve aussi le champignon du genre MeristacrumMCRJ qui a capturé en 24 heures 28% de larves alorsque les autres souches de champignons prédateurs oscil-lent entre 5 et 9% de pourcentage de capture des J2.

L’attractivité des racines de Citrus aurantium auxchampignons prédateurs. La comparaison entre les va-leurs moyennes des mesures effectuées selon le test t, amontré qu’il y a une différence significative entre la vi-tesse de croissance des souches de champignons SKANMC, MCCB, RGA, C, LA, ADCB et CBM du coté où laracine a été déposée et celle où le bout de plastique à

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Fig. 2. Evolution de la croissance mycélienne à partir de conidies (A) et à partir de mycelium (B) de culture de Meristacrum(MCRJ, SKANMC, MCCB), d’A. oligospora (LAT, LA), d’A. conoides (C, RGA), de M. rutgeriensis (MS), d’A. musiformis (ARJ),d’A. dactyloides (AD, ADCB) et de M. cionopagum (CBM) à la température de 35 °C. Le transfert des cultures après arrêt de lacroissance à 25 °C est marqué par une flèche. Les barres correspondent aux intervalles de confiance à P = 0,05.

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été déposé (Fig. 4). Ce qui confirme la présence d’un ef-fet attractif exercé par la plante sur la majorité dessouches de champignons prédateurs. Par contre pourMCRJ, LAT, AD, ARJ et MS il ne semble pas y avoir dephénomène d’attraction.

L’occupation de la rhizosphère par les champignonsprédateurs. Les observations sous loupe binoculaire desracines, après 7 jours de leur dépôt dans des boites de

Pétri contenant chacune une souche de champignonprédateur, ont montré la formation de conidiophores etd’hyphes tout autour de la racine de bigaradier avec uneimportante différence dans l’occupation de la rhizo-sphère des champignons prédateurs. Monacrosporiumcianopagum et les trois souches de Meristacrum ontmontré une formation abondante d’hyphes et de coni-dies (Figs 5G, H et I), en effet il y à formation d’unmanchon protecteur tout autour de la racine. Alors que

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Fig. 3. Evolution du pourcentage de capture des J2 de Tylenchulus semipenetrans pour différents champignons prédateurs: Meris-tacrum (MCRJ), A. oligospora (LAT), A. conoides (RGA), M. rutgeriensis (MS), A. musiformis (ARJ), A. dactyloides (ADCB) et M.cionopagum (CBM) à la température de 25 °C. Les barres correspondent aux intervalles de confiance à P = 0,05. Les différenteslettres au niveau des diagrammes montre que les moyenne sont significativement différentes à la probabilité de P=0,05 selon Stu-dent Newman et Keuls.

Fig. 4. Comparaison de l’évolution du pourcentage de croissance de Meristacrum (MCRJ), d’A. oligospora (LAT), d’A. conoides(RGA), de M. rutgeriensis (MS) et d’A. (ARJ), d’A. dactyloides (ADCB) et de M. cionopagum (CBM) en présence d’une racine deBigaradier (r) par rapport à celui en présence d’un bout de plastique (p) à la température de 25 °C. Les moyennes présentant lesymbole (*) sont significativement différentes selon le test t à la probabilité de P = 0,05.

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les champignons prédateurs A. dactyloides (AD etADCB), A. musiformis (ARJ) et A. conoides (RGA et C)(Figs 5A, B et C) ont montré une abondance moins im-portante que celle des champignons M. rutgeriensis(MS) et A. oligospora (LA et LAT) qui ont une abon-dance modéré (Figs 5D, E et F).

Les observations microscopiques des racines incu-bées avec les champignons prédateurs durant 7 et 15jours ont montré la présence de toutes les souches dechampignons prédateurs au niveau des cellules épider-miques et du cortex de la racine après 7 jours de contactet au niveau des tissus vasculaires après 15 jours.

En effet ceci a permis de confirmer que les champi-gnons prédateurs ont pu pénétrer a l’intérieur de l’épi-derme et atteindre le cortex (Fig. 6A) en premier tempspour ensuite se propager jusqu’au tissu vasculaire de laracine de bigaradier (Fig. 6C).

Comme il a été noté la présence d’appressorium auniveau des cellules racinaire lorsque le champignon se

propage dans l’épiderme (Fig. 6F). Pour A. musiformisARJ, les poils absorbant de la racine ont été coloniséspar des hyphes après 7 jours (Fig. 6I). Des hyphes res-semblant à des organes de piégeages ont été observéschez seulement les deux souches A. dactyloides ADCB(Fig. 6D) et A. oligospora LAT (Fig. 6E) respectivementaprès 15 et 7 jours du contact des racines avec ceschampignons ainsi que des hyphes vacuolisés au niveaudes tissus vasculaires ont été trouvés chez la soucheSKAN MC après 15 jours (Fig. 6G).

Mais aussi des cellules épidermiques détruites ou dé-cortiqués ont été observées chez les souches A. oligospo-ra LA, M. cionopagum CBM (Fig. 6H) et l’espèce dugenre Meristacrum SKAN MC, alors que chez A. co-noides RGA et A. dactyloides AD et ADCB les cellulesépidermiques étaient intactes après 7 et même après 15jours (Fig. 6B). Au niveau des ces cellules détruites,chez le M. cionopagum CBM, une grande colonisationhyphale a été observée.

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Fig. 5. Aspect des racines après 7 jours d’incubation dans des boites contenant des champignons prédateurs. Racine entourée par:(A) Arthrobotrys dactyloides AD; (B) Arthrobotrys musiformis ARJ; (C) Arthrobotrys conoides RGA; (D) Arthrobotrys dactyloidesADCB; (E) Arthrobotrys oligospora LAT; (F) Monacrosporium rutgeriensis MS; (G) Monacrosporium cionopagum; (H) et (I) lesdeux souches appartenant au genre Meristacrum MCRJ et SKAN MC. (Barre 1 mm).

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DISCUSSION

Douze souches de champignons prédateurs ont étéisolées à partir de la rhizosphère des Citrus de la Tunisieet identifiées. Sept souches appartenant au genre Ar-throbotrys, A. musiformis (ARJ), A. oligospora (LAT etLA), A. dactyloides (AD et ADCB) et A. conoides (RGAet C). Deux souches appartenant au genre Monacrospo-rium, M. cionopagum (CBM) et M. rutgeriensis (MS), ettrois souches appartenant au genre Meristacrum (SKANM, MCCB et MCRJ). Les champignons prédateurs deT. semipenetrans les plus fréquemment isolés, appar-

tiennent aux genres Arthrobotrys (A. conoides, A. dacty-loides, A. oligospora, A. arthrobotryoides, A. javanica, A.superba et A. musiformis), Monacrosporium (M. gephyro-pagum) et Dactylaria (Stirling et Mankau, 1977; Walteret Kaplan, 1990; Gené et al., 2005). Aucune de cesétudes n’a mentionné la présence de champignon M.rutgeriensis et des champignons appartenant au genreMeristacrum dans la rhizosphère des Citrus.

Ces souches de champignons ont montré une diffé-rence au niveau de leur vitesse de croissance vis-à-visdes températures testées 16,5, 20, 25 et 30 °C. Leschampignons A. dactyloides et M. cionopagum ont une

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Fig. 6. Observations microscopiques des racines après 7 et 15 jours d’incubation dans des boites contenant des champignons pré-dateurs. A: hyphe du champignon Arthrobotrys conoides C, qui se propage de l’épiderme jusqu’au cortex de la racine après 7jours de contact (×400) (barre 100 µm). B: epiderme intact de la racine en contact avec le champignon Arthrobotrys dactyloidesADCB après 7 jours de contact (×400) (barre 100 µm). C: aspect de la racine après 15 jours de mise en incubation avec le champi-gnon Arthrobotrys dactyloides ADCB, noté la présence des hyphes dans les tissus vasculaires (×100) (Barre 100 µm). D: la présen-ce des hyphes ressemblant a des organes de piégeages chez le champignon Arthrobotrys dactyloides ADCB après 15 jours (×1000)(barre 50 µm), mais aussi, chez E: Arthrobotrys oligospora LAT après 7 jours d’incubation (×1000) (barre 50 µm). F: la formationd’appressorium au niveau des cellules épidermiques par le champignon Monacrosporium rutgeriensis MS après 7 jours (×1000)(Barre 50 µm). G: hyphe vacuolisé du champignon du genre Meristacrum SKAN MC dans les tissus vasculaires des racines de bi-garade (×1000) (barre 50 µm). H: aspect de la racine après 15 jours d’incubation avec le champignon Monacrosporium cionopa-gum CBM (×100) (barre 100 µm). I: Les poils absorbants colonisés par les hyphes du champignon Arthrobotrys musiformis après7 jours d’incubation (×400) (barre 100 µm).

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vitesse de croissance lente contrairement aux autreschampignons prédateurs isolés de la rhizosphère des Ci-trus. Ces résultats sont conformes à ceux obtenues parMonoson (1968) qui a comparé la croissance mycélien-ne d’A. musiformis, A. oligospora, A. dactyloides, M.bembicoides et M. cionopagum en fonction de la tempé-rature et la présence des champignons mycophages.

Chaque souche de champignon a sa propre tempéra-ture optimale de croissance aux environs de 25 °C.Alors que la température de 35 °C a inhibé la germina-tion de tous les champignons ainsi que la croissance dela majorité d’entre eux sauf pour les deux souches deMeristacrum SKAN MC et MCCB. Ces résultats confir-ment que l’optimum de développement des champi-gnons prédateurs est situé entre 20 et 25 °C (Cayrol etal., 1972; Peloille et al., 1984; Namouchi, 1986; Nabil,1993). La différence de développement des troissouches de Meristacrum à la température extrême 35°C, est expliquée par l’origine de la région d’isolementdes souches de champignons. En effet, les deux souchesde Meristacrum, SKAN MC et MCCB, sont toutes deuxisolées à partir de la région du Cap bon alors que lasouche MCRJ a été isolée de la région de Ras El Djebel(Bizerte). Ces champignons hyphomycètes ne se multi-pliant que par la voie végétative conidienne présententdonc une grande adaptation environnementale avec leurmilieu (Kallel et al., 2008).

Les températures extrêmes qui surviennent pendantla période estivale à l’occasion des coups de sirocco di-minuent d’une manière importante la population de T.semipenetrans (Kallel et Abdelwahed-Ghariani, 2004;Kallel et B’Chir, 2004). Ces résultats montrent que pen-dant la saison estivale, où la température extrême enre-gistrée dans le sol atteint les 34 °C, les seuls champi-gnons actifs dans le sol sont les deux souches de Meris-tacrum SKAN MC et MCCB. Il parait, contrairement àla thèse avancée par Duncan et Cohn (1990), que la di-minution importante de la période estivale est plutôtliée aux facteurs abiotiques essentiellement la tempéra-ture sous climat méditerranéen, qu’aux facteurs bio-tiques puisque les antagonistes sont également affectés.Les antagonistes naturels tels que les champignons pré-dateurs paraissent les plus actifs pendant la périodeprintanière et automnale, périodes qui correspondent àune multiplication importante du nématode des Citrus.La meilleure activité prédatrice s’effectue à des tempé-ratures aux alentours de 25 °C (Nabil, 1993; Ribeiro etFerraz, 2000).

Bien que M. cionopagum ait montré une vitesse decroissance lente, mais il parait nettement le plus efficacedans le piégeage des larves de T. semipenetrans par rap-port aux autres souches de champignons prédateurssurtout qu’il confirme les résultats de Quinn (1987) quia obtenu 77% de nématodes bactériophages piégés parM. cionopagum.

Quant à l’étude de l’interaction entre les racines deCitrus et les champignons prédateurs, il s’est avéré qu’ily a un effet attractif produit par les racines de Citrus au-

rantium sur les souches SKAN MC, MCCB, RGA, C,LA, ADCB et CBM. Par contre sur MCRJ, LAT, ARJ,AD et MS il ne semble pas y avoir de phénomène d’at-traction. Des résultats similaires ont été obtenus parBordallo et al. (2002) sur A. oligospora, qui montrentque les substances produites par les racines sont lesseules responsables du tropisme de la croissance deschampignons prédateurs. La caractérisation de ces sub-stances, menée par Jansson et al. (1988), montre que cesont des petites molécules avec une masse moléculairene dépassant pas les 200 Da, ce qui suggère qu’ils peu-vent être des exsudats racinaires. Ce chimiotropisme,pourrait avoir une conséquence sur l’abondance et l’oc-cupation spatiale des champignons prédateurs dans larhizosphère, ainsi les racines ne seront pas uniformé-ment protégées contre les attaques des nématodes phy-toparasites (Persmark et Jansson, 1997). Les champi-gnons prédateurs ont colonisé les racines de bigaradieret ils ont pu pénétrer à l’intérieur de l’épiderme et at-teindre le cortex après 7 jours d’incubation. Ceci confir-me l’étude de Bordallo et al. (2002) qui a été le premiertravail montrant qu’un champignon prédateur de néma-tode est capable de coloniser des cellules racinaires.Mais contrairement aux résultats de Bordallo et al.(2002), les hyphes des champignons prédateurs se sontpropagés jusqu’au tissus vasculaires de la racine de biga-rade après 15 jours d’incubation. Ceci pourrait être ex-pliqué par l’utilisation de racines excisées et par la capa-cité des champignons prédateurs de coloniser les tissusvasculaires des racines et des matières organiquesmortes lors de leur phase saprophytique. La colonisa-tion des racines par M. cionopagum, A. oligospora et lessouches appartenant au genre Meristacrum, a induit unedestruction des cellules épidermiques. Ceci pourraitêtre partiellement expliqué par la réponse des champi-gnons au chimiotropisme exercé par les racines maisaussi par la croissance intracellulaire et l’abondance deshyphes dans les cellules des racines.

Les souches de champignons prédateurs se propa-gent entre les cellules des racines soit par une pénétra-tion directe soit par la formation d’appressorium, quiest un organe de fixation et de pénétration qu’élaborentles champignons pour faciliter leur pénétration. Cesstructures ont été observées dans le cas de Pochoniachlamydosporia (= Verticillium chlamydosporium), (Lo-pez-llorca et al., 2002) ainsi que pour A. oligospora(Bordallo et al., 2002) dans les racines. En outre la pré-sence des structures ressemblant à des organes de pié-geage pourrait être dû à l’habitude des champignonsprédateurs de former des pièges pour capturer les né-matodes phytoparasites. Tout ceci montre que l’habilitédes champignons prédateurs a colonisé les racines debigaradier pourrait jouer un rôle important dans l’instal-lation et le maintient des champignons prédateurs à unniveau suffisant afin de garantir une meilleure efficacitécontre les nématodes phytoparasites (Bordallo et al.,2002). En effet, ces champignons prédateurs pourraientavoir un rôle important sur la protection des racines des

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Citrus non seulement par la prédation des nématodesphytoparasites mais aussi par l’induction de modifica-tions des cellules de la paroi racinaire et améliorait ladéfense de la plante contre les nématodes et les champi-gnons phytopathogènes (Monfort et al., 2005; Bordalloet al., 2002).

Plusieurs études se sont intéressées à décrire les anta-gonistes y compris les champignons prédateurs associésaux nématodes et particulièrement le nématode des Ci-trus mais très peu ont abordé les aspects interactifsentre ces organismes. Il est évident qu’un microorganis-me élevé dans des conditions aseptiques en absence detoute concurrence présente une efficacité importante.Par contre, son efficacité dans les conditions naturellesest beaucoup plus faible puisqu’il est confronté à unéquilibre biologique ce qui pourrait expliquer le peu demicroorganisme commercialisé de nos jours (Meyer etRoberts, 2002). Les champignons prédateurs de néma-todes sont très actifs dans le sol, ils entretiennent leuractivité prédatrice grâce aux nématodes bactériophages(Quinn, 1987).

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Acceptée pour publication le 16 Septembre 2010.

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