8
Pauline Beauvillier Etudiant Magistère Communication Interculturelle Option médiation linguistique et culturelle Aire culturelle de spécialité : Russie ICL4B02B Médiation linguistique et culturelle : Typologie d’activités, profils professionnels et champs d’action O.Porte : Traduction, édition et médias Objectif : Présentation d’un état des lieux de la traduction pour le russe Interview : traducteur/interprète français/russe Ma démarche est interculturelle. Elle consiste à tenter de comprendre les aller- retour entre le français et le russe, les difficultés de traduction, les idées reçues du public, ses engouements ou réticences. Je cherche à comparer l'image de la France et de ses produits culturels dans le pays de ma langue de spécialité. Madame Gridneva Tatiana, est la personne que j’ai choisi d’interviewer pour ce devoir. C’est une traductrice, interprète dans le domaine linguistique français/russe. Elle est aussi enseignante de la langue française dans l’académie pédagogique de la région de la Volga. Cette femme est également une grande journaliste du journal Voljskaia Kommouna, Samara (Russie). Elle a écrit différent articles sur des thèmes très variés, comme par exemple le festival de Cannes, l’écologie « la révolution verte » et l’innovation « les transports futuristes ». Grâce à ces nombreuses activités, voyages et connaissances, il me semble que Madame Gridneva correspond parfaitement au profil pour répondre à mes questions concernant la langue française et russe. Je me permets de la remercier pour son aimable participation.

Présentation d’un état des lieux de la traduction pour le russe Interview : traducteur/interprète français/russe

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Présentation d’un état des lieux de la traduction pour le russe Interview : traducteur/interprète français/russe

Pauline Beauvillier Etudiant Magistère Communication Interculturelle Option médiation linguistique et culturelle Aire culturelle de spécialité : Russie

ICL4B02B

Médiation linguistique et culturelle : Typologie d’activités, profils professionnels et champs

d’action

O.Porte : Traduction, édition et médias

Objectif : Présentation d’un état des lieux de la traduction pour le russe

Interview : traducteur/interprète français/russe

Ma démarche est interculturelle. Elle consiste à tenter de comprendre les aller- retour

entre le français et le russe, les difficultés de traduction, les idées reçues du public, ses

engouements ou réticences. Je cherche à comparer l'image de la France et de ses produits

culturels dans le pays de ma langue de spécialité.

Madame Gridneva Tatiana, est la personne que j’ai choisi d’interviewer pour ce

devoir. C’est une traductrice, interprète dans le domaine linguistique français/russe. Elle est

aussi enseignante de la langue française dans l’académie pédagogique de la région de la

Volga.

Cette femme est également une grande journaliste du journal Voljskaia Kommouna, Samara

(Russie). Elle a écrit différent articles sur des thèmes très variés, comme par exemple le

festival de Cannes, l’écologie « la révolution verte » et l’innovation « les transports

futuristes ».

Grâce à ces nombreuses activités, voyages et connaissances, il me semble que

Madame Gridneva correspond parfaitement au profil pour répondre à mes questions

concernant la langue française et russe. Je me permets de la remercier pour son aimable

participation.

Page 2: Présentation d’un état des lieux de la traduction pour le russe Interview : traducteur/interprète français/russe

Votre parcours

Quel a été votre parcours universitaire ?

J’ai fait ma scolarité dans une école spécialisé dans la langue française, durant 10 années.

Nous avions différentes matières comme la géographie, l’histoire et la civilisation enseignées

en français Ensuite j’ai étudié pendant 5ans à l’Université pédagogique des langues

étrangères de Samara. J’ai soutenu le travail du diplôme sur la traduction littéraire et fait un

stage en Algérie en tant qu’interprète. Enfin je suis allée à Moscou pendant une durée de six

mois pour assister à des cours de perfectionnement à l’Université des langues étrangères

Moris Thorez. J’ai également obtenu un diplôme de traduction anglais à l’institut international

du marché, situé à Samara.

Pourquoi avez-vous décidé d’étudier la langue française ?

J’ai toujours été passionnée de l’histoire et de la littérature russe j’ai donc voulu apprendre la

langue qui les a influencées le plus.

Comment et pourquoi avez-vous décidé de devenir traductrice/interprète ?

Je crois avoir un don pour l’écriture. Etant journaliste maintenant de métier, je reste dans des

domaines toujours assez proches. On dit souvent, il suffit de gratter bien un traducteur et tu

verras un écrivain.

Avez-vous grâce à votre métier eu l’occasion de voyager ? Le contexte historique de l’époque par

rapport à la langue française.

J’ai fait mon stage en Algérie étant encore étudiante et c’était bon début pour commencer à

vraiment parler français, car c’était dans les années de l’Union Soviétique et les voyages en

France étaient très rares. Je travaillais en tant qu’interprète dans le centre de formation

professionnelle pour algériens en matière de télévision et radio.

Pensez-vous que le métier de traducteur/interprète est un métier difficile ou facile? Pourquoi ?

Je crois que c’est un métier difficile, car un traducteur porte la responsabilité du contenu des

documents qu’il traduit. Il doit faire de son mieux pour réussir à le rendre compréhensible et

fidèle par rapport à la langue source et la langue cible. Le travail d’interprète est toujours une

bonne gymnastique pour esprit, car on doit réagir vite, retenir beaucoup de données et tenir

compte de la situation qui se crée entre les locuteurs.

Pensez-vous que c’est un métier d’avenir ?

Bien sûr, les liens entre les pays se multiplient, même s’il semble que l’on a trouvé une issue

avec l’anglais qui devient une sorte de langue internationale, le besoin de bonne traduction,

Page 3: Présentation d’un état des lieux de la traduction pour le russe Interview : traducteur/interprète français/russe

disons « traduction de qualité » et d’interprétariat dans d’ autres langues restera toujours très

utiles. La diversité des langues est toujours un sujet d’actualité.

Comment voyez-vous ce métier évoluer par rapport à la concurrence aujourd’hui ?

Aujourd’hui on demande partout des spécialistes connaissant des langues étrangères. Mais

cela ne peut être utile que dans les cas strictement professionnels car on apprend une langue

étrangère pour toute la vie. Pour devenir un véritable traducteur professionnel ce n’est pas

facile, du coup la concurrence n’est pas très rude.

Votre métier d’interprète et de traducteur

Selon vous, peut-on parler de langues dominantes et de langues dominées ? Si oui, qu’en est-il du

russe?

Chaque peuple a sa voie historique. A un moment donné, il devient porteur de culture qui joue

un grand rôle pour le monde entier, alors sa langue devient dominante, comme c’était le cas

avec l’arabe et nous employons les termes et les chiffres arabes en algèbre aujourd’hui. La

même chose avec le français, qui était la langue de la noblesse russe et qui reste la langue de

poste universelle, maintenant l’anglais devient dominant grâce aux découvertes techniques

effectuées par les anglais et les américains qui ont changé le visage du monde. Le russe reste

aussi une langue répandue et utilisée dans le monde grâce à la grande culture qu’il représente.

Mais qui sait, peut-être dans l’avenir la langue tatare ou yakoute sera aussi très répandue dans

le monde, tout dépend des gens qui le parlent. Cependant, il est vrai que toute propagation

artificielle d’une langue ou défense de parler une langue sont voués à l’échec.

Comment se déroule le processus de travail d’un traducteur en Russie (vous cherchez des entreprises,

comment se négocie le contrat, quel est le volume de travail…) ?

Il y a des traducteurs libres qui sont obligés de rechercher le travail eux-mêmes. En revanche,

il y a des traducteurs salariés qui travaillent auprès des sociétés. Enfin il y a aussi ceux qui

collaborent avec des bureaux de traduction qui leur fournissent le travail.

Quelles sont les principales difficultés de ce travail de traducteur/interprète (concurrence, charge de

travail…) ?

La difficulté essentielle est que les traducteurs sont le plus demandés dans des grandes villes

comme Moscou ou St. Petersbourg, alors que dans les autres villes il y a peu de travail pour les

traducteurs. Mais avec Internet la situation s’améliore, les traducteurs qualifiés peuvent plus

facilement correspondre avec des entreprises situées à Moscou ou St.Petersbourg et envoient par

internet les travaux.

Selon vous, quels sont les principaux défis de la traduction du russe?

Page 4: Présentation d’un état des lieux de la traduction pour le russe Interview : traducteur/interprète français/russe

La langue russe possède un vocabulaire deux fois plus grand que le français et il y a trop de nuances

dans l’appréciation et dans les attitudes qui sont difficiles à transposer dans d’autres langues comme

le français, par exemple. Je dirai que c’est le plus grand défi d’un traducteur du russe en français,

cette richesse du vocabulaire est très difficile à retranscrire.

Quels sont les problèmes liés à la traduction concernant la transmission d’informations entre des

mentalités différentes entre le français et le russe ?

Il existe le proverbe russe – ce qui est bon pour un Russe est mortel pour un étranger. Mais je

dirai vice et versa aussi. Il y a non seulement des mots tabous mais aussi des thèmes tabous

pour les russes, que les étrangers ignorent. Par exemple, on peut entendre le mot CON dans

une pièce de théâtre français, cela ne choque personne tandis que l’utilisation des mots pareils

dans un milieu culturel russe est scandaleux et donc intraduisible. Le russe traduira plutôt

« idiot » ou »imbécile ». Cela dit, paradoxalement, il existe une véritable langue des injures en

Russie – le mat.

Vraiment le problème des différences des mentalités existe, et il faut en tenir compte, en

traduisant surtout les thèmes comme l’humour ou la langage courant.

Quel est l’état de la traduction du russe en France à votre avis ?

Je crois que beaucoup d’œuvres de la littérature russe qui sont dignes d’être traduites ne le

sont pas. Surtout la poésie. Je trouve cela, très dommage que le public français ne puisse pas

accéder à cette abondante poésie russe.

Aujourd’hui, pensez- vous que la littérature russe est- elle suffisamment représentée en France ? Si

non, que manque-t-il ? Y a-t-il un genre de livre qui ne serait pas représenté ?

Je pense que non, malheureusement. J’ajouterai même plus que cela aussi concerne les films

et les pièces du théâtre russes qui sont presque inconnus en France. La même chose pour la

poésie – on a beaucoup de vers libres sans rimes quand on traduit du russe. Par exemple il n’y

a presque pas de traductions des vers de la grande poétesse russe Bella Akhmadoullina qui

vient de décéder.

Selon vous, existe-t-il encore en France des idées reçues sur votre pays ? Comment peut-on les

combattre ?

Bien sûr, il faut connaître mieux le pays pour combattre ses idées reçues à mon avis. Il est également

très important d’apprendre la langue et la culture contemporaine et non pas uniquement les

classiques.

Selon vous, quelles sont les chances pour un livre russe d’être traduit en français ?

Page 5: Présentation d’un état des lieux de la traduction pour le russe Interview : traducteur/interprète français/russe

Pas grande. Je dirai une sur dix. Je ne connais pas suffisamment le domaine de l’édition pour

répondre exactement à cette question. Mais je peux dire, en faisant référence avec mon

expérience que l’avenir d’un livre russe est très rarement un destin à l’international.

Votre métier d’enseignante du français

Pouvez-vous nous dire quelques mots sur la situation des professeurs des langues étrangères d’université en général (salaire, conditions de travail, étudiants de langues françaises nombreux ou peu nombreux, pourquoi ?)

A l’heure actuelle, le salaire des professeurs d’Université est pitoyable surtout dans les

Universités qui apprennent les sciences humaines. Les jeunes professeurs ne peuvent pas

nourri r leurs familles et n’ont pas intérêt à faire des recherches scientifiques car cela demande

beaucoup de dépenses et apporte peu. La quantité d’étudiants de français diminue très vite

avec la politique du Ministère de l’enseignement qui favorise et promeut l’étude de la langue

anglaise dans les écoles. Enfin, le nouveau système de tests pendant les examens de sortie

EGE (équivalent au Baccalauréat en France) est très difficile en français. peu de jeunes

choisissent le test de français qui dépasse le niveau de l’école et ne donne pas la possibilité de

choisir au cas échéant une autre spécialisation. Observez-vous une évolution entre les étudiants d’aujourd’hui et ceux d’avant à l’université ? Qu’est ce qui a changé ? (envie des étudiants, rareté, abandon du français pour l’anglais…)

Le nombre d’étudiants a largement diminué, la situation des professeurs d’Universités et

d’écoles ne les stimule pas non plus.

Mon analyse

Le parcours de Madame Tatiana Gridneva est très intéressant, on peut faire référence à

son voyage en Algérie durant la période soviétique. Elle m’a raconté de nombreuses

anecdotes durant son voyage, par exemple la tenue vestimentaire en Algérie était

complétement différente. Elle a découvert le « jean », des fruits exotiques et plein de choses

encore qui montrent le contraste entre cette époque soviétique et un autre pays. Son métier lui

a permis de rencontrer des personnes et d’être le trait d’union entre le français et le russe. Elle

a pu assister au festival de cannes l’année dernière en tant que journaliste, son article est

apparu dans le journal Voljskaia Kommouna de Samara.

Je dirai que Madame Gridneva illustre parfaitement les différentes opportunités d’un

traducteur/interprète. Elle a la chance de travailler à son rythme et de choisir ses contrats. On

observe, d’après son témoignage, qu’il faut avoir un moral « d’acier » pour supporter d’être

aussi flexible aussi dans son emploi du temps que dans son salaire parfois. Tatiana m’a

Page 6: Présentation d’un état des lieux de la traduction pour le russe Interview : traducteur/interprète français/russe

raconté en illustrant d’une situation vécue, les aléas du métier. Elle avait accepté un travail de

traduction pour une entreprise moscovite. Elle devait traduire des notices de 50 à100 pages

environ et le site internet de l’entreprise, puis renvoyer son travail dès qu’il était terminé. La

cadence était de plus en plus intense, il n’arrêtait pas de surveiller le travail, d’en donner

toujours plus. A un certain point, Madame Gridneva a préféré arrêter le contrat. Bien sûr,

l’entreprise a mis peu de temps à retrouver un autre traducteur. Par curiosité, nous avons

consulté le site, les traductions en français sont de très mauvaises qualités. Pour moi, cet

exemple reflète d’une part la concurrence qui existe mais reste approximative. En effet,

comme l’a souligné Tatiana les bons traducteurs spécialisés et de qualités sont quand même

assez rares. D’autre part, on observe dans ce cas, la pression et les conditions de travail d’un

traducteur rattaché à une entreprise qui se préoccupe de la cadence et non pas de la qualité des

documents traduits.

Pour faire ce métier, il faut être passionné des langues, des voyages et des rencontres.

Madame Gridneva durant sa carrière a su au bon moment créer les opportunités pour des

missions d’interprétariat comme celle effectuée cet été à St.Petersbourg pour une entreprise

française. Il est vrai que Tatiana a fait beaucoup de traduction spécialisé, cela dit je suis

d’accord avec elle sur le point qu’il est impossible de vivre correctement en ne faisant que des

traductions littéraires. Le marché est très mince dans ce domaine alors que la traduction

économique et spécialisé est en pleine expansion.

Page 7: Présentation d’un état des lieux de la traduction pour le russe Interview : traducteur/interprète français/russe

Annexe 1

Les statistiques trouvées sur le site de l’UNESCO.

http://www.unesco.org/xtrans/bsstatexp.aspx

Year of publication

1

1992 4632

1993 5177

1994 3920

1995 3534

1996 3214

1998 3

1999 3130

2000 1

2002 1

2006 6934

2007 10455

2008 20

Annexe 2

Articles de Madame Tatiana Gridneva sur le site du journal Voljskaia

Kommouna en russe

http://www.vkonline.ru/article/13523.html

Annexe 3

Article de 2010 sur une exposition organisée à Liège, écrit par Madame Gridneva

Page 8: Présentation d’un état des lieux de la traduction pour le russe Interview : traducteur/interprète français/russe