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1078 (2000), Vol. 48, No. 4 / n o 4 Prix de transfert et accords de répartition des coûts : Nouveaux enjeux—Nouvelles perspectives— Nouveaux défis Jean-Sébastien Lénik* ABSTRACT In this article, the author examines the transfer-pricing issues that arise from setting up a cost-contribution arrangement for the international management of intangible property. In the first part of the article, he describes the general rules governing transfer pricing and the lastest relevant tax reforms in Australia, France, Canada, and the United States. The transfer-pricing provisions in these countries serve as guidelines for the analyses presented in this article. In the second part, the author briefly examines the alternative structures of the cost-contribution arrangement option. He concludes that these alternatives raise numerous questions and create unsolved problems from a transfer-pricing point of view, particularly that of valuation of intangible property. The author addresses the cost-contribution arrangement concept itself in the third part and sets out a theoretical framework for cost-contribution arrangements using cost-sharing and cost-funding structures. The validity of this theoretical approach is applied against national legislation to suggest that it is necessary to build a more precise international framework in order to preserve the coherence of the OECD work in this field. The fourth part of the article deals with the operational functioning of a cost- contribution arrangement. The author addresses the new challenges and multiple issues raised by this new tax structure as well as the tax-planning opportunities * Jean-Sébastien Lénik, collaborateur fiscaliste, Arthur Andersen International, Paris. L’auteur tient à remercier M. le Professeur David Stevens, McGill University, qui a accepté de diriger sa thèse de LLM, la base de cet article; M e François Vincent, Stikeman Elliott, Montréal, de ses connaissances sur la question des prix de transfert et le phénomène des accords de répartition des coûts, ainsi que de sa grande compétence et de sa disponibilité; Madame Marie-France Demade, Sanofi-Synthélabo, Paris, de sa disponibilité, de sa grande compétence, et de ses éclairages précieux.

Prix de transfert et accords de répartition des coûts ... · En mars 1996, deux chapitres ont été publiés, un sur les biens incorporels, l’autre sur les services intragroupes

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  • 1078 (2000), Vol. 48, No. 4 / no 4

    Prix de transfert et accords derépartition des coûts : Nouveauxenjeux—Nouvelles perspectives—Nouveaux défis

    Jean-Sébastien Lénik*

    ABSTRACTIn this article, the author examines the transfer-pricing issues that arise from settingup a cost-contribution arrangement for the international management of intangibleproperty.

    In the first part of the article, he describes the general rules governing transferpricing and the lastest relevant tax reforms in Australia, France, Canada, and theUnited States. The transfer-pricing provisions in these countries serve as guidelinesfor the analyses presented in this article.

    In the second part, the author briefly examines the alternative structures of thecost-contribution arrangement option. He concludes that these alternatives raisenumerous questions and create unsolved problems from a transfer-pricing pointof view, particularly that of valuation of intangible property.

    The author addresses the cost-contribution arrangement concept itself in thethird part and sets out a theoretical framework for cost-contribution arrangementsusing cost-sharing and cost-funding structures. The validity of this theoreticalapproach is applied against national legislation to suggest that it is necessary tobuild a more precise international framework in order to preserve the coherenceof the OECD work in this field.

    The fourth part of the article deals with the operational functioning of a cost-contribution arrangement. The author addresses the new challenges and multipleissues raised by this new tax structure as well as the tax-planning opportunities

    * Jean-Sébastien Lénik, collaborateur fiscaliste, Arthur Andersen International, Paris. L’auteurtient à remercier M. le Professeur David Stevens, McGill University, qui a accepté de dirigersa thèse de LLM, la base de cet article; Me François Vincent, Stikeman Elliott, Montréal, deses connaissances sur la question des prix de transfert et le phénomène des accords de répartitiondes coûts, ainsi que de sa grande compétence et de sa disponibilité; Madame Marie-FranceDemade, Sanofi-Synthélabo, Paris, de sa disponibilité, de sa grande compétence, et de seséclairages précieux.

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    opening up through transfer pricing. He concludes that despite uncertainties thatsometimes make the cost-contribution arrangement vehicle a subtle tax instrument,it has to be considered or reconsidered by multinational enterprises as a meansto solve valuation problems, distribution of legal ownership problems, anddistribution of intangible property income problems.

    In the final part of the article, the author questions the new dynamics of theconflicts between tax administrations generated by the cost-contributionarrangement vehicle. He concludes that the classic mutual agreement procedureproposed by the OECD model tax convention is not appropriate to the new cost-contribution arrangement environment. His conclusion emphasizes the need topromote alternative ways of solving international conflicts, such as advancepricing agreements or arbitration.

    PRÉCISCet article, divisé en cinq parties, a pour objectif l’examen des problématiquesliées au prix de transfert dans la perspective de la mise en place d’un accord derépartition des coûts destiné au développement et à la gestion d’élémentsincorporels.

    Dans la première partie, l’auteur dresse un état sommaire de l’actualité desproblématiques « prix de transfert » dans certaines législations nationales quiserviront de fil d’Ariane tout au long de cet article—l’Australie, la France, leCanada, les États-Unis.

    La seconde partie examine très succinctement les choix structurels de l’optiondes accords de répartition des coûts (ARC) pour conclure qu’elles sont à l’originede nombreuses incertitudes et sont d’un maniement de plus en plus délicat sur leterrain des prix de transfert .

    Dans un troisième temps, l’auteur explique le concept d’ARC et tente d’enprésenter une systématisation théorique autour des concepts de cost funding etcost sharing, et d’en vérifier la pertinence dans les législations nationales qui ontadopté un dispositif particulier en la matière.

    Dans la quatrième partie, l’auteur fait un exposé du fonctionnement opérationneldes ARC en terme de prix de transfert. Sont mis en valeur les nouveaux enjeuxfiscaux posés par cette structure, ainsi que les nouvelles perspectives qu’elle offreen termes de planification et d’optimisation fiscales. L’auteur conclut que, malgréles incertitudes persistantes de la structure d’ARC, elle constitue une optionimportante et séduisante de la gestion des éléménts incorporels que les entreprisesmultinationales doivent savoir considérer pour résoudre, le cas échéant, lesproblèmes de valorisation, de dispersion de la propriété juridique et du revenu.

    Enfin, l’auteur questionne les nouvelles géographies et dynamiques conflictuellesentre administrations fiscales générées par les ARC et conclut à l’inadéquation dela procédure de règlement amiable proposé par le modèle de convention OCDEen insistant sur la nécessité impérieuse de promouvoir des modes alternatifs de

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    résolution des conflits entre administrations fiscales tels que les accords préalablesou les procédures d’arbitrage.

    INTRODUCTIONLa variable fiscale des options stratégiques organisationnelles est un élémentfondamental de la promotion et de l’aboutissement de synergies de collaborationau sein du groupe multinational. Ces synergies de collaboration sont essentiellesau développement d’éléments incorporels. Le secteur recherche et développement(R&D) requiert en effet la mise en oeuvre de compétences techniques variées, lacombinaison de savoir-faire complémentaire, l’intervention de technologies depointe. Les enjeux de ces synergies de collaboration sont bien évidemmentstratégiques pour l’expansion ou la survie du groupe multinational, mais égalementfiscaux et organisationnels.

    Le jeu de la variable fiscaleLa variable fiscale est un élément important de la promotion des synergies decollaboration. La problématique du développement de biens incorporels à traversla question des prix de transfert constitue, au sein de la variable fiscale, une donnéeincontournable1. Le travail de l’OCDE sur les prix de transfert confirme le rôledéterminant de ces problématiques pour les acteurs de la fiscalité internationale2.

    1 Les entreprises multinationales, par l’entremise de politiques élaborées par leurs fiscalistes,comme les administrations nationales par leur politique fiscale des États, ont très rapidementcompris que le traitement de la question des prix de transfert constituerait un enjeu importantdes prochaines années. Voir Alex Easson, « The importance of Transfer Pricing » (mai 1998),8 Canadian Current Tax 80-86. Cet article commente l’enquête d’Ernst & Young publiée en1997, pour souligner combien la question des prix de transfert apparaît centrale pour lesmultinationales. En 1999, Ernst & Young publiait un nouveau rapport qui illustrait une tendancesimilaire à celle de son rapport de 1997 sur la brûlante actualité des prix de transfert pour lesentreprises multinationales. Pour consulter ces rapports, voir Ernst & Young International,Ltd., « Ernst & Young Transfer Pricing 1997 Global Survey » (le 8 septembre 1997), 15 TaxNotes International 761-77; et Ernst & Young International, Ltd., « Transfer Pricing 1999Global Survey: Practices, Perceptions, and Trends for 2000 and Beyond » (le 15 novembre1999), 19 Tax Notes International 1907-37. Il est suggéré de lire le commentaire de Ph. Ma,« Prix de transfert : les contrôles se multiplient pour les multinationales » (Paris, le 30novembre 1999), Les Échos, à la p. 2. Pour une réflexion plus générale sur les conséquencesdu phénomène de mondialisation en termes de politique fiscale pour les États, voir JeffreyOwens, « Globalisation: The Implications for Tax Policies » (1993), vol. 14 no 3 FiscalStudies 21-44; John Nørregaard et Jeffrey Owens, « Taxing Profits in a Global Economy »(mai 992), 46 Bulletin for International Fiscal Documentation 223-28.

    2 Organisation de coopération et de développement économiques, Principes applicables enmatière de prix de transfert à l’intention des entreprises mulinationales et des administrationsfiscales (Paris : OCDE) (feuilles mobiles). Mise à jour en 1998. Les références à ce documentse feront sous « le rapport OCDE » ou « le rapport ». Le Comité des affaires fiscales de l’OCDE

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    La multidisciplinarité qui caractérise le domaine des prix de transfert porte lesconséquences fiscales au coeur de la stratégie d’organisation et de gestion etplace ainsi la politique de prix de transfert au centre de la stratégie globale dugroupe multinational.

    Pour toutes ces raisons, la variable fiscale de cet article est celle des prix detransfert.

    Prix de transfert, stratégie de R&D etvariable organisationnelleÀ l’enjeu de la gestion fiscale vient s’ajouter celui de la stratégie de R&D, à savoir,la gestion du poids grandissant des coûts de financement de projets très coûteux.Les coûts de R&D3, qui incombent le plus souvent au holding du groupe, sontde plus en plus élevés et pèsent donc très lourdement sur les résultats. Ces coûtsaffectent la rentabilité du holding et en affaiblissent les capacités de distributrionpour menacer à court terme la logique de maximisation du retour sur investissementde l’actionnaire et pénaliser la création de valeur. Ils ont également pourconséquence de diminuer la capacité d’investissement de la structure, donc delimiter les opérations de croissance externe. En fragilisant la tête de groupe, ilsfragilisent la multinationale toute entière et peuvent faire du groupe multinationalune proie désarmée sur le marché des acquisitions de plus en plus actif dans lecontexte de globalisation.

    Les enjeux organisationnels de l’allégement des coûts de R&D dans lesrésultats des entreprises d’un groupe multinational sont donc fondamentaux etd’une dangerosité limpide.

    a entrepris de rédiger, sur les prix de transfert, un rapport visant à harmoniser les différentesapproches entre les pays membres de l’OCDE. Le premier rapport, publié en 1979, a été suivide trois études fiscales intitulées Prix de Transfert et Entreprises Multinationales : TroisÉtudes Fiscales (Paris : OCDE, 1984). L’ensemble de cette réflexion a ensuite été refonduedans le rapport cité ci-dessus dont l’adoption par les pays membres de l’OCDE date de juillet1995. Le rapport de 1995 comptait à l’origine cinq chapitres—principe de pleine concurrence,méthodes traditionnelles au service du principe de pleine concurrence, autres méthodes,procédures administratives, et documentation. Depuis, l’OCDE met périodiquement ce rapportà jour en publiant de nouveaux chapitres. En mars 1996, deux chapitres ont été publiés, unsur les biens incorporels, l’autre sur les services intragroupes. Le dernier chapitre, publié enaoût 1997, traite des ARC. La réflexion de l’OCDE se poursuit et, parmi les chapitres à venir,des projets sur les établissements stables ou la sous-capitalisation sont en cours de rédactionet de discussion. Consulter également : Organisation de coopération et de développementéconomiques, Modèle de convention fiscale concernant le revenu et la fortune (Paris : OCDE,1997) (feuilles mobiles) (ci-après la « convention modèle OCDE »).

    3 Selon une étude de la National Science Foundation, les dépenses R&D ont atteint, pour l’année1998 aux États-Unis, un total de 220,6 milliards de dollars américains. La part des entreprises,incluant la dépense publique, est de 143,7 milliards de dollars. Voir A. Perez, « États-Unis :Un bilan record pour la recherche et le développement en 1998 » (Paris, le 23 juin 1999), LesÉchos, à la p. 68.

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    Pour alléger les coûts de R&D, deux choix se présentent : augmenter les fondspropres et les capacités d’investissement de la structure génitrice, ou répartir lescoûts de R&D entre les différentes sociétés du groupe multinational. Dans cesdeux choix, la problématique des prix de transfert est radicalement différente4.

    La mise en place de contrats cadres entre sociétés participantes au projet dedéveloppement d’éléments incorporels constitue une solution novatrice qui créede nouvelles perspectives par rapport aux composantes du choix classiquementionné. Ce type de contrat cadre est qualifié par le Comité des affaires fiscalesde l’OCDE5 d’accord de répartition des coûts6.

    4 Dans le premier choix, celui de la création d’une structure disposant d’une capacité definancement et d’investissement très importante, la problématique des prix de transfert s’exposenotamment à travers celle des fusions-acquisitions. Dans cette optique, voir Stanley G. Sherwood,« Mergers and Acquisitions: Transfer Pricing Considerations » (septembre 1997), 24 TaxPlanning International Review 14-16. Dans le contexte canadien, voir François Vincent etIan M. Freedman, « Strategic Approaches to Transfer Pricing in Canada » (le 11 mai 1998),16 Tax Notes International 1521-29. Dans cet article, les auteurs abordent un certain nombrede questions stratégiques relatives aux prix de transfert dans le contexte d’acquisition desociétés. L’auteur est d’avis que la vague actuelle de fusions fait sans doute partie de lastratégie qui consiste à constituer une marge brute d’autofinancement importante, même sicet élan vers le rapprochement et les concentrations de holdings possède également d’autresmotivations, étrangères à l’allégement des coûts de R&D. Il est à noter que si l’option deconcentration peut être un choix intéressant pour alléger la part des coûts de R&D dans lesrésultats du holding, elle connaîtra rapidement ses limites et ne peut constituer qu’un objectifà moyen terme dans la mesure où le processus de fusion n’est pas illimité et que son principalobstacle est le respect du droit de la concurrence et des dispositifs anti-trust. Au-delà desconsidérations de fusion et une fois le bien incorporel développé, se pose le problème de laconcession de licences aux sociétés du groupe qui l’utilisent. Sur le terrain des prix detransfert surgissent les problèmes délicats de valorisation de ces éléments incorporels pour ladétermination du montant de la redevance, contrepartie de l’octroi de la licence d’utilisation.Le second choix, celui de la répartition des coûts, possède des géographies organisationnellesvariées. Schématiquement, les équipes dirigeantes sont confrontées au dilemme de créer uneentité juridique distincte dans laquelle différentes sociétés du groupe sont actionnaires, ou demettre en place un contrat cadre entre les différentes sociétés du groupe qui bénéficieront àterme des éléments incorporels dont le développement est l’objet du contrat cadre. Si lacréation d’une personne morale distincte peut répondre à l’impératif de répartition des coûtsentre différentes sociétés du groupe par le biais de la démultiplication des apports, ce choixpose néanmoins des problèmes identiques de valorisation pour la concession de contrats delicence aux sociétés actionnaires par l’entité juridique distincte ainsi créée. Sur le plan de lagestion des prix de transfert, rien ne différencie donc véritablement cette solution de celle dela création d’un holding à capacité importante de financement.

    5 À ce jour, les pays membres de l’OCDE sont l’Allemagne, l’Australie, l’Autriche, la Belgique,le Canada, la Corée, le Danemark, l’Espagne, les États-Unis, la Finlande, la France, la Grèce,la Hongrie, l’Islande, l’Irlande, l’Italie, le Japon, le Luxembourg, le Mexique, la Norvège, laNouvelle-Zélande, les Pays-Bas, la Pologne, le Portugal, la République Tchèque, le RoyaumeUni, la Suède, la Suisse et la Turquie.

    6 Rapport OCDE, supra, note 2. Il est à noter que le rapport OCDE n’exclut pas de la définitiond’« accord de répartition des coûts » les accords conduisant à la création d’une personne

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    Cette solution répond à l’objectif de diviser les coûts de développement debiens incorporels, tout en semblant présenter de nouvelles possibilités de gestiondes prix de transfert.

    La variable organisationnelle et stratégique de cet article est donc celle des ARC.

    Objectifs de cette étudeL’objectif de la présente étude est d’examiner le jeu de la variable fiscale « prixde transfert » au sein du groupe multinational dans le cadre de projets dedéveloppement d’éléments incorporels7. C’est dans la perspective de la mise enplace d’un accord de répartition des coûts tel que visé par le rapport de l’OCDEque l’auteur procède à cet examen. Tel que déjà mentionné, cette structure semblerépondre de manière unique à l’exigence d’alléger les coûts de développementsd’éléments incorporels, tout en ouvrant de nouvelles perspectives de gestionfiscale des prix de transfert8. Cette étude du phénomène international des ARCse découpe en cinq thèmes.

    Le premier dresse un état de l’actualité « prix de transfert » dans les législationsdes quatre pays qui serviront de fil d’Ariane au cours de la présente étude—l’Australie, la France, le Canada et les États-Unis. L’auteur fait ensuite uneanalyse succincte du contexte de l’option ARC et des choix structurels possibles.Suivent, une explication du concept d’ARC lui-même et un exposé de la nouvellegestion fiscale de la question des prix de transfert au sein des accords de répartitiondes coûts. Enfin, l’auteur s’interroge sur l’aspect pratique de la solution ARClorsque les conditions de mise en place de cette structure sont remises en causepar une administration fiscale nationale, obligeant ainsi les administrationsfiscales des États des autres participants à procéder à des ajustements corrélatifs.

    morale distincte. Le rapport relève néanmoins, au paragraphe 8.3, « Un ARC est un accordcontractuel plutôt que nécessairement une entité juridique distincte ou un établissementstable composé de tous les participants ».

    7 Dans le contexte américain, consulter Gregory J. Ossi, « The Significance of Intangible PropertyRights in Transfer Pricing » (le 13 septembre 1999), Tax Notes International 993-1010.

    8 L’objectif ultime de l’auteur est de décontextualiser la problématique nationale d’une tellestructure. Il est vrai que les ARC restent avant tout un concept fiscal national. L’auteur tentede prendre le contre-pied de cette logique nationale pour traiter du concept dans un cadreinternational. À l’appui de cette tentative est la réalité pratique à laquelle les entreprisesmultinationales font face. La gestion du développement et de l’exploitation des élémentsincorporels se conçoit à travers la mise en place d’une politique internationale de gestion desactivités du groupe qui doit composer avec les législations des différents États pour asseoirune stratégie fiscale organisationnelle internationale pertinente. Dans cette perspective, ilsera alors traité de certains points particuliers des législations nationales sur les ARC et nondes dispositifs complets des États auxquels il est fait référence. L’opposition qui existe entrele caractère nécessairement national des législations fiscales sur les accords de répartitiondes coûts et la gestion internationale d’un groupe est l’un des principaux éléments de laproblématique de cet article. Ce qui est une problématique nationale pour les États est, eneffet, une problématique internationale pour le groupe multinational.

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    PRIX DE TRANSFERT : GESTION NATIONALE D’UNEPROBLÉMATIQUE GLOBALELes prix de transfert font maintenant partie intégrante de la vie des administrationsfiscales des États9, tout comme de celle des multinationales. Au vu de l’envergurede la problématique globale des prix de transfert, l’auteur fait un survol desfondements nationaux de la matière et des actualités de la problématique dansles pays qui guident ensuite sa réflexion : l’Australie, la France, le Canada et lesÉtats-Unis.

    Rappel du dispositif et de l’actualité australiensLe dispositif « prix de transfert » existant est issu d’une réforme du début desannées 8010, lorsque le principe de pleine concurrence a formellement été intégréà la division 13 de la partie III de l’Income Tax Assessment Act (ITAA)11 par leconcept d’arm’s length consideration. Cette introduction touche les alinéas136AA(3)(c) et (d), ainsi que les paragraphes 136AD(1) à (4) et l’article 225concernant le régime des pénalités. Ce dispositif est périodiquement mis à jourpar un ensemble de Taxation Rulings (TR) de l’Australian Taxation Office (ATO)12.

    Sur l’actualité « prix de transfert » australienne, il convient de mentionnerque l’ATO a lancé en 1998 un vaste programme destiné à vérifier l’état de ladocumentation des politiques de prix de transfert des entreprises multinationalesaustraliennes13. L’action de l’ATO a pour objectif de déclencher une vague deprocédures de vérification de grande ampleur14. L’actualité en matière de prixde transfert est donc brûlante en Australie15.

    9 Les législations nationales sur les prix de transfert sont en constant développement. Pour uneapproche d’un mouvement récent en la matière, voir S. Hasson, « Transfer Pricing MovesEast » (octobre 1996), International Tax Review 28; Joy Jaejin Shim et Kostya Yurchenko,« Russian Tax Reform: Transfer Pricing Rules Take Effect as of January 1, 1999 » (mars 1999),26 Tax Planning International Review 25-27. Pour un état des évolutions de la législation enEurope, en Amérique du nord, dans le sud-est asiatique, ainsi qu’en Amérique du sud, voirAndrew Casley, « Turning the Screw » (avril 1999), 26 Tax Planning International Review 15.

    10 Australie, Income Tax Assessment Amendment Act 1982, no 29, article 19(1).

    11 Australie, Income Tax Assessment Amendment Act 1936, telle que modifiée.

    12 Sur le principe de pleine concurrence, voir le paragraphe 10 du Taxation Ruling TR 94/14,Income Tax: Application of Division 13 of Part III (International Profit Shifting)—Some BasicConcepts Underlying the Operation of Division 13 and Some Circumstances in Which Section136AD Will Be Applied, et le Taxation Ruling TR 97/20, Income Tax: Arm’s-Length TransferPricing Methodologies for International Dealings. En matière de pénalités, voir le TaxationRuling TR 98/16, Income Tax: International Transfer Pricing—Penalty Tax Guidelines, dontla vocation est de préciser le régime applicable.

    13 Michael Happell et Garrick Robinson, « Australia » (avril 1999), 26 Tax Planning InternationalReview 33-35, à la p. 34.

    14 « The Australian Taxation Office (ATO) is targeting 46 companies for transfer pricing auditsafter a review of 190 companies revealed that only one was maintaining adequate transfer

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    Rappel du dispositif et de l’actualité françaisLe dispositif français ne comporte qu’un seul article concernant la question desprix de transfert16 et, par ricochet, celui du principe de pleine concurrence :l’article 57 du Code Général des Impôts (CGI). Cette disposition vise à créerune présomption de transfert de bénéfices à l’étranger par voie de majorationou de minoration de prix. Fonctionne avec ce dispositif textuel, le conceptjurisprudentiel et doctrinal de l’acte de gestion anormale17. Le dispositif estcomplété par la doctrine administrative qui vient préciser les principes énoncéspar la loi et la jurisprudence18.

    Quant à l’actualité française, elle est marquée par l’inflation du dispositiftextuel « prix de transfert ». Au coeur de cette actualité se trouve l’adoption del’article L13B dans le Livre des procédures fiscales et la modification récentede l’article 57 du CGI en 199619. Également, l’adoption d’une instruction

    pricing documentation, tax commissioner, Michael Carmody, announced on 6 July 1999. The46 multinational corporations have significant cross-border related party dealings, Carmodysaid, adding that another 60 tax payers will be subject to other compliance action. All 46 taxpayers being contacted by the ATO will be offered the alternative of negociating an advancepricing agreement » (septembre 1999), no 1, vol. 1 Arthur Andersen Transfer PricingNewsletter 1.

    15 Supra, note 13, à la p. 35 : « It is clear that the ATO believe that they now have their transferpricing “house in order” and are prepared to commit significant resources to ensure complianceby taxpayers and reduce what they believe to be a significant risk to Australia’s revenue base. »

    16 Afin de comprendre la logique interne du système français sur l’application du principe depleine concurrence, il faut garder en tête deux caractéristiques systémiques qui semblentessentielles : un dispositif textuel lapidaire, une jurisprudence casuistique. Il est donc parfoisdifficile de dégager des lignes directrices d’un tel dispositif. De plus, la logique de l’approchefrançaise se trouve aux antipodes des approches anglo-saxonnes beaucoup plus systématiques.Le système n’en est pas moins cohérent, mais beaucoup plus nuancé. Il est important de préciserque l’article 238A du Code Général des Impôts traite également du transfert de bénéfices àl’étranger, mais ne concerne que l’hypothèse de transfert de bénéfices vers des pays à fiscalitéprivilégiée ou paradis fiscaux. Comme cette disposition concerne un cas très particulierd’application de l’arm’s-length, l’auteur n’en fait pas l’examen.

    17 La jurisprudence fiscale considère comme un acte de gestion anormale, « tout avantage consentipar une société à sa soeur, à sa mère, à sa filiale, sans contrepartie pour elle-même, alorsmême que cette opération serait conforme à une gestion normale du groupe », dans J.Turot,« Avantages consentis entre sociétés d’un groupe multinational » (1989), Revue de jurisprudencefiscale 263. Il pourrait être soutenu que l’article 57 n’est finalement qu’une applicationparticulière de l’acte anormal de gestion. Selon l’auteur, un examen de la jurisprudencefiscale française mène à une telle conclusion (CE 8° et 9° ss, 26 juillet 1985 req. 40066 et40067; CE 8° et 9° ss, 18 mars 1994 req. 68799 et 70814).

    18 Note du 4 mai 1973, 4 A-2-73 ; D. Adm. 4 A-1212 no 11, 1er septembre 1985. L’auteur faitremarquer que la tendance est à l’inflation du dispositif doctrinal administratif.

    19 Loi no 96-314 du 12 avril 1996 article 39 JO13; FR23/96, à la p. 51. Cette modification permetà l’administration fiscale française d’obtenir un certain nombre d’informations sur les relationsque l’entreprise en cause entretient avec une ou plusieurs entreprises exploitées hors de France.

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    administrative en date du 7 septembre 199920 vise à autoriser la conclusiond’accords préalables en matière de prix de transfert21. Enfin, l’édiction d’uneinstruction administrative en date du 26 octobre 1999 précise les conditions dujeu de la procédure arbitrale européenne récemment mise en place au sein de laCommunauté Européenne (CE)22.

    Rappel du dispositif et de l’actualité canadiensUne récente réforme de la législation en matière de prix de transfert23 constituel’actualité canadienne24. Cette réforme se traduit par l’introduction d’un nouvel

    Une instruction administrative en date du 23 juillet 1998 (BOI 13 L-7-98) est venuecompléter cette disposition. L’ensemble de ce nouveau dispositif fait l’objet de controverseset sa conformité avec la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme estdiscutée. À ce sujet, voir P. Nataf, « Prix de transfert : Un controle fiscal renforcé » (Paris, le9 octobre 1997), Les Échos, à la p. 57. Voir également C. Silberztein, J-M Priol, « Contrôledes prix de transfert : Un dispositif critiquable ? » (1998), 42 Revue Droit Fiscal 1285.

    20 Instruction administrative, le 7 septembre 1999 (BOI 4A-8-99).

    21 Ce nouvel arsenal textuel constitue une étape importante dans l’évolution du dispositif « prixde transfert » français qui démontre ainsi la volonté de l’administration fiscale française dese doter de textes lui permettant de répondre aux nouvelles exigences en la matière. L’auteursouligne la pauvreté textuelle de la législation française en cette matière. Toutefois, au coursdes trois dernières années, l’administration fiscale française semble avoir a pris la ferme décisionde remédier à ces lacunes. Voir l’interview donnée par M. Glaize, chef du bureau des affairesinternationales à la Direction générale des impôts, dans « Question d’actualité : Prix de transfert,procédure d’accord préalable », Feuillet Rapide Francis Lefebvre FR 61-99, à la p. 11.

    22 Instruction administrative du 26 octobre 1999 (BOI 14 F-1-99). Pour l’examen de la procédurearbitrale proprement dite, voir la cinquième partie de cet article. Les instructions administrativesfrançaises ont, dans la hiérarchie des normes, une valeur inférieure à celle de la loi. Pour desraisons de commodité de langage, l’auteur fait référence indifféremment au CGI, comme auxdispositions des instructions administratives, comme des éléments de la « législation » françaisesur les prix de transfert.

    23 E. Richardson et François Vincent, « Canada Takes Transfer Pricing to Task » (juillet-août1996), International Tax Review 49. Voir également Nathan Boidman, « Canada TransferPricing Proposals » (septembre-octobre 1997), 4 International Transfer Pricing Journal 239-40; François Vincent et Ian M. Freedman, « Les prix de transfert au Canada : Le principe depleine concurrence et les nouvelles règles » (1997), vol. 45, no 6 Revue fiscale canadienne,1243-75; Carole Gouin, « Fiscalité de l’entreprise qui exporte : Prix de Transfert », dans Congrès1997, tome 2 (Montréal : Association de planification fiscale et financière, 1998), 45:1-62.

    24 Les raisons de la réforme de la législation canadienne en cette matière sont multiples et variées,mais relèvent principalement de la volonté du ministre des Finances de doter le Canada d’unarsenal législatif plus performant et plus conforme aux principes directeurs du rapport OCDE.Les principaux arguments développés au soutien de cette réforme se trouvent dans le discoursde l’Honorable Paul Martin, ministre des Finances du Canada, dans le Discours sur le budget1997 : Bâtir l’avenir pour les Canadiens (le 18 février 1997). Ce document peut être consultésur le site web du gouvernement du Canada au http://www.fin.gc.ca/budget97/speeche/speeche.html (date d’accès : le 1er août 1999). Voir également Boidman, supra, note 23.

  • PRIX DE TRANSFERT ET ACCORDS DE RÉPARTITION DES COÛTS 1087

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    article 247 dans la Loi de l’impôt sur le revenu (LIR)25, ainsi que la révision dela Circulaire d’information 87-2R26.

    Selon l’auteur, deux particularités de la réforme caractérisent l’actualitécanadienne. La première autorise Revenu Canada à requalifier l’opérationintervenue entre sociétés affiliées dès lors qu’elle n’est pas conforme au principede pleine concurrence et que cette violation du principe est motivée principalementpar des considérations fiscales (alinéa 247(2)(b))27. La deuxième, que l’auteurtient à souligner, est la faculté offerte à Revenu Canada de ne pas procéder à unredressement qui déboucherait sur une diminution de la base imposable d’uneentreprise canadienne (paragraphe 247(10) LIR)28.

    Rappel du dispositif et de l’actualité américainsLe dispositif américain aujourd’hui en vigueur s’organise en triptyque autourde l’article 482 de l’Internal Revenue Code (IRC)29, du dernier règlement publiéle 1er juillet 199430 (et dont la dernière partie a été adoptée le 19 décembre 1995et traite des accords de répartition des coûts), et du dispositif relatif aux pénalités

    25 Loi de l’impôt sur le revenu, LRC 1985, c. 1 (5e suppl.), telle que modifiée. Le principe depleine concurrence y est exprimé de manière non équivoque par des références aux notionsd’« attribution de pleine concurrence » (arm’s-length allocation) et de « prix de transfert depleine concurrence » (arm’s-length transfer price) dont les définitions sont données auparagraphe 247(1). Au-delà de ces définitions, le paragraphe 247(2) traite des ajustements enmatière de prix de transfert et rappelle que les termes et conditions d’une opération entresociétés affiliées doivent être identiques à ceux qui auraient existé si elles étaient intervenuesentre personnes indépendantes.

    26 La Circulaire d’information 87-2R, « Fixation du prix des transferts internationaux », le 27septembre 1999, peut être consulté sur le site internet de l’Agence des douanes et du revenudu Canada au http://www.ccra-adrc.gc.ca/F/pub/tp/ic872rfm/ic872rf.html (date d’accès : 15janvier 2000). Dans la hiérarchie des normes, cette circulaire de Revenu Canada a une valeurinférieure à celle de la loi. Pour des raisons de commodité de langage, l’auteur fait référenceindifféremment aux articles de la LIR, comme à ceux de la circulaire d’information, commedes éléments de la « législation » canadienne sur les prix de transfert.

    27 Il est à noter que cette requalification de Revenu Canada peut viser autant la nature del’opération que son quantum.

    28 Cette disposition peut mener à une double imposition du revenu qui n’aura pas fait l’objet duredressement. Cette option, réservée à Revenu Canada, sera certainement source de difficultéssupplémentaires et constitue assurément une entorse non négligeable au principe de pleineconcurrence au profit de l’administration fiscale canadienne.

    29 Internal Revenue Code of 1986, tel que modifé (ci-après « IRC »).

    30 Treasury Regulations 1.482 (TD 8552, 1994-2 CB 93) (ci-après « Treasury Regulations »).Un exemplaire du texte se trouve à l’adresse suivante http://www.transferpricing.com/regs/482over.htm (date d’accès : le 1er août 1999).

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    en matière de prix de transfert applicable à compter du 9 février 199631. Commecet article porte sur les éléments incorporels, il semble important de rappelerque l’actualité américaine est empreinte de la polémique entourant le recours àla Comparable Profits Method visée dans le dernier règlement de 199432. Cetteméthode, très critiquée par un grand nombre d’États membres de l’OCDE pourson approche globale et non transactionnelle (et en ce sens non conforme auxprincipes directeurs de l’OCDE)33, a pour effet de faire passer le dispositif surles prix de transfert de la détermination d’un prix de pleine concurrence à ladétermination d’un bénéfice de pleine concurrence34.

    Prix de transfert : conclusion, gestion nationale d’uneproblématique globaleL’état sommaire des dispositifs normatifs et des actualités sur les prix de transferten Australie, en France, au Canada, et aux États-Unis, présenté dans cettepremière partie, constitue le terreau de l’épanouissement des stratégies fiscaleset organisationnelles en matière de gestion et de développement d’élémentsincorporels. Les principes fondamentaux de chacun des systèmes, ainsi quel’effort international de rapprochement des positions nationales par le travail del’OCDE, sont incontournables dans l’étude de processus plus sophistiqués telsque celui des ARC qui mettent en jeu les règles élémentaires gouvernant les prixde transfert. Après avoir rappelé les principales dispositions nationales applicables35,

    31 N. Raby et C. Silberstein, « Les nouvelles réglementations américaines sur les prix de transfert »(1996), 2 Cahiers juridiques et fiscaux de l’exportation 336. Pour une étude détaillée del’évolution du dispositif américain, voir Lorraine Eden, Taxing Multinationals: TransferPricing and Corporate Income Taxation in North America (Toronto : University of TorontoPress, 1998), à la p. 384. Voir également Jill C. Pagan et J. Scott Wilkie, « Transfer Pricingin the 1990s: Do the Latest U.S. Developments Relate to a Global Economy? » (juin 1992),46 Bulletin for International Fiscal Documentation 299-306; Alan W. Granwell, Mary-AnnMayo, Tood Helvie et Matthew Blum, « Proposed Section 482 Regulations: Compatibility ofUse of the Comparable Profit Interval with International Norms » (juin 1992), 46 Bulletin forInternational Fiscal Documentation 287-910.

    32 Treasury Regulations, supra, note 30, article 1.482-5.

    33 Raby et Silberstein, supra, note 31, à la p. 337.

    34 Une comparaison est de rigueur entre la comparable profits method et la méthode transactionnellede la marge nette (transactionnal net margin method) de l’OCDE. Certains notent leur similaritéset questionnent leurs réelles différences. À ce sujet, voir Doloris R . Wright, Catarina K.Nelson et Jonathan C. Kasdan, « TNMM—The OECD’s Response to CPM: Are They ReallyDifferent? » (octobre 1995), 35 European Taxation 306-14. Il est à noter que, même si lepréambule du dernier règlement de 1994 précise que cette méthode n’est à utiliser qu’endernier ressort, il faut constater qu’elle est utilisée dans la majorité des cas.

    35 Pour un exposé plus détaillé sur le fonctionnement de ces dispositifs nationaux, voir Jean-Sébastien Lénik, Prix de transfert et accords de répartition des coûts, Thèse LLM (Montréal :McGill University, 2000).

  • PRIX DE TRANSFERT ET ACCORDS DE RÉPARTITION DES COÛTS 1089

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    l’auteur dresse un état succinct des choix structurels de l’ARC pour prendreconscience de la pertinence d’y recourir ou, le cas échéant, de l’opportunité dele combiner avec certains des choix structurels décrits.

    ACCORDS DE RÉPARTITION DES COÛTS : LE CONTEXTE DEL’OPTION ARC—CHOIX STRUCTURELSCette deuxième partie brosse le paysage fiscal des structures de gestion deséléments incorporels au sein du groupe multinational. Les difficultés mises enévidence sur le plan des prix de transfert constituent certaines des motivationsprésidant à l’adoption d’une structure d’ARC. Il convient de prendre en noteque l’ARC fait parfois appel à certains concepts communs aux choix structurelsprésentés, d’où l’intérêt et la pertinence de leur étude. Enfin, l’auteur fait remarquerque ces choix structurels peuvent constituer des solutions qui, combinées à l’ARC,permettent la mise en place d’une réelle stratégie.

    Seront donc exposés succinctement, les divers schémas possibles dans le cadrede la gestion des éléments incorporels36 que sont le contrat de recherche et lecontrat de licence-redevance pour en préciser leur impact sur la politique deprix de transfert du groupe multinational.

    L’option contrat de rechercheLa gestion d’éléments incorporels par le biais du contrat de recherche consiste àisoler la R&D au sein d’une entité du groupe multinational. L’entité dans laquelleest isolée cette activité joue le rôle d’un prestataire des services contenus dansl’activité de recherche37 dont elle a la charge. Les services sont rémunérés parune société du groupe qui verse à l’entité-chercheur un droit de gestion (serviceor management fee)38. Du point de vue organisationnel, cette centralisation,combinée avec une démultiplication des entités-chercheurs39, permet d’isolerdifférents projets de recherche dans des entités distinctes et ainsi de mieux

    36 Paul W. Oosterhuis, « International R&D and Technology Transfer Arrangements » (décembre1995), 73 Taxes : The Tax Magazine 905-22.

    37 Ibid., à la p. 907.

    38 Le contrat de recherche, conclu entre l’entité-chercheur et une société du groupe, porte surdes prestations de services liées au développement d’éléments incorporels. Dans une telleperspective, l’entité-chercheur ne supporte pas les coûts et les risques du développement d’unéventuel élément incorporel, puisque ses efforts de recherche sont rémunérés par le versementde droits de gestion (management fee) couvrant les dépenses de recherche engagées parl’entité-chercheur. À cette base sera ajoutée une marge bénéficiaire destinée à générer unprofit pour cette entité (coût majoré).

    39 En effet, la pratique veut que l’optimisation d’un contrat de recherche passe par la démultiplicationde tels contrats avec différentes entités-chercheurs pour leur affecter des domaines de recherchedistincts.

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    gérer et de mieux suivre le développement de ces éléments incorporels distinctssans dispersion de la propriété industrielle ou intellectuelle40.

    En matière de prix de transfert, l’impact de cette solution est double et a traità la détermination du prix de la prestation de service41 et à la qualification ducontrat de recherche lui-même42. Cette option paraît être d’une gestion très délicateen matière de prix de transfert43.

    40 Oosterhuis relève que cette solution est couramment usitée par les multinationales européennesmais rarement adoptée seule par les entreprises américaines qui la combinent davantage avecle contrat de licence-redevance. Oosterhuis, supra, note 36, à la p. 908, mentionne que Nestléa mis en place de tels contrats pour la gestion internationale de son activité café.

    41 La logique de détermination du prix est ici unique, s’agissant de la sphère du développementd’éléments incorporels, dans la mesure où sa problématique fait entrer des considérationstenant aux prix de prestations de services. Il n’y a en effet pas, dans l’option contrat derecherche, de transfert de l’élément incorporel (comme dans le cas de la vente) ou du droitd’utilisation de l’élément en question (comme c’est le cas dans la concession de licence).L’économie du dispositif est donc guidée par les dispositions particulières nationales applicablesen matière de prestations de services et non celles applicables aux éléments incorporels.Dans cette perspective, les principes directeurs du chapitre VII du rapport OCDE sur les prixde transfert devraient recevoir application pour les États n’ayant pas adopté de règlesparticulières comme c’est le cas notamment de la France. Parmi les États qui ont adopté desdispositions particulières sur les prestations de services, il convient de citer les États-Unis(Treasury Regulations, supra, note 30, article 1.482-2), qui ont sans aucun doute développéle dispositif le plus abouti; le Canada (Circulaire d’information 87-2R, supra, note 26,paragraphes 152 et s.) et, tout récemment, l’Australie (Taxation Ruling TR 1999/1 IncomeTax: International Transfer Pricing for Intra-Group Services).

    42 Ce qui fait l’originalité du contrat de recherche est qu’il a pour objet la fourniture de prestationsde services qui vont donner lieu au développement d’éléments incorporels. Deux catégoriestrès différentes en matière de prix de transfert coexistent donc, coexistence qui est sans aucundoute la source d’une grande incertitude. La mise en place d’un contrat de recherche exigepar conséquent une grande attention sur le moment opportun de l’opération, ainsi que sur lecontenu du contrat. De ces deux variables dépend la qualification du contrat de recherchedont dépend celle des sommes versées pour l’exécution de l’activité. La qualification dessommes versées (droits de gestion ou redevances) commande l’application de règles trèsdifférentes en matière de prix de transfert et la mise en place d’une politique distincte au seinde l’entreprise multinationale. Pour une illustration américaine de la problématique du contratde recherche en matière de prix de transfert, voir Deloitte & Touche, « The Taxation ofintangibles » (supplément, mars 1998), International Tax Review.

    43 La nature « hybride » du contrat de recherche est une source d’incertitude dans la mesure oùla qualification des opérations en cause peut toujours être discutée par les administrationsfiscales des États. À cette incertitude de qualification vient s’ajouter le contexte internationalde ce genre d’opération et donc la possibilité d’approches divergentes de la part desadministrations fiscales. Il est facile de comprendre l’étendue des dangers et des risques decontentieux. Le contrat de recherche est une solution alléchante sur le plan organisationnel,mais il requiert un grand doigté sur le plan de la gestion de la question des prix de transfert,plus particulièrement, une gestion irréprochable du moment opportun de l’opération. Ibid., àla p. xxi. « The potential for IRS recharacterization of what was intended to be a servicesarrangement into a transfer of intangibles underscores the importance of finalizing allcontractual arrangements before incurring the development costs. »

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    L’option contrat de licence-redevancesCette option, de loin la plus usitée pour le développement et la gestion d’élémentsincorporels, est relativement simple. Une société du groupe (en général le holding)prend en charge la recherche et le développement de biens incorporels. Elleassume les coûts et les risques de cette opération, et détient les droits de propriétésur les éléments incorporels. L’exploitation des éléments incorporels développéssera prise en charge par d’autres sociétés du groupe (en général les filiales).Pour avoir accès à l’élément incorporel développé, les filiales devront verserune redevance au holding selon un contrat de licence formalisant le transfert dudroit d’utilisation de l’élément incorporel44.

    En matière de prix de transfert, cette option présente une différence fondamentaleavec la précédente dans la mesure où il y a un transfert d’éléments incorporels45.Le traitement de la question des prix de transfert dans l’option contrat de licence-redevances est à ce titre des plus délicats et des plus techniques46. Dans ce cas, lavalidation du respect du principe de pleine concurrence possède une géographietout à fait particulière car il est très difficile d’adopter les approches traditionnellesmettant en jeu des données comparables sur le marché, dans la mesure où laplupart des éléments incorporels développés sont uniques et qu’il n’existe parconséquent aucune donnée accessible pour asseoir une telle comparaison47. En

    44 Cette technique a l’avantage de centraliser dans le holding l’ensemble des revenus tirés de laconcession de licence et, sur le plan organisationnel, de centraliser la propriété juridique deséléments incorporels du groupe dans le holding. Par sa souplesse, ce schéma permet de gérerau cas par cas l’exploitation des éléments incorporels et éventuellement, en fonction desconditions particulières du marché d’implantation de telle ou telle filiale, d’adapter lesconditions dans lesquelles sont octroyées les licences d’exploitation. Tel que déjà mentionné,cette option peut également être combinée à un contrat de recherche. Dans cette perspective,un scénario possible serait de placer le contrat de recherche en amont et de concevoir que lasociété débitrice des droits de gestion concède à d’autres sociétés du groupe des contrats delicence moyennant le règlement d’une redevance.

    45 Rapport OCDE, supra, note 2, paragraphe 6.16, qui se lit comme suit : « Les modalités detransfert de biens incorporels peuvent être diverses : vente pure et simple ou, plus souvent,paiement d’une redevance dans le cadre d’un contrat de licence pour bénéficier de certainsdroits sur le bien en question. »

    46 La politique de prix de transfert du groupe multinational doit permettre de justifier à toutmoment que le montant de la redevance, versée au holding ou à une autre société du groupeen contrepartie du droit d’utilisation d’un élément incorporel donné, est en accord avec leprincipe de pleine concurrence.

    47 « As the number of international transactions involving non-arm’s-length transfers of technologyand intellectual property grows, the typical transfer-pricing issues continue to surface—thefair market value of the property transferred or the royalty rate for related rights. Establishingfair market royalty rates is no less problematic than establishing the property’s value. Pricingmust be commensurate with commercial reality, but all too often no transactionnal data arepublicly available for comparative purposes. », dans Richard M. Wise, « Pricing Royalties »(le 18 juin 1996), 4 Canadian Tax Highlights 47-48, à la p. 47. Le rapport OCDE de 1995 surles prix de transfert, qui consacre son chapitre VI aux éléments incoporels, relève d’emblée,

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    résumé, la difficulté du transfert d’éléments incorporels par contrat de licenceréside dans le processus de valorisation pour déterminer un montant de redevanceconforme au principe de pleine concurrence48. Afin de mieux identifier lesproblématiques auxquelles le groupe multinational peut être confronté dans untel contexte, il faut d’abord se rappeler les différentes approches économiquesde valorisation pour ensuite considérer les éléments de la problématique « prix detransfert » de cet enjeu.

    Les approches économiques de valorisationLes approches économiques de valorisation49 prennent en compte trois types devariables que sont les coûts50, le revenu51 et le marché52.

    au paragraphe 6.1 : « Il convient d’accorder une attention particulière aux transactions portantsur des biens incorporels, car celles-ci sont souvent difficiles à évaluer sur le plan fiscal ».Au paragraphe 6.13 sur le principe de pleine concurrence le rapport souligne : « Ce principepeut toutefois s’avérer particulièrement difficile à appliquer lorsque l’on a affaire à destransactions entre entreprises associées portant sur des biens incorporels, parce que ces bienspeuvent avoir un caractère spécifique compliquant la recherche de biens comparables, etparfois, la détermination de la valeur au moment de la transaction. »

    48 Le problème se pose dans les mêmes termes pour les autres formes de transfert d’élémentsincorporels. La valorisation est également une des clefs de la détermination d’un prix de pleineconcurrence lors de la conclusion d’un contrat de vente sur l’élément incorporel entre deuxsociétés appartenant à un même groupe, comme le mentionne d’ailleurs le paragraphe 6.16du rapport OCDE.

    49 Pour une analyse économique détaillée de ces problématiques, consulter R.F. Reilly et R.P.Schweihs, Valuing Intangible Assets (New York : McGraw-Hill, 1999) duquel l’auteur tireprincipalement les éléments de son analyse, et R. L. Parr, « Advanced Royalty RateDetermination Methods » dans R.L. Parr et P.H. Sullivan dir., Technology Licensing (NewYork : J. Wiley & Sons, 1996), et Eden, supra, note 31.

    50 L’approche de valorisation en termes de coûts peut se faire par le biais de deux sous-conceptsqui sont celui des coûts de remplacement de l’élément incorporel et celui des coûts dereproduction de cet élément. Il faut noter que la valorisation dont il s’agit est une valorisationéconomique, valeur qui résulte de la combinaison d’une approche comptable des coûtsintégrant des variables propres au fonctionnement du marché.

    51 La valorisation par le biais du marché est sans doute la démarche économique qui présenteles plus grandes similitudes avec l’approche fiscale par le principe de pleine concurrence.Dans cette perspective, un examen de la traduction des concepts de valorisation en termes deprix de transfert révèle de nombreux points communs avec cette approche économique. Lavaleur de l’élément incorporel, incarnée par le concept du prix anticipé (expected price), n’arien à voir avec la notion de coûts. Cette approche marque sa différence dans la mesure oùelle n’adopte pas une vision statique du phénomène de fixation du prix.

    52 La valorisation par le revenu s’appuie sur une projection du revenu économique quel’élément incorporel pourrait produire. L’usage de cette méthode exige une définition derevenu économique sur laquelle appuyer cette valorisation. Parmi les autres difficultésauxquelles les analystes pourraient être confrontés est celle de réussir à isoler la portion derevenu produite par l’élément incorporel lui-même. Comme cet élément est intégré à lachaîne opérationnelle, il est parfois très délicat d’évaluer et de valoriser la part de revenuattribuable au seul élément incorporel.

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    L’approche « prix de transfert » de la valorisationL’approche « prix de transfert » de la valorisation est révélée par la positionadoptée par l’OCDE dans son rapport de 1995 et dans les différentes législationsnationales particulières adoptées en cette matière.

    L’approche de l’OCDE

    Dans son rapport sur les prix de transfert, l’OCDE tranche sans équivoque enfaveur d’une approche contextuelle de marché pour la valorisation des élémentsincorporels et des transactions afférentes. Cette approche constitue, sur le planconceptuel, le prolongement logique de l’application du principe de pleineconcurrence53. En termes de méthodes, le rapport OCDE ne réserve pas de traitementparticulier aux incorporels. Par conséquent, les chapitres sur le principe de pleineconcurrence et sur les méthodes traditionnelles ont vocation à recevoirapplication54. L’auteur fait remarquer que le chapitre consacré aux élémentsincorporels n’est pas d’un grand secours puisqu’il traite la question en termesconceptuels plutôt que véritablement pragmatiques55.

    Les législations nationales

    La France n’a pas formellement adopté de règles précises sur la valorisation deséléments incorporels ou la détermination de taux de redevances conformes auprincipe de pleine concurrence. En cette matière, elle suit les principes directeursde l’OCDE. Le Canada56 et l’Australie57 ont adopté et explicité dans leurs

    53 Cette approche de marché tient compte des circonstances particulières de réalisation de latransaction par la prescription d’un ensemble de correctifs visant à prendre en considérationla nature de l’incorporel lui-même, ainsi que la nature et les conditions particulières du marché.La prise en compte de telles circonstances permet de compléter l’approche de la valorisationpar le marché avec celle de la valorisation par le revenu ou, le cas échéant et si les circonstancess’y prêtent, par les coûts. La souplesse relative et le caractère avant tout contextuel de l’approchede l’OCDE permettent de combiner les trois approches économiques de valorisation. Laconfiguration de cette combinaison dépendra des circonstances propres à chaque espèce.

    54 Il faut cependant reconnaître que seules la comparable uncontrolled price method (CUP) etles profit based methods semblent véritablement se prêter à la sphère des incorporels. (Le lecteurse souviendra des réserves exprimées sur l’existence de situations comparables en cette matière.)

    55 Supra, note 42. Faisant référence aux Principes directeurs de l’OCDE dans ce domaine « [...]these are conceptual rather than prescriptive and so there is plenty of scope for differences toarise between taxpayers and tax administration of their application to specific transactions. »

    56 Circulaire d’Information 87-2R, supra, note 26, paragraphes 139 et s. Bien que consacrés auxéléments incorporels, ces paragraphes ne font que rappeler l’approche du principe de pleineconcurrence en soulignant certaines spécificités de son application à la sphère des incorporels.

    57 Supra, note 11, TR 97/20. Tout en rappelant la particularité des éléments incorporels, l’ATOréaffirme l’application des méthodes relatives aux biens corporels en cette matière auxparagraphes 2.22 à 2.24. Ces paragraphes disposent :

    2.22. Intangible and intellectual property can present particular problems whenexamining comparability, usually because of the specialised nature of the property.

  • 1094 CANADIAN TAX JOURNAL / REVUE FISCALE CANADIENNE

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    législations nationales le contenu des méthodes permettant la détermination desconditions de pleine concurrence, mais n’ont pas véritablement consacré dedispositif particulier aux éléments incorporels. Quant aux États-Unis, ils ontconsacré un paragraphe complet du dernier règlement du département duTrésor58 à la valorisation des éléments incorporels. Tel que discuté dans lapremière partie de cet article, le dispositif concernant les éléments incorporelsest également constitué de l’article 482 IRC lequel, modifié en 1986, a introduitle concept de super redevance (superroyalty).

    Après une courte introduction59 et une définition60 de la notion de biensincorporels, ce dispositif aborde les problématiques relatives aux méthodes dedétermination des conditions de pleine concurrence. Le texte américain prône lechoix de la meilleure méthode61 (best method rule) parmi, notamment, laComparable Uncontrolled Transaction Method62 et les Unspecified Methodsvisées par le Treasury Regulation, article 1.482-4, consacré aux élémentsincorporels63.

    La Comparable Uncontrolled Transaction Method adopte une approchecontextuelle de marché avec tous les problèmes connus dans la sphère particulièredes éléments incorporels64. Une fois identifiées les transactions susceptibles d’être

    2.23. However, the general principles and guidelines in relation to tangibleproperty concerning comparability and the selection of the most appropriate methodis also applicable to intangible property.

    2.24. Where there is insufficient comparable data for direct comparisons, this canlead to greater reliance being placed upon profit based or other indirect arm’s lengthmethods.

    58 Treasury Regulations, supra, note 30, article 1.482-4.

    59 Ibid., alinéa 1.482-4(a).

    60 Ibid., alinéa 1.482-4(b).

    61 Cette prescription se heurte à celle de l’OCDE qui renvoie à la reasonable method rule.

    62 La comparable uncontrolled transaction method constitue la déclinaison de la CUP appliquéeaux éléments incorporels. Elle est donc basée sur une comparaison avec les transactionsréalisées sur un bien incorporel semblable entre entreprises indépendantes.

    63 Pour un exposé synthétique de cette approche méthodologique, voir Deloitte & Touche, supra,note 42.

    64 G. DeSouza, « Royalty Methods for Intellectual Property » (avril 1997), Business Economics 47.Parmi les facteurs à prendre en considération pour déterminer la comparabilité de transactions,il y a la durée du contrat de licence et les possibilités de renouvellement ou de rupture anticipéede ce contrat, les conditions d’octroi de la licence d’utilisation (étendue géographique oumatérielle des droits concédé), l’état de développement de l’élément incorporel en cause, lesconditions de la responsabilité du concessionnaire du fait des produits développés à partir del’élément incorporel, ou l’existence d’arrangements ou d’accords connexes entre le concédantet le concessionnaire. Ibid., à la p. 48. Voir également Treasury Regulations, supra, note 30,article 1.482-4(c)(2).

  • PRIX DE TRANSFERT ET ACCORDS DE RÉPARTITION DES COÛTS 1095

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    comparables, un écart statistique de redevances doit être établie. L’établissementde cet écart répond à des procédures strictes, parfois très subtiles65. La dernièreétape de ce processus est relativement simple et consiste à vérifier que le montantde la redevance visée au contrat de licence tombe dans l’écart établi. Pour êtreconforme au règlement américain, la redevance doit faire l’objet d’ajustementspériodiques dans l’hypothèse où le contrat de licence s’étale sur plusieurs années66.

    Tout comme pour la CUP, le grand problème de la Comparable UncontrolledTransaction Method est l’absence de situations réellement comparables sur lemarché des éléments incorporels qui oblige à prendre comme référentiel dessituations présentant certains points communs et à leur appliquer un ensemblede correctifs ou à recourir à d’autres méthodes telles la Comparable ProfitsMethod67 ou la Profit Split Method68. L’existence de l’ensemble de ces choix devalorisation assure une plus grande souplesse dans la gestion de la question desprix de transfert, mais ajoute à l’incertitude de la pertinence d’un choix déterminé.

    La jurisprudence joue également un rôle non négligeable dans l’incertitudecroissante à cet égard. Elle semble en effet glisser vers l’affirmation d’uneComparable Uncontrolled Transaction Method « hybride69 » fondée sur lanotion de comparables mais intégrant une notion de profit potentiel attaché àl’élément incorporel en cause70.

    ARC : Conclusion, choix structurelsL’absence de situations comparables sur le marché en matière d’élémentsincorporels oblige le contribuable à asseoir sa politique de prix de transfert surdes ajustements ou des approximations basés sur la CUP ou à recourir à d’autresméthodes. Ces ajustements ou ce recours à d’autres méthodes telles que lacontroversée Comparable Profits Method sont autant d’ingrédients préparant uncontentieux certain avec les administrations fiscales. Certaines contesteront lapertinence de tel ou tel ajustement, d’autres remettront en cause le recours à

    65 DeSouza, supra, note 64, à la p. 48. « In the Treas. Reg § 1.482(e)(2)(iii)(C), the IRS recommendscomputing the interquartile range (IQR). […] The IQR is the range from the twenty-fifth tothe seventy-fifth percentile of the results derived from the comparable transactions. »

    66 Le Treasury Regulation, article 1.482-4(f)(2) prescrit ces ajustements périodiques et prévoitun certain nombre d’exceptions dans lesquelles de tels ajustements ne sont pas requis.

    67 Treasury Regulations, supra, note 30, article 1.482-5.

    68 Ibid., article 1.482-6.

    69 DeSouza, supra, note 64, à la p. 49.

    70 De plus, il convient de relever que la comparable uncontrolled transaction method est de plusen plus délaissée au profit du recours à la comparable profits method, incompatible avecl’approche transactionnelle de l’OCDE et source de nombreuses frictions entre administrationsfiscales.

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    telle ou telle méthode comme n’étant pas la meilleure71 ou n’étant pas conformeà l’approche transactionnelle du principe de pleine concurrence72.

    Dans une telle perspective, les choix structurels de l’ARC constituent le terreauquasi-certain de conflits entre le contribuable et une administration fiscale. Lagestion d’éléments incorporels n’est certes pas impossible à l’intérieur de cesderniers schémas mais le deviendra de plus en plus à mesure que les Étatss’armeront de dispositifs sophistiqués en matière de prix de transfert.

    L’auteur est d’avis que les multinationales doivent saisir l’opportunité de cesdifficultés pour entreprendre une vaste réflexion sur les modes et les risques liésà la gestion et au développement des éléments incorporels au sein du groupemultinational.

    Selon l’auteur, l’ARC doit se trouver au coeur d’une telle réflexion commeun choix plein et entier ou comme possibilité d’ajustement des politiques deprix de transfert par combinaison de l’ARC avec les choix structurels explicités.

    ACCORDS DE RÉPARTITION DES COÛTS : DE LATERMINOLOGIE AU CONCEPTL’accord de répartition des coûts constitue un choix fiscal structurel dudéveloppement et de la gestion des éléments incorporels au sein du groupemultinational. Sur le terrain de la gestion des prix de transfert, il semble être unesolution novatrice en termes de valorisation. Tel que discuté dans la deuxièmepartie de cet article, ces problèmes de valorisation constituent des obstaclesimportants créant des zones d’incertitudes et, par conséquent, des possibilités deconflits avec les administrations fiscales sur les conditions de pleine concurrence.

    L’ARC est un élément structurel au soutien de la politique des prix de transfertdes groupes multinationaux dont il convient d’examiner, sur un plan théorique,les problèmes terminologiques et conceptuels.

    Cette troisième partie explique le concept d’ARC sur le plan international.L’auteur fait d’abord une étude de la terminologie utilisée et du concept développépar le rapport OCDE sur les prix de transfert. Il s’attarde ensuite à l’examen dusort de ce concept dans certaines législations nationales qui ont adopté desdispositions particulières en la matière.

    71 Ce type de problème se retrouve dans le contexte américain qui prescrit l’emploi de la bestmethod rule, contrairement à l’OCDE qui prescrit la reasonable method rule.

    72 Ce cas sera fréquent lorsque l’entreprise multinationale aura recours à la comparable profitsmethod américaine.

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    Accords de répartition des coûts : l’approche de l’OCDELe Comité des affaires fiscales de l‘OCDE définit l’ARC de la manière suivanteau paragraphe 8.3 de son rapport sur les prix de transfert :

    Un ARC est un accord cadre qui permet à des entreprises industrielles ou commercialesde partager les coûts et les risques de la production ou de l’obtention de biens, deservices ou de droits, et de déterminer la nature et la portée des intérêts de chacundes participants dans ces biens, ces services ou ces droits. Un ARC est un accordcontractuel plutôt que nécessairement une entité juridique distincte ou unétablissement stable composé de tous les participants. Dans un ARC, la part desavantages escomptés de l’accord revenant à un participant correspond à sa partdans le total des contributions à l’accord, compte tenu du fait que les prix detransfert ne sont pas une science exacte73. (italiques de l’auteur)

    La forme donnée à l’ARC n’est pas un critère établi par l’OCDE. Il peut s’agird’une entité juridique distincte ou d’un contrat cadre, même si cette définitionsemble pencher clairement en faveur de la vision de l’ARC contrat cadre. L’auteurfait remarquer que la qualification fiscale d’ARC n’est pas exclusive de celled’établissement stable et que, par conséquent, un accord de répartition des coûtsau sens des principes de l’OCDE peut consituer un établissement stable au sensde l’article 5 du modèle de convention sur la double imposition.

    L’objet de l’ARC est affirmé comme étant relativement large. Une telle structurepeut être mise en place tant pour le développement d’éléments incorporels quepour la prise en charge de prestations de services. Le paragraphe 8.6 soulignecependant que les ARC sont plus répandus en matière de développement conjointd’éléments incorporels. Le paragraphe 8.7 ajoute qu’une telle structure peut êtreconstituée pour des activités de recherche-développement, pour « tout financementconjoint ou partage des coûts et des risques liés au développement ou à l’acquisitionde biens ou à l’obtention de services ». D’autres exemples, plus concrets encore,sont donnés tels que la gestion de services centralisés, la mise au point decampagnes publicitaires communes aux marchés des participants.

    La limitation de la qualification d’un accord de répartition des coûts au sensde l’OCDE n’intervient donc pas sur l’objet pour lequel un tel accord peut êtremis en place ni sur la « forme » qu’il peut prendre. Le critère conceptuel de l’ARCsemble plutôt assis sur les causes et les effets de sa mise en place. Des détailsde ces aspects de la définition des ARC seront donnés plus loin dans la mesureoù ces derniers constituent également des caractéristiques opérationnelles. L’auteurtient à mentionner que l’élément fort de la qualification d’un contrat cadre enARC est une équation à deux variables qui sont les contributions que chaqueparticipant fait à la structure et l’existence d’avantages mutuels nés de la répartition

    73 Rapport OCDE, supra, note 2, paragraphe 8.2.

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    des coûts ou des risques, autrement dit l’attente légitime d’avantages de cetteassociation. Ces deux variables constituent, selon l’auteur, la clef del’appréhension du concept des ARC74.

    Le concept prenant racine dans la terminologie française ne pose donc, apriori, pas trop de difficultés à circonscrire. Dans sa version anglaise, le rapportOCDE semble cependant démultiplier le concept des ARC en deux sous-concepts.Cette démultiplication est-elle réelle ou simplement illusoire, uniquementterminologique ?

    La version anglaise du rapport OCDE qualifie l’ARC de cost-contributionarrangement. Le paragraphe 8.7 dont le contenu a déjà été cité en version française,mentionne en langue anglaise : « CCAs could exist for any joint funding orsharing of costs and risks, for developing or acquiring property or for obtainingservices75 ». Le lecteur pourrait considérer cette phrase comme simple traductionanglaise du paragraphe. Selon l’auteur, cette attitude serait superficielle dans lamesure où la citation montre qu’il existe en fait deux types d’ARC : les cost-funding arrangements et les cost-sharing arrangements. Certains soutiendrontqu’il s’agit d’une discussion sur une subtilité qui n’a pas sa raison d’être et quipeut tout au plus animer un débat théorique. La distinction faite entre cost-fundinget cost-sharing n’est cependant pas récente. La version de 1979 du rapport del’OCDE sur les prix de transfert en faisait déjà mention76. Les différences entreces deux types de structures résident dans la manière dont sont évaluées lescontributions des participants. Dans le cas du cost-sharing les contributionsreposent sur une évaluation directe des coûts et des risques de l’activité prise encharge, contrairement au schéma de cost-funding où les contributions sont évaluéesde manière forfaitaire et ne reposent donc pas directement sur les coûts véritablesde l’activité développée77. La manière dont sont évaluées les contributions

    74 Rapport OCDE, supra, note 2. Le paragraphe 8.3 rappelle que : « Dans un ARC, la part desavantages escomptés de l’accord revenant à un participant correspond à sa part dans le totaldes contributions à l’accord, compte tenu du fait que les prix de transfert ne sont pas unescience exacte. »

    75 Organisation de coopération et de développement économiques, « Transfer Pricing Guidelinesfor Multinational Enterprises and Tax Administrations » (Paris : OCDE) (feuilles mobiles),paragraphe 8.7.

    76 Organisation de coopération et de développement économiques, Prix de transfert et entreprisesmultinationales (Paris : OCDE, 1979), paragraphes 102 et s.

    77 Supra, note 31, à la p. 268. Eden relève cette distinction entre les deux types d’ARC et note,à propos des principes directeurs de l’OCDE : « Then the OECD defines two main types ofcost-contribution arrangements, which depend on how the project is financed. The first is acost-sharing arrangement, in which the group members share the actual costs, risks, andbenefits from the project; the second is a cost-funding arrangement, whereby the memberseach contribute an amount up front to finance the costs of the group activity and then sharein the benefits […]. Thus the guidelines now differentiate between cases in which the firms

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    amène l’auteur à suggérer que le schéma de cost-sharing se prêtera mieux audéveloppement d’éléments incorporels, alors que l’évaluation forfaitaire sembleêtre davantage en adéquation avec la prise en charge de prestations de services.

    À la fin des années 80, le Committee on Taxes of the Section on BusinessLaw of the International Bar Association78 s’est saisi de cette question et, plusgénéralement, du traitement fiscal réservé aux cost-contribution arrangements.Cette étude fait, de manière très claire, la distinction au sein des cost-contributionarrangements de l’existence de cost-funding arrangements et de cost-sharingarrangements79. Elle confirme la dichotomie attribuant la structure de cost-sharingplus volontiers au développement des éléments incorporels et la structure decost-funding à la prise en charge de prestations de services80.

    M. le Professeur G. Maisto souligne qu’au-delà de leurs différences, ces deuxstructures ont deux points communs indiscutables: la volonté de répartir les coûtset la volonté de centraliser certaines fonctions au sein du groupe multinational.Ces deux éléments communs constituent les motivations principales présidant àl’adoption des ARC ou, dans sa terminologie anglaise, des cost-contributionarrangements81.

    En résumé, il convient de souligner que le phénomène d’accord de répartitiondes coûts possède une géographie bidimensionnelle due aux concepts de cost-

    actually share in the functions and activities of R&D from cases in which the firms simplyfund part of the costs. » Pour une confirmation de la dualité du concept de cost-contributionarrangements, voir James J. Tobin et Dennis Olmstead, « Cost-Contribution Arrangementsand Superroyalties » (mars 1988), no 3 Intertax 61-67.

    78 Commitee on Taxes of the Section on Business Law of the International Bar Association, TaxTreatment of Cost-Contribution Arrangements (Boston : Kluwer Law and Taxation Publishers,1988), à la p. 6.

    79 Ibid. Cette étude est décomposée en un rapport général redigé par G. Maisto, ainsi qu’en 19études nationales qui rendent compte du traitement fiscal des accords de répartition des coûtsen droit interne.

    80 Ibid., à la p. 7. Lors de son essai de définition, le rapport général dispose des deux types destructures :

    I. Cost-sharing arrangements

    Arrangements under which two or more entities belonging to the same group agree toshare the actual cost and risks of a project (generally R&D) to be carried out by onegroup entity (or a newly formed group entity) in return for the project result.

    II. Cost-funding arrangements

    All arrangements amongst companies belonging to the same group under which oneentity undertakes to provide the other contracting parties with various services (includingmarketing, advertising, R&D, administration etc.) in return for a contribution establishedin proportion to the (expected) benefit each party derives or according to other criteria.

    81 Ibid.

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    funding et de cost-sharing. Cette géographie particulière est rassemblée par leciment commun de la volonté de répartir les coûts et la volonté de centralisation.

    Cet effort de catégorisation et de qualification de phénomènes distincts au seinde la catégorie fiscale des accords de répartition des coûts peut-il être confirmédans les législations nationales des États qui ont adopté des dispositionsparticulières en cette matière ? Il convient à présent de vérifier la cohérence etla validité de cette systématisation conceptuelle dans le droit interne des États.

    Accords de répartition des coûts : le droit interne des ÉtatsLe Canada et les États-Unis ont adopté des dispositions particulières concernantles ARC, tandis que la France n’a pas développé de dispositif spécial pour traiterde ce phénomène et devrait suivre les principes directeurs de l’OCDE en la matière.Quant à l’Australie, elle a adopté une position hybride dans la mesure où ellen’a pas formellement transposé le concept dans sa législation nationale mais arécemment adopté des dispositions particulières relatives aux services intragroupesqui peuvent trouver application dans le cas d’un ARC constitué pour la gestionde prestations de services. Il est à souligner que l’ATO a émis un projet de rulingtraitant en partie des ARC 82 qu’elle n’a pas encore formellement adopté. Sur leplan conceptuel, le Canada et les États-Unis constituent des exemples intéressantsquant à l’alimentation du débat sur une éventuelle systématisation de ce conceptcar les deux approches divergent. Ces divergences restent cependant cohérentesavec le rapport OCDE et semblent confirmer la possibilité d’une systématisationconceptuelle.

    L’approche américaine des ARCLa notion d’accord de répartition des coûts n’est pas une notion récente en droitaméricain. Elle apparaît dès 196683 et est formalisée dans le règlement émis parle département du Trésor en 1968. Ce texte introduit un certain nombre dedispositions sur ce qui est alors appelé les Bona Fide Cost-Sharing Arrangements.Ces accords de répartition des coûts ne peuvent être constitués que pour ledéveloppement d’éléments incorporels. Le projet de réforme du règlement modifie,en 1992, les dispositions consacrées aux ARC et consacre le concept de QualifiedCost-Sharing Arrangements. La limitation aux incorporels subsiste. Ce projet a

    82 Taxation Ruling TR 95/D29, Income Tax: International Transfer Pricing: Application ofDivision 13 of Part III and Double Taxation Agreements—Charging for Services and ExpenseAllocation, aux paragraphes 53 à 57.

    83 Proposed Regulations 1966 (Fed. Reg., vol. 31, no 148, le 12 août 1966, à la p 10399). Citédans G.Y. Yost, « The Role of Cost-Sharing Agreements in the Transfer of Technology » (août1980), 6 International Tax Journal 416. Pour un historique de l’évolution du concept dans lalégislation américaine, voir Kenneth W. Wood, « Share and Share Alike—Final Cost-SharingRegulations and Planning Considerations » (le 5 février 1996), Tax Notes International 421-32.

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    fait l’objet de vives critiques au centre desquelles s’est élevée une vague deprotestations contre la grande incertitude que représentait ce nouveau texte pourle contribuable américain84. Le texte aujourd’hui en vigueur se trouve dans lerèglement 1.482 modifié en 1994. La partie consacrée aux ARC traite au paragraphe1.482-785 du règlement et a été promulguée le 19 décembre 199586. Ces dispositionsont été amendées au cours de l’année 199687 pour constituer le texte aujourd’huien application88.

    Le concept de cost-sharing semble dominer le traitement actuel des ARC par lalégislation américaine. L’utilisation de ce concept reste limitée au développementdes éléments incorporels.

    Le concept d’ARC, ainsi défini dans la législation américaine, ne nous semblepas incompatible avec l’approche de l’OCDE. L’approche américaine est simplementplus étroite, consacrant la qualification de cost-sharing et l’utilisation de cettestructure pour les éléments incorporels seulement.

    L’approche canadienneLe concept d’ARC a été introduit en droit canadien concernant l’impot dû envertu de la partie XIII LIR89. Cette partie de la LIR a vocation à traiter des paiementsdus en vertu de l’application d’une retenue à la source. Ce concept a été appliquéaux prix de transfert par la Circulaire d’information de 1987, par renvoi auxprincipes directeurs de l’OCDE de 197990. L’introduction formelle du conceptn’intervient que dans la Circulaire d’information IC 87-2R91.

    84 Peter A. Glicklich, « IRS Guidelines for Cost-Sharing Arrangements Provide InsufficientCertainty » (juillet 1992), 71 The Journal of Taxation 42-50.

    85 Treasury Regulations, supra, note 30, TD 8632 du 19 décembre 1995.

    86 Pour un exposé du nouveau dispositif, voir Geoffrey Walker, « Using Cost Sharing To Determinean Arm’s-Length Price », dans Innovative Transfer Pricing Strategies, Insight Conferencetenue les 6 et 7 décembre 1995 (Toronto : Insight Press, 1996) 219-68. Pour une approchecomparative des dispositifs de 1968, 1992 et du dispositif final de 1995, consulter Mike Knee,Alan Shapiro et Julie Joy, « Comparative Analysis of U.S. Cost Sharing Regulations » (le 26février1996), 70 Tax Notes Special Report 1273-78.

    87 Treasury Regulations, supra, note 30, TD 8670 du 9 mai 1996.

    88 Ibid., article 1.482-7(a)(1) qui définit l’ARC comme : « A cost-sharing arrangement is anagreement under which the parties agree to share the costs of development of one or moreintangibles in proportion to their shares of reasonably anticipated benefits from their individualexploitation of the interests in the intangibles assigned to them under the arrangement. »

    89 Jean-Sébastien Lessard, « Cost-Contribution Arrangements in Canada: What Are Taxpayers inFor? » (le 13 janvier 1999), 7 Tax Management Transfer Pricing Special Report, 1-36, à la p. 4.

    90 Ibid., à la p. 5. Lessard souligne cependant l’ambiguité de cette intégration et le fait qu’en toutehypothèse, la LIR prévalait toujours sur les principes OCDE. Il relève enfin que le renvoi faitpar la circulaire n’exprime que la position de Revenu Canada de se conformer auxdits principes.

    91 Circulaire d’information 87-2R, supra, note 26.

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    Quant à la définition donnée par le dispositif canadien92, il convient de noterque si le texte français adopte une qualification différente de celle de l’OCDE(utilisant la qualification d’accord admissible de participation aux coûts (AAPC)),la version anglaise du texte vise pareillement l’hypothèse de cost-contributionarrangements93. La qualification différente dans la version française canadiennen’est pas significative de divergences conceptuelles avec le rapport OCDE. Eneffet, le champ d’application de l’ARC canadien est en ligne parfaite avec l’approchede l’OCDE94. La Circulaire d’information IC 87-2R consacre le concept de cost-contribution agreement pour la prise en charge du développement d’élémentsincoporels comme celle de prestations de services. Il est à noter que l’approcheaustralienne exprimée dans le projet de ruling TR 95/D29 est semblable àl’approche canadienne95 et donc semblable à celle de l’OCDE.

    ARC : Conclusion, de la terminologie au conceptLa géographie des accords de répartition des coûts est variable. Elle estbidimensionnelle dans le rapport OCDE, dédoublant le concept de cost-contribution arrangements en cost-sharing et en cost-funding. La législationaméricaine appréhende le concept d’ARC par le biais d’une qualification uniquede cost-sharing et réserve cette qualification aux accords de répartition descoûts formés pour le développement d’éléments incorporels. La législationcanadienne, comme le projet de législation australien, ne suit pas la voie de latransposition ouverte par le droit fiscal américain mais reprend la terminologiedu rapport OCDE pour mieux affirmer, sans doute, sa conformité avec lecontenu du rapport.

    92 Ibid., paragraphe 120. La nouvelle circulaire d’information définit les ARC comme étant :« De façon générale, un AAPC est un arrangement en vertu duquel deux parties ou pluspartagent les coûts et les risques associés à la production, au développement ou à l’acquisitiond’un bien, ou à l’acquisition ou à l’exécution de services, en fonction des bénéfices (avantages)que chaque participant peut raisonnablement s’attendre à tirer du bien ou des services envertu de l’arrangement. »

    93 Quant à l’approche canadienne, l’auteur fait usage indifférement de cost-contributionarrangement et d’arrangement de participation aux coûts.

    94 Le paragraphe 122 de la Circulaire d’information 87-2R, supra, note 26, se livre, tout commele rapport OCDE, à une énumération concrète des activités que peut prendre en charge unARC : « Il arrive souvent qu’un AAPC soit conclu en vue du développement conjoint debiens incorporels et que l’on attribue à chaque participant un intérêt dans ces biens. Cependant,les participants peuvent également mettre leurs ressources en commun pour faire l’acquisitionde n’importe quel genre de service centralisé (notamment la comptabilité, le soutien techniquedans le domaine informatique, les ressources humaines ou l’élaboration d’une campagne depublicité commune à tous les marchés des participants). »

    95 TR 95/D29, supra, note 82, paragraphe 53. Le paragraphe 53 du TR 95/D29 dispose eneffet : « MNE members may enter into an agreement for the joint production of goods,intangible property and/or services or for the joint acquisition of the same from an unrelatedparty. These are cost contribution arrangements (‘CCAs’). »

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    Au terme de cet exposé sur l’appréhension du concept d’ARC, deux voiessemblent possibles pour une conclusion. La première serait celle d’affirmer quela question terminologique est une question politique et que l’OCDE, édictantses principes après que la législation américaine eut été promulguée, a souhaité,par l’emploi d’une terminologie différente, affirmer son indépendance vis-à-visla tentative américaine. La thèse qui soutiendrait l’affirmation d’indépendancede l’OCDE vis-à-vis les travaux américains paraît être totalement fondée. Il n’endemeure pas moins que cette affirmation se fait au détriment de l’unité du conceptsur le plan international.

    Faut-il rester sur ce constat d’appréhension différenciée du concept ?

    Selon l’auteur, il appartient à la doctrine fiscale de reconstruire une cohérenceautour de schémas apparemment divergeants afin de permettre aux acteurs de lafiscalité internationale de bâtir de véritables stratégies en ce domaine.

    Cette troisième partie constitue une tentative d’élucidation du concept d’ARCsur le plan international fondée sur le paragraphe 8.7 du rapport OCDE. Cettevision tente de donner aux entreprises multinationales une image plus nette del’apparente cacophonie internationale sur la question. Elle a pour bu