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RAPPORT D’EVALUATION MULTISECTORIELLE Axe Misombo-Penekusu-Kakumbu
Shabunda, Sud-Kivu Janvier 2017
I. Contexte et méthodologie
La coalition entre les groupes armés Raïa Mutomboki (RM) Charles et Sakafari du 28 au 30 octobre 2016 a fait déplacer
la grande majorité de la population de l’axe Misombo-Penekusu-Kakumbu, dans le territoire de Shabunda, province du
Sud-Kivu. Cette population qui s’est déplacée vers la forêt et à Kama dans la province du Maniema a commencé à
regagner sa zone d’origine à partir du 02 novembre 2016 suite à la reprise de l’axe par les Forces Armées de la
République Démocratique du Congo (FARDC).
L’axe Misombo-Penekusu-Kakumbu de la zone de santé de Kalole est habité par les ethnies des Léga, des Tchi, et les
ressortissants de Maniema. Il se trouve dans le groupement de Nkulu, collectivité chefferie des Bakisi en Territoire de
Shabunda. Il est constitué de quatre aires de santé (Nyalukungu, Penekusu, Matebo, Kakumbu), subdivisées en vingt
villages (voir carte en annexe).
ACTED, avec le soutien d’ECHO, a mené du 25 novembre au 02 décembre 2016, une évaluation des besoins sur l’axe
Misombo-Penekusu-Kakumbu en vue de faire ressortir les besoins liés à ces mouvements de population, et ainsi relayer
des informations précises à l’intention de la communauté humanitaire du Sud-Kivu.
Un questionnaire a été administré individuellement à un échantillon de 109 ménages retournés par des enquêteurs
journaliers habitués à travailler avec ACTED et placés sous la supervision d’un évaluateur d’ACTED. Par ailleurs, l’équipe
d’évaluation s’est arrêtée dans chacun des vingt villages afin de compléter cette enquête ménage avec des
informations issues d’observations, d’entretiens, de groupes de discussion et de prendre les coordonnées GPS des
points critiques. Ces évaluations ont pu préciser que la plupart de ces retours ont eu lieu autour du 18 novembre 2016.
II. Accessibilité et démographie
Entre Shabunda-centre et le premier village, la distance est de 139 km. Long de 39,5 km, l’axe n’est accessible qu’en
moto et il faut 88 minutes pour le parcourir.
L’axe est calme, sous contrôle des FARDC basées à Penekusu, sans incident avec la population, ce qui encourage le
mouvement de retour continuel sur l’axe. Les évaluations ont dénombré 3 968 ménages retournés et 237 toujours en
déplacement. Le tableau 1 détaille la démographie de l’axe, selon les aires de santé.
Tableau 1 – Démographie de l’axe Mulungu-Kamulila (ménages)
Aire de santé Village Nombre de ménages retournés
Nombre de ménages toujours en déplacement
Nyalukungu Mizombo 100 12
Penekansisi 80 5
Idemba 36 0
Nyalukungu 400 27
Lugezi 90 3
Pénekusu Kiloza 150 13
Penekusu 1 800 74
Nsamba 80 12
Kanana 30 0
Penemukunza 60 8
Matebo Misoke 35 0
Kazombe 50 7
Binkutu 70 13
Mabala 60 4
Matebo 117 13
Kasaliga 100 14
Kakumbu Ngulube 120 4
Bonga 30 0
Kazombo 140 12
Kakumbu 420 16
Total 3 968 237
Aucun acteur n’est présent sur l’axe et aucune activité humanitaire n’était en cours lors de l’enquête. Par ailleurs, la
dernière intervention date du mois de septembre 2016 par le Bureau Diocésain du Développement-Kasongo (BDD-
Kansongo) qui a distribué des kits maraichers.
III. Profil socio-économique
Les résultats de l’enquête révèlent une diminution du revenu mensuel dont la moyenne actuelle (7 965 FC) est
excessivement faible par rapport à avant la crise (28 267FC)1. Enfin, on constate que tous les ménages sont fortement
endettés, à un niveau hautement supérieur au revenu des ménages. Le tableau 2 détaille cette analyse :
Tableau 2 – Revenus et endettement de la population de l’axe*
Revenu mensuel
moyen avant la crise
Revenu mensuel
moyen depuis la crise
% de ménages
actuellement endettés
Endettement moyen chez
les ménages endettés
Retournés 28 267 FC 7 965 FC
97% 37 635 FC * : Taille des ménages harmonisée à 6 membres
Le tableau 3 montre que la structure économique de l’axe n’a pas changé entre l’avant et l’après crise. La principale
activité reste l’agriculture, qui a probablement été soutenue par la dernière intervention de BDD-Kasongo en kits
maraîchers.
Tableau 3 – Activités génératrices de revenus (AGR) de la population de l’axe*
* : Les ménages sans AGR sont inclus dans les pourcentages.
1 À noter également que les revenus « depuis la crise » ont été réalisés avec un seul mois de référence au cours duquel il est possible que peu de revenus aient été engrangés par les ménages. Par contre, la moyenne des revenus « avant la crise » s’est faite sur plusieurs mois.
Principale AGR avant la crise (% de la population)
Principale AGR depuis la crise (% de la population)
% d’accès actuel à la terre
% de pratique actuelle de
l’agriculture vivrière
Retournés Agriculture, Pisciculture,
Elevage (87%) ;
Commerce, Mines, Secteur
privé (6%) ;
Travail journalier (1%) ;
Fonction publique (5%) ;
Sans revenu (1%).
Agriculture, Pisciculture, Elevage
(69%) ;
Commerce, Mines, Secteur privé
(11%) ;
Travail journalier (5%) ;
Fonction publique (8%) ;
Sans revenu (7%).
87% 98%
Tableau 4 – Ordres d’importance des pratiques agricoles actuelles et de préférence des pratiques désirées
Il n’y a pas de grand marché sur l’axe, juste un petit Limanga (marché) à Penekusu où on compte quelques
commerçants. La vente des produits se fait directement dans les ménages et habituellement ce sont des productions
locales.
Les denrées principalement vendues sont de la farine de manioc (400FC/Kg), de l’huile de palme (300FC/Bouteille), de
l’arachide (1 500FC/Kg), des haricots (2 500Kg), et du poisson salé (2 500 la pièce).
IV. Besoins sectoriels
A. Abris et articles ménagers essentiels
Le score moyen est inférieur au seuil RRMP :
Tableau 5 – Score AME
Score moyen
% supérieur à 3,8
Code d’alerte 5 du RRMP
Retournés 3,7 48%
Une forte proportion de la population présente une vulnérabilité aigüe-sévère en abris :
Tableau 6 – Score Card Abris*
Score moyen
% Vulnérabilité Aigüe
sévère (>3,9)
Retournés 4,2 40% * : Le calcul du score Abris n’a pu être effectué que sur 100 ménages
B. Sécurité alimentaire
Le SCA des ménages est pauvre. Les vulnérabilités alimentaires sont alarmantes avec un SCA moyen de 26,3 et
83% des enquêtés sont en dessous de 28 (seuil RRMP). Le tableau 7 présente les données du SCA :
Tableau 7 – Score de consommation alimentaire
Score moyen
% inférieur à 28
Code d’alerte 5 du RRMP
Retournés 26 82%
Il a été constaté un recours permanant à des stratégies de survie néfastes avec une moyenne supérieur à 20 (21,4). La
stratégie la plus fréquemment utilisée par les ménages est la consommation d’aliments moins préférés (5,3). Le tableau
8 ci-dessous synthétise ces résultats :
Importance des pratiques actuelles Préférences si des semences de qualité
étaient disponibles
Vivrières Maraîchères Vivrières Maraîchères
1 Maïs Oignon 1 Riz Aubergine
2 Riz Amarante 2 Manioc Amarante
3 Manioc Aubergine 3 Haricot Oignon
4 Arachide 4 Arachide Chou
5 Soja 5. Maïs Autre
Tableau 8 – Indice de stratégies de survie simplifié et adapté*
Score moyen de l’indice
simplifié % supérieur à 20
Score moyen de l’indice
adapté
Retournés 21,34 52% 24
* : Le score adapté comprend la consommation des semences de la prochaine saison, le fait de se déplacer dans des zones non sécurisées pour accéder à des besoins primaires et d’annuler les déplacements quotidiens.
Le nombre de repas par jour est aussi relativement faible chez les adultes tout comme chez les enfants :
Tableau 9 – Nombre de repas par jour
Nombre moyen pour
les adultes
% d’adultes à 1
repas / jour
Nombre moyen pour
les enfants
% d’enfants à 1
repas / jour
Retournés 1,1 85% 1,3 67%
C. Éducation
Le secteur de l’éducation semble n’avoir pas été particulièrement touché par l’évènement, sauf la proportion
d’enfants scolarisés :
Tableau 10 – Différents indicateurs liés à l’éducation sur l’axe, avant et après la crise actuelle
Avant crise Actuellement
Nombre d’écoles (primaires/secondaires) ouvertes 25 25
Proportion des salles de classe partiellement / totalement détruites 93% 93%
Proportion d’enfants de 6-11 ans retournés déscolarisés 9% 25%
Proportion d’enseignants qui encadrent plus de 55 élèves 4% 4%
Taille de la population qui fréquente une école primaire ou secondaire 3 248 3 123
D. Eau, hygiène, assainissement et santé
Tel que présenté au tableau 11, la situation de l’accès à l’eau est assez critique, contrairement à l’accès aux
latrines hygiéniques. Par ailleurs 56% des enfants de 0 à 5 ans auraient subi un épisode de diarrhée au cours des
deux semaines précédant l’évaluation.
Tableau 11 – Différents indicateurs liés à la santé sur l’axe, avant et après la crise actuelle
Avant la crise Actuellement
Nombre de litres d’eau consommés par jour (moyenne ménages)
N/A
38,6
% de ménages ayant accès à une source d’eau protégée fonctionnelle à
moins de 500m du domicile 20% 9%
% de ménages ayant accès à une latrine hygiénique 56% 42%
L’axe évalué est constitué de 4 aires de santé :Nyalukungu, Penekusu, Matebo et Kakumbu.
Dans l’aire de santé de Nyalukungu, il y a 2 centres de santé (le centre de santé de Nyalukungu de l’Etat et le centre de
santé 5e CELPA). L’aire de santé de Penekusu ne dispose que d’un seul centre de santé (Centre de santé de Penekusu),
tout comme les aires de santé de Matebo et de Kakumba.
Suite aux dernières exactions des RM sur la population de l’axe Mizombo-Penekusu-Kakumbu, 39 personnes ont été
violées dont 2 hommes. Parmi ces personnes, 24 ont reçu des kits PEP dans les 72 heures et 14 ont reçu des traitements
médicaux.
V. Perspectives
Les récents mouvements de populations ayant eu lieu sur l’axe évalué ont eu des conséquences notables sur la
vulnérabilité des populations retournées et ce, quel que soit le secteur étudié. Par ailleurs, cette vulnérabilité est
accentuée par un niveau d’endettement très élevé et des revenus très faibles.
Les besoins prioritaires dégagés par les ménages, par ordre d’importance sont les abris, la sécurité alimentaire et la
santé. Concernant la sécurité alimentaire, les oléagineux (huile raffinée), puis les céréales, les tubercules (farine de
manioc), et les légumineux (haricots) sont les plus demandés. Concernant les Articles Ménagers Essentiels (AME), les
savons de lessive, puis les matelas et les bâches ont été les plus demandés.
Nicolas JOUËT Chargé de Suivi Evaluation Pays Kinshasa, ACTED - RDC [email protected]
Pour plus de détails :
Souleymane CISSOKO Coordinateur zones Sud-Kivu et Nord-Kivu Bukavu, ACTED - RDC [email protected]
Annexe I. Carte de référence de l’axe Misombo-Penekusu-Kakumbu