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335 Revue nérale de Droit et Interdisciplinaire de Likasi (2018) 1 : 2 RGDILI Réseaux sociaux : réflexion sur l’émergence d’une nouvelle forme de gouvernance des droits de l’homme en République démocratique du Congo ______________________ BROZECK KANDOLO WA KANDOLO RESUMÉ Le présent article fait une analyse des réseaux sociaux comme étant un nouvel espace d’expression et d’application de certains droits fondamentaux en République démocratique du Congo (RDC). Notre réflexion part d’un constat établissant que les réseaux sociaux remettent à l’ordre du jour les libertés considérées comme acquises : liberté d’expression, le droit à l’information, le droit de réunion et la protection à la vie privée, etc. De ce fait, nous soulevons les difficultés liées à l’absence d’une législation adaptée aux nouvelles réalités alors même que les réseaux sociaux constituent aujourd’hui une autre façon de gouverner et de faire gouverner l’État, pour s’adaptant aux nouvelles technologies. Toutefois, il y a lieu de se demander, sur qui incombe la responsabilité en cas de violation des droits fondamentaux sur les réseaux sociaux ? Telle est la principale préoccupation sur laquelle va tourner le contenu de cet article. ______________ MOTS-CLÉS : Droits de l’homme – réseaux sociaux – droit numérique – régulation – égalité – justice – dignité humaine – internet – télécommunications – hébergement – gouvernance – Facebook – twitter – LinkedIn ______________ ABSTRACT This article analyzes social networks as a new space for the expression and application of certain fundamental rights in the Democratic Republic of Congo (DRC). Our reflection is based on a finding that social networks put back on the agenda freedoms considered as acquired: freedom of expression, the right to information, the right of meeting and protection of privacy, etc. As a result, we raise the difficulties En préparation d’un diplôme en Master droit du numérique à l’Université de Poitiers (France); titulaire d’un diplôme en droit privé et judiciaire (Bac+5) de l’Université de Lubumbashi (RD-Congo); initiateur et le Directeur du cadre d’étude Réceptacle Cyberjustice. Contact : [email protected]

Réseaux sociaux : réflexion sur l’émergence d’une nouvelle ......membes des outils et intefaces d’inteactions, de pésentation et de communication, ainsi que les réseaux

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335 Revue générale de Droit et Interdisciplinaire de Likasi (2018) 1 : 2 RGDILI

Réseaux sociaux : réflexion sur l’émergence d’une nouvelle

forme de gouvernance des droits de l’homme en République

démocratique du Congo ______________________

BROZECK KANDOLO WA KANDOLO

RESUMÉ

Le présent article fait une analyse des réseaux sociaux comme étant un nouvel espace d’expression et d’application de certains droits fondamentaux en République démocratique du Congo (RDC). Notre réflexion part d’un constat établissant que les réseaux sociaux remettent à l’ordre du jour les libertés considérées comme acquises : liberté d’expression, le droit à l’information, le droit de réunion et la protection à la vie privée, etc. De ce fait, nous soulevons les difficultés liées à l’absence d’une législation adaptée aux nouvelles réalités alors même que les réseaux sociaux constituent aujourd’hui une autre façon de gouverner et de faire gouverner l’État, pour s’adaptant aux nouvelles technologies. Toutefois, il y a lieu de se demander, sur qui incombe la responsabilité en cas de violation des droits fondamentaux sur les réseaux sociaux ? Telle est la principale préoccupation sur laquelle va tourner le contenu de cet article.

______________

MOTS-CLÉS :

Droits de l’homme – réseaux sociaux – droit numérique – régulation – égalité – justice – dignité humaine – internet – télécommunications – hébergement – gouvernance – Facebook – twitter – LinkedIn

______________

ABSTRACT

This article analyzes social networks as a new space for the expression and application of certain fundamental rights in the Democratic Republic of Congo (DRC). Our reflection is based on a finding that social networks put back on the agenda freedoms considered as acquired: freedom of expression, the right to information, the right of meeting and protection of privacy, etc. As a result, we raise the difficulties

En préparation d’un diplôme en Master droit du numérique à l’Université de Poitiers (France); titulaire d’un diplôme en droit privé et judiciaire (Bac+5) de l’Université de Lubumbashi (RD-Congo); initiateur et le Directeur du cadre d’étude Réceptacle Cyberjustice. Contact : [email protected]

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of not having legislation adapted to new realities, even though social networks are now another way of governing and governing the state, adapting to the new technologies. However, one must ask, who is responsible for the violation of fundamental rights on social networks? This is the main concern that will turn the content of this article.

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KEY-WORDS :

Human rights - social networks - digital law - regulation - equality - justice - human dignity - internet - telecommunications - hosting - governance - Facebook - twitter – LinkedIn

______________

IIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIII

SOMMAIRE

PROLÉGOMÈNES ........................................................................................... 337

I LE DROIT À L’ÉPREUVE DES NOUVELLES TECHNOLOGIES CAS DES RÉSEAUX SOCIAUX ........................................................................................................ 340

A La règlementation de l’économie numérique ..................................... 341

B Le droit lié aux réseaux sociaux .......................................................... 347

II LES DROITS DE L’HOMME À L’ÈRE DES RÉSEAUX SOCIAUX EN RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO ........................................................................ 357

A L’état de lieux de l'exercice des droits de l'homme sur les réseaux sociaux ..................................................................................................... 357

B Les réseaux sociaux face aux droits de l’homme ................................ 366

CONCLUSION................................................................................................. 376

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« Considérant qu’une conception commune de ces droits et libertés est de la plus haute importance pour remplir pleinement cet engagement ».

Préambule de la Déclaration universelle des droits de l’homme

PROLÉGOMÈNES

De nos jours, avec l’avènement de l’internet en général et des réseaux sociaux en particulier, il est né une nouvelle forme de participation des citoyens à la gestion de l’État (nouvelle gouvernance), qui marche de pair avec l’internet1, « les (nouvelles) technologies de l’information et de communication2 (TIC) », à travers les différents réseaux de diffusion et de communication entre les membres de la société ou les internautes, entendez par-là « les réseaux sociaux »3.

Aujourd’hui, les réseaux sociaux sont devenus un extraordinaire espace d’expression « démocratique », qui semble produire des effets vis-à-vis des gestionnaires des États et soulève une réelle question de la gouvernance électronique dans un pays. Nous pouvons le constater par l’attention particulière que le gouvernement attache aux communications faites à travers ce moyen. Ainsi, l’on peut dire que les réseaux sociaux

1 Sur le plan sémantique et étymologique, au cours de l'histoire de la création d'Internet, différents noms sont parfois considérés comme ancêtres du terme « Internet » : internetting, interconnecte, networks, internetworking, internetwork, international inter-connected networks, Inter Net, internet et International Network. En 2008, ceux qui prétendent connaître l'origine du terme sont légion (un exemple courant est d'affirmer qu'« Internet » est l'acronyme d'interconnected networks). Voir à ce sujet, NDUKUMA ADJAYI KODJO, Cyberdroit, télécoms, internet, contrats de e-commerce. Une contribution au droit congolais, Kinshasa, PUC, 2009, p. 19. 2 Les expressions « nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC) », « technologies de l’information et de la communication » (TIC), ou encore « information technologies (IT) » désignent tout ce qui relève des techniques utilisées dans le traitement et la transmission des informations, principalement l’informatique, l’internet et les télécommunications : voir en ligne : <http://www.wikipedia.org/wiki/Technologies_et_de_la_communication> (consulté le 22 septembre 2018 à 21:41). 3 Le terme Réseaux Sociaux désigne l’ensemble des sites internet permettant de se constituer un réseau d’amis ou de connaissance. Cela est professionnel et fournit à leurs membres des outils et interfaces d’interactions, de présentation et de communication, ainsi que les réseaux sociaux les plus connus sont Facebook, Twitter, Linkedin, Instagram, Viadeo et YouTube.

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imposent une nouvelle forme de gouvernance et une nouvelle forme de mise en œuvre des droits de l’homme, qui renforce la démocratie au sein des États.

En RDC, par exemple, l’arrivée des réseaux sociaux et du web 2.0 (ou Web Social) dans l’internet a contribué à l’émergence de nouvelles pratiques démocratiques, parfois inacceptables par le pouvoir public. Ces dernières vont au-delà de la gouvernance étatique (gouvernement, parlement et parti politique), puisqu’elles investissent désormais les différents lieux de participation sociale : groupes de discutions sur Facebook, forum d’échanges, blogues personnels ou professionnels, profil personnel ou professionnel sur Twitter, Facebook, whatsapp, viber, skype, Instagram, etc. À travers ce moyen, certains droits, parfois violés lorsque l’on tente de les exercer, sont exercés sans qu’aucun gouvernement n’ait le moyen de les empêcher. Nous pensons à la liberté d’expression, au droit à l’information et à la liberté de réunion. Ces droits se manifestent très activement à certaines périodes où tout citoyen se voit obligé d’émettre un point de vue à l’actualité. C’est ce que nous connaissons aujourd’hui, au moment où la question électorale devient une question de la vie nationale. Ainsi, les réseaux sociaux concurrencent les médias nationaux, souvent censurés par les gouvernements.

Le rôle des médias sociaux a été fixé par le co-fondateur de Facebook, Mark Zuckerberg, comme une « […] tendance à rendre tout plus ouvert et probablement le changement social le plus profond »4.

Dans une perspective de mobilisation citoyenne, les réseaux sociaux contribueront à mettre à l’avant-scène politique des dossiers controverses, autrement dit, des dossiers que l’on ne peut pas dire dans nos medias nationaux. La protestation qui entoure les menaces de fermeture ou de hausse de prix dans l’utilisation d’internet est une preuve de participation de tout le monde aux réseaux sociaux. L’utilisation des réseaux sociaux a fait du monde entier des journalistes. Damien Cambay le confirme à travers la devise de Storify (un réseau social) lorsqu’il dit qu’ «Aujourd’hui, tout le monde est journaliste»5. En janvier 2011, cette phrase a pris tout son sens : le monde entier a suivi les révolutions tunisienne et égyptienne à travers les

4 AGENCE FRANCE-PRESSE, « Facebook pas pressé d’entre en bourse », en ligne : <http://www.lapresseaffaires.cyberpresse.ca/ economie/technologie/201003/04/01-4257381-facebook-pas-presse-dentrer-en-bource.php> (consulté le 04 septembre 2018 à 13:05). 5 Damien CAMBAY, « La circulation de l’information sur les réseaux sociaux », en ligne : <http://www.clemi.com> (consulté le 20 septembre 2018)

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images postées sur les réseaux sociaux. Plus longtemps, les élections en Afrique, les situations au Venezuela, en Algérie et au Soudan ont été suivies par le monde entier à travers les réseaux sociaux

La RDC n’échappe pas à subir les conséquences de l’implosion des réseaux sociaux. L’on se souviendra du rôle joué par les médias sociaux dans les manifestations de janvier 2015, lorsque la population congolaise de Kinshasa faisait des marches pour empêcher un changement d’une disposition de la loi électorale devant conduire au « glissement6 » de l’ancien Président de la république Joseph Kabila et de septembre 2016, lorsque les congolais ont marché pour signifier un délai de préavis au Président de la république qui arrive à la fin de son mandat présidentiel le 19 décembre 2016 mais aussi lors de l’élection présidentielle du 30 décembre 2018 ou dans la soirée les internautes congolais se mirent à publier les procès-verbaux des différents bureaux de vote . Tant avant, pendant qu’après ces manifestations, les congolais ont partagé des vidéos et messages sur les réseaux sociaux montrant leur lutte contre le pouvoir, ce qui a d’ailleurs poussé le gouvernement congolais à bloquer l’accès à l’internet (uniquement lors de la première marche de janvier 2015 et lors de les élections du 30 décembre) puis par après à certains réseaux sociaux comme Facebook et Twitter pendant presque un mois sur toute l’étendue de la république.

Ces exemples nous montrent que chaque citoyen a la capacité de propager très rapidement et gratuitement une information à travers les réseaux sociaux, qui peut atteindre chaque endroit de la planète couvert par l’immense toile d’internet (le cyberespace). Toutefois, si la circulation libre de l’information participe évidemment à la démocratie et à la liberté d’expression, il est également devenu un lieu où l’information croise la désinformation7, dans un flou entretenu et souvent manipulé. Les pouvoirs en place, les publicitaires, les militants, les simples citoyens ont, en effet, compris au fil du temps que l’enjeu était de taille : le web en général et les réseaux sociaux en particulier sont un outil capable d’agir en profondeur sur les esprits et d’impulser des comportements au sein de la société. Le

6 « Glissement » est un terme utilisé en RDC pour désigner le dépassement d’un mandat public, particulièrement celui du Chef de l’État, fixé constitutionnellement par l’article 70. 7 Marie PELTIER, « Internet et réseau sociaux : outils d’information ou de désinformations », en ligne : <http://www.paxchristwb.be/publications/anlyses/internet-et-reseaux-outils-d-information-ou-desinformation-de-citoyennete-ou-de-propagand,0000505.html> (consulté le 04 septembre 2018 à 15:30).

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gouvernement et ses institutions passent eux-mêmes, aujourd’hui, par le web et par les réseaux sociaux pour transmettre leurs différents messages.

Ainsi, il est important de se demander si l’on peut considérer les réseaux sociaux comme un nouvel outil par lequel la population contrôle les actions du gouvernement et constitue une autre forme de gouvernance de l’État, tant par les gouvernants que par les gouvernés ? Cette nouvelle forme de gouvernance, en RDC, se base sur quel cadre juridique ?

Répondre à ces questions nous amène à faire une analyse sur l'état de lieux de l'exercice des droits de l'homme sur les réseaux sociaux en RDC (II). Mais bien avant, il est plus judicieux de faire une étude sur l’impact de l’internet sur le droit, c’est-à-dire ce que dit le droit congolais face à la question des nouvelles technologies et des réseaux sociaux (I).

I LE DROIT À L’ÉPREUVE DES NOUVELLES TECHNOLOGIES CAS DES RÉSEAUX SOCIAUX

Les Technologies de l’information et de la communication (TIC) offrent à la masse mondiale le moyen de communiquer en un clic avec les populations du monde entier, de s’informer en temps réel, de s’instruire et de conclure de transactions sans interlocuteur physique et sans bouger de chez soi. Les distances et les frontières sont abolies. Ainsi, il est question, dans cette première partie de notre réflexion, de faire une étude sur l’état de lieux des TIC car les réseaux sociaux ont pour soubassement l’informatique. C’est pourquoi, il nous paraît mieux d’analyser la règlementation de l’économie numérique en RDC (A) avant d’étudier le droit lié aux réseaux sociaux (B).

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A La règlementation de l’environnement numérique

1 Notions

A l’origine des télécommunications en RDC se trouvaient la sécurité et la nécessité de communiquer des colons belges disséminés à travers un vaste territoire à la nature hostile au départ et immensément doté des potentialités de tout genre. Le pays hérita à l’indépendance en 1960 d’un réseau filaire, des quelques relais à micro-ondes et d’une station terrestre de standard. A l’indépendance, les télécommunications n’ont pas connu la modernisation et le développement nécessaires pour couvrir la superficie nationale et répondre à l’innovation technoscientifique8.

S’agissant de l’internet, la technologie Internet a pénétré le sol congolais depuis 1995. C’est seulement vers 1998 qu’elle commence à devenir accessible au grand public avec comme nom de domaine du pays « .zr » qui devient par la suite « .cd » et qui est géré par une société privée du nom de Congo Internet Management (CIM), agréée par le ministère des Postes et télécommunications (PTT). Ici également, c’est l’initiative privée qui est à la base9.

Quant au mode d’accès, le cybercafé a demeuré longtemps l’unique modèle d’accès public à l’Internet. Mais actuellement, dans des grandes villes, les gens ne sont plus obligés de se rendre dans le cybercafé car l’internet est désormais accessible par téléphone portable.

2 Cadre juridique de l’économie numérique en République démocratique du Congo

Les activités des télécommunications ont, pendant longtemps, été réservées à la seule compétence de l’État. La puissance publique veillait à fixer le cadre réglementaire applicable en même temps qu’elle prenait en charge l’exploitation des réseaux et des services des télécommunications notamment par le biais de l’administration centrale10.

8 François OSSAMA, Les nouvelles technologies de l’information : enjeux pour l’Afrique subsaharienne, Paris, L’Harmattan, 2001, p.120. 9 Id., p.50. 10 Lepage BUSHABU WOTO, De la mise en œuvre de la régulation des télécommunications en droit congolais (RDC), Paris, École nationale supérieure des télécommunications, 2005, p.7, En ligne : in <https://www.telecom-parisch.fr> (consulté le 07 mars 2018 à 20:39).

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La régulation consiste en l’application par l’autorité compétente de

l’ensemble des dispositions juridiques, économiques et techniques qui permettent aux activités de télécommunications de s’exercer effectivement à la satisfaction de consommateurs, des opérateurs et de l’État11.

L’histoire congolaise du droit des télécommunications remonte à l’année 1940. Elle est marqué par plusieurs étapes qui peuvent être ramenées à trois : le monopole de l’État (a), la libéralisation de fait (b) et la libéralisation de droit (c).

a L’état de gestion monopolistique des TIC en République démocratique du Congo

Cette première étape de la naissance du droit des télécommunications a débuté avec l’ordonnance législative n°254/TELEC du 14 août 1940. Cette ordonnance constitue la première loi sur les services de télécommunications, qui a accordé à l’État le monopole de l’exploitation de télécommunications et celui de règlementation à l’État. C’est l’administration des Postes, Téléphones et Télécommunications (PTT) qui fut chargée de cette exploitation monopolistique en mode régie. Mais en 1978 l’administration de PTT fut par la suite supprimée au profit de l’Office Congolais des Postes et des Télécommunications (OCPT). Celui-ci bénéficiait du monopole de l’État dans la gestion des postes et télécommunications. L’OCPT deviendra l’office national des postes et des télécommunications du Zaïre (ONPTZ), suite au changement du nom du pays décidé sur le plan politique). Ce fut l’œuvre de l’Ordonnance-loi 6 n°8-475 du 13 décembre 1968 portant création de l’Office national de postes et télécommunications du Zaïre, en abrégé « ONPTZ » 12.

A la création de l’Office Congolais des Postes et des Télécommunications (OCPT), ce dernier avait de facto, exercé la fonction de réglementation par la tenue des dossiers d’octroi de licences, la gestion des fréquences radioélectriques, le pouvoir de concession et l’application de la législation et de la réglementation en vigueur. Cette situation a perduré jusqu’à l’avènement de l’ordonnance n°82-027 du 13 décembre 1982 portant

11 MUTOMBO KYAMAKOSSA, Étude de faisabilité du projet de création de l’Autorité de Régulation de la Poste et des Télécommunications en R.D.C., Kinshasa, s.e., 2002, p.1. 12 En Droit administratif, la régie est un mode de gestion de service public. « On est en présence d’une régie lorsque le service est directement exploité par l’Administration au moyen de son personnel et de son patrimoine ». Voir Liévin MBANGU TSENGE, Droit du travail congolais face à l’usage des technologies de l’information et de la communication : la problématique de nouveaux défis, Bruxelles, L’Harmattan, 2016, p.154

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cadre organique du Département des PTT qui a rétabli le Secrétariat général aux PTT autrefois confondu à l’OCPT. A l’occasion, les fonctions d’exploitation et de réglementation furent séparées entre l’OCPT et le Secrétariat général aux PTT.

b La libéralisation non consacrée par des textes législatifs (la libéralisation de fait)

Quoique la libéralisation sur le plan législatif du secteur des télécommunications interviendra en 2002, depuis 1989, il a été délivré des licences de concessions de services publics des télécommunications aux opérateurs privés alors que le monopole de l’État n’était pas encore abrogé par un texte législatif. Le manque d’abrogation claire du monopole donnera lieu à un contraste entre les faits tendant vers la libéralisation et les textes qui continuaient à consacrer le monopole d’État. Ce qui fut le cas en 1989 et en 1995.

En effet, en 1989, le Gouvernement zaïrois a approuvé un opérateur de réseau mobile privé, appelé TELECEL (qui deviendra par la suite STARCEL), employant la technologie AMPS13 ; sans aucune réforme législative globale,

une première étape de libéralisation venait d’être lancée dans l'industrie des télécommunications en RDC : le fait a précédé le droit.

En revanche, en 1991, rappelons-le, il y eut la création du RENATELSAT également autorisé pour agir avec le monopole en dépit des faits de concession du service public des télécommunications aux privés. Toutefois, par la suite, les faits tendant vers la libéralisation corroboreront l’élan vers la libéralisation du secteur des télécommunications tout en demeurant sous l’égide des lois consacrant le monopole des entreprises publiques. Ainsi, en 1995, l’État zaïrois accordera une deuxième licence d’exploitation de la téléphonie AMPS à COMCELL.

Les faits successifs observés entre 1995 et 2002 qui marquent la démonopolisation sur le plan législatif, sont les suivants :

13 AMPS : Advanced Mobile Phone System. C’est une norme de téléphonie mobile analogique américaine de 1ère génération développée par les Bell Labs et dont les expérimentations ont débuté en Amérique du Nord en 1978, puis au Canada, au Royaume-Uni, en Australie et dans quelques autres pays. Voir : « Téléphonie mobile – 1G, 2G, 3G et 4G expliquées », en ligne : <www.commentcamarche.net> (consulté le 15 décembre 2018). Voir également, « Bringing information to people : celebrating the wireless Decade », en ligne : <www.milestonespast.com> (consulté le 15 décembre 2018).

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- En 1997 : le Gouvernement congolais désigna la technologie GSM

comme standard officiel de fonctionnement de mobile dans le pays et a exigé aux deux premiers opérateurs de mobiles de digitaliser leurs réseaux ;

- En 1998 : le Gouvernement accorda une licence GSM 900 à CWN (Congolese Wireless Network, le premier opérateur de téléphonie GSM qui a signé par la suite une joint-venture avec Vodacom International Ltd en 2001, en vue de la création de l’actuelle Vodacom Congo RDC sprl) ;

- En 2000 : le Gouvernement accorda une deuxième licence GSM 900 à Celtel-Congo, puis une troisième licence GSM 1800 à SAIT Télécom14 et, enfin, dans la même année, une troisième licence à un opérateur GSM 1800 du nom de Congo Chine Télécom (CCT, en sigle, fruit d’une association entre les acteurs privés chinois et l'État congolais).

c La libéralisation de droit

La libéralisation du secteur des télécommunications en RDC est intervenue en 2002 par le biais de la loi-cadre15 n°013-2002 du 16 octobre 2002 sur les télécommunications. Cette loi-cadre ne permet cependant qu’une libéralisation partielle16, se présentant comme un instrument de la nouvelle politique de télécommunications en RDC17 et introduisant quelques innovations18.

En effet, le secteur de télécommunications connaît, depuis quelques années, une profonde mutation. Celle-ci est la conséquence de l’évolution constatée dans différents domaines techniques, politiques et économiques. Cette mutation tend à transformer le secteur de télécommunication, jadis

14 Qui avait été dénommé TIGO puis actuellement racheté par la société de télécommunication Française ORANGE. 15 Une loi-cadre est une loi au contenu très général, définissant les grands principes ou orientations d’une réforme ou d’une politique dont les domaines d’application sont définis par les décrets. 16 La loi précitée a temporairement maintenu des droits exclusifs ou sociaux en faveur de l’exploitant public, opérateur historique (OCPT, aujourd’hui SCPT et RENATELSAT). 17 Cette nouvelle politique définit de manière plus claire les principes, les règles et les institutions qui régissent les activités, les réseaux et les services de télécommunications en RDC. Pour plus de détails à ce sujet, voir l’exposé des motifs de la loi-cadre sur les télécommunications en RDC. 18 Mis à part les aménagements relatifs au monopole et au statut de l’exploitation public, cette règlementation innove essentiellement dans la séparation des fonctions de régulation et d’exploitation, ainsi que dans les régimes d’exploitation.

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administré et cloisonné au niveau national, en un secteur de plus en plus immergé dans la compétition mondiale. C’est pourquoi, depuis quelques années, certains pays africains ont promulgué des lois sur les télécommunications qui ont restructuré le secteur. Ces restructurations ont porté sur la dissociation des services postaux de secteur des télécommunications, la séparation des actions de réglementation de celles d’exploitation confiées à des organismes distincts, la création d’instances indépendantes de réglementation, la privatisation de l’exploitant publics par association des capitaux publics et privés nationaux et même internationaux et sur l’ouverture à la concurrence du marché des services à valeur ajoutée voire des services de base.

3 De nouveaux défis posés à la régulation de l’internet

Les limites temporelles et spatiales, repères traditionnels du droit, se trouvent bouleversées dans le contexte de la société de l’information, marquée par l’absence de frontières et l’immatérialité des communications. Le caractère international, polycentrique et évolutif du réseau rend complexe sa régulation : sa dimension et son architecture décentralisées font obstacle à l’identification des services et de leurs responsables et à la sanction des contenus illicites ou préjudiciables véhiculés.

Ainsi nous repérons comme difficulté de légiférer l’internet, la dimension internationale du réseau qui rend plus difficile la lutte contre la cybercriminalité, alors que la communication, le commerce, mais aussi le crime, ne connaissent pas la notion de frontière, les lois restent essentiellement tributaires de cadres nationaux. La lutte contre la cybercriminalité et contre les contenus illicites se heurte à la différence des législations applicables sur le réseau. En effet, la règle de territorialité délimite la sphère géographique sur laquelle un État a le pouvoir d’édicter des règles et de les appliquer, et les législations nationales peuvent présenter d’importantes différences.

La RDC est un État qu’on pourra considérer comme un “paradis numérique”, car la législation en matière numérique est encore laxiste, et cette inefficacité des institutions judiciaires favoriseraient la cybercriminalité. Si l’on ajoute les facteurs techniques, qui peuvent rendre les preuves des infractions commises particulièrement volatiles, on comprend les défis que la cybercriminalité lance aux systèmes nationaux de répression des infractions. Le principe de territorialité de la loi, qui témoigne de la souveraineté des États, s’applique donc mal avec la pratique du réseau mondial, puisque les

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activités sur le réseau, rattachées en droit au seul régime juridique du territoire sur lesquelles elles se déploient, deviennent en fait internationales. Comme seconde difficulté, il y a la dimension internationale du réseau qui induit une concurrence des systèmes juridiques sous l’effet de la mondialisation. Les entreprises cherchent les conditions économiques les plus favorables.

Traditionnellement, les règles fiscales et sociales applicables constituaient le premier critère de choix. Aujourd’hui, le choix du droit applicable développe ses effets dans de nouvelles matières et plus particulièrement en matière de droit de la consommation. Avec le réseau, ces pratiques de “forum shopping” (choix de la réglementation la plus favorable) se diffusent : alors que dans le “monde réel” elles sont essentiellement accessibles aux entreprises, n’importe quel internaute peut, sans difficulté, faire héberger des pages personnelles en les soumettant à une législation autre que la législation nationale. En outre, certains acteurs proposant leurs services en français aux consommateurs français peuvent très bien exercer depuis un autre pays sans que l’utilisateur s’en rende compte au premier abord19.

La dimension mondiale du réseau ne signifie pas l’impuissance des démarches nationales en matière de régulation des contenus. Comme l’ont confirmé la consultation et les débats du “Sommet mondial des régulateurs”20 organisés par le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), il apparaît peu raisonnable d’attendre l’avènement d’une conception mondiale de la liberté d’expression pour se poser la question de la régulation des contenus. Face à la diversité des législations, il s’avère difficile d’élaborer des règles communes, y compris sur des objectifs de protection essentiels tels que la lutte contre le FakeNews ou intox21 (dont la perception est, à titre d’exemple, très différente en France et en RDC) ou le racisme (appréhendé très différemment aux États-Unis et en Europe). Une variété extrême des “seuils de tolérance”, sur différents sujets, peut être en effet constatée d’un pays à l’autre.

19 Christian PAUL, Du droit et des libertés sur l’internet, la corégulation, contribution française pour une régulation mondiale, Paris, Rapport au Premier ministre, mai 2000, p.60. 20 Sommet organisé à l’UNESCO du 3O novembre au 1er décembre 1999. Les interventions à ce colloque sont disponibles sur le site du Conseil supérieur de l’audiovisuel (Français), à l’adresse : <http://www.csa.fr>. 21 Fake news ou Intox est le fait de propager des informations délibérément fausses.

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Ainsi, nous estimons pour notre part qu’au regard du principe de

subsidiarité, la régulation du contenu relève essentiellement de la responsabilité des États. Il reste maintenant de savoir quel est le droit qui est lié aux réseaux sociaux ?

B Le droit lié aux réseaux sociaux

1 Notions

Nous pouvons définir l’Internet comme « un réseau informatique mondial offrant une variété de services d'information et de communication, composé de réseaux interconnectés utilisant des protocoles de communication standardisés »22.

Quant aux réseaux sociaux, ils sont apparus sur Internet vers la fin des années 1990, réunissant des personnes via des services d’échanges personnalisés, chacun pouvant décider de lire les messages de tel ou tel autre utilisateur. Un réseau social désigne « un ensemble de personnes réunies par un lien social »23. Il est aussi « un ensemble d'identités sociales comprenant des individus ou des organisations reliées entre elles par des liens créés lors des interactions sociales. Il est représenté par une structure ou une forme dynamique d'un groupement social »24.

Dans l’article de l’Encyclopaedia Universalis intitulé « Réseaux sociaux, internet », Danah Boyd et Nicole Ellison, définissent les sites de réseaux sociaux comme « des services Web qui permettent aux individus de construire un profil public ou semi-public dans le cadre d'un système délimité, d'articuler une liste d'autres utilisateurs avec lesquels ils partagent des relations et de voir et de croiser leurs listes de relations et celles faites par d'autres à travers la plate-forme »25.

22 “Internet is a global computer network providing a variety of information and communication facilities, consisting of interconnected networks using standardized communication protocols”, en ligne : <http://oxforddictionaries.com/definition/ english/Interne>. 23 Voir en ligne, à l’adresse : <http://www.futura-sciences.com/fr/definition/t/informatique-3/d/reseau-social_10>. 24 Voici une vidéo de quatre minutes qui explique le concept en détail, voir à l’adresse : <http://mediassociaux.eureka.ntic.org/ display_lo.php?oai_id=oai%3Aeureka.ntic.org%3A4dd4194e506a12.77745155>. 25 Christophe DUBOIS, Catherine CHATET et Aude THEPAULT (CNDP d'Aquitaine), Dossier : « Les réseaux sociaux en CDI », dossier réalisé en aout 2011, disponible sur le site du Centre

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Dans leur article « Facebook et autres », Claudine Chassaniol et Gabriel

Giacommotto, distinguent quatre catégories de réseaux : professionnels (linkedin, viadeo,…), de loisirs (Myspace, flickr,...), de microblogging (Twitter), multifonction (facebook) et à nous d’y ajouter le service de messagerie telle que Whatsapp, viber et Imo. Les fonctions sont ainsi listées : phatique (maintenir un contact), informative, professionnelle (présenter son CV, ses travaux, …) et ludique (jeux, tests, quizz, recherche d’amis, ennemis, connaissances)26.

Parmi les réseaux sociaux les plus connus en RDC, nous pouvons citer Facebook, Twitter et Whatsapp. Nous pouvons aussi considérer Youtube comme un réseau social puisqu’il a développé des outils d’interactions entre ses membres.

Le réseau Facebook a été créé en 2004 par Mark Zuckerberg27 dans sa chambre d’étudiant à Harvard. Les deux tiers de l’école s’inscrivent en deux semaines28. Facebook est le plus connu parmi tous les réseaux sociaux, mais aussi le plus utilisé à ce jour. Dans l’ouvrage, « Facebook, on s’y trouve », Éric Delcroix et Alban Martin définissent Facebook comme :

« [U]n site dit communautaire, permettant de maintenir et de tisser des liens entre individus. Il s’agit d’une boite à outils sociale, en quelque sorte, qui peut servir à la fois personnellement et professionnellement (jouer, se divertir, faire des rencontres, trouver des bons plans) et professionnellement (acheter, vendre, collaborer, organiser des évènements, se former, faire de la publicité) ».

National de Documentation Pédagogique (CNDP), en ligne : <http://www.cndp.fr/savoirscdi/cdi-outil-pedagogique/reflexion/les-reseauxsociaux-au-cdi.html#c6850> 26 Voir en ligne, à l’adresse : <http://www.cndp.fr/savoirscdi/cdi-outil-pedagogique/reflexion/les-reseaux-sociaux-au-cdi.html> 27 Mark Elliot Zuckerberg, né le 14 mai 1984 à White Plains (New York) est informaticien et chef d’entreprise américain. Il est le fondateur du site internet de réseautage social Facebook, dont il est le président-directeur général. 28 Éric DELCROIX et Alban MARTIN, Facebook, on s’y retrouve, Paris, Pearson Éditions, 2008, p.5.

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Fondé sur la théorie des six degrés de séparation29 de Frigyes Karinthly

et sur celle des réseaux de Dunbar et Mayfield30, Facebook rassemble aujourd’hui plus de soixante-dix millions d’individus,

Le deuxième réseau social le plus répondu est Twitter. Le site Twitter est

« [U]n service de micro-blogging. Cet outil de réseau social permet d'envoyer des messages de 140 caractères maximum à partir de son espace membre. A l'inverse, vous pouvez consulter les messages des personnes que vous suivez. Cet outil de réseau social permet d'améliorer la communication, cela devient en quelque sorte un média social»31.

Twitter est « un outil de réseau social et de microblogage qui permet à l’utilisateur d’envoyer gratuitement des messages, bref, appelés tweets (« gazouillis »), par Internet, par messagerie instantanée ou par SMS »32.

Parler de l’Internet et des réseaux sociaux et leur relation avec la démocratie nécessite également de mentionner le terme blog. Dans l’ouvrage, Les Blogs – Nouveau média pour tous33, Benoit Desavoye commença sa définition par ces mots : « Définir un blog n’est pas simple. La multitude de définitions existantes en est la preuve. L’origine de cette difficulté est que les blogs sont à la fois un outil et un phénomène aux facettes multiples. Que l’on s’attache au fond ou à la forme, et la définition variera rapidement». Pour lui, un blog est « un outil de publication permettant à

29 Les six degrés de séparation est une théorie établie par le hongrois Frigyes Karinthy en 1929 qui évoque la possibilité que toute personne sur le globe peut être reliée à n'importe quelle autre, au travers d'une chaine de relations individuelles comprenant au plus cinq autres maillons. 30 Robin Dunbar est un anthropologue anglais, qui a émis comme hypothèse une limite imposée au nombre d'individus ayant des relations stables au sein d'un groupe. Il a ainsi prédit que 147,8 était la taille moyenne d'un groupe d'humains cohérent. Plus tard, ce calcul a été adapté aux réseaux sociaux en ligne, notamment par Ross Mayfield. La théorie a évolué, amenant ainsi à limiter à 150 la taille limite d'un groupe cohérent d'individus, taille en deçà de laquelle il n'est pas nécessaire de développer d'efforts supplémentaires afin d'assurer la cohésion du groupe. Une sorte de limite de retour sur investissement. 31 Voir en ligne, à l’adresse : <http://glossaire.infowebmaster.fr/twitter/> 32 Voir en ligne, à l’adresse : <http://democratie.exprimetoi.net/t821-twitter-un-outil-de-reseau-social> 33 Benoit DESAVOYE, Christophe DUCAMP, Xavier DE MAZENOD et Xavier MOISANT, Les Blogs – Nouveau média pour tous, s.l., M21 Éditions, 2005, p.18.

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n’importe quel internaute de mettre en ligne des textes et des images aussi facilement qu’il le ferait avec un logiciel de traitement de texte »34.

Le terme Blog est « une abréviation de weblog, qui peut se traduire par « journal sur Internet ». Défini souvent comme un site personnel, il s’agit d’un espace individuel d’expression, créé pour donner la parole à tous les internautes (particuliers, entreprises, artistes, hommes politiques, associations,…etc.)»35.

2 La nature juridique des réseaux sociaux

D’entrée de jeux, il sied de préciser qu’en droit congolais il n’existe pas encore jusqu’à la rédaction de cet article une loi sur l’usage des réseaux sociaux moins encore de l’internet sous format de l’usage actuel. De ce fait, nous constatons que les lois congolaises ont besoin d’une cure de jouvence, mais du moins, pour des besoins scientifiques, nous ferons recours à la méthode comparative36 qui nous permet de faire une étude sur la nature juridique des réseaux sociaux dans d’autres législations comme celles France et d’autres États d’Afrique de l’Ouest étant du même système juridique (Romano-germanique) que la RDC.

Pour notre part, il nous semble très difficile de qualifier juridiquement un réseau social. Et pour y arriver tout d’abord, selon nous, il faut distinguer le réseau, qui est, en quelque sorte, le service rendu, de l’entreprise, prestataire de ce service. Ainsi, quand on parle de Facebook, par exemple, on peut vouloir parler du réseau lui-même, dont l’adresse est : www.facebook.com, ou de la société Facebook (Facebook, Inc.) dont le siège social se trouve à Palo Alto en Californie au États Unies d’Amérique et qui est dirigée par Mark Zuckerberg. Or, ce qui nous intéresse dans le cadre de cet article ce sont les réseaux sociaux, eux-mêmes, et non la société qui les contrôle même si, bien évidemment, on ne peut évoquer l’un sans faire

34 Id. 35 Voir en ligne, à l’adresse : <http://www.overblog.com/offres-blog/definition-blog.php> 36 La méthode comparative, est une méthode de droit qui nous permet de faire une comparaison qui peut s’effectuer entre les sources primaires et secondaires de deux systèmes juridiques à comparer : d’un côté, le système juridique international et régional et, de l’autre, le système juridique national. Elle peut également s’effectuer entre les différentes familles juridiques, notamment entre la famille romano-germanique et celle de la Common law (anglo-saxonne). Lire à ce sujet, Pierre Félix KANDOLO ON’UFUKU WA KANDOLO, Guide Kandolo. Méthodes et règles de rédaction d’un travail de recherche en droit, Mauritius, éditions Universitaires Européennes, 2018, p.287.

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allusion à l’autre. Et, quand nous envisagerons la question du droit de la responsabilité, c’est bien la société exploitant le réseau qui est concernée. Mais, quand nous évoquons la difficulté à qualifier juridiquement un réseau social, nous envisageons bien le réseau lui-même, et non la société qui l’exploite. En effet, qualifier juridiquement la société qui exploite un réseau social ne pose pas de grande difficulté. Si nous prenons de nouveau l’exemple de Facebook Inc., il s’agit d’une société américaine non cotée, « incorporée » dans l’État de Californie. Pour ce qui est de son statut, une décision du Tribunal de grande instance de Paris37 a confirmé ce que beaucoup d’auteurs avaient présagé, à savoir que Facebook a la qualité de prestataire technique de service de communication au public en ligne assimilable à un hébergeur alors qu’en droit congolais la loi cadre de 2002 sur les télécommunications ne fait aucunement mention d’un droit réservé aux hébergeurs des sites internet.

Il sied de souligner la différence qui existe entre les hébergeurs et les éditeurs au sein des services de communications au public en ligne. Les hébergeurs sont définis comme « […] les personnes physiques ou morales qui assurent, même à titre gratuit, pour mise à disposition du public par des services de communication au public en ligne, le stockage de signaux, d’écrits, d’images, de sons ou de message de toute nature fournis par des destinataires de ces services »38. Tandis que les éditeurs peuvent être déterminés comme « […] les prestataires qui ont le pouvoir de déterminer les contenus mis à la disposition du public »39. À l’analyse de ces définitions, on comprend pourquoi il était crucial pour les entreprises de réseaux sociaux d’obtenir la qualification d’ « hébergeurs », car leur régime de responsabilité est, en effet, bien moins contraignant que s’ils avaient la qualification d’éditeurs de contenus. L’idée est que les hébergeurs ne peuvent pas, a priori, avoir connaissance du caractère éventuellement illicite des contenus que leurs utilisateurs, les éditeurs, mettent en ligne. Et, le législateur européen a reconnu qu’il leur était impossible de contrôler tous les contenus avant la mise en ligne. Par conséquent, il a été décidé de ne pas les décharger complètement de toute responsabilité, mais de limiter cette responsabilité

37 TGI Paris, 20 avril 2010, RLDI 2010/61 n°2019 cité par J. COUARD, « Facebook est un prestataire technique de services de communication au public en ligne assimilable à un hébergeur de sites » (2010) 64 RLDI. 38 Cette définition est tirée de l’article 6 de la loi n°2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique (LCEN), prise à la suite de la directive « commerce électronique », Directive n° 2000/31/CE du 8 juin 2000 de l’union européenne. 39 J. COUARD, préc., note 37

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aux cas où ils avaient connaissance du caractère illicite d’un contenu et n’ont pas agi suffisamment rapidement pour le retirer.

En revanche, si cette qualification d’hébergeur s’applique aux sociétés exploitant un tel réseau (réseau social), elle ne répond pas à notre question initiale, celle de savoir : quelle est la nature juridique des réseaux sociaux ? En effet, en l’absence de réglementation spécifique aux réseaux sociaux en droit congolais, pour déterminer quel régime juridique leur appliquer, il faut déterminer leur nature juridique. Pour cela, nous allons les comparer à un certain nombre d’objets dont on connait la nature juridique et le régime, pour essayer de déterminer s’ils sont suffisamment similaires pour que l’on puisse appliquer leur régime aux réseaux sociaux ainsi nous procèderons par une approche comparative.

Pour déterminer le régime juridique applicable aux réseaux sociaux, nous allons comparer les éléments dont le support électronique est plus traditionnel tels que la presse écrite. Par-là, nous voulons répondre à la question de s’il est possible de comparer la page personnelle d’un individu sur un réseau social à un journal traditionnel ? Il faut observer que la presse congolaise est soumise à un régime particulier consacré notamment par la Loi n°96-002 du 22 juin 1996 fixant les modalités de l’exercice de la liberté de presse40, mais aussi par l’Ordonnance n°81-050 du 2 avril 1981 portant

création et statuts d’un établissement public dénommé Office de radiodiffusion et de télévision41 et l’Ordonnance-loi n°81-012 du 2 avril 1981

portant statuts des journalistes œuvrant en RDC42.

Bien qu’il n’est pas question, pour éviter de nous écarter de notre sujet, d’analyser dans cette réflexion le régime juridique de la presse, il y a néanmoins lieu de préciser, avec Gérard Cornu, les contours du terme « presse ». Selon ce dernier auteur, la presse peut être entendue comme un « […] ensemble des moyens d’information quel qu’en soit le mode d’expression »43. Cette définition, extrêmement large recouvre beaucoup d’activités. S’y référant, l’on peut être tenté d’envisager les réseaux sociaux comme faisant partie des organes de presse. En effet, il est vrai que l’utilisateur des réseaux sociaux a le statut d’éditeur car il publie régulièrement des photos, des vidéos, des commentaires voire parfois des notes. Cette publication est, en

40 J.O.R.Z., n° spécial, août 1996, p. 5. 41 J.O.R.Z., n° 8, 15 avril 1981, p. 41. 42 Id., p. 14. 43 Gérard CORNU, Vocabulaire juridique, 8e édition, Paris, LGDJ., p. 713.

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général, limitée à ses « amis » voire « aux amis de ses amis ». Mais, il est vrai qu’à l’intérieur de ce cercle, qui peut être plus ou moins limité, chaque utilisateur agit comme un journaliste qui reçoit des informations de ses sources et des agences de presses et les publie. On pourrait dès lors concevoir un réseau social (Facebook ou Twitter notamment) comme un organe de presse où tous les utilisateurs seraient des journalistes qui s’échangeraient des informations entre eux.

Pour notre part, les réseaux sociaux, bien que phénomène récent, empruntent beaucoup de caractéristiques à la presse. Mais nous constatons qu’ils entrent dans le champ d’application de la loi fixant les modalités de l’exercice de la liberté de presse. Mais quelle est la problématique liée aux réseaux sociaux ?

3 Problématique juridique liées aux réseaux sociaux

Parmi les problèmes juridiques posés par les réseaux sociaux, beaucoup sont liés aux droits de la personnalité qui doivent être entendus comme des « droits inhérents à la personnalité humaine, droits inaliénables qui appartiennent à toute personne physique pour la protection de ses intérêts primordiaux »44. Parmi ces droits, il y a le droit à la vie, à l’intégrité physique ou encore le droit au respect de la vie privée. Ces droits sont tout particulièrement mis à l’épreuve par l’existence même des réseaux sociaux et par leur mode de fonctionnement. Ainsi, beaucoup reste encore à faire aussi bien dans le domaine du respect de la vie privée que dans celui de la détermination de la nature de la liberté d’expression et de ses nécessaires limites dans le cadre de l’utilisation de ces réseaux. D’où, dans cette partie de notre réflexion, nous analysons notamment les droits lié au respect de la vie privée, la partie relative à la liberté d’expression sur les réseaux sociaux sera analysée au point II du présent article. Lorsqu’on parle du respect de la vie privée, il faut faire allusion au droit à l’image (a), au droit d’auteur (b) au droit à l’oubli (c), considérés comme les véritables assises de ce droit.

44 Id., p.679.

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a Le droit à l’image

La notion du droit à l’imagine a pour base le droit de la personnalité. Ce droit est organisé tant par les traité et accords internationaux que par la constitution et les lois. En fait partie, le droit de passage, le droit à l’intégrité physique, qui inclut le droit à la vie privée, le droit à l’intégrité morale et le droit à l’image. Le droit à l’image confère, en effet, d’une part le droit de s’opposer à toute prise ou diffusion et, d’autre part, le droit d’exploiter son image45. Il permet à son titulaire d’autoriser ou d’interdire la diffusion de son image. Cependant, dans certaines situations, le droit à l’image connaît des restrictions. C’est le cas de prendre l’image des personnalités publiques, l’image captée dans un lieu public, etc.

Il faut toutefois noter que, dans tous les cas de figure, lorsque nous sommes devant un journaliste, son devoir professionnel l’oblige de livrer des informations vérifiables et, dans certaines circonstances, avec l’autorisation du concerné. Malheureusement, les journalistes des réseaux sociaux ou de l’internet n’ont pas encore un code de conduite moins encore une éthique à respecter. Pour cela, nous estimons qu’en diffusant l’image d’un individu à la télévisons et/ou sur internet sans son consentement, il y a une atteinte aux droits de la personnalité. Sous cet angle, les droits de la personnalité constituent une limite à la liberté des médias traditionnels et même à celle des médias sociaux.

b Droit d’auteur

Il ne s’agit pas ici de faire d’une étude exhaustive du droit d’auteur mais simplement de comprendre son fonctionnement et en quoi il peut être mis en cause dans l’utilisation des réseaux sociaux.

Le droit d’auteur est fondé sur la notion d’ « œuvre de l’esprit ». Cette notion, bien qu’au cœur de la matière, n’est pas définie dans notre loi sur la propriété intellectuelle46. Par un souci de simplification, nous allons nous servir de la définition que donne Gérard Cornu, celle qui consiste à considérer le droit d’auteur comme une « […] création de l’esprit empreinte d’originalité […] »47. Cette définition est clarifiée par la Loi congolaise qui énumère les

45 Vinny KOYAGIALO KONYELO, La liberté de la presse et ses limites en droit congolais, mémoire de Licence en droit, Faculté de droit, Kinshasa, Université Protestante au Congo, 2013, en ligne : <http://memoireonline.com> 46 En R.D.Congo cette matière est régie par la loi n°82-001 du 7 janvier 1982. 47 G. CORNU, préc., note 43, p.633.

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éléments du droit d’auteur. En effet, selon l’article 2, alinéa 2 de la loi sur la propriété intellectuelle, les éléments du droit protégé sont : « les inventions, les dessins et modèles industriels, les signes distinctifs, les dénominations commerciales et géographiques ainsi que les enseignes peuvent faire l’objet d’un titre de propriété industrielle appelé, selon le cas, brevet ou certificat d’enregistrement ». De cette manière, toute œuvre de l’esprit est protégée, d’une part par un droit moral attaché à la personne de l’auteur, perpétuel, inaliénable, imprescriptible, opposable à tous, discrétionnaire et d’ordre public et, d’autre part, par des droits patrimoniaux exclusifs, temporaires et cessibles. Or, l’on remarque que régulièrement un certain nombre d’œuvres de l’esprit circulent sur les réseaux sociaux.

Il faut néanmoins chercher à déterminer quels sont les comportements qui vont à l’encontre de la protection de ces œuvres et quels sont les comportements autorisés et qui ne portent pas atteinte à la propriété intellectuelle ?

La première situation à envisager est celle de l’auteur de l’œuvre de l’esprit qui décide de publier son œuvre sur un réseau social. Prenons l’exemple d’un utilisateur qui décide de publier ses dessins sur Facebook. À ce niveau, quelques questions suscitent notre attention : l’auteur de l’œuvre perd-t-il toute prérogative sur son œuvre publiée sur un réseau social ? Peut-il revenir sur sa décision de publication ? Un tiers peut-il « réutiliser » l’œuvre publiée dans ces conditions ? Tout d’abord, il faut noter que le droit de divulgation, c’est-à-dire le « don de l’œuvre au public »48, est une prérogative du droit moral de l’auteur. Par conséquent, l’article L121-2 du code français de la propriété intellectuelle précise que : « L'auteur a seul le droit de divulguer son œuvre. […] il détermine le procédé de divulgation et fixe les conditions de celle-ci ». Pour revenir à notre exemple, non seulement l’auteur des dessins a le droit de les publier sur Facebook ce qui a pour effet de les divulguer mais il est le seul à avoir ce droit et il choisit aussi le procédé de divulgation. Ainsi, non seulement un tiers ne peut pas divulguer les dessins sans son accord mais s’il décide de les divulguer en les publiant sur Facebook, un tiers ne peut pas, sans son accord les publier sur un autre réseau comme Twitter, par exemple.

On pourrait par ailleurs discuter sur le fait de savoir si la publication d’une œuvre sur un réseau est une « divulgation ». À cette préoccupation, la

48 Olivier LALIGANT, La divulgation des œuvres artistiques, littéraires et musicales en droit positif français, Paris, LGDJ, 1983, p.49.

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jurisprudence française s’est interrogée sur la question de savoir si la communication de l’œuvre à un cercle restreint de personnes ou à un ami devait être considérée comme une divulgation49. On se demande également si la publication sur un réseau social est une mise à disposition du public ? Comme dans les autres cas que l’on a étudiés jusqu’ici, tout dépend des paramètres de confidentialité de la personne sur le réseau. Toutefois, il faut noter que dans ce cas-ci, un autre paramètre semble attirer l’attention de la jurisprudence50 : la volonté de l’auteur. Mais il faut considérer, comme cela sera le cas dans 90%, que la publication d’une œuvre sur un réseau conduit à sa divulgation. On s’interroge alors sur les conséquences de cette divulgation.

La divulgation d’une œuvre n’entraîne évidemment pas la perte de toute prérogative de l’auteur sur l’œuvre, au contraire, on pourrait même dire que le droit d’auteur commence réellement à s’appliquer au moment de la divulgation. En effet, même si théoriquement, une œuvre est protégée dès sa création, dans les faits, avant qu’elle ne soit divulguée, la question du droit d’auteur se pose peu. C’est à partir de sa divulgation qu’il faut se situer pour parler du droit d’auteur.

c Le droit à l’oubli

Cette notion est une création prétorienne de plusieurs juridictions européennes et françaises en particulier. Ce droit peut être défini comme le principe selon lequel « toute personne qui s'est trouvée associée à un événement public, même si elle en a été le protagoniste, est fondée à revendiquer un droit à l'oubli et à s'opposer au rappel d'un épisode de son existence »51. Ce droit à l’oubli, qui est un droit de la personnalité, vise à protéger la vie privée des individus qui, à un moment de leur existence, se sont retrouvés impliqués dans un événement qui a été médiatisé.

L’idée des juges qui ont créé ce droit est que, si au moment des faits, par exemple au cours d’un procès, des éléments concernant la vie privée d’un individu peuvent être rendus publics sur les réseaux sociaux au nom du droit à l’information, cette exception est liée à « l’actualité » de ces faits. Par conséquent, quand, des années plus tard, une personne décide de publier de nouveau ces mêmes informations, la personne concernée, qui ne pouvait

49 CA Paris, 1er septembre 2001. 50 TGI Paris, 17 février 1999. 51 TGI Paris, 25 mars 1987 : D. 1988, somm. p. 198, cité par Marine DE MONTECLER, Le droit à l’heure des réseaux sociaux, Mémoire de recherche, Paris, HEC Paris, 2011, p.37.

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empêcher leur parution à l’époque des faits, pourrait s’y opposer au nom du « droit à l’oubli ». Ainsi, toute publication de telles informations après le temps d’actualité doit être faite avec l’accord du concerné, sinon, l’auteur de cette publication portera atteinte au droit à l’oubli et donc supportera les conséquences de la publication faite. Comment sont protégés tous ces droits en République démocratique du Congo à l’ère des réseaux sociaux et, surtout, les droits dits de l’homme ?

II LES DROITS DE L’HOMME À L’ÈRE DES RÉSEAUX SOCIAUX EN RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO

Pour la première fois dans l'histoire de l'humanité, tout homme peut dorénavant s'adresser directement à tout autre homme et se hausser individuellement au niveau de l'universel. Chacun peut à l'instant devenir l'interlocuteur de tout autre et jouer un rôle positif dans la consolidation de la communauté humaine. De l'universalité abstraite des premiers principes des droits de l'Homme, nous sommes passés, en quelques générations, à leur possible universalisation. L’humanité peut désormais se porter garante de la protection des droits de tout homme, et, à ce titre, l'appropriation de la Toile par les citoyens du monde constitue une étape véritablement révolutionnaire dans l'appropriation des droits de l'homme eux-mêmes52. Mais quel est l'état de lieux de l'exercice des droits de l'homme sur les réseaux sociaux en RDC (A) et quel est l’impact des réseaux sociaux face au respect des droits de l’homme (B) ? Telles sont les deux questions auxquelles nous nous efforcerons de proposer des réponses dans cette partie de notre réflexion.

A L’état de lieux de l'exercice des droits de l'homme sur les réseaux sociaux

Grâce à l’Internet, la barrière entre l'homme et la communauté humaine est effectivement sur le point de tomber, ce qui permettrait à chaque être humain de vivre dans un monde un peu plus libre, et un peu plus fraternel. L’Internet rend possible et encourage le partage d’une éthique des droits de l’homme par tous les hommes. Il est sans doute un outil extrêmement important dans la diffusion des droits de l’homme à l’échelle

52 Marc AGI, « Les droits de l'homme et Internet », étude élaborée par l’Académie internationale des droits de l'Homme, disponible en ligne : <http://www.educnet.education.fr/legamedia/droits-homme/default.htm (consulté le 20 juin 2018).

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mondiale. Pourtant, plusieurs violations aux droits de l’homme découlent de l’utilisation de l’Internet53, comme par exemple, la pédophilie et la protection des mineurs, le droit d’auteur, l’accès à l’information, la liberté d’expression, la protection des données personnelles, ou la protection de la vie privée54. Malgré les efforts étatiques et internationaux, la réponse à ces violations semble difficile dans la mesure où l’Internet apparaît comme un espace qui échappe à toute autorité étatique.

En RDC, l'utilisation des TIC ne cessent de croître. Dans un pays de plus de 80 millions d'habitants55 où le taux de pénétration de la téléphonie mobile s'établit à 56% et continue de croître de façon exponentielle dans ce pays d'Afrique centrale, mais le taux de pénétration de l'Internet reste l'un des plus bas sur le continent : 4,2%56. Il y a cinq opérateurs de télécommunications principaux offrant des services d’appels et des données – Vodacom, Airtel, Orange, Africell et Standard Telecom – dont la plupart d’entre eux fournissent l'accès à la connectivité 3G également. En mi-2016, il y avait plus de 53 fournisseurs d’Accès Internet (FAI) répertoriés dans le pays57, bien que la plupart des lois et législations congolaises régissant les communications numériques soient en brouillon. Ce qui est inquiétant, ce que le pays continue également à enregistrer des violations croissantes des libertés sur Internet pendant que le nombre d'utilisateurs des TIC augmente alors que les articles 23, 24 et 25 de la Constitution garantissent aux citoyens le droit à la liberté d'expression, d'information et d'association.

En l’absence de lois traitant des problèmes spécifiques de participation des citoyens à l’internet, la loi-cadre n°013/2002 sur les

53 Voir à cet égard, UNESCO, Droits de l’homme dans le cyberespace, UNESCO, Economica, mars 2005. 54 Agathe ALEPAGE, « Les droits de personnalité confrontés à l’Internet », dans Rémy CABILLAC et al. (dir.), Libertés et droits fondamentaux, 12ème éditon, Paris, Dalloz, 2006, p. 227-254, à la page 228. 55 NATIONS UNIES, « République Démocratique du Congo profil du pays », en ligne : <http://dat.un/org/CountryProfile.aspx?crName=democratic%20republic%20the%2àcongo>. 56 “BuddeComm, Democratic Republic of Congo – Telecoms, Mobile and Broadband – Statistics and Analyses”, en ligne : <https://www.budde.com.au/Research/Democratic-Republic-of-Congo-Telecoms-Mobile-and-Broadband-Statistics-and-Analyses>. 57 « Fournisseur d'accès Internet (FAI) au Congo », en ligne : < http://www.pagesclaires.com/fr/Activites/Fournisseur-d-acces- Internet-FAI>.

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Télécommunications58 et la Loi 014/2002 établissant l'Autorité de Régulation59 sont les principales lois ayant une incidence sur les libertés sur Internet car elles contiennent diverses dispositions sur la vie privée en ligne, la protection des données et la surveillance. En l’occurrence, l'article 52 de la Loi-cadre n°013/2002 sur les Télécommunications dispose que : « La confidentialité de tout email envoyé au travers les services des télécommunications est garantie par la loi. Cette confidentialité ne peut être violée que par l'autorité publique lorsque cela est nécessaire pour l'intérêt public tel que décrit dans la loi ». Cependant, il n'existe pas de définition explicite de ce que signifie réellement l' « intérêt public », ce qui, à notre avis, donne souvent ouverture à des abus du pouvoir public. Mais nonobstant cette liberté attribuée au pouvoir public pour garantir l’ordre public, l'article 54 de la Loi-cadre n°013/2002 prévoit que l'interception des communications est interdite « sans autorisation préalable du procureur général ». Tandis que l'article 55 explique ce qui pourrait motiver cette autorisation et dispose que « seules les nécessités de l'information motivées par les besoins de la manifestation ultime de la vérité dans un dossier judiciaire peuvent autoriser le Procureur général de la République de prescrire l'interception, l'enregistrement et la transcription des correspondances émises par voies de télécommunications ». Cependant, l'expression vérité ultime est ouverte à l'interprétation erronée et à l'abus. Les articles 57 et 58 de la Loi-cadre n°013/2002 prévoient un contrôle judiciaire dans la conduite de la surveillance des communications. En conséquence, le procureur général doit nommer un magistrat qui, à son tour, approuve un agent qualifié pour procéder à l'interception. Le magistrat doit détailler les procédures de chaque interception et soumettre le rapport au procureur général60. Selon les articles 59 à 60, dans des circonstances exceptionnelles, le Ministre de l’intérieur peut accorder l'autorisation d'interception sur proposition écrite du Ministre de la Défense et du Chef des services de renseignements.

Outre la collecte de renseignements sur la sécurité nationale, l'interception peut également être autorisée en vue de protéger les éléments essentiels du potentiel scientifique, économique et culturel de la RDC. La

58 Voir la loi, en ligne : <http://www.daldewolf.com/documents/document/20151125094235-25_loicadre_n%C2%B0_013_ 2002_du_16_octobre_2002_sur_la_t%C3%A9l%C3%A9communication.pdf>. 59 Voir la loi, en ligne : <http://unpan1.un.org/intradoc/groups/public/documents/unpan/unpan034864.pdf>. 60 Voir Article 57 et 58 du cadre de loi 013/2002.

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prévention de la criminalité et de la délinquance organisée est également une des raisons qui peuvent motiver l'interception de la communication « dans des circonstances exceptionnelle s», selon l’Article 59 de la Loi-cadre. Selon l'Article 56, l'autorisation pour des motifs exceptionnels ne peut pas durer plus de six mois, mais peut être renouvelée si les conditions demeurent inchangées.

L'article 46 de La loi-cadre accorde au gouvernement le droit d'interdire l'utilisation des installations de télécommunication soit pour la sécurité nationale, soit pour « tout autre motif ». Conformément à l'article 4 du décret n°1-6 du 25 février 1961 sur les questions qui concernent la sécurité nationale, le refus de respecter un tel ordre dans des circonstances exceptionnelles, telles que les situations d'urgence, constitue une « présomption de culpabilité ». Lorsque la sécurité nationale est citée, tous les opérateurs de téléphonie mobile et les Fournisseurs d’accès Internet (FAI) sont obligés de se conformer à cette loi.

Cependant, toute personne, y compris les agents de l'État, qui viole la vie privée des utilisateurs de télécommunications risque six mois de prison et/ou une amende de 100 000 francs congolais (près de 63$ US), comme indiqué aux articles 71-73 de la loi-cadre n°013/2002. Ceux qui perturbent ou bloquent l'utilisation des services publics de télécommunications courent le risque de payer une amende de 5 000 francs congolais (près de 3$ US).

La loi n°14/2002 instituant l'Autorité de régulation de la Poste et des télécommunications du Congo (ARPTC) accorde au gouvernement, en particulier au législateur, le droit de « procéder à des visites sur place, d'effectuer des enquêtes et de collecter toutes les données nécessaires » de la part des fournisseurs de services de télécommunications. Cette loi autorise le gouvernement à « collecter toutes les données nécessaires » auprès des entreprises de télécommunications, en cas de besoin. Il faut néanmoins noter que la RDC ne dispose pas d'une loi spécifique sur la protection des données en dehors de l'article 21 b) de la loi-cadre n°013/2002 qui mentionne seulement que les opérateurs télécoms sont soumises à une certaine confidentialité et neutralité quant au contenu des messages échangés par leurs clients.

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L'article 7 d’un arrêté ministériel de 201561 confie aux entreprises de

télécommunication la protection de la vie privée de leurs abonnés, mais le libellé est vague et trop permissif pour les acteurs étatiques. Par exemple, si la sécurité nationale ou une affaire judiciaire est citée, cet article permet aux « autorités », à savoir les ministères et autres organismes, de violer la vie privée des abonnés, sans aucune documentation ou consentement du procureur général. L'article 11 du même arrêté oblige les entreprises de télécommunication à envoyer des données collectées sur l'identité des abonnés aux services gouvernementaux avant de les supprimer de leur serveur. Cela permet une surveillance facile par l'État. L'arrêté ministériel a été promulgué pour faire appliquer l'enregistrement obligatoire de la carte SIM par tous les abonnés des réseaux de télécommunication, une mesure qui a suscité des critiques de la part des militants des droits de l’homme, mais le gouvernement n'a pas changé sa position62. Quoi qu’il en soit, l'article 31 de la Constitution et les articles 52 et 53 de la Loi-cadre n°013/2002 garantissent le droit à la vie privée à tout citoyen de la RDC.

Les agences gouvernementales qui peuvent « légalement » surveiller les communications des citoyens comprennent l'Agence Nationale de renseignements (ANR), créée en vertu du décret n°003-2003, ayant pour mandat de rechercher, de centraliser, d'interpréter, d'utiliser et de diffuser des informations politiques, diplomatiques, stratégiques, culturelles, scientifiques et d'autres informations intéressantes sur la sécurité intérieure et extérieure de l'Etat63 ; la Détection militaire des activités anti-patries (DEMIAP), qui est le service de renseignement militaire, a été utilisé pour réprimer l'opposition et le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel et de la Communication (CSAC) créé en vertu de l'article 212 de la Constitution en charge de la réglementation des médias.

De ce qui précède, pour dresser un état de lieux complet sur le respect des droits de l’homme sur les réseaux sociaux, il faut aborder la situation de

61 Voir, en ligne : <http://www.leganet.cd/Legislation/Droit%20economique/telecommunication/AIM.19.05.2015.html>. 62 ASSSOCIATION CONGOLAISE POUR L’ACCÈS À LA JUSTICE (ACAJ), « Respect de la vie privée en télécommunications », en ligne : <https://acaj-asbl.org/2015/12/29/respecter-le-secret-descorrespondances-emises-par-la-voie-de-telecommunications-communique-de-presse/>. 63 Voir la loi régissant le servie national de renseignement, en ligne : <http://www.droitcongolais.info/files/4.69.7_decret-loi__ agence_nationale_de_renseignemen.pdf>.

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liberté d’expression sur les réseaux sociaux (1) car étant jusqu’à présent les droits de l’homme le plus mise en exergue en RDC, surtout lorsqu’on fait référence aux réseaux sociaux. Il faut également aborder le point relatif aux coupures de l’internet comme moyen d’étouffement des incidents politiques provoqués ou émanés de la population (2).

1 La liberté d’expression sur les réseaux sociaux

La « liberté d’expression », est garantie par la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de 1948, en son article 19 : « Tout individu a droit à la liberté d'opinion et d'expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d'expression que ce soit ». La liberté d’expression « permet à chacun d’exprimer librement ses idées par tous les moyens qu’il juge appropriés (ex : livre, film). Elle implique donc la liberté de la presse et, aujourd’hui, la liberté de la communication audiovisuelle »64.

Pour notre part cette définition est en réalité très restrictive, puisqu’elle ne prend pas en compte un phénomène de société récent, l’apparition des « nouvelles technologies ». Car la liberté d’expression peut se concrétiser aussi par le biais de l’Internet, sur des forums, sur des réseaux sociaux, sur son propre blog, etc. Aujourd’hui, en RDC, nous pouvons dire que l’Internet est en effet le seul support possible de libre expression pour les citoyens. En dehors de l’internet, il suffit de passer en revue tous les modes d’expression traditionnels65 possibles pour comprendre qu’en réalité la libre expression est impossible, sauf si on enfreint la loi.

Le support qu’utilisent les internautes en RDC est souvent le Smartphone, plus que l’ordinateur. Mais que ce soit sur Smartphone ou sur ordinateur, la transmission de la parole et de l’opinion de l’internaute se fait de toute façon sur les réseaux sociaux, qui peuvent être de toute nature, par l’intermédiaire de la rédaction d’articles ou par les commentaires laissés sur son compte ou sur le compte d’un autre. Toute personne peut le faire, un simple citoyen lambda, un membre de l’administration, un journaliste, ou même un étranger. Les réseaux sociaux sont donc devenus un système qui

64 Selon le site en ligne : <www.vie-publique.fr>. 65 Avant l’apparition d’Internet, les formes d’expression possibles étaient les moyens de diffusion naturels (l’écriture, le langage, l’affiche, les journaux), ou techniques (la télévision, la radio, le cinéma).

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permet à tout utilisateur d’être lui-même éditeur de contenus, de commenter ou de modifier des contenus mis en ligne par d’autres utilisateurs ou encore, et c’est la particularité des réseaux sociaux, d’obtenir des contenus et des messages par le simple fait d’appartenir à une communauté.

La doctrine considère des réseaux sociaux de « medias sociaux ». Comme un media stricto sensu repose en effet sur une multitude de signifiants, il peut être perçu comme un outil de communication, un moyen d’information et d’éducation, mais il possède également une fonction de distraction66. En outre, l’idée de contenant et de contenu est significative pour la garantie d’une société démocratique.

L’histoire a en effet pu démontrer que les réseaux sociaux ont pu donner une pleine efficacité à la liberté d’expression lors du printemps arabe. En effet, ces derniers ont permis de réunir en masse des individus voulant contester le régime mis en place et de prôner la démocratie. Ces nouveaux moyens de communication ont donné la possibilité aux opposants du régime de se rassembler pour manifester. De plus, le réseau social est également un outil du collectif. Et cette aidée nous pouvons la retrouver sur Facebook, par lequel il peut-être créés des groupes ou des pages dans lesquelles il est possible de traiter d’un sujet important. Le réseau social se retrouve comme étant un outil du marketing, puisqu’il permet à des individus ou entités reconnues de diffuser plus largement les informations souhaitées. Les réseaux sociaux peuvent aussi véhiculer un symbole démocratique de liberté d'expression à travers un nouveau mode de campagne utilisé par les politiques.

En effet, il est possible de constater depuis quelques années, et notamment au regard de la campagne présidentielle en RDC de décembre 2018, que les politiciens utilisent les réseaux sociaux en vue de réaliser leur propre campagne. Il est intéressant de noter que certaines chaines de télévision de radio ont une orientation politique différente, voir favorisent un candidat. Dans ce contexte, les réseaux sociaux peuvent permettre aux candidats ayant des budgets moins importants de faire parler d’eux directement sur leur compte Facebook ou Twitter. De cette manière, les medias sociaux garantissent aussi une pluralité d’opinions. En outre, les réseaux sociaux peuvent être le support d'une véritable stratégie pour les candidats leur permettant également de toucher les jeunes de 18 à 24 ans.

66 H. ISAR, Droit des medias et des télécommunications, cours, inédit, 2012-2013.

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Enfin, les réseaux sociaux facilitent l'organisation des campagnes (meetings via des messages groupés, etc.). Les réseaux sociaux sont également un outil stratégique de communication direct et innovant pour les politiciens qui sont à même de contrôler ab initio les informations qu’ils souhaitent diffuser via leur propre compte67. Tous ces aspects démontrent le potentiel des réseaux sociaux en termes de liberté d’expression, lui assurant de facto une promotion.

2 La situation des coupures d’internet comme moyen d’étouffement des incidents politiques pour le maintien de l’ordre public national

Des coupures d'Internet ont eu lieu lors d'événements majeurs comme les élections et les manifestations de masse, alors que les actes de surveillance active du contenu des messages des citoyens et l'intimidation de ceux qui expriment des opinions contraires aux différents points des vues et actes du gouvernement sont également courants.

La première coupure eut lieu le 19 janvier 2015, le gouvernement ordonna aux compagnies de télécommunications de suspendre tous les services Internet et les messages courts (SMS) au milieu des protestations contre un projet de loi électorale. Quatre jours plus tard, seules les banques et les agences gouvernementales ont eu accès à Internet, mais pas au grand public. Vingt jours après l'arrêt initial, l’Internet et les services mobiles ont été entièrement restaurés, mais avec de nouvelles restrictions sur certaines communications68. Les utilisateurs pouvaient accéder à leurs e-mails (courriels) et à d'autres sites Web, mais pas aux plateformes de médias sociaux comme Facebook et Twitter. Ces restrictions ont été levées plus tard le 5 février 2015 après que la loi électorale ait été adoptée par les deux chambres du Parlement. Le ministre de l'Information, Lambert Mende, a tenu une conférence de presse au cours de laquelle il a annoncé la restauration des services69.

67 C. DE MALET, « Les réseaux sociaux ont joué un rôle marginal », lefigaro.fr, 20 avril 2012, en ligne : <www.lefigaro.fr>. 68 « Les coupures de réseaux en RDC : les entreprises de TIC ont besoin de règles claires », en ligne : <http://www.ihrb.org/focusareas/information-communication-technology/network-shutdowns-in-the-drc-ictcompanies-need-clear-rules> (consulté le 20 décembre 2018). 69 RADIO OKAPI, « Lambert Mende annonce le rétablissement d'Internet dans «les heures qui suivent» », en ligne :

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Un peu plus avant ces coupures, entre les 3 et 28 décembre 2011, le

gouvernement avait auparavant ordonné que toutes les communications SMS soient bloquées alors que le pays attendait les résultats de l'élection présidentielle qui avait eu lieu un mois plus tôt. L'ordre de blocage du SMS a été fait par le ministère chargé des Affaires intérieures et de la sécurité, dans une lettre du 3 décembre 2011 aux opérateurs de téléphonie mobile qui a ordonné que les services SMS soient suspendus « jusqu'à nouvel ordre », pour « maintenir l'ordre public et protéger la sécurité des biens et des personnes »70. Le Réseau national des ONG pour les droits de l'homme de la RDC (RENADHOC), un réseau d'organisations non gouvernementales nationales de défense des droits de l'homme, demanda au gouvernement de reconsidérer sa décision71.

Et la dernière coupure de l’internet et SMS date de décembre 2018, lors de l’attente des résultats de l’élection présidentielle conduisant au changement du régime car le président Joseph Kabila n’était pas candidat à sa propre succession. Le gouvernement s’est basé sur le motif de publication des procès-verbaux des résultats des bureaux de vote par les internautes en lieu et place de la Centrale électorale congolaise, seule habilitée à le faire. La situation a été réhabilitée plus de 20 jours qui ont suivi la décision de coupure. À ce jour, il faut noter que certaines ONG des droits de l’homme, en l’occurrence l’Association congolaise pour l’accès à la justice (ACAJ) ont annoncé avoir saisi les juridictions congolaises contre les compagnies de téléphonie pour obtenir la réparation des préjudices causés aux citoyens et aux entreprises par cette coupure qui ne se justifie pas.

Toutefois, si au point de vue de la forme de la décision ayant accompagné cette coupure on peut relever des irrégularités, Pierre Félix Kandolo, interviewé par la Radio Okapi, estime que le gouvernement est fondé à prendre des mesures nécessaires pour maintenir l’ordre public et

<http://www.radiookapi.net/actualite/2015/02/06/rdc-lambert-mende-annonce-le-retablissementdinternetdans-les-heures-qui-suivent> (consulté le 20 janvier 2019). 70 « Le gouvernement élève une interdiction de trois semaines pour envoyer des SMS », en ligne : <https://rsf.org/en/news/government-lifts-three-week-oldban-texting> (consulté le 20 janvier 2019) 71 RESEAU NATIONAL DES ONG CONGOLAISES POUR LES DROITS DE L'HOMME, « Déclaration de suspension », en ligne : <https://rsf.org/sites/default/files/_declaration_du_renadhoc_sur_la_suspension_prolongee_de_s_sms_en_rdc_22.12.2011-2.pdf> (consulté le 15 décembre 2018).

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assurer la sécurité des personnes et des biens s’il pense que laisser-aller la connexion internet pour tous créerait un trouble social, alors que la protection de l’ordre public et de la sécurité nationale fait partie de son pouvoir régalien72. Il explique et enseigne à ce propos que la liberté

d’information ne fait pas partie des droits intangibles protégés par l’article 61 de la Constitution de la République, c’est-à-dire que, selon lui, le droit à l’information peut être suspendu par l’État et à tout moment pour des circonstances exceptionnelles73.

B Les réseaux sociaux face aux droits de l’homme

Dans cette partie de notre réflexion, nous parlerons du droit d'accès neutre à internet, comme nouvelle pierre angulaire des droits fondamentaux (1), des règles communes de protection des droits fondamentaux qu’on retrouve sur les réseaux sociaux comme des règles opposées aux États (2) et les responsabilités en cas d’atteinte des droits de l’homme sur les réseaux sociaux (3).

1 Le droit d'accès neutre à internet, nouvelle pierre angulaire des droits fondamentaux

Il faut « considérer comme un droit fondamental à part entière » l'accès à internet74 car ce dernier est lui-même devenu une liberté fondamentale.

C'est par la France que la question de la reconnaissance de l'accès à internet comme droit fondamental s'est présentée le plus concrètement, au moment où le gouvernement poussait à l'adoption de la loi « favorisant la diffusion et la protection de la création sur internet » (dite « loi Hadopi I »). Celle-ci prévoyait de confier à une autorité administrative indépendante le pouvoir d'ordonner la suspension de l'accès à internet d'un abonné accusé de

72 Interview de Pierre Félix Kandolo, Professeur de droit international à la Faculté de droit de l’Université de Likasi, par la Radio Okapi de Lubumbashi, au micro de Neully Kabena, sur la coupure de l’internet de décembre 2018 à janvier 2019 par le Gouvernement congolais, émission du 16 au 18 janvier 2019. 73 Pierre Félix KANDOLO ON’UFUKU wa KANDOLO, Droit international humanitaire, syllabus du cours, première Licence, Faculté de droit, Likasi, Université de Likasi, 2018-2019, p. 84 et s. 74 CONSEIL D’ÉTAT, Étude annuelle 2014 : Le numérique et les droits fondamentaux, août 2014, p.90.

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n'avoir pas pris les mesures suffisantes pour empêcher la mise à disposition du public d'œuvres contrefaites.

C'est dans ce contexte que le Conseil constitutionnel français eut à se prononcer sur l'existence d'un droit fondamental d'accéder à internet. Il jugea qu' « […] en l'état actuel des moyens de communication et eu égard au développement généralisé des services de communication au public en ligne ainsi qu'à l'importance prise par ces services pour la participation à la vie démocratique et l'expression des idées et des opinions », le droit à la liberté d'expression et de communication protégé par l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 « implique la liberté d'accéder à ces services »75. Aussi, parce que la sanction de suspension de l'accès à internet aménagée par la loi Hadopi I pouvait « conduire à restreindre l'exercice, par toute personne, de son droit de s'exprimer et de communiquer librement, notamment depuis son domicile », le Conseil décidait de censurer la disposition qui confiait ce pouvoir à une autorité administrative. La loi fut en revanche validée lorsque cette prérogative jamais appliquée et finalement supprimée76 fut confiée dans une loi Hadopi II à l'autorité judiciaire77. Le juge constitutionnel français venait ainsi de reconnaître le droit d'accès à internet en « empruntant par capillarité la nature de son tuteur, la liberté d'expression »78, et en y transposant sa jurisprudence.

Au niveau universel également, le rapporteur spécial des Nations Unies sur la promotion et la protection du droit à la liberté d'opinion et d'expression, Franck La Rue, a considéré en 2011 que « […] supprimer l'accès à l'internet et ce, quelle que soit la justification fournie, [...] est excessif et constitue une violation » de l'article 19 §3 du Pacte International relatif aux droits civils et politiques79. Quelques mois plus tard, il précisera que « bien que l'accès à internet ne soit pas encore un droit de l'homme en tant que tel », il est « indispensable non seulement à l'exercice du droit à la liberté

75 Conseil Constitutionnel, décision n° 2009-580 DC du 10 juin 2009, §12. 76 Un seul jugement ordonnant la suspension de l'accès a été prononcé, mais il n'a jamais été mis en œuvre. Le décret n° 2013-596 du 8 juillet 2013 est ensuite venu abroger le dispositif réglementaire. Ne reste plus qu'une amende de cinquième classe. 77 Christophe CARON, La lutte contre la contrefaçon sur internet dans les lois HADOPI I et II, CCE n° 1, Janvier 2010, comm. 1. 78 Laure MARINO, Le droit d'accès à internet, nouveau droit fondamental, D.2009, p.2045. 79 Frank LA RUE, “Report of the Special Rapporteur to the Human Rights Council on key trends and challenges to the right of all individuals to seek, receive and impart information and ideas of all kinds through the internet”, A/HRC/17/27, 16 mai 2011, §78. en ligne : <http://www.ohchr.org/EN/Issues/FreedomOpinion/Pages/Annual.aspx>.

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d'expression mais aussi à celui d'autres droits, comme le droit à l'éducation, le droit de s'associer librement avec d'autres et le droit de réunion, le droit de participer pleinement à la vie sociale, culturelle et politique et le droit au développement économique ou social »80.

Par crainte que le modèle français ne fasse tache d'huile, le Parlement européen s'était emparé du sujet pour tenter d'y faire obstacle au nom des droits fondamentaux. Ainsi, au niveau régional, la Cour européenne des droits de l'homme (Cour EDH) a eu l'occasion de « déduire de l’ensemble des garanties générales protégeant la liberté d’expression qu’il y a lieu de reconnaître un droit d’accès sans entraves à Internet »81. Avant elle, le Comité des ministres du Conseil de l'Europe avait reconnu que « l'accès limité ou l'absence d'accès aux [technologies de l'information et de la communication] peut priver les individus de la capacité d'exercer pleinement leurs droits fondamentaux »82. Dans l'Union européenne, la Commission a estimé que « la sécurité, la stabilité et la résilience de l'internet et des autres technologies des communications électroniques constituent une des pierres angulaires de la démocratie » et qu'il y a donc « lieu de prévenir toute tentative arbitraire visant à empêcher les citoyens d'y accéder ou à en perturber l'accès »83.

Sans aller jusqu'à reconnaître un « droit à » qui générerait une obligation positive de fournir l'accès à internet, les États ont donc, au minimum, l'obligation de garantir la liberté d'accéder à internet en tant que « facilitateur » de l'exercice des droits de l'homme, ce qu'ils ne peuvent toutefois faire qu'avec le concours des fournisseurs d'accès à internet (FAI), qui font office d'intermédiaire entre l'internaute et l’internet. Or ces FAI n'offrent pas toujours le même internet, selon qu'ils décident ou non d'appliquer des restrictions.

2 Des règles communes de protection des droits fondamentaux opposées aux États

80 Frank LA RUE, « Rapport établi par le Rapporteur spécial sur la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression », A/66/290, 10 août 2011, §61 », en ligne : <http://ap.ohchr.org/documents/dpage_e.aspx?si=A/66/290>. 81 Cour EDH, 18 décembre 2012, Ahmet Yildirim c. Turquie (req. N°3111/10), §31. 82 CONSEIL DE L'EUROPE, « Déclaration du Comité des Ministres sur les droits de l'homme et l'état de droit dans la Société de l'information », 13 mai 2005, CM(2005)56 final, en ligne : <https://wcd.coe.int/ViewDoc.jsp?id=849009>. 83 COMMISSION EUROPÉENNE, Un partenariat pour la démocratie et une prospérité partagée avec le sud de la Méditarrenée, COM(2001) 200 final, 8 mars 2011, p. 12.

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Parlant des règles communes de protection des droits fondamentaux

qu’on retrouve sur les réseaux sociaux et qui sont opposées aux États, nous avons la Global Network Initiative (GNI) et les Telecommunications Industry Dialogue (TID) (a), les principes communs de liberté d'expression et de respect de la vie privée contre les États (b).

a La Global Network Initiative (GNI) et les Telecommunications Industry Dialogue (TID)

Il est très fréquent que des entreprises privées ou des associations se réunissent dans des consortiums pour défendre des intérêts communs contre des gouvernements ou contre d'autres organisations. Il est beaucoup plus rare qu'elles le fassent prioritairement pour défendre les droits des tiers contre leur propre pouvoir de nuisance. C'est pourtant en partie la philosophie de la Global Network Initiative (GNI), une coalition d'entreprises des technologies de l'information et de la communication (TIC), d'organisations de la société civile, d'investisseurs privés et d'universitaires, qui s'est créée en 2008 pour « fournir une direction à l'industrie des TIC et à ses parties prenantes sur la manière de protéger et promouvoir les droits de l'homme à la liberté d'expression et à la vie privée lorsqu'elle est confrontée à des pressions de gouvernements pour entreprendre des actions qui enfreignent ces droits »84.

Aux côtés d'institutions universitaires (dont le Berkman Center for Internet & Society de Harvard ou la George Washington University Law School) et d'associations de défense des droits de l'homme (dont Human Rights Watch), la GNI compte actuellement six entreprises multinationales membres qui offrent des services d'intermédiaire de l'internet, toutes d'origine américaine : Facebook, Google, LinkedIn, Microsoft, Procera Networks et Yahoo. Ses trois membres fondateurs étaient Google, Microsoft et Yahoo.

Souhaitant créer un véritable ordre juridique supérieur qui lie les membres entre eux, à l'instar de ce que peuvent être les traités internationaux entre les États, la GNI prévoit dans ses directives que les engagements pris par les entreprises participantes sont supérieurs à tout autre engagement. Elles stipulent en effet que « [L]es participants devront

84 GLOBAL NETWORK INITIATIVE, « What does the Global Network Initiative aim to accomplish ? », en ligne : <https://globalnetworkinitiative.org/content/frequently-asked-questions> (consulté le 22 novembre 2018).

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s'abstenir de conclure des accords volontaires les contraignant à limiter la liberté d'expression des utilisateurs ou portant atteinte au respect de la vie privée d'une manière incompatible avec les Principes » énoncés dans les documents de base de l'organisation, et qu'ils doivent dénoncer dans les trois ans tout engagement préalable qui ne serait pas compatible85. Les Principes eux-mêmes stipulent que « [L]es Participants vont chercher à accroître dans le monde entier le nombre des organisations appuyant ces Principes pour qu'ils s'imposent comme la nouvelle norme mondiale »86.

La GNI offre également ses moyens logistiques à une autre organisation plus étroite, les Telecommunications Industry Dialogue (TID), qui s'est créée en 2013 pour établir des règles de conduite spécifiques aux opérateurs et fournisseurs d'outils de télécommunication. Contrairement à la GNI dont la gouvernance est multipartite, les TDI n'accueillent en son sein que des entreprises qui discutent ensemble des règles qu'elles acceptent de s'imposer, selon un mode décisionnel qui semble être celui de l'unanimité87. L'organisation se décrit comme un « groupe d'opérateurs et de fournisseurs de télécommunications qui abordent communément les droits à la liberté d'expression et à la vie privée dans le secteur des télécommunications dans le contexte des Principes Directeurs des Nations Unies sur les Entreprises et les Droits de l'Homme ». Les TID comptent actuellement neuf membres, principalement européens : Alcatel-Lucent, Orange, Nokia, Telefonica, Telenor, TeliaSonera, Millicom, Vodafone et AT&T.

Ensemble, ces deux organisations forment les deux principales structures d'autorégulation visant à apporter aux individus une meilleure protection des droits de l'homme face aux menaces que représentent les ingérences de l’État. Il faudrait toutefois noter que même sans en être membres, de nombreux autres intermédiaires de l'internet agissent désormais selon les mêmes principes, en tout ou partie.

85 GLOBAL NETWORK INITIATIVE, « Directives de mise en œuvre des Principes de liberté d'expression et de respect de la vie privée », §5, en ligne : <https://www.globalnetworkinitiative.org/sites/default/files/pdfs/FR_Implementation_Guidelines_ FRA.pdf> (consulté le 22 novembre 2018). 86 GLOBAL NETWORK INITIATIVE, « Principes de liberté d'expression et de respect de la vie privée », Préambule, en ligne : <https://www.globalnetworkinitiative.org/sites/default/files/pdfs/FR_Principles_FRA.pdf> (consulté le 22 novembre 2018). 87 Voir : « Aucune forme de statuts n'est publiée sur le site officiel de l'organisation », en ligne : <http://www.telecomindustry dialogue.org/>.

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b Les principes communs de liberté d'expression et de respect de la vie privée contre les États

Que ce soit la GNI ou les TID, les deux organisations ont fait le choix de se concentrer exclusivement sur les problématiques liées à la liberté d'expression et au respect de la vie privée, qui sont les deux droits les plus menacés par l'action des États sur internet. Mais les principes de la GNI rappellent, dans une formule qui n'est pas sans évoquer la Déclaration et le programme d'action de Vienne88, selon lequel « [L]es droits de l'homme sont indivisibles, interdépendants et étroitement liés », que « la restriction de l'un d'entre eux pénalise tous les autres », et donc que la protection des deux droits précités « facilite une matérialisation constructive des autres droits de l'homme ».

Alors que les Principes directeurs de Ruggie, adoptés aux Nations Unies, se contentent de faire état de la responsabilité des entreprises « de se conformer à toutes les lois applicables et de respecter les droits de l'homme »89. Les membres de la GNI vont plus loin, ils choisissent d'ignorer cette quadrature du cercle qui consisterait à demander à la fois aux entreprises d'obéir à des lois nationales et de respecter les droits de l'homme, alors que ce sont parfois les droits nationaux qui sont à l'origine des violations des droits fondamentaux, et assument de chercher à imposer un rapport de force aux États pour la protection des droits, quelle que soit leur législation. Les adhérents à l'organisation reconnaissent ainsi explicitement que « [L]es entreprises du secteur des technologies de l'information et de la communication (TIC) sont responsables du respect et de la protection du droit à la liberté d'expression et au respect de la vie privée de leurs utilisateurs », et disent vouloir « assurer à l'échelle de la planète la protection et la promotion de la jouissance des droits de l'homme », ce qui est d'ordinaire perçu comme une prérogative et une obligation dévolue aux seuls États. Aussi, non seulement que les membres de la GNI « respecteront et protégeront » les droits visés, en « cherchant à éviter ou à minimiser l'impact des restrictions gouvernementales », mais, en plus, elles protégeront les

88 NATIONS UNIES, Déclaration et programme d'action de Vienne, Conférence mondiale sur les droits de l’homme, 12 juillet 1993, A/CONF.157/23, §5. (« Tous les droits de l’homme sont universels, indissociables, interdépendants et intimement liés ») 89 CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME, « La promotion, la protection et l’exercice des droits de l’homme sur l’internet », 20ème session, A/HRC/RES/20/8, Résolution 20/8 du 5 juillet 2012, en ligne : <http://ap.ohchr.org/documents/alldocs. aspx?doc_id=20340>.

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droits des « utilisateurs soumis à des exigences du gouvernement, des lois et des règlements » contraires aux principes énoncés par l'organisation90.

En pratique, selon les directives de mise en œuvre des principes, les membres de la GNI « encourageront les gouvernements à être précis, transparents et cohérents dans leurs demandes, dispositions législatives et réglementaires concernant le respect de la vie privée en ligne », « exécuteront a minima les demandes gouvernementales compromettant le respect de la vie privée », et même « poursuivront le gouvernement devant les tribunaux nationaux […] en cas de demandes gouvernementales semblant incompatibles […] avec les lois internationales sur les droits de l'homme et les normes de liberté d'expression»91. C'est ainsi par exemple que Microsoft, membre de la GNI, a déposé un recours aux États-Unis contre une ordonnance demandant l'accès à des données privées hébergées dans un centre de données en Irlande92. Malheureusement, ses entreprises lorsqu’elles se retrouvent en RDC, ne savent plus revendiquer tous ces droits, lorsque les autorités leurs demandent de couper l’internet.

Concernant les TID, leurs propres principes directeurs stipulent en introduction qu'elles « visent à remédier à ces situations exceptionnelles » dans lesquelles « les technologies de télécommunications peuvent […] être détournées par les gouvernements d'une manière qui peut affecter la liberté d'expression et la vie privée de leurs citoyens »93.

Les opérateurs de télécommunication sont néanmoins bien plus mesurés que les membres de la GNI dans leur opposition aux gouvernements. En prenant le cas de la RDC, il y a lieu de penser que sans doute qu'ils n'ont aucune possibilité de déménager, puisqu'ils doivent par nature être présents dans le pays qui accueille leurs infrastructures. Ainsi, les membres des TID se disent « conscients des responsabilités qui découlent de la fourniture de produits, de services et d'infrastructures de communication », de la nécessité de s'appuyer « sur des relations de long terme, stables » avec les

90 Principes de la GNI, §1. 91 GLOBAL NETWORK INITIATIVE, Directives, préc. note 82, §3 et §4. 92 Liam TUNG, « Microsoft files fresh appeal against handing over email in Irish datacentre », ZDNet, 9 décembre 2014, en ligne : <http://www.zdnet.com/article/microsoft-files-fresh-appeal-against-handing-over-email-in-irish-datacentre/> 93 TELECOM INDUSTRY DIALOG, « Principes directeurs en matière de liberté d'expression et de protection de la vie privée dans les télécommunications », 12 mars 2013, p. 2, en ligne : <http://www.telecomindustrydialogue.org/wp-content/uploads/ Telecoms_ Industry_Dialogue_ Principles_Version_1_-_FRENCH.pdf>.

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gouvernements, et n'édictent leurs principes que « dans la mesure qui ne les place pas en violation des lois et règlements nationaux », ce qui relativise largement leur portée et leur sincérité. En revanche, on peut souligner une volonté implicite de leur donner un caractère contraignant, puisqu'il est précisé en toute fin que « seule la version anglaise [des principes directeurs] prévaudra en cas de litige ». Là aussi, les principes des TID stipulent que les entreprises de télécommunication devront notamment

« […] s'assurer que les exigences du gouvernement sont réexaminées par du personnel dûment qualifié et expérimenté afin d'évaluer leur conformité juridique ainsi que la régularité de la procédure », « rechercher des mesures de remplacement qui pourraient minimiser ou atténuer l'incidence des impacts négatifs sur la liberté d'expression et le respect de la vie privée », ou encore « rechercher le contrôle judiciaire, dès lors qu'il est possible » 94.

Enfin, les deux organisations prévoient de rendre compte de leurs engagements à travers la publication de rapports, qui doivent permettre au public de vérifier le respect effectif de leur responsabilité de protéger les droits de l'homme, malheureusement pour les entreprises œuvrent en R.D.C aucun rapport n’a été établie jusqu’à présent.

c Les responsabilités en cas d’atteinte des droits de l’homme sur les réseaux sociaux

Le développement des réseaux sociaux soulève des problématiques juridiques multiples et épineuses comme celles relatives à l’atteinte au droit d’auteur, à la protection des données personnelles, à la responsabilité des sites de réseaux sociaux, à l’application de la réglementation relative à la publicité sur les réseaux sociaux, à la diffamation, à la pornographie, à la haine raciale, au terrorisme et aussi au respect des droits fondamentaux. Devant cette multitude de problématiques, celle relative à la responsabilité des réseaux sociaux taraude plus l’esprit du juriste et mérite davantage d’être éclairée pour que nul n’en ignore.

En effet, on peut se poser la question de savoir si les informations diffusées dans les réseaux sociaux engagent la responsabilité des utilisateurs, des prestataires de services tels que les fournisseurs d’accès, les fournisseurs de contenus et les hébergeurs. En d’autres termes, qui est responsable des

94 Id.

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informations préjudiciables ou d’un cas de violation des droits de l’homme sur les réseaux sociaux ?

Selon l’arsenal juridique congolais sur la notion de la responsabilité, celle-ci peut être retenue à l’encontre d’une personne physique ou morale (utilisateurs ou fournisseurs de contenu) ou morale (fournisseurs d’accès, hébergeurs). Mais il sied de souligner que la responsabilité sur les réseaux sociaux n’a jamais été règlementée. Ainsi, retenir la responsabilité des utilisateurs ou des gérants des réseaux sociaux s’avère difficile voire chimérique, sauf à se fonder sur les vieux articles 258 et 259 sur la responsabilité civile pour tout fait quelconque de l’homme qui cause préjudice à autrui95. D’ailleurs, la désignation de la juridiction territorialement

compétente pour connaitre des litiges nés du contenu des messages circulant à travers les réseaux sociaux de dimension internationale se heurte aux mêmes difficultés relatives à la détermination de la loi applicable.

L’une des causes qui rendent la détermination du responsable du contenu illicite difficile est sans nul doute l’existence de plusieurs intervenants sur la toile, notamment les intermédiaires techniques appelés aussi prestataires de services et le fournisseur de contenu qui est le premier responsable de la divulgation de l’information litigieuse.

En RDC, la loi-cadre sur la télécommunication constitue aujourd’hui l’arsenal juridique sur lequel le juge s’appuie nécessairement pour statuer sur un éventuel litige relatif, de manière générale, aux nouvelles technologies de l’information et de la communication. Ainsi, cette loi est restée muette sur les responsabilités des utilisateurs des réseaux sociaux que pour les personnes morales fournisseurs d’accès ou hébergeurs ou encore opérateurs. Autrement dit, en droit congolais la responsabilité en matière d’utilisation des réseaux sociaux n’existe pas encore clairement. Mais la responsabilité civile peut être retenue sur le fondement de l’article 258 du Code civil congolais Livre 3. Cette disposition permet d’attester que les utilisateurs qui causent un dommage à autrui par le biais d’un réseau social sont tenus, en principe, de le réparer personnellement.

95 Sur le point de vue critique de ces dispositions du code civil livre III et les propositions de réforme et de leur adaptation aux réalités actuelles, voir Pierre Félix KANDOLO ON’UFUKU WA KANDOLO, Réparations en droits de la personne et en droit international humanitaire. Problèmes et perspectives pour les victimes en République démocratique du Congo, Thèse de doctorat, Faculté de droit, Montréal, Université de Montréal, 2017.

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De ce fait, en l’absence donc de textes spéciaux, on doit chercher des

solutions en recourant au droit étranger. En droit français, il existe une irresponsabilité de principe des fournisseurs d’accès. En effet, l’article L.32-3-3 du code des postes et communications électroniques dispose :

« [T]oute personne assurant une activité de transmission de contenus sur un réseau de communications électroniques ou de fourniture d’accès à un réseau de communications électroniques ne peut voir sa responsabilité civile ou pénale engagée à raison de ces contenus que dans les cas où, soit elle est à l’origine de la demande de transmission litigieuse, soit elle sélectionne le destinataire de la transmission, soit elle sélectionne ou modifie les contenus faisant l’objet de la transmission ».

Ainsi, le fournisseur d’accès ou l’hébergeur ou encore l’opérateur sont, en principe, exonérés de toute responsabilité sauf dans les cas précédemment retenus par l’article L.32-3-3 susvisé. Cette position témoigne simplement le désir affiché par plusieurs pays, surtout occidentaux, d’exonérer les intermédiaires internet (fournisseurs d’accès, opérateurs). Déjà en 1988, le Parlement canadien a ajouté à la Loi sur le droit d’auteur la disposition antérieure à l’actuel article 2.4(1)b) prévoyant que la personne qui ne fait que fournir « à un tiers les moyens de télécommunication nécessaires pour que celui-ci effectue une communication » n’est pas elle-même partie à une communication illicite.

S’agissant de la responsabilité en cas de violation de la liberté d’expression sur les réseaux sociaux, en droit français, les fournisseurs d'hébergements sont dispensés de toute obligation générale de surveillance des informations qu'ils transmettent ou stockent. Toutefois, en dehors de ces principes édictés par le législateur, les hébergeurs et réseaux sociaux doivent concourir à la répression de certains contenus rejetés de façon récurrente en France. Ce sont notamment les contenus faisant l'apologie des crimes contre l'humanité, incitant à la haine raciale ou à la pornographie infantile.

Il a également été prévu que ces intermédiaires doivent participer à la lutte contre la diffusion de certaines infractions prévues par la loi du 29 juillet 1881 et par le code pénal français comme l'incitation à la violence et les atteintes à la dignité humaine. Le respect de ces dispositions suppose, selon le législateur, que l'hébergeur mette en place un dispositif de signalement des contenus illicites facilement accessibles et visibles pour que les personnes puissent porter à leur connaissance ce type de données. A titre d'illustration,

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pour les réseaux sociaux, il s'agit de la mise en place sur Facebook de l'onglet « signaler un problème » situé sur l'icône de paramétrage, facilement accessible et visible, qui permet à tout utilisateur de signaler rapidement un contenu illicite.

En cas d’abus de liberté d’expression par un internaute. Le régime de responsabilité commun s'appliquera pour les abus civils, telles que les atteintes au droit à la vie privée et au droit à l'image, aux droits de propriété intellectuelle.

CONCLUSION

Beaucoup d’observateurs ont mis en exergue depuis ces derniers temps la formidable dimension émancipatrice des médiations technologiques, non seulement des téléphones portables, mais de l’Internet et des réseaux sociaux (tels que Facebook et Twitter), permettant à l’opinion publique de s’affranchir des canaux officiels de diffusion de l’information, donnant ainsi aux citoyens la possibilité de provoquer des mobilisations sans précédent, de déborder les systèmes de contrôle. Ce sont bien de nouvelles modalités d’expression et de résistance politiques qui sont apparues, confortant l’idée que le pouvoir n’est plus seulement celui des États mais qu’il réapparaît des formes inédites de contestations.

Et les récents événements en RDC font retentir avec une acuité particulière cette réflexion sur une nouvelle forme des droits de l’homme grâce aux réseaux sociaux. Tout le monde s’accorde aujourd’hui à penser que les réseaux sociaux ont joué un rôle considérable pendant la période électorale mais aussi on a enregistré plusieurs violations de certains droits sur internet que l’on pourra qualifier des droits fondamentaux.