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Diplôme d’études supérieures spécialisées Développement, Coopération, Action Humanitaire DESS DCAH Université Paris I Panthéon – Sorbonne Année universitaire 2004 – 2005
SEINE-SAINT-DENIS (FRANCE) - FIGUIG (MAROC)
AVANCEES ET LIMITES DE LA COOPERATION.
Marie-Hélène CHAMBRIN
Directeur : Adda BEKKOUCHE
Mes remerciements vont tout particulièrement à :
- Adda BEKKOUCHE pour ses conseils tout au long de la rédaction de ce mémoire.
- Amar ABBOU – 1er vice-président de la Municipalité de Figuig – délégué culturel de la province de Figuig qui a accepté de suivre l’ensemble de mon travail, a mis à ma disposition une riche bibliographie et surtout m’a donné des clefs pour comprendre Figuig et ses habitants en répondant à mes multiples questions.
- Brahim BAHOU – chargé du suivi des projets de coopération entre le Conseil général de la Seine-Saint-Denis et la Ville de Figuig, particulièrement pour ses informations sur la décentralisation au Maroc et à toute sa famille
- Saïd TOUIJER - Pacha de Figuig - chef de cercle, toujours disponible malgré sa charge de travail
- Aux représentants des ksour Hammam Foukhani et Loudaghir qui ont accepté de répondre à toutes mes questions : Ahmed HARFI, Abdelaziz AZZOUZ, Samira MANSOURI, Boufelja ANTARI, Amora ALLAL, Brahim BOUBEKRI, Mohammed JAMMALLEDINE, Mohamed BOUBEKEUR, Mohamed TABBOU, Mohamed SOUNI.
- Aux hommes et aux femmes de Figuig, militants associatifs, élus, enseignants, étudiants, agriculteurs, fonctionnaires, artisans auprès desquels j’ai tant appris sur l’oasis, son histoire, ses traditions
- Aux originaires de Figuig résidant en France et tout particulièrement : Abderrahmane, Karim et Anne-Marie, Mostafa.
Mais également,
- A l’équipe enseignante du DESS
- Aux étudiants de la promotion qui m’ont aidé durant toute l’année universitaire,
- Au personnel administratif
et
- A tous les collègues du Conseil général de Seine-Saint-Denis qui m’ont permis de préparer ce DESS tout en poursuivant mon activité professionnelle, notamment la conduite des projets de coopération avec Figuig et Matola.
* *
*
« L’université Paris I n’entend donner aucune approbation aux opinions émises dans les mémoires. Ces opinions doivent être considérées comme propres à leurs auteurs ».
2
SYNTHESE
A côté de la coopération entre les Etats, se développe depuis les années 90, la coopération
décentralisée entre collectivités locales, présentée comme un outil pour favoriser le rapprochement
entre les Hommes, gérer les problèmes au plus proche des préoccupations des habitants.
Dans ce cadre, le Conseil général de la Seine-Saint-Denis (France) et la Ville de Figuig (Maroc)
conduisent depuis juin 2000 des projets dont l’objectif premier est de favoriser la participation des
citoyens des deux collectivités. La Ville de Figuig dispose dans ce domaine d’une expérience
spécifique, issue d’une tradition séculaire, qu’elle a souhaité partager avec le Département de la
Seine-Saint-Denis.
Au quotidien, les deux collectivités se heurtent à des difficultés liées à des visions différentes de la
coopération décentralisée au niveau de leurs pays respectifs, à des législations contraignantes et à la
faiblesse des moyens dont elles disposent pour conduire les projets.
Dans la pratique, la coopération décentralisée semble bien favoriser la participation des habitants,
notamment par le biais des associations et contribuer à faire évoluer la législation. Mais ces
évolutions demeurent lentes, freinant des processus qui pourraient être particulièrement efficaces.
MOTS CLEFS
Ksar (pl. ksour), Jemâa ou djemâa (pl. Jemâat), association, collectivités locales, coopération
décentralisée, décentralisation, autonomie locale, démocratie locale.
3
SUMMARY
Apart from cooperation between States, we assist, since the 90’s at the development of
“decentralised cooperation” (seen as a cooperation between two local authorities) presented as a way
to implement the involvement of the populations and to resolve all the problems at a level as linked
as possible to the population.
In this context, the sub region called Seine-Saint-Denis (France) and the city of Figuig (Maroc) are
leading various projects, since June 2000 which the first aim of which is to promote the involvement
of both population from Seine-Saint-Denis and Figuig. The city of Figuig, in relation with its long
and typical history has already got a large experience and wants to share it with the sub region of
Seine-Saint-Denis.
In their daily work, both local authorities are facing various problems linked to different ways of
understanding “decentralised cooperation” in each of their countries, linked as well to particularly
stiff laws and to the weakness of the tools they can use to lead theirs projects.
Concretely speaking, decentralised cooperation seems to contribute to increase the participation of
the populations, especially through NGOs and to permit as well the evolution of the laws. However,
those transformations remain slow, and prevent the development of an evolution which could bee
particularly efficient.
KEY WORDS
Ksar (pl. ksour), Jemâa or djemâa (pl. Jemâat), association, local authority, decentralised
cooperation , decentralisation, local autonomy, local democracy.
4
PLAN SOMMAIRE
Introduction Page 6
CHAPITRE I - LES AVANCEES DANS L'IMPLICATION DES POPULATIONS.
Page 13
Section 1) - Des traditions différentes en terme d’implication des populations.
Page 14
Section 2) - La coopération décentralisée, facteur de participation de la population : réalité ou vœu pieux ?
Page 35
CHAPITRE II - DES LIMITES IMPOSEES PAR LES REGLES JURIDIQUES ET PAR DES VISIONS DIFFERENTES DE LA COOPERATION DECENTRALISEE.
Page 49
Section 1) - Des niveaux différents de décentralisation. Page 50 Section 2) - Des visions différentes de la notion de coopération décentralisée.
Page 69
Conclusion Page 80
Annexes Pages 82 à 89
Bibliographie Pages 100 à 103
Table des matières Pages 104 à 106
5
INTRODUCTION
Concept et pratique « à la mode », la coopération décentralisée, au sens de « relations nouées par les
collectivités locales françaises et leurs groupements avec des collectivités territoriales relevant d’un
autre pays »1, est souvent présentée comme un outil pour rapprocher les populations, un moyen de
répondre à des besoins que la coopération bilatérale entre Etats ne peut satisfaire. Elle sert parfois à
masquer le désengagement des Etats, mais une « bonne pratique » dans les relations entre les
partenaires ne peut-elle pas permettre d’éviter ce risque et conduire à des avancées significatives,
pour les collectivités elles-mêmes et leurs habitants ou en termes législatifs ? Est-elle un outil
pertinent pour favoriser la participation des populations, non seulement aux projets de coopération
décentralisée mais à la gestion locale dans son ensemble ?
L’expression « du local au mondial » revient souvent dans les discours relatifs aux relations
internationales s’inscrivant dans une logique de développement durable. La coopération
décentralisée est fréquemment associée à la démocratie locale, participative, à la citoyenneté, à la
bonne gouvernance.
Michèle LECLERC-OLIVE, enseignante à l'EHESS, insistant sur la reconnaissance nouvelle dont
bénéficient la coopération décentralisée, les ONG et la société civile, présentées comme acteurs
essentiels pour l'efficacité des actions entreprises à l'endroit des populations, écrit, dans un texte
consacré à l'Aide Public au Développement par les grandes instances internationales : "La
coopération internationale et notamment la coopération décentralisée, contribue par ses procédures
et ses pratiques et par les choix des interlocuteurs qu'elle se donne, à configurer les structures
politiques des sociétés locales et nationales partenaires et à légitimer/délégitimer,
1 Ministère des Affaires étrangères - Guide de la coopération décentralisée – La Documentation française – 2000 – p.19
6
consolider/affaiblir certaines logiques de décision"2.
Mais les formes prises par la coopération décentralisée varient souvent d’une collectivité locale à
une autre. Les résultats sont aussi inégaux. Maurice BAUDOUX – professeur à l’USTL de Lille
précise les conditions qui lui semblent nécessaires pour une coopération décentralisée réussie 3 :
- L'existence et le fonctionnement d'un véritable partenariat, sur des projets menés en
commun et avec le même objectif par un partenaire du Sud et un partenaire du Nord.
- Des partenaires qui s'impliquent en termes politiques, humains et financiers, et sont
capables de mobiliser les acteurs locaux et leurs réseaux.
- Un souci de réciprocité.
- Une exigence d'évaluation pour faire connaître l’utilisation des fonds et rectifier les
erreurs d'orientation ou de mise en œuvre et de coordination pour éviter des projets
redondants avec d'autres et de complémentarité.
Il souligne que « la coopération décentralisée est - au-delà de la solidarité, des échanges humains et
de l'inter culturalité - un formidable moyen de développer la citoyenneté, de renforcer la démocratie
locale, de mobiliser les acteurs, de favoriser l'initiative, de diffuser la connaissance et de participer à
l'aménagement du territoire ». Pour lui, « la bonne gouvernance prônée par les Nations Unies doit
aller de pair avec un contexte politique participatif, fait de transparence, d’efficacité, de légalité, de
responsabilité de l'administration vis à vis des administrés et d’équité, ce qui implique le
renforcement des capacités des principaux acteurs politiques et une gestion des affaires publiques
ouverte aux besoins de l'ensemble de la société ». Au vu des rapports nationaux sur le
2 Michèle LECLERC OLIVE – « Décentraliser : enjeux théoriques et politiques ». Paris - Cahier du GEMDEV – n° 27 – octobre 2001. 3 Maurice BAUDOUX - "La gouvernance dans tous ses états. Economie de la connaissance, coopération décentralisée et développement local" - Revue marocaine d'audit et de développement - décembre 2004 – pp. 181 - 188
7
développement humain 2002 et 2003 des Nations Unies, il considère que la politique de
décentralisation et de déconcentration entamée au Maroc s'inscrit parfaitement dans cet esprit.
Mais cette appréciation semble devoir être modulée. Certes les liens de coopération entre les
collectivités locales françaises et marocaines sont importants : ils concernent une cinquantaine de
collectivités locales françaises qui travaillent le plus souvent avec des grandes villes marocaines et
presque exclusivement dans l’Ouest marocain4. Toutefois, et même si les dernières années ont été
caractérisées par une évolution dans le contenu des actions menées, les collectivités procèdent
généralement à des échanges protocolaires, plus rarement à la conduite de projets très concrets,
impliquant les populations.
Dans ce contexte, la coopération entre la Municipalité de Figuig et le Conseil général de la Seine-
Saint-Denis, qui a permis la mise en œuvre d’actions très concrètes, est présentée comme originale
voire exemplaire par les autorités nationales marocaines et françaises. De ce fait, les représentants
des deux collectivités sont fréquemment sollicités pour des exposés lors de colloques, séminaires….
En juin 2000, le Conseil général de la Seine-Saint-Denis (France) et la Ville de Figuig (Maroc) ont
signé un protocole de coopération décentralisée5 , décidant ainsi de travailler ensemble, dans la
durée, dans une logique de collaboration mutuellement avantageuse, impliquant les populations. Les
deux collectivités ont choisi de construire des projets communs, répondant à trois
priorités déterminées d’un commun accord:
- la participation et la citoyenneté.
- la prévention dans le domaine de la santé,
- le développement local
4 Conseil général de la Seine-Saint-Denis - Etude réalisée pour le groupe pays Maroc de Cités Unies France – mars 2003 5 Ville de Figuig et le Conseil général de la Seine-Saint-Denis, Protocole de coopération , 8 juin 2000 – Annexe 1.
8
Au terme des cinq premières années d’expérience, le rapport d’étape réalisé par le Conseil général 6
montre des avancées certaines, mais aussi des limites dans chacun de ces trois axes de travail.
Alors que les deux collectivités locales ont placé la participation et la citoyenneté comme priorité
première dans leur coopération, ce mémoire vise à étudier la place occupée réellement par les
populations et à voir dans quelle mesure cette coopération constitue un outil pour une plus grande
participation des habitants dans la gestion locale.
Etant chargée de projets au service de la coopération décentralisée du Conseil général de la Seine-
Saint-Denis depuis 1998, et plus particulièrement responsable du suivi de la coopération entre les
deux collectivités depuis 2000, ce mémoire est le résultat, non seulement d’un stage sur place dans
le cadre du DESS, mais aussi de nombreux déplacements professionnels, de l’étude des dossiers de
la coopération entre les deux collectivités, de contacts avec des élus locaux, des fonctionnaires, des
représentants des services déconcentrés de l’Etat et de l’autorité locale, des responsables associatifs,
des habitants de Figuig et de lectures. Une enquête7 plus précise dans deux quartiers de la ville
(Hammam Foukhani et Loudaghir) a permis d’étudier la place spécifique des habitants dans une
structuration originale qui voit coexister le Conseil municipal, les associations et les assemblées
traditionnelles (Jemâat).
En décidant de s’engager dans une politique de coopération décentralisée en 1997, le Conseil
général de la Seine-Saint-Denis a choisi de « travailler dans la durée », en veillant à mettre en œuvre
des projets « mutuellement avantageux » et « impliquant le plus largement possible les
populations »8 . Dans la pratique, ce dernier objectif est-il réalisé, ou les obstacles sont-ils trop
6 Conseil général de la Seine-Saint-Denis, Rapport d’étape de la coopération décentralisée, juin 2005. 7 Questionnaire établi en avril 2005 pour les entretiens – Annexe 2 8 Conseil général de la Seine-Saint-Denis, Rapport devant l’Assemblée délibérante du Conseil général – séance du 24 juin 1997.
9
nombreux pour cela ?
Apparemment très différentes, les deux collectivités ont toutefois de nombreux points communs, ce
qui explique leur décision de travailler ensemble.
Le Département de la Seine-Saint-Denis, situé aux portes de Paris, est presque totalement urbanisé.
Il compte 1, 5 millions d’habitants, repartis dans 40 cantons et autant de communes mais leurs
territoires respectifs ne se recoupent pas entièrement. Son budget est de 1, 2 milliards d’€. Plus de
5 000 agents travaillent dans les différents services et directions.
A la fin du 19ème siècle, le territoire de la Seine-Saint-Denis majoritairement rural s’engage
résolument vers son industrialisation9 . Il devient alors une terre d’accueil pour des populations
venant des quatre coins du monde et parmi elles, de nombreux originaires du Maroc et plus
particulièrement de Figuig. Aujourd’hui, environ 1 500 familles vivent en région parisienne,
principalement à Stains, Bobigny, Aulnay-sous-Bois en Seine-Saint-Denis et Chevilly-Larue dans le
Val-de-Marne.
Ancré à gauche dès sa création en 196710, le Département a connu une histoire marquée par de
multiples luttes sociales et politiques. Longtemps isolé politiquement, il a souffert de retards, en
terme d’enseignement, de transports publics par exemple. Avec une population aux revenus
généralement modestes, il cumule encore aujourd’hui de nombreux problèmes : chômage, précarité,
insuffisance des services publics, et souffre surtout d’une image négative. Malgré cela, il existe un
véritable sentiment d’appartenance à un groupe, comment en témoigne l’appellation « 9.3. »
inventée par les jeunes.
9 Madeleine LEVEAU FERNANDEZ et Denis FERNANDEZ RECATALA - Seine-Saint-Denis – le guide. Paris - Edition l’Archipel – 1998 – pp. 8 à 15. 10 Depuis 1967, le président du Conseil général de la Seine-Saint-Denis est un élu communiste.
10
Quant à Figuig, oasis d’un peu plus de 12 000 habitants11, essentiellement d’origine berbère, son
activité principale est la culture du palmier–dattier. Elle est située à 108 kilomètres de la capitale
provinciale (Bouarfa) et près de 400 kilomètres de la capitale régionale (Oujda), à plus de 1000
kilomètres de Casablanca et Rabat, dans une zone souvent appelée « le Maroc inutile ». Comme la
Seine-Saint-Denis, elle a souffert d’un long isolement politique, conséquence d’un engagement fort
de sa population contre toute forme d’oppression12. La spécificité de cette oasis a conduit de très
nombreux voyageurs à publier des récits. Parmi eux, citons Isabelle Eberhard13.
L’histoire de Figuig, qui ne sera toutefois pas développée dans ce mémoire, est émaillée de
représailles contre ses habitants durant la colonisation comme depuis l’Indépendance et jusque dans
les années 90, au moment de l’alternance politique. Isolée géographiquement et politiquement, la
ville s’est développée avant tout grâce à l’engagement de ses habitants. Les limites de ses ressources
en eau, ajoutées à cette situation difficile, ont conduit de nombreux habitants à émigrer, soit vers les
grandes villes du Maroc, soit vers l’Europe, en premier lieu l’Ile-de-France, mais l’attachement à la
ville d’origine demeure fort. La Municipalité fonctionne avec un budget de 7 961 780 dirhams (796
178 €) et 71 employés.
En 1997, les élus du Conseil général de la Seine-Saint-Denis décident d’engager une politique de
coopération décentralisée avec des collectivités locales d'Algérie et du Maroc, premier et troisième
pays d'origine des migrants résidant en Seine-Saint-Denis. Dans une vision basée sur le
développement d’une culture de la paix, ils cherchent à tisser des liens avec des collectivités situées
de part et d’autre de la frontière maroco-algérienne et à favoriser la participation de la population de
la Seine-Saint-Denis, notamment les jeunes dont la famille est originaire de ces pays. Cette volonté
11 Municipalité de Figuig , Plaquette de présentation de l’oasis de Figuig - septembre 2000. 12 J.H.FRANKLIN – « Les incidents de Figuig » - Questions diplomatiques et coloniales, 7ème année, n° 152 – 15 juin 1903. 13 Isabelle EBERHARD – Sud Oranais – Editions Joëlle Losfeld – Paris –Les éditions du centenaire –2003 - p 80- 81
11
croise une proposition émanant d’originaires de Figuig, résidant en Seine-Saint-Denis.
Figuig est située à 3 kilomètres de la frontière, en face à la région de Bechar (Algérie). Le
découpage de la frontière, réalisé durant la période coloniale (1903) a séparé les familles, coupé les
terres. La Municipalité de Figuig, dont la population souffre de la fermeture régulière de la frontière,
accueille avec enthousiasme ce projet de collaboration tripartite. Toutefois, les conditions politiques
n’ont pas permis de mener jusqu’au bout cette idée. Les projets de coopération avec une collectivité
algérienne n'ont pas abouti jusqu'à ce jour. Cela aurait sans doute pu donner un élan en faveur d’une
plus grande implication des habitants de la Seine-Saint-Denis dans les projets de coopération
décentralisée.
Ce mémoire va permettre d’aborder, dans une première partie, les avancées dans la mise en œuvre
du protocole de coopération décentralisée et tout particulièrement en ce qui concerne la participation
des citoyens et l’implication des populations, à Figuig comme en Seine-Saint-Denis, dans des
formes fondamentalement différentes, en lien avec des traditions spécifiques à chacune des deux
collectivités.
Les limites imposées par les règles juridiques et des visions différentes de la coopération
décentralisée feront l’objet d’une seconde partie.
12
CHAPITRE I
LES AVANCEES DANS
L'IMPLICATION DES POPULATIONS
13
Partageant le souci d’implication des populations, dans une démarche de démocratie participative,
les deux collectivités ont choisi comme axe prioritaire la participation et la citoyenneté,
considérant qu’au travers de la coopération décentralisée, des avancées réelles pouvaient être
réalisées.
Dans ce domaine, la ville de Figuig dispose d’une expérience originale, ancrée dans une tradition
séculaire dont elle souhaite faire bénéficier son partenaire, dans la vision d’une collaboration
mutuellement avantageuse. Les élus de la Seine-Saint-Denis, pour leur part, sont soucieux
d’impliquer davantage des habitants, dans une démarche de démocratie participative, ce qui se
traduit notamment par des consultations et une participation importante à différents réseaux : Cités
Unies France, l’Association des Départements de France et plus récemment, les Forums des
Autorités locales organisés en marge des Forum sociaux mondiaux ou européens.
SECTION 1) - DES TRADITIONS DIFFERENTES EN TERME D’IMPLICATION DES
POPULATIONS.
Outre les différences de taille et de compétences qui peuvent expliquer des niveaux incomparables
de liens avec les populations, il faut souligner l’existence de traditions spécifiques à chacune des
deux collectivités, dans le domaine de la participation des habitants aux affaires locales.
§ 1) - FIGUIG, UNE OASIS QUI PERPETUE LA TRADITION TOUT EN L’ADAPTANT AUX
REALITES NOUVELLES.
Figuig, souvent désignée dans les récits de voyage sous le terme de « pays de Figuig » a compté
jusqu’à une quarantaine de ksour14, sortes de petits quartiers, construits en matériaux traditionnels
(terre et palmier). On en compte aujourd’hui sept : Zenaga, Hammam Foukhani, Hammam Tahtani,
14 Conseil municipal de Figuig – plaquette de présentation de l’oasis - 2000
14
El Maiz, Ouled Slimane, Loudaghir et Laabidate, auxquels se sont ajoutés des quartiers modernes :
Baghdad, El Massira et le centre administratif. Les traditions restent fortement présentes encore
aujourd'hui.
a) - De la jemâa, centre du pouvoir.
Terme d'origine arabe, la jemâa, qui signifie "réunir ou réunion" désigne l'ensemble des hommes qui
y participent en même temps que le lieu où elle se tient. Elle est fondée sur le lignage15.
Décrivant la situation de Figuig en 1903 et 1945, Jean Louis MIEGE écrit : "L'organisation de
Figuig est en théorie aussi simple et aussi démocratique que possible. L'unité politique et
administrative est le ksar. L'autorité dirigeante du ksar est la djemaâ, prenant des décisions et les
faisant exécuter. La constitution de la djemaâ, consacrée par le temps, varie légèrement suivant les
ksours ; mais le principe en est le même dans tous. Chaque ksar est en somme divisé en plusieurs
grandes fractions (3 ou 4) ; chacune de ces fractions y délègue un même nombre de notables pour l'y
représenter. Les membres de la djemaâ sont remplacés en cas de décès ; ils le sont aussi, mais à titre
provisoire, quand ils s'absentent de Figuig, même pour un voyage de quelques jours. Les
désignations des nouveaux membres sont faites par la djemaâ elle-même, qui se maintient en somme
au complet d'une façon absolument constante"16.
Pierre Russo souligne les spécificités de cette population d’origine berbère, attachée à la structure
traditionnelle et décrit Figuig comme : "Une société qui, si elle a adopté quelques-uns des usages
courants dans le monde musulman, n'en a pas moins conservé avant tout ses usages propres et ses
coutumes locales. La plus frappante de ces données est celle relative à l'indépendance des
figuiguiens vis-à-vis du Sultan du Maroc. Qu'il reconnaisse le sultanat de Constantinople ou celui de
15 BORNAC (officier interprète) – « Quelques renseignements sur le droit coutumier berbère des habitants du Figuig et sur l’administration indigène des djemaa » Revue algérienne, tunisienne et marocaine de législation et de jurisprudence, n° 35 - fév-juin 1920 – pp 77-89 – Alger 1940. 16 Jean – Louis MIEGE – Figuig de 1903 à 1945 - Revue Maroc Europe n° 10 – 1996 – pp.165-205
15
Fès, un musulman doit toujours obéissance et hommage au descendant du Prophète et ne saurait se
considérer comme indépendant. (...) La discussion ne peut porter que sur le point de savoir si la
personne qui se dit descendante du Prophète et Khalife n’est pas un imposteur, mais le principe de la
subordination de tout musulman au khalife ne saurait même être effleuré. Or, à Figuig, non
seulement la question est plus qu’effleurée, mais elle est résolue par la négative. Aussi, pour
remplacer cette autorité qu’on ne reconnaissait pas, en fallait-il une autre pour maintenir un certain
ordre dans le pays. Ou plutôt il est infiniment probable que c’est la préalable existence de cette
autorité qui fit repousser celle du sultan au jour où vint dans ce pays l’islamisme. Cette autorité est
celle des djemâas. (…). La djemâa est à la fois autorité générale et particulière dans le ksar ; elle
détient toute la puissance et le dogme de la séparation des pouvoirs, si intangible aux yeux des
juristes d’Europe, est ici parfaitement ignoré. La djemâa légifère et fait exécuter, elle prend les
décisions civiles et militaires, il n’y a que dans l’ordre judiciaire qu’il y ait (mais ce n’est qu’une
apparence) intervention d’un autre pouvoir. (…) En premier lieu, il faut remarquer qu’en matière
répressive la juridiction coranique est inconnue ici, la djemâa seule est compétente. Elle juge donc,
touchant les crimes et délits, d’après une sorte de code pénal conservant par écrit les coutumes en
usage depuis des siècles au pays de Figuig. Ce code ou « kanoun » contient une série de sanctions
et prescriptions qui s’écartent sensiblement des préceptes coraniques et sont en contradiction
formelle avec le principe fondamental de la civilisation de l’Islam, qui veut que la religion, le droit
et la justice se tiennent intimement "17.
Roger GROMAND, contrôleur civil, relatant sa visite à Figuig écrit : « Le 20 août 1930, le Pacha de
Figuig avait à peine achevé le compliment qu’il venait de m’adresser de la part, pensait-il, de tous
les notables de l’oasis assemblés à l’occasion de mon départ de Figuig, que l’un des personnages les
17 Pierre RUSSO - Au pays de Figuig– Bulletin de la Société de Géographie du Maroc – Casablanca - 1er trimestre 1923 - pp. 56 – 57.
16
plus influents des Ksour se leva et prit la parole. Parlant au nom des djemâa, il dit très sobrement
quelques mots de circonstance puis, longtemps, il représenta l’attachement des Figuiguiens à leurs
coutumes séculaires, exprima leur vif désir de les maintenir intactes et me demanda de m’employer
pendant mon séjour à Rabat, où j’étais désormais affecté, à les faire respecter en haut lieu, toutes les
fois que l’occasion se présenterait » 18.
Ces trois témoignages illustrent le rôle primordial de la jemâa dans l’organisation de Figuig et la vie
de ses habitants, mais aussi le caractère démocratique de la société traditionnelle figuigui – que l'on
doit toutefois relativiser, puisque les femmes (environ 50% de la population), les juifs (près de 300
familles), les noirs et les familles non originaires du ksar, étaient totalement absents de ce système.
Les habitants actuels de Figuig complètent cette description en précisant que, jusqu'à l’instauration
de la commune urbaine (1992), la jemâa du ksar jouait un rôle essentiel dans tous les quartiers19. Là
où elle existe encore aujourd’hui, elle est encore composée de la façon suivante : la famille élargie
constitue ce que l'on appelle une fraction. Chaque fraction désigne sa jemâa - ou assemblée des
sages - qui est chargée de régler les affaires courantes, les conflits entre les personnes, la question de
l'eau. La jemâa discute de tous les projets qui concernent les habitants de la fraction, à l'exception
des questions juridiques qui relèvent, elles, des compétences du cadi. Il y a en effet une oscillation
permanente entre les traditions berbères et les dispositions qui relèvent du droit musulman. Ces
dernières sont à Figuig "adaptées" et c'est en général la tradition berbère qui prévaut, notamment
pour ce qui concerne le droit d'héritage des femmes. Les membres de la jemâa sont élus tous les
deux ans par les habitants de la fraction.
18 Roger GROMAND - Le particularisme de Figuig – Renseignements coloniaux et documents publiés par le comité de l’Afrique française et le comité du Maroc – Rabat - (n°4) -avril 1937 – Avant-propos. 19 Enquête réalisée auprès d’habitants des ksour Hammam Foukhani et Loudaghir par entretiens, sur la base d’un questionnaire établi en avril 2005 à Figuig.
17
Si plusieurs fractions sont concernées par un problème, la discussion intervient au niveau de la
jemâa du ksar. Celle-ci est composée de représentants des jemâat des différentes fractions (2 à 6
selon l'importance de chaque fraction). Pour éviter toute prédominance d'une fraction sur une autre,
la jemâa du ksar se réunit en terrain neutre. Il en est de même lorsque plusieurs ksour sont concernés
par une question et que les jemâat de ces ksour doivent se rencontrer.
Le ksar est essentiel dans la vie des habitants de Figuig. Il joue un rôle décisif dans la vie sociale :
mariages, visites, activités restent presque totalement limités au niveau du ksar dont on est
originaire. Cet attachement se retrouve de façon similaire chez les originaires de Figuig, qu’ils
habitent dans les grandes villes marocaines ou en Europe. Chacun suit « l’actualité » de son ksar et
s’implique dans les affaires qui le concernent.
Cette tradition d’implication des habitants sous forme de financement ou de travaux collectifs20
constitue un atout pour la participation de tous aux projets de coopération décentralisée. Toutefois,
la réflexion menée au seul niveau du ksar peut poser des problèmes en terme d’équilibre entre les
quartiers ou de prise en compte des questions d’intérêt général.
b) A la recherche d’un équilibre entre jemâa, Conseil municipal et
associations.
Les réformes législatives intervenues au Maroc dans les dernières années ont conduit, à Figuig, à la
recherche d’un équilibre entre les structures traditionnelles, les nouvelles institutions issues de la
décentralisation et de l’émergence de l’activité associative. Au quotidien, deux logiques différentes
s’affrontent en permanence : la vision de la ville dans sa globalité, représentée selon la loi par la
Municipalité ou celle du quartier, issue de l’existence des jemâa.
20 Roger GROMAND – « La coutume de la bezra dans les ksour de Figuig » - Revue d’études islamiques - 1931
18
En 1992, Figuig a acquis le statut de Commune urbaine, dotée d'un Conseil municipal, "chargé de la
gestion des affaires de la commune". Le passage de commune rurale à commune urbaine a soulevé
beaucoup de questions. Etait-ce ou non un avantage pour la ville et ses habitants ? En termes de
ressources financières pour la commune, la réponse est sans ambiguïté, puisque la dotation d’Etat a
été multipliée par 6. Pour ce qui concerne la population, celle-ci est davantage partagée, certains
habitants considérant que cela s’est traduit par des lourdeurs administratives.
Contrairement à la logique du ksar qui prévalait précédemment, la Municipalité, chargée de la
gestion des affaires de la commune, doit donc veiller à la prise en compte de tous les habitants. Elle
doit réfléchir en terme global et éviter de privilégier un ksar par rapport à un autre, de soutenir une
association plutôt qu'une autre. Mais l’exercice est difficile quand on sait que plus de 50 % de la
population habite le ksar Zenaga, dont sont aussi issus 7 des 15 conseillers municipaux. La majorité
des employés municipaux habite également ce quartier. Il serait facile, voire tentant, de favoriser ce
quartier. La Municipalité doit veiller en permanence à éviter cette dérive. Dans le domaine de la
coopération décentralisée, les projets discutés concernent l’ensemble de la ville. Cela favorise donc
une prise en compte globale du territoire municipal et des populations, quel que soit le quartier.
Mais malgré l'existence du Conseil municipal, il est clair que le ksar, avec sa jemâa, reste à Figuig
un élément central dans l’organisation de la ville. Chaque habitant appartient à un ksar. Les
conseillers municipaux représentent indirectement les habitants d’un ksar, le découpage des
circonscriptions électorales recoupant celui des ksour.
Le Pacha, représentant de l'Etat au niveau local "milite" pour la renaissance des jemâat dans les
quartiers de la ville où elles ont disparu, car pour lui, elles constituent un élément positif dans
19
l'équilibre de la ville et pour l'implication des habitants dans la gestion locale21.
Une troisième composante intervient : il s’agit des associations. La première association a été créée
à Figuig dans les années 60. Il s’agit de la Caisse des Ecoles, qui permet encore aujourd’hui de
généraliser la scolarisation des jeunes de la ville.
Les associations sont régies par une loi de 1958 22 , modifiée en 1973 puis en 2002 23 , pour
harmoniser la loi marocaine avec les conventions internationales ratifiées par le pays. Les
restrictions qui accordaient au pouvoir exécutif la prérogative de suspendre ou d’interdire certaines
associations ont été supprimées. Leurs moyens financiers sont renforcés. Elles peuvent maintenant
disposer de biens, fournir des services, gérer des projets. Elles ont accès à des financements
nationaux et internationaux dont les collectivités locales ne peuvent bénéficier.
Dans l’étude publiée dans le Bulletin d’Information Périodique n°120 sous le titre « Associations :
un nouveau statut », les auteurs concluent leur analyse en précisant : « La liberté d’association est un
principe consacré par l’article 9 de la Constitution marocaine. Il apparaissait donc inconcevable de
continuer d’exercer ce droit dans un cadre anarchique et archaïque d’où l’importance de la réforme
juridique des associations. Cette réforme essentielle va permettre au tissu associatif de remplir
pleinement son rôle de mobilisateur des ressources humaines actives de la nation ainsi que de
moraliser la vie publique conformément aux attentes légitimes de la société civile »24.
Depuis les années 90, au moment où le pouvoir central a été contraint d’engager des réformes, avec
la mise en place d’un Gouvernement de Gauche dirigé par A.Youssoufi, dirigeant du Parti socialiste
21 Entretien réalisé à Figuig en avril 2005. 22 Royaume du Maroc - Bulletin officiel n°2404 bis du jeudi 27 novembre 1958 – Dahir n°1-58-376 (15 novembre 1958) réglementant le droit des associations. 23 Royaume du Maroc – Bulletin officiel n° 5048 du 17 octobre 2002 du Dahir n°1-02-200 du 23 juillet 2002 portant promulgation de la loi n°75-00 modifiant et complétant le Dahir n°1-58-376 du 15 novembre 1958. 24Malak BENABELJALIL et Salima IBNOULKHATIB- Bulletin d’Information Périodique – n°120 – Janvier 2003 – Etude du mois – Associations : un nouveau statut - Publications Masnaoui Mazars –p.47.
20
marocains (USFP), leur nombre n’a cessé de croître à l’échelle du pays et ce sont elles qui ont
poussé à la modification de la législation 25 . Trois types d’associations ont vu le jour : des
associations de défense des droits de l’Homme, de développement et de bienfaisance.
Figuig n’a pas échappé à cette règle. Elle en compte aujourd'hui une quarantaine : associations de
développement dans chacun des quartiers, parents d'élèves, caisse des écoles, diabétiques,
handicapés, gestion des mosquées, coopérative agricole, artisanale, etc. Les associations rassemblent
un nombre important d'adhérents. Les femmes y sont généralement nombreuses et actives. Par ce
biais, elles ont été largement associées aux projets menés dans le domaine de la santé maternelle et
infantile, au titre de la coopération décentralisée entre la Ville de Figuig et le Conseil général de la
Seine-Saint-Denis.
L’expérience de deux quartiers - les ksour Loudaghir et Hammam Foukhani - permet de mieux saisir
le fonctionnement original de Figuig dans cette recherche d'équilibre entre trois structures : la jemâa,
le Conseil municipal et les associations, construction qui contribue à une plus grande participation
de la population26. Dans la description faite par des habitants de ces deux ksour, des aspects sont
identiques. On note toutefois des spécificités propres à chaque ksar. Les personnes rencontrées sont
soit membre du Conseil municipal, soit membre de la Jemâa, soit membre de l’association de
développement du quartier. Les entretiens ont été réalisés en présence de ces trois catégories de
personnes. Certains ont souhaité être également vus séparément.
Dans les deux cas, malgré la mise en place d’un conseil communal depuis 1976 (date de publication
de la 1ère charte communale), la jemâa occupe une position centrale au sein du ksar.
25 Pierre VERMEREN – Le Maroc en transition – Paris - Editions La Découverte – 2002. 26 Enquête réalisée en avril 2005 à Figuig.
21
Les représentants du ksar Loudaghir précisent que la jemâa s’intéresse à tous les problèmes du ksar,
peut interpeller l’autorité compétente. Elle s’occupe principalement des questions d’irrigation,
d’eau, de la gestion des terres collectives et de toutes les questions sociales. Elle joue un rôle majeur
pour rassembler les familles, coiffe plusieurs associations, donne un avis concernant le choix des
candidats pour les élections municipales. Elle est composée de 16 membres, c’est-à-dire 4 par
fraction, qui s'impliquent de façon importante au service de l'ensemble des habitants et bénéficient
d'une reconnaissance au niveau du quartier mais aussi de la ville.
Des réunions ont lieu régulièrement entre les membres de la jemâa, les conseillers municipaux du
quartier, les responsables associatifs et les habitants les plus actifs. Parallèlement, les membres du
Conseil municipal habitant le ksar sont conviés lors des réunions de la jemâa. Il est fait référence à
des réunions au cours desquelles les membres du Conseil municipal du quartier rendent des comptes
et sollicitent l’avis de la jemâa sur différents dossiers. N’importe quel habitant du quartier peut
convoquer une réunion qui intéresse les problèmes du ksar. Il est aussi fait référence à la façon dont
la jemâa est intervenue pour solutionner un problème d’eau et de terres collectives avec un ksar
voisin. Dans ce cadre, le Conseil municipal n’est pas intervenu. Plusieurs réunions ont été
organisées et le dossier a été transmis au Ministère de l’Intérieur, qui a la tutelle sur les terres
collectives, pour régler ce problème.
Les représentants du ksar Loudaghir27 considèrent toutefois que le rôle de la jemâa est affaibli en
raison du poids croissant des citoyens, notamment par le biais des associations et surtout des partis
politiques. Pour contrebalancer cela, il avait même été envisagé, lors des élections municipales de
2003, que l’un des conseillers du quartier soit directement désigné par la jemâa, l’autre par les partis
politiques. Ils soulignent l’existence de multiples coopérations, avec les autres ksour, l’Etat, la
27 Entretiens réalisés en avril 2005.
22
Municipalité et insistent sur la participation des habitants au travers des travaux collectifs
« touizat ».
Mais l’arrivée de populations nouvelles, des nomades sédentarisés du fait d’une sécheresse
permanente depuis la fin des années 90, qui composent environ 2/3 de la population du ksar
aujourd’hui, pose de nouvelles questions. Ceux-ci, selon la tradition, ne peuvent être membres de la
jemâa (même si certains résident à Figuig depuis plus de 100 ans). Ils peuvent adhérer aux
différentes associations du quartier. N’ayant pas les mêmes traditions, ils refusent de participer aux
« touizat ». En conséquence, absents de la jemâa comme des associations, ils ne s'impliquent pas
dans la vie du quartier.
La place des femmes dans le quartier est aussi un sujet de débat. En raison des migrations, qui
concernent en premier lieu les hommes jeunes, leur poids dans la ville est très important (65% de la
population, selon le recensement de 2004). Elles sont nombreuses dans les associations où elles
participent à l’animation des projets. La responsabilité première reste toutefois assumée par un
homme. Notons qu'au plan de la ville, aucune d'elles ne siège au Conseil municipal. Trois étaient
candidates pour la première fois lors des élections municipales de 2004, mais aucune n'a été élue.
Encore actuellement, et selon la tradition, la jemâa ne va pas les rencontrer. Les associations ou les
deux élus du quartier servent d’intermédiaire.
Dans ces conditions, l’équilibre recherché entre jemâa, Conseil municipal et association risque
d’être difficile à atteindre.
La jemâa joue un rôle plus important dans le Ksar Hammam Foukhani, même si les représentants
insistent sur les évolutions dans le rôle qui lui est assigné (autrefois la jemâa protégeait le citoyen ;
23
aujourd’hui, elle règle des problèmes de terrain) et sur le fait que les gens n’obéissent plus comme
ils le faisaient précédemment.
Elle compte actuellement 12 membres ; le conseiller municipal du quartier en est membre. Cela
facilite largement les contacts. Cette situation est récente ; dans les années 98 – 99, les relations avec
la Municipalité étaient difficiles, notamment pour un projet concernant l’assainissement. Or
aujourd’hui des exemples de coopération réussie avec la Municipalité sont cités par tous : la
construction d’un pont, par exemple, qui a fait l’objet d’une proposition des principaux intéressés,
puis de réunions avec les habitants ; la jemâa a approuvé l’idée. Une assemblée générale des
habitants a été organisée pour la recherche de financements ; une concertation a été engagée avec la
Municipalité pour rechercher son appui, y compris financier et voir si le projet n’était pas contraire
au plan d’urbanisme de la ville. La population du quartier a donc largement participé à la réalisation
de ce projet.
La présence des associations a aussi contribué à modifier le rôle de la jemâa. Leur création résulte
de la nécessité de rechercher des financements, la jemâa ne disposant pas de moyens suffisants et ne
pouvant en tant que telle solliciter des appuis financiers. Pour les idées émanant des habitants, des
discussions sont organisées avec les associations et la jemâa. Les habitants participent concrètement
à la réalisation du projet par le biais des travaux collectifs (touiza) ou par une contribution financière
(bezra)28.
Si parmi les membres de la jemâa on compte quelques responsables associatifs, le lien avec les
associations se fait essentiellement l’été, au moment où les originaires du ksar reviennent des
grandes villes marocaines ou d’Europe. Ce sont en général des personnes influentes, respectées, à
l’origine de projets intéressant tous les habitants. Quant au choix des candidats pour les élections
28 Roger GROMAND – « La coutume de la bezra dans les ksour de Figuig » – op.cit. p.16.
24
municipales de 2003, la jemâa du ksar Hammam Foukhani n'est pas restée neutre, sans toutefois
mener véritablement campagne.
Malgré les changements évoqués, la jemâa joue toujours un rôle important, elle gère les conflits,
s'occupe des terres, du partage, de toutes les questions liées au patrimoine. On fait aussi appel à elle
en l'absence de loi sur un domaine précis. Par contre, elle n'intervient plus en cas de menace
d'effondrement des habitations (construites en pisé), cette compétence étant assumée par la
Municipalité. La place des femmes est complexe : limitée "officiellement" puisqu'elles ne sont pas
membres de la jemâa, leur rôle est toutefois considéré comme essentiel par les personnes
rencontrées29. Elles donnent leur avis sur les projets qui les concernent (lavoir par exemple), mais
surtout sur de grandes questions, par exemple tout ce qui concerne la sensibilisation, l'éducation,
l'environnement de l'école. Elles exercent une grande pression pour la réalisation d'un jardin
d'enfants dans le quartier et il est probable que leur demande soit prochainement prise en compte.
Il est intéressant de voir comment les trois composantes – Conseil municipal, jemâa et associations
ont trouvé leur place dans l’un des projets conduits au titre de la coopération décentralisée : la
construction du réseau d’assainissement de la ville de Figuig. La Municipalité et le Conseil général
ont commencé à travailler sur les dossiers techniques, à mobiliser des fonds et à rechercher des
partenaires financiers. Le Syndicat Interdépartemental pour l’Assainissement de l’Agglomération
parisienne (SIAAP) a accordé un financement. Le Conseil municipal de Figuig a déterminé les
quartiers pouvant être concernés compte tenu du budget disponible. Il a recherché des financements
complémentaires (auprès du conseil provincial), sensibilisé la population qui s’est mobilisée pour la
réalisation du chantier (participation financière des familles et construction d’une partie du réseau
par les habitants eux-mêmes). Lors de l’étude sur les conditions de réalisation du chantier, il avait
29 Entretiens réalisés le 2 mai 2005 à Figuig.
25
été envisagé de relier le futur réseau à des bassins de lagunage existants dans l’un des quartiers de la
ville30 – idée ensuite abandonnée pour des raisons techniques. Plusieurs réunions de travail ont eu
lieu entre la Municipalité, les associations de développement du quartier concerné et la jemâa.
L’accord de cette dernière était en effet nécessaire puisque ce projet posait la question de l’usage des
terrains. Une séance de travail a eu lieu en présence des représentants du Conseil général pour
présenter à la jemâa tous les aspects techniques du projet et solliciter son accord.
Avec les jemâat et les associations, on assiste donc à une forte participation directe de la population,
qui mène directement des projets, obtient des financements et vient compléter le travail du Conseil
municipal. La coopération décentralisée qui s’appuie sur cette organisation spécifique, semble donc
bien renforcer la participation des habitants de Figuig.
c) Des partenariats qui s’entrechoquent
Au-delà de cette recherche d’équilibre entre Conseil municipal, associations locales et jemâa, se
pose avec force la question de la coordination, voire de la sélection des actions des différents
partenaires de la Municipalité ou des associations de Figuig. En effet, la Municipalité cherche à
profiter de toutes les opportunités en faveur des habitants. La population de Figuig dispose dans tout
le Maroc, d’une réputation de sérieux ; ses habitants sont généralement considérés comme des
personnes honnêtes, travailleuses, qui se prennent en charge, développent une activité associative
importante ; de ce fait, on assiste à une multitude de sollicitations de la part de personnes qui
souhaitent faire une étude, conduire un projet : étudiants, universitaires, associations, collectivités
locales …. qui viennent à Figuig, mobilisent beaucoup d’énergies locales. Ces déplacements
débouchent parfois sur des projets, mais restent bien souvent sans suite, laissant un fort sentiment
d’insatisfaction particulièrement chez les élus de Figuig.
30 Projet réalisé en 1997 par les habitants du ksar Hammam Foukhani avec le soutien d’ONG internationales.
26
La Municipalité de Figuig entretient des relations non seulement avec le Conseil général de la Seine-
Saint-Denis, la Ville de Stains, mais aussi des partenaires associatifs espagnols, italiens, belges. Des
universitaires originaires de Figuig travaillent avec des confrères issus d’universités espagnoles,
françaises. Des associations ont elles-aussi des relations avec les partenaires éventuels. Or certains
projets se chevauchent et, dans ce contexte, la Municipalité, en fonction de la faiblesse de ses
moyens, essentiellement humains, a du mal à assurer une coordination de tous ces intervenants. Cela
crée des confusions, se traduit par une impression de doublement des interventions sur un même
sujet. La multitude de partenaires intervenant sans coordination, au lieu de favoriser une implication
des habitants risque de les décourager.
Il paraît indispensable que la Municipalité mette en place un outil pour échanger les informations,
coordonner, optimiser les différentes interventions. Cette idée commence tout juste à faire son
chemin chez les élus locaux. Cela pourrait permettre l’élaboration d’une véritable politique de
développement local, dans une perspective à long terme et de préciser la place de chacun des
intervenants. La mise en place d’un outil de coordination pourrait aussi donner accès à des
financements de l’Union européenne ou d’autres organismes, un multi-partenariat étant souvent
exigé pour l’obtention de financements. La coopération décentralisée pourrait ainsi favoriser la mise
en relation, en synergie et en cohérence, des différents partenaires de la ville de Figuig.
d) Une place originale pour les originaires de Figuig
La tradition d’émigration est ancienne à Figuig. Elle remonte aux années 45. Cela résulte de la
nécessité de trouver un emploi, l’oasis ne pouvant faire vivre plus d’une quinzaine de milliers
d’habitants31.
31 Marc BONNEFOUS – « La palmeraie de Figuig » – Etude démographique et économique d’une grande oasis du Sud marocain – Chapitre II – La population sédentaire. - 1952
27
Résidant dans les grandes villes du Maroc ou en Europe, les originaires de Figuig ont gardé un lien
très fort avec leur ville d’origine. Quel que soit leur lieu d’habitation, ils se considèrent avant tout
figuiguis et se présentent comme tel. Leur attachement à leur oasis se traduit notamment par l’usage
de la langue berbère dans la totalité des foyers, l’envoi régulier d’argent à la famille, le retour à
Figuig, généralement l’été, au moins tous les deux ans, le mariage avec des personnes elles-aussi
originaires de l’oasis. Au fil des années, ils ont modifié leur mode d’intervention, passant d’un appui
à leur famille, à une participation à des projets collectifs ; la création des associations d’originaires
de Figuig a contribué à cette évolution qui se poursuit encore aujourd’hui. Ainsi, les originaires de
Figuig ont joué un rôle important pour la scolarisation de tous les enfants avec la création de la
caisse des écoles, la reconstruction de la première école de la ville, devenue aujourd’hui le siège de
la principale association de la ville.
Dans les années 1990, au moment où la vie associative a pris son essor dans le pays, en s'appuyant
sur la tradition d'intervention des habitants, la Municipalité de Figuig a encouragé les migrants à
participer au développement local. Répondant à cet appel, les originaires de Figuig ont créé des
associations pour aider au développement de l'oasis. Certaines ont été créées à Casablanca, Rabat
par exemple.
A partir de 1997-1998, des associations d'originaires de Figuig ont vu le jour en région parisienne.
Six associations sont créées : associations des originaires des ksour El Maiz, Ouled Slimane,
Zenaga, Hammam Foukhani, Loudaghir, Laabidate. Les originaires du 7ème ksar, peu nombreux,
n’ont pas créé d'association.
Ainsi, jusqu’en 2000, les associations de migrants en France ne travaillaient pas ensemble ; leurs
adhérents ne se connaissaient en général même pas. Il a fallu attendre la signature du protocole de
28
coopération entre le Ville de Figuig et le Département de la Seine-Saint-Denis, pour que se mette en
place une structure de coordination, transformée en 2002 en Fédération des associations des
originaires de Figuig en France. Nous verrons quelle place elle prend dans la coopération
décentralisée.
En général, chaque association de migrants travaille en relation avec l’association des habitants de
son ksar d’origine. Elles ont essentiellement un rôle de collecte de fonds. Si les projets menés sont
divers, ils ont cependant une caractéristique commune : leur dimension extrêmement locale. Ainsi,
l’association des originaires du ksar Hammam Foukhani a contribué au financement du réseau
d'assainissement dans le ksar. Les originaires du ksar Ouled Slimane ont, eux, collecté des fonds
pour la rénovation d'une salle permettant l'ouverture d'une école dans le quartier, évitant aux enfants
des déplacements longs et pénibles. L'association a aussi aidé à la création d'un local associatif.
Pour la plupart d’entre elles, les associations de migrants ont également financé l’aménagement de
salles informatiques ; elles ont envoyé des livres pour les bibliothèques des quartiers, tout cela à
l’échelle de leur ksar d’origine.
Cette prédominance d’une logique exclusive de ksar est partiellement en décalage avec les
évolutions qu’a connu Figuig. Même si les changements à Figuig sont lents, les migrants, quant à
eux, ont conservé une image de Figuig qui est en partie dépassée. Ils gardent trop souvent ce que
l’on pourrait appeler « l’esprit de container », c’est-à-dire l’envoi de matériel ou de médicaments
(souvent périmés) sans étude préalable des besoins de la population, sans concertation avec elle, par
opposition à la coopération décentralisée qui est concrète et en prise directe avec le terrain.
Ainsi, à Figuig, des changements interviennent. Les ksour ne sont plus la seule référence pour les
acteurs de la vie politique et sociale. D’autres structures émergent en effet, depuis les années 1990,
29
qui remettent partiellement en cause le pouvoir structurant des ksour et surtout permettent une forte
participation des habitants à la vie locale.
C’est cette implication originale et réelle de la population au travers des jemâat et des associations,
que la Municipalité de Figuig a souhaité partager avec le Conseil général de la Seine-Saint-Denis
dans le cadre de la coopération entre les deux collectivités locales.
§ 2) DE LA DELEGATION DE POUVOIR A LA DEMOCRATIE PARTICIPATIVE EN
SEINE-SAINT-DENIS.
Contrairement à Figuig, la participation des habitants est loin d'être une tradition au niveau du
département de la Seine-Saint-Denis. De nombreux efforts sont déployés pour remédier à cet état de
fait et les projets de coopération décentralisée sont mis à profit pour tenter d’impliquer davantage les
habitants, notamment les jeunes. Mais les résultats demeurent limités.
a) Une absence de tradition d'implication des populations ou la délégation de
pouvoir
Si les mouvements syndicaux et les activités politiques ont une histoire longue et riche en Seine-
Saint-Denis, la gestion locale a longtemps été considérée comme de la seule responsabilité des élus
locaux. Les salariés, en particuliers les ouvriers, trouvaient normal de défendre leurs droits dans les
entreprises. Mais il a été longtemps considéré que la gestion, que ce soit celle des entreprises, des
collectivités locales, comme du pays, ne leur revenait pas. Il a fallu des dizaines d’années pour que
les idées d’autogestion et de démocratie participative commencent à être prises en considération, au-
delà d’un cercle d’intellectuels. La Constitution de la 5ème République précise d’ailleurs : « La
souveraineté nationale appartient au peuple qui l'exerce par ses représentants et par la voie du
30
référendum ».
A propos de l’intervention directe des gens sur leur vie, Jean Lojkine, philosophe, lors du colloque
du 150ème anniversaire du Manifeste communiste de Karl MARX a déclaré: « Si ces mutations sont
restées, souvent et longtemps, peu visibles ou invisibles, c’est notamment que les cultures étatistes
(staliniennes et social-démocrates) se sont développées symétriquement à la culture capitaliste
dominante. Le détour par l’histoire des théories de la révolution et les expériences concrètes
s’impose alors pour comprendre où se sont situés et se situent les freins à la prise en compte de cette
nouvelle façon de penser l’intervention des citoyens dans la politique ».32
Quelques expériences ont toutefois été menées à l'échelon communal avec la création de
commissions extra municipales dans les années 70, le « nouveau contrat communal pour une gestion
sociale, humaine et démocratique », programme des candidats communistes aux élections
municipales de 1977 33. Mais la participation des habitants à la gestion des affaires locales est restée
très marginale. Le taux de participation aux élections est très faible. Il ne dépasse pas guère les 50
%. Depuis la deuxième moitié des années 90, dans diverses communes de la Seine-Saint-Denis, pour
combattre cette tendance à la délégation de pouvoir, au rejet du politique et des partis, a été engagée
une démarche de démocratie participative à Saint Denis, la Courneuve, Stains, Bobigny par
exemple, inspirée du modèle brésilien. Des services municipaux ont été mis en place pour organiser
la concertation auprès des habitants. Des comités de quartiers ont vu le jour. Des efforts sont
conduits pour soutenir la vie associative34. Mais les résultats de ces expériences restent limités.
Globalement, peu d’habitants participent aux réunions dans les quartiers. Les problèmes évoqués
dans les réunions concernent généralement de petites questions de la vie quotidienne (état des
trottoirs, par exemple) mais rarement les grands choix municipaux, comme l’avenir des services
32 Jean LOJKINE – Les citoyens au cœur du pouvoir – Magazine REGARDS n° 50 – Octobre 1999 - supplément. 33 Marcel ROSETTE – La gestion communale dans l’action – Paris - Editions sociales – 1977 – pp 80 – 83. 34 Archives départementales - Bulletins municipaux de chacune de ces communes.
31
publics, les finances locales, l’autonomie des collectivités.
Par ailleurs, si les habitants interviennent parfois au niveau de leurs communes, il est encore plus
rare qu'ils le fassent au niveau du département. Généralement, les habitants ne connaissent pas le
rôle d'un conseiller général, ni les compétences du Conseil général.
Certes, quelques associations existent au niveau départemental en Seine-Saint-Denis ; elles sont
généralement des coordinations de différentes associations ou comités locaux, mais peu s'intéressent
à des problèmes d'intérêt départemental, liés à la gestion locale.
b) Des efforts au niveau du Conseil général pour une plus grande participation
de la population séquano - dionysienne :
L'exécutif du Conseil général, plus particulièrement sous l’impulsion de ses deux derniers
présidents, Robert CLEMENT jusqu'en 2003, puis Hervé BRAMY, s’est largement mobilisé pour
favoriser la participation des habitants dans les projets qui les concernent. Une étape importante a
été franchie avec les actions menées en 2000 dans le domaine de l'enseignement, pour le rattrapage
des moyens alloués à la Seine-Saint-Denis, ce qui s'est traduit par l'engagement d'une campagne à
l'échelon de tout le département, avec une mobilisation très large des habitants, des élus, des
associations.
En mai 2000, le Conseil général a organisé avec le Ville de Saint-Denis deux journées de réflexion
sur le thème « Citoyenneté et démocratie participative : construire une nouvelle donne pour décider
d’un avenir humain ». Le président du Conseil général y a notamment déclaré : « A l’heure de la
mondialisation, il y a urgence à revivifier la démocratie et à penser de nouvelles formes de
participation citoyenne à tous les échelons. C’est vital parce que la démocratie n’est pas seulement
32
un outil de résistance, c’est aussi un formidable générateur de créativité, d’émancipation, de
libération humaine ». Evoquant la politique de coopération décentralisée, il a précisé : « Nous nous
attachons à travailler aussi les questions de la démocratie locale à travers les coopérations
décentralisées que nous avons avec des collectivités du Portugal, du Gabon, de Palestine, du
Mozambique et bientôt du Maroc ».35
Il convient de noter également le travail conduit en 2002 – 2003 en faveur du projet départemental
"visant à doter le département d'un projet de vie et de territoire en prise avec les aspirations de ses
habitants (...). Ce choix de voir s'épanouir la citoyenneté est d'ailleurs au cœur du projet lui-même,
car aucun des défis ne pourra être relevé sans une implication citoyenne majeure (...). L'action locale
peut contribuer à changer le monde. A condition que les citoyens mobilisent leur créativité, leur
énergie pour lever les obstacles à la concrétisation de leurs aspirations : l'engagement citoyen doit
permettre de peser de façon de plus en plus forte sur les choix déterminants, effectués en haut
comme en bas. Rien n'est plus durablement hors de portée des peuples. De ce point de vue,
l'échelon de proximité que constitue le Département est un point d'appui précieux. Il permet de
mettre en oeuvre des politiques locales efficaces, de nouer des coopérations nécessaires à
l'articulation démocratique des politiques publiques et favorise l'intervention des habitants et des
salariés eux-mêmes."36 . Cette volonté se concrétise aujourd'hui par l’engagement de négociations
avec chacune des villes de la Seine-Saint-Denis, pour la signature de chartes de coopération.
La démarche du Conseil général s'est traduite, dans le domaine des relations internationales, outre la
politique de coopération décentralisée, par l'accueil du Forum social européen à Saint Denis et
Bobigny, la participation d'une délégation départementale aux différents Forums sociaux mondiaux
35 Conseil général de la Seine-Saint-Denis – Discours du Président du Conseil général - Saint-Denis – 24 et 25 mai 2000. 36 Conseil général de la Seine-Saint-Denis - Déclaration du Président du Conseil général lors de la présentation du document d'étape pour la conception d’un projet départemental - 2002
33
et aux Forums des autorités locales. Parallèlement, a été lancé en avril 2005 par Hervé BRAMY,
nouveau président du Conseil général, « l’Appel des 93 » qui vise à changer l'image du département.
Les signataires affirment "la Seine-Saint-Denis est une terre d'avenir (...) c'est pourquoi nous
voulons en finir avec les caricatures et les clichés qui stigmatisent trop souvent ce territoire, sa
population et sa jeunesse. (...) nous sommes déterminés à mieux faire connaître sa diversité et la
richesse de sa réalité".
Mais ces efforts sont encore limités et ont du mal à être visibles dans le domaine de la politique
départementale de coopération décentralisée. Ainsi, la consultation lancée en septembre et octobre
2005 par le Président du Conseil général, auprès de l’ensemble de la population, sur le thème
« Ensemble, écrivons l’avenir de la Seine-Saint-Denis », élude complètement cette question. Les
actions conduites chaque année en novembre, dans le cadre de Semaine de la Solidarité
Internationale et qui pourraient permettre d’associer plus largement la population, restent encore
trop méconnues.
34
SECTION 2) - LA COOPERATION DECENTRALISEE, FACTEUR DE PARTICIPATION
DE LA POPULATION : REALITE OU VŒU PIEUX ?
La coopération entre Etats a montré ses limites en terme de développement. En effet, la situation
dans les pays du Sud ne s’est pas améliorée ; les écarts entre le Nord et le Sud sont toujours aussi
grands. Gérard Winter considère que cela résulte de l’absence de prise en compte des populations. Il
écrit : "Quatre décennies de lutte contre le sous-développement par des politiques dirigistes puis, à
l'inverse, par des politiques libérales n'ont pas enregistré, sauf exception, des succès décisifs, faute
d'avoir donner la parole aux populations concernées. Mais celles-ci en réaction, se sont peu à peu
organisées et prétendent désormais être aussi des acteurs de leur propre avenir. Ce qui laisse espérer
de nouvelles politiques de développement et de coopération empruntant les passages explorés par les
chercheurs du développement"37.
La pauvreté n’a pas reculé, au contraire ; on ne parle plus seulement de pauvreté, mais de pauvreté
absolue. C’est dans ce contexte qu’a été mise en avant la coopération décentralisée, qui selon la
conception française, permet une collaboration entre deux collectivités locales de pays différents38.
Nous reviendrons plus loin sur les visions différentes de cette notion dans les lois marocaines et
françaises.
Parce qu’elle part du niveau local, la coopération décentralisée ne risque t’elle pas de se traduire par
une certaine dispersion ou permet-elle au contraire un travail de proximité ? Si l’on prend l’exemple
d’une coopération comme celle de Figuig avec la Seine-Saint-Denis, il faut souligner qu’elle permet
une intervention dans des zones géographiques ignorées par la coopération bilatérale, en faveur de
populations exclues (femmes et jeunes notamment), qu’elle concerne des domaines peu pris en
37 Gérard WINTER – L’impatience des pauvres – Paris - Presses Universitaires de France - 2002
38 Ministère des Affaires étrangères - Guide de la Coopération décentralisée – op.cit., p.5.
35
compte par les politiques nationales (la protection maternelle et infantile par exemple) et introduit
des méthodes de travail nouvelles.
Est-elle également un facteur de participation des habitants ? En plaçant la participation et la
citoyenneté comme axe premier de leur coopération, les élus de Figuig et de la Seine-Saint-Denis
ont fait le pari d’une implication des populations dans les projets. Qu’en est-il véritablement
aujourd’hui ?
§ 1) DES PROJETS CONDUITS AVEC DES ASSOCIATIONS LOCALES A FIGUIG.
Le développement des associations date véritablement des années 90. La Banque mondiale et le
Fonds Monétaire International ont alors imposé au Maroc, comme dans de multiples pays, une
baisse des dépenses publiques, entraînant par-là même une réduction, voire la disparition, de
services publics39.
Dans le diagnostic du PNUD sur les ONG oeuvrant dans le domaine de l’environnement et du
développement au Maroc 40 , on note les remarques suivantes : « Les réformes politiques et
économiques engagées à partir des années 80 ont conduit l’Etat à se désengager de certains secteurs
sociaux, à privatiser la plupart des entreprises et à supprimer purement et simplement certains
services publics.
Une telle évolution implique forcément l’élargissement du champ de l’initiative privée, tant sur le
plan économique que social. Elle nécessite aussi l’élargissement du champ des libertés publiques
pour permettre notamment, la mobilisation communautaire et le développement de l’économie
sociale.
39 Banque Mondiale - Rapport sur l’organisation de l’administration et de la fonction publique au Maroc- 1995. 40 PNUD – Diagnostic des ONG oeuvrant dans le domaine de l’environnement et du développement au Maroc –Rabat – 2004 - Page 13
36
Le mouvement associatif s’est trouvé ainsi porté par un contexte général qui légitime son existence
et met en valeur sa contribution au développement. (…) On s’accorde ainsi à reconnaître la place
spécifique des ONG parmi les acteurs du développement en raison principalement de :
- leur capacité réelle ou potentielle à susciter la participation des populations locales,
- la confiance dont elles jouissent auprès des citoyens en raison du caractère désintéressé de
leur engagement, lequel s’exprime notamment par le bénévolat,
- leur aptitude à communiquer avec des acteurs de nature différente (élus, secteurs public et
privé, instances internationales, population…) et à remplir ainsi une fonction d’interface dans
la réalisation des projets ;
- leur indépendance vis-à-vis des autorités et des autres sphères de pouvoir,
- leur connaissance du milieu local et l’expérience qu’elles ont accumulée dans des
domaines essentiels pour la promotion du développement durable ».
A Figuig, l’absence d’intervention de l’Etat, phénomène ancien, a toujours été compensée par la
participation des habitants, au travers de la pratique de la « touiza » et plus récemment la création
d’un tissu associatif conséquent. Face à la faiblesse de ses moyens humains et financiers, la
Municipalité a fait le choix de travailler avec les associations, voire de leur confier des tâches
d'intérêt général. Cela conduit à la mise en place de partenariats ; c’est le cas par exemple de la
réalisation d’une décharge, fruit d’une collaboration entre la Municipalité, l’Association des
Coopératives Agricoles de Figuig, une ONG espagnole et l’Université de Barcelone.
Dans le cadre des projets de coopération décentralisée Figuig – Seine-Saint-Denis, les associations
ont donc été appelées par la Municipalité à prendre toute leur place. Elles sont notamment parties
prenante de projets concernant la santé et la protection de l'environnement.
37
a) Des actions réussies : l’exemple du Forum santé.
Cette action autour de la santé a été initiée en 2001, à l’occasion d’une mission exploratoire, en vue
de la détermination des axes concrets de travail entre les deux collectivités. Est apparu un véritable
fossé entre les médecins nommés par le Ministère de la Santé et la population de Figuig : manque de
confiance de la part des malades à l'égard des médecins sortant tout juste de la Faculté, manque de
dialogue, méconnaissance donc non prise en compte des réalités et coutumes locales de la part des
médecins, etc. Pointant tous les dysfonctionnements, la mission a permis l'ouverture du dialogue
entre les différents protagonistes41. Un comité local de la santé, présidé par le représentant de l'Etat à
Figuig, a été mis en place, regroupant des médecins, des pharmaciens, des élus locaux et des
militants associatifs. Une session de formation dans les domaines de la prévention maternelle et
infantile a été organisée en direction des associations de développement. Elles ont chacune désigné
une ou deux femmes pour participer à ce cycle de formation.
La Seine-Saint-Denis a fait part de sa propre expérience avec la mise en place d'un Forum santé en
2000, lieu d'échanges entre élus départementaux, professionnels de la santé et associations.
La Municipalité de Figuig, les associations locales, comme celles des originaires de Figuig en
France, ont repris à leur compte cette idée de Forum Santé, au point qu'il est difficile aujourd'hui de
dire qui l'a initié. Grâce à une forte implication des associations, il est devenu non pas un lieu
d’échange entre quelques spécialistes, mais un outil au service de la municipalité pour l’élaboration
de sa politique municipale dans le domaine de la santé.
Les thèmes des ateliers ont été proposés par le comité local de la santé, discutés avec le Conseil
général et les associations des originaires de Figuig en France. Onze ateliers préparatoires ont été
organisés, rassemblant plus de 600 personnes - dix ateliers à Figuig et le onzième en Seine-Saint-
41 Conseil général de la Seine-Saint-Denis – Compte rendu de la mission santé à Figuig – 19 au 26 février 2001
38
Denis, sur le rôle spécifique des migrants et de la coopération décentralisée pour l'amélioration de la
situation de la santé à Figuig 42.
Dans la préparation, la tenue et les suites du Forum santé, les associations ont joué un rôle
particulier : les propositions initiales ont été enrichies par les idées apportées par les militants
associatifs. Les thèmes de discussion ont été affinés ; de nouveaux ateliers ont été organisés. Grâce à
leur grande maîtrise des outils d'analyse : cadre logique avec arbre des problèmes, arbre des
objectifs, les associations ont permis de réaliser un diagnostic clair et complet de la situation,
d'avancer des pistes de travail et surtout de montrer que "la santé, c'est l'affaire de tous", thème du
Forum proprement dit qui s’est déroulé les 28 et 29 février 200443.
Celui-ci, qui a vu la participation de plus de 300 personnes, a été animé par des militants associatifs.
Une vingtaine de médecins originaires de Figuig et exerçant dans les grandes villes du Maroc,
étaient présents. A l'issue du Forum, ils ont décidé de constituer des "associations de médecins
originaires de Figuig (ils sont plus de 300 dans tout le pays) et leurs amis". Celles de Oujda,
Casablanca et Meknès ont rapidement vu le jour et ont commencé à travailler en relation avec la
Municipalité, les six médecins généralistes qui exercent à Figuig et dans des projets à l’échelon de
l’ensemble du Maroc.
Alors qu'habituellement les malades doivent effectuer de longs et fatigants déplacements pour
consulter un spécialiste, ces associations ont organisé la venue de médecins et des campagnes de
consultations de spécialistes ont pu être organisées à Figuig. Résultat du travail engagé entre Figuig,
la Seine-Saint-Denis, avec l’appui des associations de développement de tous les quartiers de la
ville, cette initiative a permis de pallier un manque considérable. La Municipalité a défini sa
42 Conseil général de la Seine-Saint-Denis - Document de synthèse des ateliers préparatoires au 1er Forum santé- Janvier 2004
43 Conseil général de la Seine-Saint-Denis - Actes du Forum Santé - octobre 2005.
39
stratégie en matière de santé. Elle a signé différentes conventions de partenariat, en particulier avec
le Croissant Rouge marocain.
Dans cette initiative, les associations ont joué un rôle primordial pour aider la Municipalité de
Figuig à définir sa politique de santé.
b) Les limites de l’action associative :
Si la Municipalité de Figuig s’appuie largement sur l’action associative, y compris pour la mise en
œuvre de sa politique de coopération décentralisée, celle-ci a aussi fait la preuve de ses limites,
mettant parfois en danger la poursuite de certains projets. Nous prendrons l’exemple du travail
réalisé avec l’Association des Coopératives Agricoles de Figuig (ACAF). Intervenant au départ dans
le domaine de l’appui aux agriculteurs (mise à disposition de matériel, formation des agriculteurs,
création d’une pépinière expérimentale…), elle a petit à petit diversifié ses activités, pour prendre la
responsabilité de tout ce qui concerne la protection de l’environnement au niveau local : création
d’une décharge (en lien avec la Municipalité, une ONG espagnole et l’Université de Barcelone),
éducation à l’environnement auprès des enfants, lutte contre l’ensablement…. Les cadres de
l’A.C.A.F. ont acquis, au fil des années, un très grand savoir-faire.
Dans le domaine de la coopération décentralisée Figuig - Conseil général, l’association a été chargée
par la Municipalité du suivi du projet sur la gestion raisonnée des ressources en eau par la technique
de la tensiométrie44.
Après 3 années de travail dans des conditions satisfaisantes, la mise en œuvre de ce projet connaît
des difficultés. Différentes raisons peuvent être invoquées. Si dans le cas présent, elles concernent
44 Utilisation des sondes pour mesurer le taux d’humidité du sol autour des racines et contrôler ainsi les besoins d’arrosage – Cette technique utilisée sur les arbres d’alignement dans les rues en Seine-Saint-Denis et à titre expérimental dans l’agriculture à Figuig a permis de réaliser 50 % d’économies d’eau.
40
l’A.C.A.F., elles peuvent s’appliquer à l’ensemble du monde associatif :
- Les difficultés financières de l’association qui doit en permanence rechercher les
moyens de son fonctionnement,
- Les problèmes de ressources humaines, avec le manque de pérennité dans l’activité
associative basée essentiellement sur le bénévolat, l’émigration des cadres qui
cherchent une situation financière plus aisée et une reconnaissance de leurs capacités et
une ponction des cadres les plus expérimentés par des organismes étatiques (Agence de
développement social par exemple) ou dans le cadre de programmes (SAPAN
notamment).
En effet, l’existence des associations repose sur leur capacité à mobiliser régulièrement des
financements. Cela les conduit parfois à privilégier certains types d’activités pour être sûres d’avoir
des fonds ; elles choisissent des axes de travail, non en fonction de leurs compétences, de leur
stratégie, ni des besoins des populations, mais des opportunités de financements donc des priorités
définies à tel ou tel moment par les bailleurs de fonds internationaux. L’activité associative se
transforme de plus en plus en source de revenus pour les militants. Le chômage et les bas salaires
poussent naturellement les cadres associatifs les plus expérimentés à rechercher à être embauchés
par les associations. On quitte le bénévolat pour une professionnalisation. L’ACAF s’est donc
trouvée confrontée à cette réalité ; trois des quatre cadres, reconnus pour leurs compétences ont été
embauchés pour des projets conduits par le Programme des Nations Unies pour le Développement.
La poursuite du projet de tensiométrie repose donc sur le seul permanent présent qui doit suivre
simultanément tous les autres projets et n’a pas toutes les compétences techniques requises. Ce
dernier cherche lui aussi à faire reconnaître son travail par le biais d’une rémunération
complémentaire.
41
Ce type de requête est spécifique au travail réalisé avec les associations, puisque les projets conduits
directement par la Municipalité sont mis en œuvre par des fonctionnaires qui perçoivent déjà une
rémunération, même si certains d’entre eux recherchent également à bénéficier d’une
reconnaissance spécifique, suite à une formation par exemple. On risque d’aboutir à des traitements
différents pour des personnes à qui il est demandé de réaliser des tâches comparables. Reste t-on
dans le champ de l’associatif ou assiste t-on à une professionnalisation qui changerait la nature du
monde associatif ? Dans le cadre de la conduite des projets au titre de la coopération décentralisée,
se pose clairement la question de la place de l’association dans les projets et notamment
l’opportunité ou non de lui déléguer la maîtrise d’ouvrage d’un projet. Au vu de l’expérience
décrite, l’implication directe des collectivités locales et de leurs fonctionnaires apparaît plus
favorable pour assurer la pérennité des projets. La Municipalité de Figuig s’oriente dans cette
direction en désignant petit à petit des référents pour chaque projet. Mais si l’on ne veille pas à
garder un lien avec les associations, on risque alors de se priver de l’implication d’une partie de la
population, que les associations auraient pu mobiliser.
§ 2) UNE IMPLICATION DE PARTENAIRES COTE FRANÇAIS REELLE MAIS ENCORE
LIMITEE AU SEUL NIVEAU INSTITUTIONNEL.
En Seine-Saint-Denis, les avancées en matière de participation des habitants sont encore limitées. Il
faut toutefois souligner un progrès dans la mobilisation de certains acteurs, institutionnels
notamment, même si les difficultés rencontrées par la Fédération des associations de Figuig en
France sont un obstacle à une ouverture plus grande vers la population.
a) Des intervenants multiples et de plus en plus structurés.
L'activité du Conseil général est basée sur l'implication directe des services départementaux ou de
42
leurs partenaires dans la conduite des projets de coopération décentralisée. Cette forme a été
préférée à une délégation des compétences à une association ou à des Volontaires internationaux,
comme cela se fait dans d’autres collectivités locales.
De ce fait, une dizaine de directions, services ou missions participent de façon plus ou moins
régulière à la coopération avec Figuig45. Ils rassemblent plus de trois mille personnes (sur les 5 000
agents que compte le Conseil général). Alors que les fonctionnaires en charge des projets se
déplacent sur le terrain et reçoivent, dans leurs services, des représentants de Figuig, des initiatives
sont prises pour faire connaître à leurs collègues les projets en cours auxquels le service participe :
rencontres, déjeuners-débats, conférences…. Ces initiatives restent encore limitées et se heurtent
parfois à des a priori, voire à des critiques, de certains fonctionnaires qui considèrent ces actions
comme inutiles, coûteuses et les déplacements comme des périodes de villégiature. Le travail de
conviction est donc essentiel, d’autant que les difficultés financières propres au Conseil général,
liées à la décentralisation de compétences sans transfert des moyens financiers correspondant,
réduisent les capacités d’intervention des services pour des actions à mener sur le territoire
départemental.
La mise en place d'un comité de suivi, rassemblant tous les agents partie prenante des projets permet
de donner progressivement une cohérence globale à l'intervention du Département. La coopération
décentralisée a donc bien été là un outil pour une plus grande participation des séquano-dionysiens
(de très nombreux agents habitant le département), mais surtout un moyen de favoriser le travail
entre les différents services départementaux.
45 Directions des espaces verts, de l’eau et de l’assainissement, de l’aménagement et développement, des personnes âgées et handicapées, de la culture, de la jeunesse et du sport, de la communication, des bâtiments départementaux, des collèges ; les services de prévention et d’action sanitaire, de la protection maternelle et infantile, de l’informatique ; la mission des Droits de l'enfant, l’observatoire des violences faites aux femmes.
43
Dans le souci d’associer davantage les habitants, un réseau se construit au niveau de la Seine-Saint-
Denis par le biais d’un travail partenarial avec quelques Villes. La Municipalité de Stains a signé un
accord de partenariat avec Figuig. Celle de Noisy-le-Sec, dans le cadre d’une convention avec le
Conseil général, accueille régulièrement des stagiaires de Figuig dans ses services. Une convention
est en préparation avec Tremblay en France. Cela contribue, là aussi, à une plus grande implication
d’habitants de la Seine-Saint-Denis.
Le Conseil général considère également essentiel l’échange d’expériences avec d’autres, d’où une
forte implication dans des réseaux existants (Cités Unies France et le groupe Pays Maroc) et la mise
en place d’un groupe de réflexion avec les villes et les associations, travaillant dans la Région de
l’Oriental46.
Malgré tous ces efforts, la coopération décentralisée reste méconnue. La participation directe des
habitants aux projets demeure marginale. Pour tenter de remédier à cette situation, des initiatives
sont prises en collaboration avec Via le monde, structure mise en place par le Conseil général en
2001, pour favoriser l’implication des habitants de la Seine-Saint-Denis, et singulièrement les
jeunes, dans des projets de solidarité internationale ; rencontres-débats, soutien à des projets
conduits par des associations ou par des enseignants, expositions sont organisés. Mais au regard de
l’importance de la population du département (1 million ½ habitants) la participation des habitants
aux activités de Via le monde, même si elle progresse d’année en année, reste bien modeste.
b) Une faible implication des associations parmi lesquelles celles qui
regroupent les originaires de Figuig.
L’implication des associations en Seine-Saint-Denis demeure faible. C’est le cas notamment des
46 Conseil régional Champagne Ardenne, Villes de Lille, Aix en Provence, Stains, Bondy, les associations membres du réseau Immigration, Développement et Démocratie.
44
associations des originaires de Figuig en France sur lesquelles les deux collectivités partenaires
comptaient pour favoriser une implication des populations en France.
En effet, il y a environ 1 500 familles d’originaires de Figuig en France. Six associations des
originaires de Figuig ont été créées, regroupant les habitants de six des ksour de Figuig – deux
associations supplémentaires ont vu le jour suite à des scissions. Elles se sont fortement impliquées
au début de la coopération, aidant même les deux partenaires dans le choix des axes de travail. Alors
qu’elles ne se connaissaient généralement pas, qu’elles ne travaillaient pas ensemble, elles ont
décidé en 2000 de constituer une coordination des associations de Figuig en France, avant de
s’orienter en 2001 vers la création d’une Fédération des associations des originaires de Figuig en
France.
Dans le cadre du partenariat entre Figuig et la Seine-Saint-Denis, la création de groupes de travail a
été proposée sur les questions de la santé, de l’environnement, des jeunes, les femmes. Seul le
groupe de travail sur la santé se réunit régulièrement. Les originaires de Figuig participent peu aux
initiatives organisées par le Conseil général, y compris celles qui sont organisées conjointement
avec la Fédération des Associations de Figuig.
Malgré cette présence importante d’originaires de Figuig et leur très fort attachement à leur ville,
pourquoi est-on confronté aujourd’hui à une telle difficulté ? Les associations manquent t’elles de
professionnalisme ou est-ce leur positionnement qui pose problème ? Il convient de souligner que la
plupart d’entre elles ne travaillent pas comme des associations françaises, mais comme des
associations marocaines en France, ne développant pas d’actions en faveur des populations résidant
en France. Elles mettent d’abord en avant le lien avec leur ksar d’origine plutôt qu’une activité liée
de développement au profit de l’ensemble de la ville ou de solidarité internationale. Elles sont
45
fermées sur elles-mêmes. Cela rend particulièrement difficile l’implication des jeunes, qui eux
cherchent une autre forme d’action et pourraient permettre une large ouverture. Elles sont souvent
enfermées dans des problèmes de personnes, reproduisant des conflits ancestraux. Elles manquent
aussi d'expérience. En conséquence, elles ne jouent pas un rôle moteur voire même, bloquent
l’avancée de certains projets. C’est le cas du projet d’assainissement qui associe la Fédération des
Associations de Figuig au projet, dans le cadre d’une convention quadripartite signée par la Ville de
Figuig, le Conseil général, le S.I.A.A.P et la Fédération des Associations de Figuig en France et
dans lequel cette dernière a ralenti l’ensemble des démarches. Quelques responsables de la
Fédération essayent toutefois de faire bouger les choses en prenant exemple sur le fonctionnement
d’autres associations, comme Migration et Développement, qui joue un rôle de relais pour mobiliser
les financements pour des projets de développement dans la région de Taroudant 47 .
L’affaiblissement de la structure associative à Figuig et plus particulièrement de la Fédération des
Associations de Développement de Figuig (FADEF), qui aurait pu constituer un pendant à la
Fédération des Associations de Figuig en France, constitue aussi un obstacle. Une réflexion engagée
depuis septembre 2004 et la restructuration en cours de la Fédération des associations de Figuig en
France, doivent permettre de dépasser ces problèmes.
§ 3) UNE POLITIQUE DE COMMUNICATION INSUFFISANTE, ICI ET LA-BAS.
La communication est un moyen essentiel pour favoriser la participation des populations. Or, la
question de la communication sur la coopération entre les deux collectivités est surprenante. Dans
les « milieux d’initiés », les deux partenaires bénéficient d’une réelle notoriété. Les représentants de
Figuig comme de la Seine-Saint-Denis sont sollicités pour participer à des rencontres, des colloques.
La coopération est souvent citée en exemple. Auprès de l’ensemble des populations, à Figuig
comme en Seine-Saint-Denis, la coopération est méconnue.
47 Fatema MERNISSI – ONG rurales du Haut Atlas – Les Aït Débrouille – Rabat - Editions Le Fennec – 1998
46
Cela résulte d’un grand déficit en matière de communication. Or, la participation des populations
nécessite au préalable une information régulière. Les deux collectivités enregistrent dans ce domaine
un retard important, qui peut être à l’origine des insuffisances soulignées dans ce travail.
Côté Seine-Saint-Denis, si les outils existent (Magazine départemental, site Internet) on peut
s’interroger sur les raisons de leur faible, voire de leur non-utilisation. Un recul important est à
signaler par rapport aux premières années de la mise en œuvre de la coopération (1998 – 2000) où
paraissait presque chaque mois un article dans le magazine départemental ou dans le bulletin destiné
au personnel. Les hypothèses suivantes peuvent être avancées :
- craintes de se voir reprocher l’utilisation de l’agent public pour des projets hors du
territoire départemental,
- transfert (même de façon implicite) à la structure Via le monde de tout ce qui concerne
l’information et la mobilisation de la population de la Seine-Saint-Denis. Or celle-ci ne
communique pas (et n’a pas vocation à le faire) sur les projets conduits au titre de la
coopération décentralisée.
Ainsi, hormis les rencontres avec les personnels, l’organisation de débats lors de la semaine de la
solidarité internationale (SSI), la participation à certains colloques, la parution de deux articles dans
la revue du Service de Coopération et d’Action culturelle de l’Ambassade de France à Rabat, une
information annuelle aux originaires de Figuig à l’occasion de l’assemblée générale de la
Fédération, la communication est quasiment inexistante.
Soulignons aussi l’absence de communication de la part de la Fédération des Associations de Figuig
en France en direction des familles originaires de Figuig. Cette situation constitue un frein à leur
participation aux différentes initiatives. « Je n’étais pas au courant » entend-on régulièrement de la
47
part des originaires de Figuig résidant en France.
Côté Figuig, la situation est là aussi complexe. Un diagnostic réalisé en 200348 met l’accent sur les
difficultés suivantes :
« - l’insuffisance ressentie d’informations distillées confine parfois au « vide », ce qui laisse souvent
place à la rumeur, synonyme de désinformation intentionnelle ou pas.
- l’information existante est vague, partielle, tronquée, non officielle.
- la principale source est l’ouï-dire : radio trottoir est le principal canal avec les désinformations et
les méconnaissances dans ce qui est colporté ».
Lors des entretiens réalisés avec des habitants de Hammam Foukhani au printemps 2005, ceux-ci se
sont plaints de l’insuffisance d’information sur les projets de coopération décentralisée et
s’interrogent sur la façon dont le choix de certains projets est fait et sur la lenteur du travail.
La Municipalité de Figuig a décidé de créer un site Internet et a sollicité un appui du Conseil général
en vue de la formation d’un Web master. Ce site, où pourra être présentée la coopération entre les
deux collectivités, va être accessible à tous, notamment aux originaires de Figuig, résidant dans les
grandes villes marocaines comme en France. Cela devrait permettre d’améliorer de façon sensible la
situation et contribuer ainsi à une plus grande participation des habitants aux différents projets.
Plusieurs questions sont aujourd’hui en débat sur les moyens à mettre en œuvre pour remédier à
cette situation, car si les personnes se plaignent souvent de l’insuffisance de communication, il faut
noter que même si celle-ci existe, cela ne se traduit pas nécessairement par une participation aux
projets. Il semble que les gens ne profitent pas de leur droit à l’information et que leur intérêt pour
tout ce qui concerne la gestion des affaires locales demeure faible.
48 Conseil général de la Seine-Saint-Denis - Rapport de la mission « communication » du Département de la Seine-Saint-Denis à Figuig – 14/21 janvier 2003.
48
CHAPITRE 2
DES LIMITES IMPOSEES PAR DES REGLES JURIDIQUES
ET DES VISIONS DIFFERENTES
DE LA COOPERATION DECENTRALISEE
49
Outre les difficultés exposées ci-dessus pour impliquer les populations dans la conduite des projets
de coopération décentralisée, il convient de noter l’existence de multiples obstacles liés aux lois
marocaines et françaises en matière de décentralisation, mais aussi à des visions différentes de la
coopération décentralisée.
SECTION 1) - DES NIVEAUX DIFFERENTS DE DECENTRALISATION
La coopération décentralisée est basée sur un travail entre deux partenaires. Cela suppose que
chacun d’entre eux puisse développer sa propre politique en la matière. La question est donc de
savoir de quelle marge de manœuvre dispose chaque collectivité partenaire.
La décentralisation est un processus en construction constante. Où en sont aujourd’hui les
collectivités locales marocaines et françaises ? Peut-on parler de libre administration des
collectivités locales marocaines et françaises ? Disposent–elles des moyens de développer les
politiques qu’elles ont définies, ou les obstacles sont-ils trop importants ?
Il ne s’agira pas ici de faire une étude comparée globale sur la décentralisation au Maroc et en
France, mais de pointer ce qui peut favoriser ou entraver la conduite des projets de coopération
décentralisée. Au-delà des aspects généraux, nous verrons dans la pratique comment cela se traduit
pour Figuig et la Seine-Saint-Denis.
§ 1) L’AUTONOMIE DES COLLECTIVITES LOCALES MAROCAINES
Décentralisation, bonne gouvernance, gouvernance locale sont des termes largement utilisés
aujourd’hui dans les discours, les colloques, les études (Banque mondiale - PNUD - USAID par
exemple49) et les revues administratives marocaines.
49 PNUD - Documents relatifs au programme GOLD Maghreb et étude financée par USAID "de la capacité locale pour la bonne gouvernance - appui au renforcement de la décentralisation et de la démocratie locale" - 2001
50
La pratique montre que les choses ne sont pas si simples, car il ne faut pas oublier que le processus
de décentralisation au Maroc est très récent et seulement partiel. Il semblerait plus judicieux de
parler d'autonomie des collectivités locales marocaines ou d'amorce de la décentralisation50.
a) Un phénomène nouveau
Même si la Commune marocaine moderne est l'héritière de tout un processus historique qui plonge
ses racines dans le passé, son autonomisation, au sens moderne du terme, est un phénomène très
récent.
La doctrine est divisée quant aux origines de la décentralisation au Maroc. Certains auteurs
considèrent la date de 1976 comme l’an I de la décentralisation, pour d’autres, se référant à
l’existence de jemâat, les collectivités locales relèvent d’une sorte de droit naturel, avec les formes
d’organisation traditionnelle.
Il convient de noter quelques dates significatives dans l’histoire des communes marocaines :
- le 2 septembre 1912, est promulgué un dahir permettant à Fès d’être la première
municipalité moderne, dotée d’une assemblée municipale.
- Le 1er avril 1913, une sorte de loi-cadre en vue d’organiser des commissions municipales
dans les ports est publiée.
- Le 11 septembre 1914, un dahir précise que les tribus dites de coutume berbère demeurent
régies et administrées selon leurs lois et coutumes propres, sous le contrôle des autorités.
Trois autres dahirs seront promulgués concernant les régions berbères, les 21 novembre
1916, 16 mai 1930 et 6 juillet 1951.
- Le dahir du 8 avril 1917 est considéré comme la charte municipale définitive du Maroc. Il
50 Extrait du document du PNUD – Programme GOLD Maghreb – p.1et 2 – Structure administrative décentralisée – Annexe 3.
51
s’appliquera jusqu’en 1953.
- Deux réformes de la charte communale interviendront ensuite, en 1976, puis en 2002.
Selon Mohamed BRAHIMI, Directeur des affaires juridiques, des études et de la coopération au
Ministère d’Etat à l’Intérieur « la France a légué au Maroc à l’Indépendance, une mosaïque de
régimes, qui ont sans doute eu le mérite de poser les bases d’un système communal moderne et de
préparer le milieu, mais dont l’application a généralement buté contre les atavismes centralisateurs
de l’occupant »51.
A l’Indépendance, les autorités publiques décident d’établir un système d’administration
décentralisée, inspiré très largement du modèle français (charte royale du 11mai 1958, dahirs des 1er
septembre, 2 décembre 1959 et 23 juin 1960 sur l’organisation communale).
Les lois de 1976 ont doté les communes d’une assemblée souveraine, aux compétences élargies et
d’un exécutif élu. Même si le Royaume du Maroc a choisi de faire de la commune, dès le lendemain
de l'Indépendance, la cellule de base de son édifice politique, démocratique et administratif, il a fallu
attendre 2002, avec l’adoption de la Charte communale, pour que des changements significatifs
interviennent dans les compétences des collectivités :
« Les dahirs de 1959 et de 1960 avaient posé les fondations de ce premier régime de
décentralisation, mais la décentralisation marocaine a abordé sa phase critique avec les lois de 1976
qui ont rénové l'institution communale et fixé les bases institutionnelles d'une autonomie et d'une
démocratie locale avancée" souligne la note de présentation du Dahir n°1-02-297 du 25 rejeb 1423
(3 octobre 2002) portant promulgation de la loi 78 - 00 sur la Charte communale.
Les articles 35 à 44 de la Charte communale précisent les attributions du Conseil communal
51 Mohamed BRAHIMI - la décentralisation marocaine : évaluation d’une formation en plusieurs actes – REMALD - n° 12 - Juillet – septembre 1995 – Page 15
52
réparties en compétences propres (articles 35 à 42), compétences transférées (article 43) et
compétences consultatives (article 44). L’article 35 définit les compétences générales : « le Conseil
règle, par ses délibérations, les affaires de la commune. A cet effet, il décide des mesures à prendre
pour assurer le développement économique, social et culturel de la commune ».
L’article 42 concerne les « actions de coopération de nature à promouvoir le développement
économique, social et culturel de la commune » 52. Le point 3 de cet article précise que le Conseil :
« examine et approuve les conventions de jumelage et de coopération décentralisée ; décide de
l’adhésion et de la participation aux activités des associations des pouvoirs locaux et de toutes
formes d’échanges avec les collectivités territoriales étrangères, après accord de l’autorité de tutelle,
et dans le respect des engagements internationaux du Royaume. Toutefois, aucune convention ne
peut être passée entre une commune ou un groupement de collectivités locales, avec un Etat
étranger ».
Lors d’un colloque organisé en 2003, Mohammed HARAKAT - professeur à l'université Mohamed
V après avoir analysé l’évolution vécue par le Maroc depuis le protectorat, en passant par les
premières années de l'Indépendance, où une série de textes ont été promulgués pour organiser la
gestion des affaires locales, précise : « (…) la charte communale de 1976 a posé les jalons de
l'organisation communale moderne basée sur la participation démocratique des citoyens dans la
gestion communale. La réforme instaurée par la nouvelle Charte communale de 2002 consiste à
dépasser les lacunes institutionnelles émanant du texte de 1976, dues essentiellement aux nouveaux
impératifs qui sont venus s'imposer aux décideurs. Cette réforme répond à deux objectifs :
- objectifs politiques : ils résident essentiellement dans le renforcement de l'ancrage de la
démocratie de proximité et de l'amélioration du système de représentation ;
52 Royaume du Maroc - Charte communale - 2002 – annexe 4
53
- objectifs économiques : ils consistent à promouvoir le rôle de l'institution communale dans le
développement économique, par le biais de l'instauration de structures de partenariat et de
coopération décentralisée. La pratique de la gestion locale se heurte à une série de contraintes
organisationnelles, budgétaires et humaines résidant notamment dans la faiblesse des capacités
organisationnelles des communes, les lacunes de leadership et de formation, la faiblesse du taux
d'encadrement, l'absence ou la défaillance des structures d'évaluation des politiques locales de
développement, l'inefficacité du système de comptabilité et de contrôle financier »53.
A l’occasion du même colloque, Mohamed ASSOUALI – partant de son expérience de vice-
président du Conseil de la région Tanger-Tétouan a déclaré :
"Le mouvement de décentralisation, amorcé sous la charte communale de 1960, accentué avec les
lois de 1963 sur l'organisation provinciale ou préfectorale et celle de juin 1971 sur l'organisation
régionale, amélioré par la suite avec la charte communale de 1976, a été considérablement renforcé
par la nouvelle charte communale de 2002. Le Maroc s'est rapproché d'une démocratie décentralisée
en adoptant la charte régionale en 1997. Aujourd'hui, le paysage des collectivités locales au Maroc
comporte 16 régions, 71 préfectures et provinces, 14 communautés urbaines, 1 547 communes, dont
1 298 communes rurales et 249 communes urbaines. La décentralisation marocaine compte près de
25 000 élus locaux. Cependant, il n'est pas sûr que le processus de la décentralisation soit parvenu à
son terme » 54.
En réalité, « il semble bien que l’administration marocaine ait toujours été partagée entre une
53 Mohamed HARAKAT - Du gouvernement à la gouvernance : les leçons marocaines - (actes du colloque national organisé par l'Université Abdel Saâdi, faculté des sciences juridiques, économiques et sociales - 21 et 22 mars 2003 - Tanger - revue marocaine d'audit et de développement - n°5 - 2004 (pp.17 - 18) 54 Mohamed ASSOUALI - Du gouvernement à la gouvernance : les leçons marocaines - (actes du colloque national organisé par l'Université Abdel Saâdi, faculté des sciences juridiques, économiques et sociales - 21 et 22 mars 2003 - Tanger) - revue marocaine d'audit et de développement - n°5 - 2004 - La gouvernance locale, instrument de renforcement de la décentralisation et de la démocratie – (pp.155 - 157).
54
constante centralisatrice et une volonté de périphérisation. La centralisation, produit de l’héritage
colonial et l’autonomie locale, valeur profonde de la sociologie locale marocaine, appartiennent au
patrimoine de l’histoire marocaine »55.
Dans les discours sur les changements en cours, il y a souvent une confusion entre décentralisation
et déconcentration. Cela ne semble pas être le fruit d’une méconnaissance des termes mais plutôt
une hésitation dans le chemin d’une réforme, que Brahim ZYANI, enseignant chercheur, décrit dans
les termes suivants : « (..) Nul au Maroc ne peut contester le fait que la décentralisation territoriale
ait été à l’origine de l’intérêt croissant et soutenu accordé à la question de la déconcentration, à tel
point que celle-ci a fini par devenir une dimension essentielle de la politique de réforme
administrative » 56 . Il fait notamment référence à la Constitution du 13 septembre 1976 qui ne
mentionne jamais le terme décentralisation mais réserve toutefois plusieurs dispositions aux
collectivités locales appelées à élire « des assemblées chargées de gérer démocratiquement leurs
affaires »57.
La Ville de Figuig dispose d’un Conseil municipal de 15 membres, élus au suffrage universel
direct58. Dans le domaine de la coopération décentralisée, elle a signé des accords de coopération
avec le Conseil général de la Seine-Saint-Denis en juin 2000 et avec la Ville de Stains en octobre
200259 . Quand elle a contractualisé sa coopération avec la Conseil général de la Seine-Saint-Denis,
rien dans les textes officiels de l’y autorisait. Il n’y avait en effet aucune référence à la coopération
décentralisée dans les lois sur les compétences des collectivités locales marocaines – jusqu’à la
Charte communale de 2002.
55 Driss ABBADI – Tendances nouvelles en matière de gouvernance locale - La nouvelle gouvernance au Maroc – Bulletin scientifique annuel de l’observatoire de l’administration publique – n° 4 – 2003. 56 Brahim ZYANI – communication présentée au 4ème Forum méditerranéen du développement – Amman – 8 avril 2002. 57 Royaume du Maroc - Constitution du 13 septembre 1976 – article 101 58 Extrait du document du PNUD – Programme GOLD Maghreb – structure administrative communale (Loi 78 – 00) – p. 11- Annexe 5 59 Protocole de coopération signé entre les Villes de Stains et de Figuig - octobre 2002 - Annexe 6.
55
A l’occasion des sessions du Conseil municipal, elle définit les grands axes de travail avec ses
partenaires étrangers. Mais, au quotidien, existe t-il ou non une véritable décentralisation ?
b) Une autonomie encadrée par la loi et limitée dans la pratique.
Dans la pratique, il semble que la logique de centralisation ait toujours prévalu sur celle de la
déconcentration, ce qui a contribué à affaiblir le processus de décentralisation enclenché dès 1963.
Cette situation est sans doute liée à l'histoire spécifique du Maroc avec, comme le souligne Bernard
Cubertafond60, un système fondé sur trois piliers :
- l’allégeance, c’est-à-dire obéissance et soumission au Roi,
- le Makhzen, qui peut être défini comme les affaires réservées au Roi, ou le Roi, son
entourage et le Palais, ou encore les représentants locaux de l’Etat, du Roi, c’est-à-dire les
Gouverneurs et les Caïds,
- la légitimité religieuse.
Avec l'arrivée en 1999 d'un nouveau souverain, des changements sont intervenus, mais ils
demeurent limités et se heurtent à des traditions très profondes. Ainsi en 2000, lors de la parution
d'un livre blanc de la réforme administrative, élaboré par le Ministère de la fonction publique, le
Gouvernement s'est engagé à consolider et renforcer le processus de décentralisation et de
déconcentration. Or, la situation demeure paradoxale avec un discours politique réformateur mais
une absence de réformes significatives.
En effet, l'analyse de la pratique montre que les limites à la décentralisation demeurent importantes.
Lors du colloque déjà cité, Monsieur Mohamed Assouali - Vice-président du Conseil de la région
Tanger-Tétouan - a cherché à décrire cette situation de la façon suivante :
60Bernard CUBERTAFOND - La vie politique au Maroc – Paris - Editions L’Harmattan - 2001
56
" (...) Le dispositif normatif actuel de la décentralisation ne fournit pas aux décideurs locaux un
cadre juridique, financier et organisationnel, parfaitement adapté à la conduite d'une action de
développement en conformité avec les exigences de la bonne gouvernance. Il y a lieu de souligner
que l'esprit de l'expérience de décentralisation au Maroc, repose sur l'élaboration progressive d'un
système de répartition de compétence tendant à l'équilibre des pouvoirs. Plusieurs remarques
illustrent cette affirmation :
- Le Maroc a toujours poursuivi un double objectif de conciliation : d'une part encourager et
promouvoir les libertés individuelles et collectives, d'autre part sauvegarder l'unité nationale par la
cohésion sociale et la solidarité sur l'ensemble du territoire.
- A cet effet, et depuis l'Indépendance, l'Etat a voulu désigner sur des territoires, des représentants
du pouvoir central chargé d'appliquer la politique de l'Etat dans des domaines déterminés. Le
gouverneur correspond à cette fonction "d'envoyé en mission" auprès des élus et de la population.
- De nos jours, la déconcentration, exercée sous la responsabilité des Gouverneurs, est doublée d'un
dispositif juridique qui ne cesse de s'accroître et qui repose sur une décentralisation assumée par les
élus des collectivités territoriales (communes, provinces ou préfectures, régions).
- Le processus de décentralisation est permanent et continu. La volonté de doter les collectivités
locales de plus d'autonomie et de moyens s'accompagne d'une volonté de construire une démocratie
locale et participative par étapes prudentes et progressives.
- Le couple de force "déconcentration - décentralisation" s'exprime par des relations quotidiennes
entre agent de l'autorité et élus et évolue dans la recherche de l'équilibre entre pouvoir central et
pouvoir local. Dans le cadre de ce couple de force, les relations entre l'Etat et les collectivités locales
sont fondées sur la coopération et la solidarité, c’est-à-dire sur un travail en commun avec l'Etat,
autour des intérêts locaux relevant de l'affaire locale. L'Etat appelle les collectivités locales à
57
s'associer à lui pour réaliser des opérations d'intérêt général. Il accompagne ses collectivités dans le
développement économique et social et il propose à ces dernières de contractualiser avec lui des
actions prioritaires de développement.
Par ailleurs, l'appréciation de l'expérience marocaine de décentralisation – déconcentration, nous
permet de soulever des problèmes liés à l'évolution inévitable de l'administration territoriale :
- La réforme est un chantier permanent. Il faut la poursuivre sans cesse et la faire vivre avec les
citoyens. Il faut des années pour concevoir et faire mûrir les projets et des années pour appliquer et
corriger les dispositions adoptées.
- Des disparités de développement apparaissent sur le territoire du fait du découpage.
- L'insuffisance des ressources financières des collectivités locales constitue une préoccupation
majeure. La réforme des finances locales est inéluctable.
- La décentralisation rencontre des limites qui sont celles des facultés contributives des citoyens
eux-mêmes. Elle souffre aussi de l'absence de bonne pratique de gestion chez les acteurs en charge
de la question locale et régionale.
- La carte administrative pose la question de l'existence de plusieurs niveaux de compétences qui se
superposent : la commune, la province, la région, l'Etat. Toutes les collectivités territoriales ont une
compétence générale et peuvent délibérer sur toutes les questions économiques et sociales de la
collectivité. Les conflits de compétences entre les acteurs locaux constituent une entrave majeure à
la bonne gouvernance locale.
Mise en oeuvre sous la conduite des conseils élus, la coopération décentralisée est à même de baliser
le terrain à un perfectionnement des capacités organisationnelles et productives des collectivités
partenaires et constituer un véritable appui et soutien à la gestion locale".
58
Monsieur Driss ABBADI, professeur à la Faculté des Sciences juridiques économiques et sociales
de Mohammedia 61, souligne quant à lui, que " la centralisation est le produit de l'héritage colonial ;
l'autonomie est une valeur profonde de la sociologie locale marocaine. La déconcentration et la
décentralisation s'inspirent du système administratif français. Elles fonctionnent selon les principes
de subsidiarité et de progressivité".
Selon l'article 41 de la Charte communale, "le Conseil municipal initie toutes actions nécessaires à la
promotion des activités sociales, culturelles et sportives et engage toutes les actions d'assistance, de
soutien et de solidarité et toute oeuvre à caractère humanitaire et caritatif". S'il dispose d'une
compétence générale pour gérer toutes les questions d'intérêt local, notamment en matière de
développement économique et social, finances, fiscalité et gestion des biens communaux, gestion
des services publics locaux et équipements collectifs, urbanisme et aménagement du territoire,
hygiène, salubrité et environnement, équipement et actions socioculturelles, coopération, la loi
communale confère à l'Etat un droit de tutelle sur les communes. Cette tutelle se traduit notamment
par un régime d'approbation préalable des délibérations dans les domaines clés de la gestion locale.
Elle s'exerce sur de nombreux actes des conseils municipaux, notamment tout ce qui concerne les
aspects financiers, les conventions d'association ou de partenariat, les accords de coopération
décentralisée62. Cela tend à freiner l’activité des collectivités locales en matière de coopération
décentralisée.
Pour remédier à cette situation, Mohamed TOZY, professeur de sciences politiques à l’Université
Hassan II de Casablanca, prenant appui sur la situation du Sahara, écrit63 : « le conflit du Sahara
peut être perçu comme une chance pour le Maroc, dans la mesure où il nous somme de rompre avec
61 Driss ABBADI - Revue Administration du Maroc - bulletin scientifique annuel de l'observatoire marocain de l'administration publique – OMAP - n°4 - 2003 62 Royaume du Maroc – Charte communale de 2002 - Articles 68 et suivants 63 Mohamed TOZY – « Mohamed VI, six ans après » Jeune Afrique Intelligent – n° 2325 du 31 juillet au 6 août 2005
59
les conforts du consensus et de l’unanimité et nous invite à élaborer un pacte de citoyenneté qui ne
soit pas prisonnier de l’identité et de l’histoire ». Parlant de la volonté des populations sahraouies
d’exprimer leur citoyenneté, il considère que celle-ci « peut l’être dans le cadre d’une
décentralisation, voire d’une autonomie à la catalane. En ce cas, ce ne sont pas seulement les
Sahraouies qui décideront souverainement de l’avenir de leur territoire, mais aussi les Soussis, les
Ksouriens du Draa et du Tafilalet, les Rifains, les nomades de l’Oriental…. ».
Dans la pratique, il semble que le niveau régional soit privilégié. Les Régions ont été élevées au
rang de collectivité locale en 1996. Le Dahir du 2 avril 1997 concerne leur organisation et le
fonctionnement des conseils régionaux. Dans l’exposé des motifs, il est souligné que la région a
toujours occupé une place de choix dans la pensée et la stratégie royales, visant à doter le Maroc
d’un Etat moderne. « (…) De fait, la région s’avère un cadre approprié et une pièce maîtresse à
même de compléter et de parfaire l’édifice institutionnel du Royaume ».
Parallèlement, le pouvoir des Walis, représentants de l’Etat au niveau des régions a été
renforcé64. En novembre 2001, le Roi a défini pour eux de nouvelles attributions : « Votre mission
procède d'une vision globale où chacun a un rôle à jouer pour que l'initiative individuelle soit le
moteur de la relance de notre croissance”. Ils sont devenus les chefs des centres régionaux
d'investissement (CRI). Au vu de ces nouvelles responsabilités, le rôle économique et le statut des
walis se confirment davantage. Ils ont désormais pour mission de promouvoir les investissements
par le biais d’une simplification effective des procédures administratives. Le quotidien « le Matin du
Sahara » dans son édition du 1er septembre 2005, précise que « S.M. le Roi Mohammed VI a bien
voulu donner ses Hautes instructions pour la nomination de plusieurs walis et gouverneurs au sein
de l'administration centrale et territoriale au Ministère de l'Intérieur. Ces nominations s'inscrivent
64 Extrait du document du PNUD – Programme GOLD Maghreb – Le Wali – p.6 - Annexe 7
60
dans le cadre du renforcement de l'encadrement des wilayas et préfectures du Royaume, en les
dotant de potentialités humaines qualifiées, en concrétisation de la politique de proximité visant à
faire de l'administration territoriale un instrument au service des sujets de Sa Majesté le Roi. (…)
Par la même occasion, et dans le cadre de l'intérêt particulier que le Souverain ne cesse d'accorder à
la promotion de l'administration territoriale, afin qu'elle assume pleinement son rôle
d'encouragement de l'investissement, particulièrement dans la capitale économique du Royaume, Sa
Majesté le Roi a bien voulu nommer Hamid Ben Lafdil, Directeur du Centre régional
d'investissement de la région du Grand Casablanca ».
Des organismes et de nombreux programmes sont mis en place à ce niveau, outre les CRI, citons
notamment les Agences de Développement Social (ADS), les projets engagés avec le PNUD
(programmes GOLD) ou avec le Gouvernement français (projet d’accompagnement du processus de
décentralisation marocain, avec la création de Maisons de l’élu au niveau des 16 Régions).
Tout cela laisse penser que l’on s’engage davantage vers une politique de déconcentration et que, si
la décentralisation devait progresser, cela se ferait sans doute à l’échelle des Régions, mais non à
celui les provinces ou des communes, ces dernières étant peut-être trop éloignées du pouvoir central.
c ) La Municipalité de Figuig, exemple d’une administration encadrée mais
qui, au travers de la coopération décentralisée, fait évoluer les pratiques.
Le Conseil municipal se réunit en séance ordinaire 4 fois par an. Il peut également se réunir en
séances extraordinaires. Les séances sont publiques. Toutefois, peu d’habitants sont généralement
présents. Le Pacha, représentant de l’Etat au niveau de la ville, assiste à toutes les réunions. A priori,
il n’a pas à intervenir dans les débats, sauf pour apporter des éclaircissements sur tel ou tel texte.
Certes, les relations avec le Pacha actuellement en poste à Figuig semblent claires et ouvertes ; mais,
61
au-delà de la personnalité de cet homme, dans un pays qui sort tout juste des « années de plomb »,
on peut s’interroger sur la liberté de parole et d’action des membres du Conseil municipal dans ces
conditions. Se sentent-ils pleinement à l’aise pour intervenir, en présence du représentant de l’Etat et
sachant que ce dernier doit obligatoirement transmettre au Gouverneur des rapports réguliers et
veiller au respect de la législation ?
Au-delà de ces aspects administratifs, la question de l’autonomie de la collectivité est aussi liée à ses
moyens financiers et humains. Les pouvoirs des communes marocaines sont limités par des moyens
financiers faibles, des ressources propres quasiment inexistantes. La Ville de Figuig dispose de
moins de 8 millions de dirhams (moins de 800 000 €). 71, 59 % du budget de la Ville de Figuig
proviennent de dotations d'Etat. Les fonctionnaires municipaux sont peu nombreux (71) et surtout
peu formés. La mise en place d'un programme annuel de formation, qui intervient en parallèle de la
conduite des projets décidés d'un commun accord entre la Ville de Figuig et le Conseil général de la
Seine-Saint-Denis, devrait permettre, progressivement, de remédier à cette situation ; mais les
salaires sont si faibles que les personnes les plus qualifiées pourraient avoir envie de travailler dans
d’autres secteurs professionnels ou de quitter la ville.
Les élus n'ont pas, ou peu, d'expérience. La question de leur formation est donc essentielle. Seuls
deux élus (le Président de la Municipalité et le 1er Vice-président) faisaient partie du Conseil
municipal précédent. Dans le travail au quotidien, il y a souvent une confusion entre le rôle des élus
et celui des fonctionnaires municipaux. Cette situation a naturellement des conséquences sur les
capacités de mise en œuvre du protocole de coopération entre la Ville de Figuig et le Département
de la Seine-Saint-Denis. Certains projets avancent lentement ; d’autres sont reportés à plus tard.
Enfin, il convient de souligner l’existence d’une tutelle a priori sur les actes essentiels de la
62
collectivité, qui freine toute l’activité municipale. Ainsi, tous les dons financiers ou en nature
doivent être soumis à l'accord préalable des autorités de tutelle. Cette situation retarde et complique
bien souvent la conduite des projets de développement, par exemple dans les domaines de la
coopération décentralisée. Dans le cas d’un projet d'assainissement, les délais ont été tellement longs
que le principal bailleur de fonds français a cru que le projet était compromis et a menacé de
reprendre son financement.
Mais la procédure a conduit à s’interroger sur la déconcentration, plus particulièrement sur les rôles
respectifs du Wali et du Ministère de l'Intérieur, et sur l’interprétation pouvant être faite du message
n° 575 du 8 janvier 2003 du Ministre de l’Intérieur, relatif aux pouvoirs d’approbation des
conventions par les walis des Régions65.
Dans le cas présent, il apparaît que le coopération décentralisée pourrait ainsi contribuer à faire
avancer les pratiques en matière de déconcentration. Celle-ci seraient peut-être alors une première
étape vers la décentralisation.
En effet, le projet d’assainissement de quatre quartiers de Figuig a fait l’objet d’une convention
quadripartite entre le Conseil municipal de Figuig, le Conseil général de la Seine-Saint-Denis, le
Syndicat interdépartemental pour l’assainissement de l’agglomération parisienne (SIAAP) et la
Fédération des associations de Figuig en France. Elle prévoit notamment l’attribution d’un
financement de la part du Conseil général et du SIAAP. La Municipalité de Figuig a soumis la
convention à l’approbation du Wali de la Région de l’Oriental, conformément aux directives du
télégramme ministériel.
Quand les fonds ont été versés sur son compte, la Municipalité de Figuig a dû faire une demande
65 Message n° 575 du 8 janvier 2003 du Ministre de l’Intérieur - Annexe 8.
63
d’autorisation spéciale auprès du Ministère de l’Intérieur, plus particulièrement à la division des
finances de la Direction Générale des collectivités locales (D.G.C.L.). Cette demande nécessite
l’obtention d’un visa du Ministère des Finances pour l’ouverture des crédits supplémentaires au
budget de la commune de Figuig. La Ville devait adresser la convention quadripartite et une
attestation du Percepteur de Figuig (dépendant du Ministère des Finances). La D.G.C.L. a demandé
pourquoi la convention avait été signée par le Wali, arguant qu’un tel document, impliquant des
organismes étrangers, devait être approuvé par le Ministère de l’Intérieur et non le Wali. Devant
cette situation qui a posé la question de l’interprétation d’une directive ministérielle, la Municipalité
a suggéré que le visa du Wali pouvait être interprété comme preuve de transmission du dossier au
Ministère de l’Intérieur. Ce dossier a été remis à la division juridique du Ministère, puis transféré à
la division des finances qui a accordé l’autorisation spéciale. La pratique a donc anticipé sur le droit.
Il conviendra de voir comment de tels dossiers seront traités par la suite et si cela fera évoluer la
législation.
§ 2) LA DECENTRALISATION COTE FRANÇAIS
La décentralisation en France est un phénomène beaucoup plus ancien qu'au Maroc et les
collectivités locales disposent d'une marge de manœuvre beaucoup plus grande. Mais là aussi, des
obstacles demeurent.
a) Un processus en perpétuelle évolution
Le terme de décentralisation n’apparaît que dans les années 1830, mais le combat pour les libertés
face au pouvoir central remonte au Moyen Age. La Révolution française fut le déclic qui permis les
révisions administratives. Le territoire est alors divisé en 83 départements (loi du 22 décembre 1789)
et la loi du 14 décembre 1789 établit 44 000 communes. Les lois prévoient les organes
64
administratifs, les compétences et les contrôles exercés par le pouvoir central. Vont ensuite alterner
des périodes de centralisation et de décentralisation des pouvoirs. Les débats vont porter sur les
niveaux de collectivités locales (l’existence des départements est bien souvent remise en cause) sur
le nombre de communes, sur les transferts de compétences et sur les moyens accompagnant ceux-ci.
Citons notamment la loi du 10 août 1871, qui donne la possibilité aux départements de prendre des
décisions sans approbation préalable du préfet qui n’exerce qu’un contrôle a posteriori, la loi du 5
avril 1884, qui concerne l’administration communale et la Constitution du 27 octobre 1946 qui
affirme le principe de la libre administration des collectivités locales et le transfert d’attributions en
faveur du Président du Conseil général, mais ne sera jamais appliquée. Le texte de 1958 ne prévoit
plus le principe de transfert de l’exécutif. La loi du 2 mars 1982 consacre trois changements
importants : la suppression de la tutelle administrative, le transfert de l’exécutif départemental et
régional au profit d’un élu et la transformation de la région en collectivité territoriale.
La loi du 6 février 1992, relative à l’administration territoriale de la République, s’articule autour de
trois grands thèmes : le titre I traite de l’organisation territoriale de l’Etat. Le titre II est consacré à la
démocratie locale, c’est-à-dire à l’information des habitants sur les affaires locales, leur participation
à la vie locale, les droits des élus, le contrôle a posteriori des actes des collectivités locales. Le titre
III porte sur la coopération locale, interrégionale et intercommunale. Cet ensemble de dispositions
relatives à la coopération est assorti de dispositions fiscales et financières. Quant au titre IV, il traite
de la coopération internationale décentralisée66.
La loi du 17 août 2004, relative aux libertés et responsabilités locales, est présentée comme l’acte II
de la décentralisation. La première partie porte sur les transferts de compétences ; la seconde fixe le
66 Loi d’orientation n°92-125 du 6 février 1992 relative à l’administration territoriale de la République (Extraits) – Annexe 9.
65
cadre général. Les Départements, dont la suppression fut au cœur des débats, sortent renforcés67.
Les collectivités locales françaises ne sont soumises qu’au contrôle a posteriori, ce qui leur laisse
une marge de manœuvre plus grande que les collectivités locales marocaines. Même s’il est souvent
considéré comme insuffisant, il existe un statut de l’élu local et le personnel dispose d’outils pour sa
formation. On le voit, la situation est donc fort différente de celle du Maroc.
b) Une méconnaissance du niveau administratif départemental
Pour le Conseil général de la Seine-Saint-Denis, c’est donc davantage son niveau administratif -
entre la Commune et la Région - qui complexifie le travail et rend difficile l’implication de la
population. En effet, dans l’organisation administrative de la France, la Commune demeure pour
tous, le lieu de référence prioritaire. Les Français sont attachés à leur commune et tous les efforts
faits pour en réduire le nombre ont échoué. Seule l’intercommunalité, avec notamment la loi du 12
juillet 1999, semble être acceptée. Même si les compétences des organismes intercommunaux sont
importantes, notons toutefois que l’élection au suffrage universel direct se fait toujours au niveau de
la commune.
Avec plus de 36 000 communes, la France constitue un cas particulier à l’échelon européen. Cette
singularité a conduit périodiquement à une tentative de remise en cause, par le pouvoir central, du
nombre des communes, mais aussi de l’échelon départemental.
Les habitants connaissent leur ville, leur maire, les élus locaux. Chacune des 40 communes du
département a ses spécificités. Mais qui, particulièrement dans une zone urbaine comme la Seine-
Saint-Denis, connaît le Conseil général, ses compétences, le nombre de ses cantons, le nom de son
conseiller général, de celui du Président du Conseil général ?
67 Eugène MINOT , avocat - Département, Conseil général, décentralisation – tome 1 – histoire et perspectives d’avenir » Editions La lettre du cadre – Assemblée des départements de France – octobre 2000.
66
Qui sait par exemple que la plupart des crèches du département, les collèges, l’assainissement sont
de la responsabilité du Département ? Qui sait que les services comptent plus de 5 000 agents ?
Dans ce contexte, il est difficile pour le Conseil général de faire connaître et partager sa politique et
plus particulièrement celle engagée dans le domaine de la coopération décentralisée, d’autant que sa
communication en la matière est quasiment inexistante.
Avec la création en 2001 de « Via le monde », centre ressources ouvert à tous les habitants, mais
aussi un lieu où toute association située dans le département peut trouver un appui pour le montage
d’un projet à l’international, voire même un coup de pouce financier, le Conseil général a tenté de
remédier à cette difficulté. Mais les efforts conduits depuis la création de « Via le monde » ne
permettent pas encore, à ce jour, de faire face à ce problème. La structure est encore peu connue, le
centre ressources faiblement fréquenté.
c) Les limites financières
La décentralisation est aussi limitée par la faiblesse des moyens dont disposent les collectivités
locales. Si la loi prévoit le transfert des moyens financiers en même temps que celui des
compétences, de nombreux exemples témoignent de l’existence d’un grand écart entre les principes
et la réalité. Cette situation est particulièrement complexe pour la Seine-Saint-Denis où réside une
population aux revenus très modestes, souvent exonérée du paiement de l’impôt.
Dans ce contexte où les moyens financiers de la collectivité locale sont en régression, la réalisation
des actions de coopération décentralisée par les services et Directions du Département peut être
menacée. En effet, les actions conduites par le Conseil général sont mises en œuvre par les agents
des différentes directions départementales. Les crédits sont inscrits sur leurs budgets respectifs.
67
Aussi, face aux réductions budgétaires qui interviennent chaque année, les services peuvent avoir
tendance à privilégier leurs actions au niveau local. Dans la pratique, deux problèmes se posent : les
disponibilités en personnel et les capacités budgétaires.
En raison du transfert de compétences, il est souvent nécessaire de faire plus de travail avec le même
nombre de personnel. Comment dans ce cas dégager du temps pour travailler sur un projet
concernant la coopération avec un partenaire étranger ? Certains considèrent ainsi que les réductions
de personnels ne permettant pas de faire autre chose que le travail au niveau local, les actions de
coopération décentralisée seraient un « superflu ». Ce même type de réflexion concerne les aspects
budgétaires. Dans ce contexte, travailler à améliorer l’information des personnels départementaux et
leur implication dans les projets constitue un axe majeur.
Ces idées croisent la notion d’intérêt local qui sera évoquée ultérieurement.
Au-delà de niveaux de décentralisation très différents, c’est aussi une conception différente de la
coopération décentralisée dans leurs pays respectifs, auxquelles les deux collectivités doivent faire
face et qui pourrait complexifier leurs relations.
68
SECTION 2) - DES VISIONS DIFFERENTES DE LA NOTION DE COOPERATION
DECENTRALISEE.
Le terme de coopération décentralisée recouvre des notions différentes d’un pays à l’autre. L’Union
européenne par exemple, utilise la notion de coopération décentralisée dans un sens beaucoup plus
large que celui qui s'est imposé en France. La coopération décentralisée apparaît dans les accords de
Lomé (1989). Elle est redéfinie dans une note d’orientation de la commission européenne68 comme
« une autre façon de faire la coopération, une approche novatrice qui met les acteurs (dans toute leur
diversité) au centre du processus de développement », en relation avec les réformes introduites au
cours des années 80 : ajustement structurel, démocratisation, décentralisation par exemple.
Dans certains cas, la coopération décentralisée sert à désigner un certain nombre d'acteurs, dans
d'autres elle désigne une façon de mener la coopération. Parfois donc, la "coopération décentralisée"
comprend les ONG, les pouvoirs locaux, les associations, les coopératives, les sociétés et
entreprises, les syndicats....; en bref toutes les organisations qui constituent la société civile, à la fois
en Europe et dans les pays partenaires. Ailleurs, on met l'accent sur les procédures et la
participation.
§ 1) LA COOPERATION DECENTRALISEE COTE MAROCAIN ET SA MISE EN ŒUVRE A
FIGUIG.
Bien que le principe de la coopération internationale des collectivités locales n'ait été formellement
inscrit dans la législation en vigueur qu’en 2002 (loi n° 78-00 portant charte communale et la loi n°
79-00 relative à l'organisation des collectivités préfectorales et provinciales), les collectivités locales
ont depuis les années 60, et principalement depuis 1976, développé un large champ de relations
68 Commission européenne – DG développement – Note aux services de la DG DEV et aux délégations dans les pays ACP-ALA-MED et PECO – 23 décembre 1999.
69
internationales que la D.G.C.L. marocaine présente dans ses documents comme de la coopération
décentralisée.
Elle indique donc que ce qu’elle appelle la coopération décentralisée s’est développée sous forme
de :
- jumelages (110 avec des villes et des régions de tous les continents - dont 47 avec l'Europe,
43 avec l'Afrique, 20 avec l'Asie et 10 avec l'Amérique),
- conventions de coopération avec douze collectivités d'Espagne, trois d'Italie, trois du Canada
et une vingtaine de collectivités françaises,69
- adhésion à des associations régionales et internationales des pouvoirs locaux : organisation
des villes arabes (76), Fédération Mondiale des Cités Unies (73), Union internationale des
pouvoirs locaux - IULA (8), Organisation des villes et capitales islamiques (9), Union des
villes africaines (28), Association internationale des Maires et responsables des capitales et
métropoles entièrement ou partiellement francophones - AIMF, Métropolis, Association
internationale des villes nouvelles, Association Messagère de la Paix, Association des Villes
martyres, Association internationale des régions francophones, Organisation des villes
patrimoines du Monde, etc.
a) Coopération interne et coopération internationale
Avec la Charte communale de 2002, la notion de coopération décentralisée apparaît pour la première
fois dans les textes en prenant deux formes :
- la coopération interne, qui concerne les rapports de coopération, d'association ou de
partenariat avec les autres personnes morales de droit public et les autres acteurs économiques
et sociaux privés, notamment pour réaliser une oeuvre commune, pour la gestion d'un service
69 Liste des collectivités françaises ayant des partenariat avec des collectivités marocaines (documents de CUF) – Annexe 10.
70
d'intérêt commun, la réunion de fonds.
- la coopération internationale, qui concerne les rapports et échanges avec les collectivités
locales étrangères et les associations régionales ou internationales des pouvoirs locaux.
La coopération interne s'établit généralement sous forme de conventions de coopération ou de
partenariat, de groupements de communes, de groupements de Préfectures ou de provinces, de
groupements de collectivités, de comités interrégionaux de coopération ou de sociétés d'économie
mixte.
La coopération internationale trouve ses origines dans la pratique du jumelage, inaugurée dans les
années 60 entre les Villes de Fès et de Florence (Italie). Les jumelages, qui se limitaient alors à des
échanges de visites symboliques ou protocolaires, se sont progressivement transformés pour devenir
des instruments de coopération. La coopération internationale des collectivités locales qui peut être
bilatérale ou plurilatérale, s'est orientée depuis vers des actions de développement économique,
social et culturel, de construction d’équipements socio-éducatifs, de formation, de développement
industriel, agricole, etc70.
b) La coopération décentralisée, facteur de développement de la
décentralisation et d'avancées dans la déconcentration du pouvoir au Maroc
L’expérience menée avec la Ville de Figuig, en lien avec un projet d’assainissement et exposée
précédemment, montre que la coopération peut favoriser des avancées tant dans le domaine de la
décentralisation, que de la déconcentration. Toutefois, il faut constater que si les notions de bonne
gouvernance, de société civile, de décentralisation, de déconcentration, sont largement utilisées et
font l’objet d’une multitude de colloques, peu d’écrits ou de débats sont consacrés à la coopération
70 Royaume du Maroc - Extrait du bulletin officiel n° 5058 du 16 ramadan 1423 (21 novembre 2002) Dahir n° 1-02-297 du 25 rejeb 1423 (3 octobre 2002) portant promulgation de la loi n°78-00 portant charte communale – Annexe 4 – op.cité. p53.
71
décentralisée.
Abdelkader DJEFLAT - professeur à l'Université de Lille écrit71 : "La gestion urbaine rencontre des
difficultés énormes que seuls de nouveaux modes de gouvernance peuvent contribuer à atténuer. Par
ailleurs, les moyens limités dont disposent un nombre conséquent de pays en voie de développement
font que le recours à la coopération internationale, et notamment la coopération décentralisée,
constitue une voie appréciable d'accès, aussi bien aux moyens matériels et financiers, qu'à la
connaissance".
Ces freins se retrouvent également dans le cadre des négociations menées entre les Etats français et
marocains, sur la politique de coopération franco marocaine. Ainsi, au niveau des deux Etats, la
mise en place d’un « processus d’accompagnement du processus de décentralisation marocain » a
été décidée en 2002. Ce projet prend la forme d’un fonds de solidarité prioritaire (F.S.P.). Le
document n’a été publié qu’en octobre 200572.
Le document de travail d’avril 2005 cite trois grands chantiers :
- la nécessaire redéfinition des rapports entre les services de l’Etat et les collectivités locales,
- le renforcement des capacités des élus et des personnels des collectivités locales,
- la mise en pratique, par les collectivités locales, autour de projets de développement de leur
territoire, de leur rôle de maître d’ouvrage.
Depuis 2002, de nombreuses réunions de travail ont été organisées pour la mise en place de ce
projet. Les 11 et 12 juillet 2005, s’est tenue à Rabat une réunion consacrée à la préfiguration de la
Maison de l’élu, organisée par l’Ambassade de France, en relation avec le Ministère des Affaires
71 Abdelkader DJEFLAT - "gouvernance et coopération décentralisée : quelles perspectives pour l'économie de la connaissance" - Revue marocaine d'audit et de développement - décembre 2004 - La gouvernance dans tous ses états - Economie de la connaissance, coopération décentralisé et développement local - page 26 72 Programme PAD Maroc – site www.padmaroc.org
72
étrangères français et la Direction générale des Collectivités Locales marocaines. Côté français, y
participaient des représentants de Cités Unies France, de l’association des Régions de France et de
l’Association des Départements de France. Le Conseil général de la Seine-Saint-Denis, à partir de
son expérience dans le domaine de la coopération décentralisée, a été convié à y participer. Ses
partenaires marocains ne l’étaient pas. Plusieurs collectivités locales marocaines étaient présentes,
mais il faut souligner que toute la réunion a été conduite par les représentants du Ministère de
l’Intérieur marocain, particulièrement nombreux durant ces deux jours.
Cette expérience illustre une nouvelle fois la faiblesse de la décentralisation et la confusion
entretenue entre décentralisation et déconcentration.
Pour ce qui concerne la Municipalité de Figuig, elle a très peu écrit sur la coopération décentralisée.
Un article est paru dans le numéro 7 du journal du Service de coopération et d’action culturelle de
l’Ambassade de France à Rabat (janvier 2002), suite à une interview d’un élu de Figuig où elle
déclare : « Véritable coopération de terrain et coopération d’acteurs, elle mobilise toutes les
potentialités locales et instaure une réelle réciprocité de bénéfices, tant pour les institutions et les
populations de Figuig, que pour celles de Seine-Saint-Denis ».
Dans la pratique, sa politique de coopération décentralisée concerne essentiellement les accords avec
deux collectivités françaises : le Conseil général de la Seine-Saint-Denis et la Ville de Stains. Elle
n’a pas encore développé des coopérations au sens large de la loi marocaine. De premiers pas ont été
faits en 2004 et 2005 avec la Province de Figuig et une association italienne.
Cette coopération décentralisée lui permet de répondre à des besoins des habitants, de développer
des projets, des services, de réaliser des équipements, de renforcer les savoir-faire des personnels, de
73
faire connaître sa situation, de se faire reconnaître auprès d’institutions qui jusque là l’ignoraient,
comme en témoignent les relations instaurées avec le Croissant Rouge marocain, depuis le Forum
santé, ou la participation de la Province à certains projets.
§ 2) LA COOPERATION DECENTRALISEE A LA FRANÇAISE ET SA MISE EN ŒUVRE EN
SEINE-SAINT-DENIS.
La vision française de la coopération décentralisée se différencie de celle du Maroc et de celle de
l’Union européenne. Elle ne concerne en effet que les relations entre collectivités territoriales.
a) Une grande liberté selon les textes et dans la pratique.
La coopération décentralisée figure dans les textes officiels en particulier dans la loi n°92-125 du 6
février 1992, mais ni son contenu, ni sa finalité ne sont définis ; seuls les acteurs sont désignés, à
savoir les collectivités territoriales qui peuvent faire appel à d’autres acteurs. La loi précise que la
pleine responsabilité des choix et méthodes d’actions appartient aux collectivités concernées.
Bernard HUSSON du CIEDEL dans un article intitulé « La coopération décentralisée, légitimer un
espace public local au Sud et à l ‘Est » précise que « l’inexistence d’un cadre politique précis ouvre
des marges d’appréciation très larges aux acteurs de la coopération décentralisée pour définir l’objet
de leur action. Selon le contenu qu’ils donnent et les objectifs qu’ils poursuivent, on peut identifier
trois types d’approche de la coopération décentralisée. Pour certains, la coopération décentralisée
(…) ouvre à des rapports de solidarité et à une meilleure connaissance mutuelle entre les hommes.
(…) D’autres agissent plus franchement sur le registre du développement communal. (…) La
troisième dimension dessine un objet particulier pour la coopération décentralisée, celui
74
d’accompagner la transformation de l’organisation administrative et politique des pays»73.
La cadre juridique est assez large. En effet, les collectivité locales peuvent intervenir librement, dans
le champ de leurs compétences, sous réserve du respect des engagements internationaux de la
France et de l’interdiction de contracter directement avec un Etat étranger. La nature juridique de la
convention n’a pas été précisée par le législateur. Cette liberté d’intervention des collectivités
locales est soulignée par Charles Josselin, ancien secrétaire d’Etat à la coopération, dans un article
publié dans la Gazette des Communes 74 « une collectivité locale peut faire, en matière de
coopération décentralisée - et c’est cela qui est magnifique - ce qu’elle veut ».
Près de 3 250 collectivités territoriales françaises sont engagées dans des actions de coopération
décentralisée, dont plus de cinquante ont signé des accords de coopération avec des collectivités
locales marocaines. Villes, Départements ou Régions, elles ont signé avec des collectivités de
niveaux divers. Ainsi, le Conseil général de la Seine-Saint-Denis a pu choisir de signer avec une
Commune marocaine. La circulaire du 26 mai 1994 précise que « la loi ne crée pas d’obligation
pour que la collectivité étrangère soit de même niveau que la collectivité française ».
Une étude réalisée en 2003 par le Département de la Seine-Saint-Denis pour le groupe pays Maroc
de Cités Unies France, montre que les formes d’intervention sont aussi diverses : certaines
collectivités ont choisi d’intervenir directement par le biais de leurs services, d’autres ont recours à
une association comme la Région Champagne Ardenne, avec l’IRCOD, dont les projets concernent
des champs de compétences très variés : aménagement urbain, environnement, développement
économique, santé, culture, sport, jeunesse…
73 Bernard HUSSON – « La coopération décentralisée, légitimer un espace public local au Sud et à l’Est » – CIEDEL – Revues grand public - 2000. 74 Charles Josselin - La Gazette des Communes - n° du 17 novembre 1997.
75
Le contrôle de légalité s’applique sur l’accord de coopération et sur toutes les délibérations prises
pour sa mise en œuvre. Pour ce qui concerne la coopération entre Figuig et la Seine-Saint-Denis,
dans la pratique, cela implique de soumettre à la commission permanente du Conseil général, des
rapports pour toute action ayant une répercussion financière, les délibérations étant ensuite
transmises au contrôle de légalité. Un contrôle est également effectué par le payeur. Ces procédures
ont pour conséquence un accroissement de tous les délais, mais ne mettent pas en cause les choix du
Conseil général.
Depuis la mise en œuvre de sa politique de coopération décentralisée, le Conseil général a transmis
au contrôle de légalité des dizaines de dossiers. Aucun n’a été rejeté.
b) La notion d’intérêt local. Limite à la coopération et garantie de
l’implication des populations.
Dans son rapport 2004, le Délégué pour l’action extérieure des collectivités locales souligne que le
dispositif légal laisse encore quelques questions en suspens et parmi celles-ci, la notion d’intérêt
local.
La notion d'intérêt local borne en effet l'action des collectivités territoriales en France, tant du point
de vue géographique, que du point de vue juridique. Dans un article paru en mars 2003 dans la revue
AJDA (31 mars 2003) sous le titre "Comment s'extraire des contingences de l'intérêt public local",
Arnaud Cabanes et Alexia Robbes, avocats, soulignent que le juge administratif développe une
conception extensive de la notion d’intérêt local. Ils s’appuient sur l’arrêt du Conseil d'Etat -
Commune de Villeneuve d'Ascq, rendu le 28 juillet 1995.
Le Tribunal administratif de Lille avait annulé, en première instance, une délibération de la Ville de
76
Villeneuve d’Ascq relative à l’octroi d’une bourse d’étude à deux étudiants, l’un polonais et l’autre
roumain. En appel, la commune a invoqué l’existence d’un jumelage avec les villes dont étaient
issus les deux étudiants. Le Conseil d’Etat a interprété la notion d’intérêt local de façon nettement
plus large, en précisant que « le Conseil municipal a entendu faciliter l’accueil d’étudiants de haut
niveau, spécialistes de certaines techniques avancées, dans le but d’encourager le développement
ultérieur des projets de coopération associant des instituts de recherche et des entreprises situés aussi
bien sur le territoire de Villeneuve d’Ascq, que sur celui des collectivités dont sont issus les deux
étudiants bénéficiant des dites bourses ». Par contre, les juridictions ont parfois considéré des
interventions comme des prise de partie dans un conflit politique, elles ont alors été interdites.75
Dans la revue de l'Association des Départements de France n° 202 de juin 2002, Jean-Paul
WAUQUIER, responsable des affaires juridiques du Département des Deux-Sèvres, s'appuyant sur
la jurisprudence, précise que "les actions entreprises par une collectivité locale en matière de
coopération avec l'étranger doivent permettre d'en tirer un certain bénéfice en terme de
développement du territoire (économique, culturel, touristique...). (...) La population prise en compte
se limite aux seuls habitants du territoire géographique que couvre la collectivité locale. Ainsi, un
département ne peut soutenir une cause humanitaire sans retombée directe sur la collectivité ou
participer au financement d'opérations nationales n'ayant pas de lien avec la population ou l'histoire
de la collectivité". Il conclut son article en préconisant une clarification législative pour garantir aux
collectivités locales la légitimité de leurs engagements dans la coopération internationale.
Une décision du Tribunal administratif de Poitiers en 200476 ouvre à nouveau le débat et confirme
l’importance d’avoir une définition claire de la notion. En effet, un recours déposé par un ancien
conseiller Front national du Conseil régional Poitou Charente, et concernant une délibération du
75 Jurisprudence du Conseil d’Etat - Commune de Pierrefitte – 23 octobre 1989 76 Tribunal Administratif – 18 novembre 2004 – Jean Romée Charbonneau c/ Département des Deux-Sèvres
77
Conseil général des Deux-Sèvres relative à des opérations au Burkina Faso et à Madagascar, a
abouti à l’annulation de la délibération par le Tribunal Administratif77. Ce qui peut être considéré
comme un revirement de jurisprudence montre que le débat n’est pas encore tranché. Comment faut-
il interpréter la notion d’intérêt local ? De façon plus ou moins restrictive ? Faut-il que l’action ait
des retombées directes ?
Dans son analyse de la décision du Tribunal administratif, Yves Gounin, Maître de requêtes au
Conseil d’Etat78 , considère que « quelle que soit la définition que la jurisprudence donnera de
l’intérêt local et de son exigence plus ou moins grande de retombées directes pour les populations
locales, une insécurité juridique prévaut aujourd’hui. Les collectivités locales qui veulent engager
une action de coopération ne peuvent aujourd’hui être rassurées sur la légalité de leurs
interventions ».
Dans un second article, Yves GOUNIN évoque deux hypothèses :
- La confirmation en appel du jugement Charbonneau ce qui ferait jurisprudence, et mettrait
alors en péril nombre d’actions de coopération décentralisée.
- Une lecture différente qui permettrait de limiter le risque juridique, en considérant que
l’intérêt local est présumé puisque la collectivité locale intervient dans le champs de ses
compétences d’attribution et non au titre de la clause générale de compétence.
Il précise : « Il importerait peu que l’action de coopération décentralisée, effectuée dans le cadre
d’une convention, présente un intérêt pour la population locale en France, dès lors qu’elle entre dans
le champs des compétences spécifiques de la collectivité territoriale. Cette présomption résulterait
de l’intention du législateur qui en 1992 aurait entendu autoriser largement les actions de
77 Tribunal Administratif – Poitiers 18 novembre 2004 – Charbonneau – AJDA - mars 2005 – p.486.
78 Yves GOUNIN – « La Corrèze ou le Zambèze - AJDA – 7 mars 2005 – actualité jurisprudentielle – p.486.
78
coopération décentralisée »79.
Ainsi, les collectivités locales seraient protégées, sous réserve d’avoir signé une convention.
Il faut toutefois souligner que rien n’est encore décidé à ce jour. Une étude a été demandée par le
Premier ministre au Conseil d’Etat, le 7 septembre 2004. Le Délégué à l’action extérieure des
collectivités locales, en proposant de réfléchir à une adaptation du droit pour lever toute incertitude
juridique concernant l’intervention des collectivités locales dans le domaine humanitaire, a ouvert
une porte qui pourrait aussi bénéficier à la coopération décentralisée.
Une proposition de loi a été déposée au Sénat, visant à sécuriser les actions en cours, tout en posant
des bornes aux interventions des collectivités locales à l’étranger.
Une large implication des populations dans les actions conduites au titre de la coopération pourrait
sans doute permettre de se protéger contre une interprétation restrictive de la notion d’intérêt local.
79 Yves GOUNIN « Le cadre juridique de l’action extérieure des collectivités locales » - AJDA – 19 septembre 2005 - pp. 1713-1717.
79
CONCLUSION
En dépit des lourdeurs administratives, de la faiblesse des moyens financiers et des incertitudes
juridiques, le travail conduit depuis 2000 entre le Conseil général de la Seine-Saint-Denis et la Ville
de Figuig a permis des avancées dans le domaine de la participation des habitants, plus
particulièrement par le biais des associations. Il témoigne aussi de l’importance de la coopération
décentralisée pour favoriser la décentralisation et la démocratie participative.
Certes, la coopération franco-marocaine tant bilatérale que décentralisée est l’une des plus
importante mais les moyens mis en œuvre ne sont pas à la hauteur des ambitions annoncées. Ainsi,
dans leurs déclarations, les autorités françaises et marocaines accordent une large place à la
coopération décentralisée. La 7ème rencontre franco marocaine des chefs de Gouvernements, qui
s’est déroulée les 26 et 27 septembre à Rabat, avait pour ordre du jour « la coopération décentralisée
et l’Initiative Nationale pour le Développement Humain (INDH) », programme initié par S.M. le
Roi du Maroc. Mais le résultat d’une telle rencontre est décevant puisqu’il ne fait que confirmer un
programme attendu par les collectivités locales depuis plus de deux ans.
Parallèlement, les résultats du partenariat euro-méditerranéen issu le la Déclaration de Barcelone de
1995 s’avèrent aussi décevants. Dix ans après, le bilan est insignifiant. Les programmes MEDA
n’ont pas répondu aux attentes. Les collectivités locales en ont été presque totalement exclues.
On peut toutefois espérer que la nouvel instrument qu’est la politique européenne de voisinage
ouvre des perspectives plus favorables. Mais avec l’élargissement de l’Europe à 25, il semble que
les efforts portent prioritairement sur les nouveaux pays entrant au détriment du partenariat euro-
méditerranéen.
80
Les limites des politiques menées au niveau national ou international conduisent souvent à se
tourner vers le local.
La coopération décentralisation pourrait ouvrir la voie à une participation accrue des populations
dans tout ce qui concerne la gestion locale, à des progrès en matière de développement. Mais restent
posées les questions de moyens qui lui sont alloués, de la crédibilité qui lui est accordée, de la
formation des acteurs locaux, élus et militants associatifs et surtout du niveau de décentralisation.
81
ANNEXES
1) Protocole de coopération signé entre la Ville de Figuig et le Conseil général de la Seine-
Saint-Denis – 8 Juin 2000.
2) Questionnaire établi en avril 2005 pour réaliser les entretiens à Figuig.
3) Document du PNUD – Programme GOLD Maghreb – Structure administrative décentralisée
au Maroc.
4) Royaume du Maroc – Extrait de la Charte communale du 3 octobre 2002 – Article 42 :
« coopération et partenariat ».
5) Document du PNUD – Programme GOLD Maghreb – Structure administrative communale.
6) Protocole de coopération signé entre les Villes de Figuig et de Stains – 18 octobre 2002.
7) Document du PNUD – Programme GOLG Maghreb – Le Wali
8) Message n° 575 du 8 janvier 2003 du Ministre de l’Intérieur marocain, transmis par le Pacha
au Président de la Commune urbaine de Figuig, le 13 janvier 2003.
9) Loi d’orientation n°92-125 du 6 février 1992 relative à l’administration territoriale de la
République – Titre IV « de la coopération décentralisée ».
10) Liste des collectivités locales françaises ayant signé des accords de coopération avec des
collectivités locales marocaines.
11) Carte du Maroc.
82
ANNEXE 1 REPUBLIQUE FRANÇAISE ROYAUME DU MAROC
Protocole de coopération décentralisée
entre, le
LE DEPARTEMENT DE LA SEINE-SAINT-DENIS, Domicilié : 124, rue Carnot – B.P. 193 – 93003 Bobigny cedex - France Représenté par le Président du Conseil général, Monsieur Robert Clément, Agissant en vertu d’une délibération de la Commission permanente du 30 mai 2000.
d’une part, et LA VILLE DE FIGUIG, Domiciliée : Cité administrative – B.P 121 - 61000 Figuig - Maroc Représentée par le Président du Conseil municipal, Monsieur Mostafa LALI, Agissant en vertu de l’article 39, titre deuxième, du dahir portant loi n° : 1.76.583. du 30 septembre 1976 Et en vertu de la délibération du Conseil municipal dans sa session extraordinaire du 19 mai 2000.
d’autre part, ci-après dénommés « partenaires »,
Vu les articles L 1112-1 à L 1112-7 du Code général des Collectivités territoriales françaises, relatifs à la coopération décentralisée ;
Vu le dahir portant loi n° 1.76.583 du 30 septembre 1976 relatif à l'organisation Communale ;
CONSIDERANT leur attachement au développement d’une Culture de la Paix ;
CONSIDERANT la nécessité d’un meilleur partage des connaissances, des savoir-faire et des richesses pour que les femmes et les hommes de toutes les cultures s’épanouissent où qu’ils vivent ;
CONSIDERANT la coopération décentralisée, - entendue au sens de l’action internationale des collectivités locales -, comme un mode de coopération propice à un développement local participatif ;
CONSIDERANT la volonté exprimée de promouvoir entre le Département de la Seine-Saint-Denis et la Ville de Figuig, des liens d’amitié et de coopération avec et au bénéfice des populations de leurs territoires ;
83
CONSIDERANT la volonté des deux parties de mener conjointement des actions dans le cadre d’un partenariat durable et mutuellement avantageux ;
CONSIDERANT les accords internationaux, en particulier ceux liant la France au Maroc ;
CONSIDERANT les compétences dévolues aux collectivités locales signataires ;
SONT CONVENUS DE CE QUI SUIT :
ARTICLE PREMIER - OBJET
1. Les partenaires décident d’engager, ensemble, une coopération, durable, fondée sur les intérêts mutuels de leurs populations et dans les domaines qui relèvent de leurs compétences.
2. Ce protocole de coopération a pour objet de définir le cadre de la coopération entre les partenaires, dans tous les domaines qui les intéressent mutuellement et dont ils conviendront ensemble.
ARTICLE 2- FORMES DE LA COOPERATION
Cette coopération prendra toutes les formes induites par les projets conclus d’un commun accord. Une programmation annuelle des actions sera établie et validée par les partenaires. Ces programmes d’action constitueront des annexes au présent protocole.
Dans ses formes, la coopération entre les deux collectivités locales partenaires pourra notamment se traduire par :
• des rencontres entre les populations ;
• des échanges d’expériences ;
• l’accueil de stagiaires dans les services de l’administration de part et d’autre ;
• la définition, la réalisation de projets et la recherche des financements nécessaires à leur conduite.
Pour la définition et la mise en œuvre des objectifs assignés aux projets de coopération, chaque collectivité pourra associer les partenaires de son choix.
ARTICLE 3- PRIORITES DE LA COOPERATION
D’une manière générale, les partenaires souhaitent que leur coopération permette de renforcer la participation et le bien-être des citoyens. Pour ce faire, ils entendent :
• développer des liens entre le territoire de Figuig et le territoire de la Seine-Saint-Denis ;
• entretenir ces liens dans la durée et avec un esprit de réciprocité ;
• mettre en œuvre des projets avec l’appui des services techniques, des associations, des entreprises et de l’ensemble des acteurs des deux collectivités locales.
84
Plus particulièrement, les programmes de coopération pourraient concerner les domaines suivants :
1. Participation et citoyenneté
Formation et action de soutien de la vie associative et de la participation des citoyens aux décisions ;
•
•
• •
•
• • •
• • • • •
Education et formation en particulier des jeunes, des femmes et des populations défavorisées ; Accès à l’emploi en particulier pour les jeunes et les femmes ; Développement de l’accès aux nouvelles technologies de l’information et de la communication ; Echanges culturels et de loisirs.
2. Santé et prévention
Renforcer l’information des populations sur les Droits fondamentaux ; Sensibilisation des populations aux problèmes de santé ; Echanges entre professionnels en matière de santé.
3. Environnement, urbanisme et développement local
Gestion de l’eau, spécialement l’exploitation et la gestion des infrastructures de distribution. Lutte contre la désertification dans la Province de Figuig ; Accompagnement du développement de l’agriculture dans la Province de Figuig ; Coopération en matière d’assainissement ; Identification de projets d’infrastructures et d’équipements culturels, sanitaires, touristiques et de projets de nature à favoriser le développement local, notamment au plan économique.
ARTICLE 4- DEFINITION DES PROJETS - METHODE DE TRAVAIL - EVALUATION
Pour chacun des domaines choisis, des projets précis seront définis d’un commun accord.
Ces projets devront s’inscrire dans une perspective de développement à long terme, tout en précisant les actions à court et moyen termes.
Ils seront actualisés en fonction de leur état d’avancement et de l’évolution du contexte.
Une évaluation de chaque projet devra être conduite suivant des formes à définir en commun.
ARTICLE 5- MISE EN OEUVRE ET SUIVI DES PROJETS
Chaque projet défini en commun devra faire l’objet d’une convention particulière précisant :
- la nature et les objectifs du projet ;
- les étapes et les moyens de sa mise en œuvre.
Un rapport faisant état de l’avancement des différents projets devra être établi régulièrement par le maître d’ouvrage du projet. Ce rapport devra être communiqué aux partenaires. Il constituera un des
85
éléments de base de l’évaluation.
ARTICLE 6 - ENTREE EN VIGUEUR ET DUREE
Le présent protocole de coopération décentralisée prendra effet à sa ratification par les organes compétents de chacune des collectivités partenaires et après les formalités prévues par les articles L 3131-1 et L 3131-2 du Code général des Collectivités territoriales françaises, pour ce qui concerne le Département de la Seine-Saint-Denis, et l’article 31, chapitre IV, titre premier, du dahir portant loi, relatif à l’organisation communale, pour ce qui concerne la Municipalité de Figuig.
Il restera valable pendant cinq ans et sera prorogé, ensuite, chaque année, par tacite reconduction.
ARTICLE 7- RESILIATION
Le présent protocole pourra être résilié à la demande expresse et motivée de l’un des partenaires.
La résiliation est effective après un délai de préavis de six mois.
Fait à Bobigny, le 8 juin 2000, en deux exemplaires originaux en langues française et arabe. Pour le Département de la Seine-Saint-Denis Le Président du Conseil général
Pour la Ville de Figuig Le Président du Conseil municipal
86
ANNEXE 2
QUESTIONNAIRE ETABLI EN VUE DES RENCONTRES AVEC DES MEMBRES DE LA JEMAA, DES ASSOCIATIONS ET DES CONSEILLERS MUNICIPAUX
DES KSOUR KSAR HAMMAM FOUKHANI ET LOUDAGHIR. - Connaissez-vous l'existence d'un accord de coopération entre la Municipalité et le Conseil général de la Seine-Saint-Denis ? Si oui, la nature des projets engagés ? - Avez-vous été consulté sur l'un des projets ? qui ? la Jemâa ? les associations ? le conseiller du quartier ? sous quelle forme ? - A votre avis, est-ce que la mise en oeuvre de cette coopération décentralisée favorise la participation de la population aux choix qui la concerne ? - Que proposeriez-vous pour améliorer l'information et la consultation sur les projets conduits. - Pensez-vous que la coopération décentralisée contribue ou non à renforcer le rôle du Conseil municipal ? Si oui, cela se fait-il au détriment de la Jemâa ? des associations ? du pouvoir central ? - La décentralisation engagée au Maroc a t'elle des conséquences sur le rôle de la Jemâa ? sur celui des associations ? - Quelles sont les compétences de la Jemâa ? - Quelles sont les associations qui existent dans le quartier ? Quelles sont leurs compétences ? - Quelles sont les compétences du conseiller municipal ? - Comment sont désignés les membres de la Jemâa ? - Qui a proposé le candidat pour les élections municipales ? la Jemâa a t'elle été consultée ? - Quand le Conseil municipal doit prendre une décision, la Jemâa est-elle consultée ? Si oui, comment cela se passe t'il ? - Les associations sont-elles consultées ? Si oui, sous quelle forme ? - Est-ce le conseiller du quartier qui se charge de la consultation ou le président de la municipalité ou le vice président en charge d'un dossier ? - La Jemâa rencontre t'elle les associations du quartier ? Sollicite t'elle leur avis ? - Quand une association veut mettre en oeuvre un projet comment cela se passe t'il ? avec la Jemâa ? avec le Conseil municipal ? - Quelle place des femmes dans le quartier, dans les projets?
87
ANNEXE 3
88
ANNEXE 4
89
ANNEXE 5
90
ANNEXE 6
PROTOCOLE D’ACCORD
DE COOPERATION
Entre d’une part,
LA COMMUNE DE FIGUIG ROYAUME DU MAROC
et d’autre part,
LA COMMUNE DE STAINS (SEINE SAINT-DENIS) REPUBLIQUE FRANCAISE
Nous, Monsieur Mostafa LALI, Maire de la Commune de FIGUIG, Et Monsieur BEAUMALE Michel, Maire de la Commune de STAINS (Seine Saint-Denis) Considérant la loi 92125 du 06 Février 1992 donnant compétence aux collectivités territoriales Françaises en matière de coopération décentralisée. Considérant le dahir portant loi n° 583-76-1 du 5 Choual 1396 (30 septembre 1976) relatif à l’organisation communale tel qu’il a été modifié et complété . Considérant les relations étroites qui lient dans divers domaines le Royaume du Maroc et la République française, Considérant l’importante communauté Figuigui vivant à STAINS, organisée en associations, lesquelles sont disposées à soutenir une action de coopération entre les deux collectivités, Considérant l’évaluation de la situation sanitaire, économique, sociale, culturelle et environnementale faite au cours du séjour officiel de la Délégation Stanoise au Maroc en novembre 2001, Considérant le courage et le dynamisme de FIGUIG et de ses nombreuses associations en lutte permanente pour maîtriser une nature hostile, et disposées à s’impliquer dans les actions de partenariat découlant de la présente convention, Considérant la Déclaration commune du Maire de FIGUIG (Maroc) et du Maire de STAINS (Seine Saint Denis – France), signée le 15 novembre 2001 à FIGUIG, et la volonté partagée des deux Maires d’établir des rapports de coopération entre leurs deux collectivités,
Convenons des dispositions suivantes : ARTICLE 1 : La Commune de FIGUIG et la Commune de STAINS (SEINE SAINT-DENIS) établissent entre elles des rapports de coopération mutuellement avantageuses qui seront
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développées en complémentarité des actions déjà engagées avec le département de Seine Saint-Denis ou d’autres collectivités . ARTICLE 2 : Elles s’engagent à poursuivre des actions d’information, de formation et de sensibilisation de leur population, en vue d’une meilleure connaissance de leurs réalités respectives. ARTICLE 3 : Ces missions d’information, de formation et de sensibilisation se feront à travers l’accueil réciproque de délégations, l’utilisation d’internet, ou tout autres moyens de communications modernes et l’organisation de manifestations susceptibles de valoriser leurs richesses réciproques. ARTICLE 4 : Les domaines de coopération ci-après ont été retenus : - échanges culturels, sportifs, économiques. - accueil de stagiaires, - tourisme social et culturel pouvant favoriser l’économie locale, notamment par la valorisation du patrimoine et des ressources de Figuig ARTICLE 5 : La mise en œuvre du présent accord pourrait s’ouvrir à des domaines autres que ceux ci-dessus spécifiés, et s’inscrire dans un véritable réseau de villes engagées dans la coopération décentralisée à travers le monde, en préfiguration d’une autre conception de la mondialisation fondée sur l’amitié, le respect mutuel, l’échange, la coopération pacifique et le co-développement. ARTICLE 6 : Chaque action de coopération fera en temps opportun l’objet d’une convention spécifique, précisant la nature et les objectifs du projet ainsi que les étapes et les moyens de sa mise en œuvre. La Commune de STAINS apportera l’appui nécessaire à sa réalisation. ARTICLE 7 : Elle entreprendra à cet effet des démarches appropriées auprès de l’Union Européenne, du Gouvernement Français, de l’agence française de développement, des éventuels partenaires économiques et des bailleurs de fonds, pour obtenir des co-financements adéquats. ARTICLE 8 : Le présent accord de coopération sera soumis pour délibération aux conseils municipaux des deux communes et son exécution se fera dans le strict respect des lois et règlements en vigueur dans les deux pays. ARTICLE 9 : Le présent accord restera valable pendant dix ans et sera prorogé , ensuite , chaque année par tacite de reconduction . ARTICLE 10 : Le présent accord de coopération pourra être résilié à la demande expresse et motivée de l’un des partenaires. La résiliation est effective après un délai de préavis de six mois. Fait à Stains, le 19 Octobre 2002.
Ont signé
POUR LA COMMUNE POUR LA COMMUNE DE STAINS DE FIGUIG LE MAIRE LE MAIRE
Michel BEAUMALE Mostafa LALI
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ANNEXE 7
93
ANNEXE 8
94
ANNEXE 9
95
96
ANNEXE 10
Coopérations franco marocaines (classement par Régions françaises)
Collectivités Françaises Collectivités Marocaines Ville de Strasbourg (67) Ville de Fès Conseil régional Aquitaine
CU de Bordeaux et Ville
Région Souss Massa Dra - CU de Casablanca et Ville d'El Jadida
Communauté urbaine de Casablanca Conseil général de l'Allier (03) Association Pays d'Allier Ville de Clermont Ferrand (63)
Communauté urbaine de Tétouan Tiflet - Maamora Ville de Marrakech
Ville de Cherbourg (50) Conseil Régional Champagne Ardenne Région de l'Oriental Conseil Régional Corse Région de Marrakech Conseil régional Franche Comté Ville de Belfort (90) SYDOM Lons le Saunier (39)
Région de Ouarzazate Ville de Mohammedia Communautés urbaines de Kénitra et de Tanger
Conseil Régional Ile de France Ville de Suresnes (92) SEM de Nanterre (92)
Conseil général de Seine-Saint-Denis (93) Ville de Saint Denis (93) Ville de Stains (93) Ville de Bondy (93) Ville de Mantes la Jolie (78) Ville de Saint Germain en Laye (78)
Marrakech Médina Commune d'Essaouira - Région Souss - Massa -
Dra Ville de Figuig Ville d'Agadir Ville de Figuig Ville de Berkane Ville de Rabat Agdal Riyad Ville de Temara
Conseil général de l'Hérault (34) Ville de Sète (34) Ville de Montpellier (34)
Ministère des affaires sociales - Agadir Ville d'El Jadida Ville de Fès
Conseil régional Lorraine Ville de Maxéville (54) Grand Nancy (54)
Province de Sefrou - Immouzer du Kandar Commune urbaine de Marrakech
Conseil régional Midi Pyrénées Région de Marrakech Ville de Roubaix (59) Conseil régional PACA Conseil général Bouches du Rhône (13) Ville d'Aix en Provence (13) Ville de Marseille (13)
Région de Tanger - Tétouan Mohammedia - Rabat Ville d'Oujda Villes de Rabat - Casablanca - Meknes - Agadir
Conseil général Loire Atlantique (44) Ville de Nantes ( 44) Conseil général de Vendée (85
Province d'Agadir Agadir Rabat
Ville de Poitiers ( 86) Ville de La Rochelle ( 17)
Ville d'Azrou Ville d'Essaouira
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Conseil régional Rhône Alpes Conseil général de l'Isère (38) Ville de Meylan (38) Romans (26) CU de Lyon (59)
Région Rabat - Salé Ville de Magdaz Ville de Taroudant Villes d'Agadir et de Rabat
98
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BIBLIOGRAPHIE OUVRAGES Bernard CUBERTAFOND - La vie politique au Maroc – Paris - Editions Lharmattan – 2001 Isabelle EBERHARD– Sud Oranais – Editions Joëlle Losfeld – Paris – 2003 - Les éditions du centenaire – 280 p – ouvrage réalisé par Marie-Odile Delacour et Jean René Huleux Madeleine LEVEAU FERNANDEZ et Denis FERNANDEZ RECATALA - Seine-Saint-Denis – le guide. Paris - Edition l’Archipel – 1998. Fatema MERNISSI – ONG rurales du Haut Atlas – Les Aït Débrouille – Rabat - Editions Le Fennec – 1998 – 136 p Eugène MINOT - Département, Conseil général, décentralisation – tome 1 – histoire et perspectives d’avenir » Editions La lettre du cadre – Assemblée des départements de France – octobre 2000. Marcel ROSETTE – La gestion communale dans l’action – Paris - Editions sociales – 1977 – 333 pages. Pierre VERMEREN – Le Maroc en transition – Paris - Editions La Découverte – 2002 - 262 pages. Gérard WINTER – L’impatience des pauvres – Paris - Presses Universitaires de France – 2002 – 294 pages. Ministère des Affaires étrangères - Guide de la coopération décentralisée – Paris - La Documentation française – 2000 ARTICLES Driss ABBADI – Tendances nouvelles en matière de gouvernance locale - La nouvelle gouvernance au Maroc – Bulletin scientifique annuel de l’observatoire de l’administration publique – n° 4 – 2003. Mohamed ASSOUALI - Du gouvernement à la gouvernance : les leçons marocaines - actes du colloque national organisé par l'Université Abdel Saâdi, faculté des sciences juridiques, économiques et sociales - 21 et 22 mars 2003 - Tanger - Revue marocaine d'audit et de développement - n°5 - 2004 - La gouvernance locale, instrument de renforcement de la décentralisation et de la démocratie. Maurice BAUDOUX - "La gouvernance dans tous ses états. Economie de la connaissance, coopération décentralisée et développement local" Revue marocaine d'audit et de développement - décembre 2004 –
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TABLE DES MATIERES
Remerciements Page 2
Synthèse et mots clés (en français et anglais) Pages 3 et 4
Plan sommaire Page 5
Introduction Pages 6 à 12
Chapitre 1) LES AVANCEES DANS L'IMPLICATION DES POPULATIONS Page 13
Section 1) - Des traditions différentes en terme d’implication des populations Page 14
§1) Figuig, une oasis qui perpétue la tradition tout en l’adaptant aux réalités
nouvelles.
Page 14
a) De la jemâa, centre du pouvoir Page 15
b) A la recherche d’un équilibre jemâa, Conseil municipal et associations Page 18
c) Des partenariats qui s’entrechoquent Page 26
d) Une place originale pour les originaires de Figuig Page 27
§ 2) De la délégation de pouvoir à la démocratie participative en construction à
l’échelle du Département de la Seine-Saint-Denis.
Page 30
a) Une absence de tradition d'implication des populations ou la délégation
de pouvoir
Page 30
b) Des efforts au niveau du Conseil général pour une plus grande
participation de la population séquano - dionysienne
Page 32
Section 2) - La coopération décentralisée, facteur de participation de la
population : réalité ou vœu pieux ?
Page 35
§ 1) Des projets conduits avec des associations locales à Figuig Page 36
104
a) Des actions réussies : l’exemple du Forum santé Page 38
b) Les limites de l’action associative : Page 40
§ 2) Une implication de partenaires côtés français réelle mais encore limitée au
seul niveau institutionnel.
Page 42
a) Des intervenants multiples et de plus en plus structurés : Page 42
b) Une faible implication des associations parmi lesquelles celles qui
regroupent les originaires de Figuig.
Page 44
§ 3) Une politique de communication insuffisante, ici et là-bas. Page 46
CHAPITRE 2) DES LIMITES IMPOSEES PAR DES REGLES JURIDIQUES
ET DES VISIONS DIFFERENTES DE LA COOPERATION
DECENTRALISEE
Page 49
Section 1) - Des niveaux différents de décentralisation Page 50
§1) L’autonomie des collectivités locales marocaines Page 50
a) Un phénomène nouveau Page 51
b) Une autonomie encadrée par la loi et limitée dans la pratique Page 56
c) La Municipalité de Figuig, exemple d’une administration encadrée mais
qui, au travers de la coopération décentralisée, fait évoluer les pratiques,
Page 61
§ 2) La décentralisation côté français Page 64
a) Un processus en perpétuelle évolution Page 64
b) Une méconnaissance du niveau administratif départemental Page 66
c) Les limites financières Page 67
Section 2) -. Des visions différentes de la notion de coopération décentralisée Page 69
§ 1) La coopération décentralisée côté marocain et sa mise en œuvre à Figuig Page 69
105
a) Coopération interne et coopération internationale Page 70
b) La coopération décentralisée, facteur de développement de la
décentralisation et d'avancée dans la déconcentration du pouvoir au Maroc
Page 71
§ 2) La coopération décentralisée à la française et sa mise en œuvre en Seine-
Saint-Denis
Page 74
a) Une grande liberté selon les textes et dans la pratique. Page 74
b) La notion d’intérêt local. Limite à la coopération et garantie de
l’implication des populations.
Page 76
Conclusion Page 80
Annexes Pages 82 à 99
Bibliographie Pages 100 à
103
Table des matières Pages 104 à
106
106