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Revue de chirurgie orthopédique et traumatologique (2010) 96, 985—989 MÉMOIRE ORIGINAL Thrombose veineuse profonde associée à une ostéomyélite aiguë hématogène chez l’enfant Deep venous thrombosis associated with acute hematogenous osteomyelitis in children S. Bouchoucha a,, F. Benghachame a , M. Trifa b , W. Saied a , W. Douira c , M.N. Nessib a , M. Ben Ghachem a a Service d’orthopédie pédiatrique, hôpital d’Enfants de Tunis, Bab Saadoun, 1007 Tunis Jabbari, Tunisie b Service d’anesthésie réanimation, hôpital d’Enfants de Tunis, Tunis, Tunisie c Service de radiologie, hôpital d’Enfants de Tunis, Bab Saadoun, 1007 Tunis Jabbari, Tunisie Acceptation définitive le : 18 mai 2010 MOTS CLÉS Enfants ; Osteomyelite ; Thrombose veineuse Résumé Introduction. — Les thromboses veineuses de l’enfant sont très rares. Elles peuvent compliquer des ostéomyélites aiguës (OMA) hématogènes. Hypothèse. — Le but de ce travail était d’évaluer la place des thromboses veineuses pro- fondes (TVP) compliquant les OMA communautaires et d’en préciser les caractéristiques en les comparant aux OMA sans TVP. Matériel et méthodes. — Il s’agit d’une étude prospective menée entre avril 2007 et décembre 2009. Seules les OMA hématogènes communautaires ont été retenues. Résultats. — L’étude a inclus 70 enfants. L’âge moyen des patients était de 7,7 ans. Sept patients avaient une TVP. Il s’agissait dans tous les cas d’infection à staphylocoque aureus (SA). Le SA résistant à la méthicilline était significativement plus souvent responsable d’OMA compliquée de TVP que le SA sensible à la méthicilline. La C-réactive protéine (CRP), la vitesse de sédimen- tation (VS), la positivité des hémocultures et le nombre de staphylococcie pleuropulmonaire étaient significativement plus important en cas de TVP. Le délai d’apyrexie était également significativement plus long. Un patient est décédé dans un tableau de détresse respiratoire aiguë. DOI de l’article original : 10.1016/j.otsr.2010.05.006. Ne pas utiliser, pour citation, la référence franc ¸aise de cet article, mais celle de l’article original paru dans Orthopaedics & Traumatology: Surgery & Research, en utilisant le DOI ci-dessus. Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (S. Bouchoucha). 1877-0517/$ – see front matter © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.rcot.2010.07.024

Thrombose veineuse profonde associée à une ostéomyélite aiguë hématogène chez l’enfant

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Page 1: Thrombose veineuse profonde associée à une ostéomyélite aiguë hématogène chez l’enfant

Revue de chirurgie orthopédique et traumatologique (2010) 96, 985—989

MÉMOIRE ORIGINAL

Thrombose veineuse profonde associée à uneostéomyélite aiguë hématogène chez l’enfant�

Deep venous thrombosis associated with acute hematogenousosteomyelitis in children

S. Bouchouchaa,∗, F. Benghachamea, M. Trifab, W. Saieda,W. Douirac, M.N. Nessiba, M. Ben Ghachema

a Service d’orthopédie pédiatrique, hôpital d’Enfants de Tunis, Bab Saadoun, 1007 Tunis Jabbari, Tunisieb Service d’anesthésie réanimation, hôpital d’Enfants de Tunis, Tunis, Tunisiec Service de radiologie, hôpital d’Enfants de Tunis, Bab Saadoun, 1007 Tunis Jabbari, Tunisie

Acceptation définitive le : 18 mai 2010

MOTS CLÉSEnfants ;Osteomyelite ;Thrombose veineuse

RésuméIntroduction. — Les thromboses veineuses de l’enfant sont très rares. Elles peuvent compliquerdes ostéomyélites aiguës (OMA) hématogènes.Hypothèse. — Le but de ce travail était d’évaluer la place des thromboses veineuses pro-fondes (TVP) compliquant les OMA communautaires et d’en préciser les caractéristiques en lescomparant aux OMA sans TVP.Matériel et méthodes. — Il s’agit d’une étude prospective menée entre avril 2007 etdécembre 2009. Seules les OMA hématogènes communautaires ont été retenues.Résultats. — L’étude a inclus 70 enfants. L’âge moyen des patients était de 7,7 ans. Sept patientsavaient une TVP. Il s’agissait dans tous les cas d’infection à staphylocoque aureus (SA). Le SArésistant à la méthicilline était significativement plus souvent responsable d’OMA compliquée

de TVP que le SA sensible à la méthicilline. La C-réactive protéine (CRP), la vitesse de sédimen-tation (VS), la positivité des hémocultures et le nombre de staphylococcie pleuropulmonaireétaient significativement plus important en cas de TVP. Le délai d’apyrexie était égalementsignificativement plus long. Un patient est décédé dans un tableau de détresse respiratoireaiguë.

DOI de l’article original : 10.1016/j.otsr.2010.05.006.� Ne pas utiliser, pour citation, la référence francaise de cet article, mais celle de l’article original paru dans

Orthopaedics & Traumatology: Surgery & Research, en utilisant le DOI ci-dessus.∗ Auteur correspondant.

Adresse e-mail : [email protected] (S. Bouchoucha).

1877-0517/$ – see front matter © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.doi:10.1016/j.rcot.2010.07.024

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986 S. Bouchoucha et al.

Discussion. — Les OMA compliquées de TVP ont été observées chez 10 % de nos patients. Ellesréalisent en général des formes plus graves avec un début bruyant et des signes locaux mar-qués. La chirurgie est souvent nécessaire pour drainer un abcès sous périosté. L’existenced’une TVP constitue un facteur d’essaimage bactérien par l’intermédiaire d’emboles septiques,notamment aux poumons.Niveau de preuve avec le type d’étude. — III.© 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

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ntroduction

es thromboses veineuses de l’enfant sont rares par rapportla population adulte. Elles sont devenues plus fréquentes

es dernières années avec la multiplication des formesraves d’infections ostéoarticulaires, notamment à staphy-ocoque communautaire méthicilline-résistant (SAMR) [1].

Nous rapportons ici sept cas d’ostéomyélites aiguësOMA) hématogènes compliquées de thrombose veineuserofonde (TVP) sur une période de 32 mois.

Le but de ce travail est de préciser la fréquence etes particularités des OMA hématogènes communautairesompliquées de TVP à partir de patients hospitalisés danse service d’orthopédie pédiatrique de l’hôpital d’enfantse Tunis.

atériel et méthodes

l s’agit d’une étude prospective réalisée entre débutvril 2007 et fin décembre 2009 dans le service d’orthopédieédiatrique de l’hôpital d’enfants de Tunis. Les OMA néona-ales, nosocomiales et celles secondaires à une inoculationirecte ou une infection par contiguïté n’ont pas été inclusesans l’étude. Le diagnostic d’ostéomyélite aiguë a étéetenu devant des signes cliniques et biologiques évocateurs’infection osseuse associés à l’isolement d’un germe sur lesrélèvements bactériologiques et/ou à la mise en évidence’un décollement périosté à l’échographie. En l’absence deerme et de décollement périosté, le diagnostic d’OMA a étéetenu sur l’association de signes cliniques et biologiquest de signes d’imagerie évocateurs d’infection osseuse à’imagerie par résonance magnétique (IRM) et/ou à la scin-igraphie osseuse triple phase au diphosphonate marqué auechnétium 99 métastable (99mTc).

Chaque malade a eu, systématiquement à l’admission,n bilan inflammatoire comportant une numération formuleanguine à la recherche d’une hyperleucocytose, un dosagee la C-réactive protéine (CRP) et une mesure de la vitessee sédimentation (VS) à la première heure. Une radio-raphie standard du site infectieux, une radiographie duhorax et une échographie à la recherche d’un décollementériosté ont systématiquement été réalisées à l’admission.ne échographie-doppler à la recherche d’une TVP a étééalisée devant l’existence de signes cliniques locaux évo-

ateurs.

Les prélèvements bactériologiques ont comporté desémocultures avant la mise en route du traitement antibio-ique ainsi que des prélèvements au niveau du site infectieuxn cas d’intervention chirurgicale.

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Pour chaque malade, ont été notés la durée d’évolutionvant traitement, l’importance de la fièvre et de’impotence fonctionnelle, les valeurs de la CRP, de la VS

l’admission et le nombre de globules blancs par milli-ètre cube à la numération formule sanguine ; le nombre’interventions chirurgicales nécessaires et l’existence’une localisation à distance notamment pleuropulmonaire.

tude statistique

’analyse des données a été faite par le logiciel SPSS version1.0. La comparaison de moyennes a été faite par le test detudent et la comparaison de pourcentages par le test dehi2 de Pearson. Le test est statistiquement significatif si leegré de signification p est inférieur ou égal à 0,05.

ésultats

urant la période étudiée, 70 patients ont été hospitali-és pour une OMA selon les critères suscités. L’âge moyenes patients était de 7,7 ans avec des extrêmes de septois et 13 ans et demi. Dans 88 % des cas, l’infection inté-

essait le squelette du bassin et des membres inférieurs.n germe à été retrouvé dans 64,5 % des cas. Il s’agissaitu staphylocoque aureus (SA) dans 86 % des cas : 33 SAéthicilline-sensible (SAMS) et six SAMR. Les autres germes

etrouvés étaient le streptocoque A dans 11 % des cas (cinqois). Une salmonelle a été retrouvée chez un patient dré-anocytaire.

Sept patients avaient une TVP (10 %). Celle-ci siégeaitoujours aux membres inférieurs et au niveau du bassin. Leableau 1 illustre le siège de la thrombose et celui de l’OMAorrespondante.

L’âge moyen des patients en cas de thrombose veineusetait de 8,1 ans avec des extrêmes de 23 mois et de 13 anst demi. Les délais de consultation étaient de 4,4 jours aveces extrêmes de zéro et sept jours. Tous les malades avaientes douleurs osseuses importantes responsables d’une impo-ence fonctionnelle totale. La température était supérieure38 ◦C dans tous les cas avec une moyenne de 38,6. Cinq

atients avaient un état général altéré dés l’admission etrois patients avaient ou ont développé secondairementes lésions alvéolaires diffuses aux deux champs pulmo-aires évocatrices d’une staphylococcie pleuropulmonaire

la radiographie du thorax.La CRP était supérieure à 72 mg/litre avec une moyenne

e 251 mg/litre à l’admission. La VS était toujours supé-ieure à 40 à la première heure avec une moyenne de 84. Ilxistait une hyperleucocytose à polynucléaires neutrophiles

Page 3: Thrombose veineuse profonde associée à une ostéomyélite aiguë hématogène chez l’enfant

Ostéomyélite aigue et thrombose veineuse

Tableau 1 Siège des thromboses veineuses et des ostéo-myélites correspondantes.

Thrombose Ostéomyélites aiguës

Surale TibiaSaphène interne et fémorale Tibia proximalSuperficiellePoplité et surale Fémur distalFémorale superficielle FémurPoplité et surale Tibia proximal

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Lcca7cecpdvtil

de plus en plus souvent rapportée. Hollmig et al. [4] ont rap-

Poplité et fémorale superficielle TibiaIliaque externe gauche Col fémoral

supérieure ou égale à 10 900 par millimètre cube chez tousles patients avec une moyenne de 13 550 éléments blancspar millimètre cube.

Un SA a été isolé chez tous les patients. Il s’agissait quatrefois d’un SAMS et trois fois d’un SAMR. Chez six patients,les hémocultures étaient positives. Chez six patients, legerme a été retrouvé au niveau du site de l’infection. Sixpatients présentaient un décollement périosté ou une col-lection profonde au niveau du site infectieux et ont duêtre opérés. Quatre patients ont été opérés à plusieursreprises pour drainer une recollection après le drainage ini-tial.

L’évolution a été fatale chez un patient. Il s’agissait d’unpatient de 13,5 ans hospitalisé pour une OMA du fémur évo-luant depuis quelques heures. Le diagnostic de thrombose dela veine fémorale superficielle a été fait dès la réception dumalade. Celle-ci était associée à un décollement périosté.L’éventualité d’une infection à SAMR a été évoquée devantla thrombose et le tableau clinique grave et le malade aété mis dès son admission sous teicoplanine à dose efficace.

Une héparinothérapie a été instaurée immédiatement et lepatient opéré pour drainage de l’abcès sous périosté. UnSAMR à été isolé quelques jours plus tard et sa sensibilitéà la teicoplanine vérifiée. Dans les jours qui ont suivi, le

prvr

Tableau 2 Tableau comparatif des ostéomyélites aiguës avec et

Avec thrombose veineuse pr

Âge (année) 8,1Sex-ratio 6Jours d’évolution 4,4Température (◦C) 38,6Globules blancs/mm3 13 550CRP (mg/litre) 251VS (1re heure) 84SAMS, n (%) 4 (57)SAMR, n (%) 3 (43)Streptocoque A, n (%) —Non-isolé, n (%) —Hémocultures + (%) 6 (86)Prélèvement locaux + n (%) 6 (86)Patients opérés, n (%) 6 (86)Délais d’apyrexie (jours) 12Staphylococcie pulmonaire, n (%) 3 (43)

n : nombre de patients ; NS : non-significatif.

987

atient a développé deux autres localisations ostéoarticu-aires ayant nécessité un drainage chirurgical. Le patient estesté fébrile et a présenté une détresse respiratoire avec desésions alvéolaires aux deux champs pulmonaires. L’enfant

été hospitalisé en réanimation mais le décès est survenuans un tableau de détresse respiratoire aiguë six jours aprèson admission.

Le Tableau 2 résume les différentes données cliniques etiologiques des OMA compliquées de thrombophlébites enes comparant aux formes sans thrombophlébites.

L’analyse comparative montre une différence significa-ive concernant les valeurs de la CRP et de la VS. Lesémocultures étaient également significativement plus sou-ent positives en cas de TVP de même que les délais’obtention d’apyrexie.

iscussion

es thromboses veineuses sont rares chez les enfantsomparativement à une population adulte. Leur incidencehez l’enfant est estimée à 0,06 à 0,07/10 000 enfants parn alors que l’incidence chez l’adulte est estimée de 2 à/10 000 patients par an [2]. Il existe deux pics de fréquencehez l’enfant. Le premier est représenté par les nouveau-nést les enfants de moins d’un an et le second par les adoles-ents et les préadolescents [3]. L’incidence est beaucouplus rare chez les enfants entre deux et 14 ans. Des facteurse risque sont le plus souvent retrouvés tels qu’un cathétereineux central, en particulier chez le nourrisson, des fac-eurs prothombotiques congénitaux, un traumatisme, unemmobilisation, un geste chirurgical ou une grossesse chezes adolescentes [3].

La survenue d’une TVP en association avec des OMA est

orté 11 cas de TVP sur 212 OMA. Ces auteurs, par ailleurs,éalisent la seule étude comparative que nous avons retrou-ée entres les OMA avec et sans TVP. Gonzalez et al. [5] ontapporté neuf TVP associées à des OMA. Plus récemment,

sans thrombophlébites.

ofonde, n : 7 Sans thrombose veineuse, n : 63 p

7,6 NS2 NS3 NS39 NS12 911 NS109 0,00148 0,00329 NS3 0,045 NS25 0,0423 (36,5) 0,0228 (79) 0,05234 (53) NS3 < 10−3

1 (1,4) 0,002

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88

ander Have et al. [1] ont rapporté huit TVP compliquantes infections ostéoarticulaires à SAMR ; le plus souvent desMA. Il s’agit ici des séries les plus grandes à notre connais-ance. De plus petites séries ont également été rapportées6—9].

Il est important de souligner l’augmentation de fré-uence de survenue de ces TVP depuis une dizaine d’année.ela est particulièrement clair dans la série de Gonzalez etl. [5]. Parmi les neuf cas rapportés par ces auteurs, huitnt été diagnostiqués entre 2001 et 2004 et un seul dans lesrois années précédentes.

Le siège des TVP a toujours été au niveau du pelvis etes membres inférieurs chez nos patients. Les TVP étaiente plus souvent adjacentes au foyer infectieux osseux et/ouroximal à celui-ci. Des localisations plus haut situées auiveau de la veine cave peuvent également se voir [4].

Les OMA compliquées de TVP présentent des particulari-és cliniques, biologiques et évolutives.

L’âge moyen de nos patients présentant une TVP n’étaitas significativement différent de celui du reste des OMA.ollmig et al. ont constaté la survenue d’une TVP chez desatients de 10,9 ans d’âge moyen. Ceux-ci étaient significa-ivement plus âgés que les patients ne présentant pas deVP. L’âge moyen des patients rapportés par Gonzalez et al.5] était de 10,6 ans.

Une prédominance masculine a été notée chez nosatients en cas de TVP : six garcons pour une fille, sansependant de différence significative avec le reste des OMA.ette prédominance masculine a également été notée par’autres auteurs. Tous les patients rapportés par Gonzalezt al. étaient des garcons. Huit des 11 patients rapportés parollmig et al. [4] étaient de sexe masculin. Les trois patientsapportés par Gorenstein et al. [10] étaient des garcons. Unerédominance masculine n’a, cependant, pas été retrouvéehez Walsh et Phillips [8]. Des quatre patients rapportés pares auteurs, trois étaient de sexe féminin.

La OMA compliquées de TVP ont une symptomatolo-ie clinique particulièrement bruyante avec des douleursntenses d’installation rapide et une impotence fonction-elle totale qui était présente dés l’admission chez tousos patients. Les signes locaux sont également marquésvec un œdème souvent étendu dépassant largement leiveau du segment osseux concerné. Dans notre série, nous’avons pas retrouvé de différences significatives concer-ant l’importance de la fièvre à l’admission : 38,6 contre8,9 pour les formes sans TVP. Une fièvre plus marquée até rapportée par Hollmig et al. [4] en cas de TVP. Chez cesuteurs, la gravité du tableau clinique initial explique pro-ablement les délais de consultation plus courts : 5,6 joursn cas de TVP contre 14,4 jours en l’absence de TVP. Pourotre part, nous n’avons pas trouvé de différence signifi-ative concernant les délais de consultation entre les deuxormes. Il existait, en revanche, chez nos patients, une dif-érence significative en ce qui concerne l’importance duyndrome inflammatoire biologique à l’admission. Cette dif-érence est particulièrement nette pour les valeurs de la CRPt de la VS. Nous n’avons pas retrouvé de différence signifi-

ative pour l’hyperleucocytose. Un germe a également étéetrouvé chez tous les patients porteurs d’une TVP contre4,5 % des cas pour le reste de la série. Les hémocultures,otamment, étaient significativement plus souvent positives

êch

S. Bouchoucha et al.

ue chez le reste des patients avec un taux de positivitée 86 % contre 41 % des cas pour l’ensemble des OMA. Celaémoigne d’un état septicémique plus marqué en cas de TVP.a chirurgie à également été plus souvent nécessaire chezes patients porteurs d’une TVP et les délais d’obtention’apyrexie significativement plus longs.

La survenue d’une TVP était associée de facon signi-cativement importante à des localisations pulmonaireseptiques. Trois de nos patients ont développé une détresseespiratoire associée à des lésions pulmonaires évocatricese staphylococcie pleuropulmonaire. L’aspect radiologique’opacités alvéolaires diffuses au niveau des deux champsulmonaires permet d’évoquer le mode de contaminationar l’intermédiaire de décharges septiques multiples et dif-uses [11]. Le rôle central des TVP dans la disséminatione l’infection, en particulier, pleuropulmonaire par la libé-ation d’emboles septiques a été évoqué par Gorensteint al. [10] dont les trois patients présentaient des signes’atteinte pulmonaire à la radiographie standard. Tous lesatients présentant une TVP de la série de Vander Have1] ont développé une détresse respiratoire nécessitant unessistance ventilatoire. Sept des 11 patients de la série deollmig et al. [4] avaient des lésions pulmonaires évoca-rices d’emboles septiques de même que quatre des neufatients rapportés par Gonzalez et al. [5]. De nombreusesutres publications ont également rapporté l’association’une TVP compliquant une OMA à des signes pulmonaires’emboles septiques [8,9,12].

L’atteinte pulmonaire peut être, dans certain cas, leeul signe d’appel d’une TVP [9]. Les signes locaux pouvanttre minimes, difficiles à mettre en évidence ou masquésar ceux de l’OMA. Dans ce cas, la recherche d’une TVP’impose. Le diagnostic repose sur l’échodoppler veineuxvec une bonne sensibilité et spécificité. En cas de douteiagnostique, d’autres techniques peuvent être utiliséesomme l’angioscanner ou l’angio-IRM [2].

La survenue d’une localisation pulmonaire est uneomplication grave pouvant être fatale. Cela a été leas chez un de nos patients malgré la précocité du diag-ostic ayant conduit à la mise en route d’un traitementntibiotique adapté, un drainage chirurgical urgent et unraitement anticoagulant dés l’admission. Gorenstein et al.10] ont souligné la gravité de la triade OMA-TVP-embolesulmonaires septiques pouvant mettre en jeux le pronosticital.

La TVP apparaît comme étant une complication des infec-ions à SA. Celui-ci a été retrouvé chez tous nos patients.l s’agissait de trois SAMR et quatre SAMS. Proportionnelle-ent, les infections à SAMR ont été, chez nous, plus souventourvoyeuses de TVP que les infections à SAMS : respective-ent 50 et 12 % des cas réalisant une différence significative.

a plus grande fréquence des TVP en cas d’infections à SAMRégalement été rapportée par d’autres auteurs [1,4,5,13].

’augmentation de l’incidence, ces dernières années desMA compliquées de TVP, est à mettre en parallèle avec

e changement de l’épidémiologie des OMA [13—15], carac-érisé par l’augmentation des infections à SAMR.

La physiopathologie des TVP sur OMA ne semble pastre en rapport avec un facteur de risque prothombotiqueongénital. Gonzalez et al. [5] ont exploré l’hémostase chezuit de leurs neuf patients. Ces auteurs n’ont pas retrouvé

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2008;28:777—85.[16] Gillet Y, Dohin B, Dumitrescu O, Lina G, Lina G, Vandenesch

Ostéomyélite aigue et thrombose veineuse

d’hypercoagulabilité congénitale pouvant expliquer le déve-loppement d’une TVP. Hollmig et al. [4], quant à eux, ontretrouvé un facteur de risque prothrombotique congénitalchez deux de leurs neuf patients explorés. La TVP est plusvraisemblablement secondaire à des facteurs de virulencebactériens. Les SA agissant par la libération d’enzymes bac-tériennes qui interagissent avec le fibrinogène entraînant ledéveloppement d’un caillot sanguin. Des exotoxines bacté-riennes pourraient provoquer une agrégation plaquettaire etun spasme du muscle lisse de la paroi des vaisseaux favorableà la constitution d’une thrombose [10]. Parmi ces toxines,la leucocidine de Panton et Valentine (PVL) a souvent étéretrouvée en cas de TVP [5]. Il s’agit d’une toxine aux fortespropriétés nécrosantes responsable de tableaux cliniques etbiologiques aigus et sévères. La PVL peut être produite parles SAMS et les SAMR [16].

En conclusion, l’éventualité d’une TVP doit toujours êtregardée à l’esprit en cas d’ostéomyélite aiguë. Celle-ci doitêtre particulièrement suspectée en cas de tableau bruyantavec des signes locaux très marqués associé à des signesgénéraux importants. L’existence de lésions pulmonairessuggérant des emboles septiques doit également impéra-tivement faire rechercher une TVP. La mise en évidenced’une telle lésion impose un traitement énergique et unesurveillance rapprochée. La survenue d’une TVP impose untraitement urgent par de l’héparine de bas poids molécu-laire relayée par l’administration d’antivitamine K par voieorale afin de prévenir l’extension locale de la thrombose etles embolies. Des filtres intravasculaires ont également étéutilisés [5].

Le traitement antibiotique, notamment, doit être adaptéet viser le staphylocoque résistant à la méthicilline et sécré-teur de PVL [16].

Conflit d’intérêt

Aucun.

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