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Revue d’oncologie hématologie pédiatrique (2013) 1, 79—88 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com MISE AU POINT Toxicité cardiaque des traitements du cancer chez l’enfant et l’adolescent Cardiotoxicity of cancer treatments in children and adolescents M. de Ville de Goyet a,,c , S. Moniotte b,c , B. Brichard a,c a Service d’hématologie et oncologie pédiatrique, cliniques universitaires Saint-Luc, UCL, 10, avenue Hippocrate, 1200 Bruxelles, Belgique b Service de cardiologie pédiatrique, cliniques universitaires Saint-Luc, UCL, 10, avenue Hippocrate, 1200 Bruxelles, Belgique c Institut de recherche expérimentale et clinique (IREC), UCL, Bruxelles, Belgique Rec ¸u le 10 juin 2013 ; accepté le 18 juillet 2013 Disponible sur Internet le 27 aoˆ ut 2013 MOTS CLÉS Effets au long-cours ; Séquelles ; Hémato-oncologie pédiatrique ; Cardiologie pédiatrique ; Chimiothérapie ; Radiothérapie Résumé Les progrès thérapeutiques en oncologie pédiatrique ont permis de porter la sur- vie à cinq ans pour tous types de cancer confondus à 80 %, permettant à un nombre croissant d’enfants d’être guéris et d’atteindre l’âge adulte. Cependant, ces survivants de cancers sont à risque de développer des complications secondaires aux traitements. Les anthracyclines et la radiothérapie médiastinale sont potentiellement cardiotoxiques et contribuent à une morbidité et une mortalité significative à long terme. Cette revue résume brièvement la physiopathologie des complications cardiaques liées aux anthracyclines et à la radiothérapie, leur incidence, ainsi que les facteurs de risque principaux. Les études les plus significatives sont exposées dans cette revue et toutes démontrent un risque accru de complications cardiaques par rapport à la population normale. Enfin, les différentes techniques actuellement disponibles ou émergentes pour le suivi cardiaque des patients, les moyens de prévention pour limiter la cardiotoxicité et les traitements de ces complications cardiaques une fois diagnostiquées seront dévelop- pés. Les pathologies cardiovasculaires étant la cause principale de décès chez ces survivants, le dépistage d’une dysfonction cardiaque débutante reste la clé de voûte du devenir de ces patients. © 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (M. de Ville de Goyet). 2213-4670/$ see front matter © 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. http://dx.doi.org/10.1016/j.oncohp.2013.07.004

Toxicité cardiaque des traitements du cancer chez l’enfant et l’adolescent

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Page 1: Toxicité cardiaque des traitements du cancer chez l’enfant et l’adolescent

Revue d’oncologie hématologie pédiatrique (2013) 1, 79—88

Disponible en ligne sur

www.sciencedirect.com

MISE AU POINT

Toxicité cardiaque des traitements ducancer chez l’enfant et l’adolescent

Cardiotoxicity of cancer treatments in children and adolescents

M. de Ville de Goyeta,∗,c, S. Moniotteb,c, B. Bricharda,c

a Service d’hématologie et oncologie pédiatrique, cliniques universitaires Saint-Luc, UCL, 10,avenue Hippocrate, 1200 Bruxelles, Belgiqueb Service de cardiologie pédiatrique, cliniques universitaires Saint-Luc, UCL, 10, avenueHippocrate, 1200 Bruxelles, Belgiquec Institut de recherche expérimentale et clinique (IREC), UCL, Bruxelles, Belgique

Recu le 10 juin 2013 ; accepté le 18 juillet 2013Disponible sur Internet le 27 aout 2013

MOTS CLÉSEffets au long-cours ;Séquelles ;Hémato-oncologiepédiatrique ;Cardiologiepédiatrique ;Chimiothérapie ;Radiothérapie

Résumé Les progrès thérapeutiques en oncologie pédiatrique ont permis de porter la sur-vie à cinq ans pour tous types de cancer confondus à 80 %, permettant à un nombre croissantd’enfants d’être guéris et d’atteindre l’âge adulte. Cependant, ces survivants de cancers sontà risque de développer des complications secondaires aux traitements. Les anthracyclines et laradiothérapie médiastinale sont potentiellement cardiotoxiques et contribuent à une morbiditéet une mortalité significative à long terme. Cette revue résume brièvement la physiopathologiedes complications cardiaques liées aux anthracyclines et à la radiothérapie, leur incidence,ainsi que les facteurs de risque principaux. Les études les plus significatives sont exposées danscette revue et toutes démontrent un risque accru de complications cardiaques par rapport à lapopulation normale. Enfin, les différentes techniques actuellement disponibles ou émergentespour le suivi cardiaque des patients, les moyens de prévention pour limiter la cardiotoxicitéet les traitements de ces complications cardiaques une fois diagnostiquées seront dévelop-pés. Les pathologies cardiovasculaires étant la cause principale de décès chez ces survivants,

le dépistage d’une dysfonction cardiaque débutante reste la clé de voûte du devenir de cespatients.

Tous droits réservés.

© 2013 Elsevier Masson SAS.

∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (M. de Ville de Goyet).

2213-4670/$ — see front matter © 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.http://dx.doi.org/10.1016/j.oncohp.2013.07.004

Page 2: Toxicité cardiaque des traitements du cancer chez l’enfant et l’adolescent

80 M. de Ville de Goyet et al.

KEYWORDSLate effects;Pediatrichemato-oncology;Pediatric cardiology;Chemotherapy;Radiotherapy

Summary Childhood cancer is a success story of modern medicine in which effective treat-ments have been identified for a previously untreatable disease. The current 5-year survival ratereaches 80 % and led us to focus on the long-term sequelae in this growing population of cancersurvivors. Anthracyclines chemotherapy and mediastinal radiotherapy are both potentially car-diotoxic and contribute to a significant morbidity and mortality among cancer survivors. Thisreview summarizes the physiopathology of cardiovascular diseases induced by cancer therapy, aswell as their incidence and the risk factors associated with each specific therapy. We will exposein this review the most pertinent studies that have investigated the cardiac outcomes of adultsurviving from childhood cancer. All demonstrated a substantial risk for late cardiac effects inthis specific population. Cardiovascular monitoring, prevention tools and early detection stra-tegies will also be developed. Early screening of cardiac dysfunction remaining the keystone ofan improved long-term outcome for survivors of childhood cancer.© 2013 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

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ntroduction

e traitement du cancer est le paradigme d’une réussiteédicale moderne qui a permis la guérison de maladies

u départ incurables. Dans cette population croissante deurvivants de cancer, la prise en charge des séquelles secon-aires aux traitements est devenue le nouveau challenge desncologues pédiatres [1,2].

Le groupe du Childhood Cancer Survivor Study (CCSS)apportait que 30 ans après les traitements anticancéreux,’incidence cumulative de problèmes de santé atteignait3 % dont 42 % de problèmes sévères ou de décès [3]. Parmies complications, on retrouvait la cardiotoxicité princi-alement liée à l’utilisation des anthracyclines et/ou dea radiothérapie médiastinale. À ce jour, il n’existe pase consensus sur le suivi optimal cardiaque ainsi que lesesures de prévention à proposer à ces patients. De même,

e traitement de ces complications cardiaques reste un sujet débat.

ardiotoxicité des traitementsnticancéreux utilisés en pédiatrie :ésumé des connaissances actuelles

ncidence des effets secondaires cardiaques

e nombre de survivants de cancer pédiatrique souffrant deardiopathie secondaire aux traitements est variablementstimé selon les études. La prévalence de la cardiotoxi-ité varie de 0 à 16 % lorsque seuls les patients souffrant’insuffisance cardiaque sont repris, mais atteint 57 %orsque les patients présentant un dysfonctionnement car-iaque subclinique sont inclus [4]. De manière similaire,’incidence cumulative de morbidité cardiovasculaire aprèsrradiation médiastinale a été estimée entre 0,3 et 22,8 %5]. Le spectre des cardiopathies secondaires aux traite-ents de cancer allant de l’insuffisance cardiaque sévère à

oute atteinte infraclinique, l’incidence des complicationsugmente avec la sophistication des techniques d’imagerie.e perfectionnement des techniques explique en partie lesifférences observées entre les études mais la disparité des

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oses d’anthracyclines et de radiation recues ainsi que lesifférences en termes de durée de suivi des patients sont’autres explications [6]. En 2010, le taux standardisé deortalité pour les maladies cardiovasculaires était cinq fois

upérieur pour les survivants de cancer pédiatrique par rap-ort à la population générale [7].

raitements cardiotoxiques : facteurs deisque et mécanismes d’action

es anthracyclines et la radiothérapie sont les principauxcteurs de la cardiotoxicité secondaire aux traitements duancer. Nous nous concentrerons exclusivement sur ces deuxodalités thérapeutiques, même si d’autres médicamentseuvent également être responsables de toxicité cardiaqueiguë ou subaiguë.

nthracyclinesa cardiotoxicité secondaire aux anthracyclines est divi-ée en trois catégories : aiguë, chronique progressive’apparition précoce et chronique progressive d’apparitionardive :

la toxicité aiguë liée aux anthracyclines se présente typi-quement dans la première semaine de traitement. Elle estrarement observée (< 1 %), généralement transitoire etréversible dès l’arrêt du traitement. Le risque de dysfonc-tion chronique tardive semble plus élevé pour les patientsprésentant une dysfonction aiguë [8] ;l’apparition précoce d’une cardiomyopathie chroniqueprogressive survient moins d’un an après le traitement.Elle est souvent prédictive de la cardiotoxicité tardive[9] ;l’apparition tardive d’une cardiomyopathie chroniqueprogressive se voit des années ou des décennies après lafin du traitement [2].

Plusieurs facteurs de risque sont associés à l’apparitione cardiotoxicité chronique qu’elle soit d’apparition pré-oce ou tardive. La dose cumulative est clairement le

acteur prédictif le plus important [5]. Bien que différentseuils au-dessus desquels la cardiotoxicité est susceptible dee développer aient été proposés [7,8], des études récentesuggèrent qu’il n’existe pas de dose sécuritaire en decà de
Page 3: Toxicité cardiaque des traitements du cancer chez l’enfant et l’adolescent

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Toxicité cardiaque des traitements du cancer chez l’enfant

laquelle la cardiotoxicité ne survient pas [10—12]. Un suivià plus long terme après l’administration du médicamentest associé à une plus grande prévalence de déficience car-diaque [5,8]. Le jeune âge (< 4—5 ans) [5,9] et l’associationà la radiothérapie médiastinale favorisent aussi les effetssecondaires cardiaques [5]. Le sexe féminin est un autrefacteur de risque [5—14], probablement parce que lesanthracyclines sont mal absorbées par le tissu lipidique.En effet, les femmes ayant un pourcentage plus élevé detissu graisseux, cela entraîne une concentration plus impor-tante du médicament au niveau du muscle cardiaque. Uneprédisposition génétique entraînant une diminution de laclairance de ces médicaments, la trisomie 21, la race noire,l’hyperthermie, les maladies du foie et une maladie car-diaque préexistante ont également été associés à un risqueaccru de cardiotoxicité [4].

De plus, on observe des variations dans la sensibilitéà la toxicité des anthracyclines parmi les patients ayantdes facteurs de risque et des traitements similaires. Cetteobservation appuie l’existence d’une composante génétiquedans la réponse d’un individu aux anthracyclines. Récem-ment, divers gènes associés à la cardiotoxicité induite parles anthracyclines ont été rapportés [15—17]. Ainsi, le poly-morphisme V244 M du gène CBR3 (carbonyle réductase 3)pourrait influencer le risque d’insuffisance cardiaque chezles survivants de cancers infantiles en modulant la for-mation intracardiaque de métabolites cardiotoxiques desanthracyclines [15]. Des variantes génétiques dans le gèneSLS28A3 ainsi que d’autres gènes associés à la cardiotoxicitéinduite par les anthracyclines ont également été signalés[16]. Récemment, il a été proposé que les patients dont lescardiomyocytes expriment davantage la topoisomérase IIßont un risque accru de toxicité cardiaque induite par la doxo-rubicine [17]. La reconnaissance de marqueurs génétiqueset protéomiques de la sensibilité individuelle du patient auxeffets cardiotoxiques des anthracyclines pourrait donc amé-liorer le suivi et l’avenir au long cours de nos patients.

La physiopathologie de la toxicité des anthracycliness’explique principalement par la production de radicauxlibres endommageant les cardiomyocytes. En analyse micro-scopique, les dommages des myocytes induits par lesanthracyclines apparaissent sous forme de perte myo-fibrillaire, de fibrose et de dégénérescence vasculaire.L’importance de ces changements est corrélée à la dosetotale d’anthracycline recue. Les myocytes pouvant rare-ment proliférer après l’âge de six mois, la croissancemyocardique résulte d’une augmentation de la taille desmyocytes. Par conséquent, le principal moyen de compenserles myocytes perdus après un traitement par anthracyclinesest une hypertrophie accrue des myocytes restants afin demaintenir l’architecture cardiaque et la fonction contrac-tile. L’insuffisance cardiaque d’apparition tardive après untraitement par anthracyclines est due à l’incapacité desmyocytes restants à compenser convenablement une sur-charge cardiaque due à la croissance normale du corps, àune grossesse ou à d’autres contraintes métaboliques.

RadiothérapieToute radiothérapie médiastinale ou thoracique peutconduire à un dysfonctionnement cardiaque. Dans sonétude, Tukenova a rapporté que le risque de mourir d’une

clSt

adolescent 81

aladie cardiovasculaire est significativement majoré poures personnes ayant recu une dose d’irradiation supérieure à

Gy [7]. Mulrooney, quant à lui, démontrait que l’expositionu cœur à des radiations de 15 Gy ou plus augmente le risqueelatif d’insuffisance cardiaque congestive, d’infarctus duyocarde, de maladies péricardiques et de pathologies val-

ulaires de deux à six fois par rapport aux survivants deancer non irradiés [6].

Les patients peuvent rester asymptomatiques pendantes années et les dommages peuvent apparaître de manièrensidieuse. La fibrose est la marque histopathologique de laaladie cardiaque induite par radiothérapie [18—20].

onitoring cardiovasculaire

e chapitre se concentre surtout sur la surveillance car-iaque à long terme et plus particulièrement sur les outilsrometteurs d’un dépistage précoce des toxicités car-iaques tardives.

onitoring pendant les traitementses lignes de conduites pour la surveillance cardiaqueont disponibles pour plusieurs protocoles de traitemente cancer même si le plus souvent il n’existe pas deonsensus international. Néanmoins, l’American Heart Asso-iation (AHA) recommande que tous les enfants recevant unehimiothérapie potentiellement cardiotoxique bénéficient’une échocardiographie transthoracique avant le traite-ent [21].

onitoring après les traitements et suivi au longoursu vu des risques substantiels de maladies cardiovascu-

aires, les survivants de cancers pédiatriques devraienténéficier d’un suivi cardiaque tout au long de leurie. Cela doit particulièrement être pris en compte lors’événements tels qu’une grossesse, d’exercices phy-iques importants, d’infections graves systémiques ou’interventions chirurgicales majeures. Aujourd’hui, lesesures échocardiographiques de la fonction systolique ven-

riculaire gauche sont reproductibles et restent l’outil deépistage le plus couramment utilisé.

lectrocardiographie’électrocardiographie est utile pour la détection’arythmies secondaires aux traitements. La réalisa-ion d’un électrocardiogramme à 12 dérivations est uneratique courante au début et à la fin du traitement, mais il’y a actuellement pas de lignes directrices précises sur lalanification du suivi à proposer aux patients à long terme.

chocardiographie et Doppler tissulaireour le suivi échographique, la fraction de raccourcissementFS) et la fraction d’éjection (FE) sont le plus souvent utilisésomme paramètres systoliques standard.

Par ailleurs, le Doppler tissulaire est une techniqueon invasive d’échocardiographie permettant d’évaluer la

ontractilité myocardique et sa relaxation. Son intérêt danse contexte clinique est encore en cours d’évaluation [22].elon des études récentes chez l’adulte, l’imagerie dopplerissulaire couplée à l’échographie pourrait être plus sensible
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8

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ans la détection infra clinique de la dysfonction diastolique23—25].

entriculographie isotopique et scintigraphie myocar-iquea ventriculographie isotopique ou Multi-Gated Acquisitioncan (MUGA scan) permet de détecter une détériorationubclinique de la fonction cardiaque avec une excellenteeproductibilité, même chez les patients avec des fenêtrescoustiques médiocres [2]. Bien qu’une étude récente aitontré que le MUGA scan semble être plus sensible que

’échographie dans la détection des dysfonctionnementsardiaques induits par les anthracyclines [26], son rôle dansa surveillance à long terme reste à définir, à la lumièreotamment de l’émergence de la résonance magnétiqueucléaire (RMN).

La scintigraphie myocardique pourrait être un outil pro-etteur pour la détection précoce de la cardiotoxicité

nduite par les anthracyclines [27], mais là aussi, plus deonnées sont nécessaires avant que des recommandationsuissent être établies.

arqueurs biochimiques cardiaques’utilité des paramètres biochimiques sanguins comme outile dépistage chez les patients traités par anthracyclines estncore sujette à débat. La stratégie la plus prometteuseour détecter les lésions cardiaques sera probablement’associer un panel de biomarqueurs avec des outils nonnvasifs d’imagerie cardiaque. Les biomarqueurs intéres-ants, les paramètres idéaux d’imagerie cardiaque, lealendrier d’un tel dépistage et la mise en place d’unechelle de risque cardiaque chez les patients pédiatriquesestent à définir [28,29].

Les biomarqueurs les plus étudiés actuellement sontes troponines cardiaques, marqueurs directs de la mortes myocytes et les peptides natriurétiques, marqueurs’étirement des fibres des myocytes.

ésonance magnétique nucléaire cardiaqueeules deux études par RMN ont évalué la dysfonctionardiaque après un traitement par anthracyclines. Dansa première série de 22 patients adultes présentant uneonction cardiaque normale avant la chimiothérapie, uneiminution significative de la fraction d’éjection était rap-ortée ainsi qu’une augmentation de la prise de contrastear le myocarde en rehaussement tardif [30].

La seconde étudia l’intérêt de la RMN chez les patientsédiatriques atteints d’un cancer (n = 28, âge moyen6,4 ans). Les auteurs constataient que l’index volumétriquen fin de systole augmentait avec une diminution de la frac-ion d’éjection du ventricule gauche et droit au cours duraitement par anthracyclines. Néanmoins, aucun signe cli-ique d’insuffisance cardiaque ou de cardiomyopathie n’até observé [31].

Bien que la RMN soit un outil très sensible, reproductiblet prometteur, d’autres études sont nécessaires pour préci-er son rôle dans le dépistage de la cardiotoxicité chez lesurvivants de cancer.

preuve d’effort cardio-pulmonaire’épreuve d’effort cardiopulmonaire est une technique pro-etteuse. Elle peut en effet révéler un dysfonctionnement

ardiorespiratoire non détectable sur des études au repos.

LLa

M. de Ville de Goyet et al.

nouveau, davantage d’études sont nécessaires pour déter-iner sa place dans le dépistage de la cardiotoxicité [32,33].

oment optimal de la surveillance de la fonction car-iaquee Children Oncology Group (COG) propose des lignes direc-rices pour le suivi cardiaque à long terme des survivants deancer. Ainsi, il a proposé un calendrier de surveillance enonction de l’âge, des doses anthracyclines et/ou des dosese rayons recus [34] (Tableau 1).

révention des complicationsardiovasculaires

a prévention des complications reste un domaine deecherche important, mais plusieurs mesures prophylac-iques ont déjà été testées.

a limitation de la dose cumulative’anthracyclinesa plupart des protocoles de traitement pour les cancersant de l’adulte que de l’enfant tentent de limiter laose cumulative totale d’anthracyclines [35]. Cependant,l n’existe pas de dose fiable connue en pédiatrie en decàe laquelle aucune cardiotoxicité n’apparaît, en particulierour les dysfonctionnements cardiaques chroniques.

’utilisation de différents schémas’administration d’anthracyclines’avantage de la perfusion lente par rapport aux bolus’anthracyclines reste controversé. Si une perfusion conti-ue réduit le pic d’anthracycline, elle prolonge l’expositionu produit. Une revue systématique de la Cochrane Data-ase sur cette question chez les adultes a conclu qu’uneurée de perfusion d’anthracyclines de six heures ou pluséduit le risque d’insuffisance cardiaque clinique et le risquee dommages cardiaques infracliniques. Néanmoins, ce tra-ail n’a pas réussi à démontrer l’avantage des perfusionsontinues sur les bolus chez les enfants en raison du nombreimité de patients pédiatriques participant à l’étude. Lesodalités d’administration doivent encore être évaluées

hez les enfants avant que des recommandations spécifiquesuissent être faites [36].

es analogues, les anthracènediones et lesouvelles formulations d’anthracyclineses analogues tels l’épirubicine, l’idarubicine ou la mitoxan-rone ont montré une toxicité cardiaque diminuée dans lestudes précliniques et cliniques, mais aucune donnée n’estisponible en pédiatrie [37].

Les anthracyclines liposomales ont été introduites pouréduire la cardiotoxicité de la doxorubicine tout en préser-ant son efficacité antitumorale, mais dans la populationédiatrique, plus de données sont nécessaires pour pouvoirournir des recommandations factuelles et garantir leurs uti-isations en toute sécurité.

es agents cardioprotecteursa compréhension du mode d’action des anthracyclines

permis de développer des stratégies visant à prévenir

Page 5: Toxicité cardiaque des traitements du cancer chez l’enfant et l’adolescent

Toxicité cardiaque des traitements du cancer chez l’enfant et l’adolescent 83

Tableau 1 Fréquences recommandées des échographies cardiaques ou du muga scan.

Âge autraitementa

Radiation avec impactpotentiel sur le cœur

Dosed’anthracyclinesb

Fréquencerecommandée

< 1 an OuiNon

Toute dose< 200 mg/m2

≥ 200 mg/m2

Chaque annéeTous les 2 ansTous les ans

1—4 ans OuiNon

Toute dose< 100 mg/m2

≥ 100 à < 300 mg/m2

≥ 300 mg/m2

Chaque annéeTous les 5 ansTous les 2 ansTous les ans

≥ 5 ans Oui < 300 mg/m2

≥ 300 mg/m2Tous les 2 ansTous les ans

Non < 200 mg/m2

≥ 200 à < 300 mg/m2

≥ 300 mg/m2

Tous les 5 ansTous les 2 ansTous les ans

Extrait de Children’s Oncology Group long-term follow-up guidelines [34].a Âge au premier traitement cardiotoxique (anthracyclines or radiothérapie).b Basée sur une dose isotoxique équivalente de doxorubicine.

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ou à réduire leur cardiotoxicité sans interférer avec leurefficacité. Divers agents cardioprotecteurs potentiels sontaujourd’hui à l’étude. Parmi ceux-ci, le dexrazoxane est lemédicament le plus étudié. La méta-analyse de la CochraneDatabase a démontré que le dexrazoxane réduit significa-tivement la survenue de la toxicité des anthracyclines chezles adultes, mais aucune recommandation ne peut être faiteà ce jour chez les enfants [38]. De plus, les lignes directricespubliées en 2008 par l’American Society of Clinical Oncology(ASCO) ne recommande pas l’utilisation du dexrazoxane enpédiatrie [39]. En effet, il y aurait un risque d’apparitionde nouveaux cancers (leucémie myéloïde aiguë et myélo-dysplasie) chez les enfants recevant du dexrazoxane. Il yaurait aussi un risque accru d’aplasie médullaire grave etd’infections sévères. Ce médicament ne doit donc pas êtreutilisé dans ce groupe d’âge.

La radiothérapieLes techniques modernes, incluant la planification dutraitement en trois dimensions, l’utilisation d’un accé-lérateur linéaire, le respect de la pondération anté-rieure/postérieure, l’utilisation du bloc sous-carinaireau-dessus de 30 Gy et la technique de champ d’irradiationdiminuent, mais ne suppriment pas les risques decomplications cardiaques [40].

La prévention post-traitementCertains facteurs déclenchants peuvent conduire àl’apparition rapide de symptômes cardiaques : tout d’abord,les facteurs qui accélèrent la croissance somatique commela croissance normale ou l’utilisation d’hormone decroissance, ou des facteurs qui augmentent les besoinshémodynamiques (ex. : la grossesse, l’accouchement,

l’exercice intense, l’anesthésie générale, etc.). Parailleurs, des maladies concomitantes telles qu’une hyper-tension systémique, une infection ou une insuffisancerénale peuvent aussi précipiter l’apparition de symptômes

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ardiaques des années après un traitement par anthra-yclines. Les mesures de prévention devraient aussi seocaliser sur ces facteurs déclenchants afin de surveillerdéquatement les survivants de cancer [40]. En outre, touses patients devraient être informés des risques cardiovas-ulaires de la chimiothérapie et de la radiothérapie, ainsiue de la nécessité d’un suivi au long cours. Un mode de vieain et la pratique d’exercices physiques ont montré un réelénéfice chez les patients ayant survécu à un cancer dans’enfance et devraient donc être fortement encouragés.

es traitements

raitement de la dysfonction ventriculaire gauchesymptomatique et prévention de sa progressiones inhibiteurs de l’enzyme de conversionette thérapie visant à réduire la post-charge du ventri-ule gauche peut changer le cours de l’évolution d’uneysfonction ventriculaire gauche progressive. Peu d’étudesnt étudié l’effet des inhibiteurs de l’enzyme de conversionIEC) chez les survivants de cancer infantile, mais toutesontraient néanmoins une amélioration transitoire de la

onction cardiaque [41—43].

es antagonistes des récepteurs �-adrénergiqueses antagonistes �-adrénergiques peuvent égalementéduire la cardiotoxicité induite par les anthracyclines [44].

ce jour, peu d’études existent et davantage de donnéesont nécessaires pour fournir des lignes directrices fondées.

a thérapie par hormone de croissance’hormone de croissance a été proposée comme traitement

e la cardiomyopathie et de l’insuffisance cardiaque gauchear elle augmente l’épaisseur de la paroi ventriculaire.ependant cet effet semble perdu à l’arrêt du traitement45].
Page 6: Toxicité cardiaque des traitements du cancer chez l’enfant et l’adolescent

84

M.

de Ville

de G

oyet et

al.

Tableau 2 Résumé des principales études sur le devenir cardiaque des survivants de cancer pédiatrique.

Études Années audiagnostic

Nombre depatients

Âge médian audiagnostic(écart)

Diagnostic Traitement administré Duréemédiane dusuivi (écart)

Incidence de maladie cardiaqueou décès par cause cardiaque

Kenneyet al.,2010 [20]

1947—1968 107 8 ans (0—17) Tumeurssolides

7 % chirurgie seule93 % CT et/ou RT

48 ans (36—65) 17 % coronaropathies (p = 0,01)51 % hypertension (p = 0,001)1,9 % décès (1 péricardite,1 cardiomyopathie)

Mulrooneyet al.,2009 [6]

1970—1986 14 358 6 ans (0—20) Tous types decancersconfondus

Doses d’AT13,4 % < 250 mg/m2

19,7 % > 250 mg/m2

Doses de RT39,9 % < 1500 Gy9,7 % 1500—< 3000 Gy6,9 % ≥ 3500 Gy

(0—34) Après 5 ans1,7 % insuffisance cardiaque,1,6 % anomalies valvulaires,1,3 % maladies péricardiquesAprès 30 ans4,1 % insuffisance cardiaque,4,0 % anomalies valvulaires,3 % maladies péricardiques

Tukenovaet al.,2010 [7]

1942—1986 4122 (0—14) Tumeurssolides

CT et/ou RT 27 ans Risque de décès plus élevé pourdes doses cumuléesd’AT > 360 mg/m2 (RR : 4,4) etde RT >5 Gy (RR 12,5 et25,1 pour 5 à 14,9 Gy et > 15 Gyrespectivement)

Mölleret al.,2001 [13]

1960—1989 13 711 (0—19) Tous cancersconfondus

Non précisé 5—20 ans aprèsle diagnostic

RMS : 5,8

Page 7: Toxicité cardiaque des traitements du cancer chez l’enfant et l’adolescent

Toxicité cardiaque

des traitem

ents du

cancer chez

l’enfant et

l’adolescent

85

Tableau 2 (Suite)

Études Années audiagnostic

Nombre depatients

Âge médian audiagnostic(écart)

Diagnostic Traitement administré Duréemédiane dusuivi (écart)

Incidence de maladie cardiaqueou décès par cause cardiaque

Guldneret al.,2006 [19]

1968—1985 229 6,2 ans (0—21) Tumeurssolides

Dose moyenne d’AT :344 mg/m2

Dose moyenne de RTcardiaque : 8 Gy

18 ans 39 % de problèmes cardiaquesdivers

Sorensenet al.,2003 [8]

1970—1990 184 LLA :4,8 ± 2,7 ansTW :4,1 ± 2,3 ans

LLA, TW Dose cumulée dedoxorubicine :LLA : 180 ± 73 mg/m2

TW : 301 ± 78 mg/m2

6,2—6,7 ans10,3—11,1 ans

15 % de LLA et 42 % de TW ontdes anomalies cardiaques pourdes doses d’AT > 242 mg/m2

Lipshultzet al.,2005 [11]

Non précisé 115 4,8 ans (1—19) LLA Dose médiane cumuléed’AT : 352 mg/m2

11,8 ans(8,3—15)

57 % montrent un accroissementde la post-charge ventriculairegauche ou diminution de lacontractilité

Hudsonet al.,2007 [9]

Non précisé 278 5,5 ans(0—23,6)

Tous types decancersconfondus

Pts à risque : 67,4 %AT : 25,8 % ; AT + RTcardiaque : 2,8 % ; RTcardiaque seule : 11 %(Dose médiane d’AT :201,8 mg/m2)

Pts à risque :9 ans (3—18)Pts non àrisque : 11 ans(4,2—21,7)

Les patients à risque ont plusd’anomalies de la fraction deraccourcissement ou de lapost-charge

Ratheet al.,2010 [10]

1986—2000 80 4,0 ans(0,8—13,4)

LLA Dose médiane cumuléed’AT : 250 mg/m2

(120—300 mg/m2)

8,2 ans(1,1—20,6)

> 70 % avec des anomalieséchographiques variées dont11 % avec fractiond’éjection < 60 %

AT : anthracyclines ; CT : chimiothérapie ; LLA : leucémie lymphoblastique aiguë ; Pts : patients ; RR : risque relatif ; RT : radiothérapie ; RMS : ratio de mortalité standardisé ; TW : tumeurde Wilms.

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86 M. de Ville de Goyet et al.

Figure 1. Mortalité observée suite à des pathologies cardiovasculaires (A) et cardiaques (B) dans la cohorte franco-anglaise de patientst énéraT

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raités pour un cancer dans l’enfance par rapport à la population gukenova et al. [7].

raitement des cardiomyopathies et de’insuffisance cardiaque congestivee traitement standard de l’insuffisance cardiaque conges-ive se concentre sur la correction des anomaliesous-jacentes telles que la post-charge accrue et la dimi-ution de la contractilité. Fait à noter, Levitt et al. ontémontré que sur les trois dernières décennies il y a eu uneugmentation conséquente du nombre de transplantationsardiaques chez les survivants de cancer pédiatrique [46].

raitement de l’arythmieout patient atteint de cardiomyopathie est à risque’arythmies ventriculaires et d’anomalies de la conduction.es patients doivent bénéficier d’un ECG de dépistage de4 heures de manière régulière. Lorsqu’une arythmie estémontrée, un traitement antiarythmique ou un défibrilla-eur doit évidemment être envisagé. Lors de l’utilisation desntagonistes des récepteurs �-adrénergiques, l’attentionevrait être accordée à leur effet inotrope négatif potentielar ils peuvent déprimer davantage la fonction myocardiqueu interférer avec d’autres médicaments [40,44].

raitements des lésions secondaires à laadiothérapie (coronaropathies, valvulopathies etaladie du péricarde)

es options de traitement pour la maladie coronarienneomprennent le pontage coronarien et l’angioplastie per-utanée. Bien que les régurgitations valvulaires légèresuissent bénéficier d’une prise en charge médicale visant

réduire la post-charge, le traitement est essentiellementhirurgical dans les cas modérés à sévères. En cas de péri-ardite aiguë, la moitié des patients ne nécessite pas deraitement et 40 % d’entres eux répondent simplement au

dbdm

le francaise et anglaise.

epos associé aux anti-inflammatoires non stéroïdiens et auxiurétiques [40].

tudes de suivi au long cours

’intérêt du suivi au long cours des survivants de cancerédiatrique a émergé au cours des dix dernières années3,6—13,19]. Cependant, les cohortes des études étaient auépart hétérogènes en termes de critères d’inclusion, deurée de suivi, de technique de surveillance cardiovascu-aire, d’âge moyen au moment du diagnostic, de doses et duype d’anthracyclines ou de doses de radiothérapie recues.

Les principales études de suivi sont présentées selon laurée de suivi (Tableau 2). Cette liste n’est pas exhaustive,ais ces études ont été sélectionnées, soit en raison de leur

rès long temps de suivi, du grand nombre de patients inclusu parce qu’elles apportent une information significative.

Les études incluant les plus grands nombres de patientsont l’étude du groupe du CCSS (Tableau 2 — étude de Mul-ooney et al. [6]), de la cohorte francaise et anglaiseTableau 2 — étude de Tukenova et al. [7]), et l’étude nor-ique (Tableau 2 — étude de Möller et al. [13]).

En 2001, les premières études de cohortes rétrospec-ives soulignaient déjà l’importance de la morbidité à longerme et la mortalité cardiovasculaires chez les survivantsu cancer pédiatrique [13]. Elles montraient que le taux deortalité globale augmentait avec le temps et était claire-ent au-dessus de la mortalité anticipée dans la population

énérale. De plus, ce taux de mortalité était significative-ent plus faible chez les patients traités au cours de la

ernière période de l’étude (années 1980—1989), dû proba-lement à une meilleure prise de conscience de la toxicitée la chimiothérapie et une utilisation plus attentive de cesédicaments [13].
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Toxicité cardiaque des traitements du cancer chez l’enfant

Mulrooney et al. (Tableau 2) ont démontré quel’incidence cumulative de morbidité cardiaque continuait àaugmenter jusqu’à 30 ans après le diagnostic [6]. En 2010,Kenney et al. (Tableau 2) ont publié une petite série de107 patients ayant un suivi relativement long [20] et confir-maient que plus de 50 ans après la fin de la chimiothérapieet/ou radiothérapie, les survivants continuaient d’être àrisque de cardiopathie, avec une altération de la qualitéde vie ou même une espérance de vie réduite. L’étude deGuldner et al. (Tableau 2) démontrait que la radiothérapieexpose également les patients à un risque accru de maladiecardiaque à long terme [19]. Tukenova et al. (Tableau 2)confirmaient que les patients recevant plus de 5 Gy auniveau cardiaque, ainsi que ceux ayant recu une dose cumu-lative d’anthracyclines supérieure ou égale à 360 mg/m2,sont à haut risque de mortalité cardiovasculaire. Dans cettecohorte, le taux cumulatif de mortalité d’origine cardiaqueet l’incidence cumulative d’insuffisance cardiaque augmen-taient avec le temps, y compris après 20 ans de suivi (Fig. 1)[7].

Il persiste encore des controverses au sujet du seuil dela dose cumulative d’anthracyclines à risque de cardiotoxi-cité pour les patients. Certains auteurs (Tableau 2 — étudede Sorensen et al. [8]) ont rapporté que les patients ayantrecu des doses cumulatives d’anthracyclines inférieures à250 mg/m2 montrent rarement une détérioration de leurfonction cardiaque [8]. À l’inverse et plus récemment,d’autres équipes ont démontré (Tableau 2 — études de Lip-shultz et al. [11], Hudson et al. [9], Rathe et al. [10]) que defaibles doses d’anthracyclines (45 à 250 mg/m2) pouvaiententraîner une dysfonction cardiaque avec réduction de lamasse ventriculaire gauche [9—11], ce qui suggère que ladoxorubicine n’est jamais exempte de toxicité cardiaque.

Conclusions

Le taux de survie de la plupart des cancers de l’enfants’est amélioré de facon remarquable au cours des dernièresdécennies [1].

Avec ce succès, il est devenu indispensable de considérerla morbidité et la mortalité associées aux traitements contrele cancer. Les survivants sont en effet à risque de développertoute une série d’effets indésirables [1—3]. Parmi ceux-ci, la cardiotoxicité est l’une des complications chroniquesles plus graves avec un taux de mortalité élevé, persistantmême plusieurs décennies après le traitement.

Dès lors, la réalisation d’enquêtes d’envergure sur leseffets secondaires de la chimiothérapie et de radiothéra-pie est cruciale. À ce jour, il n’y a pas encore beaucoupde grandes études internationales. Il s’agit essentiellementd’études monocentriques, sur un nombre limité de patientsayant été traités pour une pathologie précise, avec des para-mètres de monitoring cardiaque différents et des durées desuivi très variables d’une étude à l’autre. Les résultats deces études sont donc encore difficiles à comparer.

L’éducation des survivants et des professionnels dela santé aux séquelles potentielles des thérapies anti-

cancéreuses demeure essentielle. La recherche clinique doitse concentrer non seulement sur le développement de nou-velles thérapies visant à accroître le taux de survie maiségalement à diminuer la gravité des effets secondaires

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adolescent 87

ardifs. L’avancée des recherches dans l’établissement derofils de risques génétiques combinés à des facteurs deisques cliniques pourrait aider à identifier les patients àaut risque de cardiotoxicité. Le but des traitements futursevraient assurer une vie exempte de séquelles à long termeour chaque enfant diagnostiqué avec le cancer.

éclaration d’intérêts

es auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts enelation avec cet article.

emerciements

e travail a été soutenu par le Fonds national de la recherchecientifique (Grant Télévie - FNRS no 7.4637.09), le Fondsational pour la recherche en cardiologie pédiatrique, laondation « Salus Sanguinis » et le Centre du cancer des cli-iques universitaires Saint-Luc.

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