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BOIS ET FORÊTS DES TROPIQUES, 2009, N° 302 (4) 65 COPRAH ET BIOÉNERGIE / LE POINT SUR… Valorisation flexible du coprah des fruits du cocotier, « arbre de vie » en Polynésie française Photo 1. Une cocoteraie en réhabilitation aux îles Société. Photo A. Liennard. Alain Liennard Cirad Upr Biomasse-énergie 73, rue Jean-François Breton TA B-42/16 34398 Montpellier Cedex 5 France

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Valorisation flexible du coprahdes fruits du cocotier,

« arbre de vie » en Polynésie française

Photo 1.Une cocoteraie en réhabilitation aux îles Société.Photo A. Liennard.

Alain Liennard

CiradUpr Biomasse-énergie 73, rue Jean-François Breton TA B-42/1634398 Montpellier Cedex 5France

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RÉSUMÉ

VALORISATION FLEXIBLE DU COPRAHEN POLYNÉSIE FRANÇAISE

L’essor économique des nations etpays du Pacifique est intimement liéau secteur agricole et en particulier àla commercialisation du coprah, lequels’avère générateur d’emplois et dedevises quand son exportation devientnotable. C’est le cas en Polynésie fran-çaise dont la production de coprahest modeste par rapport à celled’Indonésie, qui assure de l’ordre de30 % de la production mondiale, alorsque les navires qui naguère collec-taient quasiment tous les atolls nepassent plus si les chargements nesont pas importants. Le maintien del’équilibre économique et social danscette région polynésienne dépendaussi de la consommation durable decoprah et de son huile. C’est à cet effetqu’une réflexion la plus innovante pos-sible a été menée pour connaîtretoutes les opportunités d’utilisation del’huile de coprah, en particulier la valo-risation énergétique, génératrice demultiples externalités positives.

Mots-clés : coprah, biocarburant,biocombustible, électrification, déve-loppement durable, développementinsulaire, économie insulaire, MIRAB,économie de rente, Polynésie fran-çaise, Pacifique.

ABSTRACT

FLEXIBLE APPLICATIONS FOR COPRAPRODUCTION IN FRENCH POLYNESIA

Economic development in the Pacificnations and countries is closely linkedto the agricultural sector and espe-cially the copra market, which is capa-ble of generating both employmentand foreign currency when large vol-umes are exported. This is the case inFrench Polynesia, where copra pro-duction is modest compared toIndonesia – which produces some30% of world supplies – but wherethe boats that traditionally picked upcopra from virtually all the atolls nolonger do so unless volumes are large.Maintaining an economic and socialbalance in this Polynesian region alsodepends on sustainable consumptionof copra and coconut oil. This was thecontext of a study that set out to inno-vate as far as possible in seekingevery opportunity to make use ofcoconut oil, and particularly as a bio-fuel, which would potentially generatenumerous positive externalities.

Keywords: copra, biofuel, electrifica-tion, sustainable development,island development, island economy,MIRAB, rent economy, French Poly -nesia, Pacific.

RESUMEN

NUEVAS APLICACIONES FLEXIBLESDE LA COPRA EN POLINESIAFRANCESA

El auge económico de las naciones yregiones del Pacífico está estrecha-mente ligado al sector agrícola y,especialmente, a la comercializaciónde copra, que se revela generadorade empleo y divisas a partir de uncierto umbral de exportación. En laPolinesia Francesa, con una modestaproducción de copra con respecto ala de Indonesia, que produce entorno al 30% de la producción mun-dial, los barcos que antes recolecta-ban casi todos los atolones ya sólopasan si la carga es considerable. Elmantenimiento del equilibrio econó-mico y social en esta región polinesiadepende también del consumo dura-dero de la copra y su aceite. A talefecto, se llevó a cabo una amplia einnovadora reflexión para conocertodos los usos posibles del aceite decopra, especialmente para su aprove-chamiento energético, generador demúltiples externalidades positivas.

Palabras clave: copra, biocarburante,biocombustible, electrificación,desarrollo sostenible, desarrolloinsular, economía insular, MIRAB,economía de renta, Polinesia Fran-cesa, Pacífico.

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Alain Liennard

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Introduction

La Polynésie française soutientla production de coprah pour parer àune migration récurrente des habi-tants des atolls vers Papeete, sa capi-tale. Si l’Huilerie de Tahiti valorise latotalité de la production en huile decoprah principalement exportée, lavolatilité des cours, les nouvellesnormes de transport maritime et leprix des énergies fossiles ont conduitle gouvernement local à mener uneréflexion sur les opportunités quisont offertes par cette huile.

La plupart des îles du milieupolynésien ont des économies derente. Elles exploitent tantôt des res-sources naturelles, tantôt leur posi-tion géostratégique pour en tirer unecontrepartie financière. D’autresadditionnent des rentes qui viennentrégulièrement de leurs compatriotesexpatriés ou encore des subventionsen tant que pays moins avancé.

Entre développement libéral etdéveloppement endogène s’inscritdonc une économie de rente, quisemble porteuse de développementou au moins d’espoirs : le modèleMirab (Migrations, Remittances, Aidand Bureaucraty). Celui-ci concilie ledéveloppement par l’ouverture sur lemonde extérieur avec une certainegarantie de conservation des valeurssocioculturelles. Bertram et Watters(1986) et Bertram (1999) ont décritce modèle.

En 1995, Poirine le résumait ences termes : « Le modèle Mirab peutparaître un moindre mal dans le sensoù l’aide publique extérieure ainsique les envois de fonds des tra-vailleurs émigrés permettent d’obte-nir les biens “occidentaux” convoitéstout en conservant un secteur tradi-tionnel “subventionné”, et en limi-tant au maximum le secteur privécapitaliste, puisqu’il n’est pas néces-saire, compte tenu de l’aide privée etpublique, de dégager un équilibre ducommerce extérieur, donc d’exporterautant qu’on importe. »

Le contexte

La Polynésie française est sou-mise aux conséquences de la fin desessais du Centre d’expérimentationdu Pacifique (Cep). Si la situationtemporaire de la rente atomique apermis l’essor économique, elle anéanmoins entraîné une extinctionquasi irréversible de certaines exploi-tations familiales sur les atolls et desecteurs exportateurs tels que le caféou la vanille. C’est aujourd’hui l’ex-portation de la perle noire à hautevaleur ajoutée qui tente de redresserla situation avec un succès mitigé.

Le secteur traditionnel a perdude son attractivité et la fragilité desatolls du Pacifique incite à une grandeprudence. Tant sur le plan purementéconomique que social ou environne-mental, chaque décision pèse lourde-ment sur l’avenir de ces îles et sur laqualité de vie de ses habitants.

Les chiffres qui émanent de laCommunauté du Pacifique ou Com-mission du Pacifique Sud attestentune montée démographique modestemais régulière dans le territoire. L’em-ploi correspondant devra être assurépour ne pas renforcer les externalitésconsécutives à l’après-nucléaire.

Assurant, avec les îles Tuamotu, lamajeure partie de la production decoprah, la population des îles Mar-quises est de l’ordre de 9 000 habitantset sa croissance n’est que de 0,2 % paran. Cette faible croissance de la popula-tion reflète un déficit migratoire impor-tant, à peine compensé par l’accroisse-ment naturel. Le phénomène est géné-ralisé dans la majorité des atolls.

Outre la production de fruits etlégumes qui ne sont pas facilementtransportables, c’est la récolte tradi-tionnelle du coprah qui ressort commeune solution efficace pour assurer desrevenus attrayants aux habitants deces perles du Pacifique (Meyer, 2007).

Photo 2.Un brûleur fonctionnant à 100 % à l’huile de coprah.Photo A. Liennard.

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À court terme, 5 à 10 ans, lestransferts de la métropole vers laPolynésie française seront la princi-pale source de revenus. À moyenterme, 10 à 20 ans, le tourisme etpeut-être le commerce des perles etd’autres sources encore inexploitées(minerais sous-marins) s’ajouteront àces transferts. Cependant, à long

terme, toutes les nouvelles activitéséconomiques ne seront pas à mêmede garantir à la Polynésie son niveaude vie actuel sans subventions, quellequ’en soit la forme. Outre la pêche etles contrats négociés sur l’étendue dela Zone économique exclusive (Zee), laseule ressource naturelle valorisables’avère être le cocotier (encadré 1).

Le coprah :production

et coûts

Les petites cocoteraies ont desrendements généralement de 0,5-1 tonne (t) de coprah par hectare (ha),30 à 50 fruits par arbre. C’est le cas denombreux sites du Pacifique. La pro-duction d’huile associée est donc pla-cée dans une fourchette de 250 à500 litres (l) par hectare. Des planta-tions bien gérées de cocotiers grandslocaux sélectionnés peuvent atteindredes rendements quatre fois supérieurset des expérimentaux dépassant les6 t/ha de coprah ont été obtenus enCôte d’Ivoire et aux Philippines.

Si l’huile de coprah se heurted’ores et déjà à la concurrence deplus en plus forte de l’huile de pal-miste au niveau mondial, il se pour-rait bien que l’une comme l’autre soittôt ou tard en partie remplacée parles huiles lauriques issues de soja etde Brassica génétiquement modifiés(Prota, 20091).

Cependant, le coco, tout commeson huile, ne sont pas réellementsoumis à concurrence sur les nom-breux atolls car les productions ponc-tuellement faibles et le fort tauxd’isolement de ces morceaux deterres ne motivent plus les collec-teurs de produits tropicaux. Ces fruitssont toujours une ressource, voire laseule, supposée indéfiniment dispo-nible pour la survie des insulaires.Parfois, ils constituent presque laseule espèce à pouvoir être cultivéedans l’écosystème local. Pour lesgrandes cocoteraies, c’est peut-êtrele nouveau marché mondial se déve-loppant en faveur de produits sainset respectueux de l’environnementqui pourrait offrir de nouveauxdébouchés au commerce d’exporta-tion (photo 1).

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Encadré 1.Cocos nucifera et ses applications traditionnelles.

Le cocotier, Cocos nucifera, est originaire des côtes d’Asie tropicale et duPacifique. Il est exploité pour ses cocos, tantôt en cocoteraie organisée, tantôten récolte sur la base d’une repousse naturelle. Il a été surnommé « arbre devie », car c’est une source précieuse d’une multitude de produits très utiles.C’est le coprah, l’albumen du coco arrivé à maturité, qui offre le plus de variétéde produits. L’huile de coprah est extraite de manière traditionnelle en faisantbouillir un mélange de chair et d’eau, puis en recueillant la partie qui surnage.Industriellement, le coprah est décortiqué puis séché pour extraire l’huilecontenue avec des presses le plus souvent mécaniques. L’huile de premièrecatégorie est utilisée en cuisine ou dans la confection de margarine, dematière grasse, de lait condensé, de crèmes glacées et de sucreries. Enrevanche, l’huile de seconde catégorie est transformée en savons, détergents,cosmétiques, shampooings, peintures, vernis et produits pharmaceutiques.Le coprah séché au soleil en atmosphère humide est souvent d’une teneur eneau variable mais assez importante, son transport en cales de navire n’arran-geant rien (photo 5).La technique du séchage au four à bourres et coques permet un meilleurséchage. Les risques d’apparition de l’aflatoxine sont réduits.Le tourteau ou farine de coprah est un bon produit d’alimentation animale.Le lait de coco, mélange de pulpe fraîche râpée et d’eau, est utilisé tradition-nellement pour de nombreux produits alimentaires et pâtisseries, en Afriqueet surtout en Asie. Il est obtenu aussi par pressage à froid de la pulpe fraîche.Il est également vendu en conserve sous forme pasteurisée et homogénéiséeou bien en poudre. Les protéines peuvent être séparées par ultrafiltration etséchées par atomisation, ce qui donne une poudre blanche parfaitementadaptée à l’alimentation des nourrissons (proche du lait maternel). La pulpefraîche, râpée ou émincée, est aussi très utilisée en confiserie, boulangerie etrestauration rapide. La coque du coco peut être transformée en ustensiles pour la maison et enobjets décoratifs, en charbon de bois ou utilisée directement comme combus-tible. La bourre sert à la fabrication de cordages, confrontés à la concurrencedes fibres synthétiques. La bourre remplace quelquefois les fibres minéralesdans les cultures hydroponiques.Les feuilles sont utilisées en couverture de toitures et permettent la confectionde nattes, de paniers, de sacs et de chapeaux.Les troncs sont employés pour la fabrication de meubles ou des structures desfarés. Le taux de silice contenu dans ce bois fibreux nécessite des outils decoupe en carbure. L’arbre est également ornemental, devant une mer bleue ilsymbolise les tropiques.L’huile de coprah, issue principalement d’une extraction mécanique, est valo-risée au sein de petites structures en tant que biocarburant ou biocombustiblequi concourt à la rentabilisation de l’ensemble des installations de triturationet conditionnement. Depuis les années 1980, la possibilité de combustion del’huile de coprah a été mise à profit sur des sites insulaires du Pacifique pourla fourniture d’énergie et en particulier d’électricité rurale.

1 Prota est une fondation internationalesans but lucratif. Son objectif est de fairela synthèse de l’information disperséesur environ 7 000 plantes utiles de l’Afriquetropicale et de fournir un large accès à cetteinformation par le moyen de bases dedonnées sur le web, de livres, de cédéroms et de produits spéciaux (www.prota.org).

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Les quantités de coprah produitesdans les îles ne mettent pas en dangerl’équilibre alimentaire local (tableau I).L’autoconsom mation ne dépassejamais le tiers de la production (commec’est le cas à Vanuatu où c’est le soldequi est vendu et répertorié dans les pro-ductions). La majorité des producteursse trouvent sur des atolls isolés et lesproductions de coprah sont ainsi trèsmorcelées, et les bateaux qui naguèrecollectaient le coprah ne s’arrêtent plusdepuis longtemps. L’exportation decoprah ou d’huile deviendra un pro-blème au vu des faibles quantités et àcause du renchérissement des trans-ports intercontinentaux.

En 2008, la production de coprahest toujours la première de Polynésieen volume. L’agriculture polynésienneoccupe moins de 10 % de la popula-tion active et ne couvre que 20 % desbesoins alimentaires. Les exploita-tions sont de petite taille et la superfi-cie des terres exploitées est limitéeavec 25 648 ha, soit environ 70 % dela surface agricole utile. Elles ne repré-sentent que 7 % des terres émergées.L’élevage est peu important enPolynésie française. La production deviande est insuffisante et le territoiredoit faire appel à l’importation pourcouvrir les besoins de la population.

En 2008, la volatilité des coursdu pétrole a eu pour conséquence lahausse du prix du fioul lourd à unniveau jamais atteint et le gazole estdevenu un produit extrêmement cherpour les transports routiers et pourtous les autres utilisateurs. Une sub-stitution sera sans doute irréversiblecar le pétrole se raréfiera, même si laraison de son prix actuel n’est pas larareté. Son prix d’équilibre devraitsuivre la règle de Hotelling (1931).

Il est regrettable que la produc-tion d’huile de coprah ne soit pas dumême ordre de grandeur que laconsommation de fioul lourd en Poly-nésie française. Cependant, ce faitdevrait permettre de renforcer nota-blement la production de coprah.

Une réelleinnovation :

la valorisationflexible du coprah

Le coprah assure un moyen desubsistance à environ 12 000 per-sonnes. Il bénéficie d’une subventiontotale de près de 8 millions d’eurospermettant le maintien de la popula-tion active dans ce secteur, particu-lièrement vital aux îles Tuamotu etaux îles Marquises.

Selon les statistiques del’Huilerie de Tahiti, la productionrecord en Polynésie fut de 22 349 ton -nes en 1975.

En comptant les cocoteraies àréhabiliter et les espaces dispo-nibles, il est tout à fait possible dedoubler ou tripler la production pré-sente, avec des retombées non négli-geables sur l’emploi.

L’huile de coprah est déclinéedepuis une dizaine d’années en huilebrute pour l’export et en huile raffinéepour la fabrication du Monoï (appella-tion d’origine « Monoï de Tahiti »).

La situation étant posée commesérieuse à l’export, le gouvernementpolynésien et l’Huilerie de Tahiti ontpris une décision judicieuse en diver-sifiant le plus possible les ouverturesoffertes à l’huile de coprah.

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Tableau I.Répartition de la production de coprah en 2007.

Lieu de production Production 2005 en kilogrammes payés à quai Motu Uta (Papeete)

Australes 187 300

Maiao 398 860

Moorea 9 298

Tahiti 14 331

Total îles du Vent 422 489

Bora-Bora 33 149

Huahine 307 858

Maupiti 41 368

Mopelia 23 532

Raiatea 160 832

Scilly, Bellings 56 448

Tahaa 1 008 521

Total îles Sous-le-Vent 1 631 708

Marquises 1 096 895

Tuamotu 6 574 760

Total îles Tuamotu-Gambier 6 574 760

Total Polynésie française 9 913 152

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Dès 2005, dans le cadre dudéveloppement des énergies renou-velables, une commission « biocar-burants » s’est intéressée aux utilisa-tions énergétiques possibles del’huile de coprah, en s’appuyant surl’expertise issue de la filière coprah-énergie en Nouvelle-Calédonie oùdifférents moteurs diesel fonction-nent depuis 1994 à l’huile de coprahpure dans différentes installations,dont Enercal, le principal fournisseurd’électricité local (près d’un méga-watt au total). Cette expertise a per-mis de déterminer les axes durablesles plus raisonnables pour l’utilisa-tion énergétique de l’huile de coprah.

Si les cours des carburants etcombustibles fossiles (qui ne sontpas raffinés localement) flambent, ilsera possible d’utiliser l’huile en sub-stitution. Elle pourra alors être appli-quée en tant que source énergétiquepour des moteurs ou des brûleurs.

Si les applications en moteursont démontré une parfaite durabilitéau sens technique, un brûleur expéri-mental « Babcock » a été installé àl’Huilerie en 2007 pour alimentertoute la trituration en vapeur souspression. Un standard de qualité del’huile a été créé à cet effet, pour qu’ilassure la fourniture tout au long del’année (photo 2).

Une demande récurrente dansles îles du Pacifique concerne l’utili-sation de l’huile en circuit court pourl’électrification rurale.

Les résultats de la premièreexpertise menée sur les atolls n’inci-tent pas pour l’instant à se dirigerdans cette voie, pour plusieurs rai-sons. En effet, les situations rencon-trées sont très diverses et on peutnoter les principaux écueils rencon-trés. Dans certains cas, les atolls nepratiquent pas la récolte du coprah etil serait nécessaire de réhabiliter la

cocoteraie avant toute chose. Dansd’autres cas, la population est peuimportante et une tentative de récoltepour une trituration locale rencontre-rait tous les obstacles liés à la désé-conomie d’échelle et en particulierles problèmes de forte variabilité dela qualité de l’huile produite.

Le risque le plus important quipourrait être consécutif à une tentativeprésente de mise en place d’un circuitcourt d’électrification insulaire est lemanque de fret à transporter par lesgoélettes qui assurent le ravitaillementdes atolls. Si le seul chargement auretour sur Papeete venait à ne plusexister, sans compter le manque detransport de gazole à l’aller, ces ravi-tailleurs (les goélettes) supprimeraientpeut-être la ligne ou modifieraient leurpériodicité de passage de manière àgarder un minimum de rentabilité.Nous assisterions alors à une montéesignificative de l’indice d’isolement.

Photo 3.Maupiti, archipel de la Société, îles Sous-le-Vent, Polynésie française.Photo A. Liennard.

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Les premières mises en place quipourraient avoir lieu dans le futurdevront donc être faites sur des îles quisoient d’une taille critique minimum.

Les applications énergétiquesde l’huile de coprah polynésienneseront effectuées à court terme surTahiti, en profitant d’une élaborationindustrielle de l’huile qui pourra êtredéclinée en différentes qualités sinécessaire :▪ une qualité brute pour l’exportation estla production principale de l’huilerie ;▪ une qualité raffinée pour le Monoïest en amélioration permanente ;▪ une qualité combustible pour lesbrûleurs définie en 2007 ;▪ une qualité carburant pour l’alimen-tation de groupes électrogènes défi-nie depuis 2008. Celle-ci reprendpour partie les standards élaboréspar le Cirad pour l’utilisation enmoteurs agro-industriels.

Il est probable qu’il faudrarecourir à des mélanges à faibleteneur faute de production suffi-sante, si l’économie du territoire pas-sait un jour par la consommationd’huile de coprah comme carburantdes moteurs semi-rapides del’Électricité de Tahiti (Edt). Wartsilä,un des leaders mondiaux en fabrica-tion de moteurs de grande puissance,fait fonctionner des moteurs dumême type que ceux de l’Edt en Italiedepuis deux ans avec de l’huile decolza et de l’huile de palme.

Si le prix du baril venait à monterencore au-dessus de son prix recordde 140 dollars et si les cours desoléagineux confirmaient l’inflexionnaissante du deuxième trimestre2008, il pourrait être intéressant devaloriser toute la production d’huilelocalement sous forme d’huile raffi-née pour Monoï (haute valeur ajou-tée) et de carburant pour les grosmoteurs semi-rapides de l’Edt.

Les installations identifiéescomme potentiellement clientes del’huile de coprah énergétique sontles suivantes :▪ les brasseurs de Tahiti qui consom-ment annuellement 1 500 tonnes defioul lourd ;

▪ l’Huilerie elle-même qui utilise déjàl’huile comme combustible ;▪ les transformateurs de viandes ;▪ l’Edt qui produit l’électricité deTahiti mais également d’une majoritéd’îles en Polynésie ;▪ les installations de productiond’électricité des îles importanteset/ou proches de Papeete. Le cas deMaupiti a été étudié en 2006 car à lafois cette île est proche de Papeete,l’électricité est produite par l’Edt etune réhabilitation de la cocoteraieest programmée (photo 3).

Les débouchés industriels étantlargement supérieurs à la productionactuelle d’huile de coprah, il n’a passemblé pertinent de regarder plus endétail les applications (déjà connues)de l’huile en véhicules captifs. Les véhi-cules particuliers ne sont pas envisagés.

Dans le but de préparer l’infor-mation et sans doute la formationfuture d’opérateurs de maintenancesur les groupes électrogènes utilisantde l’huile de coprah en Polynésie, unpremier groupe de démonstration de30 kilovoltampères (kVA) vient d’êtreinstallé à l’Huilerie de Tahiti (photo 4).

Suite duprogramme de

développement del’huile de coprah

énergétique et proposition

d’étudeIl devient maintenant pertinent

de faire une évaluation économiquebasée sur les différents scénarios lesplus vraisemblables en matière desubstitution en fonction des marchésdu pétrole et des oléagineux, pour lecas de la Polynésie.

Une étude de la sorte est d’im-portance pour la prise de décision enmatière de diversification. Un regardapprofondi sur la dynamique desmultiplicateurs de cette mésoécono-mie est également indispensablepour connaître les impacts d’unepoussée du développement du sec-teur agricole polynésien.

Photo 4.Un groupe électrogène de 30 kVA fonctionnant à 100 % à l’huile de coprah. Photo A. Liennard.

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Plus globalement, il est ques-tion de savoir si une aide renforcéedu gouvernement pour une augmen-tation notable de la production decoprah et sa « détaxation » commecarburant ou combustible auront unimpact socio-économique positif surle pays.

L’évaluation économique seraaccompagnée par la mise en placed’un modèle d’équilibre général cal-culable (Megc) tel que celui utilisé en2000-2003 pour l’étude de l’impactdes projets miniers sur la Nouvelle-Calédonie, et qui soit adapté à l’éco-nomie de la Polynésie.

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Photo 5.Un séchoir solaire à Maupiti.Photo A. Liennard.

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