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RÉSUMÉ ANALYTIQUE
8
Liban: Impact Économique et Social du Conflit Syrien
Résumé Analytique
i. À la demande du Gouvernement libanais, la Banque mondiale, en collaboration avec les
Nations Unies, l’Union Européenne et le Fonds Monétaire International, a effectué une étude rapide de
l’impact économique et social (ESIA) du conflit syrien sur le Liban durant la période 2012-2014. La
phase actuelle (première) du rapport se limite à la quantification de l’impact du conflit et des besoins de
stabilisation au Liban. Sur la base des priorités définies par les autorités, une deuxième phase portera sur
l’identification de recommandations pratiques, de programmes et de projets visant à atténuer l’impact du
conflit syrien.
ii. Cette étude rapide d’impact économique et social diffère grandement de l’évaluation
typique des effets et des besoins en raison de la nature du choc qui secoue le Liban. Les principales
différences tiennent au fait que le choc est 1) continu — le Liban a subi et continue de subir les
répercussions d’un conflit dans un pays voisin, mais ne se trouve ni dans une situation d’après-catastrophe
ni d’après-conflit ; 2) d’une ampleur incertaine, à la fois en termes de durée et de taille — les
répercussions commencent de manière diffuse, mais nul ne sait quand elles prendront fin, et l’ampleur du
choc dépend en grande partie de l’intensité du conflit (en cours) en Syrie ; 3) temporaire — le Liban n’est
pas soumis à un choc permanent, comme dans le cas d’une catastrophe naturelle ou d’une guerre
(directe) ; 4) sans dégâts substantiels sur l’infrastructure, le logement, les équipements ou le capital
humain libanais. Les pertes se dénombrent plutôt en termes de flux, comme pour la baisse de l’activité
économique, du revenu, de l’accès et de la qualité des services publics. L’étude d’impact économique et
social demandée par le Gouvernement libanais constitue une évaluation rapide ayant été réalisée dans des
délais extrêmement brefs, compte tenu de la détérioration actuelle de la situation. Ainsi, tout en examinant
l’impact économique global (net) de façon approfondie, ce rapport ne porte que sur quelques secteurs
lourdement affectés. Il n’aborde pas les répercussions en matière de sécurité qui sont le domaine
d’évaluation d’autres institutions et organismes spécialisés.
iii. Les retombées initiales du conflit syrien étaient surtout d’ordre humanitaire et associées à
l’afflux de réfugiés au Liban. Depuis le déclenchement de la crise syrienne, le Liban a généreusement
maintenu une politique d’ouverture des frontières et a permis aux réfugiés de s’installer temporairement,
mais librement sur l’ensemble de son territoire. Pour l’aider à faire face à la dimension humanitaire de
l’arrivée des réfugiés, la communauté internationale a aussitôt engagé des opérations dans le pays par le
biais du HCR et d’organismes partenaires des Nations Unies. Vers août 2013, le nombre de réfugiés avait
considérablement augmenté — pour atteindre 914 000 personnes représentant 21 pourcent de la
population libanaise d’avant la crise — suscitant la plus importante intervention d’urgence humanitaire du
genre depuis de nombreuses années. Compte tenu de l’évolution actuelle de la situation, 1,3 million de
réfugiés du conflit syrien pouraient entrer sur le territoire libanais d’ici la fin 2013 (selon le 5e Plan
régional d’intervention de juin 2013). Les prévisions pour 2014 présentent un degré élevé d’incertitude.
Pour faire face à cette situation, deux hypothèses sont envisagées : une hypothèse de base prévoyant 1,6
million de réfugiés d’ici la fin 2014 (37 pourcent de la population libanaise d’avant la crise) et une
hypothèse moins probable/d’impact plus important (scénario d’afflux élevé de réfugiés) avancée à des
fins d’illustration.
iv. Le conflit en Syrie étant entré dans une escalade, ses retombées sur le Liban ont rapidement
dépassé le volet humanitaire pour atteindre les sphères économique et sociale, où elles sont
importantes, négatives et croissantes (Tableau 1). En résumé, le rapport relève que durant la
période 2012-2014, le conflit pourrait 1) ralentir la croissance du PIB réel de 2,9 points de pourcentage
chaque année, entraînant un énorme manque à gagner en termes de salaires, de recettes, d’impôts ou de
consommation privée et d’investissements ; 2) faire basculer environ 170 000 Libanais dans la pauvreté
(en plus du million qui vit actuellement en dessous du seuil de pauvreté) et doubler le taux du chômage
RÉSUMÉ ANALYTIQUE
9
qui s’établirait à plus de 20 pourcent, surtout chez les jeunes non qualifiés ; et 3) amputer les recettes
fiscales de l’État de 1,5 milliard de dollars tout en augmentant parallèlement les dépenses de 1,1 milliard
de dollars en raison de la forte progression de la demande de services publics, ce qui porterait l’impact
total sur le budget à 2,6 milliards de dollars. Dans tous les principaux services publics, cette hausse de la
demande est en partie satisfaite actuellement par la diminution aussi bien de l’accès que de la qualité de
prestation de services publics. Selon les estimations, il faudra dépenser 2,5 milliards de dollars de plus
pour parvenir à un stabiliser, autrement dit rétablir l’accès et la qualité des services publics à leur
niveau d’avant le conflit syrien.
Plus précisément :
v. Le conflit en Syrie — un pays qui entretient des liens historiques, sociaux et économiques
étroits avec le Liban — a des répercussions profondément néfastes sur l’économie libanaise. Selon
les estimations, la croissance libanaise a diminué de 2,9 points de pourcentage, ce qui se traduit par des
milliards de dollars de manque à gagner résultant de la baisse de l’activité économique durant la période
d’étude de 2012-2014 — Tableau 1. Le plus grand impact se fait ressentir dans les retombées de la crise
en matière d’insécurité et d’incertitude, minant ainsi de manière considérable et négative la confiance des
investisseurs et des consommateurs. La baisse de l’activité économique qui en résulte réduit les recettes
de l’État, une situation qui, combinée à la demande croissante des services publics générée par l’afflux
massif de réfugiés, grève les finances publiques, par ailleurs structurellement faibles, du Liban.
vi. L’impact du conflit syrien est aussi particulièrement visible dans le secteur du commerce
international, notamment des biens et services, et surtout dans le vaste secteur touristique. L’économie libanaise est caractérisée par un important secteur du commerce et est très exposée de la
Syrie, non seulement en raison de son rôle comme partenaire commercial, mais aussi parce qu’un volume
considérable du commerce libanais transite par la Syrie, et que la déstabilisation de la Syrie menace les
exportations de services libanais, particulièrement le tourisme – le nombre de visiteurs internationaux n’a
cessé de décroître depuis 2010. Le premier semestre 2013 a accusé une baisse drastique des flux
commerciaux, notamment des produits alimentaires et des biens de consommation. Autrefois importateur
net traditionnel de produits alimentaires en provenance de la Syrie, le Liban a enregistré son premier
excédent de la balance commerciale dans cette filière en 2012. Cependant, les perturbations des échanges
tirent vers le haut les prix intérieurs de certaines denrées de base comme la farine de blé, ce qui a une
incidence majeure sur les conditions de vie, surtout pour les ménages pauvres.
vii. Déjà structurellement faibles avant la crise syrienne, les finances publiques libanaises sont
actuellement mises à rude épreuve, de sorte qu’une augmentation du déficit de l’ordre de
2,6 milliards de dollars est prévue pendant la période 2012-2014 — (Tableau 3, prévisions d’afflux
des réfugiés fondées sur une hypothèse de base). Après cinq années de croissance robuste, le Liban a vu
son ratio dette/PIB baisser de manière substantielle, passant d’environ 180 pourcent en 2006 à
134 pourcent à la veille du conflit syrien en 2011. L’amélioration des finances publiques du pays était
toutefois due en grande partie à une embellie conjoncturelle, les réformes structurelles envisagées dans le
cadre de la Conférence de Paris III n’étant pas encore intégralement mises en œuvre. Le conflit syrien met
à rude épreuve les finances publiques libanaises, dont les difficultés augmentent rapidement et de façon
insoutenable, au regard des faiblesses budgétaires d’avant la crise. Du côté des recettes, on estime que le
conflit syrien va entraîner une baisse de 1,5 milliard de dollars des recettes fiscales entre 2012 et 2014, en
raison à la fois de son impact direct sur les secteurs clés (tourisme par exemple) et des conséquences
indirectes marquées par la contraction de l’activité économique. D’un autre côté, les dépenses budgétaires
totales du Gouvernement devraient augmenter d’un montant pouvant atteindre 1,1 milliard de dollars sur
la période 2012-2014, à cause du conflit syrien et de la forte progression connexe de la demande et de la
consommation des services publics par les réfugiés en provenance de Syrie. L’élargissement du déficit
budgétaire, la faiblesse de la croissance économique et la hausse de la prime de risque sur les taux
RÉSUMÉ ANALYTIQUE
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résultant du conflit syrien, sont tous des facteurs ayant interrompu les progrès remarquables accomplis par
le Liban au titre de la réduction de son ratio d’endettement ; pour la première fois depuis 2006, le ratio
d’endettement du pays est remonté en 2012, et les prévisions font état d’une progression supplémentaire
jusqu’en 2014.
viii. Durant la période 2012-2014, on estime l’incidence budgétaire du conflit syrien sur la santé,
l’éducation et la protection sociale entre 308 et 340 millions de dollars, alors que 1,4 à 1,6 milliard
de dollars (3 à 3,4 pourcent du PIB) seront nécessaires pour revenir à une situation de stabilisation
— autrement dit, rétablir l’accès et la qualité de ces services à leur niveau d’avant le conflit. Il faudra
également 166 à 242 millions de dollars pour créer des emplois à court terme (tableaux 1 et 2). Selon les
estimations, le conflit syrien a une incidence profondément néfaste sur la pauvreté, les moyens de
subsistance, la santé et les conditions de vie des Libanais. D’ici fin 2014, quelque 170 000 Libanais
supplémentaires auront basculé dans la pauvreté (en plus du million qui vit actuellement en dessous du
seuil de pauvreté). De plus, 220 000 à 324 000 Libanais supplémentaires devraient se retrouver au
chômage, surtout des jeunes non qualifiés, doublant ainsi le taux de chômage qui s’établirait à plus de
20 pourcent. L’arrivée des réfugiés syriens perturbe davantage le secteur des services sociaux publics déjà
fragilisé, alors même que les tensions sociales s’intensifient entre réfugiés et Libanais.
La hausse de la demande de services de santé générée par le conflit syrien grève le système
de santé libanais. Les retombées du conflit syrien sur le système de santé libanais se manifestent
comme suit : 1) Une demande accrue des services de santé ; 2) Une accumulation des impayés du
ministère de la Santé publique (MOPH) auprès des hôpitaux sous contrat ; 3) Un déficit de
professionnels de la santé comme les médecins spécialistes et les infirmiers ; 4) Une flambée des
maladies transmissibles (la prévalence de la rougeole a par exemple augmenté entre 2012 et 2013,
passant de 9 à 1 456 cas) et l’apparition de nouvelles maladies comme la leishmaniose (420) cas ;
et 5) augmentation de risques d’épidémies de maladies d’origine hydrique, de rougeole et de
tuberculose, entre autres. L’encombrement, le manque d’installations d’approvisionnement en eau
et d’assainissement, et d’autres conditions ambiantes déplorables augmentent également les
risques d’infection, en témoigne l’apparition de poux et de gale parmi les réfugiés. Ainsi, la
demande des services de santé s’est intensifiée durant les six à douze derniers mois — en
décembre 2012 uniquement, 40 pourcent des consultations de santé primaire concernaient des
réfugiés syriens. Qui plus est, la forte demande de soins hospitaliers créé des encombrements
dans les hôpitaux et entrave l’accès aux soins, avec pour conséquences une pression financière
sur le secteur hospitalier, le renchérissement des coûts et des pénuries de médicaments. À moyen
et à long terme, l’impact du report des soins de santé pourrait se traduire par l’élévation du niveau
général de morbidité, particulièrement chez les personnes vulnérables. L’impact budgétaire est
estimé quant à lui à 38 millions de dollars en 2013 et 48 à 69 millions de dollars en 2014, en
fonction du nombre de réfugiés. Le coût des soins de santé nécessaires pour ramener le système à
ses niveaux d’accès et de qualité d’avant l’arrivée des réfugiés est estimé à 177 millions de
dollars en 2013 et 216 à 306 millions de dollars en 2014, en fonction des prévisions concernant le
nombre de réfugiés.
L’accroissement de la demande de services d’éducation par les enfants réfugiés syriens
entraîne une majoration des coûts budgétaires, affecte négativement la qualité de
l’enseignement public et génère un besoin considérable d’éducation non formelle. Avant le
déclenchement du conflit syrien, les inscriptions au primaire s’étaient stabilisées à plus de
90 pourcent durant une décennie, et l’égalité était atteinte entre garçons et filles. Si les écoles
publiques n’accueillaient que 30 pourcent du nombre total d’élèves, elles s’occupaient surtout
d’enfants de milieux socioéconomiques modestes. Depuis le début du conflit syrien et l’arrivée de
réfugiés au Liban, le ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur (MEHE) a ouvert
son réseau d’écoles primaires aux réfugiés. En 2012, 40 000 enfants réfugiés fréquentaient les
RÉSUMÉ ANALYTIQUE
11
écoles publiques, pour un coût budgétaire de 29 millions de dollars. Les bailleurs de fonds par
ailleurs ont apporté 24 millions de dollars à travers des institutions onusiennes pour financer des
coûts additionnels que le ministère aurait dû supporter autrement. Ces coûts budgétaires devraient
toutefois continuer à augmenter : l’année académique prochaine, 90 000 réfugiés devraient
s’inscrire à l’école et, d’ici 2014, ils atteindraient 140 000 à 170 000. Ce dernier chiffre
représente 57 pourcent des élèves des écoles publiques au Liban. Par conséquent, les besoins de
stabilisation du ministère de l’Éducation s’élèvent à 183 millions de dollars en 2013 et varient
entre 348 et 434 millions de dollars en 2014, selon l’hypothèse d’afflux des réfugiés. Ces
montants ne prennent toutefois pas en compte les 65 pourcent de réfugiés qui ne devraient pas
accéder à des écoles de type classique, créant de ce fait un besoin considérable d’éducation non
formelle ou hors des salles de classe, nécessaire pour empêcher que les enfants ne se retrouvent
sur le marché du travail et d’autres conséquences sociales négatives.
À cause du conflit syrien, on s’attend à ce que quelque 170 000 Libanais supplémentaires
basculent dans la pauvreté d’ici 2014, alors que les personnes déjà pauvres s’enfoncent
davantage dans la misère. Avant le déclenchement du conflit syrien, la pauvreté était importante
au Liban, et les disparités de conditions de vie marquées d’une région à l’autre. On estimait à près
d’un million le nombre de Libanais pauvres (vivant avec moins de 4 dollars par jour). Les filets
de protection sociale étaient limités, fragmentés et mal ciblés, raison pour laquelle le ministère
des Affaires sociales (MOSA) était en passe de réformer son système de protection sociale.
Jusqu’à présent, le MOSA a relevé une hausse de 40 pourcent de l’utilisation de ses programmes
sanitaires et sociaux. Il faudra 176 millions de dollars d’ici la fin 2014 pour stabiliser la situation,
dont plus de 50 millions devraient servir à étendre le Programme national de lutte contre la
pauvreté à plus de Libanais pauvres et vulnérables.
Les retombées du conflit syrien exacerbent les difficultés sur un marché du travail déjà sous
pression, et devraient entraîner une hausse du chômage et le renforcement du secteur
informel. Le marché du travail au Liban rencontrait déjà de graves difficultés avant la crise
syrienne. Des taux de chômage élevés coexistaient avec des décalages entre l’offre et la demande
et une forte prévalence d’emplois de qualité médiocre et peu rémunérateurs. L’arrivée des
réfugiés syriens devrait entraîner une augmentation de 30 à 50 pourcent de la main-d’œuvre
disponible — ce qui devrait surtout affecter les femmes, les jeunes et les travailleurs non
qualifiés. Une telle hausse de demandeurs d’emploi en période de baisse de l’activité économique
devrait avoir une incidence considérable sur le marché du travail. Le chômage et le travail
informel pourraient enregistrer chacun un taux d’augmentation pouvant atteindre 10 pourcent de
l’emploi total. Il faudrait 166 à 242 millions de dollars pour stabiliser la situation en appliquant
un éventail complet de programmes d’intervention directe sur le marché du travail pour améliorer
les moyens de subsistance et les perspectives de revenu à court terme.
ix. Durant la période 2012 à 2014, le coût budgétaire du conflit syrien sur les infrastructures
est estimé à 589 millions de dollars, alors que 1,1 milliard de dollars seraient nécessaires pour
stabiliser ce secteur, dont 258 millions de dollars pour les dépenses de fonctionnement (selon
l’hypothèse d’afflux de base). L’infrastructure du pays (entendue comme incluant l’eau et
l’assainissement, les services municipaux, l’électricité et le transport pour les besoins du présent rapport),
qui était déjà sérieusement mise à mal, n’était pas préparée à faire face à une utilisation accrue résultant
de l’augmentation considérable du nombre de réfugiés. Déjà minés par des contraintes de ressources et de
capacités, les administrations et les établissements locaux et municipaux sont lourdement affectés par la
crise, eux qui doivent à présent étendre les services de base et satisfaire les besoins immédiats aussi bien
des réfugiés que de la population hôte. Les tableaux 1 et 2 présentent une répartition sectorielle de
l’évaluation de ces impacts et des besoins de stabilisation. Des tableaux détaillés recensant les différentes
RÉSUMÉ ANALYTIQUE
12
composantes d’évaluation de l’impact et des besoins de stabilisation sont inclus au début de chaque
chapitre consacré à un secteur.
Peinant déjà avant la crise à établir un équilibre entre l’augmentation des
approvisionnements et la gestion de la demande, les réseaux d’approvisionnement en eau et
d’assainissement doivent désormais faire face à une demande additionnelle d’eau estimée à
26,1 millions de m3/an, ce qui équivaut à 7 pourcent de la demande d’avant la crise. L’impact
budgétaire cumulé sur la période 2012-2014 se monte à près de 18 millions de dollars (prévisions
d’afflux de base). Entre 2012 et 2014, on estime qu’il faudra 340 à 375 millions de dollars pour
des interventions de stabilisation destinées à ramener les services d’approvisionnement en eau et
d’assainissement à leurs niveaux d’avant la crise pour les populations hôtes et les réfugiés. Il
s’agit notamment des services suivants : 1) interventions d’aide humanitaire comme la
distribution de l’eau en bouteille et dans des citernes, de kits de désinfection au chlore et de
réservoirs de stockage aux populations les plus vulnérables ; 2) coûts additionnels d’équipement,
d’exploitation et d’entretien, fourniture d’équipements urgents et investissements additionnels à
court terme pour réhabiliter les dispositifs d’approvisionnement en eau ; et 3) accélération des
investissements et des réformes institutionnelles dans le secteur des infrastructures —
installations de stockage et de transfert, remise en état et remplacement du réseau de distribution,
traitement de l’eau et des eaux usées, et expansion et amélioration des systèmes d’irrigation.
L’accroissement soudain et rapide de la demande et de l’utilisation des systèmes de gestion
des déchets solides et des services municipaux par les réfugiés syriens entraîne une baisse
tangible du niveau et de la qualité des prestations. Les collectivités locales et les municipalités
libanaises dépendent largement des transferts de l’administration centrale, ont une base étroite de
recettes locales et des besoins d’investissement accumulés qui dépassent de loin les ressources
disponibles. La production de déchets solides a doublé dans plusieurs localités, contribuant à la
contamination des eaux souterraines, la pollution des ressources en eau et la propagation de
maladies d’origine hydrique. Selon les prévisions, les municipalités devraient enregistrer une
baisse importante aussi bien de leurs recettes que de leurs dépenses en 2013 et 2014, ce qui va
réduire davantage leur capacité à fournir des services de base et à financer l’entretien minimal de
leurs installations déjà vétustes. L’impact budgétaire cumulé sur la période 2012-2014 atteint
71 millions de dollars (hypothèse d’afflux de base). On estime qu’il faudra 193 à 206 millions de
dollars pour les interventions visant à stabiliser le secteur municipal entre 2012 et 2014, y
compris notamment : 1) la fermeture et la réhabilitation des décharges ouvertes et non contrôlées
de déchets ménagers ; 2) la mise en place d’unités de compostage, de séparation et
d’enfouissement ; et 3) la fourniture d’une aide financière aux municipalités hôtes pour couvrir
les dépenses additionnelles d’investissement et de fonctionnement escomptées.
La demande accrue d’électricité résultant de l’afflux de réfugiés syriens est estimée à
213 mégawatts (MW) d’ici à la fin 2013, et de l’ordre de 251 à 362 MW en fin 2014, selon les
prévisions d’afflux de réfugiés. Même avant le déclenchement de la crise syrienne, le secteur de
l’électricité au Liban avait une capacité installée insuffisante, un déficit d’efficacité, des pertes
importantes et des carences en termes d’infrastructures qui se traduisaient par un manque de
fiabilité, des niveaux d’approvisionnement insuffisants et des délestages considérables. Le coût
budgétaire actuel de l’approvisionnement des réfugiés en électricité est estimé à 170 millions de
dollars pour 2013 et 314 à 393 millions de dollars pour 2014, en fonction des prévisions d’afflux
de réfugiés. Pour revenir aux niveaux de services offerts aux populations libanaises avant la crise
et satisfaire les besoins des réfugiés, les interventions requises sont, entre autres : 1) des
investissements dans la capacité de production et les réseaux associés de transmission et de
distribution ; et 2) le renforcement des capacités institutionnelles et l’assistance technique pour la
RÉSUMÉ ANALYTIQUE
13
préparation et la mise en œuvre de projets. On estime entre 310 et 440 millions de dollars le
montant des financements requis d’ici la fin 2014 pour les interventions de stabilisation.
Dans les régions accueillant un nombre important de réfugiés comme Akkar, Zahle et
Ba’albeck, le trafic va plus que doubler sur certains axes routiers, suscitant des accidents et
la dégradation rapide du réseau. D’une manière générale, le réseau de transport libanais est
dans un état médiocre et délabré et a dépassé le seuil de saturation, particulièrement dans la zone
du Grand Beyrouth. Si la crise syrienne n’a pas eu d’impact budgétaire direct sur les dépenses de
l’État dans le secteur du transport, ses retombées sont néanmoins les suivantes : 1)
l’accroissement de l’usure de la route et du réseau de transport ; 2) l’augmentation substantielle
du volume du trafic entraînant des embouteillages ; et 3) la quasi-interruption du secteur du
transit libanais en plein essor, particulièrement l’activité de fret. Dans la zone du Grand Beyrouth,
le trafic va connaître une augmentation de 15 à 25 %, ce qui pourrait réduire les vitesses et
rallonger la durée des voyages d’environ 20 à 30 % aux heures de pointe. Les services de
transport de transit ont rétréci de plus de 65 % à la faveur de la crise, notamment le camionnage
libanais. Pour rétablir les performances du secteur du transport à leurs niveaux d’avant la crise, il
faut investir entre 246 et 525 millions de dollars durant la période 2013-2014, selon les
hypothèses respectives de faible et fort afflux de réfugiés. Ces investissements peuvent être
regroupés dans les catégories suivantes : 1) préservation du patrimoine, dont entretien accru des
routes ; 2) augmentation des capacités, notamment par la reconstruction, l’élargissement et
l’expansion du réseau ; 3) solutions de transport public comme le transport de masse.
Pour conclure :
x. Les effets et les coûts de stabilisation importants qui ne cessent d’augmenter sont insoutenables
au regard des faiblesses budgétaires du Liban et doivent faire l’objet de mesures immédiates. Avec un
ratio d’endettement de 134 pourcent du PIB en 2012 et un déficit budgétaire global de 8,6 pourcent du
PIB, le Liban ne peut pas — et ne devrait pas être tenu de — supporter tout seul et de façon continue
l’impact et les coûts de stabilisation décrits plus haut.
xi. Qui plus est, le conflit syrien a plus généralement mis à mal le tissu social et l’équilibre
intercommunal déjà fragiles au Liban. Comme on peut le voir tout au long du rapport, l’encombrement,
la saturation des services de base et la concurrence pour l’emploi figurent parmi les causes profondes de
la détérioration des relations sociales entre les populations hôtes et les réfugiés. Pour réduire les
conséquences négatives de cette crise sur les plans économique et social, il importe de préserver et
promouvoir le renforcement de la cohésion sociale.
xii. Bien que le présent rapport vise à quantifier l’impact et les coûts de stabilisation du conflit
syrien, plusieurs options pourraient diminuer considérablement les coûts imposés au Liban. Celles ci
incluent des financements externes de la communauté internationale et l’adoption de réformes en vue
d’améliorer l’efficacité des prestations des services publics. Dans la pratique, il faudra probablement
combiner plusieurs options. Une cohésion sociale durable doit aussi être recherchée à travers
l’investissement dans des mécanismes, des procédures et des capacités d’atténuation des conflits à tous
les niveaux, et par le biais de programmes qui tiennent compte des conflits.
RÉSUMÉ ANALYTIQUE
14
Tableau 1 : Évaluation quantitative de l’impact du conflit syrien sur le Liban
Source : Calculs et prévision de la Banque mondiale. 1/Aucune hypothèse haute n’a été prise en compte pour la pauvreté et les filets de sécurité sociale en 2014.
2012 2013
Données
cumulées pour
2012/14
Afflux des
réfugiés -
hypothèse de
base
Afflux des
réfugiés -
hypothèse
haute
Afflux des
réfugiés -
hypothèse de
base
Évaluation de l'impact 94 343 475 745 781 984 973 041 1 352 072
L'impact sur le développement humain et social 62 032 162 754 238 801 287 807 463 587
Santé 9 088 57 999 71 688 103 705 138 775
Éducation 43 994 95 206 153 113 184 102 292 313
Pauvreté et filets de sécurité sociale 1/ 8 950 9 550 14 000 … 32 500
L'impact sur les infrastructures 32 311 312 991 543 183 685 235 888 485
Électricité 24 120 256 275 473 355 592 448 753 750
Eau et assainissement 8 191 7 571 11 337 14 698 27 099
Gestion des déchets solides et services municipaux - 49 145 58 491 78 089 107 636
Évaluation de l'impact 63 316 519 645 897
L'impact sur le développement humain et social 41 108 158 191 308
Santé 6 38 48 69 92
Éducation 29 63 102 122 194
Pauvreté et filets de sécurité sociale 1/ 6 6 9 … 22
L'impact sur les infrastructures 21 208 360 455 589
Électricité 16 170 314 393 500
Eau et assainissement 5 5 8 10 18
Gestion des déchets solides et services municipaux - 33 39 52 71
Évaluation de l'impact 0,1 0,7 1,1 1,4 1,9
L'impact sur le développement humain et social 0,1 0,2 0,3 0,4 0,7
L'impact sur les infrastructures 0,0 0,5 0,8 1,0 1,3
L'impact économique (secteurs public et privé; en pourcentages) -2,9 -2,9 -2,9 -2,5 …
Taux de croissance du PIB réel: Pas de retombées du conflit syrien (en pourcentages) 4,3 4,4 4,4 4,4 …
Taux de croissance du PIB réel: Réel et prévisionnel (en pourcentages) 1,4 1,5 1,5 1,9 …
L'impact budgétaire (variation du solde budgétaire global résultant de l'impact du conflit) 1,1 2,1 2,6 2,6 5,8
Recettes: manque à gagner résultant de l'impact du conflit 0,9 1,3 1,3 1,0 3,4
Dépenses: manque à gagner résultant de l'impact du conflit 0,2 0,9 1,3 1,6 2,4
Pour mémoire :
PIB nominal (réel et prévisionnel) 42 945 45 203 47 230 47 408 …
PIB nominal (hypothèse contradictoire: aucune retombée du conflit syrien 44 088 47 662 51 157 51 157 …
2014
(en millions de livres libanaises )
(en millions de dollars)
(en pourcentage du PIB, sauf indication contraire)
(en millions de dollars)
RÉSUMÉ ANALYTIQUE
15
Tableau 2 : Évaluation quantitative des besoins de stabilisation résultant de l’impact du conflit syrien sur
le Liban
Source : Calculs et prévision de la Banque mondiale. 1/ Les coûts de stabilisation proposés pour 2014 dans l’hypothèse de base et l’hypothèse haute incluent les besoins pour 2013 2/ Aucune hypothèse haute n’a été prise en compte pour la pauvreté et les filets de sécurité sociale en 2014.
2012 2013
Données
cumulées pour
2012/14
Afflux des
réfugiés -
hypothèse de
base
Afflux des
réfugiés -
hypothèse
haute
Afflux des
réfugiés -
hypothèse de
base
Évaluation des besoins de stabilisation 309 734 1 237 495 2 205 928 3 145 052 3 753 157
L'impact sur le développement humain et social 237 373 643 389 1 230 226 1 480 770 2 110 988
Santé 56 578 267 031 326 018 461 271 649 626
Éducation 145 692 275 245 524 903 654 999 945 840
Emploi et moyens de subsistance 1/ … … 250 875 364 500 250 875
Pauvreté et filets de sécurité sociale 2/ 35 103 101 114 128 430 … 264 647
Infrastructure 72 361 594 106 975 702 1 664 282 1 642 169
Électricité 58 793 322 605 85 928 281 903 467 325
Eau et assainissement 8 141 133 866 370 893 422 854 512 890
Gestion des déchets solides et services municipaux 5 427 72 511 212 859 232 607 290 797
Infrastructure de transport 0 65 125 306 023 726 918 371 148
Current spending 205 003 641 581 1 156 239 1 370 995 2 002 823
Capital spending 104 731 595 913 1 049 690 1 774 056 1 750 334
Évaluation des besoins de stabilisation 205 821 1 463 2 086 2 490
L'impact sur le développement humain et social 157 427 816 982 1 400
Santé 38 177 216 306 431
Éducation 97 183 348 434 627
Emploi et moyens de subsistance 1/ … … 166 242 166
Pauvreté et filets de sécurité sociale 2/ 23 67 85 … 176
Infrastructure 48 394 647 1 104 1 089
Électricité 39 214 57 187 310
Eau et assainissement 5 89 246 281 340
Gestion des déchets solides et services municipaux 4 48 141 154 193
Infrastructure de transport 0 43 203 482 246
Dépenses de fonctionnement 136 426 767 909 1 329
Dépenses d'investissement 69 395 696 1 177 1 161
Évaluation des besoins de stabilisation 0,5 1,8 3,1 4,4 5,4
2014
(en millions de livres libanaises )
(en millions de dollars)
(en pourcentage du PIB)