Corentin Bialais Simon Ferey
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DRT-6000 Droit de l'OMC Hiver 2015
Le statut de Tawan, Hong Kong et Macao au sein de lOMC comme territoires douaniers : perspectives historiques et juridiques
Corentin Bialais Simon Ferey
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Table des matires Introduction : .............................................................................................................................. 3
I Perspective historique ........................................................................................................... 4
A Histoire gnrale des quatre territoires ........................................................................ 4
B Les territoires dans le contexte du GATT et de lOMC .............................................. 6
II Le statut particulier des territoires douaniers distincts ...................................................... 10
A Comment devient-on Territoire douanier distinct ? .................................................. 10
B Les implications du statut de Territoire douanier distinct ......................................... 13
III La notion de territoire douanier distinct lOMC la lumire du Droit International
Public ........................................................................................................................................ 16
A Lgalit souveraine des Etats comme principe de base du Droit International Public
.......................................................................................................................................... 16
B Dautres organisation incluant des entits non souveraines ...................................... 18
Conclusion ................................................................................................................................ 20
Annexe 1 : chronologie (tir de Choukroune Lela. La Chine et l'OMC en dates. In:
Perspectives chinoises. N69, 2002. pp. 78-80.) ...................................................................... 22
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Introduction :
[LOMC] sait faire uvre de pragmatisme propre la discipline du commerce dans
lapplication des principes du droit international classique. []
LOMC reste, il est vrai, un cadre intertatique. Mais, elle a su l aussi sadapter
lvolution de la socit internationale et lmergence de nouveaux acteurs.
Les Membres peuvent tre des territoires douaniers, ce qui a permis au Taipei chinois
de rejoindre lOMC et Hong Kong de continuer participer comme Membre autonome
aprs son retour la Chine.
En Mai 2006, Pascal Lamy alors directeur gnral de lOrganisation mondiale du
commerce employait lexemple de Hong-Kong et du Taipei Chinois (Taiwan) pour illustrer le
pragmatisme et les capacits dadaptation de lOMC la ralit mondiale.1
LOMC est rgulirement dcrite comme une organisation internationale innovante et efficace
notamment grce sa procdure rapide de rglement des diffrends. Le fait quelle parvienne
inclure des territoires souvent qualifi de quasi-tats ou dEtats de facto, qui posent souvent
des problmes de reprsentation dlicat en droit international semble attester une nouvelle fois
du caractre novateur de cette institution.
En effet, ce nest pas une petite chose que de runir la Chine et Taiwan dans une organisation
vocation universelle comme lOMC. Rgulirement, depuis les annes 90, certains pays
demandent ce que la question de la reprsentation de Taiwan soit inscrite lordre du jour
de lAssemble Gnrale des Nations-Unies.2 Ces demandes sont systmatiquement rejetes
par la Chine qui y oppose son vto. Plus proche de nous, le ton est mont entre Pkin et Taipei
depuis le dbut du mois de Mars 2015. En effet, la Chine a pris la dcision unilatrale
dinstaurer une route arienne survolant le territoire Taiwanais. Taiwan nest pas membre de
lOrganisation de lAviation Civile Internationale, le pays ne dispose donc daucun recours
juridique face cette situation.3
Dun autre ct, les territoires de Hong-Kong et Macao, bien quils appartiennent
officiellement la Rpublique Populaire de Chine, jouissent dune certaine autonomie par
rapport au gouvernement chinois, notamment en matire conomique. Pourtant ces entits ne
sont pas non plus membre de lONU mais se retrouvent tout de mme dans une poigne
dorganisations. Comment expliquer que la Chine qui dfend fermement la politique dune
1 Pascal Lamy, La place et le rle (du droit) de l'OMC dans l'ordre juridique international, Intervention devant la
Socit europenne de droit international, Paris, 19 mai 2006 2 Bob Jieffer, LOrganisation Mondiale du Commerce et lvolution du droit international public, Larcier, 2008 3 Yuan-Ming Chiao, M503 unrelated to ICAO bid: foreign minister, The China Post, March 17, 2015
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seule Chine lONU et dans dautres organisations comme lOACI puisse se retrouver avec
sa rivale dans lOMC ? De mme comment expliquer que lOMC reconnaisse Hong-Kong et
Macao comme des membres part entire alors que ceux-ci appartiennent officiellement
une entit tatique suprieure. Cette situation paradoxale est brillement rsum par le titre
dun article sur le sujet intitul Une seule Chine, quatre membres lOMC .4
Dans ce travail, nous nous efforcerons de comprendre par quels moyens lOMC parviens
inclure ces entits quasi-tatiques et quels sont les implications de ce statut. Cette analyse se
fera dun point de vue juridique et historique, par lanalyse des processus daccession de ces
quatre territoires et notamment par lanalyse de la notion de territoire douanier distinct
propre lOMC. Dans une premire partie, nous rappellerons lhistoire des relations difficiles
entre ces quatre entits, et notamment leur interactions avec lOMC, nous verrons ensuite par
quels moyens ils ont pu devenir des territoires douaniers distincts et ce quimplique ce statut
sur leurs relations. Enfin nous tenterons de voir en quoi lOMC prsente une manire
originale de rgler les problmes de reprsentations en droit international et quels sont ses
limites.
I Perspective historique A Histoire gnrale des quatre territoires
Tawan, Hong Kong et Macao sont trois territoires d'Asie Pacifique dont l'histoire est
indissociable de la Chine. D'un point de vue gographique et historique, ces trois territoires
sont d'une grande proximit avec la Chine.
La Rpublique populaire de Chine, est le plus grand pays d'Asie et se compose de vingt-deux
provinces, cinq rgions autonomes, quatre municipalits et deux rgions administratives
spciales : Hong Kong et Macao. La Rpublique de Chine est le nom officiel de Tawan,
jusquau milieu du XXe sicle, la Rpublique de Chine contrlait galement la Chine
continentale jusqu la prise de pouvoir par les forces communistes en 1949. Cest alors que
le gouvernement nationaliste de Tchang Ka Sheck sest rfugi sur l'le. Cependant, la Chine,
travers sa politique d'une seule Chine (One China policy), revendique le pays comme unifi,
c'est dire quelle inclut Macao, Hong Kong, Tawan ou encore le Tibet. Cette position est
4 ZENG Huaqun, One China, Four WTO Memberships": Legal Grounds, Relations and Significance, The
Journal Of World Investment & Trade, 2007
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accepte notamment par l'ONU qui a refus plusieurs reprises la reprsentation de Tawan
au sein de l'organisation.
Hong Kong et Macao se distinguent de Tawan dans leur histoire rcente. Ces deux cits ont
aujourdhui le statut de Rgion administrative spciale (RAS) , c'est dire qu'elles font
partie de la Chine tout en conservant leur autonomie dans une majorit de domaines dont
l'conomie, c'est ce qu'on appelle le principe un pays, deux systmes . Nanmoins, Hong
Kong et Macao n'ont pas d'autonomie dans le domaine de la dfense ni des affaires trangres
qui sont dvolues la Chine. Les deux furent des colonies europennes dont la rtrocession
eut lieu la fin du XXe sicle. Hong Kong a t rtrocd par la Grande Bretagne en 1997
travers la signature du trait international intitul Dclaration commune sino-britannique sur
la question de Hong Kong aprs plus d'un sicle et demi de prsence britannique, depuis le
trait de Nankin de 1842. Quant Macao, dernier comptoir europen, il fut rtrocd par le
Portugal la Chine en 1999 suite la signature du trait international intitul Dclaration
commune sino-portugaise sur la question de Macao. Hong Kong et Macao ont t des
carrefours entre l'Europe et l'Asie et des portes d'entres du continent asiatique. Leur
dveloppement conomique a t plus rapide que dans le reste du continent. Leurs conomies
sont spcialises et influences par le modle occidental. Hong Kong est une des principales
places financire asiatiques et un des plus grands ports au monde. Macao est devenu une
destination touristique majeure dans le domaine des jeux dargent.
Tawan a un statut diffrent, malgr la revendication de l'le par la Chine comme 23e province
chinoise, Taiwan est considr comme un Etat indpendant de facto . Officiellement
dnomm Rpublique de Chine, l'le, anciennement appele Formose est un pays de 23
millions d'habitants. Elle a reprsent officiellement la Chine dans les instances
internationales, comme au Conseil de Scurit de l'ONU par exemple, jusqu'en 1971, date
laquelle la Chine continentale la remplace. Son histoire rcente se caractrise par le
peuplement des nationalistes du Kuomintang, venus en masse suite la dfaite contre les
communistes en 1949. A l'instar de Hong Kong et Macao, Tawan sest dvelopp rapidement
au cours de la seconde moiti du XXe sicle, on parle souvent ce sujet de miracle
tawanais . Son conomie est actuellement oriente vers la haute technologie, dans des
secteurs tels que la biotechnologie, les ordinateurs portables ou les nergies renouvelables, la
Chine tant son principal partenaire conomique.
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B Les territoires dans le contexte du GATT et de lOMC
Lhistoire de ces quatre entits lOMC retranscrit lhistoire mouvemente que la
rgion a connu au cours du XXme sicle. Nous verrons dans cette partie le parcours
tumultueux qui les ont mens jusqu leur entre dans le GATT et lOMC. Une chronologie
intitule la Chine et lOMC en date est jointe lannexe 1 et reprend les principaux
vnements.
Hong Kong et Macao dans le GATT et lOMC
Hong Kong est rentr en tant que territoire douanier distinct par la volont du
Royaume-Uni en 1986 qui a invoqu larticle XXVI:5 (c) du GATT qui permet de relcher un
territoire douanier distinct de son territoire (nous reviendrons en dtail sur les diffrents
moyens daccder au GATT en tant que territoire douanier distinct dans la section suivante).5
Au mme moment la Chine met une communication expliquant que Hong Kong deviendra
une Rgion Administrative Spciale (SAR) aprs la rtrocession de la cit tat et quelle
gardera ainsi le contrle de sa politique commerciale et conomique. 6 Le territoire sera ce
moment renomm Hong-Kong, Chine . Cette communication sappuie sur la dclaration
commune Sino-Britannique qui organise le transfert de souverainet de la colonie
britannique.7
Aprs avoir une dizaine danne en tant que partie contractante au sein du GATT, Hong Kong
devient un membre fondateur de lOMC en 1995. Le 1er Juillet 1997, la suite de la
rtrocession, Hong Kong prend le nom de Hong Kong, Chine .
Le sort de Macao est similaire celui de Hong-Kong. Le Portugal devient partie contractante
du GATT en 1962. En 1991, le Portugal fait parvenir une communication prcisant quen
vertu de larticle XXVI:5 (c) du GATT, Macao deviendra une partie contractante en tant que
territoire douanier distinct.8 Macao devient galement un membre fondateur de lOMC en
1995.
Comme pour Hong Kong, la Chine fait la aussi parvenir une communication au secrtariat du
GATT pour expliquer quaprs la rtrocession, Macao conservera son systme conomique et
social actuel mais utilisera le nom de Macao, Chine lOMC.9
5 L/5986 24 Avril 1986, reference tir de Chien-Huei Wu, WTO and the greater China, Economic Integration
and Dispute Resolution, Martinus Nijhoff Publishers, 2012 6 L/5987, Admission of Hong Kong as a contracting party, Communication from the People's Republie of China,
24 April 1986 7 Joint Declaration of the Governmenent of the United Kingdom of Great Britain and Northern Ireland and the Peoples Republic of Chine on the Question of Hong-Kong Section VI Annex 1 8 L/6806 Ibid note 5 9 L/6807 Admission of Macao as a contracting party, Communication from the People's Republic of China, 14
January 1991
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La Rpublique de Chine dans le GATT
La Rpublique de Chine est une des parties contractantes originelles du GATT en
1947, elle est mentionne dans la liste des pays au prambule du texte.10
En 1950, un an aprs que le gouvernement de la Rpublique de Chine se soit rfugi
Taiwan, celui-ci dcide de se retirer du GATT. Cette dcision est justifie par le fait que la
majeure partie des marchandises pour lesquelles sappliquaient les concessions du GATT
taient en provenance du continent, que le gouvernement de Tchang Ka Chek ntait plus en
mesure de contrler.11
La Rpublique de Chine obtient un statut dobservateur lOMC partir de 1965.12 En tant
que signataire de la Charte de La Havane, le pays obtient le statut dobservateur sans que cela
ne ncessite de vote en vertu de la rgle 8 des Rules of Procedure for Sessions of the
CONTRACTING PARTIES .13
A cette poque le problme de la reprsentation de la Chine dans les institutions
internationales tait dj brulant. Le Secrtaire-gnral du Gatt14 avait cependant affirm que
les parties contractantes, devaient [suivre] la politique exprim par larticle 86 de la Charte
de la Havane, [et ainsi] viter de se prononcer sur des matires essentiellement politique et de
suivre les dcisions des nations unies ce propos. 15
Cest dans cette logique que les parties contractantes vont permettre la Rpublique de Chine
dobtenir son statut dobservateur, mais cest galement ce mme principe qui va justifier plus
tard son exclusion. En 1971, choisissant de suivre la rsolution 2758 (XXVI) de lONU qui
reconnait le gouvernement de la Rpublique Populaire de Chine comme le seul gouvernement
lgitime de Chine, la Rpublique de Chine est exclue du GATT.16 Cette dcision impulse par
le secrtaire-gnral du GATT, est soumise au consensus. Curieusement, de nombreux Etats
(ayant tous vots contre o stant abstenu lors du vote de la rsolution lAssemble
gnrale de lONU) sindigneront de ce rsultat et refuserons dtre associ au consensus sans
quaucun dentre-deux ne se soit oppos ce mme consensus. Les Etats-Unis, le Brsil ou le
Zare ont fait part de leur protestation, sans toutefois sy tre oppos. A cette poque, ces pays
10 Accord General sur les Tarifs Douaniers et le Commerce, Prambule 11 Chuo Hui-Wan, Legal Eligibility of Taiwans Accession to GATT/WTO, School of Law University of Maryland, 2000 p.4 12 Summary Record of Third Meeting, GATT SR.22/3, 16 March 1965 13 Ibid note 11, p.4 voir aussi GATT 1994, 1009 The Rules of Procedure for Sessions of the CONTRACTING
PARTIES rule 8 14 Article XXV, Joint Action by the Contracting Parties, GATT Analytical Index, p.877 15 SR.22/3 16 SR.27/1, Summary Record Of The First Meeting, 19 November 1971
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reconnaissaient encore le gouvernement de la Rpublique de Chine et entretenaient parfois
des relations fortes, bien que les Etats-Unis aient commenc renverser leur stratgie en
faveur dun rapprochement avec la Rpublique Populaire.17 La Rpublique de Chine conteste
galement la dcision prise son encontre. Cependant le statut dobservateur te au pays la
possibilit de faire chouer le consensus.
Le nouveau gouvernement communiste, pour des raisons idologiques, nentreprend cette
poque aucune dmarche pour succder la Rpublique de Chine au GATT.
Les Demandes dadhsion de la Chine et de Taiwan au GATT et lOMC
En 1986 la Rpublique Populaire de Chine en pleine libralisation conomique transmet une
communication au directeur du GATT dans laquelle elle indique son souhait de retrouver son
statut de partie contractante.18 La note ajoute que le gouvernement chinois est prt ngocier
avec le GATT les termes de son adhsion.
Bien quun groupe de travail soit mis en place ds 1987, le processus daccession de la Chine
sera le plus long de lhistoire de lOMC jusqu aujourdhui. Les ngociations nayant pas t
termin la fin du cycle dUruguay, la Rpublique Populaire de Chine nest pas parvenue
devenir membre originel de lOMC, le groupe de travail du GATT sera renomm groupe de
travail de lOMC aprs 1995.19
Parmi les lments qui expliquent cette lente accession, reviennent les relations parfois
tendues entre Pkin et certains membres ou parties contractantes cruciaux lors des
ngociations. La rpression des opposants de la place Tian An Men en 1989 isole la Chine sur
la scne internationale et va freiner les ngociations avec les pays occidentaux qui refusent de
traiter avec Pkin. Dix ans plus tard, en mai 1999, le bombardement par larme amricaine
de lambassade chinoise Belgrade entraine un nouveau refroidissement dans les relations
entre les deux pays et la Chine interrompt provisoirement ses ngociations avec
Washington.20 Malgr tout, la mme anne en novembre, la Chine et les Etats-Unis finissent
par signer un accord bilatral sur laccession de la Chine lOMC.
Un an plus tard, cest avec lUnion Europenne que la Chine signe un accord bilatral.
17 Sur ce sujet voir par exemple: Samantha F. Ravich (1999) U.S. Policy toward the Taiwan Strait: A Historical
Perspective, American Foreign Policy Interests: The Journal of the National Committee on American Foreign
Policy 18 GATT L/6017 Communication from PRC 14 Juillet 1986 19 Chien-Huei Wu, WTO and the greater China, Economic Integration and Dispute Resolution, Martinus Nijhoff
Publishers, 2012, p.10 20 Alexandroff, Alan S;Ostry, Sylvia;Gomez, Rafael, China and the Long March to Global Trade (Routledge,
2003), p.22
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Le rapport du groupe de travail est finalement dpos en Septembre 200121. Lors de la
confrence ministrielle de Doha en novembre la dcision daccession est enfin prise par les
membres, la Chine devient membre 30 jours aprs la ratification.22
De son ct la Rpublique de Chine (Taiwan) prsente une candidature au GATT sous
le nom de Territoire douanier distinct de Taiwan, Penghu, Kinmen et Matzu souvent repris
par labrviation Taipei Chinois en Janvier 1992. Un groupe de travail pour examiner
cette candidature est form le 29 Septembre de la mme anne.23 Nous reviendrons plus en
dtails dans le chapitre suivant sur le processus daccession qua travers Taiwan pour tre
admis en tant que territoire douanier distinct.
Dans une communication o le directeur gnral du GATT nonce les modalits de la
formation du groupe de travail, il prcise que toutes les parties contractantes sentendent pour
respecter la politique dune seule Chine et souligne la demande de plusieurs parties
contractantes de faire accder le Taipei Chinois aprs la Chine comme cette dernire lexige.24
Taiwan a sign des accords bilatraux concernant son accession avec les Etats unis et lUnion
Europenne en 1998. Les ngociations se terminent ds 1999, mais lOMC suivra la
procdure envisage plus tt dans le GATT et Taiwan ne sera admis lOMC quaprs la
Chine. Le rapport du groupe de travail est formul le 5 octobre 200125 et la dcision
daccepter laccession du Taipei Chinois est prise le lendemain de celle de laccession de la
Chine, lors de la confrence de Doha. Finalement le Taipei Chinois accde lOMC en
Janvier 2012 soit un mois aprs sa voisine chinoise.
21 WT/ACC/CHN/49, Rapport du groupe de travail de l'accession de la Chine, 1er octobre 2001 22 WT/MIN(01)/DEC/1 Dclaration Ministrielle, confrence ministrielle de l'OMC, Doha, 2001 23 C/M/259, MINUTES OF MEETING Held in the Centre William Rappard on 29 September-1 October 1992 24 Ibid. 25 WT/ACC/TPKM/18, Rapport du groupe de travail de l'accession du territoire douanier distinct de Taiwan,
Penghu, Kinmen et Matsu, 5 octobre 2001
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II Le statut particulier des territoires douaniers distincts A Comment devient-on Territoire douanier distinct ?
Bien que Hong-Kong, Macao et le Taipei Chinois soient tous les trois dsigns comme
des territoires douaniers distincts, les voies suivis par ces entits pour atteindre ce statut
divergent. Notamment parce que Hong-Kong et Macao ont accd au GATT alors que le
Taipei Chinois a directement accd lOMC. Dans ce chapitre nous allons retracer le
parcours vers laccession de ces trois entits.
Hong Kong et Macao, laccession au GATT par larticle XXVI:5(c)
Le terme territoire douanier est dfini larticle XXIV :2 du GATT comme :
Tout territoire pour lequel un tarif douanier distinct ou d'autres rglementations commerciales distinctes sont
appliqus pour une part substantielle de son commerce avec les autres territoires.
Cest ensuite larticle XXXIII du GATT qui dfinit laccession en ces termes et louvre aux
territoires douaniers distincts :
Tout gouvernement qui n'est pas partie au prsent Accord ou tout gouvernement agissant
au nom d'un territoire douanier distinct qui jouit d'une entire autonomie dans la conduite
de ses relations commerciales extrieures et pour les autres questions traites dans le prsent
Accord, pourra adhrer au prsent Accord, pour son compte ou pour le compte de ce
territoire, des conditions fixer entre ce gouvernement et les PARTIES
CONTRACTANTES.
Ainsi laccession est dfinie comme ouverte des gouvernement . La terminologie est ici
particulirement importante puisquelle ne rfre pas des Etats .26
Ensuite il est ncessaire que ce gouvernement dispose dune entire autonomie dans ses
relations commerciales extrieures . Ds 1947, le Royaume-Unis se prte cet exercice en
dmontrant que ces colonies de Ceylan (actuel Sri Lanka), de Birmanie et de Rhodsie du Sud
(actuel Zimbabwe) dtiennent effectivement cette autonomie.27 28
Hong-Kong et Macao ont tous les deux t prsent aux GATT aux fins de leur accession.
En effet, le GATT de 1947 permettait une procdure daccession originale, prvue par le
larticle XXVI :5(a) et (c) :
26 GATT, Guide to GATT Law and Practice: Analytical Index (6th Edition WTO, Geneva 1995), p.1017-1018 27 Pour ce faire, le Royaume-Uni a par exemple dmontr la capacit de ces colonies de signer des traits
conomiques entre eux. Par exemple, entre la Rhodsie du Sud et lAfrique du Sud 28 E/PC/T/198, Second session of the preparatory committee of the United Nations conference on trade and
employment, 15 September 1947, https://www.wto.org/gatt_docs/English/SULPDF/92290253.pdf
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5. a) Chaque gouvernement qui accepte le prsent Accord l'accepte pour son territoire
mtropolitain et pour les autres territoires qu'il reprsente sur le plan international,
l'exception des territoires douaniers distincts qu'il indiquera au Secrtaire excutif(5) des
PARTIES CONTRACTANTES au moment de sa propre acceptation.[]
c) Si un territoire douanier pour lequel une partie contractante a accept le prsent
Accord jouit d'une autonomie complte dans la conduite de ses relations commerciales
extrieures et pour les autres questions qui font l'objet du prsent Accord, ou s'il acquiert
cette autonomie, ce territoire sera rput partie contractante sur prsentation de la partie
contractante responsable qui tablira les faits susviss par une dclaration.
Bien que le paragraphe a) explique que le GATT en plus de sappliquer au territoire
mtropolitain du membre sapplique aussi ceux quil reprsente sur le plan international,
lindex analytique du GATT prcise que ce nest pas le cas pour la France, la Grande-
Bretagne, les Pays-Bas et de la Belgique ou laccord sapplique uniquement au territoire
mtropolitain. En effet, le Protocole dApplication Provisoire du GATT fait la liste des
futures parties contractantes en prcisant bien, pour chacun des pays mentionns lexpression
lgard de leur territoire mtropolitain .29 Le Paragraphe 2 du mme protocole prcise
quil est possible que laccord sapplique pour ces territoires si le pays en fait la demande au
secrtaire gnral des Nations-Unies.30
Ainsi cest partir 1948 que laccord du GATT sapplique sur le territoire de Hong-Kong,
aprs que le Royaume-Uni en ai fait la demande.31 A ce stade, laccord du GATT sapplique
pour la colonie asiatique de la mme manire que pour le Royaume-Unis.
Le paragraphe c) explique ensuite, qu la condition davoir une autonomie
complte dans ses relations extrieures, un territoire peut acqurir le statut de partie
contractante sur prsentation de la partie contractante qui en est responsable
internationalement. Nous avons vu prcdemment que l autonomie est le fruit dune
attestation donn par lEtat responsable internationalement du territoire, lindex analytique du
GATT prcise que lEtat doit certifier que ce territoire a le droit de jure et/ou de facto dagir
par lui-mme et de remplir ses obligations. 32 33
LEtat responsable doit ensuite prsenter ce territoire douanier. La traduction anglaise
sponsorship retranscrit peut tre mieux le sens de cette disposition. Par cette manire
lEtat responsable atteste de lautonomie du pays sur ses relations conomiques et lui offre
ainsi une admission automatique dans le GATT.
29 Provisional application of the General Agreement 30 GATT, Guide to GATT Law and Practice: Analytical Index (6th Edition WTO, Geneva 1995) p.917 31 Chien-Huei Wu, WTO and the greater China, Economic Integration and Dispute Resolution, Martinus Nijhoff
Publishers, 2012 p.5 32 EPCT/TAC/PV/22, p. 22 (traduction libre) 33 GATT, Guide to GATT Law and Practice: Analytical Index (6th Edition WTO, Geneva 1995) p.919
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Au terme de cette procdure on parle souvent de succession plutt que daccession. En
effet la plupart des Etats qui ont utiliss cette procdure lont fait aprs leur prise
dindpendance de la mtropole. Cette procdure fut particulirement populaire puisque ce
nest pas moins de 63 parties contractantes du GATT (sur un total de 128 en 1995) qui ont
succd leur ancienne mtropole. Cette mthode tient sa popularit au fait quelle est
automatique et ainsi ne demande pas de ngociation pralable. A linverse, la procdure
classique qui utilise larticle XXXIII demande au candidat laccession de ngocier son
entre avec les parties contractantes, souvent par des abaissements de tarifs douaniers, ce que
certains auteurs appellent le entry ticket .
Il existe quatre cas o larticle XXVI:5(c) a t utilis pour faire accder un territoire douanier
lorganisation sans pour autant que celui-ci soit pralablement devenu indpendant, il sagit
du Lesotho, du Liechtenstein et surtout de Hong-Kong et Macao.
Ainsi en 1986, le Royaume-Uni va prsenter Hong-Kong, en dclarant que le territoire a
acquis son autonomie sur les affaires commerciales34. Hong-Kong devient ainsi partie
contractante du GATT. Une communication chinoise de 1986 prcise que la Rgion
Administrative spciale de Hong-Kong restera un territoire douanier distinct aprs la
rtrocession de 1997.35
Laccession de Macao se fait dans des termes similaires. Le Portugal accde par larticle
XXXIII au GATT en 1962. Ntant pas membre fondateur du GATT, le pays nest pas dans la
liste des pays pour lequel laccord ne sapplique quau territoire de la mtropole comme prvu
par le paragraphe 1 du protocole dapplication provisoire du GATT. Ainsi le GATT
sapplique Macao comme dans le reste du Portugal, le protocole daccession portugais
prcise bien que laccord sapplique lgard de tous ses territoires douaniers distincts 36.
En 1991 le Portugal va prsenter Macao lOMC37 et la Chine va faire une
communication similaire celle de Hong-Kong.
34 L/5986, Admission of Hong Kong as a contracting party, Certification by the Director-General, 24 April 1986 35 L/5987, Admission of Hong Kong as a contracting party, Communication from the People's Republie of
China, 24 April 1986 36 11S/20, Protocol for the Accession of Portugal to the GATT 37 L/6806, certification by the Director-General incorporating a communication by Portugal
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Laccession de Taiwan lOMC et larticle XII de lOMC et XXXIII du GATT
Depuis 1995 et la cration de lOMC, larticle XXVI:5 du GATT ne permet plus
dchapper aux ngociations pour accder lOMC. En effet, cest prsent larticle XII de
laccord instituant lOMC qui gouverne laccession :
Tout Etat ou territoire douanier distinct jouissant d'une entire autonomie dans la
conduite de ses relations commerciales extrieures et pour les autres questions traites
dans le prsent accord et dans les Accords commerciaux multilatraux pourra accder
au prsent accord des conditions convenir entre lui et l'OMC. Cette accession
vaudra pour le prsent accord et pour les Accords commerciaux multilatraux qui y sont
annexs.
Les critres sont ici similaires ceux du GATT mais la phrase des conditions convenir
entre lui et lOMC indiquent que laccession est maintenant conditionne par une
ngociation avec les membres de lOMC.
Nous lavons vu, la candidature de Taiwan au GATT prcde la cration de lOMC. Avant la
cration de lOMC la candidature Taiwanaise tait gouverne par larticle XXXIII du GATT,
qui prvoit le mode daccession rgulier, et non pas larticle XXVI:5. La Chine prtend que
cette candidature est irrgulire puisque la candidature Taiwanaise aurait d tre gouvern par
larticle XXVI:5 tant donn que Pkin considre lle comme tant lune de ces provinces.
Le protocole daccession final de Taiwan prcise bien que le groupe de travail a t cr en
1992 au titre de l'article XXIII prsente par le Territoire douanier distinct de Taiwan .
Aucune mention de larticle XXXIII nest faite dans le document du groupe de travail.38
Le mme document prcise galement que cest au moment de laccession en 2001, larticle
XII de laccord instituant lOMC qui gouverne laccession du territoire.39
B Les implications du statut de Territoire douanier distinct
Accords entre les SAR et la Chine des accords nationaux ou internationaux sous l'gide de l'OMC?
Quelles sont les consquences de cette situation dans laquelle Tawan, Hong Kong et Macao
sont membres de l'OMC au mme titre que la Chine ? Qu'est-ce que cela implique en termes
de relations conomiques entre eux ? La situation permet-elle une certaine harmonie, ou au
contraire accentue-t-elle les tensions ?
tant donn que Hong Kong, Macao et Tawan sont autonomes dans leur commerce extrieur,
38WT/ACC/TPKM/18, rapport du groupe de travail de l'accession du territoire douanier distinct de Taiwan,
Penghu, Kinmen et Matsu, 5 octobre 2001 39 WT/ACC/TPKM/18, rapport du groupe de travail de l'accession du territoire douanier distinct de Taiwan,
Penghu, Kinmen et Matsu, 5 octobre 2001
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ils agissent indpendamment de la Chine. En tant que membres de l'OMC, les territoires
douaniers possdent une marge de manuvre dans la conduite de leurs relations
commerciales.
Mme si ces entits sont considres par l'empire du Milieu comme faisant partie du territoire
chinois, leur indpendance en termes de politique commerciale favorise des partenariats
conomiques et commerciaux. Et c'est travers leur appartenance commune l'OMC que
Hong Kong et Macao tablissent des partenariats conomiques, l'instar de l'accord spcial
intitul Closer Economic Partnership Arrangement40 (CEPA). Le CEPA est un accord
sign dans le cadre de l'OMC entre la Chine et Hong Kong en 2003 qui concorde avec les
objectifs de l'OMC, il prvoit notamment l'limination des tarifs douaniers ou la poursuite de
la libralisation du commerce des services, en vue d'une prosprit commune de la Chine et
de Hong Kong. Cet accord est original car il est la fois un volet national en tant quaccord
rgissant diffrents territoires dun mme pays et quil est galement un trait international au
sens de lOMC. Cela met en vidence que l'OMC joue un rle majeur dans le dveloppement
des partenariats commerciaux entre la Chine et les territoires douaniers voisins. Un accord
similaire a t instaur entre la Chine et Macao, dnomm Mainland and Macau Closer
Economic Partnership Arrangement, dont les objectifs sont semblables, en vue d'une
libralisation plus pousse des changes entre la Chine et Macao. Malgr l'appartenance
administrative de Hong Kong et Macao la Chine, on constate que l'OMC favorise largement
les relations conomiques entre la Chine et les territoires douaniers voisins. Bien qu'ils n'en
aient pas le nom, ce sont des accords de libre-change41.
Il existe galement un partenariat conomique entre la Chine et Tawan42, il s'agit de l'
Economic Cooperation Framework Agreement (ECFA)43 tabli en 2010. C'est un partenariat
strictement conomique44, qui vise au dveloppement des changes. Cet accord conomique a
pu tre mis en place par le fait que Tawan est membre de l'OMC. En effet, dans le cadre de
l'OMC, Tawan peut dcider de ses partenariats conomiques. Le partenariat, qui est considr
comme le plus significatif depuis la guerre civile de 1949, vise la libralisation du
commerce, le dveloppement des investissements, ou encore une coopration industrielle.
40 Chien-Huei Wu WTO and the Greater China , Chapitre 8, Partie III 41 Chien-Huei Wu WTO and the Greater China , Chapitre 8, Introduction, p.233 42Chien-Huei Wu WTO and the Greater China , Chapitre 7 43Chinese mainland, Taiwan sign landmark economic pact, Xinhua Net, 2010,
http://news.xinhuanet.com/english2010/china/2010-06/29/c_13375203.htm 44Taiwan and China sign landmark trade agreement, BBC News, 29 June 2010
http://www.bbc.com/news/10442557
Corentin Bialais Simon Ferey
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On retrouve dans ce contexte le rle majeur qui a vu la cration de l'OMC : celui d'tre un
forum de discussion en faveur de la libralisation de l'conomie. On retrouve cet objectif qui
est poursuivi l'chelle de la Chine et des territoires douaniers.
Rglement des diffrends entre la Chine continentale et Tawan
tre membre de l'OMC implique la possibilit d'allguer d'autres membres de l'OMC, mais
aussi accepter une plainte d'un membre de l'OMC sur un diffrend, un sujet de dsaccord dans
le domaine des changes commerciaux. Les tensions politiques qui existent depuis plusieurs
dcennies entre la Chine et Tawan se refltent-elles dans le cadre du rglement des diffrends
de l'OMC ?
A premire vue, on peut penser que les tensions politiques n'ont pas de rpercussions sur les
relations conomiques car la Chine n'a pas de diffrend officiel contre Taipei chinois, ni en
tant que plaignant ni en tant que dfendeur45. Toutefois, mme si la Chine et Tawan ne se sont
encore jamais attaqus directement devant lorgane de rglement des diffrends, ils sont tierce
parties dans diffrentes affaires dans lesquelles ils sont concerns. Par exemple, l'affaire Chine
- Terres rares46 dont le rapport a t adopt en aot 2014, oppose la Chine (dfendeur)
l'Union Europenne (plaignant). Dans cette affaire, Taipei chinois a jou le rle de tierce
partie. On peut donc penser que malgr l'absence de confrontation directe, la Chine et Tawan
s'opposent parfois travers des intermdiaires. Leur statut de membre de l'OMC leur
permettrait nanmoins d'utiliser le rglement des diffrends de l'OMC comme plate-forme
pour apporter des solutions en cas de litige, comme par exemple la mise en place d'un systme
de protection contre les investissements chinois Tawan.
Leur statut de membre de l'OMC implique galement de respecter les principes de l'OMC sur
la libralisation des changes, et favorise les changes entre la Chine et les territoires
douaniers. Un territoire douanier, au mme titre qu'un tat se doit de suivre les acquis de
l'OMC et donne des responsabilits aux territoires douaniers qui vont dans le sens d'une plus
grande coopration conomique avec la Chine. En conclusion, le fait que la Chine ait
quatre membres l'OMC lui est favorable car cela permet de concentrer ses relations avec
les territoires douaniers dans le domaine conomique, en outrepassant les tensions politiques.
45 On peut par exemple consulter cette infographie propos par le site official de lOMC pour sen render compte
https://www.wto.org/french/tratop_f/dispu_f/dispu_maps_f.htm?country_selected=CHN&sense=e 46Le nom entier est : Chine Mesures relatives l'exportation de terres rares, de tungstne et de molybdne
Corentin Bialais Simon Ferey
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III La notion de territoire douanier distinct lOMC la lumire du
Droit International Public A Lgalit souveraine des Etats comme principe de base du Droit International
Public
Le principe dgalit souveraine trouve ses sources dans larticle 2 alina 1 de la
charte des Nations Unies qui indique que : L'Organisation est fonde sur le principe de
l'galit souveraine de tous ses Membres. .47 Elle est galement reprise par la dclaration
relative aux principes du droit international touchant les relations amicales et la coopration
entre les Etats conformment la Charte des Nations Unies 48 qui la dfinit en ces termes :
Tous les Etats jouissent de l'galit souveraine. Ils ont des droits et des devoirs gaux et
sont des membres gaux de la communaut internationale
On retrouve ce concept dans le droit de lOMC larticle IX de lOMC qui prvoit au
paragraphe 1 quen cas dimpossibilit datteindre le consensus, les dcisions seront prises
la majorit des voix. Il est prcis que chaque membre dispose dune voix lexception des
communauts europennes qui dispose du nombre de voix de ses Etats membres. Lancien
directeur de lOMC, Pascal Lamy, dclarait lui-mme dans une confrence sur la relation
entre le droit de lOMC et le droit international :
Lgalit souveraine des Etats exige une galit formelle entre Etats de taille ou de
puissance diffrente. Ce principe est parfaitement respect lOMC.49
LOMC est-elle galitaire?
LOMC sinscrit dans lhritage du GATT ou la pratique du consensus tait courante.
A larticle IX de laccord instituant lOMC, le consensus est affirm comme tant le mode
privilgi pour la prise de dcision.
Le principe dgalit souveraine nest pas compatible avec celui du vote majoritaire qui a
pour rsultat de mettre en minorit certains membres, cest pourquoi lunanimit est
considre comme le meilleur instrument pour respecter ce principe. Cependant en raison de
la difficult dappliquer ce principe les institutions internationales ont souvent recours
47 Charte des Nations Unies, 26 juin 1945, 15 CNUCIO (RT Can 1945 n7) 48 Dclaration Relative aux principes du Droit International touchant les Relations Amicales et la Coopration
entre les Etats conformment la Charte des Nations Unies, Res. AG 2625 (XXV), Doc off AG NU, 25me sess.
Doc NU A/8082 (1970) 49 Pascal Lamy, La place et le rle (du droit) de l'OMC dans l'ordre juridique international, Intervention devant
la Socit europenne de droit international, Sorbonne, Paris, 19 mai 2006
Corentin Bialais Simon Ferey
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dautres mthodes pour la prise de dcision dont le consensus50 qui semble davantage
respecter le principe dgalit que le vote.
Cependant larticle IX prvoit galement le recours au vote en cas dimpossibilit datteindre
le consensus. Il faut maintenant examiner le critre de la souverainet.
Le problme de souverainet des territoires douanier distinct
Les territoires douaniers distincts de lOMC disposent dun droit de vote comme tout
autre membre. Il y a pourtant l une contradiction avec le principe dgalit souveraine qui
repose galement sur le principe de souverainet.
La question de la souverainet de Taiwan pose de nombreuses questions en droit
international, son caractre tatique est sujet un long dbat, Taiwan est cependant
gnralement considr comme un Etat de facto qui il manque une reconnaissance
internationale. Le fait que Taiwan puisse sengager internationalement est dj une premire
preuve de sa souverainet, puisque dans laffaire du vapeur Wimbledon la Cour permanente
de Justice internationale admet que la facult de contracter des engagements est [] un
attribut de la souverainet de lEtat .
En revanche quelle que soit la dfinition, il est difficile de considrer Hong-Kong et Macao
comme des Etats souverains. Dans sa dfinition classique, la souverainet est dfinie comme
le pouvoir suprme dun Etat sur son territoire et ses habitants 51. Hong-Kong et Macao,
bien quils puissent sengager internationalement sur les questions dconomie et de culture,
ne sont pas responsables des questions de scurit ni de politiques trangres et ne
sinscrivent pas, en consquence, dans cette dfinition de la souverainet. Dans son ouvrage
lOrganisation Mondiale du Commerce et lvolution du droit international public, Bob
Kieffer pose ce constat pour remettre en cause la pertinence du concept dentire
autonomie de ces territoires douaniers distincts et va mme jusqu qualifier les deux cits
dentits infra-tatiques .52
Ainsi ces entits infra-tatique, comparable des Etats fdrs auxquels on aurait permis
lentre dans les institutions internationales auraient-elles rellement lautonomie ncessaire
pour pouvoir exprimer un vote indpendant du gouvernement central chinois ?
50 Maurice Arbour, Genevive Parent, Droit International, 6me Edition, Yvon Blais, 2012 51 M. ST. Korowicz, La souverainet des Etats et lavenir du droit international, Paris, Pedone, 1945, tir de Maurice Arbour, Genevive Parent, Droit International, 6me Edition, Yvon Blais, 2012 p.322 52 Bob Kieffer, lOrganisation Mondiale du Commerce et lvolution du droit international public, Larcier, 2008
Corentin Bialais Simon Ferey
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Pour illustrer le problme, lauteur rappelle la situation qui prvalaient jusquen 1990 aux
Nations-Unies o lURSS disposait de 3 voix (URSS, Bilorussie et Ukraine) alors que la
charte elle-mme consacrait le principe dun Etat, une voix. Cette situation tait le rsultat
dune ngociation entre les vainqueurs de la Seconde Guerre mondiale et pas de justification
juridique.
B Dautres organisation incluant des entits non souveraines
L'Organisation Mondiale du Commerce respecte le principe d'galit souveraine de ses
Membres, qui dans le cadre de l'OMC ne sont pas toujours des tats. On retrouve l'OMC,
parmi les membres qui ne sont pas des tats, les trois territoires sur lesquels nous nous
intressons (Tawan, Hong Kong, Macao), mais aussi une entit qui regroupe plusieurs tats
souverains : l'Union Europenne. L'Union Europenne est reconnue comme membre part
entire ; ainsi, la Commission Europenne est en mesure de parler au nom de l'ensemble de
ses membres, actuellement au nombre de 28 lors des sommets et runions de l'OMC.
Comment expliquer cette diffrenciation quant au statut de l'Union Europenne, de Tawan,
Hong Kong, Macao, ou toute autre entit n'tant pas un tat selon les organisations
internationales ?
L'ONU, l'organisation internationale majeure qui sert de plate-forme dans de nombreux
domaines pour la rencontre et la coordination des politiques dans tats du monde, ne
reconnat par exemple pas Tawan, ni Macao ou Hong Kong, alors que l'Union Europenne
possde quant elle un statut d' observateur avanc , qui lui permet par exemple de
s'adresser devant l'Assemble gnrale.
Cette nuance quant aux membres, qui parfois peut tre la source de polmiques car elles ont
une dimension politique, est possible car le domaine de comptence de l'OMC est strictement
conomique. En effet, l'OMC a une vocation purement conomique, comme prvu dans
l'article II de l'OMC o son champ d'action est prcis.
L'OMC servira de cadre institutionnel commun pour la conduite des relations
commerciales entre ses Membres en ce qui concerne les questions lies aux accords et
instruments juridiques connexes repris dans les Annexes du prsent accord.
Les considrations autres qu'conomiques n'entrent en ligne de compte dans les critres
d'accession. A cet gard, on retrouve cette dimension purement conomique dans la
jurisprudence de l'OMC (comme Etats-Unis, Crevettes), qui ne s'attarde pas sur des domaines
qui interfrent sur l'conomie, tels que lenvironnement, lorsqu'il s'agit pour le juge de l'OMC
Corentin Bialais Simon Ferey
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d'arbitrer sur un diffrend.
Ce sont donc bien des critres conomiques, tels qu'indiqus l'article XXXIII du GATT, qui
justifient l'accession d'un membre l'organisation, la condition premire tant de disposer
d'une entire autonomie dans la conduite de sa politique commerciale .
Dans le domaine des Relations Internationales, les organisations internationales ont pour la
plupart un mandat dans un domaine de comptences bien particulier, l'conomie et relations
commerciales pour l'OMC, la condition des enfants l'UNICEF, l'nergie atomique pour
l'AIEA, le travail l'OIT, la sant l'OMS, etc...
Ainsi, dans chaque organisation, des critres diffrents s'appliquent. Il n'est alors pas tonnant
de constater que certaines entits sont reprsentes et donc reconnues dans certaines
organisations mais pas l'ONU. Par exemple, l'Organisation internationale de la
Francophonie met l'accent sur le critre linguistique dans la slection de ses Membres, prcis
lgalement dans Statuts et Modalits d'adhsion 53, adopt lors du IXe Sommet de la
Francophonie de 2006 Bucarest. L'entit, qu'elle soit un pays ou non, qui se porte candidate
doit en effet respecter un nombre important de critres linguistiques, tels que la prsence de la
langue franaise dans l'espace pdagogique, dans l'espace culturel ou encore dans l'espace de
communication. On comprend ds lors que c'est le domaine de comptences de l'organisation
internationale qui dtermine les critres de slection et la pertinence ou non d'y inclure des
membres qui ne sont pas des tats au sens politique.
De ce fait, le Qubec et le Nouveau Brunswick sont membres de l'OIF, au mme titre que le
Canada, bien que ce soient des provinces, entits fdres. C'est aussi le cas de la fdration
Wallonie-Bruxelles, reprsente au mme titre que la Belgique.
Dans le domaine du sport, un autre exemple dmontre la ncessit de s'adapter au domaine
concern. Le Comit international Olympique, qui organise les Jeux Olympiques se donne
pour mission que tous les sportifs de haut niveau puissent y participer, il existe ainsi un
groupe d'athltes apatrides pour les individus n'ayant aucune nationalit.54 A titre d'exemple,
lors des derniers Jeux Olympiques, un athlte de l'le de Curaao, dont l'indpendance n'est
pas reconnue a couru sous les couleurs de l'IOA (International Olympic Athletes).
Ce pragmatisme permet une meilleure reprsentation de la ralit dans un domaine donn, et
permet de justifier la prsence de Tawan, Hong Kong et Macao comme membres de l'OMC.
53 Statuts et modalits dadhsion la Confrence des chefs dtat et de gouvernement ayant le franais en
partage - http://www.francophonie.org/IMG/pdf/adhesion_bucarest_2006-2-2.pdf 54http://www.20minutes.fr/sport/979703-20120731-londres-2012-moi-reginald-windt-athlete-apatride
Corentin Bialais Simon Ferey
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En effet, ces trois entits ont une conomie forte, et des changes commerciaux de grande
ampleur, notamment en termes d'exportations. Tawan et Hong Kong sont parmi les quatre
dragons asiatiques qui ont merg il y a dj plusieurs dcennies, et Macao possde une
conomie touristique, dont ses casinos qui en fait un territoire riche.
Les critres conomiques, tels que le PIB ou les changes commerciaux et le fait que leurs
conomies sont tournes vers l'extrieur sont la justification majeure de la prsence de
Tawan, Hong Kong et Macao comme membres de l'OMC.
Conclusion Lhistoire conflictuelle de la Chine pose encore aujourdhui des difficults juridiques
et politiques importantes quant la reprsentation de Taiwan, Hong-Kong ou Macao dans les
organisations internationales. Cette difficult provient de la relation souvent rigide
quentretiennent ces organisations, en premier lieu les Nations-Unis, avec la dfinition de la
souverainet.
En proposant une formule daccession souple et qui dpasse le concept de souverainet,
lOMC fait figure dexception dans le systme mondial et parvient intgrer ces quatre
entits avec succs. Encore mieux, en incluant ces nouveaux membres, lOMC a donn une
plateforme efficace ses pays pour ngocier leurs accords rgionaux.
Pourtant, cette situation nest pas sans poser de nouveau problmes. Les difficults
diplomatiques entre Taiwan et la Chine semble les inhiber dutiliser directement lorgane de
rglement des diffrends pour rgler lun contre lautre, de mme pour Hong-Kong et Macao.
Du ct de lorganisation, laccession des trois territoires douaniers distincts, si elle permet de
passer outre les barrires de la souverainet, ne permet pas en revanche de dpasser les
questionnements sur lquit de la reprsentation au sein de lorganisation.
LOMC en ayant accept ces trois entits au statut juridique encore incertain en droit
international sera confront tt ou tard lvolution de leurs situations respectives. Dabord,
si rien ne change, en 2047 et en 2049 lorsque la priode de transition de Hong-Kong et Macao
sera achev, ces territoires deviendront des entits rgulires au sein de la Rpublique
Populaire et perdront ainsi leur autonomie. De mme, bien quil soit envisageable que le statu
quo entre Taiwan et la Chine soit encore maintenu longtemps, de nombreuses forces, dans la
socit Taiwanaise ou dans les couloirs de la diplomatie chinoise pressent la runification des
deux rives du dtroit de Taiwan. A contrario, lindpendance de Taiwan est encore un sujet
Corentin Bialais Simon Ferey
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dactualit et notamment dfendu par le principal parti dopposition Taipei. LOMC sera
ainsi confronte des questions politiques majeures au moins long terme. Sera-t-il possible
dexclure des membres qui ont perdu toute autonomie ? A linverse est-il possible de
transformer un territoire douanier distinct en membre rgulier ? Sur ces questions, lONU qui
ne reconnait aucune de ces entits ne pourra pas apporter de rponse et lOMC sera donc bien
oblig de traiter une question dordre essentiellement politique contrairement son
souhait de se prserver de ces questions.
Certains auteurs nhsitent pas parler de menace de politisation de lOMC avec
laccession de Taiwan et de la Chine. A titre dexemple, la Chine a longtemps critiqu le fait
que la dlgation Taiwanaise lOMC porte le nom de Mission Permanente comme les
autres Etats alors que Hong Kong et Macao ont une dlgation dsign par lexpression
Bureau de commerce . LOrganisation a finalement cd aux pressions chinoises et le
Blue Book de lOMC qui comprend les coordonnes de chaque dlgation Genve ne
fait plus de mention de Mission Permanente pour Taiwan.55
55 Arie Reich, The Threat of Politicization of the WTO, University of Pennsylvania journal of international
economic law, Vol. 26 (4), 779814 (2005)
Corentin Bialais Simon Ferey
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Annexe 1 : chronologie (tir de Choukroune Lela. La Chine et l'OMC
en dates. In: Perspectives chinoises. N69, 2002. pp. 78-80.)
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