MINISTÈRE DE L'ENVIRONNEMENTService de l'Eau
migration des nitratesdans la zone non saturée
de la craie de Champagne
interprétation des résultats d'une campagne de carottagessous un champ d'épandages d'effluents agricoles
Connantre - Marne
BRGM
MINISTÈRE DE L'ENVIRONNEMENTService de l'Eau
14, boulevard du Général-Leclerc - 92524 NEUILLY-SUR-SEINE CEDEX
migration des nitratesdans la zone non saturée
de la craie de Champagne
interprétation des résultats d'une campagne de carotta g essous un c h a m p d'épandages d'effluents agricoles
Connantre - Marne
J.-J. Seguinavec la collaboration de
F. Moreau*
'Service Géologique Régional Aquitaine
mars 1 98686SGN 172 EAU
BUREAU DE RECHERCHES GÉOLOGIQUES ET MINIÈRESSERVICE GÉOLOGIQUE NATIONAL
Département EauB.P. 6009 - 45060 ORLÉANS CEDEX 2 - Tél.: (33) 38.64.34.34
RESUME
Les résultats que l'on présente dans ce rapport, établi à la demande du
Ministère de l'Environnement (convention 84/13), sont issus de l'exploitation de
nombreuses mesures de teneurs en nitrates réalisées depuis 1979 dans la zone non saturée
de la nappe de la Craie en Champagne (commune de Connantre, 51).
Aux échantillons d'eau prélevés en 1979 sur carottes, ont succédé des
prélèvements effectués annuellement à partir de bougies poreuses installées jusqu'à 15 m
de profondeur. Afin de lever toute incertitude quant à la représentativité des résultats
obtenus, qui ne concernaient qu'une verticale, une campagne de forages a pu être menée
en octobre 1985 sur la m ê m e parcelle.
L'interprétation de l'ensemble des mesures disponibles a permis de conclure à
l'existence d'un stock d'azote nitrique en déplacement très lent dans la zone non saturée ;
tous les profils réalisés sont caractérisés par un certain nombre de m a x i m u m s , en phase et
d'amplitude concordante, qui ont pu être reliés aux épisodes culturaux de surface ; en
particulier, il a été montré l'impact de l'azote des eaux résiduaires de sucrerie, reçues par
la parcelle, sur les concentrations en nitrates de l'eau interstitielle.
C e travail a pu être mené à bien grâce au concours du Service Géologique
Régional Champagne-Ardennes.
SOMMAIRE
INTRODUCTION 1
1. - CADRE DE L'ETUDE 3
1.1 - Sols et cultures 3
1.2 - Zone non saturée 7
1.3 - Contexte climatique 9
2. - R E S U L T A T S D E J A A C Q U I S 13
2.1 - Caractérisation du profil de teneurs de 1979 13
2.2 - Vitesse de migration des nitrates *3
3. - CAMPAGNE DE CAROTTAGES DE 1985 15
3.1 - Prélèvements des échantillons et analyses l5
3.2 - Présentation des résultats 16
4. - MODELISATION E T INTERPRETATION D E S M A X I M U M S D E T E N E U R S
A 3 M DE PROFONDEUR 2 3
4.1 - Ordre de grandeur des quantités d'azote lessivées 2 3
4 . 2 - Reconstitution du profil F 1 2 2 3
C O N C L U S I O N 27
BIBLIOGRAPHIE 2 8
A N N E X E S
Annexe 1 - Description du modèle utilisé pour la reconstitution du profil des
teneurs en nitrates sur le forage F12 31
Annexe 2 - Résultats des analyses effectuées par le Laboratoire Municipal et
Régional de Reims 35
Annexe 3 - Résultats des analyses effectuées 38
- par le laboratoire du B R G M à Orléans
- par le laboratoire de la Chambre d'Agriculture du Loiret
Annexe 4 - Analyse des teneurs en eau et en nitrates d'un échantillon de craie.
Mode opératoire du Laboratoire Municipal et Régional de Reims 39
INTRODUCTION
L'épandage des eaux résiduaires d'industries agricoles -distilleries, féculeries,
sucreries, usines de déshydradatation- est une pratique qui se répand de plus en plus en
Champagne et qui concerne actuellement plusieurs milliers d'hectares.
Ces eaux, très chargées en de nombreux éléments (chlorures, sodium,
potassium, sulfates, azote, ...) constituent un matériau fertilisant certain, notamment en
raison de leur teneur en azote et potassium ; elles peuvent néanmoins représenter à terme
une menace pour les nappes des régions concernées : quelques-uns de leurs constituants
sont en effet très mobiles : l'azote nitrique, les chlorures et, dans une moindre mesure, le
sodium et les sulfates ; des épandages excessifs, alliés à un lessivage intense possible des
sols, peuvent entraîner rapidement ces éléments hors de portée du système racinaire des
cultures ainsi fertilisées.
En principe, les doses d'épandage sont calculées de façon à minimiser et les
risques d'accumulation dans les sols (pour le potassium) et les risques de migration en
profondeur (nitrates et chlorures essentiellement). En fait, une partie des éléments en
cause aura déjà pu migrer en profondeur avant que la capacité de reprise des plantes soit
effective (les épandages ont lieu en automne et la phase de drainage des sols se situe de
décembre à début avril). D e plus, la variabilité de la composition des effluents d'une
campagne d'épandage à l'autre rend difficile un ajustement précis aux besoins des cultures
(qui sont d'ailleurs très faibles exportatrices de chlorures et de sodium).
Afin d'apprécier l'impact de ces effluents sur les nappes, plus particulièrement
les risques de pollution par les nitrates, le Service Géologique Régional de Champagne -
Ardennes ( B R G M ) a mis en place dans les zones concernées des réseaux de surveillance
dont les points sont régulièrement échantillonnés. Parallèlement au suivi de ces réseaux,
de nombreux carottages ont été réalisés dans la zone non saturée des champs d'épandages
afin d'analyser l'eau interstitielle ; de plus, 2 sites ont été équipés de bougies poreuses
placées à différentes profondeurs et permettant un prélèvement régulier de cette eau
interstitielle.
Le premier dispositif de prélèvements a été installé dès 1979 sur une parcelle
de la c o m m u n e de Connantre près de Châlons-sur-Marne (51) ; cette parcelle, à
l'historique cultural connu, a reçu durant l'hiver 1979-1980 des eaux résiduaires d'une
sucrerie.
Les analyses de l'eau extraite, effectuées annuellement, ont permis de suivre
l'évolution des profils de teneurs en azote nitrique. Les maxima caractérisant ces profils
sembleraient se déplacer très lentement, parcourant 40 à 60 c m par an.
En 1983, sur une parcelle voisine, un deuxième forage était réalisé puis équipé
également de bougies poreuses. Toutefois, se posait le problème, inhérent à toute mesure
faite sur une grandeur spatialement distribuée, de la représentativité des résultats
obtenus. Afin de lever toute incertitude sur ce point, une série de forages régulièrement
espacés était réalisée en octobre 1985 sur une centaine de mètres toujours dans la m ê m e
parcelle.
C'est à l'interprétation des résultats de cette dernière campagne de mesures et
à leur confrontation avec ceux déjà obtenus sur le m ê m e site que se consacre cette note.
1 - LE CADRE DE L'ETUDE
La parcelle sur laquelle les forages ont été réalisés est située à proximité de
Connantre à une quarantaine de kilomètres au sud-ouest de Châlons-sur-Marne (fig.l) ;
elle est incluse dans la zone d'épandage des eaux résiduaires de la sucrerie de Connantre.
La figure 2 précise la localisation exacte du site d'études.
1.1 - Sols et cultures
Sols
C o m m e de nombreux sols de la région, le sol recevant les effluents est une
rendzine brune formée sur la craie du Sénonien inférieur.
La craie, fissurée et altérée, apparaît dès 50 c m de profondeur. Ces sols ont
une bonne réserve hydrique c o m m e l'indique le tableau 1 suivant qui reprend des valeurs
moyennes issues d'une étude menée par la station INRA de Châlons (réf.l).
Profondeurcm
0-5050 - 100100 - 150
Réserve en eaumm
110150160
Tableau 1 - Réserve en eau d'une rendzinebrune (valeurs moyennes)
La capacité de réserve en eau (définie c o m m e la différence entre l'humidité en
volume à la capacité au champ et l'humidité au point de flétrissement sur une certaine
profondeur de sol) apparaît donc importante : 420 m m sur une épaisseur de 1,50 m (réserve
théorique).
Le réservoir superficiel de ces sols peut être alimenté par des transferts d'eau
ascendants en raison de la continuité de la porosité de la craie sous-jacente, si bien qu'en
Figure 1 - Pian de situation générale, échelle 1/250 000
mantre
Figure 2 - Localisation des forages (extrait de la carte à 1/25 000, Sézanne 3-4)
période de sécheresse le taux de saturation de la porosité totale reste élevé (pouvant
dépasser 50 %) ; l'épuisement du réservoir superficiel n'est donc jamais total et sur les
420 m m de réserve théorique, 140 à 150 m m environ pourront être effectivement extraits
(réf.2).
Cultures et fertilisation
La rotation pratiquée depuis 1960 associe essentiellement 3 cultures (tabl.2)
luzerne (3 années de suite),
blé et betterave succédant à la luzerne et alternant sur 5 ans.
Le pois et la p o m m e de terre font leur apparition en 1983 et 1985.
Années
19601961196219631964196519661967196819691970197119721973197419751976
1977197819791980
19811982198319841985
Cultures
LuzerneLuzerneLuzerne
BléBetteraves
BléBetteraves
BléLuzerneLuzerneLuzerne
BléBetteraves
BléBetteraves
BléLuzerne
LuzerneLuzerne
BléBetteraves
BléEscourgeon
PoisBlé
P o m m e s de terre
Fertilisationkg N/ha
-_
140160160160160
--_
160160160160160
Epandage de cossettesde betteraves
--
160Epandage de 78 m m
d'eaux de sucrerie160140
-160200
Tableau 2 - Cultures et fertilisation sur la parcelleConnantre (51) depuis 1960
de
Les doses d'engrais appliquées sont à peu près constantes depuis 1960 (tabl.2) :
160 kg d'azote N fertilisent les cultures de blé et betterave (200 kg/ha en 1985 sur p o m m e
de terre). A titre de comparaison, un quintal de grain exporte environ 1,8 kg d'azote N .
Pour des rendements en blé de 70 à 80 qtx, c'est donc 125 à 145 kg d'azote N qui seront
exportés.
Durant l'hiver 1979-1980, 78 m m d'eaux boueuses de sucrerie ont été épandues,
soit un apport de 600 kg d'azote organique environ.
Les études sur les cinétiques de minéralisation de l'azote des eaux résiduaires
d'industries agricoles menées par l'INRA conduisent à estimer que 25 % de l'azote
organique des eaux de sucrerie est susceptile de minéraliser la première année (tabl.3).
Végétal
Betterave
P o m m e de terre
Luzerne
Industrie
SucrerieDistillerieFéculerie
(avec récupérationde protéines)Protéinerie
Azote nitrique(% azote total de l'effluent)
après16 semaines
1228
34
70
48 semaines
2341
40
75
Tableau 3 - Azote nitrique susceptible d'être libéré par les eaux résiduaires(d'après expérimentation en laboratoire, réf. 9)
O n peut donc estimer à 150 kg environ la quantité d'azote N libérée la
première année par les eaux boueuses épandues.
1.2 - Zone non-saturée
La zone non-saturée est constituée par la Craie du Sénonien. Le temps de
transfert des substances polluantes dans cette zone et donc la rapidité de contamination
de la nappe dépend de quelques unes de ses caractéristiques :
épaisseur,
porosité (liée au degré de fissuration),
perméabilité matricielle (et plus globalement conductivité hydraulique).
* Epaisseur. Elle varie en fonction des fluctuations de la nappe (qui peuvent être de
plusieurs mètres). Le forage réalisé en 1979 et ceux de septembre 1985 atteignaient
la profondeur de 15 m .
* Porosité. La porosité totale dans ce type de matériau est comprise entre 40 et 50 %. L e
tableau 4 ci-dessous indique pour quelques sites autour de Châlons-sur-Marne des
valeurs de porosité de craie en place et d'échantillons. Bien que la profondeur
d'investigation ne dépassait pas 1,50 m , de telles valeurs peuvent sans doute
s'appliquer aux couches plus profondes. La porosité mesurée au laboratoire sur
échantillons est de l'ordre de 40 % (variant de 37 à 44 %). Par différence, il a été
déduit une porosité de fissures de 3 à 10 %.
Sites
Sénonien inférieur1
2
3
Coniacien4
5
6
Santonien7
Profondeurcm
90-100*140-15080-120*120-160100-120
100-110*120-130130-15090-100*
130-150120-130
140-150
Porosité de lacraie en place
%
52,250,843,442,340,7
51,648,7
55,046,247,8
Porositéd'échantillons
%
42,540,139,939,5
37,443,9
41,136,9
39,0
* craie remaniée par cryoturbation
Tableau 4 - Porosité de la craie dans la région de Châlons-sur-Marne (réf.l)
* Perméabilité. Les mesures de perméabilité matricielle réalisées au laboratoire sur
carottes cylindriques fournissent des valeurs très faibles, proches de celles caractéri-
sant une argile (10~8 m / s ) .
Toutes ces caractéristiques conduisent à formuler l'hypothèse d'une double
circulation d'eau : une partie de l'eau infiltrée emprunterait la voie fissurale
(circulation rapide), tandis qu'une autre partie (l'eau interstitielle) migrerait très
lentement sous l'effet d'un potentiel matriciel prépondérant. Cette hypothèse permet
d'expliquer l'augmentation des teneurs en nitrates dans la nappe, malgré les très
faibles vitesses de migration constatées dans la zone non saturée.
1.3 - Le contexte climatique
II a été caractérisé sur les 8 dernières années (1977-1984) par :
la hauteur de pluie, fournie par la station de Janvilliers, située à une vingtaine de
kilomètres au nord-ouest de Connantre,
l'ETP, calculée au pas de temps mensuel à l'aide de la formule de Turc, température
et durées d'insolation provenant de la station météorologique de Reims,
les précipitations efficaces, c'est-à-dire la lame d'eau qui s'infiltre en direction de la
nappe (l'entraînement des nitrates en profondeur en est fonction).
Le tableau 5 ci-dessous présente les valeurs annuelles de pluie et d 'ETP.
Années
pluie (mm)
ETP (mm)
1977
733
600
1978
732
568
1979
624
564
1980
709
564
1981
971
573
1982
725
633
1983
701
615
1984
848
567
Tableau 5 - Précipitations et E T P sur 8 ans à Connantre
La moyenne sur 8 ans est de 760 m m pour la pluie, de 585 m m pour l'ETP.
Les précipitations efficaces ont été obtenues à l'aide d'un bilan au pas de
temps mensuel en faisant intervenir une valeur de réserve en eau du sol (bilan de type
Thornthwaite). L'année considérée est une "année hydrologique" (septembre à août).
Année
1977
1978
1979
1900
1981
1982
1983
1984
1985
Janv
57
76
33
33
58
66
43
78
37
Fevr
77
56
71
61
42
0
55
49
9
Mars
31
108
26
66
60
63
20
18
52
Avr.
0
5
6
0
0
0
73
0
10
Mai
0
0
4
0
0
0
31
11
1
Juin
0
0
0
0
0
0
0
0
0
Juil.
0
0
0
0
0
0
0
0
-
Août
0
0
0
0
0
0
0
0
-
Sept.
0
0
0
0
0
0
0
0
-
Oct.
0
0
0
0
118
0
0
58
-
Nov.
7
0
0
0
TI
37
0
53
-
Dec.
35
35
16
0
92
112
0
32
-
Année
212
281
156
161
398
279
221
290
-
AnnéeHydrologique
291
175
176
160
361
370
156
252
Tableau 6 - Précipitations efficaces (en m m ) calculées avec une réserve en eau de 100 m m
11
La valeur de réserve en eau retenue est de 100 m m ; c'est une valeur de
référence classiquement utilisée, mais qui doit être modulée en fonction des
caractéristiques pédologiques locales. Elle est utilisée ici c o m m e base de calcul.
Les résultats obtenus figurent dans le tableau 6 qui permet de constater que les
précipitations efficaces se répartissent essentiellement sur une période de 5 mois, de
novembre à mars (parfois avril et mai) ; sur les 8 années considérées, elles sont toujours
restées supérieures à 150 m m ; la moyenne est d'environ 240 m m , le m a x i m u m observé
étant de 370 m m (en 1982-1983).
Remarques.
1 - Dans le contexte climatique de la Champagne, l'évapotranspiration réelle pour une
culture de blé a été évaluée à 515 m m et pour une culture de betterave à 475 m m
(réf.3) ; l'évapotranspiration potentielle annuelle calculée sur 8 ans (585 m m ) est donc
cohérente avec ces valeurs.
2 - La quantité d'eau drainée annuellement dans la région de Châlons a été mesurée à
2 m de profondeur sous lysimètres cultivés (réf.3) ; pour la période 1973-1980 la
moyenne était de 160 m m , ce qui est plus faible que la moyenne des précipitations
efficaces (240 m m ) calculée avec une réserve en eau de 100 m m (choisie a priori
c o m m e indiquée ci-dessus, et qu'il est donc possible d'ajuster de façon à tendre vers
les résultats expérimentaux).
12
50 100 150 200 250 300 350 N03(mg/l)
Figure 3 - 2 profils de teneurs en nitrates obtenus en 1979 et 1985 à partir de carottages.
Connantre (51) : forages F E X SI et FI
13
2. - RESULTATS DEJA ACQUIS
2.1 - Caractérisation du profil de 1979
En juin 1979, un premier forage (noté F E X SI) était réalisé (profondeur
atteinte : 15 m ) et des échantillons de craie étaient extraits à la tarière hélicoïdale tous
les 50 cm (réf.7). L'analyse de l'eau de ces échantillons a permis d'établir le profil de
teneurs en azote nitrique de la figure 3.
Une interprétation de ce profil a été faite (réf.7) à l'aide d'un modèle "rustique"
simulant la migration de l'azote nitrique par des déplacements de type piston (ce modèle,
mis au point au "Water Research Centre" est couramment utilisé en Angleterre pour
prévoir l'évolution des teneurs en nitrates des nappes de la craie ; une description en est
donnée en annexe).
Il était alors mis en évidence une vitesse de migration de l'ordre de 50 cm/an .
D'autre part, les maximums de concentration observés ont pu être mis en relation avec des
situations culturales précises :
ainsi, le "pic" III à 7-8 m de profondeur (fig.3), était relié au déboisement de l'année
1955 libérant une forte quantité d'azote organique,
le "pic" II était attribué à la succession blé-betteraves des années 1963 à 1967 ;
le "pic I" était attribué à un épandage de cossettes de betteraves sur luzerne en 1977.
2.2 - Vitesse de migration des nitrates
Afin de suivre l'évolution de ce profil, un dispositif de prélèvements d'eau par
bougies poreuses était installé : 10 bougies étaient mises en place à différentes profondeurs
(1, 2, 3, 4 , 5, 6, 7, 9, 11 et 15 m ) .
La figure 4 montre comment le profil a évolué en 4 ans (les résultats relatifs
aux années 1983 et 1984 n'ont pas été reportés en raison du non fonctionnement des bougies
situées en profondeur).
O n peut suivre en particulier la progression du pic situé à 7,50 m en juin 1979 et
que l'on retrouve à 9,50 m en mars 1982, soit donc un déplacement de 2 m en 3 ans ; le
déplacement annuel moyen apparaît un peu plus fort que celui simulé en raison de
précipitations efficaces assez fortes en 1981 et 1982 (tabl.6) et de l'épandage d'eaux
boueuses durant l'hiver 1979-1980 (78 m m ) .
Bougrf% groupfrl
O 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 110 120 130 140 150 180 170 180 190 200 210 220 230Q _|. I • J • 1 I
I -
2
3
4
9
6
7
8
9
3
15-
/ i
I ¡
nitrates «n m g / l g(«ou Interstitlsllo)
valeurs mesuróos
——- Juin 1979décembre 1979mors 1980mors 1981mors 1982
Dispositif de mesures
Figure * - Evolution des profils de teneurs en nitrates au forage F E X SI
Site de Connantre (1979-1982)
15
3. - LA C A M P A G N E D E C A R O T T A G E S D E 1985
3.1 - Prélèvement des échantillons et analyses
Dans la parcelle du premier forage réalisé (FEX SI en 1979) et partant de
celui-ci, 12 forages espacés les uns des autres d'une dizaine de mètres furent exécutés en
septembre 1985 suivant une direction N E - S O (fig.2).
Sur le premier forage (noté FI) et le dernier (noté F12) de cet alignement, un
échantillon de craie a été prélevé tous les 50 cm à la tarière hélicoïdale sur une
profondeur de 15 m , soit donc 30x2 = 60 échantillons. En parallèle, à 3 m , 5 m , 10 m et
15 m , des échantillons furent également extraits au carottier (méthode moins
destructrice).
Sur chacun des 10 forages intermédiaires, 3 échantillons furent prélevés au
carottier : à 3 m , 5 m et 10 m , soit un total de 3 x 10 = 30 échantillons. Les échantillons
ont été analysés au Laboratoire Municipal et Régional de Reims. D e plus, afin d'étayer les
résultats obtenus, 11 échantillons ont été analysés par la Chambre d'Agriculture du Loiret
d'une part, le Laboratoire du B R G M (Orléans) d'autre part.
L'accord entre les 3 séries de mesures peut être jugé satisfaisant c o m m e le
fait apparaître le tableau 7 ci-après (sauf peut-être sur les 3 premiers mètres).
Profondeurm
1,52,53,04,05,05,56,06,57,07,5
Laboratoire Municipalde Reims
235356329163523735495855
Laboratoire B R G MOrléans
168304260*136523232435655
Chambre d'Agriculturedu Loiret
164301252*152764938607581
* extraction au carottier
Tableau 7 -Comparaison des mesures d'azote nitrique effectuées par 3 laboratoiressur 10 échantillons de craie (site de Connantre)
16
Enfin, l'accord entre les teneurs mesurées sur échantillons prélevés à la tarière
et celles mesurées sur échantillons extraits au carottier est également relativement
satisfaisant (tabl.8).
Profondeurm
3
5
1015
Forage FI
tarière
329
52
75,58
carottier
252*260**
54*34**8914
Forage F12
tarière
145
28
789
carottier
128
18,5
849
* Chambre d'Agriculture - * * B R G M
Tableau 8 - Comparaison des analyses N O 3 (en mg/1) sur échantillonsprélevés à la tarière et au carottier
3.2 - Présentation des résultats
3.2.1. Caractéristiques hydriques des profils
Les teneurs en eau mesurées au Laboratoire de Reims sont présentées, pour les
profils 1 et 12, dans le tableau 9 ; exprimées, au sortir du laboratoire, en pourcent de la
masse de l'échantillon humide (notation H m h ) , elles ont été converties en pourcent de la
masse de l'échantillon sec (notation : H m ) qui est un référant plus fréquemment
rencontré :
H m x 100 = mh x 100
17
Profondeuren m
0,51,01,52,02,53,03,54,04,55,05,56,06,57,07,58,08,59,09,510,010,511,011,512,012,513,013,514,014,515,0
Forage FI
Teneur
% poidshumide
14,618,821,219,721,022,223,223,022,823,522,723,020,922,121,723,221,921,722,221,422,422,322,022,622,122,322,520,922,123,0
en eau
% poidssec
17,123,226,924,526,628,530,229,929,530,729,429,926,428,427,730,228,027,728,527,228,928,728,229,228,128,729,026,428,429,9
Forage F12
Teneur en eau
% poidshumide
15,720,020,821,121,021,222,822,322,022,322,220,422,421,622,522,822,622,221,821,823,221,822,022,521,822,322,320,221,721,8
% poidssec
18,625,026,326,726,626,929,528,728,228,728,525,628,927,629,029,529,228,527,927,930,227,928,229,021,928,728,725,327,727,9
Tableau 9 - Distribution des teneurs en eau sur les profils FI et F12
18
A partir de 1,50-2 m , ces teneurs varient très peu c o m m e l'indique le
tableau 10.
Forages
Moyenne (en %)Ecart-type
Valeur minimaleValeur maximale
FI
28,641,15
26,430,7
F12
28,181,11
25,330,2
Tableau 10 - Caractéristiques des profils deteneurs en eau pondérales H m , àpartir de 2 m de profondeur
Afin d'évaluer le degré de saturation des échantillons (par rapport à la porosité
totale), il est nécessaire de convertir les teneurs en eau massique H m en teneurs
volumiques H v ; cela est possible si l'on connaît la masse volumique apparente pa des
échantillons, c'est-à-dire le rapport de la masse de l'échantillon sec au volume occuppé
par l'échantillon. O n a dans ce cas : pe désignant la masse volumique de l'eau :
H v = pa / pe H m = H m . da
où da est la densité apparente. Des mesures effectuées par l'INRA sur la craie sénonienne
dans la région de Châlons-sur-Marne conduisent à des valeurs de da comprises entre 1,3 et
1,6 les valeurs de porosité totale variant dans le m ê m e temps de 41 à 51 % (tabl.3, § 1.2).
Si l'on considère une valeur moyenne da = 1,45 et pour une densité réelle dr
de 2,68, on obtient une valeur de porosité totale :
Pt = (1 - da /d r ) x 100 = 46 %
D'autre part, si l'on prend c o m m e teneur en eau massique moyenne 28,6 %
(tabl.10), on obtient, avec la densité apparente moyenne de 1,45, une teneur en eau
volumique de 41 %. La porosité totale calculée ci-dessus intégrant la porosité de
fissuration, on peut conclure que la porosité matricielle est donc, à l'époque des
prélèvements, proche de la saturation à partir de 2 m de profondeur.
19
Dans le premier mètre de sol, la réserve en eau apparaît en partie épuisée
(tabl.ll).
Profondeurcm
0 - 5 050 - 100
Humitité volumique%
FI
24,833,6
F12
27,036,2
Tableau 11 - Teneur en eau en FI et F12 surle premier mètre (site deConnantre)
3.2.2. Teneurs en azote nitrique
O n trouvera en annexe l'ensemble des résultats d'analyses issus du Laboratoire
de Reims.
La figure 5 montre les profils de teneurs en azote nitrique obtenus sur les
forages FI et F12, distants d'une centaine de mètres. O n remarquera l'excellente
simulitude de ces profils au-delà de 5 m de profondeur. On remarquera également
l'existence d'un pic de teneurs vers 2-3 m , pic beaucoup plus important en FI (360 mg/1)
qu'en F12 (210 mg/l).
Les figures 6 a, b, c visualisent les résultats obtenus pour les 12 forages à 3, 5
et 10 m . Si les teneurs varient assez peu d'un forage à l'autre à 5 m et 10 m , elles sont par
contre beaucoup plus fluctuantes à 3 m . Le tableau 12 résume ces observations.
Caractéristiquesmg/1
Valeur minimaleValeur maximale
MoyenneEcart-type
3 m
8032919863
5 m
17523113
10 m
621188214
Tableau 12 - Caractéristiques statistiques des teneurs enN O 3 à 3, 5 et 10 m de profondeur sur12 forages -Connantre
20
O 50 100N03(mg/l)
150 200 250 300 350 400
Figure 5 - 2 profils de teneurs en nitrates expacés d'une centaine de mètres
Site de Connantre (forages FI et F12), octobre 1985
21
¿23
o£352..ro
i -333 1
i250 j
200
150..
100..
50 . .
50
ß¿00 4_
10 11 12
10 11 1?
6a 3 m
6b 5 m
6c 10 m
Figure 6 - Teneurs en nitrates à 3, 5 et 10 m de profondeur aux 12 forages
Site de Connantres, octobre 1985
23
4. MODELISATION ET INTERPRETATION DES TENEURS A 3 M DE PROFONDEUR
4.1 - Ordre de grandeur des quantités d'azote lessivées
Afin d'avoir une estimation de la quantité d'azote déterminant les
concentrations observées à 2-3 m de profondeur, un calcul sommaire a été réalisé en
supposant que la concentration moyenne C observée à 3 m , soit 200 mg/1 environ (tabl.12)
pouvait être affectée à une colonne de hauteur z = 0,50 m et de teneur en eau uniforme
H v = 0.4 ; la quantité d'azote M mise en jeu est alors données par :
M = C . (Hv . z) x 10
avec M en kg/ha quand C est exprimée en mg/1 et z en m .
Les valeurs précédentes conduisent à :
M = 400 kg N O 3 / h a = 90 kg N/ha
S'agissant d'une quantité d'azote située à 3 m de profondeur donc hors de portée du
système racinaire des cultures, le chiffre apparaît important.
Par ailleurs, il a été calculé, à l'aide du profil de teneurs caractérisant le
forage F12 (fig.5) la quantité d'azote comprise entre 1 et 4 m de profondeur :
Ml4= ^ 4 C(z) Hv(z) dz = H v ff C(z)dz
4 = 1 740 kg NO3 /ha = 395 kg H/ha
Si l'on peut espérer qu'une fraction de cette quantité puisse être récupérée par
les cultures, il demeure néanmoins la quasi-certitude que le reliquat irréversiblement
entraîné en profondeur sera important.
4.2 - Reconstitution du profil F12
Afin de préciser ces chiffres, une reconstitution du profil F12 a été tentée à
l'aide du modèle de simulation déjà employé sur le forage F E X SI en 1979.
24
Les valeurs définitives des paramètres utilisés pour le calage sont les
suivantes :
nombre de noeuds de calcul : 30
porosité matricielle : 40 %,
porosité de fissures : 8 %
coefficient de "dispersion" : 5.10-2 m 2 / a n
coefficient de perte sur engrais épandu :
. 6 % (blé),
. 8 % (betteraves et p o m m e s de terre),
correction sur réserve en eau : + 80 m m .
La phase de calage a permis de préciser la valeur de réserve en eau du sol : la
valeur de 100 m m initialement considérée est apparue trop faible pour obtenir un
positionnement correct des max imums observés. C'est en définitive une correction
positive de 80 m m qu'il a fallu prendre en compte, soit donc une réserve d'eau de 180 m m
qui conduit à une valeur moyenne de précipitations efficaces de 160 m m (rejoignant celle
issue de mesures sur cases lysimétriques, cf 1.3).
La figure 7 permet de conclure à une reconstitution relativement satisfaisante
du "pic" de concentrations observé.
2¿0 3ÖOteneurs en HO3 (mg/l)
Figure 7 - Comparaison entre profil observé (0 à 6 m ) et profil simulé
25
Le tableau 14 indique pour chacun des noeuds de calcul la masse d'azote N
obtenue et la concentration en azote nitrique correspondante.
Noeud
12345678910111213141516171819
1 1Profondeur Hauteur d'influence Teneur en eaudes noeuds
m
0,1980,4830,9041,5611,9762,2682,5772,9293,2693,3793,7094,0894,3344,6624,9455,1185,1645,5406,080
des noeuds decalcul
m
0,3960,1750,6670,6460,1840,4000,2190,4850,1950,0230,6370,1240,3660,2900,2760,0690,0230,7290,352
0,4000,4000,4000,4000,4000,4000,4000,4000,4000,4000,4000,4000,4000,4000,4000,4000,4000,4000,400
Masse Azote N
g/nr>2
2,851,714,549,133,337,393,174,561,320,142,950,561,631,311,250,310,103,151,42
ConcentrationNO3
mg/1
79,90108,4775,34
156,42200,21204,38160,61104,1675,0468,8751,2049,5949,5050,0849,9749,4449,2847,8544,81
Tableau 14 - Masse d'azote N et teneurs en nitrates entre 1 et 6 m de profondeur
calculées par le modèle (forage F12)
La quantité d'azote N contenu dans le profil calculé entre 1 et 4 m est de
365 kg/ha (395 kg/ha dans le profil observé).
Plus intéressants à connaître sont les reliquats azotés (lessivables) qui ont pu
engendrer ces valeurs. Leur répartition dans le temps est donné par le tableau 15.
26
Année
1978-19791979-1980
i 1980-19811981-19821982-19831983-19841984-1985
Azote N lessivékg/ha
1090
17068104026
Tableau 15 - Reliquats cPazote N(en kg/ha) potentiellementlessivables obtenus aprèscalage
Sur 3 années de 1980 à 1982, la quantité d'azote N entraînée a été très
importante : plus de 300 kg/ha avec un m a x i m u m en 1981 (170 kg/ha). L'explication de
cette situation est très vraisemblablement à rechercher dans l'épandage d'eaux résiduaires
qui a eu lieu durant l'hiver 1979-1980 : 80 m m d'eaux boueuses contenant un stock d'azote
organique de 600 kg ont été alors déversées.
Rappelons (cf 1.2) que 25 % de cet azote organique peut minéraliser la
première année, ce qui représente donc un apport de 150 kg d'azote N auquel il faut
ajouter l'azote issu de la matière organique stable du sol (environ 70 kg/ha dans le
contexte pédologique champenois) et celui libéré par les résidus culturaux. Une "fuite" de
90 kg/ha l'année ayant suivi l'épandage est donc tout à fait plausible. La deuxième année
la minéralisation de l'azote organique des boues se poursuit, mais le plan de fertilisation
adopté (tabl.2) ne semble pas en tenir compte, puisque 160 kg d'azote sous forme d'engrais
sont apportés à la culture. Dans ces conditions, la perte calculée de 170 kg/ha ne paraît
pas non plus invraisemblable.
27
CONCLUSION
A la lumière des résultats obtenus grâce à la campagne de carottages de
septembre-octobre 1985 sur le site de Connantre, deux faits semblent désormais bien
acquis.
- D'une part, la zone non saturée de la nappe de la Craie contient un stock d'azote
nitrique en déplacement très lent dont la distribution sur une verticale se
caractérise par des m a x i m u m s liés à certains épisodes culturaux de surface ; cette
distribution verticale reste relativement invariante par translation horizontale
c o m m e le montre la série de forages exécutés sur une centaine de mètres
(maximums et min imums en phase, amplitudes concordantes).
- D'autre part, l'épandage d'eaux résiduaires se traduit par un apport considérable
d'azote organique dont la minéralisation progressive (sur plus d'une année), en se
superposant aux autres sources azotées (engrais non c o n s o m m é , minéralisation de
la matière organique stable du sol, restitution des résidus culturaux) engendre un
reliquat potentiellement lessivable important.
Il est donc à craindre une augmentation "brutale" des concentrations dans la
nappe lorsque de tels excédents y parviendront.
S'il y a lieu d'espérer dans les années à venir une réduction de la quantité
d'azote organique contenu dans les eaux résiduaires en raison de l'amélioration des
procédés d'épuration, il semble néanmoins que le facteur de réduction décisif de l'azote
lessivable réside dans une meilleure maîtrise de la fertilisation par une prise en compte
sur plusieurs années de la minéralisation de l'azote organique des eaux résiduaires et par
une meilleure connaissance des potentialités de minéralisation des sols recevant les
effluents.
28
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
1. BAILLIF (J.L.), 1980 .- Caractères et réserves hydriques des sols sur craie et sur
graveluches en Champagne .- Ann. Agron., 31(4), 473-485
2. BAILLIF (J.L.), 1978 .- Porosité de la craie. Appréciation de la taille et de la
répartition des pores .- Ann. Agron., 29(2), 123-131
3. BAILLIF (J.L.), DUTIL (P.), 1983 .- Lysimétrie en sol de craie non remanié.
Drainage, evaporation et rôle du couvert végétal. Résultats 1973-1980 .-
Ann. Agron., 3(9), 257-866
4. DUTIL (P.), 1982 .- L'épandage des eaux résiduaires des industries agricoles en
Champagne. Evolution des idées, solutions techniques .- S .H .F . , XVIIèmes Journées
de l'Hydraulique, Nantes, rapport n° 14
5. DUTIL (P.), M U L L E R (J.C.), 1979 .- L'épandage des eaux résiduaires des industries
agricoles en Champagne crayeuse .- C . R . Acad. Agrie, 989-1005
6. L A N D R E A U (A.), M O R F A U X (P.), 1979 .- Epandage d'effluents sur terrain agricole. Effets
sur la zone non saturée de la craie en Champagne .- Rapport B R G M 79 S G N 229 H Y D / C H A
7. L A N D R E A U (A.), M O R F A U X (P.), 1979 .- Impact des pratiques agricoles sur la minéralisation
des eaux interstitielles des terrains sous-jacents .- Rapport B R G M 79 S G N 768 H Y D
8. L A N D R E A U (A.), M O R F A U X (P.), 1981 .- Etude sur site expérimental de la propagation des
nitrates dans la craie de Champagne .- Rapport B R G M 81 S G N 640 C H A / E A U
9. M U L L E R (J.C.), 1977 .- Transformations dans le sol des déchets de l'industrie
sucrière .- Travaux Stat. Se. du Sol Châlons, pub. n° 50
10. M U L L E R (J.C.), BAILLIF (J.L.), 1985 .- Mesures des pertes en nitrates des eaux
résiduaires d'industries agricoles en Champagne crayeuse (INRA Châlons-sur-Marne)
.- In : Les nitrates dans les eaux. Congrès Paris, novembre 1985
29
ANNEXES
31
Annexe 1
DESCRIPTION DU MODELE UTILISE*
POUR LA RECONSTITUTION DU PROFIL DE TENEURS EN NITRATES
SUR LE FORAGE F12
Le modèle permet de reconstituer un profil d'azote le long d'une verticale de
la surface du sol à la nappe, puis éventuellement de suivre l'évolution de ce profil sous
différents scénarios.
Le pas de temps est annuel ; les variables nécessaires au fonctionnement du
modèle sont :
les précipitations efficaces annuelles,
les doses d'engrais appliquées chaque année,
les cultures pratiquées.
Le programme comprend deux fonctions indépendantes :
une fonction production azote,
une fonction transfert.
1. Calcul du stock d'azote annuellement lessivable
Chaque année, sur une période s'étendant de la reprise de la minéralisation de
la matière organique du sol à la cessation de cette minéralisation (ou à son ralentissement
très sensible), c'est-à-dire approximativement de la fin de l'hiver à la fin de l'automne, le
stock d'azote nitrique qui échappera définitivement à l'absorption par les racines et à
l'interception par la microfaune du sol aura été constitué par deux fractions :
l'une provenant de l'engrais azoté épandu,
l'autre issue de la minéralisation des substances organiques du sol :
. matières organiques stables (humus),
. "restitutions" des précédents culturaux (racines, chaumes, "verts", . . . ) ,
. biomasse : ensemble des organismes vivants s'alimentant en m ê m e temps que la
culture à partir de l'azote des engrais et de l'azote libéré par les matières
organiques.
* II s'agit d'une version du modèle mis au point au Water Research Centre (Angleterre)
32
En l'absence de résultats expérimentaux, la contribution des sources
organiques à l'enrichissement de la solution du sol en azote nitrique est difficile à préciser
et l'utilisation d'une équation de bilan en termes "d'entrées-sorties" pour obtenir un
reliquat lessivable n'est pas nécessairement la solution la mieux adaptée au modèle
retenu.
U n e relation de calcul plus globale a donc été préférée. Pour une culture
donnée, il a été considéré que la quantité d'azote lessivée pouvait être représentée par la
s o m m e :
d'un certain pourcentage K ¿ de l'engrais épandu, intégrant l'engrais directement
lessivé et celui libéré après avoir été temporairement bloqué sous forme organique
par les micro-organismes du sol,
et d'une fraction K £ de l'azote produit par :
. la minéralisation des débris végétaux enfouis, plus ou moins importante selon la
culture (= restitutions du précédent cultural),
. la minéralisation de la matière organique stable qui se poursuit après récolte et qui
peut représenter la moitié de la minéralisation annuelle,
enfin un terme supplémentaire permet de tenir compte de sources azotées diverses :
retournement de prairies, épandage d'eaux résiduaires...
Le coefficient K ^ peut varier suivant les cultures. Par exemple, pour un blé,
une valeur de référence a pu être définie à partir des résultats obtenus par R e m y et
Hebert. Confirmant les résultats de Kolenbrander cités par Young (réf. A .3 ) , ces deux
auteurs montrent, que pour un sol limoneux et sous culture de blé :
le coefficient d'utilisation de l'engrais s'établit autour de 50 %,
la fraction immobilisée par la biomasse est de l'ordre de 30 %, dont 8 %
reminéraliseraient la première année,
le reliquat minéral dans le sol après récolte est de quelques pourcents (5 %) .
Les pertes sous la culture représentraient donc 15 % environ de la dose
appliquée (lessivage et dénitrification). U n tel ordre de grandeur peut donc être introduit
dans le modèle c o m m e point de départ de la phase de calage.
33
Pour d'autres cultures, le coefficient K ^ doit être ajusté au mieux (afin
d'obtenir la meilleure reconstitution possible sous contraintes, bien sûr, de plausibilité).
2. Transfert
1/ La migration de l'azote nitrique est purement verticale et il n'y a pas d'apports
latéraux.
2/ Le déplacement s'effectue dans un milieu homogène à double porosité ; les auteurs
distinguent en effet :
- une "porosité de fissure" où la circulation de l'eau est rapide, une raction des
précipitations efficaces, déterminée en fonction des fluctuations obsrvées de la
nappe, emprunte cette voie,
- une "porosité matricielle", caractérisant la matrice poreuse, on y trouve l'essentiel
de l'eau infiltrée et du soluté.
L'eau infiltrée et les masses de soluté empruntant l'une et l'autre voie sont
supposées être dans le rapport de ces porosités.
3/ Dans la matrice poreuse le long de la verticale considérée, les masses d'azote sont
concentrées en des noeuds dont l'espacement est calculé en fonction de l'intensité
des précipitations efficaces et de la porosité matricielle (cf fig.Al). Chaque année,
il y a déplacement de l'intégralité des masses d'un noeud i vers le noeud i+1 (effet
piston). Le premier noeud est alimenté par la fonction production azote ; le dernier
alimente la nappe.
Pour atténuer le mécanisme "piston", un effet dispersif est pris en compte. Dans la
version originale du modèle, appliquée à la craie du bassin de Londres, le coefficient
de dispersion retenu a été mesuré en laboratoire.
4 / Enfin, la migration vers la nappe se fait sans interaction avec une éventuelle
fraction "eau liée", l'équilibre de concentration étant supposé établi.
Références bibliographiques de l'Annexe 1
1 - C A O U S (J.Y), C O M O N (D.), SEGUIN (3.3.), 1984 .- Evolution des teneurs en nitrates
de la nappe de la craie. Essai de prévision .- Rapport B R G M 84 AGI 329 PIC
2 - R E M Y (J.C.), H E B E R T (J.), 1977 .- Le devenir des engrais azotés dans le sol .-
C . R . Acad. Agrie. Fr., 1977, t.63, p.700-714
3 - Y O U N G (C.P.), O A K E S (D.B.), 1976 .- Nitrate in groundwater. Studies on the chalk
near Winschester, Hampshire .- Water Research Center Technical, report T R 31.
34
matrice poreuse
- (l-f)*SNO.
2(1)
2(1)
Z(N)
2
3
1-1
I
1+1
N-l
AZOTE LESSIVE
S N 0. fissures
INFILTRATIONINF
(l-f)xIHF fxINF
(l-f)X INF
I — I— I —• I —
!
I
f * SNO.
contribution duâernier noeud
M(N)
C(N) M(N)6(N) * 2(N)
\
MF
CF
= f X
M _
f X
SNO
INF
C eM(N)
(N) X Z+
(N)MF
+ fxINF
contributionâes fissures(apport annuel)
DILUTION DANS LA NAPPE
INF = infiltrationf fraction d'eau infiltrée empruntant la "fissure"w porositée teneur en eauM(I) masse d'azote au noeud I dans l'eau interstitielleMF masse d'azote circulant dans les fissuresC concentration résultante au niveau de la nappe
Figure A.1 - Schématisation du transfert des nitrates dans le modèle du W R C
35
Annexe 2
RESULTATS DES ANALYSES EFFECTUEES
PAR LE LABORATOIRE MUNICIPAL DE REIMS
Profondeurm
Forage FI0,51,01,52,02,53,03,54,04,55,05,56,06,57,07,58,08,59,09,510,010,0*10,511,011,512,012,513,013,514,014,515,0
15,0*
Humidité% de la masse de
l'échantillon humide
14,618,821,219,721,022,223,223,022,823,522,723,020,922,121,723,221,921,722,221,420,322,422,322,022,622,122,322,520,922,123,021,0
Ammoniaquemg/1
5,844,04,75,64,454,53,564,14,44,94,34,25,34,253,654,074,024,064,765,064,604,474,094,84,174,524,755,634,334,124,505,29
Nitratesmg/1
235,059,0
235,0337,0356,0329,0254,0163,087,052,037,035,049,058,055,051,055,063,071,075,589,076,573,069,061,558,037,027,018,011,08,0
14,0
* carotte
36
Profondeurm
Forage F23,05,010,0
Forage F33,05,0
10,0
Forage F 43,05,0
10,0
Forage F53,05,0
10,0
Forage F63,05,0
10,0
Forage F73,05,0
10,0
Forage F83,05,010,0
Forage F93,05,0
10,0
Forage F103,05,0
10,0
Forage Fil3,05,0
10,0
Humidité% de la masse de
l'échantillon humide
22,322,522,1
21,924,022,1
21,023,320,9
24,722,721,4
23,523,422,1
20,223,622,2
20,320,220,2
22,322,822,4
21,422,521,4
22,121,721,9
Ammoniaquemg/1
3,963,924,52
3,354,444,52
4,454,564,89
4,236,435,6
4,154,555,05
5,483,04,24
5,36,065,19
5,545,435,39
4,384,25,06
4,254,064,83
Nitratesmg/1
80,043,078,0
153,026,095,0
227,019,083,0
143,049,0
118,0
188,021,072,0
250,025,062,0
256,025,070,0
223,017,077,0
168,526,089,0
209,049,080,0
37
Profondeurm
Forage F120,51,01,52,02,53,03,0*3,54,04,55,05,0*5,56,06,57,07,58,08,59,09,5
10,010,0*10,511,011,512,012,513,013,514,014,515,0
15,0*
Humidité% de la masse de
l'échantillon humide
15,720,020,821,121,021,221,422,822,322,022,322,322,220,422,421,622,522,822,622,221,821,821,123,221,822,022,521,822,322,320,221,721,821,0
Ammoniaquemg/1
8,735,095,194,995,525,05,064,653,963,873,964,223,974,143,44,344,973,884,954,644,984,844,993,563,362,672,882,693,162,93,893,243,235,0
Nitratesmg/1
81,056,0
174,0212,0186,0145,0128,089,053,043,028,018,530,050,047,055,056,556,562,076,074,078,084,083,577,564,550,038,032,022,514,011,09,09,0
* carotte
38
Annexe 3
RESULTATS DES ANALYSES EFFECTUEES
1. PAR LE LABORATOIRE DU BRGM A ORLEANS
Echantillons
150250300C400500C500550600650700750
Humidité% de la masse del'échantillon sec
26,1026,6027,2030,0030,0
30,4030,530,5
26,4029,2028,20
N
ppm deterre sèche
9,918,216,09,22,23,62,22,22,63,73,5
(NO3)
mg/1 desolution de sol
38,068,458,830,77,3
11,87,27,29,812,712,4
NO3mg/1 de
solution de sol
16830426013632523232435655
2. PAR LE LABORATOIRE DE LA CHAMBRE D'AGRICULTURE DU LOIRET
Echantillons
150250300C400500
500C550600650700750
Humidité% de la masse del'échantillon sec
27,227,226,530,230,231,930,530,527,828,227,8
N (NO3)
ppm deterre sèche
10,118,515,110,45,23,93,42,63,84,85,1
mg/1 desolution du sol
•37,1685734,417,212,211,18,5
13,617,018,3
N O 3 mg/1 desolution du sol
164,3301,2252152,476,15449,137,660,275,381
39
Annexe 4
ANALYSE DES TENEURS EN EAU ET EN NITRATES D'UN ECHANTILLON DE CRAIE
MODE OPERATOIRE DU LABORATOIRE MUNICIPAL ET REGIONAL DE REIMS
L'échantillon subit d'abord une phase de conditionnement exécutée
manuellement : malaxage, fractionnement, puis homogénéisation.
Une fraction de 300 g est alors constituée, sur laquelle sont prélevés :
d'une part 25 à 30 g pour la mesure des teneurs en eau,
d'autre part 150 g pour la mesure des teneurs en nitrates.
Teneurs en eau
La fraction de 30 g passe à l'étuve à 100° pendant une nuit. Après pesée et
détermination de la masse d'eau, le taux d'humidité H n est défini c o m m e le rapport de la
masse d'eau à la masse de l'échantillon humide.
Teneurs en nitrates
Aux 150 g prélevés après homogénéisation de l'échantillon, sont ajoutés 300 ml
d'eau distillée. L'ensemble est alors agité pendant une heure de façon à provoquer une
lixiviation ; à cette opération succède une décantation de 24 h.
L'analyse des nitrates est effectuée à l'aide d'un procédé de réduction des
nitrates en nitrites par passage sur une colonne réductrice cadmium-cuivre. Les
concentrations sont ensuite mesurées par spectrophotométrie.
Les concentrations obtenues Cj^ sont en dernier lieu corrigées pour tenir
compte de la dilution opératoire : si v désigne le volume d'eau distillée, et si m est la
masse de l'échantillon, la concentration cherchée C 2 est donnée par :
C 2 = C ! < 1 + - . - )m
avec H n l'humidité pondérale rapportée à la masse de l'échantillon humide, et e la masse
volumique de l'eau.
réalisationservice
reprographiedu B R G M
86SGN 172 EAU