N° 8. — Deuxième Appée.
Samedi 27 Février 1909.
Gazette bi-n?ei?suelle illustrée.
Le Nuipéro : 20 Ceptinpes.
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sur le ter rail? patriotique et militaire.
Nos lecteurs connaissent certainement
l'existence de la Fédération des Sociétés de
Tir et de 'Préparation Militaire de l'Est.
Ce puissant groupement réunissant
12,000 tireurs et de nombreux pupilles,
sous la présidence infatigable et brillante
de notre ami Albert Maringer, Président
de la Fédération et de la vigoureuse Société
de Tir de çNjincy (Grcmillon).
Les écrivains militaires les plus compé-
tents, les chefs de corps, le Ministre de la
Guerre lui-même, ont compris la nécessité
absolue de ces groupements pour compen-
ser la réduction de durée de notre service
militaire et contrebalancer les gros effectifs
allemands.
Si nos jeunes générations françaises en-
trent toutes dans les Sociétés de Tir et de
Préparation, nos soldats deviendront bien-
tôt capables de lutter victorieusement,
même contre un adversaire supérieur en
nombre.
La Fédération des Sociétés de Tir de l'Est a
merveilleusement compris son rôle patrio-
tique, et son dévoué Secrétaire Général,
M. Cordonnier, dans sa vibrante allocution
prononcée à l'Assemblée Générale de di-
manche dernier, exprimait sa confiance en
l'avenir de notre Patrie.
Pour grouper ces diverses sociétés de
nos départements lorrains, la Fédération
avait patronné en 1908, un journal inté-
ressant : la c
Revue du Tir, fondé par nos
amis et confrères Gérardin et. Equoy.
Comme ces derniers, après avoir main-
tenu la Revue du Tir, en abandonnent la
direction pour des motifs personnels, la
Société de Tir de N^ancy, désireuse de conser-
ver la vie à cet organe indispensable, réso-
lut d'en assumer l'administration et de de-
mander à la Fédération des Sociétés de Tir de
l'Est de lui continuer son patronage.
Puis, élargissant son terrain d'action,
la Société de tir de Nancy fit officiellement
appel à l'Union des Sociétés militaires de Nancy,
groupement très vivant, formé par les Vé-
térans, les Médaillés militaires, les diverses
Prolonges régimentaires, les Associations
d'anciens légionnaires ou militaires, au
nombre de quatre mille.
L'Union des Sociétés militaires, présidée par
M. Je général Le Coat de Saint-Haoûen,
cette sympathique personnalité et vice-
présidée par M. le L^Colonel Coquinet,
écrivain militaire distingué, commandant
le 42 e territorial, accepta de donner son
patronage à la nouvelle Revue du tir, tirée
désormais sur plus grand format, illustrée
182 Le Cri de Nancy
de nombreux clichés relatifs au tir et à
l'armée.
La Revue du tir, mensuelle, transformée,
organe des deux groupements mentionnés
plus haut, paraîtra au début de mars (i).
N'oublions pas que ces Sociétés de tir
et de Préparation militaire, ces Sections
de Vétérans et d'Anciens soldats, ces Pro-
longes régimentaires sont formés d'élé-
ments variés, de Lorrains séparés politi-
quement et parfois socialement, mais
étroitement unis sur le terrain militaire et
patriotique.
Ralliement au Drapeau ! voilà leur de-
vise et le Cri de Nancy, modeste défenseur
de l'Entente Franco-Française, bienfaisante
trêve nationale, souhaite une longue car-
rière à la Revue du tir, solidement cons-
tituée, prête à soutenir les initiatives heu-
reuses de M. Albert Maringer, de M. Cor-
donnier et de M. le général de Saint-
Haoûen.
LE CRI DE NANCY.
(i) La. Revue du tir,, orfrane de la Fédération des Sociétés de tir et
de Préparation militaire de l'Est et de V Union Fraternelle des Sociétés
militaires, Rédacteur en chef : Marcel Knecht ; Administrateur :
L. Girardot. (Abonnement, 3 fr. par an. Imprimerie Nanccïenne,
rue de la Pépinière. )
LE COIN DES POÈTES
Paysages industriels
VIII. — La Saline
Le puits s'ouvre profond, au fil de la colline
Où le soleil verse à flots ses métaux ;
Sa cage, haute et frêle — une tour ! — avoisine
L'indolente fumée et les calmes bateaux.
Tous les matins, l'homme descend à la saline,
Cité d'ombre, d'où naît la clarté des cristaux ;
Robuste et sain, l'œil clair, sur le rail il chemine
En cette énorme ville aux arcs monumentaux. .
... Une foule mouvante emplit la grande artère ;
Car c'est Midi qui sonne aux clochers de la terre ;
Chaque-lampe qui flotte éclaire un Aladin.
Et le mineur, soigneux du bloc noir à sa chute,
Sifflant un air — ainsi qu'un berger dans sa flûte —
Revoit le jour et songe à chérir son jardin.
René d 'AvRiL.
NOS CHARGES
LE BON WATTMAN LORRAIN
M. Henri GUTTON
Conseiller municipal, ancien Pipo, Architecte et Ingénieur
Membre du Comité permanent de l'Exposition de Nancy
Nous savons tous qu'il est généralement inter-
dit, sur les tramways, de parler au wattman : notre
reporter-détective spécial a cependant pu obtenir
un bref interview du bon wattman lorrain M.Henri
Gutton et s'est empressé de compléter ses notes
rapides en visitant quelques amis personnels de
l'architecte-ingénieur.
M. H. Gutton n'a-t-il pas acquis une popularité
comparable à celle de nos parlementaires les plus
sympathiques, en dotant ce précieux joyau des
Vosges qu'est la Schlucht d'un tramway devenu
célèbre.
Grâce à M. Henri Gutton, les Vosges et leurs
visiteurs sont maintenant dans le « tram » I et
voici que Pont-Saint-Vineent-sur-Moselle et Dom-
basle-sur-Meurthe vont être les terminus de lignes
suburbaines nancéiennes.
Originaire d'une vieille famille lyonnaise,
M. H. Gutton naquit à Paris en i S 5 1 et, fils du
directeur de la Manufacture des Tabacs de Nancy,
entra au lycée de notre ville en 1861.
C'est dans cette excellente maison universitaire,
encore et toujours plus florissante que M. H.
Gutton prépara ses divers examens et particulière-
ment Polytechnique, où il entra victorieusement.
Il étudia successivement à Pipo, à l'Ecole d'Ap-
plication de Fontainebleau, aux Beaux-Arts, et
dans l'armée, sous-lieutenant de réserve du génie,
devint plus tard lieutenant d'artillerie territoriale.
Encore vibrant des souvenirs classiques des Beaux-
Arts et cependant épris des réalités modernes, le
jeune Pipo abandonna le bicorne et l'épée pour se
consacrer à l'exercice de Péquerre et du crayon et,
architecte bientôt régional, collabora à la création
de nombreuses industries nouvelles.
Grand maître de l'électricité qu'il régit sur nos
ballons comme dans nos vallées, il contribua à
fonder la Société Générale Electrique, etc., etc.
Conseiller municipal depuis quatorze ans, sous
les municipalités Maringer et Beauchet, M. H. Gut-
ton s'efforça de maintenir son intervention "dans le
domaine purement économique : plusieurs de ses
Le Cri de Nancy 183
collègues l'auraient désiré ceint d'une écharpe
d'adjoint, que M. Gutton refusa toujours.
Ennemi des chinoiseries administratives et du
gâchis, M. Gutton témoigna parfois son hostilité à
des projets mesquins et livra bataille à son adver-
saire particulier : les rues particulières.
Président de la Société Industrielle de l'Est, quand
cette Société, maintenant la plus puissante de
toute la France, faisait ses premiers pas, M. Gut-
ton quitta le fauteuil pour redevenir trésorier : il y
a quelques années, il accepta la présidence du
Syndicat d'initiative des Vosges et de Nancy, et mena
hardiment la barque, avec le concours d'un orga-
nisateur éclairé, M. Collin, et de notre ami
Charles Sadoul.
C'est le Syndicat d'Initiative des Vosges et de Nancy,
qui développa considérablement le tourisme dans
nos stations thermales et œstivales de Lorraine et
qui manifesta brillamment sa vitalité en faisant
réussir le grand Congrès des Syndicats d'Initiative
de France tenu à Nancy en 1908.
Malgré cette activité, M. H. Gutton n'est pas
encore décoré et sa douce philosophie, parfois
souriante, l'en console aisément.
M. Henri Gutton, officiel, a quelque chose de
grave, de froid dans l'attitude : c'est Pipo encore
hanté par les durs X, c'est Minerve, pensive déesse
de la sagesse, qui caresse une chouette mystérieuse.
Il existe un aimable causeur, aux plaisanteries
enjouées, à l'humour renouvelé de Swift, qui fut
un talentueux ténor, heureux de prêter son assis-
tance artistique aux concerts et aux messes de
bienfaisance : M. Henri Gutton découvre cette
personnalité au milieu d'amis, de collègues, aux
réunions intimes de la Société Industrielle et du
Conseil municipal.
Ténor léger, chanteur aimé, dit une vieille chan-
sonnette : M. H. Gutton est plus qu'un ténor
léger, sans être cependant une basse : ,ce qu'il
regrette lors de ses arrivées, en tram, au sommet
de la Schlucht, puisqu'il ne peut alors chanter le
fameux grand air du Chalet : « Arrêtons-nous ici !
l'aspect de ces montagnes, d'ivresse et de plaisir fait
tressaillir mon cœur ! »
Toujours est-il que bon wattman ou excellent
ténor, il joue un rôle important dans la quintette,
plus prosaïquement appelée Comité Permanent de
l'Exposition de Nancy et préside régulièrement le
Groupe VI des Transports.
Disons pour terminer que M. H. Gutton refusa
gentiment, pour sa charge, le concours de notre
collaborateur Tom et prétèra celui de P.-R. Clau-
din ; M. Gutton nous en expliquait finement la
raison : « Vous savez que les étudiants et beau-
coup d'autres • surnomment mon fils To-Tom :
certains pourraient lui attribuer la caricature de
son père et le traiter de fils irrespectueux.
Son ami Collot ne lui ménagerait pas ses spiri-
tuels lazzis ! ». To-Tom a lui aussi du sang d'ad-
ministrateur et d'argentier : ne fut-il pas, pendant
longtemps le parfait trésorier de la Société géné-
rale des Etudiants ?
Nous avons donc évité Tom, pour ne pas gêner
To-Tom.
M. K.
LE COESr LES POÈTES
A Charles GUÉRIN M
Tel Adonis couché sur un lit d'asphodèles,
Tu dors au seuil d'avril parmi le buis nouveau ;
Mais en toi la pensée a tu ses frissons d'ailes
Quand s'est voilé l'azur qui hantait ton cerveau.
Ton ombre élyséenne erre peut-être encor
Dans les feux violets d'un couchant radieux,
A moins qu'hostie ardente aux lèvres de l'aurore
Ton âme communie avec l'âme des dieux.
Non point ; tu fus chrétien. Frère attristé de Jammes
Ton front pur s'inclinait à l'ombre du clocher,
Et le vol des ramiers au bleu pays des âmes
T'incitait à l'essor... Soudain, las de marcher.
Tu t'arrêtas, plus pâle, et baissas les paupières ;
Sur ton coeur de croyant la mort joignit tes mains
Et, dans l'endos pieux où se signent les pierres,
T'accorda de dormir, sourd aux fracas humains.
Rameau de buis fidèle au crucifix d'ivoire,
Tu t'es pensivement desséché, peu à peu...
Sans regret de la Vie ou souci de la Gloire,
Ton beau rêve expira jeune et beau comme un dieu.
Parmi les lys hautains, ta gravité sereine
Au clair jardin natal ne méditera plus
Sur la douceur d'aimer la campagne lorraine
A l'heure où dans le soir tinte au loin l'angélus.
Jamais plus ton regard contemplatif d'artiste
N'ira de l'herbe en fleur au frêle insecte ailé.
Mais ceux dont la foi prie et dont l'espoir persiste
Se font un idéal du poète en allé.
D'autres qui, comme moi, n'ont pas ton évangile
Et que la beauté seule émeut dans l'univers,
En disciples fervents d'Homère et de Virgile
Respectent ta croyance en admirant tes vers.
Le sillon du néant s'ouvre au Semeur de Cendre,
Mais féconde est la mort quand l'esprit a semé.
Que l'Homme intérieur sorte et daigne descendre !
Le tertre funéraire est un rosier de mai.
Léon TONNELIER.(il Extrait do !a FlttU tfÈbLnc.
184 Le Cri de Nancy
Une salle de fêtes nécessaire.
Après l'incendie du théâtre de Nancy, et lors des
projets de l'ancien Evêché, le Cercle militaire avait
discrètement prévenu la municipalité qu'il serait
heureux de collaborer à la création, sur l'emplace-
ment actuel, d'une vaste salle de fêtes, de bals, de
concerts d'été, de distractions diverses.
L'Union des Syndicats d'Alimentation et la
F. C. N., de leur côté, désireux de provoquer les
sorties et les fêtes, faisaient de semblables démar-
ches.
Maintenant que le Théâtre s'installe à l'Evêché,
la municipalité devrait examiner d'urgence la réali-
sation pratique de ce projet.
Nancy .a été particulièrement privée de fêtes
brillantes, au cours de cet hiver : d'impérieux
deuils ont empêché les autorités civiles et mili-
taires de recevoir et les concerts de gala et les bals
ont été remplacés par de nombreux « dîners en
ville » d'un caractère plus intime.
Les divers commerçants de luxe, tailleurs, cou-
turiers, bottiers, coiffeurs, chemisiers, etc., etc.,
en ont beaucoup souffert.
Depuis que le théâtre est brûlé, les bals somp-
tueux des Jours gras et de la Mi-Carême ne peu-
vent plus s'abriter dans une salle suffisamment
vaste ; cependant, en 1906, le joli bal masqué
organisé chez Walter, au profit des sinistrés de
Courrières, et en 1907, 1908, les deux beaux bals
offerts par les étudiants dans, les salons du Grand
Hôtel ont maintenu ce prestige d'antan.
Mais les salles de J. Walter et du Grand Hôtel
sont relativement petites et ne possèdent ni loges,
ni promenoirs.
■ Un bal masqué et travesti nécessite surtout une
grande enceinte de danse et, au-dessus, divers
balcons d'où gens du monde masqués de loups
noirs et jeunes ménages bourgeois, curieux et
mystérieux, sont heureux de contempler, en
sûreté, les chahuts et les mattehiches des indépen-
dantes.
Nous n'avons à Nancy aucune salle réellement
accessible à toutes et à tous : les salons de l'Hôtel
de Ville sont justement puritains, les salons
Walter sont coquets, excellents pour les mariages
et les banquets, mais trop exigus.
Ce que les commerçants et les Nancéiens dési-
rent, c'est une vaste salle, avec étages de balcons
et de loges, pouvant contenir, huit cents à mille
personnes.
La municipalité de Nancy ne peut qu'obtenir
l'approbation de tous en dotant notre cité de cette
salle NÉCESSAIRE.
SHERLOCK HOLMES.
LE OOHST DES POETES
Ballade de la Mort
A Pierre Weiss.
Quoi qu'on en dise, l'on y pense,
A la Dame du Dernier jour ;
Chaque seconde qu'on dépense
Nous en rapproche sans retour...'
Elle apparaît, vierge d'atour,
Et nous prend, d'un geste de brute :
« Allons, mon petit, c'est ton tour ;
« Au bout du fossé, la culbute ! »
Lucullus, quittez la bombance !
Armide, votre doux séjour !
Vous, parias à maigre panse,
Votre triste et noir carrefour !
Tant pis ou tant mieux, contre ou pour,
Il faut que chacun s'exécute
Quand la mort parle, sans détour :
Au bout du fossé, la culbute !
C'est l'identique récompense
De l'honnête homme et du pandour,
Car tout mérite se compense
Aux yeux du funèbre vautour.
Que l'on soit prince ou troubadour,
Qu'on chante, qu'on dorme, ou qu'on lutte,
A la Mecque comme à Saint-Flour,
Au bout du fossé, la culbute !
ENVOI
Belles à qui l'on fait la cour,
N'attendez pas l'autre minute :
Il n'est rien de bon que l'amour !
Au bout du fossé, la culbute...
PAUL EVERARD.
Le Cri de Nancy 185
NOS ANCIENS MAITRES
M. ALEXANDRE de Rocl>e du Teilloy, a LMembre de I' « Académie de Stanislas
Professeur Honoraire au Lycée de Nancy
Secrétaire Général de l'A. des Anciens Elèves des Lycées de
Metz, Nancy, Strasbourg et Golmar
Au temps des gilets à fleurs et des jabots de
dentelle il existait de par la France, juxtaposée à
l'aristocratie de Versailles, moins tapageuse sans
doute, moins brillante, mais de vie intérieure infi-
niment plus riche, une autre aristocratie.
Laïques ou ecclésiastiques, nobles ou bour-
geois, gallicans ou ultramontains, ses membres
coulaient des jours heureux dans la fréquentation
silencieuse des bons auteurs, écrivaient avec aisance
le style le plus pur, et, charmants causeurs,
ironistes délicats, entretenaient vivaces en nos
provinces les fortes traditions de notre humanisme.
Bons fils, bons époux, bons pères, amis sûrs,
confrères obligeants, chrétiens effectifs, ils savaient
d'ailleurs valoir autrement encore que par leur
esprit, et chaque année nouvelle n'était qu'une
strophe de plus au beau poème de noblesse et de
loyauté que, jusqu'à leur dernier soupir, rythmait
le battement de leur cœur.
N'en déplaise à son ombrageuse modestie, nous
devons le proclamer ici : M. Alexandre de Roche
du Teilloy réalise à nos yeux une survivance par-
faite de ce type — trop rare aujourd'hui — de
lettrés honnêtes hommes (i).
** *
Loin de Xarrivisme, et du hallage (2), en une rue
discrète, peuplée de rossignols au printemps et en
toutes saisons de ménages bourgeois, une maison
claire l'abrite parmi les feuillages, et dans son
bureau paré de portraits de famille, d'armoiries
sculptées et peintes, de gravures de Callot, d'effigies
de Boileau, de Molière, de Racine, de Voltaire,
de Chateaubriand et de Lamartine, dominé par les
six mille volumes de sa bibliothèque, paisible et
attentif, au ronflement de sa petite chienne Chape
qui dort sur un coussin, il lit.
Il lit des ouvrages anciens splendidement gaufrés
d'or.
Il lit des ouvrages modernes, avec dédicaces,
d'Edmond de Goncourt ou d'Emile Gebhart, de
Henri de Régnier ou de Maurice Barrés.
(1) L'honnête homme est un homme poli et qui sait
vivre ( BUSSY).
On n'apprend pas aux hommes à être honnêtes hommes
(PASCAL).
(2) Que M. de Roche du Teilloy nous pardonne ces néo-
logismes barbares, encore inconnus à l'Académie Française!
Mais ses préférences vont aux' auteurs classiques
du Grand Siècle, et, entre tous ceux-ci, à Racine.
Les jeunes filles, parfois, s'en étonnent, car la
grandiloquence cornélienne leur plaît davantage.
Mais M. Alexandre de Roche en sourit. « C'est
de leur âge, pense-t-il, car elles n'ont point aimé.
D'ailleurs, pour qu'elles apprécient la pureté d'un
style, il leur reste encore tant à apprendre ! »
Et, avec un soupir, de sa grande écriture qui
rappelle celle de Bossuet, M. Alexandre de Roche,
impitoyable, barre quelque énorme faute de fran-
çais étourdiment calligraphiée de quelque char-
mante petite main.
M. de Roche professe en effet la littérature
française en de virginales pensions, et telles et telles
de nos jolies compatriotes qui s'appliquent à
dauber spirituellement l'inoffensif Cri de Nancy,
le feraient . sans doute en langage moins
châtié si jadis, dans la chaleur de ses improvi-
sations, M. de Roche n'avait, mainte fois, du fin
tabac de ses prises, saupoudré leurs copies.
*
Les jeunes filles n'ont d'ailleurs pas toujours
accaparé l'activité intellectuelle de M. de Roche,
car de 1865 à 1897 I e Lycée de Nancy, où du
reste il avait fait toutes ses études de 1849 à 1857,
le compta parmi ses professeurs, et durant des étés
et des étés, il prépara au baccalauréat ès lettres des
centaines et des centaines de candidats.
Il faut l'entendre, avec quel légitime orgueil
sous une nuance d'ironie bien lorraine ! évoquer
les temps lointains où Henri Poincaré, déjà remar-
quable, s'évertuait à énoncer littérairement les
« Différences entre l'homme et les animaux », et
où Maurice Barrés, pas encore régionaliste, vantait
ses origines mexicaines à son ami Stanislas de
Guaïta, lequel à son tour se disait issu des
Borgia.
... Eheu! fugaces, Poslume, labuniur anni... La
voix plaisante, mais, derrière les verres du lorgnon
à cordonnet de soie, quelque chose voile le regard :
un peu, beaucoup d'attendrissement...
** *
Conformément à la définition qu'Aristote donne
de l'homme complet, M. de Roche est des plus
sociables.
La Société d'Archéologie Lorraine, dont il est
membre, met parfois à contribution sa science de
la versification latine pour ses réponses, en hexa-
mètres nancéiens, aux hexamètres montalbanais
par lesquels une Société savante de Tarn-et-
186 Le Cri de Nancy
Garonne, tous les douze mois, souhaite la bonne
année à ses sœurs de France.
L'Académie de Stanislas, tous les quinze jours,
le Vendredi, à huit heures précises du soir, n'a
pas de fidèle plus régulier, ni de lecteur plus
assidu à pratiquer immortellement le culte des
morts.
Le Couarail, Académie Lorraine, dont M. de Roche
est membre d'honneur, éprouve en toute circons-
tance le bienfait de sa sympathie.
De son côté, le Comité du Nouveau Nancy se
félicite de le voir s'intéresser si juvénilement aux
destinées de Nancy Ouest, et s'employer avec tant
de bonne grâce à en baptiser des noms histori-
ques les plus glorieux tels que Godefroy de
Bouillon ou Marguerite d'Anjou les artères les
plus quelconques.
Mais le royaume incontesté de M. de Roche est
l'Association des Anciens Elèves des Lycées de
Nancy, Strasbourg, Metz et Colmar où il remplit,
depuis la mort du regretté docteur Friot, les fonc-
tions de Secrétaire général. Maint malade, maint
orphelin, mainte veuve savent tout le bien qu'à
ce titre il a pu leur faire.
Enfin et surtout, en dehors de ces sociétés par-
ticulières, la grande société des pauvres connaît
M. de Roche pour un philanthrope éclairé, intelli-
gemment pitoyable à toute misère vertueuse et le
plus bel éloge qu'on puisse faire de lui, c'est qu'à
son nom, sous plus d'un humble toit, plus d'un
cœur humble vibre.
IGNOTUS.
EE COIN DES POÈTES
À Madame René Fernand-Lafargue.
Si vous voulez prêter l'oreille,
Vous entendrez un bruit d'abeille,
Un immatériel frisson...
Comme la plainte d'une eau pure,
Que trouble le vent qui murmure ;
De mon âme c'est la chanson.
Un frémissement se dessine
Sur la surface qui s'incline
De cette onde calme toujours,
Sous votre haleine de délice,
Le cristal sans rides se plisse
Et s'élève en vagues d'amour.
Ce souffle de rose entrecroise
Agités des flots de turquoise
Qui viennent en chantant mourir,
Sur le rivage de mes lèvres,
Puis retomber dans la fièvre
Innombrable des souvenirs.
Pierre WEISS.
(I) Extrait des Navres Légères.
1 5 Février 1909.
Je n'ai qu'à lermer les yeux pour revivre le merveilleux
cotillon auquel j'ai assisté la nuit dernière et dont je gar-
derai toujours l'enchantant souvenir.
Je revois le conducteur agiter son tambourin dont les
grelots tintent joyeusement, et valser sous la grande
ombrelle japonaise dont l'abrite sa danseuse. Toutes ont de
ces légers parasols aux couleurs vives, et ils s'èutrechoquent
avec un crissement de papier froissé. Elles ont aussi des
fleurs attachées à leurs corsages, fleurs un peu pâles sous la
lumière, et si délicates qu'elles semblent naturelles : grappes
de glycine ou d'acacias, touffes de roses de mai, pavots
étincelants de filigrane qui pleure, coucous et pâquerettes.
Les jeunes gens, eux, ont des décorations bkarres dont
s'étonnent leurs sévères habits noirs, et portent au bout de
longues baguettes, des petites lanternes qui tremblent.
Mais voici qu'on distribue d'autres fleurs, étranges et
monstrueuses, celles-là : ce sont d'énormes bleuets, coque-
licots et soleils, montés sur une haute tige enrubannée, et
cela me rappelle soudain une phrase d'un vieux conte que je
me plaisais à relire étant enfant :
« Et chacune de ces petites personnes, qui étaient des fées,
tenait à la main une grande fleur qui montait droit vers le
ciel, et leurs légères robes flottant au vent, elles dansaient
jusqu'à l'aube. »
Les grelots du tambourin interrompent ma rêverie ; les
« petites personnes » ont abandonné leurs sceptres et posé
sur leurs têtes des chapeaux aussi amusants qu'inattendus. Je
vois un gainsborough empanaché de rose, danser avec un
hussard de l'empire aux cheveux soigneusement nattés. Puis
voici une petite châtelaine moyenâgeuse, dont le très grave
cavalier porte les deux longues plumes de Méphisto. Plus
loin un toréador cause avec une bergère, pendant qu'un
incroyable ébauche un brin de cour à une « princesse loin-
taine ».
Après, le piano s'arrête, et le chocolat traditionnel fait son
apparition.
Les salons se vident Je rouvre les yeux
Ida CARTER.
Le Concert de 1' « Harn?onie Nancéienoe. »
Le 3 février dernier, salle Poirel, l'Harmonie
Nancéienne, dont Nancy aura tant besoin d'ici peu,
offrait à ses membres honoraires un concert fort
brillant et réussi.
M. René Payelle, qui préside YHarmonic avec
une autorité et un tact louables, MM. Busselot et
Deldemme, vice-présidents, firent aimablement les
Le Cri de Nancy 187
honneurs, de la loge .officielle à MM. Beauchet,
maire, Michaut, premier adjoint, Herbier, général
de Saint-Haoûen, Marc, Millot, Lalitte.
La salle Poirel était comble et de longs applau-
dissements saluèrent l'excellent baryton de notre
théâtre, M. Danse, Mmcs Chambéry et Richard,
M. Borel, la toujours vaillante Chorale de l'Est et
surtout l'Harmonie, particulièrement en forme.
Les dévoués MM. Jullien et Lalance méritent
une large part de ces bravos.
Les nouveaux Evêques.
MM. Théophile Brichon, maire de Pagny-sur-
Moselle, Président de la Vedette et Charles Fern-
bach, Conseiller du Commerce Extérieur, viennent
d'être promus évêques violets, ou plutôt officiers
d'Académie.
Mgr Th. Brichon, évêque quelque peu
moderniste, a rendu de grands services à la cause
du tir scolaire et Mgr Charles Fernbach s'occupe
activement de questions économiques.
La seule différence entre leurs nominations,
c'est que Mgr Théophile a été palmé, sur la de-
mande de son Eminence Bonnet, Cardinal Préfec-
toral, tandis que Mgr Charles, ancien directeur de
la Rafale, concurrent du docteur Aimé, peu intime
avec la Préfecture, a été violette par Sa Sainteté
le Pape Berteaux, futur Président de la Répu-
blique.
Et, jolie coïncidence, tandis que ces jours der-
niers, on célébrait le mariage de M. le Dr Aimé à
Mantes, sous la pluie odorante des fleurs, des
félicitations et des vœux (que nous lui adressons
ici) une violette républicaine, toute ministérielle,
donnait à Charles Fernbach, adversaire des Pon-
tifes, le. premier galon du Pontificat.
NICK CARTER.
La Municipalité et le Théâtre.
Maintenant que M. Caillaux vend l'Evêché à la
ville et que la décision des héritiers Lejeune met
.fin à la polémique du Bastion de Vaudémont,
souhaitons que nos confrères de la Presse quoti-
dienne, généralement unis pour défendre les inté-
rêts de Nancy, oublient les querelles récentes et
permettent à la municipalité d'employer toute sa
bonne volonté à nous reconstruire rapidement un
nouveau Théâtre.
M. Brisson et le Musée des Postes.
L'aimable M. Brisson, Directeur des P. T. T.,
qui a bien voulu nous donner récemment satis-
faction en prescrivant d'urgentes réparations chez
les abonnés au téléphone, prépare pour l'Exposition
un intéressant Musée Postal, avec reconstitution
d'uniformes anciens.
Nous faisons appel à tous les collectionneurs et
amateurs pour prêter leurs collections à M. Brisson
et contribuer ainsi à créer le Musée des Postes.
Le Musée de la Gendarmerie.
M. le député Jean Grillon, aidé du comman-
dant Bonnefoy, s'efforce de mettre sur pied un
Musée de la Gendarmerie, qu'il installerait dans
les locaux de l'ancienne Ecole des Beaux-Arts, rue
Ville-Vieille, à proximité du Musée Lorrain.
Cette initiative est intéressante : mais n'enga-
geons pas M. Jean Grillon à y exposer la boîte de
Pandore, origine de toutes les calamités.
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188 Le Cri de Nancy
Notre "Alliance Française" de.NancY Moire Barreau
IVJ:C Louis LESPINE,-WO* *
Avocat à la Cour
Vice-Président et Délégué Régional de Y Alliance Française, Directeur du Pays H'essinSecrétaire Général du Congrès de la Mutualité de 1909
Organisant des Cours de français parmi les peuplades d'Afrique, d'Amérique et d'Asie
Le Cri de Nancy 189
ISTOS CHAEGES
NOS AVOCATS
Me Louis LESPINE <», o. #, *
Vice-Président de 1' « Alliance Française »
Rédacteur en Chef du « Pays Messin »
Il est à Nancy un certain nombre d'œuvres des
plus intéressantes qui, modestement, accomplissent
une tâche très noble et très patriotique, et parmi
ces œuvres, au premier rang, se place 1' « Alliance
Française ».
M. Louis Lespine s'occupe depuis longtemps
déjà de 1' « Alliance Française ». Il le fait avec
autant d'intelligence que de cœur.
Ce fut lui qui, vers 1898, organisa son premier
bal à Nancy alors que son Président, dans notre
ville, était M. Lejeune, dont bien de nos conci-
toyens conservent encore le souvenir du visage
souriant et de la politesse raffinée.
Secrétaire général de 1' « Alliance Française »
en 1903, délégué régional du Comité central de
Paris en 1907, Vice-Président en 1908, de concert
avec MM. Gavet, Président et Collignon, Vice-
Président, M. Louis Lespine n'a cessé d'accroître
l'activité heureuse de 1' « Alliance Française ».
Celle-ci ne donne-t-elle point des cours très
suivis à l'Université de Nancy ! Mais il est une
autre entreprise des plus louables dont M. Louis
Lespine s'est occupé tout particulièrement. Ce fut
la création de cours de français pour les ouvriers
italiens dans l'arrondissement de Briey.
Pour ces cours, M. Louis Lespine a trouvé
l'aide empressée de l'inspection académique et des
industriels de la région.
Lorsqu'on connaît bien, en effet, la langue d'un
pays, on n'est pas loin de l'aimer et d'y être
attaché par les liens d'une affection indissoluble.
L' « Alliance Française » de Nancy a lancé
également des ramifications puissantes dans le
Luxembourg et elle a pris une part des plus
actives et des plus remarquées au récent Congrès
d'Arlon.,
Au physique, M. Louis Lespine a conservé la
maigreur élégante, le teint mat et la voix grave
qu'il avait déjà au Lycée de Nancy où il fit de
sérieuses études.
C'est un lorrain de la Meuse ; il est né dans cette
vieille ville épiscopale de Verdun aux mes étroites,
emplies du son des cloches.
Verdun ressemble étrangement à Metz. Aussi
M. Louis Lespine a-t-il profondément au cœur
l'amour de la cité messine, de son passé glorieux
et des paysages clairs et harmonieux qu'on découvre
des collines qui l'entourent.
Directeur du « Pays Messin », confondu avec
le « Pays Lorrain », il apportera dans une œuvre
commune, mais cependant distincte les qualités
d'un esprit avisé et chez qui le souci du passé n'est
point un obstacle à la saine compréhension des
réalités du présent.
*
M. Louis Lespine est aussi un fervent de la
mutualité et il est le Secrétaire général du grand
Congrès mutualiste qui aura lieu à Nancy au
cours de l'Exposition.
Signe particulier : possède trois décorations : les
palmes, le Nicham-Iftikhar et le Moni-Seraphon,
qui lui fut décerné par le Roi Sisowath en raison
de la part si active qu'il prit aux fêtes de 1907.
Et M. Louis Lespine, dans les soirées mondaines
qu'il affectionne, porte déjà une brochette de déco-
rations, tout comme M. Brisson, notre sympathique
« post-master ».
M e Louis Lespine fréquente volontiers, l'été,
la terrasse du café Chapellu, situé près du Palais
de Justice où il a acquis, comme avocat, une
situation enviable dans le jeune barreau.
.* *
C'est un de nos Nancéiens d'avenir. Il appartient
à cette génération qui, dans la paix du travail,
attend, sans fébriles impatiences, une ascension
normale à la vie publique.
Et ceci constitue un légitime désir de bon
citoyen.
G. D.
Notre prochaine Charge.
Nous publierons dans notre prochain numéro
la charge de notre excellent doyen et confrère,
M. Victor Hinzelin, Directeur de l'Impartial de
l'Est, Trésorier du Syndicat des Journalistes répu-
blicains départementaux.
190 Le Cri de Nancy
Notre confrère Le Moyne.
M. Le Moyne, de l'Eclair de l'Est, vient de
quitter le journalisme et d être attaché à la mairie
de Nancy. Le public se louera certainement de
l'amabilité de. ce confrère si courtois.
NOS ÉDILES
M. Antoni MULLER
Maire de Boudonuille
Nous sommes heureux de publier dans notre n° 8 la charge
de notre sympathique maire de Boudonville, que nous devions
faire paraître au début de janvier : l'article était déjà com-
posé au Nouvel-An.
« Antoni I er , par la grâce de Luther, Calvin,
Zwïngle, Mélanchton et iFcolampade, maire de
Boudonville, seigneur de la Culotte, Teulotte,
Foucotte, Carotte, etc., marquis de la Renaudine
et des Sifflets, baron de Montreville, comte sau-
vage de la. Colline, etc., etc., etc., à tous présents
et à venir, salut ! »
Ainsi s'exprimera quelque jour M. Muller de
Boudonville, conseiller municipal de Nancy, arbo-
riculteur émérite, lorsque les bonnes gens de son
lointain quartier lui auront édifié un superbe
hôtel de ville, sur la place Godefroy de Bouillon.
Et un jour encore jour faste entre tous, la
statue d'Antoni Muller se dressera devant la
façade du nouveau municipe faubourien, la statue
du premier maire, en costume de jardinier, tenant
une stringue à la main et aspergeant de toutes ses
forces son éternel adversaire, M. Bretagne de la
Ravinelle.*
* *
Antoni Muller est né voilà bientôt douze lus-
tres et il n'a cessé de grandir dans l'estime et
l'affection des gens du plus ancien faubourg de
Nancy, antique village de Saint-Dizier, où les
belles dames des siècles écoulés venaient joyeuse-
ment se pourmener, où les riches robins et bour-
geois avaient de charmantes villas et d'agréables
maisons des champs.
Et tout gamin, quand il n'était pas plus haut
que çà, le petit Antoni faisait la gloire de Bou-
donville ; il rôdaillait dans le sentier des Plantes,
et se baignait dans la fontaine de la Teulotte, in
naluralibus et ultra !
Il grimpait à l'assaut de la Renaudine et de la
Croix-Gagnée, dénichant les nids, hôlant les ceri-
siers et les mirabelliers, et enragé, je ne vous dis
que çà, des quat'pattes et du mezé. ».
C'était lui qui menait la branle par toute la
région des vignes et des enclos ; c'était lui, aux
beaux soirs des dimanches, qui s'en allait à la
chasse aux misserons sur les hauteurs dénudées du
Haut de Lièvre.
Grandissant, le bel Antoni devint la coqueluche
de son Boudonville. En haut, en bas, sur lescôtes,
à travers les paisseaux, dans les vergers, partout où
les gens fouillaient la terre, entre la route de Toul
et le chemin de Saint-Jacques, on célébrait ses
mérites précoces, précoces comme les primeurs
qu'il faisait naître dans ses jardins et sous ses
cloches et vitraux.
Antoni, de plus en plus, incarnait Boudonville.
Si bienveillant, si libéral et si amène, cet autoch-
tone eut un jour comme des idées séparatistes et
autonomes.
Il tint des meetings, il présida des réunions, il
souleva les foules, enthousiasma les pucelles,
pénétra jusqu'au cœur des mères et conquit la
vallée tout entière, de haut vol et de haut verbe.
Et un jour, jour béni, jour auguste entre tous,
Antoni Muller devint à la fois père et maire, père
d'un joli bébé rose, maire de Boudonville, et maire
incontesté, inamovible, irréductible. Sur le plus
haut des arbres, il arbora son drapeau... Une devise
courait, flamboyante : Tout par et pour Boudonville.
Pour un peu, ce diable d'homme aurait, à son
profit, réédité la phrase célèbre de nos pères :
« Sans Boudonville, avec un peu Nancy (oh ! si
peu), qu'est-ce que ce serait que la Lorraine ? »
** *
Les années ont passé, comme passe un rêve.
Les municipalités ont disparu, tombées dans le
sombre oubli... des rues ont poussé avec des mai-
sons, le quartier de Boudonville s'est transformé
rasibus, et M. le Maire est toujours là.
Il a neigé sur sa tête, mais ses joues ont gardé
leur fraîcheur... telles les joues des pèches velou-
tées ou des pucelles en fleur. Dans sa barbe,
M. Muller a mélangé savamment le sel attique
de l'éloquence persuasive et le poivre des piquantes
allusions ; on s'en souvient à Windsor, dans un
jour de Cordiale Entente ; sur son cœur, un ruban
vert fileté de rouge étincelle à des jours de solen-
nités champêtres.
M. Muller, resté maire de Boudonville, est
devenu conseiller municipal de Nancy et sa bonne
humeur légendaire n'a d'égale que sa volonté
tenace quand il s'agit de son Boudonville.
Ce diable d'homme — oh ! les taquins, qu'il
répète souvent, en parlant de ses adjoints — ne
quitte pas la mairie — l'autre, celle qui est sur la
place Royale de Stanislas.
Le Cri de Nancy 191
Il houspille l'un, déclame contre un autre, atta-
que les abus et signale les lenteurs de l'adminis-
tration, architecture, voirie... et tout le bazar.
Il en veut à M. Bretagne qui a relusé
de donner à sa rue le nom pourtant si
glorieux d'Odebric ou de Saint-Bodon ; il
en veut à ceux qui abattent les arbres et ne
savent pas les remplacer ; il en veut surtout à
ces édiles théâtrophiles qui dépensent des millions
pour construire une Salle de Voluptés et un Foyer
de Corruption au centre de Nancy.
Est-ce qu'il y a un théâtre à Boudonville, voyons
donc ? Quelle drôle d'idée, n'est-ce pas !
Mais taisez-vous donc avec vos histoires de
comédie ; le plus beau théâtre du monde ne vaut
pas celui de la nature à Boudonville.
Le bruit a couru que M. Muller aspirait à
1 echarpe d'adjoint des promenades de la ville de
Nancy.
— Oh ! les tarquins (M. Muller voulait se
donner de IV pour une fois et luthier avec les
Egéries des rois de Rome antique), disait-il, pen-
sez-vous !... quand on est maire de Boudonville,
eh ! bien, on y reste, et s'il n'en reste qu'un, je
serai celui-là !
* *
J'ai rencontré l'autre jour M. Muller de Bou-
donville en train d'escalader le chemin des Sifflets,
avec un vieil ami, sculpteur de son métier.
M. Muller avait eu une idée, une idée géniale.
Sur le plus haut du mont, il avait projeté d'élever
une statue colossale du Père Eternel protégeant, ou
mieux, créant Nancy et Boudonville, sous les
espèces et apparences de M. Antoni Muller.
Et le sculpteur œuvrait une maquette minuscule
dans une glaise informe et molle.
Et je demandai à M. Muller : « Que faites-vous
donc là-haut, hommes de Boudonville au grand
cœur ? » Et M. Muller répondit : « Nous sommes
en train de masser le Père Eternel ! »
— Quel dur travail... et combien difficultueux,
m'écriai-je. C'est maintenant, ô maire de Boudon-
ville, père et maire à la fois, qu'on va pouvoir
redire à tous les échos de ces lieux : Continuez,
masseur !
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M. Jean Grillon se ûendarine...
M. Jean Grillon, député de Nancy, est en train
d'organiser à Nancy un Musée de la Gendarmerie.
Pendant ce temps, ses adversaires politiques
annoncent les candidatures dans la 3 e circonscrip-
tion tle M. l'adjoint Ruttinger, du Général de
N , de M. Bernard de Jandin : ce sont
probablement des bruits vagues. On parle aussi
d'une candidature, posée presque officiellement....
M. Jean Grillon va bientôt se gendarmer.
Mais est-il vrai qu'en outre des candidats d'op-
position, un radical-socialiste se présenterait aussi ?
M. de Ludre et le Dr Aimé.
AL de Ludre, député de Nancy, se représentera
aux élections législatives de 19 10, et aura pour
concurrent M. le Dr Aimé. Tels sont, du moins,
nos renseignements.
Le Cri de Nancy publiera donc, dans ses deux
pages de couverture du n° 9, les charges de M.
Ferri de Ludre, député, et de M. le Dr Aimé.
M. le Député Louis Marin.
M. le député Louis Marin vient d'être nommé
secrétaire du Comité du monument de Wagram,
en souvenir des Français morts sur ce glorieux
champ de bataille.
L'actif M. L. Marin ne craint pas le travail :
membre de plusieurs Commissions de la Chambre,
auteur de nombreux projets de lois, il viendra,
en Président de la Fédération Régionalisle Fran-
çaise, assister officiellement au Congrès Régiona-
liste de juin prochain.
Dans les milieux républicains radicaux, on
chuchotte le nom d'un jeune membre du Barreau
nancéien, prêt à se présenter contre M. Marin.
Cet avocat, ardent et débrouillard, s'attend à
trouver en M. Marin un adversaire remuant et
dispos.
La lutte sera intéressante, et, souhaitons-le,
courtoise.
Les élégants n'auront plus d'inquiétude, quand ils
porteront le PANTALON BREVETE VAXELAIRE, PIGNOTet Cie.
192 Le Cri de Nancy
Méquillet, Castara ou Turcljbeiîp ?
Méquillet, Castara ou Turckheim sont les trois
noms de candidats lunévillois éventuels.
Avec des opinions opposées, tous trois sont des
hommes intelligents, capables de donner au Crois-
sant de Lunéville une heureuse croissance!
Qui vivra, verra !
MONSIEUR LECOQ.
Autour de l'Cijiversité
Dans son beau discours prononcé à la séance de
rentrée de l'Université et édité récemment en une
élégante plaquette, M. le Recteur Charles Adam
expose magistralement la vie intense de l'Univer-
sité de Nancy et joint aux graves considérations
générales une documentation précise, pittoresque,
sur les détails de l'organisme.
Nous pensons que les charmantes lignes consa-
crées à l'émincnt professeur M. Albert Collignon,
seront particulièrement goûtées par nos lecteurs :
« Après avoir rappelé nos deuils, je dois mentionner aussi
nos sujets de joie. Nous avons applaudi d'abord à la décora-
tion de M. Albert Collignon, celui de nos collègues peut-être
qui est. le plus populaire. Depuis plus de trente ans, il ensei-
gne à Nancy, au Lycée d'abord, puis à la Faculté des Lettres.
Tous les lettrés connaissent ses ouvrages de littérature
latine, en particulier son Etude sur Pétrone ; et les érudits,
qu'intéresse l'histoire littéraire de la Lorraine, savent ce
qu'elle doit à ses savantes publications. Mais surtout, les
légions d'élèves qui ont suivi sa classe de rhétorique, ont été
heureux de retrouver le nom de leur maître parmi les déco-
rés de janvier (décret du 17 janvier 1908) ; et nul d'entre
ceux-ci, j'en suis sûr, n'a reçu, avec des félicitations aussi
vives, autant et de si sincères témoignages de reconnaissance.
Quel conseiller, d'ailleurs, et quel guide pour la jeunesse !
Je n'en citerai que deux exemples. Un jour M. Collignon fut
consulté par une famille bien connue de Nancy sur l'avenir
d'un jeune homme dans la littérature. Le maître se porta
garant du talent de son élève, qui, en effet, en 1906, à l'âge
de 43 ans, entrait à l'Académie française. Plus récemment,
l'Académie de Stanislas à Nancy avait à décerner un de ses
prix à une œuvre littéraire : M. Collignon désigna Terres
lorraines d'Emile Moselly, et six mois plus tard la même
œuvre était jugée digne de la plus haute récompense par
une autre Académie, celle des Goncourt. Une Société pari-
sienne d'hommes de lettres, et qui se pique d'être ultra-
moderne, se trouvait avoir été devancée dans ses jugements
par une antique et vénérable Compagnie de province, grâce
à la clairvoyance de notre collègue. »
Colette Baudoche
Notre' ami et éminent compatriote Maurice
Barrés vient de faire paraître chez Juven une édi-
tion in- 12 de Colette Baudoche, que beaucoup
avaient déjà lu dans la Revue Hebdomadaire.
Maurice Barrés nous raconte en un style sobre,
de belle architecture française, la touchante his-
toire d'une jeune fille de Metz, Colette Baudoche.
Jamais l'académicien et écrivain lorrain n'a fait
preuve d'une aussi délicate psychologie et' n'a
décrit notre province annexée d'une manière aussi
touchante.
Le Cri de Nancy, humble gazette de jeunes,
s'associe respectueusement à la grande critique
provinciale et parisienne, qui classe Colette Bau-
doche parmi les plus purs chefs-d'œuvre de notre
littérature contemporaine.
Me X..., avocat nancéieti très en vue, n'esl
jamais de bonne humeur quand il vient à l'hôte
des P. T. T.
L'autre jour, pestant contre un employé qui
s'était absenté deux minutes, pour raisons ma-
jeures, il s'écriait avec l'accent lorrain qui l'a rendu
légendaire :
« Encore un qui fait l'école brissonnière ! »
* *
Rue de la Hache noté cette affiche :
Madame Kriegskopf
carde les matelas et les enfants
et plus loin, dans une agence de location :
« Appartement à louer sur le derrière d'un bou-
langer qui peut facilement se couper en deux. »
** *
La dernière de notre concitoyen : « C'est une
travailleuse, cette fille-là, c'est la chenille ouvrière
de la maison. »
LE FLÂNEUR.
Toute personne soucieuse de ses intérêts ne doit contracter aucune
assurance sur la Vie, aucune assurance Dotale, aucune Rente Viagère
sans consulter les tarifs de la Norwich-Unzon, fondée en 1808, la plus
ancienne, la plus importante Compagnie anglaise d' « Assurances sur la
Vie ». Fonds de garantie pour : Assurances, i63 millions ; Rentes
Viagères, 22 millions.
M. PETITCOLLOT, inspecteur général pour Meurthe-et-Moselle et
Vosges, 5r, rue de Strasbourg, Nancy. — Téléphone 5.99. \
Chocolat Lorrain
Le Cri de Nancy
NOT^E BARBEAU
193
lVIe Charles JACOB, Avocat à la Cour
Une fin de non recevoir .
Me Charles JACOB
Auocat, Artiste et Horticulteur
La superbe barbe de Mc Jacob a contribué dans
une certaine mesure à la popularité de ce membre
distingué du barreau de Nancy. En effet, porter
un nom auquel vient s'accoler une si abondante
toison du visage, est une rencontre peu commune.
Cette rencontre devait faire nécessairement naître,
dans l'esprit de 'beaucoup, un rapprochement avec
un type populaire qu'un céramiste utililitaire im-
mortalisa parmi le monde des fumeurs. Mc Jacob
a trop bon caractère pour se fâcher de ce rappro-
chement que ses adversaires politiques ont fait trop
souvent avec lourdeur et manque d'esprit.
Comme bon nombre de ses confrères, Mc Char-
les Jacob possède de multiples soupapes pour
donner libre cours à son activité. Indépendam-
ment des causes variées et diverses qu'il suit avec
assiduité, il consacre une partie de ses loisirs à la
culture des arts les plus divers. Ce sont d'abord la
peinture et le dessin qui furent ses premières
amours. Il fut même sur le point de bifurquer ét
de s'adonner à la pratique exclusive du pinceau.
Nous lui connaissons un crayon très habile autant
que spirituel, quelques-uns prétendent même qu'il
collabore à l'illustration de notre Cri, ce que j'ignore.
Quand les tribunaux prennent leurs vacances en
donnant les leurs aux hommes de loi, Mc Jacob se
dirige avec ardeur vers la vallée de la douce Mortagne
où il possède à Xermaménil un logis familial. Par
les jours ensoleillés d'août, il taquine le goujon et
harcèle le brochet, en attendant qu'il dirige ses pas
vers les cultures et les forêts où les lièvres essaient
en vain de dépister les investigations de ce chasseur
consommé. Après une journée de fatigue, il aime
aussi parfois laisser vagabonder son âme esthétique
sur les ciels triomphants qu'illuminent les derniers
rayons du soleil couchant. Il regrette parfois devant
ces spectacles grandioses d'avoir abandonné l'art
du peintre pour le prosaïque prétoire.
M° Jacob a voulu essayer aussi de convaincre
ses concitoyens qu'il pourrait leur rendre quel-
ques services dans une fonction élective. Trouvant
sans doute que le mandat municipal était trop
restreint pour déployer les ressources de sa com-
pétence, il essaya à deux reprises de forcer les
portes de la préfecture et de s'asseoir parmi les
conseillers généraux. Il échoua dans ses deux ten-
tatives, mais avec l'application des circonstances
atténuantes comme on pourrait s'exprimer en
langage judiciaire.
Depuis lors, il se retira de la vie politique et pour
le consoler et consacrer son talent de cultivateur
de carottes, la Société lorraine d'Horticulture le
choisit comme avocat-conseil et lui fit dessiner
l'affiche annonciatrice de ses concours.
194 Le Cri
M= Jacob est un homme heureux qui sait refré-
ner les déconvenues qui peuvent l'assaillir. Tou-
jours il conserve un stoïcisme souriant et le carac-
tère le plus bienveillant, ce qui désarme les adver-
saires qu'il a pu malmener par sa parole incisive et
vibrante.
HORTUS.
Permettez-moi, chères lectrices, de jeter un cri... d'alarme !
Comme vous habituée aux modes Empire, j'admirais
l'étalage d'un de nos plus grands couturiers parisiens, lorsque
j'y découvris une robe à taille, que dis-je ! froncée à la taille !
Intriguée par ce changement, j'entrais et dans un . court
interview, j'appris les nouvelles suivantes : nous retournons
aux corsages « cuirasse »' et aux robes à draperies, horrible
acheminement vers la crinoline, les paniers !
La mode des chapeaux concorde bien, hélas ! avec ces re-
nouveautés : plus de grands bords comme nous eûmes cou-
tume d'en voir aux derniers chapeaux de paille. Le chapeau
actuel se compose d'nne grosse calotte. Leur forme est
encore bien indécise et l'on en voit de bien des façons. Ils
sont parfois rehaussés de larges brides prêtes à nouer au cou.
— .Un de ces modèles excita ma curiosité : retourné, il avait
l'aspect d'un panier à bras !
Réagissons, chères lectrices ! et que nos efforts tendent à
étouffer ces élégances de mauvais goût dont les « maîtres »
nous annoncent la vogue pour le printemps !
CHIFFON.
Après l'Amiral Housseaux, le JVIaréehal Ney
M. Antoine-Michel NEY
Conseiller municipal, Vice-Président de la F. C. N.
(Au 85 de la Grande-Rue, Ville-Vieille, aux vitrines.) -
La Pantoufle riche. — « Vous aviez vu dans le
Cri de Nancy la jolie charge du sympathique Ami-
ral Housseaux ? et quel charmant article en 'patois,
de Nancy
dit-on ? L'Amiral Housseaux a été enchanté de
l'article et du dessin également.
Le Sabot d'enfant. — « Mais, le Cri de Nancy
qui publie la charge de l'Etat-Major. de la F. C.N.,
devrait faire paraître son deuxième Vice-Président,
notre bon patron Antoine Ney en Maréchal Ney.
Le Lacet jaune (d'un ton liant). — « Mais, du
reste, M. Ney,- d'origine presque messine, est des-
cendant du grand soldat, gloire de la Lorraine.
La Molletière (déjà vieille). — « Mais certes
oui, jeune ignorant, M. Ney est né en Lorraine
en 1862 : venu en 187 1 à Nancy, il fit ses pre-
mières études à l'Ecole Loritz, avec les Staub, les
Kronberg
Son père, un bon mécanicien de la Compagnie
de l'Est, le dirigea ensuite vers la cordonnerie, où
il fit son apprentissage. C'est un véritable fils du
peuple
La Botte. — « Et c'est aussi un militaire, scron-
gnieugneu !
Après avoir servi quatre ans au 102 e de ligne, à
Paris, le sergent-major Ney devint sous-lieutenant
de réserve au 69 e, puis lieutenant au 42 e territo-
rial, où il accomplit une période en 1908 sous les
ordres du lieutenant-colonel Coquinet et à la
1 I E compagnie, commandée par le capitaine Albert
Maringer.
La Boite de cirage (avec éclat). — « Et ses vic-
toires aux élections municipales ! entré avec succès
au Conseil municipal de Nancy aux élections par-
tielles de 1901, réélu en 1904, puis en 1908,
M. Nev soutient à l'Hôtel de Ville les intérêts
toujours plus importants de la Fédération des
Commerçants de Nancy, qu'il fonda récemment
avec ses collègues Pignot et Housseaux.
Le Soulier noir. — « Et malgré ses opinions poli-
tiques bien connues, notre patron veut I'ENTENTE
FRANCO-FRANÇAISE à la F. C. N., il fraternise avec
ses collègues républicains radicaux et, dans sa vaste
fabrique d'outillage moderne, du 18 de la rue des
Tanneries, il possède en commun avec son ami
et concurrent aux Elections municipales de 1901,
M. Edmond Gérard une large cheminée, où leurs
feux brûlent et fument, unis.
La Bottine de femme. — « C'est vrai ! le petit
cordonnier Antoine Ney, tenant humble boutique
en lace du vénérable Musée Lorrain, a mis du
foin dans ses bottes, puisque, depuis 1904, il
occupe 100 ouvriers, et de caporal-bottier, aspire
au titre, non de Napoléon, mais de Maréchal Ney
de la chaussure.
La démocratie laborieuse et économe est en
marche : rien ne l'arrêtera plus !
Le Crochet à boutons (ironique et subtil). — « Et
Le Cri de Nancy 193
puis M. Ney possède deux grands patrons :
Saint Antoine, et son animal, symbole de pros-
périté ; Saint Michel, à la lance victorieuse.
De tels patrons peuvent inspirer à M. Ney assez
de confiance en lui pour peindre ses magasins en
vert, couleur d'espérance !
L'Escarpin. — « Et le Comité supérieur de
l'Exposition de Nancy vient de le nommer Secré-
taire de la classe 60 (chaussures), on dit même
qu'il assistera aux Fêtes de l'Exposition, non pas
en habit noir, médiocre livrée bourgeoise, mais en
tenue de Maréchal.
C'est le chroniqueur de la Fashion du Cri, qui
sera content !
Le Tire-pied. — « Ecoutez un doyen de la
cordonnerie : la F. C. N. peut être fière.
M c G. Boulay, son distingué avocat, n'aurait-il
pas dit à peu près en ces termes, au banquet offert
en juillet 1908 par M. Pignot :
« Votre Président vous offrira Pignot sur rue,
mais votre Vice-Président vous donnera, sinon du
flair, du moins du nez ! »
Sténographié par Arsène Lupin.
L'orchestre est réorganisé et les premières.répé-
titions ont donné d'excellents résultats d'ensemble.
Dry et Dherbois, improvisés chefs d'orchestre,
sont vaillamment secondés par une vingtaine de
camarades pleins de bonne volonté et d'entrain.
Bravo !*
* *
Le sympathique trioCollot-Hogard-Grandgérard
compose actuellement une revuette qui sera don-
née au cercle, en séance intime, lors du Congrès
des Etudiants.
Dans cette revue intitulée Nancy uni vers
Cyihère seront intercalées les chansonnettes pri-
mées au concours organisé par le Comité sur des
sujets intéressant la vie d'étudiant ou l'Université.
Et enfin le dévoué Duret écrit la partition d'une
« Marche des étudiants lorrains ». Toutes nos
félicitations pour ces heureuses initiatives.
Grimai, postichéur et coiffeur «tu théâtre, 14, rue des Mitéchaux,
est en mesure de préparer toutes perruque, tète grimée-,- ne^ mastiqué
sur commande. "
Grimai possède un grand choix de têtes inédites pour les jours graset la Mi-Caréme.
Le Bal de Gala de la Mi-Carêrrçe.
Le Bal de Gala du dimanche 21 mars, organisé
par les Etudiants, aura lieu dans les brillants Salons
Walter, Place Stanislas. L'entrée sera de cinq francs
pour les cavaliers et de trois francs pour les dames.
Les Etudiants font dès maintenant un pressant
appel au public pour donner à ce bal de bienfai-
sance, paré, masqué et travesti un caractère ori-
ginal.
A signaler déjà parmi les cortèges déguisés de
la soirée : i° Les Statues de Nancy suivies des
personnages de leur époque ; 2° Réception des
visiteurs étrangers par la Lorraine, la Ville de
Nancy et l'Exposition ; 3 0 Congrès des Etudiants
internationaux.
De très beaux prix artistiques, vases Majorelle,
Gallé, Daum, Veissières, d'une valeur de mille
francs récompenseront les travestis les plus origi-
naux et luxueux.
Les moindres têtes grimées recevront de petits
prix.
Nancéiennes et Nancéiens, déguisez-vous toutes
et tous pour assister au Bal de la Mi-Carême.
QUASIMODO.
J. Biaise, coiffeur,- o' rue des Dominicains, prépare de nombreuses
tètes grinl :es et des perruques de genre en vue du grand bil musqué eltrave*ti du dimanche 21 mars.
A l'occasion du Bat des Etudiants de la Mi-Carême, le c )stumier bien
connu Monrose, 16, rue Cornillon, à Meaux (Seine-et-Marne), secharge de l'exécution artistique et rapide de tous costumes, oiiginauxou classiques.
Location de costumes neufs ou déjà portés à des prix avantageux.- (Jrande variété de costumes.
Les Bals des Jours Gras.
M. Pajol, notre spirituel imprésario du Casino
et de l'Edeh, vient de donner, les dimanche et
mardi Gras, deux jolis bals. Une quête fructueuse
au profit des pauvres fut faite par la gracieuse
Mrac N. Nos félicitations.
Les Tsiganes de la Rctopde.
La Rotonde ne peut plus se priver du brillant
concours des artistes du maestro Gallozzi : les
concerts sont très suivis en ce moment.
196 Le Cri de Nancy
Bulletin bibliographique de Victor Berger, libraire, succes-
seur de A. Buvignier, 13, rue Saint-Georges, à Nancy,
Téléphone 5.91.Virely. R.-C. Guilbert de Pixerécourt, 10 fr.
Galoux. Le reste est silence, 3 fr. 50.
Le Dantcc. La crise du transformisme.
Hackel. Histoire de la création.
Lanson. Manuel bibliographique de la littérature française
moderne, 4 fr.
Maurel. Un mois à Rome.
Wells. Douze histoires et un rêve, 3 fr. 50.
Dutrait-Crozon. Précis de l'aflaire Dreyfus, 6 fr.
Franié. M'ame Préciat, 3 fr. 50.
Salomon Reinach. Orphcus, histoire générale des reli-
gions, 6 fr.La librairie V. Berger prend toujours des souscriptions
pour « l'Histoire de France », publiée par la Maison La-
rousse.Facilité de paiement. Spécimen gratuit sur demande.
La séance récréative du Lycée de Nancy
Le jeudi 18 février, les élèves internes du Lycée de
Nancy ont offert à leurs maîtres et à leurs camarades
une séance récréative qui fut fort réussie. Dès 4 heu-
res, les invités prenaient place dans la coquette salle
des fêtes de l'établissement, conduits par de corrects
commissaires. Quelques jeunes gens vendaient d'élé-
gants programmes, et, à 4 h. 1/2, l'orchestre dirigé
par M. Stolz père, ouvrait la fête par « Le Voyage en
Chine », de F. Bazin. Disons de suite, l'orchestre du
Lycée mérite une mention toute spéciale pour son
ensemble parfait. Tout le monde a admiré le réel
talent des musiciens qui furent fort applaudis. Ensuite
eut lieu la représentation de « Jean-Marie », le célèbre
drame en un acte, d'André Theuriet.
M lle Krug-Basse. . . eh ! que dis-je ? M. Krug-Basse
a joué très gentiment son rôle de Thérèse. « Elle est
un peu calme » me disait une personne de ma con-
naissance ; c'est peut-être vrai, mais franchement,
doit-on demander à un jeune homme de 16 ans d'in-
terpréter ce difficile personnage à la perfection ? Non.
Moi, j'ai beaucoup et sincèrement applaudi Thérèse
et bien d'autres l'ont fait aussi. -— Jean-Marie fut tenu
par M. Mameluch qui a joué « en acteur ». Il vivait
son rôle et sa diction fut excellente. — M. Boy rem-
plissait le rôle de Joël et ne joua pas moins bien que
les deux autres.
La seconde partie de la séance comprenait d'abord
un morceau d'orchestre : « Premier Bonheur », de
Salabert ; puis, « Le voyage de M. Perrichon », comédie
en 4 actes de Labiche. Les décors représentant une
gare, une auberge, un salon et un jardin, furent
entièrement faits au Lycée. Vives félicitations aux
décorateurs.
Le rôle principal de la pièce, celui de M. Perrichon
était rempli par M. Grosjean. On n'aurait pas mieux
pu interpréter Perrichon : le jour où M. Grosjean
cherchera sa voie, je lui conseille d'aller s'engager au
théâtre : « il y fera certainement son chemin. » Ses
succès au lycée, les applaudissements que nul ne lui
a ménagés, surtout lors de la tirade de la fin, lui
suffisent, et je crois inutile de le féliciter encore ici.
— M. Schlumberger jouant le rôle du commandant
Mathieu me sembla d'abord être un peu intimidé,
mais brûla bientôt les planches. — MM. Didierjean et
Mameluch interprétant l'un, le rôle d'Armand Desro-
ches ; l'autre, de Daniel Savary, jouèrent avec beau-
coup de talent. M. Mameluch surtout fut très remar-
qué. M. Gérard tenant le rôle de Majorin a légèrement
chargé .
. Citons aussi MM. François et Krug-Basse, l'un
jouant Mme Perrichon, et qui fit rire tant l'auditoire,
l'autre, Henriette, gracieuse et enjouée.
L'orchestre interpréta plusieurs morceaux et parti-
culièrement une « Sérénade », de J. Guy Ropartz.
Parmi la nombreuse et élégante assistance, remar-
qué :
MM. Adam, recteur; Barrabino, Déroches, Parisot,
Rohmer.
Mmcs Beauchet, Grosjean, Leitienne, Parisot, Mo-
reau, Grûber.
M"" Campaùx, Grante, Martin, Paquy, Gegout.
Vives félicitations à M. Campaux, le sympathique
censeur du Lycée qui, malgré ses nombreuses occu-
pations, a su organiser une matinée aussi charmante
et aussi réussie ; bien sincèrement remercions aussi
M. le proviseur Chacornac, qui reçut ses invités avec
une charmante amabilité, et encore une dernière fois :
« Bravo les Artistes ! »
René D'ALSACE.
Chez Majorelle.
Majorelle expose actuellement de forts jolis
meubles, des bibelots gracieux et élégants, de belles
séries signées Daum.
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Saint-Dizier, restaure les vieilles glaces et les
cadres de style et dessine des maquettes originales
pour ses encadrements importants.
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et les ors des cadres aux moulures distinguées.
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