37
IN TITUT NATI NAL DE PEDO OGIE IN TITUT NATI NAL DE PEDO OGIE ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE : POTENTIALITES ET CONTRAINTES. REPUBLIQUE DU SENEGAL Un Peuple Un But Une Foi MINISTERE DE L’AGRICULTURE ET DE L’EQUIPEMENT RURAL --------- INSTITUT NATIONAL DE PEDOLOGIE RAPPORT DE STAGE AOUT-OCTOBRE 2013 Présenté par Youssoupha MBODJI Etudiant en géographie à l’UGB de Saint-Louis du Sénégal Dirigé par Monsieur Babacar NGOM Délégué de la zone Sine-Saloum de l’INP

ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

IN TITUT

NATI NAL DE

PEDO OGIE

IN TITUT

NATI NAL DE

PEDO OGIE

ETUDE SUR LA FAISABILITE DE

LA REGENERATION DE LA

MANGROVE DANS LA

COMMUNAUTE RURALE DE

NDIAFFATE : POTENTIALITES

ET CONTRAINTES.

REPUBLIQUE DU SENEGAL

Un Peuple – Un But – Une Foi

MINISTERE DE L’AGRICULTURE

ET DE L’EQUIPEMENT RURAL

---------

INSTITUT NATIONAL DE PEDOLOGIE

RAPPORT DE STAGE

AOUT-OCTOBRE 2013

Présenté par Youssoupha MBODJI

Etudiant en géographie à l’UGB de

Saint-Louis du Sénégal

Dirigé par Monsieur Babacar NGOM

Délégué de la zone Sine-Saloum de l’INP

Page 2: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

2

Page 3: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

SIGLES ET ACRONYMES ......................................................................................................................... 4

INTRODUCTION ......................................................................................................................................... 5

PREMIÈRE PARTIE: CADRE THÉORIQUE ET CONCEPTUEL ............................................................ 7

I. PROBLEMATIQUE ............................................................................................................................. 8

II. OBJECTIFS........................................................................................................................................... 8

III. STRUCTURE D’ACCUEIL ................................................................................................................. 9

IV. DEFINITION DES CONCEPTS .................................................................................................... 10

DEUXIÈME PARTIE: CADRE MÉTHODOLOGIQUE ET ANALYTIQUE .......................................... 12

V. PRESENTATION DE LA ZONE D’ETUDE ..................................................................................... 13

1. Climat .............................................................................................................................................. 13

2. Hydrologie ....................................................................................................................................... 14

3. Les sols ............................................................................................................................................ 15

4. Relief et végétation .......................................................................................................................... 18

5. Le milieu humain ............................................................................................................................. 18

VI. METHODOLOGIE ET RESULTATS OBTENUS ........................................................................ 19

1. La collecte de l’information ............................................................................................................ 19

2. Dépouillement des questionnaires et interprétation ......................................................................... 20

3. Traitement et interprétation des résultats d’analyse de sols et d’eaux ............................................. 23

VII. TYPOLOGIE DES MANGROVES ET IDENTIFICATION DES POTENTIELLES ZONES

D’IMPLANTATION DE LA MANGROVE DANS LA C.R .................................................................... 24

1. Les potentialités des zones .............................................................................................................. 24

2. Les contraintes au développement de la mangrove ......................................................................... 26

3. Typologie des mangroves ................................................................................................................ 27

Différentes espèces de mangroves ........................................................................................................... 27

CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS ........................................................................................... 30

BIBLIOGRAPHIE ...................................................................................................................................... 32

WEBOGRAPHIE ........................................................................................................................................ 33

ANNEXE .................................................................................................................................................... 35

TABLE DES MATIERES

Page 4: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

4

SIGLES ET ACRONYMES

CE : conductivité électrique

C.R : communauté rurale

EPEEC : Equipe Pluridisciplinaire des Ecosystèmes Côtiers

INP : Institut National de Pédologie

pH : potentiel Hydrogène

PLD : Plan Local de Développement

RBDS : Réserve de Biodiversité du Delta du Saloum

UICN : Union Mondiale Pour la Nature

UNESCO : Organisation des Nations Unies pour l’Education et la Coopération Scientifique

WAAME: West African Association for Marine Environment

Page 5: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

INTRODUCTION

Avec une superficie estimée à 196 722 km², le Sénégal se situe entre les latitudes 12°30 et 17°30

Nord et les longitudes 11°30 et 16°30 Ouest. Il se trouve en grande partie dans la zone sahélienne

et est marqué par un climat tropical semi-aride caractérisé par une saison sèche de novembre à

juin et une saison pluvieuse de juillet à octobre.

La pluviométrie suit un gradient Nord – Sud avec des précipitations variant de moins de 250 mm

au Nord à plus de 1 000 mm en moyenne au Sud, alimentant ainsi le grand réseau

hydrographique du Sénégal constitué essentiellement de bras de mers, de lacs et de fleuves très

ramifiés drainant l’intérieur du pays. Ces cours d’eau sont quasiment tous bordés de forêts de

mangroves en amont comme en aval.

C’est surtout sur le fleuve Casamance, dans l’estuaire du Saloum et à l’embouchure du fleuve

Sénégal qu’on localise les mangroves sénégalaises qui couvrent une superficie estimée à environ

2 000 hectares.

La mangrove est un écosystème forestier du bord des mers et des lagunes, longeant les rebords

des fleuves tant que l’eau est saumâtre. Elle est une forêt amphibie des côtes tropicales et

subtropicales, faisant la transition entre la mer et le continent.

C’est un milieu périodiquement soumis à l’inondation des eaux saumâtres des marées. La

végétation est en grande partie composée d’espèces ligneuses sempervirentes, des genres

Rhizophora, Avicennia, Laguncularia et Conocarpus.

La mangrove joue un rôle important dans la protection des côtes contre l’érosion et fournit des

substances nutritives indispensables à certaines espèces de crustacées et de poissons (crevettes,

huîtres, tilapia etc..), du bois de chauffe et d‘œuvre et de la matière première à la pharmacopée

traditionnelle.

Malgré ces multiples services, la mangrove reste un écosystème forestier soumis à la négligence

des populations qui réduisent de ce fait son niveau de protection. Ainsi outre les phénomènes

naturels qui l’affectent, elle reste aussi victime de l’action humaine ce qui, aujourd’hui la met

dans un processus de dégradation très avancée dans certains endroits et totalement en disparition

dans d’autres.

C’est dans ce contexte que l’Institut Nationale de Pédologie (INP) à travers sa délégation située à

Ndiaffate et couvrant la zone Sine-Saloum travaille sur cette thématique en rapport avec la

salinisation des terres.

Page 6: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

6

Cette étude qui s’inscrit dans ce cadre est surtout tournée sur la faisabilité de la régénération de la

mangrove dans la communauté rurale en axant ses recherches sur les potentialités et les

contraintes que présente la zone tant du point de vue sociologique que biophysique.

Page 7: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

PREMIÈRE PARTIE: CADRE THÉORIQUE ET CONCEPTUEL

Page 8: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

8

I. PROBLEMATIQUE

L’économie dans le Sine-Saloum, si florissante qu’elle puisse être reste néanmoins basée sur

l’agriculture. En effet la région s’inscrit entièrement dans le bassin arachidier qui est une zone de

production d’arachides par excellence. Cependant les cultures céréalières aussi occupent une

bonne partie de la production agricole d’où l’importance de ce secteur dans la région.

Outre l’agriculture, base de l’économie, la zone est bien dotée par la nature avec un relief dans

l’ensemble plat dépassant rarement 20m d’altitude. Dans la zone deltaïque du Saloum, se

développent des mers peu profondes avec un débit faible mais le niveau d’eau monte après la

saison des pluies, elle reste aussi très arrosée avec principalement trois fleuves : le Saloum, le

Diomboss et le Bandiala. L’aire est drainée par l’important réseau estuarien du sine-Saloum qui

s’étale sur 234000ha. Cette importance du réseau permet de mettre en évidence le rôle joué par

les estuaires dans l’économie de la région avec 25% de leur surface peuplée par la mangrove.

La mangrove est un élément essentiel pour l’enrichissement trophique des estuaires et lutte contre

l’érosion des sols en stabilisant le substrat par la rétention des sédiments, elle participe aussi au

développement de la pêche, de l’apiculture, du tourisme, et de l’exploitation des coquilles et bois.

Cependant, avec tous ces services qu’en tire l’homme, la mangrove fait face à une multitude de

problèmes qui a causé aujourd’hui sa dégradation très avancée dans le Sine-Saloum et une

disparition totale dans la communauté rurale de Ndiaffate.

Ndiaffate à l’instar de tout le bassin arachidier, a une économie essentiellement agricole mais la

pêche et l’exploitation des marais salant y sont plus ou moins pratiquées. La saliculture gagnant

de l’ampleur provoque une forte salinisation des terres, réduisant ainsi leur fertilité et affectant les

eaux de l’estuaire ; ce qui a conduit à une raréfaction des ressources halieutiques.

C’est ainsi que, dans un souci de restauration des sols, s’impose nécessairement une étude pour la

régénération de la mangrove dans la C.R, vu son fort potentiel bioécologique.

Ainsi compte tenu des exigences physicochimiques et climatiques de la mangrove il faudra

d’abord procéder à l’identification des milieux favorables à son développement, pour essayer

trouver des solutions aux contraintes qui gêneraient son existence.

II. OBJECTIFS

1. OBJECTIFS GENERAL

L’objectif général de cette étude est de contribuer à la régénération des écosystèmes du Sénégal.

Page 9: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

2. OBJECTIFS SPECIFIQUES

Pour atteindre l’objectif global, les objectifs spécifiques suivants sont à atteindre d’abord:

Identifier les zones potentielles, adaptées au développement de la mangrove dans la

communauté rurale de Ndiaffate ;

Evaluer les contraintes du développement de la mangrove dans les sites potentiellement

adaptées ;

Et participer à la restauration des terres affectées par la salinisation dans la communauté

rurale de Ndiaffate.

III. STRUCTURE D’ACCUEIL

Face à l’ampleur de la dégradation des sols par la salinisation qui affecte les terres arables du

pays, surtout celles du bassin arachidier et participant activement au processus de déforestation,

l’INP s’est investi dans toute démarche allant dans le sens de restaurer ces terres en passant

d’abord par une bonne prise de connaissance des phénomènes et de leurs impacts pour mieux

planifier ses interventions. C’est à cette fin que « l’Etude sur la faisabilité de la régénération de la

mangrove dans la C.R de Ndiaffate : potentialités et contraintes» nous a été confiée dans le cadre

de notre stage pour disposer d’une base de données permettant de bâtir une stratégie de réponses

aux aléas des changements climatiques sur la mangrove.

Le stage a été réalisé à l’Institut National de Pédologie (INP) et a duré deux mois, période à

l’issue de laquelle ce présent document a été conçu.

L’INP a été créé par le décret n° 2004-802 du 28 juin 2004. C’est un établissement public à

caractère scientifique et technologique qui a pour objectif principal l’étude des sols.

C’est aussi un instrument de développement transversal au service de l’agriculture, de l’élevage,

de l’environnement, de la pêche continentale, de l’aménagement du territoire, de l’hydraulique et

du développement communautaire.

Sa mission est :

d’identifier et de maîtriser les caractéristiques des ressources en sol ;

de sauvegarder le patrimoine foncier ;

de former et de sensibiliser les producteurs et autres opérateurs économiques sur le rôle de

la science du sol ;

de mettre en œuvre des modules de formation sur l’exploitation et la gestion durable et

rentable ;

Page 10: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

10

de coordonner, de réglementer et de contrôler les travaux pédagogiques exécutés sur le

territoire national ;

d’établir des normes en matière de sols et eaux pour l’agriculture ;

de mettre en œuvre des centres polyvalents de formation des producteurs, vitrines des

techniques et méthodes d’exploitation agricole durable ;

de dynamiser et de développer les coopérations sous régionale, régionale et internationale.

IV. DEFINITION DES CONCEPTS

- Biodiversité : Elle désigne la variabilité des organismes vivants de toute origine y compris

entre autres, les écosystèmes terrestres, marins et autres écosystèmes aquatiques, ainsi que les

complexes écologiques dont ils font partie. Elle englobe la diversité au sein des espèces (diversité

génétique), la diversité des espèces et la diversité des écosystèmes (Convention sur la diversité

biologique, 1992). Toutes les formes de vie sur terre sont concernées ainsi que leurs

caractéristiques naturelles.

- dégradation des terres : elle désigne la diminution ou la disparition, dans les zones arides,

semi-arides et subhumides sèches, de la productivité biologique ou économique et de la

complexité des terres cultivées non irriguées, des terres cultivées irriguées, des parcours, des

pâturages, des forêts ou des surfaces boisées du fait de l’utilisation des terres ou d’un ou de

plusieurs phénomènes, notamment de phénomènes dus à l’activité de l’homme et à ses modes de

peuplement, tels que : l’érosion des sols causée par le vent et/ou l’eau, la détérioration des

propriétés physiques, chimiques et biologiques ou économiques des sols, et la disparition à long

terme de la végétation naturelle (CLD, 1994).

- Ecosystème : c’est un complexe dynamique formé de communautés de plantes, d’animaux et de

micro-organismes et de leur environnement non vivante qui, par interaction, forment une unité

fonctionnelle (CDB, 1992). Ecosystème= biotope +biocénose ; c’est-à-dire le milieu de vie

(biotope) et les formes de vie et leurs relations (biocénose).

-mangrove : La mangrove est un écosystème incluant un groupement de végétaux

principalement ligneux spécifique, ne se développant que dans la zone de balancement des

Page 11: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

marées appelée «estran» des côtes basses des régions tropicales. On trouve aussi des marais à

mangroves à l'embouchure de certains fleuves.

- Zones humides : les zones humides sont des étendues de marais, de fagnes, de tourbières ou

d'eaux naturelles ou artificielles, permanentes ou temporaires, où l'eau est stagnante ou courante,

douce, saumâtre ou salée, y compris des étendues d'eau marine dont la profondeur à marée basse

n'excède pas six mètres. Elles ont des fonctions écologiques fondamentales en tant que

régulateurs du régime des eaux et en tant qu’habitat d’une flore et d’une faune caractéristiques et

particulièrement des oiseaux d’eau. (Convention de RAM SAR, 1971). Les zones Humides

constituent des sources d’eau douces, de biodiversité animale et végétale, représentent des zones

privilégiées d’agriculture et constituent également des remparts contre le changement climatique,

notamment en raison du potentiel de séquestration de carbone des forêts marécageuses (forêts de

zones humides).

- Estuaire : Etendue d'eau en partie fermée, sur le bief intérieur d'une rivière raccordée librement

à la mer, et qui est alimentée en eau douce par des zones de drainage en amont. L’estuaire est une

forme de contact entre un cours d’eau et l’étendue d’eau dans laquelle il se jette, généralement le

lieu où le fleuve rejoint la mer (éventuellement le lac). En général, l'estuaire correspond à une

zone élargie du lit du fleuve qui se divise en nombreux bras et méandres.

-Restauration : action de restaurer, de replanter une forêt soumises à la dégradation. Ici la

restauration renvoie à la replantation de la mangrove disparue de la C.R.

- Régénération : c'est la capacité de reproduction naturelle d'une partie vivante qui a été détruite,

ici les populations de mangroves. C’est notamment à travers l'observation d'une bonne

régénération que l'on peut juger du bon état de santé d'un peuplement de palétuviers. Elle

s'exprime par une densité de plantules et de jeunes arbres dans le sous-bois.

Tanne herbacée: étendue de sol couverte d'halophytes de petite taille se développant aux dépens

de la mangrove. La surface des tannes herbeuses est moins salée que celle des tannes vives ce qui

explique la présence d'herbacées ou de tout petits ligneux.

Tanne vive : on appelle tanne vive une étendue de sol nu se développant aux dépens de la

mangrove. Il existe deux origines au phénomène de « tannification » : la salinisation et parfois

l'acidification. Une diminution de la salinité ou de l'acidité des nappes et des sols peut conduire à

une recolonisation partielle et souvent temporaire des tannes par les palétuviers.

Page 12: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

12

DEUXIÈME PARTIE: CADRE MÉTHODOLOGIQUE ET ANALYTIQUE

Page 13: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

LatminguéNDIAFFATE

Tiombi

Tiaré

Ndiebel

Keur Baka

Dya

Keur Socé Sago

Ndiendieng

C.R DU DEPT DE KAOLACK

C.R DE NDIAFFATE

ESTUAIRE

RN 4 et 5

20 0 20 Kilomètres

N

350000

350000

360000

360000

370000

370000

380000

380000

390000

390000

400000

400000

410000

410000

420000

420000

15400

00

15400

00

15500

00

15500

00

15600

00

15600

00

15700

00

15700

00

15800

00

15800

00

MATAM

LOUGA

TAMB ACOUNDA

KOLDA

SAINT LOUIS

KE DOUGOU

KAFFRINE

THIE S

FATICK

SEDHIOUZIGUINCHOR

KAOLACK

DIOURBE LDAKAR

N

V. PRESENTATION DE LA ZONE D’ETUDE

La communauté rurale de Ndiaffate se localise à environ 200km de Dakar, entre les latitudes 13°

57' 20.60" N et 14° 10' 50.49" N et les longitudes 16° 02' 53.37" W et 16° 16' 51.64" W et

s’inscrit administrativement dans le département de Kaolack, particulièrement dans

l’arrondissement de Ndiedieng. Elle couvre une superficie de 321.08km2 (soit 32108 Ha) et

compte à son actif 75 établissements humains.

Elle est limitée à l’Est par la C.R de Latmingué, à l’Ouest par l’arrondissement de Djilor, au

Nord par les C.R de Thiomby, Dya et la commune de Kaolack, au Sud par les communautés

rurales de Ndiedieng et Keur Socé Sago.

La C.R est traversée sur sa limite Est par la route nationale n°4 et à son centre par la route

nationale n°5.

1. Climat

Située au centre Ouest du Sénégal, la Communauté Rurale de Ndiaffate à l’image de toute la zone

sahélienne a connu une longue période de sécheresse ce qui a d’ailleurs contribué au recule des

isohyètes du Nord vers le Sud, inscrivant la zone entre les isohyètes 400 et 600 mm. Cependant

il faut noter une abondante pluviométrie durant l’an 2012 avec une moyenne pluviométrique

annuelle de 926.3mm.

Figure 1 Localisation de la C.R de Ndiaffate

Page 14: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

14

Le climat de la C.R est de type soudano-sahélien avec des températures relativement hautes

d’Avril à Juin (15/18°C à 35-45°C). Il est marqué par trois types de vents :

l’Alizé maritime (novembre – février) : avec des températures variant entre 12,5 et 14° C,

il apporte la fraîcheur et le froid ;

l’Harmattan : agent très actif dans l’érosion de l’écosystème, il est marqué par des vents

de sable et des températures qui avoisinent parfois 45°C ;

la Mousson (juillet – octobre) : elle traverse la Communauté Rurale ; facteur de pluie, elle

constitue un intérêt particulier pour les populations à forte potentialités agricoles.

A l’instar du reste du pays on y retrouve deux saisons que sont la saison des pluies qui s’étale de

juin à octobre avec de fortes pluies et la saison sèche pour le reste de l’année.

2. Hydrologie

La C.R a un vaste réseau hydrographique, elle est drainée dans toute son étendue par un ensemble

de cours d’eaux permanents et ou temporaires (rivières, marigots étangs, etc.) ; elle est traversée

dans toute sa partie Nord par un réseau hydrographique constituant un ensemble de bolongs et de

ramifications issus du bras de mer le Saloum. (cf. carte). Ainsi il pourrait être confondu avec une

ria sillonnée par de larges bolongs présentant de multiples ramifications.

Selon l’EPEEC, l’estuaire du Saloum présente une nette particularité reposant sur un

fonctionnement inverse de l’hydrodynamique estuarienne. En effet le régime hydrologique est

complètement inversé avec un écoulement des tannes vers le plateau. Les chenaux de marée et les

affluents se transforment en saumure après l’hivernage, Sokhna M., 1994-95, cité par Sanokho,

2008.

Au Saloum, les mers sont peu profondes avec un débit faible mais le niveau d’eau monte après la

saison des pluies. C’est ainsi que MARIUS (1979), nous dit que le Saloum n’est ni delta, ni

estuaire au sens véritable du terme. En effet, dans le Saloum le chenal est parcouru exclusivement

par les eaux marines. L’eau est plus transparente en saison sèche, les quantités d’eau douce

reçues par l’estuaire sont insuffisantes même pour compenser les pertes par évapotranspiration.

La salinité de l’eau du Saloum est partout supérieure à celle de l’eau de mer (33,3g/1) (Saos et

alii Pages 1982). Les phénomènes de marée dynamique et de marée de salinité sur l’ensemble du

réseau hydrographique sont déterminants.

Page 15: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

I1 y a très peu d’apport de l’amont même en saison des pluies, le débit d’eau douce étant très

faible en hivernage.

3. Les sols

Au Quaternaire récent les différents épisodes géologiques engendrés par l'alternance de périodes

humides et sèches ont profondément façonné le milieu. Le réseau du Sine Saloum se serait mis en

place pendant la période humide ayant succédé à l'Ogolien entre 13 000 et 8 000 ans B.P.

(Michel, 1973). Au cours de cette période humide l'estuaire actuel, alors zone déprimée, recevrait

les épandages des fleuves du Sine, du Saloum et de Khombole (Diop, 1978, 1988).

Les sols de l’estuaire sont des sols sableux ou argileux. Selon SADIO (1991 cité par MANGA,

2012), les sols de mangrove du Saloum sont des vasières qui résultent des dépôts argileux

ceinturant les cours d’eau dans la zone intertidale. Ces sols hydromorphes sont de manière

temporaire ou permanente submergés.

Dans la C.R, globalement on rencontre sept types de sols :

Figure 2 Hydrographie de la C.R de Ndiaffate

Page 16: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

16

des sols hydromorphes à Gley salé ;

des sols hydromorphes et sols vertiques ;

des sols hydromorphes sur matériaux sableux ;

des sols hydromorphes à gley salé et sols halomorphes salins hydromorphes

des sols ferrugineux tropicaux non ou peu lessivés plus ou moins bien drainés ;

des sols hydromorphes organiques plus ou moins tourbeux avec sols halomorphes ;

des sols ferrugineux tropicaux lessivés plus ou moins remaniés sur matériaux dunaire

tronqués, indurés, sols peu évolués.

Sur chaque unité du modelé géomorphologique, les états de surface des sols ont été étudiés par

VALENTIN (1990), cité par MANGA (2012) et ils peuvent être regroupés en trois grands

ensembles. Il s’agit des vasières, de sols hydromorphes et des sols ferrugineux tropicaux.

Figure 3 Typologie des sols dans la C.R de Ndiaffate

Page 17: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

Dans leur répartition spatiale, les vasières représentent 5% de la superficie de la CR (sols

hydromorphes à gley salé et sols halomorphes salins hydromorphes ; sols hydromorphes

organiques plus ou moins tourbeux avec sols halomorphes), elles sont rencontrées dans les

environs immédiats des cours d’eau. Cette position leur confère leur caractère halomorphe. Ces

sols correspondent en général aux sols salés ou tannes qui sont caractérisés par la présence d'une

structure dénaturée en surface, se traduisant par une faible capacité de rétention en eau, la

présence d'éléments nocifs au développement de la plante tels que Cl-, SO4--, HCO3

-, CO3--, Na+,

Al++ et Fe++ et une absence presque totale de matière organique.

Les sols halomorphes sont classés, en fonction de la Conductivité Electrique (CE), en trois

grandes catégories : les tannes arbustives dont la CE est comprise entre 500 et 2 000 µs/cm ; les

tannes enherbées avec une CE comprise entre 2 000 et 4 000 µs/cm et les tannes pures ou sols

sursalés où la CE est supérieure à 4 000 µs/cm.

Les sols hydromorphes qui occupent 15% de la superficie de la CR (sols hydromorphes à gley

salé, sols hydromorphes et sols vertiques, sols hydromorphes sur matériaux sableux) sont

rencontrés dans les zones de dépression. Ces sols se sont développés sur alluvions récentes. Leur

profil est marqué par des taches d’hydromorphie dues à une nappe d’eau temporaire durant la

saison des pluies. Ce sont les terres potentiellement les plus fertiles mais leur difficulté de travail

et leur engorgement temporaire entraînent leur non-mise en culture pluviale. Actuellement, ces

sols sont utilisés pour le maraîchage et l’arboriculture fruitière.

Les sols ferrugineux tropicaux occupent 80% de la superficie de la CR (sols ferrugineux

tropicaux non ou peu lessivés plus ou moins bien drainés, des sols ferrugineux tropicaux lessivés

plus ou moins remaniés sur matériaux dunaire tronqués, indurés, sols peu évolués).

Les sols ferrugineux tropicaux cuirassés des plateaux se rencontrent essentiellement sur le

plateau cuirassé. Ils reposent sur un matériel clair et argileux en profondeur, contenant des tâches

ferrugineuses indurées sur cuirasse ferrugineuse. La teneur en matière organique est faible dès la

surface (0,l à 0,5%) (DIATTA et MATTY, 1993 cité par MANGA, 2012). Ces sols sont

actuellement soumis à des défrichements massifs agricoles qui les exposent à l’action mécanique

de la pluie : la formation d’une croûte de battance réduisant très fortement l‘infiltration de l’eau

dans cette zone.

Page 18: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

18

Les sols ferrugineux tropicaux sur glacis de raccordement se localisent sur la toposéquence

entre le plateau résiduel et la vallée colluvo-alluviale. Ces sols présentent une forte hétérogénéité

morphologique, on les classe en deux groupes :

- Sols peu évolués, d’apport colluvial sur gravillons et cuirasse, appelés sols modaux et

possédant un horizon supérieur peu épais (70 cm de profondeur) à texture sablo-

limoneuse, à faible taux d’argile (8 à l0%). Ces sols présentent des propriétés

chimiques médiocres et hydriques limitées.

- Sols ferrugineux tropicaux lessivés à peu lessivés, relativement profonds, possèdent

un horizon supérieur à texture sableuse à sablo-limoneuse. Ces sols sont considérés

comme étant des terres agricoles par excellence malgré une capacité moyenne de

stockage de l’eau et des carences en phosphore et potassium (BERTRAND, 1971 cité

par MANGA, 2012).

Les problèmes rencontrés sur ces sols sont liés au fait qu’ils sont soumis à une culture continue

sans apport de fertilisant minéral ou organique. Sur ces sols apparaissent de nombreux signes

d’érosion : encroûtement en surface, rigoles et ravines (MANGA P., 2012).

4. Relief et végétation

Le relief de la C.R est dans son ensemble plat avec des altitudes dépassant rarement 4m et une

faible pente d’orientation général Nord-sud inférieure à 0,6m.

La végétation y est de type savaneux, constituée d’herbes, d’arbustes, et d’arbres. La C.R compte

aussi des forêts classées comme celle de Kousmar, de Koutal, de Vélor et de Keur Matar et des

forêts protégées où commence à apparaître une végétation pseudo steppique dominée par le genre

Acacia et d’autres épineux (acacia seyal, zizyphus mauritiana).

5. Le milieu humain

La population de la communauté rurale est estimée en 2007 à 29.102 habitants. Elle a évolué de

2000 à 2007 à l’ordre de 10755 habitants soit une progression de 55 %. Les jeunes représentent

16042 habitants de la population totale soit 55 % de la population alors que les femmes sont de

13246 habitants soit un peu plus de 46 % de la population totale.

Page 19: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

La population est essentiellement constituée de wolof (17046 habitants, soit 59 %), peulh (6000

habitants soit 21 %), sérère (5301 habitants, soit 19 %). Le reste de la population est composée

des minorités de Socés, de bambaras et de toucouleurs.

Cette population est composée dans sa grande majorité de musulmans avec une bonne

coexistence entre les différentes sensibilités religieuses surtout dans les villages à majorité sérère

comme Ndiaffate escale Ndiaffate sérère Ndiaffate Beyrouth et Thioffior. La communauté

chrétienne représente un peu moins de 2 % de la population totale.

La texture socio professionnelle est composée de 97 % d’agricultures qui sont à 60 % des

éleveurs et le reste est fait de commerçants d’artisans et d’autres petits métiers. (PLD Ndiaffate,

2007-2012).

VI. METHODOLOGIE ET RESULTATS OBTENUS

La méthodologie employée dans ce travail s’articule sur trois axes principales que sont la collecte

de l’information, le traitement et l’analyse des données et enfin la rédaction du document final.

1. La collecte de l’information

C’est la première phase du travail consistant à la recherche documentaire, à des visites de

terrains, à l’administration de questionnaires et de guides d’entretien, à la collecte de données

d’analyse d’échantillons de sols et d’eaux et à la photographie.

La documentation est le point de départ et le plus essentiel pour ce travail en ce qu’elle

permet une meilleure appréhension de l’objet de l’étude et une bonne compréhension de

la zone. Ainsi différents ouvrages et sites web traitant de la mangrove ou présentant la

zone ont été consultés.

Les visites de terrains consistent à descendre sur le terrain, principalement sur les villages

bordant l’estuaire pour y repérer les sites concernés par l’étude. C’est aussi durant les

visites que des questionnaires ont été administrés dans 4 villages riverains.

Les questionnaires visaient 40 chefs de familles établis depuis au moins 25 ans dans l’un

des 4 villages (Bill, Ndiaffate Peulh, Ndiaffate Sérère et Kado) et âgés au minimum de 25

ans. Ainsi avec 10 questionnaires par village, nous avons pu recueillir des informations

relatives à l’utilité de la mangrove, les causes et les conséquences de sa disparition.

S’en est suivi l’introduction d’un guide d’entretien auprès du conseil rural et des

techniciens évoluant dans le domaine de l’environnement ou de l’agriculture. Les

Page 20: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

20

informations obtenues par le biais de ce guide d’entretien nous ont permis de confronter et

d’interpréter les résultats de l’enquête.

Avec un appareil photo numérique, des prises de vue ont été effectuées sur les sites

identifiés et dont les coordonnées géographiques ont été relevées avec le logiciel Google

earth

Et enfin, la collecte de diverses données d’analyse d’échantillons de sol et d’eaux prélevés

sur différents sites de la zone d’étude.

2. Dépouillement des questionnaires et interprétation

Une étude sur la régénération de la mangrove ne pourrait se faire sans l’implication des

populations locales tout comme il est nécessaire de recueillir leurs avis sur l’existence

d’anciennes reliques de mangroves dans la zone. C’est en ce sens que des questionnaires ont été

administrés dans 4 villages (BILL, NDIAFFATE PEULH, NDIAFFATE SERER ET KADO)

bordant l’estuaire. Ces questionnaires visaient 40 chefs de familles qui sont probablement

contemporains à la mangrove de la C.R dont ils garderaient des souvenirs. Ainsi le dépouillement

des résultats de l’enquête fait apparaitre les informations suivantes :

o Caractéristique de l’échantillon

59% des personnes interrogées sont âgées de 45 à 60 ans alors celles qui sont âgées de plus de 60

ans représentent une proportion de 38.5% pendant que les 2.5% constituent la proportion

d’individus ayant un âge compris entre 35 et 45 ans. Malgré cette diversité des âges, l’ensemble

des individus interrogés a une ancienneté de plus de trente (30) ans dans les villages concernés ;

mieux encore ils y vivent depuis leur naissance.

L’activité principale de ces populations est l’agriculture, pratiquée par 61.9% des personnes

interrogées, alors que la pêche et l’élevage viennent en second plan avec respectivement 15.9 et

11.1% de l’échantillon défini.

o Historique de la mangrove dans la CR de Ndiaffate

L’analyse de ces résultats montre que les personnes interviewées ont une bonne connaissance de

la mangrove qui leur était contemporaine en peuplant jadis l’estuaire de leur localité. Elle indique

aussi que les populations vivent actuellement les conséquences résultant de sa disparition.

Page 21: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

Ainsi il est confirmé que l’estuaire du Saloum, au niveau de la C.R Ndiaffate était bien peuplé de

mangroves et les anciennes reliques étaient globalement localisées sur toute l’étendue du bras, ce

qui fait une ligne quasiment droite de Bill à Bane Samane et même au-delà de la limite de la C.R

(Kamatane). D’après l’enquête les genres Avicennia et rhizophora étaient les plus représentés ;

cependant, suivant la division locale de l’estuaire le petit bras qui va de Bill à Keur Demba était

la zone des Avicennia qui sont plus représentatifs (66.75%), alors que le grand bras qui va de

Keur Demba à Bane Samane est une zone de peuplement de rhizophoras (33.3%). Néanmoins

une prédominance du Conocarpus est révélée non pas par le questionnaire, mais par les

entretiens avec certaines personnes ressources comme les chefs de village de Keur Yigo, de Keur

Samba Thiadji et de Keur Demba. Ces derniers affirment que l’estuaire était longé par une espèce

végétale nommée « niaraniara » en langue locale et désignée en français par le terme Conocarpus

erectus. Même si tous nos interlocuteurs confirment la disparition totale de la mangrove dans la

C.R, plus d’une dizaine de pieds de Conocarpus erectus restent localisés sur la tanne de Keur

Waly Ndiaye, au bord de la route nationale n°5.

La pêche constituait la principale activité pratiquée dans ces mangroves ; mais on y exploitait

aussi le bois pour la construction et le chauffage. Les feuilles et les racines des arbres étaient

utilisées dans la médecine traditionnelle. Du point de vue écologique la mangrove constituait un

frein anti sel et servait en plus de cela à réduire la force des vents dévastateurs.

o Processus de dégradation de la mangrove dans la CR de Ndiaffate

Ces reliques de mangroves ont enclenché un processus de dégradation relativement avancé entre

les années 1960/70 et ont entièrement disparu entre 1970 et 1980. Cette disparition est le résultat

d’un concours de plusieurs facteurs qu’ils soient naturels ou anthropiques comme l’attestent les

chefs de familles interrogés. Ainsi, il est claire que la sursalure de l’estuaire, accentuée par les

sècheresses des années 70 à 80 ont fortement contribué à la disparition des reliques de mangroves

dans la C.R. En effet en 1974, une sévère crise de sècheresse frappa le Sahel et les effets ont

subsisté jusqu’en1980. Cela a fortement impacté sur la pluviométrie de cette région qui s’est

considérablement réduite. Mais s’y est ajoutée une hausse des températures entrainant du fait une

forte évaporation des eaux du bras du Saloum. Ainsi, si on analyse les relevées thermiques de la

station météorologique de Kaolack, on constate une très grande variation d’amplitude thermique

(température diurne deux fois supérieure à la température nocturne) sur la période de 1951-2003.

La température diurne mensuelle la plus élevée est de 42,2° à la même période (Avril 1987) alors

que les températures diurnes moyennes annuelles ne varient qu’aux environs de 34°C à 37°C.

Page 22: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

22

Ainsi la tendance généralement croissante des températures moyennes annuelles et leurs

anomalies des années 1951 à 2003 traduisent une augmentation nette des températures, donc des

effets de changement climatique sur la région du Saloum (NAMBONA, 2007). Face à

l’importance du processus évaporatoire de ces années au niveau de l’estuaire, la salinité a très

fortement augmenté car la dilution par les eaux de ruissellement n’est plus assurée. Ces données

viennent confirmer les affirmations de Marius selon qui « la disparition de la mangrove dans

l’estuaire du Saloum reste essentiellement liée aux variations climatiques des années 70-80. En

effet les végétations de mangroves sont particulièrement réactives aux variations du climat et en

particulier à son impact sur la salinité des eaux ». La dégradation importante de la mangrove de

l’estuaire entre 1972 et 1986 coïncide avec les périodes de déficit pluviométrique qui a installé la

sécheresse dans cette partie du Sénégal, y accentuant ainsi l’évaporation et la salinité des eaux de

mer.

Tableau 1 caractéristique climatique à la station de Kaolack 1971/81

Sur le plan anthropique, le facteur le plus visible demeure l’installation des Salins du Sine-

Saloum sur le bras. En effet cette usine exploite le sel contenu dans l’eau de l’estuaire déjà

sursalée mais après usage, rejette l’eau très concentrée en Chlorure Sodium (NaCl) dans le bras,

ce qui participe à la hausse de la salinité dans ce bras du Saloum. S’y ajoute aussi la coupe des

branches de rhizophoras utilisées dans la construction des cases et autres.

Cette dégradation de la mangrove dans la C.R de Ndiaffate a eu plusieurs conséquences mais la

plus manifeste reste la salinisation des terres associée à une intense tannification provocant ainsi

l’infertilité des sols. En outre, la forte salinité de l’estuaire a entrainé une rareté du poisson et la

disparition de certaines espèces. Parmi les conséquences aussi on peut citer la salinisation des

nappes et le colmatage de l’estuaire suite aux actions de l’érosion éolienne.

Pour confirmer ces résultats on peut observer sur le terrain la disparition du couvert végétal (et

même les arbres fruitiers dans certains villages comme Bill), le rétrécissement des aires de

culture, la baisse des rendements agricoles.

Page 23: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

o Possibilités de régénération de la mangrove dans la CR de Ndiaffate

Malgré tous ces problèmes liés à la disparition de la mangrove, il s’avère possible de régénérer

cet écosystème vu l’abondance pluviométrique de ces dernières années et l’absence de sécheresse

depuis les années 1980. Ainsi la régénération de la mangrove reste fort possible avec une bonne

gestion du problème impliquant les populations locales et un bon choix des sites potentiels.

3. Traitement et interprétation des résultats d’analyse de sols et d’eaux

Dans cette partie nous utiliserons les résultats des mesures effectuées sur la salinité et le pH par

l’INP dans le cadre d’une étude menée pour le compte du PAPIL en 2012. Ces mesures ont été

réalisées sur un ensemble de sites localisés dans la zone Kaolack-Fatick, donc incluant la

communauté rurale de Ndiaffate (surtout au niveau des villages de Bill Peulh et de Bane

Soutoura). L’analyse des résultats de mesure montre une légère variation du pH entre les mois de

mars et de novembre encadrant la saison des pluies alors que la conductivité électrique subie une

forte variation dans les deux sens entre ces deux périodes.

En effet avant la tombée des premières pluies (Mars) la conductivité mesurée dans les eaux de

surface varie entre 30900 µs/cm à Bill Peul et 113300 µs/cm à Bane Soutoura alors que le pH est

respectivement de 7,72 et 7,96. Ces résultats révèlent ainsi un gradient de salinité très élevé qui se

reflète d’ailleurs au niveau des nappes de 5 à 10 m de profondeur qui présentent des valeurs de

conductivités variant entre 2640 µs /cm à Bill Peul et 3030 µs /cm à Bane Soutoura pour des

valeurs de pH comprises entre 5,54 et 4,72. Après la saison des pluies, par contre, les variations

du pH et surtout de la conductivité se font dans deux sens avec d’une part une chute importante à

Bane Soutoura où la conductivité mesurée est de 66600 µs/cm et le pH de 7,8 et d’autre part une

augmentation importante à Bill Peul où la conductivité mesurée est de 70900 µs/cm. La même

évolution est notée au niveau de la nappe phréatique avec une baisse de la conductivité à Bane

Soutoura (2012 µs /cm) et une augmentation à Bill Peul (4370 µs /cm).

Cette variation hétérogène de la concentration des eaux de surface de l’estuaire témoigne de la

complexité du phénomène de salinité dans la communauté rurale. Il apparait ainsi que la saison

des pluies n’entraine pas automatiquement de baisse de la concentration saline au niveau des

eaux de surface sur tous les sites de l’estuaire ; ou même si c’est le cas, cette baisse est très

éphémère. En effet, théoriquement une quantité importante de pluies permettrait de diluer l’eau

saline et transformer les tannes vives en saumure. Mais cela ne dure pas plus de 3 mois et on

revient à la situation de départ à cause des fortes évaporations en octobre qui font perdre leurs

Page 24: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

24

qualités aux eaux saumâtres. En outre, le lessivage du sel des tannes vives peut contribuer à

l’augmentation de la conductivité électrique expliquant ainsi l’augmentation de celle-ci à Bill

Peul après la saison des pluies.

En 2012 donc, année la plus pluvieuse depuis 12 ans avec une moyenne de 926,3mm en 55 jours,

la salinité sur les tannes demeure élevée au mois de novembre malgré la dilution par les eaux

pluviales. Cette salinité demeure néanmoins dans la limite du tolérable pour la plupart des

variétés de mangroves de la zone qui sont localisées sur des sites où la conductivité varie entre

3000 et 100 000 µS/cm. Une tentative de reboisement de la mangrove aux mois d’août ou de

septembre pourrait donc être envisageable

VII. TYPOLOGIE DES MANGROVES ET IDENTIFICATION DES POTENTIELLES

ZONES D’IMPLANTATION DE LA MANGROVE DANS LA C.R

Les vasières se localisent dans la communauté rurale sur presque toute l’étendue de l’estuaire qui

constitue la limite Nord de la localité. Théoriquement la régénération de la mangrove pourrait

concerner les sites qui, jadis l’abritaient. Ainsi on retiendra l’axe Kaolack-Bill-Bane Samane qui

fut entièrement peuplé de rhizophoras et d’avicennias. La tanne de Keur Waly Ndiaye qui abrite

actuellement des reliques de conocarpus erectus constituerait également un potentiel site

d’accueil de la mangrove.

Cependant à considérer les activités de reboisement réalisées à l’aval du bras, dans la zone Keur

Demba, Keur Yigo, Kado, Bane Samane, il s’avère que cette zone est inhospitalière pour le

rhisophora. Mais vu les reliques trouvées à Keur Waly, on pourrait essayer d’y replanter le

conocarpus erectus.

1. Les potentialités des zones

La pluviométrie dans la C.R de Ndiaffate connaît dans son ensemble une évolution très positive

depuis 2000 bien qu’évoluant sur la courbe en dent de scies. En effet depuis cette année une

hausse des précipitations est notée dans cette région, comblant ainsi les déficits pluviométriques

occasionnés par les épisodes de sécheresse des années 70 à 80.

Page 25: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

L’écart enregistré entre moyenne pluviométrique y est de 492,8mm alors la plus importante

quantité d’eau a été recueilli en 2012 avec 955,3mm en 55jours contre 438,33 mm en 38 jours en

2007.

Tableau 2 situation pluviométrique à la station de Ndiaffate

Années

hauteur total

(mm) écart nbre de jours

2000 727.3 39

2001 619.8 -107.5 37

2002 500.5 -119.3 30

2003 478.7 -21.8 32

2004 597.6 118.9 38

2005 834.1 236.5 43

2006 711 113.4 49

2007 433.5 -277.5 38

2008 801.8 368.3 59

2009 795 -6.8 51

2010 878.9 83.9 61

2011 648 -230.9 43

2012 926.3 278.3 55

2013 fin aout 558,7 33

Une analyse de ces résultats permettrait de considérer la pluviométrie de cette dernière décennie

comme facteur très important pour la restauration des écosystèmes mangroves dans la

communauté rurale de Ndiaffate. En effet les fortes quantités de pluies tombées dans cette zone

ces années-ci peuvent fortement influer sur la salinité des eaux de l’estuaire et compenser les

pertes d’eaux douces dues à l’évaporation. Ainsi à bien considérer cette relative baisse de la

salinité, la régénération de la mangrove reste fort possible.

En plus de cette importante pluviométrie, nous avons la présence de reliques de conocarpus

erectus dans certains endroits, ce qui constitue un atout encourageant pour toute entreprise en vue

de restaurer cet écosystème. En effet la présence de ces reliques montre une adaptation de cette

Page 26: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

26

espèce aux conditions du milieu, ce qui aide à choisir les espèces à replanter dans chaque partie

considérée.

Outre ces facteurs, les diverses initiatives de gestion de l’île de Kousmar et des territoires qu’elle

polarise constituent autant de facteurs favorables à la régénération de la mangrove. Si on y ajoute

l’intérêt accordé par les populations à la restauration de cet écosystème, on peut donc affirmer

que les conditions pour une réussite de la régénération de la mangrove dans la communauté rurale

de Ndiaffate sont réunies. Cependant un certain nombre de contraintes doit être considéré.

2. Les contraintes au développement de la mangrove

Malgré ce fort potentiel que présentent les zones favorables à la régénération de la mangrove,

quelques obstacles sont à lever pour son développement. Ainsi il serait difficile de reboiser de

planter sur ces sites sans aménager préalablement le terrain en vue de le rendre hospitalier. En

outre, l’activité de saliculture aussi bien traditionnelle qu’industrielle (les salins du Sine-Saloum)

doit être d’avantage contrôlée pour réduire l’hyper salinité de l’estuaire.

Du point de vue institutionnel, la régénération de la mangrove dans la C.R fait face au manque

d’implication des autorités locales dont la politique environnementale est souvent orientée vers

les espaces et forêts classés continentaux. C’est ainsi qu’il faut noter qu’aucune étude, sous la

direction de ces autorités, n’a été préalablement effectuée sur la régénération de la mangrove

dans la C.R. les seules tentatives notées à cet effet furent celle du projet WAMEE qui a eu à

reboiser le rhisophora sur la rive Nord du bras, mais sans résultats.

Parmi les difficultés pour la régénération de la mangrove, nous notons aussi le manque de

sensibilisation. En effet la population de la C.R est à majorité jeune, ignorant ainsi tout sur les

anciennes reliques de mangroves qui peuplaient l’estuaire de Ndiaffate, il y a de cela plus de 30

ans. C’est d’ailleurs ce qui fait qu’ils ne se sentent pas trop intéressés par la régénération de ces

espèces forestières dont l’utilité leur est quasiment ignorée.

Enfin, l’existence d’un titre foncier1 couvrant la plus importante partie de la rive sud du bras de

mer constitue un facteur bloquant pour toute initiative environnementale dans cette zone. En

effet, même si les détenteurs de cette espace permettaient la réimplantation de la mangrove sur

leurs terres, la volonté et la motivation de certaines couches de la population manqueraient.

1 Titre foncier appartenant à la famille Turpin

Page 27: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

3. Typologie des mangroves

Les forêts de mangroves ont une certaine spécificité et ne se développe sur n’importe quelle territoire.

Autrement dit pour qu’une population de mangroves se développe il faut nécessairement le concours de

certaines conditions :

- Elle peut évoluer dans un milieu tropical sec où les sols sont arrosés par une faible pluviométrie

et affectés par des températures élevées intensifiant ainsi les processus évaporatoires.

- La mangrove peut pousser sous un climat chaud et sec avec 8 mois de saison sèche et 4 mois de

saison pluvieuse à moyenne pluviométrique annuelle comprise entre 250 mm et 1800 mm, ce qui

fait de la pluviométrie un facteur déterminant dans l’évolution de cette espèce végétale.

-Sur le plan de la sédimentologie, le sol des mangroves est caractérisé par un substratum

essentiellement composé de sédiments sableux provenant des dépôts du continental terminal

(CT), d’argiles kaolinites et ou sumectites et de matières organiques.

-Au plan morphologique, la zone où pousse la mangrove est globalement plat avec une altitude

d’ensemble ne dépassant pas 4m IGN.

Ainsi au regard de ces conditions thermiques, pluviométriques et morphologiques, l’élimination

des sels solubles est difficile et complexe ce qui justifie alors salinité plus ou moins importante,

pouvant être supérieure à celle de l’eau mer dans les mangroves du Saloum.

En outre la position des écotones entre le milieu marin et terrestre des écosystèmes mangroves

fait qu’ils sont soumis à de nombreux facteur limitant tels que : la durée d’inondation et

d’exondation, la salinité des eaux et l’hydromorphie du substrat (Amara Singhe, 1992), cité par

Nambora, 2006.

o Différentes espèces de mangroves

Il existe près de 70 espèces de mangroves dont 40 sont retrouvées dans le Sud-est Asiatique.

L’Afrique compte à peu près 15 espèces et l’Amérique une bonne dizaine. Au delta du Saloum et

en Casamance la mangrove comporte 3 familles, 4 genres et six espèces. (Eco-Rurale pour la

Formation et le Développement Local, 2007).

Tableau 1 Typologie des mangroves du Saloum

Famille Genre Espèces

Rhizophoraceae

Rhizophora racemosa

Rhizophora mangle

Rhizophora harisonii

Page 28: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

28

Avicenniaceae ou

Verbenaceae Avicennia africana

Combretaceae Conocarpus erectus

Les rhizophoracées sont représentés au Saloum par le Rhisophora racemosa et mangle et

l’Avicennia africana représente la famille des verbénacées alors qu’avec une faible

représentativité, les Combrétacées sont représentés par le conocarpus erectus.

Chacune de ces espèces présente des caractéristiques morphologiques et physiologiques bien

spécifique :

Le système racinaire

Les sols des mangroves deviennent anaérobiques (absence d’air) quand ils sont recouverts par

l’eau. Certaines espèces de mangroves présentent un système racinaire caractéristique appelé

racines aériennes adaptées à l’absence d’air. Il y a plusieurs types de racines aériennes : les

racines échasses, les pneumatophores, les racines coudées et les racines en planches.

Les Rhizophora ont des racines échasses. Leurs racines aériennes sont exposées à l’air libre

depuis le tronc et les premières branches pour s’étendre vers l’extérieur en descendant vers le sol.

Avicennia et Laguncularia ont quant à elles des pneumatophores. Ce sont des racines coniques en

forme de crayon évoluant vers le haut à partir racines horizontales. Les pneumatophores et les

jeunes racines échasses contiennent de la chlorophylle sous leurs écorces et sont ainsi capables de

faire la photosynthèse. Les racines aériennes permettent ainsi d’échanger des gaz et de stocker de

l’air pour la respiration pendant la submersion. (Eco-Rurale pour la Formation et le

Développement Local, 2007).

Les fruits

Toutes les espèces de mangrove produisent des fruits de forme particulière qui sont

habituellement dispersées par l’eau. Rhizophora produit des fruits de forme cylindrique (forme de

bâtonnet) appelés fruits vivipares ou plus communément plantules vivipares. La raison est que les

graines de Rhizophora germent à l’intérieur du fruit et l’hypocotyle de la plantule se développe à

partir du fruit toujours accroché à la plantule mère.

Page 29: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

Avicennia produit quant à elle de fruits en forme de haricot appelés crytovivipares, à l’intérieur

desquels les graines germent mais restent couvertes par leurs péricarpes (enveloppe du fruit)

pendant qu’ils sont accrochés à la plante mère. (Eco-Rurale pour la Formation et le

Développement Local, 2007).

Système de contrôle du sel

Certaines espèces de mangrove développent des systèmes adaptés à des taux élevés de salinité.

Avicennia contrôle sa teneur en sel à travers un système de sécrétion par des organes appelés

glandes à sel. Les glandes à sel sont abondantes à la surface des feuilles. De temps en temps, nous

pouvons observer du sel cristallisé sur la surface des feuilles. Rhizophora contrôle sa teneur en

sel par d’autres moyens, soit par la perte des feuilles sénescentes ayant accumulées du sel, soit en

exerçant une pression osmotique sur les racines.

Tolérance à la salinité

Pour parler du seuil de tolérance des mangroves à la salinité nous utiliserons les résultats de la

zonation faite par l’UNESCO et ceux des mesures effectuées par l’UICN ; ainsi :

Le Rhisophora se retrouve au Delta du Saloum dans la zone 1 où la salinité est comprise

entre 13.75g/l et 18.75g/l ; la structure du fond est meuble avec de la vase sablonneuse.

D’après les tests de l’UICN :

- A 75mhos/cm tous les plants étaient morts dès la deuxième semaine de l’expérience

- A 65mhos/cm, la survie était de 89% à la troisième semaine, à la quatrième semaine elle

était de 33% et de 22% à la fin de l’expérience.

- A 55mhos/cm, le taux de survie était de 55% à la fin de l’expérience.

Pour cette espèce, la meilleure croissance était obtenue avec les traitements 25mhos/cm et

45mhos/cm qui n’étaient pas significativement différents entre eux au seuil de 5%.

Les pires performances étaient données par le traitement en eau douce et le traitement salé à plus

de 55mhos/cm sans différence entre eux.

A plus de 55mhos/cm tous les plants de Rhizophora étaient morts.

Ainsi on peut retenir que le seuil maximal salinité accepté par le Rhisophora se fixe à 55mhos/cm

ou 41,8g/l.

Page 30: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

30

L’Avicennia africana se localise sur la zone 3 située à la limite de la zone intertidale qui

subit moins l’influence de la marée dans son amplitude et sa fréquence, caractérisée par

une forte évaporation.

Les tests de l’UICN montrent que :

- A 75mhos/cm, 55% des plantes survivent à la troisième semaine et à la

quatrième semaine elles représentaient 33%.

- A 65mhos/cm, le taux de survie était de 89% à la fin de l’expérience.

En somme on remarque que le taux maximal de salinité admis par l’Avicennia ne peut pas

dépasser 75mhos/cm (60g/l) et trois gradients de salinité dans lesquels l’Avicennia présente

différentes performance :

- De 0 à 35mhos/cm, on a une croissance dynamique ;

- De 35 à 5mhos/cm, toutes les plantes survivent, aucune mortalité n’est

notée

- De 55 à 70mhos/cm, on remarque une décroissance du peuplement avec

une mortalité sommitale ;

- +70mhos/cm, la disparition de la mangrove est généralisée.

Vu ces résultats, on peut convenir que l’Avicennia est beaucoup plus résistant à la salinité que le

Rhisophora.

Le Conocarpus erectus se localise sur la frange terrestre où les sols sont sableux

ou vaseux, le plus souvent sec.

CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS

La mangrove du Sénégal reste l’un des écosystèmes estuariens les plus remarquables en Afrique

l’Ouest. C’est aussi une importante source de biodiversités, faisant ainsi la richesse des fleuves,

bras et autres cours d’eaux. En cela elle revêt un grand intérêt pour les populations qui en

bénéficient non pas seulement par la pêche, mais aussi par l’utilisation des bois et feuilles dans la

construction et la médecine traditionnelle. Malheureusement la mangrove qui a disparu depuis

Page 31: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

longtemps dans la C.R de Ndiaffate y est méconnue des jeunes d’aujourd’hui malgré les

multiples services qu’elle offrait. Ainsi il devient un impératif de régénérer cet écosystème

typique des zones estuariennes pour réussir la restauration de la biodiversité qu’il renferme. Mais

cela nécessite une parfaite implication des populations concernées et une intégration du volet

mangrove dans les politiques environnementales de la collectivité locale.

La régénération de la mangrove n’est pas une tâche simple, elle nécessite un certain nombre de

précautions et d’engagement de la part des populations concernées et des autorités locales tout

comme les institutions gouvernementales et ou non gouvernementales. Ainsi pour entreprendre

un quelconque travail sur la mangrove, il faut tout d’abord impliquer la population en les

imprégnant bien de la situation et demander leur contribution dans les études et les actes concrets

à effectuer en ce sens. En effet une population qui ne connaît pas l’intérêt que pourrait générer cet

écosystème, ne se donne pas de raison pour s’ingérer dans sa restauration. La collectivité locale

aussi, par ces autorités doit, au-delà du travail en synergie avec les institutions

environnementales, prévoir dans leurs politiques des études et des travaux de restauration. La

maîtrise des techniques de reboisement est capitale pour la restauration de cet écosystème

ultrasensible.

La salinité est aussi un facteur phare à considérer, donc il est nécessaire de choisir un site où l’eau

est peut être saumâtre. Souvent s’il ne reste plus du tout d’Avicennia, c’est un signe qu’il y’a trop

de sel. Plus on remonte vers Kaolack et plus l’eau est salée car elle s’évapore et seul le sel reste.

Alors mieux vaut reboiser les endroits où il reste encore quelques pieds de mangroves à l’instar

de la tanne de Keur Waly Ndiaye, abritant jusqu’à présent des individus de Conocarpus erectus.

Pour reboiser, la période en est également un facteur déterminant en ce qu’il est obligatoire de

tenir en considération l’effet des pluies sur la salinité. En général c’est fin août – début

septembre, lorsque les travaux champêtres sont moindres, que les reboisements sont effectués à

marée basse. Mais il serait préférable de débuter en juillet.

Il faut également penser à créer des pépinières d’Avicennia et de conocarpus car ces espèces ne

disposent pas de propagules comme le rhisophora.

Page 32: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

32

BIBLIOGRAPHIE

BALDE P., 2010 : Etude de l’état de référence des plantations de rhisophora sp du projet

pilote dans le bassin du Saloum. Université de Thiès, Master de foresterie

environnementale.

BOCOUM M., 2004 : Méthodes d’analyse des sols, 55pages.

Communauté rurale de Ndiaffate, 2007 : Plan local de développement (PLD) 2007-2012.

DEME O. et al. 2013 : Dégradation des sols et ses conséquences dans la communauté

rurale de Ndiaffate, dossier de UE Géo3OO EC3 : Les environnements des milieux arides

et humides, 8p.

DIOP E.S., 1978 : L'estuaire du Saloum et ses bordures (Sénégal). Etude

géomorphologique. Thèse IIIème cycle. Univ. Louis Pasteur, Strasbourg., 247p, 54fig. 4pl.

h.t. (1/50000).

DOYEN A., 1985 : La mangrove à usages multiples de l’estuaire du Saloum (Sénégal),

Dakar, 145pEco-Rurale pour la Formation et le Développement Local, 1999,

Reboisement de la Mangrove.

INSTITUT NATIONAL DE PEDOLOGIE, 2012 : Caractérisation et analyse de la

salinité des sols et des eaux dans les régions de Fatick et Kaolack, Rapport final, 71p.

MANGA P., 2012 : Impacts de la saliculture dans les régions de Kaolack et Fatick : cas

de Ndiaffate au Sénégal, Mémoire de Fin de Cycle pour l’obtention du Diplôme

d’Ingénieur Agronome de l’IPR/IFRA de Katibougou, 41p.

MINISTERE DE L’ENVIRONNEMENT ET DE LA PROTECTION DE LA NATURE,

2005 : Déforestation de la mangrove et durabilité de l’exploitation des ressources

malacologiques dans l’écosystème estuarien du delta et du fleuve Saloum, pp 23.

MARIUS C., 1985 : Mangrove du Sénégal et de la Gambie, thèse doctorale, Paris,

ORSTOM, 357p.

MICHEL.P., 1969 : Les bassins des fleuves Sénégal et Gambie. Mémoire ORSTOM,

N°63. 1169 p., 3 tomes. 170fig. 9pl.h.t.

MICHEL I., 1973 : Les basins des fleuves Sénégal et Gambie Etude géomorphologique

(tome 1). Coll. Mémoires ORSTOM, no 63, 365 pages

Page 33: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

NAMBONA R.M.D., 2007 : Contribution des reboisements de mangroves du delta du

Saloum à la séquestration du carbone atmosphérique : cas des villages de Djirnda et de

Sanghako, mémoire DEA sciences de l’environnement UCAD, 75p.

NDOUR N. et al., 2011 : Rôle des mangroves, mode et perspectives de gestion dans le

Delta du Saloum (Sénégal), volume11, numéro 3.

SANOKHO M., 2007 : La désertification des terres agricoles et baisse des rendements en

milieu sahélien: exemple du phénomène de salinisation dans les communautés rurales de

Latmingué et de Ndiaffate (bassin arachidier du Sénégal), DEA, Université Gaston Berger

de Saint-Louis.

SARR M., 2009 : Etude de la contribution de l'écosystème mangrove à l'amélioration des

revenus des ménages de Palmarin, mémoire pour l’obtention du diplôme d’Ingénieur

agronome, Université polytechnique de Thiès, Sénégal.

SY B et al., 2000 : Etude de la dynamique actuelle de la mangrove d’Oukout en Basse

Casamance.

TOSTAIN S., 2010 : Espèces de palétuviers dans les mangroves de Toliara, FORMAD

Environnement Toliara, 105p

UICN, 2006 : Les Mangroves du Sénégal : Situation actuelle des ressources, leur

exploitation et leur conservation RAPPORT FINAL p57

UNESCO, 1993 : L’estuaire et la mangrove du Sine Saloum, Résultats d’un atelier

régional Unesco-COMAR tenu à Dakar (Sénégal) du 28 février au 5 mars 1983.

VALENTIN C., 1990 : Les états de surface des bassins versants Thyssé -Kaymor

(Sénégal). ORSTOM, Dakar, 10 pages.

WEBOGRAPHIE

www.bienvenuecasamance.com

www.d1pierre10coups.be

www.deltadusaloum.com

www.duduf2.free.fr

www.ideecasamance.org

www.ird.fr

Page 34: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

34

www.ndiaffate.blogspot.com

www.onf.fr

www.peda.martinique.fr

www.toubacouta.org

Page 35: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

ANNEXE

ANNEXE 1 : Normes d’interprétation du pH et de la conductivité électrique

Tableau 2 norme d'interprétation du pH

pH Caractéristiques

≤ 4,5 Extrêmement acide

4,6 - 5,2 Très acide

5,3 - 5,5 Acide

5,6 - 6 Modérément acide

6,1 - 6,6 Légèrement acide

6,7 - 7,2 Neutre

7,3 -7,9 Légèrement alcalin

8 - 8,50 Alcalin

Source : BOCOUM M., 2004: Méthodes d’analyse des sols.

Tableau 3 norme d'interprétation de la conductivité

CE (µs/cm) Caractéristiques

≤ 250 Non salin

250 - 500 Légèrement salin

500 - 1000 Salin

1000 - 2000 Très salin

≥ 2000 Extrêmement salin

Source : J.H. Durand, 1983 : Les sols irrigables, étude pédologique.

Page 36: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

36

QUELLES SONT LES CONSEQUENCES DE LA DISP

SURSALURE DE L'ESTUAIRE 1,9%

AVANCEE DES TANNES 23,1%

SALINISATION DES TERRES 25,0%

RETRECISSEMENT DES AIRES CULTIVABLES 4,8%

RARETE DU POISSON 24,0%

RARETE DU BOIS D'OEUVRE 1,9%

FREQUENCE DES VENT DESTRUCTEUR 2,9%

AUGMENTATION DES TEMPERATURES 1,9%

COLMATAGE DE L'ESTUAIRE 1,0%

SALINISATION DE LA NAPPE PHREATIQUE 2,9%

DISPARITION DE CERTAINES ESPECES DE CRUSTACES 2,9%

INFERTILITE DES SOLS 3,8%

RARETE DE LA PLUIE 1,9%

PAS DE REPONSES 1,0%

DISPARITION DE LA RIZICULTURE 1,0%

QUELLE(S) ACTIVITES) PRATIQUEZ-VOUS?

61,9%15,9%

11,1%

3,2%

7,9%

AGRICULTURE

PECHE

ELEVAGE

COMMERCE

AUTRE

Figure 4 activités pratiquées dans la C.R

Figure 5 différentes espèces de mangrove peuplant jadis la mangrove a Ndiaffate

ANNEXE 2 : Données d’enquête sur la mangrove auprès d’un échantillon de la population de Ndiaffate

Figure 1 : les causes de la disparition de la mangrove dans la C.R de Ndiaffate

Figure 2 : les conséquences de la disparition de la mangrove dans la C.R de Ndiaffate

Figure 3 : activités pratiquées dans la C.R

QU'EST-CE QUI SERAIT A L'ORIGINE DE LA D

FORTE SALINITE DE L'ESTUAIRE 49,3%

FORTE SALINISATION DU SOL 16,4%

LA SECHERESSE 16,4%

COUPE ABUSIVE 2,7%

REJET DES EAUX SURSALEES PAR LES SSS DANS L'ESTUAIRE 13,7%

PAS DE REPONSE 0,0%

DEFORESTATION 1,4%

Page 37: ETUDE SUR LA FAISABILITE DE LA REGENERATION DE LA MANGROVE DANS LA COMMUNAUTE RURALE DE NDIAFFATE:POTENTIALITES ET CONTRAINTES

POURQUOI?

ABONDANCE PLUVIOMETRIQUE 44,0%

ABSENCE DE SECHERESSE 12,0%

S'IL UNE BONNE GESTION DES PROBLEMES 16,0%

SI ON CHOISIT DES ESPECES ADEQUATES 10,0%

SI LES SITES SONT BIEN CHOISIS 8,0%

SI LA SALINITE DE L'ESTUAIRE EST REDUITE 10,0%

Figure 4 : différentes espèces de mangroves rencontrées jadis dans la C.R

Figure 5 : potentialités pour la régénération de la mangrove dans la C.R

ANNEXE 3 : Evolution de la pluviométrie dans la communauté rurale de Ndiaffate

Figure 6 : variation de la pluviométrie à la station de Ndiaffate de 2000 à 2012

0

100

200

300

400

500

600

700

800

900

1000

hau

teu

r to

tale

(m

m)

Années

LES QUELLES?

33,3%

66,7%

RHISOPHORA

AVICENNIA

LAGUNCULARIA

CONOCARPUS

AUTRES